Ultimate Mortal Kombat 3

Développeur : Midway Manufacturing Company
Éditeur : Midway Manufacturing Company
Testé sur : ArcadeMega DriveSaturnSuper Nintendo
Disponible sur : DS, Game Boy Advance, iPhone, J2ME, Xbox 360
Présent au sein de la compilation : Mortal Kombat : Arcade Kollection (PlayStation 3, Windows, Xbox 360)

La série Mortal Kombat (jusqu’à 2000) :

  1. Mortal Kombat (1992)
  2. Mortal Kombat II (1993)
  3. Mortal Kombat 3 (1995)
  4. Ultimate Mortal Kombat 3 (1995)
  5. Mortal Kombat Trilogy (1996)
  6. Mortal Kombat Mythologies : Sub-Zero (1997)
  7. Mortal Kombat 4 (1997)
  8. Mortal Kombat Gold (1999)
  9. Mortal Kombat : Special Forces (2000)

Version Arcade

Date de sortie : 6 novembre 1995
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et cinq boutons
Version testée : Version internationale, révision 1.2
Hardware : Processeurs : Texas Instruments TMS34010 50MHz ; Analog Devices ADSP-2105 10MHz ; Microchip PIC16C57 4MHz
Son : Haut-parleur ; DMA-driven DAC ; 1 canal
Vidéo : 400 x 254 (H) 54,70684Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien avant l’ère des réseaux sociaux, des commentaires assassins sur les pages de Steam et des Youtubeurs avec deux millions d’abonnés, un éditeur avisé avait déjà tout intérêt à prêter une oreille attentive aux retours des joueurs pour éviter une tragique déconvenue (ce que l’on qualifierait en ce moment d’ « effet Concord ») – et tout autant, aussi paradoxal que cela puisse paraître, lorsque les chiffres de vente étaient bons. Ainsi, Mortal Kombat 3 avait beau avoir rencontré exactement le succès auquel tout le monde s’attendait, les premiers retours des joueurs – et en particulier des fans les plus impliqués de la saga – étaient loin d’être aussi unanimement positifs que ce à quoi l’on pouvait s’attendre.

De fait, le troisième opus avait opéré une manœuvre dangereuse : une prise de risques, et celle-ci semblait chaque jour un peu plus mal reçue, de quoi inviter à corriger le tir avant de tuer bêtement ce qui était devenu la principale poule aux œufs d’or de la compagnie avec NBA Jam. Alors que faire, enchaîner immédiatement avec un Mortal Kombat 4 ? Cela pourrait engager un nouveau moteur de jeu, du nouveau matériel, une nouvelle refonte des mécanismes… Or, dans le même temps, Capcom avait démontré qu’on pouvait amasser beaucoup d’argent simplement en vendant jusqu’à plus soif les déclinaisons d’un même jeu à succès – au hasard avec les quelques cinq variantes de Street Fighter II qui avaient vu le jour en quatre ans, et qui avaient d’ailleurs représenté le principal concurrent des Mortal Kombat dans le domaine. Conclusion logique : plutôt que de prendre un nouveau risque, autant proposer une grosse rustine (payante) histoire de montrer aux joueurs qu’on les aime, qu’on les écoute, et leur proposer de repasser à la caisse pour bien montrer à quel point cette affection est mutuelle. Cela donna Ultimate Mortal Kombat 3, un Mortal Kombat 3 en mieux, et une nouvelle borne à acquérir pour les gérants de salles d’arcade.

Parmi les points à avoir suscité la grogne la plus vive dans Mortal Kombat 3, il en était au moins un qui revenait systématiquement : le roster. L’évacuation de personnages aussi populaires que Johnny Cage ou Raiden n’avait déjà pas bien été vécue, et le fait que s’y ajoute une large partie des (nombreux) personnages de ninja comme Scorpion, Kitana ou Mileena n’avait rien arrangé.

Dès lors, si cette nouvelle version ne réintègre pas tout le monde, elle fait au moins le choix de faire revenir Scorpion, Kitana, Smoke et Reptile, tout en transformant Jade (entraperçue dans Mortal Kombat II) en personnage jouable. Tant qu’à faire, Mileena, le Sub-Zero « classique » (avec son masque, donc) et Ermac signent également leur retour, mais sous forme de personnages secrets à débloquer via un code, avec en prime une version humaine de Smoke. Bref, tout le monde ne sera pas nécessairement comblé, mais le fait d’avoir désormais dix neuf personnages jouables accessibles d’emblée et vingt-deux avec les codes commence à offrir de quoi contenter un paquet de joueurs, d’autant que les réajustements ne se seront bien entendu pas limités à cette réinjection de personnages rejetés du précédent casting.

Parmi les très nombreuses retouches opérées pour peaufiner un peu une expérience de jeu qui souffrait de certains déséquilibres flagrants, on notera pêle-mêle : une nouvelle attaque pour Stryker, qui voit en contrepartie sa fameuse grenade « nerfée » en se voyant ajouter une latence qui interdit de la spammer en boucle, un Kabal sérieusement rééquilibré en se voyant privé de plusieurs combos faciles, tout comme Sub-Zero qui voit les capacités de son attaque de clone de glace revue à la baisse, la possibilité d’engager les combos avec un coup de poing ou un coup de pied sautés ou encore de nouveaux enchaînements pour Liu Kang et Sonya.

Tant qu’à faire, on assiste au grand retour des « Endurance Matches » opposant le joueur à plusieurs adversaires, à l’ajout d’un tournoi un peu gadget à huit et à celui, déjà plus notable, d’un mode 2 contre 2 en « tag » (ce qui signifie que deux joueurs humain ne pourront pas jouer dans la même équipe). Le mode principal est désormais divisé en quatre niveaux de difficulté, et parvenir à terminer l’un d’entre eux ouvrira la sélection à l’un des « trésors perdus de Shao Kahn » qui permettra de dévoiler certains codes ou de débloquer certains bonus. Pour poursuivre avec les retouches, les joueurs n’ayant guère goûté aux nombreux décors situés sur Terre, une partie d’entre eux aura été remplacée par des cadres un peu plus exotiques. Mis bout-à-bout, cela commence à faire pas mal de choses.

Il y a toujours plus de Fatalities

La grande question reste posée : cela améliore-t-il l’expérience de jeu ? Comme on peut s’en douter, oui. Évidemment, certains problèmes subsistent, et les réfractaires à certaines des orientations « tardives » de la saga – la complexification de sa jouabilité, notamment – risquent de ne pas changer d’avis : le bouton de course est toujours là, tout comme celui de blocage, et il est difficile d’espérer aller loin sans maîtriser un minimum le système de combos.

Néanmoins, entre la variété du roster, le rééquilibrage bienvenu, et une accessibilité enfin revisitée – les premiers championnats sont nettement plus abordables que les combats extrêmement exigeants auxquels nous avait habitué la série – offrent enfin une chance aux néophytes de se faire les dents sans aligner les frustrantes humiliations à répétition. Le tout a beau être condamné à sentir un peu le réchauffé, Ultimate Mortal Kombat 3 ressemble davantage au titre que Mortal Kombat 3 aurait dû être, et de fait il est très rare de trouver des joueurs lui préférant son édition d’origine. Mais il valide également et assume l’orientation prise par la saga avec ce troisième épisode, et les joueurs qui estimaient que celle-ci commençait à dangereusement ronronner et à tourner en rond en suivant l’orientation « toujours plus mais pas forcément toujours mieux » déjà reprochée à la série concurrente des Street Fighter ne trouveront ici que matière à appuyer leur verdict.

En résulte, comme souvent, un jeu pensé pour les convertis de la première heure et ayant la bonne idée de ne pas se révéler inaccessible aux nouveaux venus, notamment en se laissant enfin approcher dans les modes de difficulté inférieurs. Tous ceux qui savent ce qu’ils viennent chercher – le gore assumé, l’action hyper-nerveuse, la pléthore de personnages, les secrets et les easter eggs dans tous les coins – n’auront aucune raison de renâcler face à une formule qui fonctionne.

Les joueurs davantage versés dans l’école « Neo Geo » à la King of Fighters et plaçant la technicité et le pixel art au-dessus de tout le reste continueront d’être réfractaires à un système de jeu qui leur apparaîtra sans doute comme un peu grossier et pas assez bien équilibré ; quant à ceux qui auraient quitté la série en cours de route pour une raison ou pour une autre, il y a peu de chances qu’ils trouvent ici une raison d’y revenir. Reste un jeu efficace qu’on peut relancer fréquemment avec beaucoup de plaisir, et c’est bien là l’essentiel.

Vidéo – Combat : Sub-Zero vs. Reptile :

NOTE FINALE : 16/20

Sentant que l'accueil réservé à Mortal Kombat 3 n'aura pas été tout à fait aussi enthousiaste que prévu, Midway aura eu la bonne idée d'écouter les joueurs pour offrir une version un peu plus conforme à leurs attentes. Ultimate Mortal Kombat 3 ne résout peut-être pas tous les problèmes de la version de base, notamment au niveau du gameplay, mais cela redevient ce qui faisait la force de la saga : un jeu de combat nerveux et rapidement accessible, avec du sang partout et un côté bêtement transgressif, et avec un contenu pléthorique et quelques modes de jeu bien vus, dont les affrontements en deux contre deux. Ce ne sera jamais l'équivalent des maîtres hyper-techniques de la discipline sur Neo Geo, mais ce n'est de toute façon pas vraiment la catégorie qu'il vise – dans tous les cas, c'est une friandise qui accomplit parfaitement sa mission, et c'est bien là l'essentiel


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une jouabilité qui n'a pas corrigé tous ses errements
– Toujours pas de Raiden ?

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Ultimate Mortal Kombat 3 sur une borne d’arcade :

Version Mega Drive

Développeur : Avalanche Software LLC
Éditeurs : Williams Entertainment, Inc (Amérique du Nord) – Acclaim Entertainment (Europe) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Date de sortie : 11 octobre 1996 (Amérique du Nord) – 28 novembre 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad (trois ou six boutons)
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 32Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on peut s’en douter, sortir une version « Ultimate » si peu de temps après le jeu de base était un mouvement risqué au moment de porter le jeu sur les systèmes domestiques. C’est sans doute pourquoi on remarquera que parmi les rares consoles à bénéficier d’un portage du titre se trouvaient les deux consoles 16 bits alors en fin de vie et dont les joueurs étaient heureux de pouvoir encore profiter de quelques nouveautés alors que tout le monde s’éclatait déjà sur la génération suivante. Mine de rien, transposer le contenu pléthorique de la borne commençait à représenter une sacrée colle, même en dopant la capacité des cartouches, et certains sacrifices auront donc du être faits : Sheeva est absente des deux versions 16 bits, et plusieurs des décors visibles dans Mortal Kombat 3 ne sont plus accessibles non plus (cette version Mega Drive est d’ailleurs la seule, avec celle sur Saturn, à avoir conservé le décor de la banque). Les Animalities et les Mercies ont également été supprimées. En contrepartie, tous les personnages déblocables sur la borne (Mileena, Ermac et Classic Sub-Zero, pour ne pas les nommer) sont accessibles d’office, avec en prime Noob Saibot et Rain, et Smoke est toujours jouable via un code. Bref, les coupes opérées ne pénalisent qu’assez marginalement la durée de vie de la cartouche, ce qui est un bon point.

En termes de réalisation, Avalanche Software a pris la relève de Sculptured Software – ce qui est presque logique, le studio ayant justement été fondé quelques mois plus tôt par des anciens de Sculptured Software. Le résultat est au moins à la hauteur de ce qu’offrait Mortal Kombat 3 sur la même machine, avec des décors plutôt plus colorés et un rendu globalement un peu moins grisâtre. Évidemment, c’est moins fin que sur la borne, et les dégradés étalent tous leurs pixels, mais le résultat n’est globalement pas désagréable et si cette version est la moins belle de toutes, elle n’en tire pas moins le meilleur de ce que pouvait afficher la console, avec un framerate impeccable en toute circonstance et une action très nerveuse – autant que sur arcade, c’est dire ! Les options de configuration de la difficulté restent décevantes, celle-ci augmentant très vite quel que soit le mode, mais le défi reste un peu plus accessible que dans les anciennes versions. Il en résulte qu’on tient une version à la jouabilité irréprochable et à la réalisation qui tient la route, avec un contenu qui aurait de quoi combler même les possesseurs de Mortal Kombat 3 – du très bon boulot, en résumé.

NOTE FINALE : 15,5/20

On pouvait penser qu’en 1996, un portage d’Ultimate Mortal Kombat 3 sur Mega Drive risquerait de sentir fort la fainéantise et l’opportunisme, mais Avalanche Software ne s’est vraiment pas moqué du monde : le contenu est dantesque, les coupes sont minimales, la réalisation est solide, la jouabilité est parfaite et l’action n’a pratiquement rien à envier à la borne. Si jamais vous cherchez quelle version de la série Mortal Kombat posséder sur la console de SEGA, un conseil : commencez par celle-là.

Version Saturn

Développeur : Eurocom Developements Ltd.
Éditeurs : Williams Entertainment, Inc (Amérique du Nord) – GT Interactive Software (Europe) – Playtronic Industrial Ltda. (Brésil)
Date de sortie : 27 juin 1996 (Amérique du Nord, Europe) – Avril 1997 (Brésil)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on s’en souvient, la Saturn avait dû tirer un trait sur son portage de Mortal Kombat 3 – une histoire d’exclusivité négociée par le président de Sony. Pour sa revanche, elle aura en revanche eu droit à un portage d’Ultimate Kombat 3 qui, lui, ne sera pas paru sur PlayStation – celle-ci étant probablement trop occupée à se préparer à réceptionner Mortal Kombat Trilogy quatre mois plus tard. Vous suivez ? Quoi qu’il en soit, cette version – ironiquement basée sur la version PlayStation de Mortal Kombat 3 – débarque avec l’avantage de ne connaître aucune rivale au sein de la génération 32 bits. l’ambition est à présent d’aller chatouiller la borne d’arcade, ce qui se remarque au fait que le contenu est le même ; comprendre : Mileena, Ermac et Classic Sub-Zero ne sont plus accessibles d’emblée, et Motaro, Shao Kahn et Noob Saibot ne sont plus jouables – mais Sheena, elle, est de retour, comme à peu près tout ce qui avait été coupé dans les versions 16 bits. Le niveau de la banque, présent sur Mega Drive mais pas sur la borne, a également fait le trajet jusqu’à ce portage.

En termes de réalisation, en tous cas, ce n’est peut-être pas encore la retranscription pixel perfect de la borne (la résolution, notamment, est plus basse), mais ça commence à sérieusement s’en approcher, d’autant que l’effet de dithering présent sur la version PlayStation de Mortal Kombat 3 n’a pas fait le trajet jusqu’ici. la différence avec les versions 16 bits saute aux yeux, d’autant qu’on retrouve les défilements parallaxes et toutes les petites friandises de la borne. Le framerate est parfait et l’action aussi nerveuse que sur la borne. En revanche, comme dans l’adaptation 32 bits de Mortal Kombat 3, le souhait de coller à l’expérience originale au maximum signifie également que toutes les options de configuration ont disparu : le seul moyen de régler la difficulté se fait ici via le choix du championnat, comme sur la borne. Heureusement, les premiers niveaux étant ici bien plus abordables que dans l’épisode précédent, on n’a pas trop l’occasion de s’arracher les cheveux au bout de vingt secondes, particulièrement si on a déjà eu l’occasion de s’entraîner un peu sur les versions précédentes. Dommage que ce portage n’en ait pas profité pour intégrer toutes les options présentes dans les versions 16 bits, mais c’est vraiment l’unique reproche à adresser à une version qui n’a clairement pas de complexes à nourrir vis-à-vis de la borne.

NOTE FINALE : 16/20

Ultimate Mortal Kombat 3 offre peut-être sur Saturn des graphismes un peu moins fins que la borne dont il est tiré – et quelques temps de chargement dommageables dus au support CD-ROM – mais pour le reste, il est très difficile de trouver des reproches à lui adresser. Jouable, bien réalisé et nerveux, le titre représente sans discussion possible l’épisode de la série à posséder sur Saturn… avec Mortal Kombat Trilogy.

Version Super Nintendo

Développeur : Avalanche Software LLC
Éditeurs : Williams Entertainment, Inc (Amérique du Nord) – Acclaim Entertainment (Europe) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Date de sortie : 11 octobre 1996 (Amérique du Nord) – 28 novembre 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 32Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Même équipe de développement, même philosophie : on ne sera pas surpris d’apprendre que les version Mega Drive et Super Nintendo d’Ultimate Mortal Kombat 3 ont énormément de choses en commun. Le roster de départ et es coupes opérées sont virtuellement les mêmes, avec juste quelques petites nuances, comme l’absence du niveau de la banque, comme on l’a déjà mentionné, ou d’autres détails plus subtils comme le fait que cette version soit la seule où les personnages de Noob Saibot et de Rain ont d’autre Fatalities que les Brutalities.

Pour le reste, les nuances seront à aller chercher du côté de la réalisation, domaine où la machine a ses qualités (sa palette de couleurs) et ses défauts (sa résolution, son processeur). En résumé : c’est clairement plus coloré que sur Mega Drive, mais c’est également un peu moins fin, et l’action est un tout petit peu plus lente. Les différences restent franchement anecdotiques, même si les fans absolus d’une jouabilité irréprochable au dixième de seconde près préfèreront sans doute l’opus Mega Drive, mais dans tous les cas on tient une nouvelle fois un portage solide et bien réalisé – dommage que la difficulté soit toujours aussi mal réglée.

NOTE FINALE : 15,5/20

Pas de surprise pour cette version Super Nintendo d’Ultimate Mortal Kombat 3, qui joue comme d’habitude avec ses armes et se défend bien en la matière. Très proche de la version Mega Drive dans tous les domaines, elle demeure une alternative tout-à-fait décente à la borne d’arcade, surtout pour ceux qui voudraient profiter d’un contenu boosté et facilement accessible.

Hang On GP ’96

Développeurs : Genki Co., Ltd. – SEGA Consumer Research and Development Department
Éditeurs : SEGA Enterprises Ltd. (Europe, Japon) – SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Titre original : Hang On GP ’95 (Japon)
Titres alternatifs : Hang-On GP (Amérique du Nord), Hang On GP (écran-titre – Amérique du Nord, Europe)
Testé sur : Saturn

La licence Hang-On (jusqu’à 2000) :

  1. Hang-On (1985)
  2. Hang-On II (1985)
  3. Hang-On Jr. (1986)
  4. Super Hang-On (1987)
  5. Hang On GP ’96 (1995)

Version Saturn

Date de sortie : 27 octobre 1995 (Japon) – 30 janvier 1996 (Amérique du Nord) – 16 février 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Arcade Racer, Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou cartouche mémoire

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Lorsqu’on est une entreprise comme SEGA, dont l’essentiel de la renommée s’est fait dans les salles d’arcade bien avant le succès inattendu de la Mega Drive, comment faire face au rouleau compresseur non moins inattendu qu’aura constitué la PlayStation de Sony ? À cette délicate question, la première réponse de la firme japonaise aura été de miser précisément sur les adaptations de ses grosses licences de l’arcade, de Virtua Fighter à Virtua Cop en passant par Daytona USA, Virtual On ou Sega Rally, pour n’en citer que quelques unes – quitte d’ailleurs à laisser de côté des séries domestiques tout aussi populaires comme Streets of Rage, ce qui lui aura longtemps été reproché.

Une stratégie assumée dès le lancement, et dont le succès (particulièrement au Japon) aura un temps fait croire qu’elle était pérenne ; on ne sera donc pas surpris que SEGA ait commencé à remuer le fond des cartons à la recherche de bornes iconiques à ressusciter, quitte à en ressortir jusqu’à des Rad Mobile que personne n’attendait. Le nom d’Hang-On aura dû être prononcé assez rapidement, ce qui pouvait sembler cohérent dans le sens où en dépit d’une certaine sur-représentation des jeux de course sur la console, les motos n’avaient pas encore eu le droit à leur jeu dédié. On aurait pu aller chercher Yu Suzuki, père de la série, mais le fait est que celui-ci était quelque peu occupé à être producteur de la moitié des licences rentables de la compagnie à ce stade (rien que pour l’année 1995 : Virtua Fighter 2, Virtua Fighter Remix, Virtua Cop 2, Fighting Vipers), et qu’on estima donc qu’il valait mieux se débrouiller sans lui. Voici donc comment aura émergé Hang On GP ’96 : orphelin de son créateur, et avec une énorme pression sur les épaules. Ce n’est jamais un bon départ.

Dix ans après l’opus inaugural, et déjà huit ans après Super Hang-On (ce qui nous rappelle, au passage, que la licence était en sommeil depuis un bon moment), le titre s’avance donc sur la trace de ses aînés… en commençant par ne pas en reprendre le concept. Il faut dire que les mécanismes originaux se limitant à doubler des concurrents sur des routes virtuellement infinies commençaient à sentir un peu la poussière et que préférer des circuits plus traditionnels commençait à faire sens à l’ère de la 3D triomphante, certes, mais aussi balbutiante.

En fait, le titre s’adapte à un moule si familier que, bien que les deux jeux aient été réalisés à la même période par deux équipes différentes, il est difficile de ne pas établir dès maintenant un parallèle avec F-1 Challenge sur la même console. On retrouve en effet les mêmes modes de jeu : un mode « Grand Prix » permettant de concourir sur les trois circuits du jeu, puis de débloquer trois variantes plus longues de ces mêmes circuits, ce qui nous fait un total de six circuits dont trois variantes – comme dans F-1 Challenge – et un mode « Time Trial » permettant de peaufiner ses temps en parcourant les mêmes circuits, mais cette fois sans opposition. S’y ajoute malgré tout un mode « Endurance » débloqué une fois la première place acquise dans toutes les courses, et qui demande de finir classé le plus haut possible au terme d’un laps de temps donné, en ajoutant cette fois la gestion du carburant absente des autres modes. Quant à la conduite, en dépit de quelques timides options de configuration se limitant au choix de la boîte de vitesse, à savoir si votre pilote peut être éjecté de sa moto en cas de collision et à l’activation d’un mécanisme baptisé « Powerslide » autorisant une reprise canon à la sortie d’un dérapage, elle est ouvertement orienté arcade, et ça n’est pas négociable.

Une fois la partie lancée, et après avoir choisi sa moto (conseil : la dernière semble nettement plus polyvalente et performante que toutes les autres), la sensation de vivre F-1 Challenge en deux roues ne se dissipe pas : la 3D, si elle est moins grisâtre ici, demeure relativement décevante à cause de textures grossières qui s’affinent très tard (il faut pratiquement être arrivé sous la bâche annonçant un point de passage pour parvenir à décrypter le mot « Checkpoint ») et de modèles de véhicules et de pilotes taillés à la serpe.

Au moins le framerate est-il constant et la distance d’affichage pas trop mauvaise. Comme dans F-1 Challenge, il y a des arrêts aux stands qui sont ici inutiles dans à peu près tous les cas de figure : vos pneus sont censés se dégrader au fil de la course, mais cela est totalement indécelable au niveau des sensations de conduite, et il n’est pas nécessaire d’en changer à cause de la pluie puisque celle-ci n’est pas gérée – quant au carburant, il n’est géré qu’en mode « Endurance », et encore, vous n’aurez même pas droit à une jauge, juste à une alerte insupportable qui viendra se manifester tous les deux tours pour vous enjoindre à aller faire le plein pour la faire taire ! Comme dans F-1 Challenge, chaque course terminée vous renvoie directement au logo SEGA plutôt qu’à l’écran-titre, et comme dans F-1 Challenge, la victoire finale vous vaudra un tour d’honneur impossible à passer tandis que défilent les crédits. Décidément, les grands esprits se rencontrent, à moins que les développeurs de Genki et de Bell Corporation se soient échangés des idées à la machine à café commune…

S’il fallait chercher une vraie différence entre les deux jeux, cependant, elle serait plutôt à trouver du côté de la conduite. Non que la philosophie soit opposée – on a affaire à deux logiciels orientés arcade, comme on l’a vu – mais le fait d’être placé sur une moto introduit quelques nuances, comme la gestion de se pencher ou non dans les virages, qui offrent une expérience assez différente de la formule un. Surtout que l’approche est ici assez… radicale ; traduit en clair : l’essentiel de la conduite va reposer sur un mécanisme simple : ne rentrer en contact avec rien ni personne.

Cela peut sembler évident dit comme cela, mais c’est vraiment ici le cœur de la jouabilité, car dès l’instant où le plus infime frôlement avec un mur enverra votre moto effectuer un triple salto, tandis que la moindre molécule de vos roues en contact avec de l’herbe se traduira instantanément par une réduction de votre vitesse de 90%, apprendre à bien rester au centre d’une route très étroite correspondra à l’essentiel du savoir à maîtriser pour espérer réaliser un bon temps – ou finir en tête. Tâche d’autant plus compliquée que vos changement de directions souffrent d’une inertie prononcée qui, à la vitesse où se déroulent les courses, risque de vous donner le sentiment de (tenter de) contrôler une boule de flipper rebondissant de mur en mur (avec un magnifique gadin à chaque fois), d’où un premier contact avec le CD-ROM qui pourrait fort ne pas être idyllique. Fort heureusement, les choses s’améliorent avec un tout petit peu de pratique, et c’est tant mieux car ce maniement un peu spécial et vaguement exigeant à ses débuts est à peu près tout ce que le jeu ait à offrir qu’on n’ait pas déjà vu un million de fois ailleurs.

Ce n’est pas qu’on ne s’amuse pas – j’ai plutôt passé un meilleur moment que sur F-1 Challenge, puisque celui-ci a beaucoup été évoqué, grâce à des caméras mieux placées (même si la vue subjective est très difficilement jouable) et une 3D plus colorée – mais que dès l’instant où le pilotage est dompté, c’est à dire grand maximum au bout d’une demi-heure, on fait très vite le tour du contenu du jeu.

Trois variations des circuits de base, ce n’est pas tout à fait la même chose que six circuits différents, et le manque de contenu déblocable hors de ces fameux circuits et surtout celui d’un mode solo un peu plus consistant que d’aligner cinq tours avant de retourner au logo – des reproches qu’on pouvait déjà faire à Daytona USA, et à tous les premiers jeux de course en 3D qui n’avaient que très peu d’options de configuration à offrir au-delà du choix du mode de difficulté, quand il y en avait un – finit d’annihiler l’intérêt sur la durée. Quand on met vingt minutes à maîtriser la conduite du jeu, puis dix à en faire le tour, le bilan est quand même assez décevant, surtout quand on peut trouver de meilleurs jeux de moto sur la même machine (Coucou, Manx TT Superbike) ou au sein de la même génération de consoles (hello, Moto Racer). Bref, de quoi faire illusion une heure ou deux, et éventuellement relancer une partie de dix minutes tous les cinq ans ; correct à défaut d’être ébouriffant, mais cela valait-il vraiment la peine de ressusciter la licence pour si peu ?

Vidéo – Course : Albatross Cliff Reef :

NOTE FINALE : 13,5/20

Hang On GP '96, c'est un peu F1-Challenge, mais sur une moto : un contenu décent mais sans plus, une 3D pas folichonne et des sensations de course assez décevantes au service d'un jeu dont on fait très vite le tour, et souvent difficile pour les mauvaises raisons. Ne parvenant jamais à choisir entre son approche arcade qui souffre d'une jouabilité imprécise et un aspect inutilement punitif qui interdit littéralement de rentrer en contact avec n'importe quoi d'autre que la route, le titre se laisse dompter en une heure et finit même par se montrer relativement amusant, mais la grande question reste de savoir qui aura réellement envie de lui consacrer autant de temps dès l'instant où on a accès à un Manx TT Superbike ou à un Moto Racer, bien plus efficaces dans le même domaine. Les mordus de jeux de course pourront lui laisser sa chance, mais les autres jugeront probablement que l'investissement n'en vaut pas la chandelle.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une jouabilité « arcade » pas très naturelle, avec une inertie particulièrement pénible
– Seulement deux modes de jeu plus un mode bonus qui n'apporte pas grand chose
– Pas de multijoueur
– Des arrêts aux stands qui ne servent à rien, sauf à la rigueur en mode « Endurance »

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Hang On GP ’96 sur un écran cathodique :

Shinobi X

Développeur : Tose Co., Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd. (Europe, Japon) – Vic Tokai, Inc. (Amérique du Nord)
Titre original : Shin Shinobi Den (Japon)
Titre alternatif : Shinobi Legions (Amérique du Nord)
Testé sur : Saturn

La saga Shinobi (jusqu’à 2000) :

  1. Shinobi (Arcade) (1987)
  2. The Revenge of Shinobi (1989)
  3. Shadow Dancer (1989)
  4. Shadow Dancer : The Secret of Shinobi (1990)
  5. The Cyber Shinobi (1990)
  6. Shinobi (Game Gear) (1991)
  7. Shinobi II : The Silent Fury (1992)
  8. Shinobi III : Return of the Ninja Master (1993)
  9. Shinobi X (1995)

Version Saturn

Date de sortie : 30 juin 1995 (Japon) – 21 septembre 1995 (Amérique du Nord) – 13 octobre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On aurait pu penser, à l’heure du lancement de la Saturn, que le premier mouvement de SEGA – le plus évident, le plus rationnel, et pour ainsi dire le plus viable – aurait été de s’appuyer sur le succès de ses licences maisons.

De la même manière qu’on a du mal à imaginer la sortie d’une console de Nintendo sans un Mario au line-up et un Zelda ou un Metroid dans les cartons, la nouvelle pépite 32 bits de SEGA aurait eu du mal à être mieux mise en valeur que par un épisode de Sonic the Hedgehog – on sait comment cela se sera terminé au final, tant la cicatrice est restée vivace, comme le seront restées les absences de séries aussi iconiques que Streets of Rage ou Phantasy Star, tant la firme japonaise semblait davantage obnubilée par les portages de ses succès de l’arcade les plus récents. Néanmoins, on pourra au moins citer une licence majeure qui aura pu honorer la Saturn de sa présence : Shinobi, qui aura livré ce qui sera resté son ultime épisode sur une console SEGA (et son dernier opus au XXème siècle alors que la série venait d’enchaîner sept titres en quatre ans) : Shinobi X. Une sortie qui aura d’ailleurs fait assez peu de bruit à l’époque tant les joueurs occidentaux, ces ingrats, étaient déjà obnubilés par la déferlante de la 3D à laquelle les nouvelles aventures du ninja avaient choisi (courageusement ou curieusement ?) de ne pas appartenir, préférant en rester à la bonne vieille 2D de la génération précédente.

Parler des « nouvelles aventures du ninja » est d’ailleurs erroné, puisque Joe Musashi a cette fois tiré sa révérence pour laisser sa place à un nouveau venu nommé Sho. Au commencement était donc un maître du ninjitsu avec trois élèves : Sho, son frère Kazuma, et la propre fille du maître, Aya. Comme dans toutes les tragédies shakespeariennes, Kazuma aura fini par faire bande à part, dévoré par l’ambition et furieux que le maître ait refusé de lui transmettre la technique ultime de leur ordre.

Bien des années plus tard, longtemps après la mort de son maître, c’est à la tête d’une véritable armée qu’il fait son retour, bien décidé à arracher le dernier secret qui manque à sa puissance… ce qui est déjà passablement idiot, puisque comme on l’a vu son maître et mort et que rien n’indique qu’il ait transmis le secret de la technique à l’un des deux autres élèves – auquel cas, l’élève en question serait de toute façon assez puissant pour rivaliser avec Kazuma – mais c’est pas grave, l’important est qu’Aya se fait enlever et que c’est bien évidemment Sho, parti à sa rescousse, que le joueur va incarner au fil de neuf niveaux revisitant largement la plupart des passages marquants de la saga – l’environnement du premier, à titre d’exemple, évoquant furieusement celui du niveau inaugural de The Revenge of Shinobi.

Notre nouveau (et éphémère) ninja peut compter sur l’essentiel de la panoplie de son prédécesseur : double saut, réserve de kunai, rebonds sur les murs, accrochage aux branches, sans oublier l’inévitable katana. Il n’a plus cependant qu’un unique pouvoir de ninjitsu, lequel sera à dénicher au sein des niveaux et non plus fourni d’office avec chacune de ses vies, et fera toujours office de smart bomb.

On trouvera également plusieurs power-up dont des sphères permettant de gagner une vie toutes les dix unités collectées, un sabre doublant sa puissance et une invincibilité temporaire. Tous les piliers de la série sont donc a priori présents, mais Sho se révèle également capable de courir et d’enchaînements au katana auxquels Joe ne nous avait pas habitué, ce qui lui permet, entre autres gourmandises, de renvoyer les projectiles à leur lanceur à condition de respecter le bon timing, ce qui modifie mine de rien énormément l’approche de la jouabilité tant les kunai sont devenus nettement moins indispensables ; savoir parer et renvoyer les projectiles sera désormais la clef de beaucoup de combats où les ennemis vous laissent souvent assez peu de temps pour réagir.

Au moment d’aborder la question de l’exécution du jeu, autant en profiter pour mentionner l’éléphant dans la pièce : son esthétique. Quitte à embrasser la modernité, l’équipe de développement aura en effet fait un choix qui risque de ne pas plaire à tout le monde : celui de graphismes réalistes s’appuyant sur des acteurs digitalisés, à la Mortal Kombat. Dire que le résultat a plus mal vieilli que le pixel art auquel il succédait serait un euphémisme tant le résultat tient d’un collage cheap évoquant les vieux romans-photos et qui donne à son univers un aspect carton-pâte qui sonne faux de A à Z.

Si cela n’est pas trop gênant en jeu, où on sent malgré tout que le résultat aurait été bien meilleur avec des illustrateurs en lieu et place de photographes, difficile de ne pas être secoué d’un rire nerveux en assistant au déroulé d’un scénario objectivement pas fameux via des vidéos qui évoquent les pire nanars de ninjas philippins imputables à Godfrey Ho. On n’avait pas trop envie d’y penser, mais autant se rendre à l’évidence quand on voit un type en pyjama qui joue comme un pied se débattre dans des entrepôts et des couloirs désaffectés parce que ce sont les seuls décors que la production a les moyens de lui offrir : les ninjas sont ridicules, surtout quand ils n’ont pas de budget.

Sachant que Kazuma est de toute façon limité à être un gros méchant qui veut du pouvoir par pure mégalomanie et que l’unique rôle d’Aya et de se faire kidnapper à répétition (en trouvant malgré tout le temps de livrer à Sho le secret de la technique ultime qui ne l’empêche visiblement pas de se faire enlever toutes les cinq minutes), on ne va pas dire que ces séquences fauchées tournées maladroitement au premier degré aident à se sentir franchement impliqué dans les tracas de notre ninja. Un aspect « à côté de la plaque » qu’on retrouve hélas dans des thèmes musicaux pas très inspirés, heureusement remplacés dans la version européenne par des compositions de Richard Jacques inspirées de celles de Yuzo Koshiro – pour une fois, les perfectionnistes auront une raison de préférer cette version européenne à toutes les autres.

Si le cœur du jeu en lui-même fonctionne bien et se révèle globalement agréable à jouer, avec des combats efficaces et une jouabilité précise, on ne peut s’empêcher de sentir un certain manque de finition qui, sans faire basculer le titre dans le champ de la médiocrité, tend à faire pencher en sa défaveur la comparaison avec l’excellent Shinobi III à pratiquement tous les niveaux.

Loin de l’extraordinaire variété de son prédécesseur, qui enfilait les scènes d’anthologie comme des perles, Shinobi X se complait dans un level design sans inspiration avec beaucoup de grand couloirs rectilignes, et si apprendre à composer avec les différents obstacles et adversaires aide à garder les choses suffisamment intéressantes pour avoir envie d’arriver au bout de l’aventure, on regrette de ne retrouver absolument aucune des idées qui avaient fait mouche auparavant – les séquences à cheval ou en jet-ski, les énigmes à base de bombe, tout cela est passé à la trappe en même temps que le formidable sens du rythme qui avait tant impressionné deux ans plus tôt. Il en ressort souvent une impression mitigée, celle d’un jeu qui essaie d’être Shinobi mais qui a peur que la moindre tentative d’imprimer sa patte sur la licence soit vécue comme une trahison, et qui à force de chercher à se grimer en ninja finit par côtoyer le grotesque – comme si ce nom trop lourd à porter lui coupait définitivement les ailes.

En résulte un jeu imparfait mais sympathique avec ses bons moments entre deux hilarantes séquences de nanar, mais qui aurait peut-être mieux révélé son potentiel s’il avait eu à porter un nom moins chargé d’histoire et d’attentes des fans. Il restera comme ce qu’il est : une tournée d’adieux trop sage se contentant de reprises mécaniques de ses plus grands succès sans l’inclusion d’un seul titre original, aucun rappel, et merci pour tous les fans mais il est l’heure de profiter de la retraite. Un bon moment qui laisse pourtant comme un pincement amer – c’est sans doute ça qu’on appelle la nostalgie.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20

Pour sa dernière aventure au XXe siècle, la saga emblématique de SEGA signe avec Shinobi X un épisode qui place un peu trop d'efforts dans une réalisation en toc riche en vidéos nanardesques et en digitalisations à l'esthétique de roman-photo cheap et pas toujours assez du côté du game design. Même si l'efficacité de la jouabilité assure l'essentiel en offrant quelques possibilités intéressantes et en revisitant le système de jeu qui a fait la force de la série, on ne peut s'empêcher de sentir un manque d'inspiration générale, à l'image du scénario involontairement hilarant, où chaque composante du jeu fait un peu moins bien que celles de son fabuleux prédécesseur. Au final, on obtient un jeu d'action/plateforme efficace mais jamais surprenant qui porte sur ses épaules un nom un petit peu trop lourd pour lui.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un level design paresseux se limitant trop souvent à de longs couloirs
– Un système de jeu rééquilibré pas toujours pour le meilleur
– Aucune originalité, peu de séquences marquantes
– Une réalisation qui a moins bien vieilli que celle de la génération précédente

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Shinobi X sur un écran cathodique :

S.C.I. : Special Criminal Investigation

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Titre alternatif : Chase HQ II : Special Criminal Investigation (édition publiée par Ocean sur ordinateurs)
Testé sur : ArcadeAmigaAtari STCommodore 64ZX SpectrumPC EngineMaster SystemSaturn
Disponible sur : Wii
Présents dans les compilations : Taito Chase H.Q. Plus S.C.I. : Special Criminal Investigation (Saturn), Taito Memories II : Joukan (PlayStation 2)

La série Chase H.Q. (jusqu’à 2000) :

  1. Chase H.Q. (1988)
  2. Crime City (1989)
  3. S.C.I. : Special Criminal Investigation (1989)
  4. Chase H.Q. II (1992)
  5. Super Chase : Criminal Termination (1993)
  6. Super Chase H.Q. (1994)
  7. Ray Tracers (1997)
  8. Chase H.Q. : Secret Police (1999)

Version Arcade

Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un volant, une pédale, un levier de vitesse et un bouton
Version testée : Version internationale, set 1
Hardware : Processeurs : Motorola MC68000 16MHz (x2) ; Zilog Z80 4MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; YM2610 OPNB 8MHz ; filtre à volume (x4) ; 2 canaux
Vidéo : 320 x 240 (H) 60,055992Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quand on voit le monde avec les yeux d’une division marketing, il y a des décisions si évidentes qu’elles ne méritent même pas un débat. Par exemple, quand on vient de commercialiser un succès critique et commercial – au hasard, une borne d’arcade comme Chase H.Q. – la marche à suivre était déjà imprimée dans tous les manuels dès la deuxième moitié des années 80 : on négocie un contrat pour les portages sur un maximum de machines (« Salut Ocean ! Ca va, U.S. Gold ? Et toi, LJN, comment va la petite famille ? ») et on met la suite en chantier avant que le soufflé ne retombe, que la mode ne passe et que le navire n’ait plus de vent dans les voiles – comme vous le voyez, les images ne manquent pas. Combien de séries seront mortes de n’avoir pas su offrir assez vite ce nouvel opus que les joueurs réclamaient, entrez ici Dungeon Master, Duke Nukem 3D et tant d’autres ? Bref, inutile de se faire des nœuds au cerveau : il faut battre le fer quand il est chaud, c’est simple et difficilement réfutable.

Seulement voilà, avec les yeux d’un développeur, les choses peuvent être un petit peu plus compliquées. Parce qu’une suite, sur le papier, c’est très bien, mais la concevoir est une autre chose, surtout quand on vient déjà de mettre toutes ses idées et à peu près tout ce qu’offre la technique dans le premier opus. Tiens, reprenons l’exemple de Chase H.Q. – quel heureux hasard de l’avoir justement mentionné plus haut : par essence, que peut-on ajouter à un jeu de course-poursuite dès l’instant où il mettait déjà en scène exactement ce qu’on venait y chercher, à savoir, eh bien, des courses-poursuites, justement ? À cela, la réponse n’était pas si évidente à trouver alors, comme un aveu, Taito aura commencé par ne pas intituler sa suite Chase H.Q. II, mais plutôt S.C.I. : Special Criminal Investigation. Un mouvement curieux sur le plan commercial, mais qui permettait de dire qu’il y avait au moins un aspect du jeu qui n’était pas exactement comme Chase H.Q.

Quitte à demander au joueur de se lancer à la poursuite de la délinquance routière en transgressant l’intégrale du code de la route (« oui mais nous, on a le droit ! »), S.C.I. aura décidé d’investir dans un vague scénario avec ses rebondissements bouleversants (bon, peut-être pas à ce point-là, mais au moins, il a le mérite d’exister), avec des jeunes filles enlevées, dont celle du maire pour faire bonne mesure, et cette votre nouvelle unité de pointe qui se trouve faire exactement la même chose que l’ancienne qui s’y colle, et de la même manière encore.

Mais à ceux qui voudraient un peu plus de nouveautés que… ben, que rien du tout, une situation désespérée appelle des mesures extrêmes, et c’est pourquoi vous serez cette fois doté d’une arme à feu avec l’autorisation de tirer directement sur les (véhicules des) malfrats. Et histoire de faire monter encore un peu la sauce, un hélicoptère viendra carrément vous livrer un bazooka juste avant d’atteindre votre cible, je vous promets que tout cela est parfaitement documenté et très réaliste – même le fait qu’une voiture ennemie puisse encore rouler après avoir encaissé cinq roquettes consécutives, après tout on a fait d’énormes progrès en matière de blindage.

Pour le reste, on est exactement face aux mêmes mécanismes que dans le premier opus : chaque poursuite se fait en deux phases de soixante secondes (la durée peut être modifiées via les DIP switches), une phase d’approche et une phase de « contact », et le but sera de remplir la jauge de dégâts du véhicule ciblé dans le laps de temps imparti – sauf que cette fois, donc, vous ne serez plus limité à lui rentrer dedans puisque la municipalité a la générosité de fournir l’arme et les munitions illimitées qui vont avec.

À ce détail près, on observera quelques petits ajouts moins marquants qu’ils ne le voudraient : des segments avec de la circulation à double-sens, des effets de météo, des véhicules comme des motos ou même un hélicoptère qui viennent directement vous prendre pour cible – de quoi renouveler un peu la formule… ou du moins, on sent que c’était l’objectif, mais puisque celui de cet article est de statuer sur la qualité du jeu, autant dire les choses : c’est raté. Pas dramatiquement raté, pas au point de transformer un jeu efficace en un jeu qui ne l’est plus, mais suffisamment pour qu’on constate rapidement l’évidence : non seulement le jeu aurait dû s’appeler Chase H.Q. II, mais l’honnêteté aurait même valu qu’il s’intitule Chase H.Q. 1.1.

Non seulement on ne trouve dans la borne aucun des ajouts plus ou moins évidents qui lui auraient permis d’épaissir un peu ses possibilités – plusieurs véhicules à conduire, ou des composants à améliorer, ou une sélection des armes, ou un choix du parcours, ou… – mais en plus, les rares apports sont assez mal intégrés, le plus flagrant étant cette fameuse arme à feu qui fait si peu de dégâts que la bonne vieille méthode consistant à utiliser votre voiture de police comme un bélier demeure la meilleure, et de loin. Sachant que l’on n’a de toute façon aucune gestion des munitions, ni même une quelconque raison de faire attention où l’on tire, le plus simple est de garder le bouton appuyé d’un bout à l’autre et de se concentrer sur autre chose.

Pas exactement la pointe du gameplay… Et puisque les courses comme les voitures ennemies n’ont elles-mêmes rien de fondamentalement neuf à offrir, on a l’impression de parcourir un pack de cartes additionnelles pour la borne originale – et même pas un pack spécialement impressionnant, puisqu’il n’y a une nouvelle fois que cinq niveaux plus une course bonus de trente secondes, soit environ dix minutes de contenu. Rien de honteux pour une borne, certes, mais pas grand chose non plus pour donner une bonne raison au joueur de revenir se vider les poches plus d’une partie ou deux, le temps de reprendre ses marques et de découvrir que rien (ou si peu) n’a changé. Bref, une expérience qui reste sympathique à petite dose, mais un cruel déficit d’idées et de prise de risques de la part de Taito, pour un jeu qui a finalement d’excellentes raisons de ne pas avoir marqué les esprits. Hé, c’est d’ailleurs cela, l’autre moyen de tuer une série.

Vidéo – La première poursuite du jeu :

NOTE FINALE : 14/20 S.C.I : Special Criminal Investigation ne s'intitule peut-être pas ouvertement Chase H.Q. 2, mais on a surtout l'impression que c'est parce que la filiation est simplement trop évidente. En dépit de quelques nouveautés bienvenues sur le papier, comme l'ajout d'une arme à feu ou la possibilité de croiser des véhicules à contresens, le fait est que le déroulement des courses-poursuites n'a fondamentalement pas varié d'un iota depuis le premier opus et qu'on se retrouve à faire exactement la même chose de la même manière sans jamais avoir l'impression d'avoir à jouer différemment. L'action est toujours aussi rapide et aussi nerveuse, mais entre des captures qui tirent en longueur et des derniers segments vraiment infernaux, on peine un peu à trouver quoi que ce soit qui n'apparaisse pas comme bêtement redondant par rapport à l'épisode précédent. Amusant ? Indubitablement. Plus de dix minutes ? Ça, c'est déjà moins sûr...

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un principe qui ne se renouvèle pas depuis Chase H.Q. – Toujours aussi peu de poursuites différentes – Une arme à feu qui donne souvent le sentiment de ne pas servir à grand chose

Version Amiga
Chase H.Q. II : Special Criminal Investigation

Développeur : ICE Software
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Lecteur de disquette additionnel supporté

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au moment de porter SCI sur les ordinateurs, on retrouver bien évidemment l’inévitable Ocean à la baguette – et la compagnie britannique, plus maligne que Taito sur ce coup-là, n’aura bien évidemment pas manqué de rajouter « Chase H.Q. II » dans le titre pour bien capitaliser sur le succès du premier épisode. Si cette version domestique propose tout le contenu de la borne (qui n’était de toute façon pas énorme), il aura fallu réadapter légèrement la jouabilité pour faire tenir toutes les possibilités sur un joystick à un bouton : on accélère donc en poussant le stick vers le haut, le bouton sert à faire feu et le boost est dorénavant sur la barre d’espace – et comme cela était déjà bien suffisant, le changement de vitesse est passé à la trappe, ce qui n’est pas une grosse perte. Si ce portage avait été globalement bien accueilli par la presse de l’époque, on sentait quand même que le seuil d’exigence avait augmenté, en particulier quand on se souvient qu’un certain Lotus Esprit Turbo Challenge était sorti un mois plus tôt. Or, si les sprites des véhicules sont devenus un peu plus gros que ceux du premier opus, la sensation de vitesse n’est pas ébouriffante, on sent que la palette de couleurs est calée sur les capacités de l’Atari ST, et la difficulté est trop élevée – sans oublier qu’il n’y a aucun moyen de la configurer. Bref, le jeu sent le service minimum, et sachant que la réalisation était l’une des clefs de son succès, autant dire que la magie fonctionne déjà nettement moins bien sous cette forme. On peut s’amuser avec (beaucoup) de patience, mais vu la concurrence sur la machine, difficile d’avoir envie d’engloutir des heures sur cette version.

NOTE FINALE : 10/20

Chase H.Q. II est un portage décent de S.C.I., mais il n’offre clairement pas les sensations qu’on pouvait attendre dans un jeu basé précisément sur la vitesse et sur l’adrénaline. Entre la réalisation décevante, l’équilibrage raté et le peu de nouveauté comparé à Chase H.Q., on comprend que la plupart des joueurs aient préféré aller voir du côté d’une concurrence qui faisait mieux dans tous les domaines.

Version Atari ST
Chase H.Q. II : Special Criminal Investigation

Développeur : ICE Software
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Chase H.Q. II version 16 bits a beau avoir été développé avec les caractéristiques de l’Atari ST en ligne de mire, c’était visiblement encore trop ambitieux, voilà la leçon qu’on pourra tirer de ce portage. Cette version est en effet totalement identique à la version Amiga (en-dehors, comme souvent, du rendu sonore), à un petit détail près : elle est hachée de nombreux ralentissements. Un jeu de course qui ne va pas vite, en voilà une bonne idée ! Autant dire que ce qui ne faisait déjà pas illusion en étant vaguement fluide (il serait plus précis de parler de framerate constant) perd encore en intérêt dans une action branchée sur courant alternatif. Tiens, exactement comme le portage du premier épisode ! Là encore, autant jouer à Lotus Esprit Turbo Challenge ou à Vroom et oublier cette adaptation. Personne n’en souffrira.

NOTE FINALE : 09,5/20

Signe du je-m’en-foutisme des productions de l’époque, Chase H.Q. II a le mauvaise goût de débarquer sur un ST avec un framerate inconsistant qui empoisonne la course avec une pléthore de ralentissements. Sachant que ce n’est ni très beau, ni très amusant, et qu’il y a de toute façon bien mieux sur la machine, autant faire l’impasse.

Version Commodore 64
Chase H.Q. II : Special Criminal Investigation

Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe des temps : les fêtes de Noël de 1990 correspondent également à la période de commercialisation de la (très éphémère) C64 GS, une console de Commodore… qui n’était techniquement rien d’autre qu’un Commodore 64 sans clavier. Ocean aura été la seule compagnie à croire un peu en la machine, ce qui se traduisit par une sortie de certains jeux exclusivement au format cartouche – ce qui est exactement le cas pour Chase H.Q. II. Pour cette édition, on retrouve Probe Software, et la bonne nouvelle est que la sensation de vitesse est assez réussie, davantage même que sur Amiga ! On tiendrait même une version qui supplanterait celle de l’autre machine de Commodore en termes de fun sans un écueil très énervant : chaque virage du jeu est si serré qu’il est pratiquement impossible de ne pas finir sans le décor. C’est quand même très pénalisant ! Pour ne rien arranger, l’équilibrage ne tient absolument pas compte de cette petite facétie, et non seulement on peut déjà facilement griller plusieurs continues rien qu’à arriver à hauteur du premier véhicule à traquer, mais en plus en constate que notre arme lui fait très peu de dégâts – 1% par tir, là où l’arcade comptait par incréments de 5% – mais que les collisions, elles, ont carrément l’air de n’avoir aucun effet ! C’est vraiment dommage d’avoir accompli le plus difficile pour se rater sur la jouabilité, mais le fait qu’on réservera cette édition aux joueurs les plus mordus.

NOTE FINALE : 09,5/20

Si Chase H.Q. II sur Commodore 64 remplit très bien sa mission sur le plan technique, avec notamment une sensation de vitesse bien rendue, c’est hélas du côté de la jouabilité et de l’équilibrage qu’il se rate : un jeu de course-poursuite où il faut prendre chaque virage à 30 à l’heure, c’est quand même gonflé ! Sachant que la partie « capture » n’est de toute façon pas très exaltante, on réservera le jeu aux amateurs les plus dévoués.

Version ZX Spectrum
Chase H.Q. II : Special Criminal Investigation

Développeur : ICE Software
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 128ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme la plupart des autres ordinateurs 8 bits populaires de la période, le ZX Spectrum était peut-être en fin de vie en 1990, mais il était encore vivant. Pour cette édition, on pourra au moins reconnaître une certaine ambition à ICE Software, qui aura préféré réserver le portage aux modèles à 128ko de mémoire, autorisant quelques gourmandises inhabituelles comme des changement de palette à la volée au sein d’un même niveau. Ce n’empêche hélas pas le programme de ne jamais afficher plus de trois couleurs en simultané hors de l’interface, ni à la vitesse d’être globalement insuffisante – même si elle ne fait pas pire que ce qu’affichait la version Atari ST. L’équilibrage m’a en revanche paru moins punitif que dans les itérations 16 bits, et on peut enfin concevoir l’idée de réussir la première mission en un seul crédit sans avoir à s’entraîner pendant des heures. Comme on peut s’en douter, cela reste une version que l’on réservera aux nostalgiques, mais cela reste un jeu de course plutôt solide à l’échelle du ZX Spectrum.

NOTE FINALE : 09,5/20

« Ni très belle, ni très rapide, mais jouable et relativement bien équilibrée », voilà ce que l’on peut retenir de la version ZX Spectrum de Chase H.Q. II. Comme souvent, la machine de Sinclair nous rappelle qu’elle n’était clairement pas la mieux équipée, au début des années 90, pour offrir des conversions de bornes d’arcade, mais ce portage est loin d’être honteux pour autant.

Version PC Engine

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 25 janvier 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sur PC Engine, S.C.I. revient entre les mains de Taito, et la console 8 bits ne se fait pas prier pour nous rappeler qu’elle était largement capable d’enfoncer les ordinateurs 16 bits dans le domaine des jeux de course. La sensation de vitesse est la meilleure de tous les portages, avec des sprites assez volumineux, mais il faut également reconnaître que cela passe par le sacrifice de nombreux éléments de décor : les bas-côtés tendent à faire un peu vide, dans cette version, à tel point que le pont du deuxième niveau n’existe même plus : il s’agit d’une route au milieu de l’eau, et puis basta ! L’équilibrage est globalement satisfaisant, avec une arme à feu plus efficace que sur la borne, mais il est assez énervant que les collisions déportent la voiture vers le bord de la route, surtout dans un jeu où l’objectif est précisément de percuter une voiture adverse. Une nouvelle fois, difficile de dire qu’on sente un gain qualitatif palpable depuis le portage du premier épisode, sorti il est vrai à peine un an jour pour jour auparavant. En fait, et comme pour à peu près toutes les autres versions, ça fonctionne plutôt moins bien, et il y a de fortes chances qu’on estime avoir fait le tour de ce que la carte a à offrir très rapidement. Correct, mais redondant.

NOTE FINALE : 13/20

Comme la borne dont il est issu, S.C.I. sur PC Engine donne le sentiment d’être un clone de Chase H.Q. plus que sa suite, et ni la réalisation ni la jouabilité ne fournissent une raison valable de repasser à la caisse pour un titre qui ne fait fondamentalement rien de mieux que son prédécesseur. Une expérience trop limitée pour s’avérer prenante sur la durée.

Version Master System

Développeur : Natsume
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 15 octobre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Encore un timing très surprenant : en 1992, la Master System n’était plus vraiment en odeur de sainteté nulle part, pas même en Europe (elle allait le rester au Brésil, mais c’est une autre histoire), mais cela n’aura visiblement pas empêché Taito d’envoyer Natsume au charbon pour porter S.C.I. Visiblement bâtie dans le même moule que la version PC Engine, ce portage ne fait naturellement pas aussi bien, mais il est loin d’être ridicule pour autant. Certes, la sensation de vitesse n’est pas ébouriffante, les bas-côtés sont plus vides que jamais et l’interface vampirise un bon tiers de l’écran, mais la jouabilité est très bonne et l’équilibrage plus permissif que dans les autres versions. Encore une fois, cela reste du Chase H.Q. avec un pistolet, donc rien qu’on n’ait déjà vu sur la console, mais cela fait suffisamment illusion pour pouvoir supplanter (de peu) les références du genre sur la console. Allez, on prend.

NOTE FINALE : 12/20

Sans transcender en rien les capacités de la console, S.C.I. sur Master System parvient à placer tous les curseurs aux bons endroits : réalisation, jouabilité, équilibrage, vitesse, tout fait à peu près mouche et permet d’offrir une expérience ludique et accessible, à défaut d’être variée. Les joueurs n’ayant pas eu leur dose de Battle Outrun pourront repiquer dans la joie.

Version Saturn
Taito Chase H.Q. Plus S.C.I. : Special Criminal Investigation

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 9 août 1996 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

Autre cible récurrente pour les compilations de vieux succès de l’arcade : la Saturn (qui aura été, une fois n’est pas coutume pour une console SEGA, beaucoup plus populaire au Japon qu’en occident). On ose espérer que la machine avait les capacités techniques pour faire tourner une borne de 1989, ce qui n’a pas toujours été le cas (coucou, Galaxy Force II), mais au moins ici, pas de suspense à entretenir : le portage tourne peut-être même encore plus vite que la version originale ! la jouabilité est excellente, et on bénéficie pour l’occasion de trois niveaux de difficulté ainsi que des options de configuration d’attribution des touches – autant dire le strict minimum de ce qu’on était en droit d’attendre en 1996, mais le contrat est rempli : c’est au moins aussi efficace que la borne d’arcade. Bien sûr, ce n’était plus vraiment ce que les joueurs attendaient alors, et il y a de fortes chances que cette compilation ait ironiquement moins de mal à trouver son public aujourd’hui, mais si vous voulez de la course à l’ancienne sur Saturn, il y a de quoi faire.

NOTE FINALE : 14,5/20

C’est aussi beau que la borne d’arcade, ça tourne au moins aussi vite que la borne d’arcade et cela y ajoute quelques options de configuration minimales mais bienvenues : c’est S.C.I. sur Saturn, et s’il ne constitue pas un indispensable de la console, il n’en reste pas moins un candidat idéal pour découvrir le titre aujourd’hui.

Mr. Bones

Développeurs : Zono, Inc. – Pacific SoftScape Inc.
Éditeurs : SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Enterprises Ltd. (Europe, Japon) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Testé sur : Saturn

Version Saturn

Date de sortie : 18 octobre 1996 (Amérique du Nord) – 13 mars 1997 (Europe) – 26 juin 1997 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM (x2)
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Avec le temps – et celui-ci est souvent cruel –, l’histoire vidéoludique aura fini par ranger la Saturn principalement dans la case de la machine qui aura perdu face à la PlayStation. Une vision assez simpliste, considéré qu’à peu près tous les systèmes domestiques de la période pourraient être classés dans cette catégorie (à l’exception notable du PC, éternelle institution hors-concours, qui ne perd ni ne gagne jamais : comme la montagne, il ne bouge pas), mais le fait est là : le prolongement de la guerre SEGA-Nintendo que tout le monde attendait n’aura pas vraiment eu lieu, et la guerre Sony-SEGA aura largement tourné à l’avantage du premier après quelques mois de flottement.

Du coup, la Saturn demeure un peu la console des jeux de baston, des manic shooters, du sommet d’une 2D qui ne marchait plus très fort en occident… et surtout, de nombreuses exclusivités valables qui lui confèrent, aujourd’hui encore, un certain cachet. Quand on peut s’enorgueillir de compter dans sa ludothèque des titres tels que la série des Panzer Dragoon, Nights into Dreams ou encore Dragon Force (sans même mentionner les conversions des bornes de chez SEGA), difficile de ne pas laisser des souvenirs impérissables à ses possesseurs. Au rang des exclusivités qu’on cite moins fréquemment mais qui auront elles aussi réussi à marquer les mémoires, Mr. Bones est un O.V.N.I. a bien des égards : un titre développé par un studio américain plutôt inconnu au bataillon et mettant en scène un squelette, avec en renfort le guitariste de rock Ronnie Montrose à la composition, et offrant une expérience… eh bien, assez surprenante.

À l’ère de la vidéo, Mr. Bones prend le temps d’installer son récit : celui d’un personnage fantasque et assez sinistre nommé DaGoulian, à mi-chemin entre le savant fou et le grand méchant de film de vampire, pour qui la pureté totale ne peut être atteinte que par le mal à l’état pur. Dans cette optique, il a mis au point le « squelettisme », pouvoir lui permettant de relever les morts et de les diriger vers son objectif final : l’éradication complète du bien.

Mais un grain de sable vient se glisser dans sa titanesque machine : Mr. Bones, un squelette au cœur si pur qu’il en a conservé son libre-arbitre, et dont la générosité semble avoir un effet communicatif sur les autres morts-vivants grâce à un medium inattendu : la musique, et plus spécifiquement le blues. Traqué par le génie maléfique furieux de voir ses plans compromis, l’improbable héros va donc débuter une longue épopée pour mettre à mal les projets de DaGoulian en faisant usage de ses maigres moyens : son corps squelettique, sa générosité, sa musique et son humour. Dans cet ordre. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que son odyssée aura au moins le mérite de ne jamais tout-à-fait amener le joueur là où il s’y attend.

À la base, Mr. Bones est avant tout une succession de séquences de jeu assez disparates – il s’ouvre d’ailleurs sur une phase de poursuite « sur des rails », avec une vidéo projetée en guise de décor, pour enchaîner avec une déroutante séquence d’adresse, avant de continuer par de la plateforme et d’arriver quelques minutes plus tard à… un solo de guitare électrique.

Si le « cœur » du gameplay consiste en des séquences de plateforme, celles-ci ne représentent même pas la moitié des vingt-cinq niveaux du jeu, lequel semble prendre un plaisir particulier à dérouter le joueur en permanence – quitte à offrir des séquence aburdo-oniriques proposant par exemple de rebondir sur son propre crâne pour récupérer des morceaux de son corps (!). Mais que l’on libère un dragon squelette, que l’on joue des percussions, que l’on se retrouve emporté par une rivière souterraine, que l’on patine sur un lac gelé, qu’on aide un groupe de lutins menacés par des araignées géantes (avant qu’ils ne vous récompensent en chanson, s’il vous plaît !) ou même que l’on déride un mort-vivant via un numéro de stand-up sous les rires du public (mort-vivant, lui aussi) : une chose est sûre : on ne sait jamais à quoi s’attendre, et c’est ça qui est chouette. De fait, les joueurs à la recherche d’une expérience conventionnelle et fermement établie risquent de connaître quelques passages douloureux tant le titre est précisément basé sur l’expérimentation permanente empêchant le joueur de pouvoir compter sur une zone de confort – à tel point qu’il peut se montrer très clivant dans son approche, et surtout dans sa façon de la matérialiser.

Techniquement inattaquable et bénéficiant notamment d’une bande originale assez réjouissante qui lui donne une personnalité bienvenue, Mr. Bones est un titre qui est malheureusement loin d’être irréprochable dans les secteurs où on l’attend le plus, à savoir ceux du gameplay et de l’accessibilité. Le squelette en lui-même tend à ne pas être extrêmement maniable, ses sauts étant rarement précis, et la difficulté parfois inutilement frustrante du jeu se trouve encore accrue par le mécanisme de « squelettisme » qui pousse notre héros à commencer à perdre ses membres après avoir subi trop de dégâts exactement comme c’était déjà le cas pour les protagonistes de The Incredible Crash Dummies (pas exactement une référence en la matière) quelques années plus tôt. Ce n’est déjà pas toujours facile d’atteindre une plateforme avec ses deux jambes, alors imaginez quand on n’est qu’un crâne avec juste une cage thoracique !

Surtout, le déroulement est volontairement flou, et il arrive très – trop – souvent qu’on ne sache tout simplement pas comment progresser faute de se voir délivrer des instructions claires (ou plutôt, des instructions tout court). Le premier exemple parlant intervient d’ailleurs lors du fameux solo de guitare où strictement rien ne vous indique ce que vous êtes censé accomplir, ni comment, ni en vertu de quoi, et tant pis pour vous si vous ne parvenez pas à saisir la logique de la séquence : vous êtes là pour expérimenter, que ça vous plaise ou non ! La bonne nouvelle étant que le programme sauvegarde automatiquement la progression à chaque niveau, vous permettant ainsi de reprendre directement depuis le passage qui vous intéresse, ce qui a au moins le mérite de ne pas rendre vos expériences inutilement punitives. La mauvaise est que l’aventure connaît également quelques pics de difficulté particulièrement immondes, le lac gelé et sa glace qui s’effrite sous vos pieds étant l’un des pires, au point d’avoir poussé bien des joueurs à ne jamais mener l’aventure à son terme. Une approche d’autant plus dommageable que d’autres niveaux, eux, sont de véritables promenades de santé, ce qui ne fait que traduire un manque de soin flagrant au niveau de l’équilibrage.

En dépit de ces nombreux défauts, il y a néanmoins quelque chose qui fait indéniablement mouche avec ce Mr. Bones, même après des premiers instants difficiles et avec de nombreux écueils sur le chemin. En fait, à bien des niveaux, je serais tenté de rapprocher le titre de logiciels comme Another World : un jeu où l’expérience en elle-même dépasse la simple valeur ludique d’un gameplay imparfait.

« L’important, ce n’est pas la destination mais le voyage en lui-même » disait Stevenson, une maxime qui s’applique assez bien à un programme frustrant, souvent opaque, parfois ridiculement exigeant, et pourtant inexplicablement sympathique, plus cohérent qu’il n’en a l’air, porté par sa musique et sa capacité à constamment surprendre. Mr. Bones parvient à rendre son personnage attachant, son univers poétique, son atmosphère unique, et même son scénario de série B n’est jamais traité par-dessus la jambe : on a véritablement envie de mener notre sac d’os jusqu’au terme de son périple, ce qui est quand même un signe. Cela demandera un peu d’investissement, un esprit ouvert et pas mal de persévérance (sans oublier une parfaite connaissance de l’anglais pour ceux qui veulent suivre l’histoire), mais la récompense est un jeu qui ne ressemble pas à grand chose d’autre et qui attend encore de trouver un héritier spirituel presque vingt ans après sa sortie. Le mieux est sans doute de l’essayer et de lui laisser le temps de prendre ses aises : il est vraiment difficile à détester, ce Mr. Bones.

Vidéo – L’introduction et le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20 Mr. Bones est peut-être l'un des titres les plus déstabilisants de toute la ludothèque de la Saturn. Plus qu'un jeu de plateforme entrecoupé de séquences aussi disparates qu'un solo de guitare, une opération de sauvetage de lutins ou même un concours de vannes (!), l'improbable logiciel de Zono parvient à devenir ce qu'il cherche à être : une épopée. Certes, c'est précisément dans le cœur de son gameplay que le programme montre le plus de lacunes, avec un mécanisme de « squelettisme » frustrant, une jouabilité imparfaite, des objectifs souvent opaques et une difficulté parfois à la limite de l'immonde, mais l'extraordinaire variété des situations, toujours surprenantes – pour ne pas dire oniriques –, couplé à l'excellente bande sonore finissent par transformer ce qui n'aurait pu être qu'un jeu maladroit en une expérience vraiment unique en son genre. Il faut s'accrocher un peu pour entrer dans cet univers bizarre, mais la bonne surprise est qu'on finit par avoir du mal à le quitter. Une aventure comme on aurait aimé en connaître davantage sur la 32 bits de SEGA. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une vue souvent trop près de l'action lors des phases de plateforme – Des mécanismes assez opaques... – ...tout comme des séquences entières, pour lesquelles aucune instruction n'est jamais donnée – Certains niveaux atroces (le lac gelé !) – Une jouabilité globalement frustrante... – ...et un équilibrage à revoir – Ni version française, ni sous-titres

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Mr. Bones sur un écran cathodique :

Super Ghouls’n Ghosts

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd. (Japon)
Titre original : 超魔界村 (Cho Makai-mura – Japon)
Testé sur : Super NintendoPlayStationSaturn
Présent dans la compilation : Capcom Generation : Dai 2 Shū – Makai to Kishi (PlayStation, Saturn)
Disponible sur : Game Boy Advance, navigateur, New 3DS, Switch, Wii, Wii U

La série Ghosts’n Goblins (jusqu’à 2000) :

  1. Ghosts’n Goblins (1985)
  2. Ghouls’n Ghosts (1988)
  3. Gargoyle’s Quest (1990)
  4. Super Ghouls’n Ghosts (1991)
  5. Gargoyle’s Quest II (1992)
  6. Demon’s Crest (1994)
  7. Arthur to Astaroth no Nazo Makaimura : Incredible Toons (1996)
  8. Makaimura for Wonderswan (1999)

Version Super Nintendo

Date de sortie : 4 octobre 1991 (Amérique du Nord, Japon) – 10 décembre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version américaine patchée en français
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le nom de Capcom sera resté un nom profondément attaché à celui de Nintendo au cours des années 80 – et au-delà. Un peu comme celui de Konami, d’ailleurs, ou de quantité d’autres studios japonais auxquels les accords extrêmement restrictifs passés avec la firme au plombier interdisaient d’aller s’épancher chez une concurrence qui ne pesait de toute façon alors généralement pas assez lourd pour aller se froisser avec l’acteur dominant du secteur.

Ironiquement, les choses commençant à se modifier (en partie sous la pression de la justice) autour de l’irruption de la génération 16 bits, c’est également un jeu Capcom – Ghouls’n Ghosts, pour ne pas le nommer – qui aura représenté un des premiers vrais succès critiques et commerciaux de la Mega Drive, à une époque où la machine survivait difficilement depuis un an et se retrouvait enfin dotée d’une killer app au meilleur moment, à savoir celui de la sortie américaine de la console. Le reste fait partie de la légende, mais on remarquera qu’au moment où la Super Nintendo venait à son tour revendiquer la domination sur la nouvelle génération, le roi Arthur et son goût prononcé pour le die-and-retry auront une nouvelle fois été mobilisés. Mais, quitte à sortir le monarque de sa retraite pour la dernière fois du siècle, Capcom se sera probablement avisé que la borne d’arcade avait déjà fêté ses trois ans, et que les joueurs ayant déjà eu l’occasion de s’éclater sur la très bonne version Mega Drive ou sur l’encore meilleure version SuperGrafx commenceraient peut-être à renâcler à relancer la même aventure, même si elle parvenait à être encore un peu plus jolie. Ainsi arriva Super Ghouls’n Ghosts, un épisode exclusif livré avec ses propres arguments.

Les exclusivités, dans le domaine des jeux venus de l’arcade, il en existe de deux types : celles que l’on décrira comme « de façade » et qui consistent à fournir une simple variation de la borne se limitant, le plus souvent, à des modifications assez symboliques (Super Thunder Blade ou Space Harrier II, par exemple, correspondant très bien à cette description) et puis celles qui s’efforcent de fournir un titre avec son identité et son gameplay propres (The Revenge of Shinobi, pour rester du côté de chez SEGA).

Super Ghouls’n Ghosts appartient clairement à la deuxième catégorie : bien qu’il reprenne exactement le principe et le prétexte de la borne de 1988 (repartir secourir la princesse pas moins de deux fois de suite) au point de débuter dans le même cimetière que Ghouls’n Ghosts, il ne tarde pas à s’émanciper en proposant ses propres idées, ses propres environnements, et surtout quantités d’éléments tirant parti des fameuses capacités graphiques de la console et de sa panoplie de zooms, rotations et autres effets de transparence directement codés dans le hardware de la machine. Un programme qui affirme d’ailleurs son ambition dès l’affichage de la carte du jeu, avec pas moins de huit niveaux à boucler là où le jeu original n’en proposait que cinq. Et le mieux, c’est qu’on ne retrouve finalement qu’assez peu d’éléments tirés directement de la borne au fil de l’aventure, et que les changements sont très loin de se limiter à du contenu additionnel : c’est véritablement au troisième épisode de la trilogie qu’on a affaire, et pas à une sorte de version 1.5 de Ghouls’n Ghosts.

Les premiers changement significatifs apparaissent d’ailleurs du côté du gameplay : là où Arthur avait acquis la capacité de tirer dans les quatre directions cardinales dans la borne d’arcade, ce n’est plus le cas ici où il ne peut tirer que devant lui, comme c’était le cas dans Ghosts’n Goblins.

Afin de compenser cette perte, notre héros médiéval gagne un double saut qui lui sera très utile pour faire mentir la raideur légendaire de ses jambes, quelques nouvelles armes comme un arc ou une faux, et surtout une armure supplémentaire lui ouvrant accès à une partie des (nouvelles) capacités de l’armure d’or, à savoir : modifier le comportement de l’arme utilisée ! Par exemple, un arc employé avec les armures verte ou dorée verra ses flèches se transformer en munitions à tête chercheuse – le genre de bonus qui peut changer drastiquement la façon d’aborder une séquence difficile. Un gain d’ailleurs renforcé par l’apparition des boucliers exclusifs à l’armure d’or, lesquels permettent d’arrêter un à trois tirs avant de disparaître. Sachant que l’arme portée impacte également la magie accessible en chargeant votre tir avec, encore une fois, la fameuse armure dorée, autant dire qu’il y aura matière à expérimenter – et de nombreuses raisons pertinentes pour s’accrocher à sa précieuse armure comme à la prunelle de ses yeux.

Mais ce qui a véritablement fait la réputation de la série, c’est sa difficulté qui en a fait l’un des archétypes célébrés du die-and-retry. Ne vous inquiétez pas : bien que le menu des options ouvre l’accès au choix du nombre de vies ainsi qu’à quatre niveaux de difficulté, il y aura déjà matière à souffrir dès le mode facile, et peut-être plus encore que sur la borne !

Il faut dire que, là où les deux précédents opus prenaient le temps de vous accueillir « en douceur » avec un premier niveau déjà exigeant mais relativement accessible, la barre est ici placée assez haut dès le cimetière, qui risque de vous demander d’autant plus d’efforts à terminer que les niveaux tendent ici à être sensiblement plus longs que dans les épisodes précédents. Sachant que perdre toutes vos vies vous vaudra une nouvelle fois de repartir du début du niveau plutôt que du dernier point de passage, autant vous habituer à répéter chaque séquence de très nombreuses fois avant d’espérer découvrir la suite du programme. La bonne nouvelle, heureusement, c’est que la réalisation est largement à la hauteur de celle de la borne, et qu’on est vraiment pressé de découvrir le prochain environnement, surtout quand le jeu prend la peine d’introduire des décors encore jamais vus dans la saga comme les steppes enneigées ou le cimetière de bateaux. En 1991, Capcom savait visiblement déjà tirer le meilleur des capacités graphiques de la machine, le seul regret étant les quelques ralentissements à subir lorsqu’il y a un peu trop de monde à l’écran, et le résultat a très bien vieilli : c’est clairement le type de jeu qui affichait d’entrée les arguments de la machine face à ses deux grandes concurrentes, et qui le faisait bien.

Le mieux reste d’ailleurs la façon dont l’aventure s’acharne à exploiter, comme on l’a vu, le jeu d’instructions de la machine pour en faire des passages originaux et surprenants qui viennent très régulièrement ravir (et tuer) le joueur : séquence où le décor entier pivote (trois semaines à peine avant que Super Castlevania IV ne vienne offrir une séquence similaire), avalanches, décors qui se déforment, vagues qui viennent emporter le décor…

Je vous laisse profiter de la vidéo du premier niveau pour pouvoir juger du nombre de trouvailles à chaque écran : on est presque heureux de rencontrer, toutes les trente secondes, une nouvelle façon inattendue de trépasser ! On pourrait également parler des boss massifs – presque tous inédits – qui sont plutôt moins exigeants que ceux de Ghouls’n Ghosts, ou de l’efficacité toujours intacte du système de jeu, qui en fait une nouvelle fois un excellent candidat aux marathons entre joueurs où on se tend la manette pour tenter sa chance à tour de rôle afin de parvenir à terminer l’aventure à plusieurs. Le fait est qu’absolument tout ce qu’on pouvait espérer trouver dans cette cartouche s’y trouve, et que même les joueurs ayant écumé Ghouls’n Ghosts en long, en large et en travers pourront s’y lancer sans l’ombre d’une hésitation : c’est tout simplement l’apogée des aventures du roi Arthur, l’épisode le plus long, le plus varié, le plus ludique et le mieux réalisé. Aucune question à se poser : dès l’instant où la difficulté ne vous fait pas peur, foncez !

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 18,5/20 En transformant l'un des meilleurs épisodes d'une de ses licences phares en une exclusivité pour la jeune Super Nintendo, Capcom ne se sera clairement pas moqué du monde. Dopé par les effets graphiques de la machine, plus grand, plus long, plus varié et encore plus dur, Super Ghouls'n Ghosts peut se vanter de supplanter à pratiquement tous les niveaux la borne dont il est originellement tiré, c'est dire ! Le plus réjouissant reste la variété des décors et des situations d'une cartouche qui s'adapte à merveille à son support pour étaler le savoir faire acquis par la firme japonaise au fil des trois années écoulées : d'accord, on en bave, mais en dépit du cadre pratiquement gravé dans le marbre de la série, on parvient à être souvent surpris, et surtout, on ne s'ennuie jamais. Évidemment, le défi ridiculement exigeant risque de destiner le jeu en priorité à une catégorie bien spécifique de joueurs, mais dans le domaine du die-and-retry que l'on peut vaincre avec un peu de mémoire et beaucoup d'entraînement, on touche pratiquement au pinacle du genre. Incontournable, tout simplement. CE QUI A MAL VIEILLI : – Des ralentissements dont on se serait bien passé – Des sauts toujours aussi raides – Une difficulté parmi les pires d'une série déjà réputée pour cela... – ...et doit-on préciser que le jeu devra à nouveau être terminé deux fois de suite pour en voir la fin ?

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Super Ghouls’n Ghosts sur un écran cathodique :

Version PlayStation
Capcom Generations

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 23 septembre 1998 (Japon) – 3 septembre 1999 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (1 bloc)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on aura déjà eu l’occasion de le voir avec les deux précédents épisodes de la saga « canonique », Capcom aura décidé en 1998 de porter la trilogie originale sur les consoles 32 bits – d’abord uniquement au Japon, avant que les joueurs européens ne bénéficient d’une compilation regroupant quatre des cinq volets parus séparément au pays du Soleil Levant. Cette version de Super Ghouls’n Ghosts est bien évidemment très fidèle à la version d’origine (on se doute que la PlayStation avait largement les armes pour rivaliser avec une Super Nintendo), mais curieusement, ce n’est pas une version émulée : l’œil avisé (et surtout le joueur ayant accès aux données techniques) réalisera par exemple que le jeu tourne ici dans une résolution trèèèès légèrement inférieure, en 255×220 au lieu de 256×224. À ceux qui feraient la moue pour ces quelques lignes de pixels en moins (c’est naturellement indécelable une fois en jeu), on notera cependant un avantage qui compense largement : grâce au hardware, les ralentissements ont disparu. Le reste de l’expérience étant identique (on remarquera qu’on peut désormais activer ou non les vibrations dans le menu des options), inutile de dire que le jeu est toujours aussi bon est que vous ne devriez pas avoir à regretter de le découvrir dans cette compilation.

NOTE FINALE : 18,5/20

Super Ghouls’n Ghosts débarque sur PlayStation dans une version qui perd bien quelques pixels au niveau de la taille de la fenêtre de jeu, mais qui a l’avantage de se débarrasser des quelques ralentissements qui existaient sur la version Super Nintendo. Le reste n’a pas bougé, y compris au niveau des options, c’est donc une excellente alternative à la version originale.

Version Saturn
Capcom Generation : Dai 2 Shū – Makai to Kishi

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 23 septembre 1998 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou carte mémoire

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On se doute que l’essentiel de ce qui a été dit pour la version PlayStation est toujours valable pour la version Saturn de Chohmakaimura : c’est toujours la version Super Nintendo, mais avec un framerate plus constant. Les férus de technique les plus pointilleux noteront néanmoins que, pour une raison quelconque, la résolution est encore légèrement différente ici (251×224) – une nouvelle fois, bon courage pour s’en rendre compte une fois en jeu, surtout avec l’image étirée au format 4:3. Pour le reste, même si on se doute que les gens n’achetaient pas une Saturn pour s’essayer aux titres de la génération précédente, l’expérience de jeu est au moins égale, si ce n’est supérieure, à celle de la cartouche originale. Que du bonheur.

Une exclusivité Super Nintendo sur une machine SEGA… comme quoi, c’était déjà possible !

NOTE FINALE : 18,5/20

Les possesseurs de Saturn désireux de jouer à Chohmakaimura auront pu le faire d’en d’aussi bonnes conditions que sur PlayStation. C’est toujours aussi bon, et c’est même un peu plus fluide que sur Super Nintendo, donc aucune raison de bouder cette version.

Asteroids

Développeurs : Ed Logg, Lyle V. Rains et Howard Delman
Éditeur : Atari, Inc.
Titres alternatifs : Cosmos (titre de travail), Asteroids (Asteróides) (édition Polyvox – Brésil), Meteorlar Geliyor (Turquie)
Testé sur : ArcadeAtari 8 bitsAtari 2600Atari 7800Game Boy
Disponible sur : Antstream, Dreamcast, DS, Game Boy Advance, PlayStation 2, PlayStation 4, Xbox, Xbox 360, Xbox One, Windows
Présent au sein des compilations :

  • Microsoft Arcade (1993 – Macintosh, PC (Windows 3.x))
  • Arcade Classic 1 : Asteroids / Missile Command (1995 – Game Boy)
  • Arcade’s Greatest Hits : The Atari Collection 1 (1996 – PlayStation, Saturn, Super Nintendo)
  • Atari Arcade Hits : Volume 1 (1999 – PC (Windows 9x))
  • Atari Anniversary Edition (2001 – Dreamcast, PlayStation, PS Vita, Windows)
  • Atari Anniversary Advance (2002 – Game Boy Advance)
  • Atari : 80 Classic Games in One! (2003 – PlayStation 2, Windows, Xbox))
  • Atari Retro (2004 – Palm OS, Symbian, Windows Mobile, Zodiac)
  • Atari Legends Vol. 1 (2005 – J2ME)
  • Atari Masterpieces Vol. I (2005 – N-Gage)
  • Pong & Asteroids & Yars’ Revenge (2005 – Game Boy Advance)
  • Atari Legends Vol. 3 (2006 – J2ME)
  • Atari Anthology (PlayStation 2, Xbox)
  • Atari Vault (2016 – Atari VCS, Linux, MacOS, Windows)
  • Atari Flashback Classics (2018 – Switch)
  • Atari Vault : 50 Game Add On Pack (2019 – Atari VCS, Linux, MacOS, Windows)
  • Atari Collection 1 (2020 – Evercade)
  • Atari Collection 2 (2020 – Evercade)
  • Atari Arcade 1 (2021 – Evercade)
  • Atari 50 : The Anniversary Celebration (2022 – Atari VCS, PlayStation 4, PlayStation 5, Switch, Windows, Xbox One, Xbox Series)

Également testé : Asteroids Deluxe

La série Asteroids (jusqu’à 2000) :

  1. Asteroids (1979)
  2. Asteroids Deluxe (1981)
  3. Space Duel (1982)
  4. Blasteroids (1987)
  5. Asteroids (Syrox Developments) (1998)
  6. Asteroids Hyper 64 (1999)

Version Arcade

Date de sortie : Novembre 1979 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Cinq boutons
Version testée : Version internationale, révision 4
Hardware : Processeur : MOS Technology M6502 (1,512 Mhz)
Son : Circuits discrets
Vidéo : Vectoriel

L’espace intersidéral n’est pas uniquement l’ultime frontière de l’expansion humaine ni le territoire des rêves les plus anciens, des spéculations les plus folles et des découvertes à venir les plus importantes.

Il aura également souvent représenté un décor de choix pour une bonne partie des premiers jeux vidéo, à la fois en tant que terrain d’accueil pour les scénarios de science-fiction, prétextes à tous les possibles (notamment aux attaques d’extra-terrestres, ennemis encore plus consensuels que les communistes ou les terroristes), et aussi grâce au fait qu’il soit assez largement, eh bien, vide, ce qui était sans nul doute ce qu’on pouvait le mieux représenter avec la technique de l’époque et ses grands écrans noirs. L’espace, c’est spacieux, par définition, ça laisse beaucoup de place pour bouger, et ça ne demande jamais que quelques point blancs en guise d’étoiles pour être matérialisé graphiquement : le pied. Ceci dit, de Space Wars à Space Fighter, ça n’était jamais plus que cela : un décor de fond qui ne jouait aucun rôle particulier autre que d’être facile à figurer. Jusqu’à ce que débarque un certain Asteroids, qui décida d’adjoindre à l’espace une de ses caractéristiques compréhensibles par le profane : l’apesanteur, et par extension l’inertie. Isaac Newton aura peut-être matérialisé la loi de la gravitation, mais Ed Logg et Lyle Rains, eux, auront précisément introduit l’absence de celle-ci. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, d’un point de vue ludique, c’était une idée absolument brillante.

Comme pour beaucoup de titres fondateurs d’une époque pionnière – elle aussi –, Asteroids est avant tout un e évolution d’un concept antérieur, lui-même basé sur un concept antérieur, lui même basé sur… vous avez compris l’idée. En l’occurrence, le point de départ pourrait être situé à Space Wars, qui proposait à deux joueurs de s’affronter dans l’espace – le jeu devait initialement en être un simple clone, avec des astéroïdes, certes, mais purement en guise de décor. Puis le projet sera devenu Planet Grab, un titre qui aurait proposé aux joueurs de capturer des planètes en les touchant avec son astronef – et, éventuellement, de les détruire. Il aura fallu attendre deux ans pour que ce matérialise Asteroids avec son concept simple mais génial : détruire des… astéroïdes (j’espère qu’à ce stade, vous aviez deviné) mais le faire dans un espace « crédible » ou chaque poussée entraîne un élan définitif jusqu’à ce que celui-ci soit compensé par une poussée en sens inverse. Et ça, mine de rien, c’est très, très différent de bouger une raquette déguisée en vaisseau comme dans le premier Space Invaders venu. Et ça change tout.

Tout est là : l’objectif, comme pour tous les jeux de cette période, est le score. Pour gagner des points, il faudra donc prendre les commandes d’un triangle figurant un vaisseau spatial pour aller tirer sur des amas de roches dérivant dans l’espace, lesquels se diviseront alors en morceaux plus petits, lesquels se diviseront à leur tour en morceaux plus petits (Pang n’aura décidément rien inventé !) jusqu’à leur destruction.

Évidemment, la dimension stratégique est introduite par le fait que détruire anarchiquement les astéroïdes du titre engendra rapidement un chaos de rochers flottant dans tous les sens, et que le moindre contact avec votre astronef lui sera bien entendu fatal. Il faudra donc faire preuve d’un minimum de méthode, quitte à développer le réflexe, en cas de collision imminente, d’utiliser l’hyperespace – un mécanisme faisant réapparaître votre vaisseau aléatoirement à un autre endroit de l’écran. Des soucoupes volantes, petites ou grandes, feront parfois leur apparition (un autre grand classique de l’époque) et celles-ci sont armées : mieux vaudra donc s’en débarrasser le plus vite possible avant qu’elles ne se débarrassent de vous. Voilà, tout est dit, le reste n’est qu’une question de jouabilité, d’équilibrage – et d’adresse.

À ce titre, l’autre idée géniale d’Asteroids est celle à laquelle on pense moins : le fait que les bords de l’écran soient « connectés », et que par conséquent disparaître par la droite vous fasse réapparaître par la gauche et inversement – cela marche aussi pour le haut et le bas, naturellement. Quel meilleur moyen de figurer un espace illimité sur un écran fixe sans utiliser un mécanisme comme le défilement (lequel ne serait introduit par Defender qu’un an et demi plus tard) ?

L’orientation sera souvent une clef de la jouabilité, surtout si le joueur use et abuse de l’hyperespace – et on notera qu’il était encore loin d’être évident de manipuler le vaisseau comme si on le pilotait en vue subjective, ce qui devait être particulièrement déstabilisant à l’époque. Évidemment, avec plus de quarante ans de recul, l’action devient fatalement répétitive faute de renouvellement – il n’y a jamais que trois types d’ennemis, un seul décor, et des vagues successives qui reviennent à l’infini. Mais pour peu qu’on adhère à la philosophie de l’arcade (c’est à dire amasser le plus de points possible dans une partie qui dépassera difficilement les trois minutes), le concept a étonnamment bien vieilli, et il n’est pas très surprenant qu’il ait souvent été pillé mais rarement dépassé : à part le multijoueur (qui sera introduit par certains portages, comme on va le voir), tout était déjà là d’entrée.

L’histoire retiendra en tous cas qu’Asteroids aura constitué le plus grand succès d’arcade de l’histoire d’Atari, avec plus de 56.000 bornes produites. Dès le développement, Ed Logg et Lyle Rains devaient souvent chasser les autres membres du laboratoire qu’ils retrouvaient régulièrement en train de jouer à leur prototype lorsqu’ils arrivaient au bureau le matin ou lorsqu’ils revenaient de leur pause déjeuner.

La plupart des joueurs de l’époque vivaient l’expérience comme un véritable rush d’adrénaline, le danger venant de partout à la fois et l’action demandant de rester concentré sur tout ce qui se passait à l’écran en permanence. De nos jours, on y verra plutôt une affaire d’anticipation et d’adaptation dont on risque de faire le tour en une poignée de minutes, mais à laquelle on reviendra avec un certain plaisir – en regrettant juste que l’interface fasse usage de pas moins de cinq boutons là où on aurait été bien plus à l’aise avec un stick, mais hé, c’est aussi ça la magie de cette période où tout restait à définir. Si vous n’avez jamais joué à Asteroids, faites l’expérience au moins une fois. À un certain niveau, il était là, le premier voyage intersidéral de l’histoire de l’humanité.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 11/20 Comme tous les titres fondateurs imaginés à une époque où le son et la couleur étaient encore des luxes quasi-inaccessibles dans l'univers vidéoludique, Asteroids a pour lui la force d'un concept génial reposant sur l'inertie, et la faiblesse paradoxale d'une jouabilité accessible conçue pour être comprise en une fraction de seconde : celle d'avoir tout vu dès les première secondes de la première partie. Le concept consistant, comme son nom l'indique, à détruire des astéroïdes dans l'espace, ne se renouvèle bien évidemment jamais, mais il inclut déjà ces petits détails qui font la différence, comme la prime aux stratégies les plus risquées ou l'ajout bien vu d'une bouton d'hyperespace – qui sera d'ailleurs repris tel quel dans un autre classique du genre : Defender. Inutile de dire que seuls les nostalgiques les plus persévérants accepteront aujourd'hui d'y consacrer plus d'une poignée de minutes, mais dès l'instant où l'on accepte de faire une partie sur le pouce pour tenter de battre son meilleur score, la formule n'a fondamentalement pas pris une ride. Simple, mais efficace.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Aucune forme de renouvellement dans l'action ni dans la réalisation – Une jouabilité à cinq boutons qui aurait mieux fonctionné avec un joystick – Des tirs minuscules difficiles à apercevoir, ce qui est particulièrement gênant dans le cas des soucoupes volantes adverses

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Asteroids sur une borne d’arcade :

Version Atari 8 bits

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1981
Nombre de joueurs : 1 à 4
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche testée sur Atari 800 XL
Configuration minimale : Systèmes : Atari 400/800/XL/XE – RAM : 8ko

Au moment de porter Asteroids sur ses systèmes domestiques, on se doute qu’Atari allait devoir procéder à quelques simplifications – les graphismes vectoriels n’étant pas les plus simples à rendre sur des machines dont le hardware n’était pas exactement prévu pour. Conséquence immédiate pour cette itération Atari 8 bits (et pour la grande majorité de celles à suivre) : les vecteurs ont laissé la place à des sprites. Alors certes, les graphismes sont nettement moins fins, l’animation est moins fluide, l’action est un peu moins précise… mais en contrepartie, on récupère quelques couleurs qui permettent de distinguer immédiatement la position de son vaisseau à l’écran, la jouabilité au joystick est infiniment plus naturelle que celle utilisant cinq boutons, on peut choisir entre différents modes de jeu et différents mode de défense (on peut par exemple remplace l’hyperespace par le bouclier introduit dans Asteroids Deluxe), et pour ne rien gâcher, il est même possible de jouer à quatre simultanément, en coopératif comme en compétitif ! Autant dire que ces multiples ajouts font un bien fou en termes de durée de vie : Asteroids à plusieurs, c’est déjà nettement plus amusant, et sachant que la réalisation n’est de toute façon pas l’argument de vente qui fera mouche aujourd’hui, on réalise qu’on a déjà matière à passer nettement plus de temps sur cette cartouche que sur la borne d’arcade. Certes, les adeptes du scoring en solo resteront sur la version originale, mais pour ceux qui veulent juste s’amuser, il y a clairement un titre à découvrir ici.

NOTE FINALE : 12,5/20

Asteroids ne se sera pas moqué du monde en débarquant sur les machines de salon. La réalisation a beau être extraordinairement basique, l’ajout d’une sélection de modes de jeu, d’options de configuration et surtout d’un mode multijoueur font une énorme différence ! Le tout n’a peut-être pas la précision de la borne, mais pour s’éclater à plusieurs, c’est assurément une version à tester.

Version Atari 2600

Développeur : Brad Stewart
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1981
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 64kb

Sur l’antique console de salon qu’est l’Atari 2600, le jeu n’aura pas débarqué à l’identique de ce qu’il était sur Atari 800 (l’ordinateur avait, il est vrai, un hardware plus puissant équivalent à celui d’une Atari 5200… laquelle n’aura d’ailleurs jamais reçu sa version du jeu). Du côté des bonnes nouvelles, le jeu est encore plus coloré qu’il ne l’était sur ordinateur : on est loin du monochrome des graphismes vectoriels. En revanche, il faudra tirer un trait sur le multijoueur en simultané, et les options de configuration demanderont un passage par le manuel pour avoir une chance de comprendre de quoi il est question. Une nouvelle fois, difficile de dire que la réalisation soit immensément moins efficace que celle de la borne d’arcade, mais les joueurs solo lui préfèreront sans doute l’expérience originale tandis que les autres se dirigeront vers le mode multijoueur de sa comparse. Bref, une conversion très honnête, mais probablement pas celle vers laquelle se diriger aujourd’hui.

NOTE FINALE : 10,5/20

Équivalent plus coloré et moins fin de la version arcade, cette version Atari 2600 d’Asteroids perd également une partie des nombreux ajouts observés sur l’édition Atari 800. En résulte un jeu qui se défend bien et avec lequel on peut toujours prendre plaisir, mais autant aller voir directement du côté de l’expérience originale ou des variations multijoueurs.

Version Atari 7800

Développeur : General Computer Corporation
Éditeur : Atari Corporation
Date de sortie : 1987
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb (version 1991) – Cartouche d’1Mb (version 1995)

Signe de son succès en arcade, Asteroids aura fait partie de la « prestigieuse » gamme de lancement de onze titres promue sous le nom de « Fabulous Eleven » par Atari, intégralement composée d’adaptations de l’arcade et censée donner envie d’acheter l’Atari 7800 (ce qui aurait certainement fonctionné si la console avait été disponible, oh, disons trois ans plus tôt). Si on sait que l’argument de vente ne portait plus trop auprès d’un public qui avait largement eu le temps de passer à autre chose en 1987, il faut reconnaître que cette version fait assez bien le travail : c’est fin, c’est coloré, c’est fluide, les astéroïdes ressemblent enfin à des astéroïdes plutôt qu’à de gros pâtés, et surtout on récupère tous les modes de jeu de la version Atari 8 bits, multijoueur compris (mais uniquement à deux, désormais). Une nouvelle fois, ces ajouts font beaucoup de bien, et si les puristes ne changeront probablement pas d’avis en ce qui concerne le mode solo, on appréciera de pouvoir s’écharper et/ou s’entraider avec un ami. Sans doute pas de quoi y engloutir des semaines, mais quitte à posséder une Atari 7800, il serait dommage de faire l’impasse sur cette adaptation.

NOTE FINALE : 12,5/20

Pour résumer, on pourrait dire que cette version Atari 7800 d’Asteroids, c’est l’itération Atari 800 avec de meilleurs graphismes et un multijoueur se limitant désormais à deux participants au lieu de quatre. C’est une nouvelle fois le principal intérêt d’une version qui n’a objectivement pas trop mal vieilli, surtout comparé au reste de la ludothèque de la machine.

Version Game Boy

Développeur : The Code Monkeys, ltd.
Éditeur : Accolade, Inc. (version 1991) – Nintendo Co., Ltd. (version 1995)
Date de sortie : Version 1991 : 11 décembre 1991 (Amérique du Nord) – 24 juillet 1992 (Europe)
Version 1995 : 15 juin 1995 (Amérique du Nord) – 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : Version 1991 : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Game Link)
Version 1995 : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 256kb

Asteroids aura eu le droit à pas moins de deux parutions séparées sur Game Boy : la première en 1991, vendu seul (ce qui était quand même un peu pingre pour un titre qui allait déjà sur ses treize ans), et la deuxième en 1995, cette fois avec Missile Command en bonus, mais les deux versions sont autrement identiques… au détail près que la version de 1995 perd son mode multijoueur au profit d’un mode « classic » qui remplace les astéroïdes dessinés par des modèles tentant vainement de se faire passer pour du vectoriel ! Un choix d’autant plus décevant que la conversion est de toute façon loin d’être éblouissante : non seulement on se sent immédiatement à l’étroit sur l’écran de la petite console, mais en plus le tout n’est même pas spécialement fluide, et en solo les options se limitent au choix de la difficulté parmi trois modes – vraiment le minimum vital ! Bref, si on pouvait encore imaginer un vague intérêt à avoir une version du jeu à transporter dans sa poche en 1991, le fait qu’on puisse désormais émuler directement la borne ou virtuellement n’importe laquelle des versions de salon sur un simple téléphone portable rend cette itération caduque.

NOTE FINALE : 10/20 (version 1991) – 09/20 (version 1995)

Bilan pas très emballant pour pas moins de deux portages excessivement paresseux d’Asteroids sur Game Boy. Si la version de 1991 peut encore être sauvée par son mode multijoueur (où on se sent malgré tout très à l’étroit), celle de la compilation de 1995 intégrant Missile Command n’offre pas grand intérêt.

Asteroids dans Microsoft Arcade

Développeur : Microsoft Corporation
Éditeur : Microsoft Corporation
Date de sortie : 1993 (version PC) – 1994 (version Macintosh)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″* et 3,5″
*Version PC uniquement
Contrôleurs : Clavier, souris
Testé sur : Macintosh, PC
Configuration minimale : Version PC : Processeur : Intel i386 SX – OS : Windows 3.1 – RAM : 2Mo
Mode graphique supporté : VGA
Version Macintosh : Processeur : Motorola 68020 – OS : System 7.0 – RAM : 3Mo

À ce stade, et vu l’âge plus que vénérable que commençait à atteindre Asteroids en 1993, je ne pense pas trahir un gros secret en indiquant qu’il faudra désormais s’attendre à croiser le jeu exclusivement dans des compilations estampillées Atari – ou dans des adaptations intégrant suffisamment de nouveautés pour justifier le prix de la cartouche. Microsoft Arcade ressemble surtout à une compilation destinée à montrer que Windows 3.1 pouvait accueillir des titres dédiés, même si ceux-ci n’étaient plus de la première fraicheur (mais bon, après tout, Asteroids n’avait pas eu le droit à une version DOS). Le résultat n’est pas encore transcendant : même si le jeu tourne en 640×480, la fenêtre de jeu ne s’étend pas au-delà de cette dimension (ce qui signifie que vous en serez quitte pour jouer avec une énorme bordure si votre bureau est dans une résolution supérieure), et on remarquera qu’il n’est même pas possible de faire usage d’un joystick ! Le tout n’est pas aussi précis que la borne (vos tirs ont des angles morts, il n’est pas réellement possible de tirer à 360°), et il n’est plus question de multijoueur autrement qu’n jouant à tour de rôle. En revanche, reconnaissons au moins au titre un panneau de configuration très complet vous laissant carrément décider de la vitesse de votre vaisseau ou de celle des astéroïdes. Cela reste objectivement assez peu, mais bon, au moins cette version aura-t-elle eu le mérite d’exister. La version Macintosh, pour sa part, et exactement identique, au pixel près, et offre exactement les mêmes options.

NOTE FINALE : 10,5/20

Version fonctionnelle pour Asteroids sur Windows 3.1/Macintosh, qui correspond assez bien au genre de jeu qu’on peut ouvrir dans une fenêtre pour évacuer la pression cinq minutes au bureau. L’essentiel de la borne est parfaitement conservé, mais on regrettera que le titre ne s’embarrasse même pas à reconnaître un joystick et qu’il n’ait rien de neuf à proposer.

Asteroids dans Arcade’s Greatest Hits : The Atari Collection 1

Développeur : Digital Eclipse Software, Inc.
Éditeur : Midway Home Entertainment, Inc.
Date de sortie : PlayStation : 20 décembre 1996 (Amérique du Nord) – Décembre 1997 (Europe)
Saturn : 11 juin 1997 (Amérique du Nord) – Mars 1998 (Europe)
Super Nintendo : Août 1997 (Amérique du Nord) – 26 février 1998 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français (messages en jeu)
Supports : PlayStation/Saturn : CD-ROM
Super Nintendo : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Testé sur : PlayStation, Saturn, Super Nintendo
Spécificités techniques :

Les vieux succès de l’arcade auront connu une forme de retour en grâce dans la deuxième moitié des années 90 – où des licences comme Frogger, Battlezone ou même Asteroids auront vu apparaître de nouveaux épisodes – et Midway y aura visiblement vu l’occasion de se faire un peu d’argent à moindre frais. Cette compilation de jeux Atari respire la paresse : les options y sont pratiquement inexistantes, on peut choisir le nombre de vies, et basta ! Et évidemment, le cœur de cible étant les nostalgiques, pas question ici d’ajouter des options graphiques pour embellir le tout ou un mode de jeu original – sans même oser mentionner la possibilité d’inclure les modes multijoueurs présents dans les premières adaptations ; ce sera la borne originale en moins fin, point barre. Les seules nuances d’une version à l’autre sont à chercher du côté d’une section présentant l’histoire du jeu dans les versions CD, d’un choix de la langue des messages dans ces dernières, ainsi que la résolution native (318×256 sur PlayStation, 352×512 sur Saturn, 256×224 sur Super Nintendo). Autant dire le minimum vital, de quoi contenter l’amateur éclairé, mais à une époque où on peut directement lancer la borne à partir d’à peu près n’importe quoi…

NOTE FINALE : 11/20

Aucune fioriture, très peu de bonus : Asteroids se livre dans cette compilation dans le plus simple appareil, sans l’ombre d’une option ou d’un mode de jeu supplémentaire. le bon côté, c’est que ça marche toujours, mais cette compilation aurait sans doute présenté un peu plus d’intérêt en acceptant de proposer un minimum de contenu additionnel.

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Testé sur : ArcadeBBC MicroAtari STLynxPC (Windows 9x)
Disponible sur : Antstream, Atari 7800, DS, PlayStation 2, PSP, Windows, Xbox, Xbox 360
Présent au sein des compilations :

  • Super Asteroids / Missile Command (1995 – Antstream, Lynx)
  • Atari Arcade Hits 2 (2000 – PC (Windows 9x))
  • Atari Anniversary Edition (2001 – Dreamcast, PlayStation, PS Vita, Windows)
  • Atari : 80 Classic Games in One! (2003 – PlayStation 2, Windows, Xbox)
  • Atari Masterpieces Vol. II (2006 – N-Gage)
  • Atari Classics Evolved (2007 – PSP)
  • Atari Vault (2016 – Atari VCS, Linux, MacOS, Windows)
  • Atari 50 : The Anniversary Celebration (2022 – Atari VCS, PlayStation 4, PlayStation 5, Switch, Windows, Xbox One, Xbox Series)

Suite au succès d’Asteroids, l’idée de développer une version améliorée (qui tournerait sur le même hardware que l’édition de base) aura rapidement fait son chemin – un cheminement assez classique pour les bornes d’arcade de la période, demandez à Zaxxon ou à Space Invaders si vous ne me croyez pas. Bien que reposant fondamentalement sur le même principe, et utilisant le même moteur, le titre introduit son lot de nouveautés principalement pensé pour rendre la borne encore plus ardue que le titre d’origine – à tel point que, face à la grogne des joueurs, des révisions auront rapidement suivi pour diminuer la difficulté d’un cran. Les nouveautés sont listées sur le flyer en ouverture du test, mais pour citer les plus importantes, mentionnons le remplacement de l’hyperespace par un bouclier qui dure dix à douze secondes par crédit et ne peut pas être rechargé, des soucoupes volantes plus agressives qui viseront désormais spécifiquement les astéroïdes (trois tirs sur quatre) puis le joueur (le quatrième tir ; s’il n’y a plus assez d’astéroïdes, les tirs surnuméraires viseront le joueur), et des vaisseaux poétiquement nommés « Death Star » (référence !) qui se diviseront en trois vaisseaux plus petits et plus rapides à l’impact, lesquels se diviseront à leur tour en deux avant de prendre en chasse le joueur. On notera également qu’il y a désormais un tir automatique et que votre vaisseau accélère plus vite. Autant de choses qui obligent à réviser un peu les stratégies initiales (la mobilité permanente est dorénavant une quasi-obligation) sans pour autant métamorphose l’expérience, soit exactement l’objectif recherché.

Date de sortie : Mars 1981 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Borne, cabaret, table coktail
Contrôleurs : Cinq boutons
Version testée : Version internationale, révision 3
Hardware : Processeurs : MOS Technology 6502 1,512MHz ; Atari C012294 POKEY 1,512MHz
Son : Haut-parleur ; Circuits discrets ; Atari C012294 POKEY 1,512MHz ; 1 canal
Vidéo : Vectoriel

L’essentiel ayant déjà été dit, concentrons-nous à présent sur cette version arcade d’Asteroids Deluxe – laquelle bénéficie, au passage, d’un filtre de couleur pour doter les vecteurs d’un bel éclat bleuté. Comme on l’a vu, cette version, même après révision, est encore plus difficile que l’originale : les néophytes devront désormais serrer les dents rien que pour espérer attaindre les vagues trois ou quatre. Les nouveaux vaisseaux introduisent certes des approches un peu différentes –  le meilleur moyen de se débarrasser des fameux « Death Star » étant de foncer dans une direction avant de retourner son vaisseau et de faire feu sur les astronefs à votre poursuite – mais on ne peut pas vraiment dire que cela suffise à apporter le renouvellement qui manquait à la borne originale. La difficulté étant particulièrement frustrante, on peut certes s’amuser le temps de quelques parties courtes, mais cette version est avant tout à réserver aux mordus su scoring à la recherche d’un défi à leur mesure. Un poil plus varié, mais pas beaucoup plus amusant.

NOTE FINALE : 11,5/20

Quelques nouveaux mécanismes ne suffisent pas toujours à métamorphoser une expérience, et même si cet Asteroids Deluxe introduit une poignée d’idées intéressantes, la difficulté redoutable de l’expérience risque de la réserver à des amateurs acharnés de scoring sachant pertinemment ce qu’ils sont venus chercher. Si vous jouez pour le fun, essayez plutôt les versions du jeu de base permettant de jouer à plusieurs.

Développeur : Paul Skirrow
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : 1984
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur BBC Model B
Configuration minimale :

Galop d’essai pour Asteroids Deluxe avec cette version BBC Micro dont je ne suis pas certain à 100% qu’elle ait été commercialisée à l’époque (les informations sont parfois difficiles à trouver). Quoi qu’il en soit, comparé à la borne, on hérite de quelques petits bonus bienvenus : pas de mode multijoueur en simultané, hélas, mais des options de configurations assez complète vous laissant notamment le choix du pouvoir accessible en poussant le joystick vers le bas (bouclier, hyperespace, retournement ou même changement de couleur !), celui de la difficulté entre deux modes, ou même les couleurs des astéroïdes, de votre vaisseau, du fond et des explosions. Le jeu est lisible et tourne très bien, et même si on regrette qu’il n’intègre pas certaines des nouveautés présentes dans le portage du jeu de base sur Atari 8 bits, par exemple, il demeure une alternative plus que crédible – et sensiblement moins frustrante – à la borne d’arcade. Une bonne version.

NOTE FINALE : 11,5/20

Version sérieuse pour Asteroids Deluxe sur BBC Micro, avec des options de configuration assez bien vues et une jouabilité comme une réalisation n’ayant pas à rougir face à la borne d’arcade, loin de là. Avec de véritables options multijoueurs, on aurait même pu tenir une forme de version ultime.

Développeur : Paradox Software
Éditeur : Atari Corps (UK) Ltd.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis

il aura fallu attendre 1988 pour voir apparaître un portage officiel d’Asteroids Deluxe sur Atari ST. Le terme « officiel » est important, car la machine d’Atari avait largement eu le temps de crouler sous les clones, ce qui explique sans doute mieux pourquoi ce portage réalisé par Paradox Software aura été accueilli aussi fraîchement à l’époque – et pourquoi ça ne s’est pas arrangé depuis. Non seulement il n’y a pour ainsi dire rien de neuf comparé à la version arcade (pas de multijoueur, pas de mode de jeu, pas de choix du pouvoir du vaisseau), mais en plus la réalisation est à peine fonctionnelle, avec un grand fond noir devant lequel se baladent des astéroïdes sphériques mal dessinés. Pour ne rien arranger, le framerate poussif évoque celui de la version Game Boy, et les angles morts dans les tirs rappellent ceux de la version PC. La totale ! Alors certes, le jeu n’est pas pour autant devenu mauvais, mais on comprend que les joueurs de l’époque aient nourri des aspirations un peu plus élevées vis-à-vis de leur ordinateur 16 bits. En l’état, ça ne vaut même pas la version BBC Micro. À oublier.

NOTE FINALE : 10,5/20

Difficile d’imaginer une conversion plus paresseuse d’Asteroids Deluxe sur Atari ST : le titre n’a même pas l’idée d’inclure les quelques options de configuration de la version BBC Micro, et l’action n’est même pas spécialement fluide. L’expérience souffre légèrement de quelques ratés évitables (les angles morts dans le tir), et la réalisation n’étant pas renversante, elle non plus, le mieux est sans doute de retourner jouer sur la borne.

Développeur : Atari Corporation
Éditeur : Atari Corporation
Date de sortie : 1995 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Encore une sortie extrêmement tardive pour une console portable en fin de vie. on remarquera d’ailleurs qu’il s’agit ici d’un Super Asteroids et non d’un Asteroids Deluxe, signe de l’arrivée de quelques modifications évoquant celles qu’allait connaître la version Game Boy Color quelques années plus tard. Concrètement, le jeu hérite du bouclier de la borne (lequel s’active dorénavant automatiquement en cas de contact, il fait donc plus office de jauge de santé que de mécanisme à proprement parler) et introduit quelques power-up, dont certains augmentant votre puissance de feu ou d’autres détruisant tout à l’écran. La réalisation est un peu plus léchée que sur la borne, et l’action est plus fluide que sur Game Boy, en revanche la fenêtre de jeu est toujours aussi minuscule et les « Death Stars » ont totalement disparu. La difficulté du jeu est bien plus progressive, avec des vagues qui s’enchainent vite, mais l’absence du multijoueur comme de la moindre option de configuration limite une nouvelle fois l’intérêt du jeu sur le long terme. Dommage.

NOTE FINALE : 11,5/20

Quelques ajouts très anecdotique pour une itération qui se veut un peu plus accessible, un peu plus variée et un peu moins punitive en solo mais qui se révèle vraiment trop répétitive pour rester intéressante sur la durée.

Développeur : Digital Eclipse Software, Inc.
Éditeur : Hasbro interactive, Inc.
Date de sortie : 1er avril 2000
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 16Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique minimale : DirectX : 3.0 – RAM vidéo : 2Mo – Résolutions supportées : 640×480, 800×600, 1024×768

À l’approche du nouveau millénaire, il semblait toujours de bon ton de proposer les éternelles compilation des vieux succès de l’arcade dans un rendu qui soit le plus fidèle possible à celui de la borne. Dans son domaine, cette itération Windows d’Asteroids Deluxe ne s’en tire pas trop mal, avec de nombreuses options de configuration, des commandes entièrement configurables, un rendu d’autant plus lisible qu’il gère les hautes résolutions jusqu’à 1024×768, et deux petits bonus inattendus. Le premier, purement esthétique, est l’inclusion d’un fond correspondant à celui qui était parfois utilisé sur les bornes de l’époque, pour habiller un peu ce grand vide noir : c’est effectivement un peu moins sinistre, et ça fait très bien le travail. Le deuxième, plus surprenant, est l’inclusion d’un mode « Trippy » dans lequel tous les éléments graphiques changent en permanence de couleur et où tous les sprites laissent une traînée qui rend hélas l’action particulièrement difficile à suivre. Sympathique, mais très gadget. Dans tous les cas, voilà au moins un portage qui colle parfaitement à la borne tout en s’efforçant d’apporter de quoi personnaliser l’expérience : un compromis comme on les aime.

NOTE FINALE : 12/20

Peu de fioritures pour cette version Windows d’Asteroids Deluxe, mais ce qui est présent est très bien intégré et permet de se faire une expérience de jeu sur mesure. Le mode de jeu additionnel n’apporte pas grand chose, mais on tient au moins une version qui ne laissera pas de regrets aux joueurs ayant abandonné la borne.

Panzer Dragoon

Développeurs : SEGA CS1 – Team Andromeda
Éditeurs : SEGA Enterprises Ltd. (Europe, Japon) – SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Titre alternatif : Andromeda (nom de code)
Testé sur : SaturnPC (Windows 9x)

La série Panzer Dragoon (jusqu’à 2000) :

  1. Panzer Dragoon (1995)
  2. Panzer Dragoon II : Zwei (1996)
  3. Panzer Dragoon Mini (1996)
  4. Panzer Dragoon Saga (1998)

Version Saturn

Date de sortie : 10 mars 1995 (Japon) – 11 mai 1995 (Amérique du Nord) – 30 août 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad, Mission Stick, Virtua Stick
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’une des caractéristiques fondamentales d’une tragédie, c’est que tout le monde en connait déjà la fin – et sait qu’elle est vouée à mal se finir, par définition. Il existe quelque chose d’universellement fascinant à assister au déroulé implacable de la fatalité en méditant sur l’hybris et sur la vanité humaine : on a beau savoir que le Titanic va couler, on ne peut s’empêcher d’observer le déroulement de l’inévitable désastre en se demandant à quoi ressemblerait le monde si le drame avait été évité.

Cela marche d’ailleurs également très bien avec l’histoire de la Saturn.

On tend à l’oublier tant il est désormais établi, à juste titre, à quel point la guerre de la première génération de consoles post-16-bits aura été remportée haut-la-main par la PlayStation, mais la 32 bits de SEGA avait connu des débuts extrêmement prometteurs, en particulier au Japon – au point de connaître des ruptures de stocks, ce qui invitait alors Tom Kalinske, le directeur de SEGA of America, à déclarer qu’ils étaient en train de « tuer Sony ». Comme on le sait, la tendance se sera rapidement inversée, mais pour bien comprendre le caractère magique que pouvait encore revêtir la Saturn à ses débuts, il importe sans doute de se pencher sur ce qui sera resté une des « exclusivités » (je mets le terme entre guillemets, le jeu ayant été porté sur PC) les plus marquantes de la console, une de celles qui décrochaient les mâchoires, faisaient briller les yeux, et amenaient à penser que la nouvelle génération n’allait être qu’un long voyage ininterrompu vers le merveilleux. Autant le dire : en dépit de la présence de succès comme Virtua Fighter dès le lancement de la machine, s’il était un jeu qui invitait à acheter immédiatement une Saturn en 1995, c’était bien Panzer Dragoon.

L’histoire du jeu, plaçant l’humanité dans un monde où l’ancienne société s’est effondrée, est à la fois très simple et particulièrement confuse : je vous laisserai juger, après avoir visionné l’introduction, si vous comprenez quelque chose aux forces en présence et à leur rôle dans un monde où une technologie avancée a été redécouverte sans qu’on sache trop au bénéfice de qui.

Ce n’est de toute façon pas vraiment important : notre histoire à nous commence dans la peau d’un chasseur qui, au terme d’une traque infructueuse, se retrouve miraculeusement propulsé chevaucheur de dragon par un cavalier agonisant avant d’hériter d’une mission précise : empêcher un autre dragon de rejoindre une tour ancienne dont vous avez reçu la vision. Vous voilà donc sur votre fière monture, comme une version futuriste des chevaliers de LanceDragon, prêt à parcourir les sept niveaux qui vous amèneront à sauver le monde, ou juste votre pays, ou on-ne-sait-trop-quoi parce qu’en fait, comme on va le voir plus bas, l’important n’est pas vraiment là.

Le jeu en lui-même est un rail shooter en 3D. le principe est aussi simple qu’il l’a toujours été : promenez un viseur à l’écran, détruisez les cibles avant qu’elles ne soient en position de vous toucher. Histoire d’épaissir un peu le concept, le titre de l’Andromeda Team ajoute néanmoins quelques subtilités à ce qui aurait pu autrement n’être qu’un jeu de tir comme on les pratiquait avec un pistolet optique : premièrement, le fait de voir votre monture et son cavalier signifie que vous pouvez les déplacer à l’écran et ainsi éviter les projectiles, les pièges ou même les éléments de décor qui viendront à votre rencontre.

Plus original encore : rien ne vous oblige à regarder droit devant vous : les boutons de tranche du joypad feront pivoter la vue par incréments de 90°, vous laissant faire face à ce qui pourrait venir de n’importe quel côté – et histoire de ne pas passer votre temps à regarder partout à la recherche d’ennemis, un radar en haut à droite a l’excellente idée de vous tenir informé de la position des adversaires ET de leurs projectiles en temps réel. Dernier raffinement : en maintenant le bouton de tir appuyé, il est possible de « verrouiller » les adversaires et de lâcher une salve de tirs à tête chercheuse qui pourront facilement vous débarrasser de l’opposition – à condition, donc, d’avoir sacrifié quelques précieux dixième de secondes à arrêter de tirer le temps d’acquérir vos cibles. En résumé : juste ce qu’il faut pour rendre le gameplay plus intéressant et moins limité sans pour autant en faire une usine à gaz avec trop de critères à prendre en compte. Un bon début.

Ces quelques ajouts ne pourraient cependant justifier en rien l’aura exceptionnelle dont le titre bénéficie encore de nos jours auprès des joueurs ayant posé les yeux sur lui à sa sortie.

C’est certainement le bon moment pour aborder la réalisation du jeu, avec une 3D qui avait de quoi faire son petit effet à l’époque : les reflets des bâtiments dans l’eau des lagunes du premier niveau étaient quelque chose qu’on n’avait encore jamais eu l’occasion de voir à l’époque, et la présence d’une musique symphonique au souffle épique transmettait à la perfection un sentiment de liberté d’autant plus grisant qu’il parvenait à faire oublier à la perfection le fait que toute l’aventure se déroulait, précisément, sur des rails. Dès le départ, Panzer Dragoon se sera affirmé comme le titre le plus impressionnant techniquement de toute la ludothèque de la jeune console, laissant entrevoir des promesses enthousiasmantes quant aux futures productions de la machine – lesquelles n’auront, pour la plupart, que beaucoup trop rarement été tenues. Les textures étaient peut-être granuleuses, les environnements un peu vides, mais à l’époque c’était la première fois – et également l’une des dernières – que les utilisateurs de PlayStation baissaient les yeux face aux capacités de la Saturn. la 3D a d’ailleurs relativement bien vieilli : c’est dynamique, c’est varié, et c’est surtout d’une fluidité totale et sans la moindre variation de framerate ; une barre placée très haut d’entrée de jeu… et qui n’aura hélas pas souvent été à nouveau atteinte.

La véritable erreur serait malgré tout de limiter Panzer Dragoon à une sorte de prouesse technique précoce n’ayant servi qu’à vendre le hardware de la console. Certes, la très longue cinématique d’introduction aura fait rêver bien des joueurs à l’époque – imaginez-vous découvrir une pareille séquence en 3D pré-calculée en sortant d’une partie sur Mega Drive ou Super Nintendo – mais il convient ici avant tout d’invoquer la formidable ambiance de l’univers.

Quand on parle de « post-apocalyptique », on tend à imaginer des déserts à la Mad Max ; avec ses lagunes et ses forêts tropicales côtoyant les ruines anciennes, le titre de la Team Andromeda évoque davantage une rencontre entre Miyazaki et Moebius, une sorte d’Arzach chevauchant un dragon en lieu et place de son inimitable volatile et évoluant au milieu des machines volantes de Nausicaä de la Vallée du Vent. Le design des personnages de Manabu Kusunoki est d’ailleurs si proche du style du célèbre illustrateur français qu’on ne peut que se montrer surpris que celui-ci ne soit crédité que pour l’illustration de la jaquette de la version japonaise du jeu ! Toujours est-il qu’il y a, dans l’atmosphère du jeu, un dépaysement particulier qui donne le sentiment d’évoluer dans un monde infini dont on ne perçoit que quelques bribes, et qui donne parfois envie de s’évader pour partir en exploration comme on pouvait parfois le ressentir aux plus belles heures de titres à la Another World.

En d’autres termes, il y a une forme de poésie visuelle et auditive dans ces ruines vénitiennes reflétées dans l’eau ou dans ces plaines balayées par le vent qui font de Panzer Dragoon une épopée beaucoup plus marquante qu’un simple jeu de tir en 3D. C’est un bon jeu, mais c’est surtout une expérience, un voyage qu’on peut ré-entreprendre régulièrement avec plaisir parce qu’il a conservé, par séquences, son caractère dépaysant et parfois même onirique. Si tous les jeux de la Saturn avaient été capable de véhiculer de telles sensations, le destin de la console de SEGA et l’issue de sa « guerre » contre Sony auraient sans doute été bien différents, mais ceci est une autre histoire…

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20 La plus grande prouesse de Panzer Dragoon n'est pas d'être un rail shooter en 3D n'introduisant finalement que très peu d'idées neuves, c'est plutôt sa capacité à le faire oublier au joueur. Porté par une ambiance à part évoquant fréquemment les plus belles planches d'Arzach, le titre de la Team Andromeda est un voyage avant d'être un jeu d'action, un simple aperçu de ce monde post-apocalyptique où les plaines minérales côtoient les ruines perdues au milieu des lagunes. Les combats épiques laissent souvent la place à de courtes respirations où on se surprend à penser, comme dans Loom ou Another World, qu'on aimerait vraiment s'échapper pour explorer le monde qui s'étend autour de notre dragon et de son cavalier, et c'est un titre auquel on aime revenir comme on aime reprendre contact, de temps à autre, avec un vieil ami. Rien d'étonnant à ce que ce premier contact avec la Saturn ait fait naître des attentes qui, dans leur grande majorité, n'auront jamais pu être comblées : la barre avait peut-être simplement été placée trop haut et trop vite. À (re)découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – Un gameplay finalement très basique – Pas toujours facile de déterminer si notre monture est bien placée pour éviter une attaque – Aucun checkpoint

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Panzer Dragoon sur un écran cathodique :

Version PC (Windows 9x)

Développeur : SEGA PC
Éditeurs : SEGA Enterprises Ltd. (Japon) – Expert Software, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Europe Ltd. (Europe)
Date de sortie : 1996 (Amérique du Nord) – 5 décembre 1996 (Europe) – 14 mars 1997 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique : DirectX : 3 – API : NV1 – Résolution : 320×240, 640×480 / 8 bits, 16 bits

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Avant d’aborder le test de cette version Windows à proprement parler, il convient sans doute de préciser que Panzer Dragoon aura existé en deux versions sur PC. La première, optimisée spécifiquement pour le chipset NV1 (très proche de celui qui équipait la Saturn), n’aura apparemment été commercialisé qu’en bundle avec la carte accélératrice EDGE 3D, et exclusivement en Amérique du Nord. Elle aura été suivie quelque mois plus tard par une version software internationale nécessitant, elle, au moins un Pentium pour fonctionner – et qui sera le centre de notre attention, la version « NV1 » étant aussi délicate à trouver qu’impossible à émuler au moment où j’écris ces lignes, la réservant de fait à une catégorie très précise de joueurs ayant à la fois la chance de la posséder et une configuration d’époque sous la main. Sans surprise, on retrouve le contenu du jeu à peu près à l’identique, même s’il semblerait que certaines cinématiques de fin du jeu aient disparu. Du côté de la réalisation, et même s’il fallait avoir un processeur très puissant pour espérer en profiter à l’époque, le jeu est jouable en 640×480 (en fait, en 640×400 avec deux grandes bandes noires) et en 16 millions de couleurs. En revanche, l’effet de brouillard qui camouflait l’apparition des polygones a été retiré, ce qui signifie que le clipping sera plutôt brutal. Évidemment, on aurait préféré que le jeu tire parti des APIs Direct3D ou Glide, mais en l’état le résultat est assez convaincant dès l’instant où l’on joue sur une configuration de type Pentium II à 200MHz. Niveau jouabilité, mieux vaudra privilégier le joystick au clavier, mais les sensations demeurent globalement identiques à celles de la version Saturn. Bref, une alternative convaincante pour ceux qui parviendront à la faire tourner.

NOTE FINALE : 16/20

Panzer Dragoon livre sous Windows à peu près la prestation à laquelle on pouvait s’attendre – c’est à dire la même chose que sur Saturn, en plus fin et en légèrement moins jouable. Dommage que le jeu ne reconnaisse aucune autre carte accélératrice que celles équipées du chipset NV1.

Keio Flying Squadron 2

Développeur : Victor Entertainment Inc.
Éditeurs : Victor Entertainment Inc. (Japon) – JVC Musical Industries Europe, Ltd. (Europe)
Titre original : 慶応遊撃隊 活劇編 (Keiou Yuugekitai : Katsugeki-hen – Japon)
Testé sur : Saturn

La série Keio Flying Squadron (jusqu’à 2000) :

  1. Keio Flying Squadron (1993)
  2. Keio Flying Squadron 2 (1996)

Version Saturn

Date de sortie : 17 mai 1996 (Japon) – Septembre 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou Saturn Backup Memory

Vidéo – L’introduction du jeu :

Parmi les titres qu’on n’aurait pas imaginé voir quitter le Japon un jour, on peut dire que Keio Flying Squadron aurait intégré sans difficulté le peloton de tête. Difficile de trouver plus japonais que ce personnage de prêtresse de quatorze ans habillée en bunny (que la version occidentale se sera d’ailleurs empressée de vieillir de six ans) à la poursuite d’un raton-laveur anthropomorphe dans un univers pétri de références culturelles globalement inaccessibles à l’européen ou à l’américain moyens – et pourtant, l’improbable avait bel et bien eu lieu, quoiqu’avec un peu de retard (le jeu avait quand même mis près de deux ans à arriver en Europe).

À la mention d’une suite, cette fois, la surprise n’allait pas jouer : qu’est-ce qui pourrait encore espérer surprendre un joueur, après le programme ô combien barré du premier opus ? Eh bien, le genre, pour commencer : là où le premier épisode était un shoot-them-up à défilement horizontal finalement assez classique une fois fait abstraction de son univers visuel, Keio Flying Squadron 2 aura tout simplement décidé de devenir… un jeu de plateforme en 2D. Un choix plus risqué qu’il n’en a l’air, surtout en 1996, où le genre commençait à connaître une sérieuse perte de vitesse… un peu comme le genre du shoot-them-up, d’ailleurs. À croire que l’équipe de Victor Entertainment aimait involontairement accompagner les fins de règne.

Pour planter le décor, rien ne vaut une cinématique animée réalisée – une fois encore – par Studio Pierrot. Devinez quoi : une nouvelle fois, une relique ancestrale dont Rami, la jeune prêtresse susmentionnée, avait la garde se fait chiper sous son nez par une obscure princesse sortie de nulle part, laquelle se la fait à son tour subtiliser par… le Dr. Pon, le méchant du premier épisode, qui a entretemps mis la main sur une carte dévoilant l’emplacement d’un trésor secret – lequel nécessite de trouver six orbes, dont l’un est la fameuse relique.

Ni une ni deux : Rami est une fois de plus priée par sa grand-mère (toujours doublée par un homme) d’aller récupérer l’orbe volé et les cinq autres dans la foulée, ce à quoi l’adolescente va s’atteler… à pied, pour la plus grande partie du jeu, ce qui est quand même un peu triste pour un jeu dont le titre est « Keio FLYING Squadron ». Alors, pour faire bonne mesure, il arrivera ponctuellement à la jeune fille de chevaucher à nouveau son dragon (ou sa dragonne dans la version européenne, laquelle n’aura visiblement pas observé les attributs de la bête sur les illustrations du premier opus…) le temps d’un stage ou deux, chacun des cinq niveaux du jeu étant divisés en plusieurs étapes. L’occasion de retrouver le Japon de l’ère Keio sous une forme historiquement assez discutable, mais pour être honnête c’est un peu toute l’idée de la série.

Pour l’essentiel, notre héroïne va composer avec une panoplie d’actions… eh bien, assez classiques : elle peut sauter sur les adversaires, ou bien ramasser les armes qu’il leur arrive de lâcher pour s’en servir, ce qui lui offrira d’ailleurs incidemment un point de vie supplémentaire (elle trépasse normalement en un coup, mais la toucher lorsqu’elle tient une arme la lui fera d’abord lâcher).

Le parapluie permet également de se protéger contre les éléments du décor et de ralentir sa chute, et l’arc l’autorisera à vaincre l’opposition à distance – Rami est également capable de soulever de lourds éléments du décor, comme le premier Astal venu, pour s’en servir comme projectiles. Lors des phases de shoot-them-up, elle retrouvera exactement les bonus et les power-up du premier opus – et même le thème musical du niveau inaugural de ce dernier ! – avec les mêmes mécanismes, ce qui signifie que là où les phases de plateforme la feront réapparaître à un checkpoint en cas de décès, elle réapparaîtra là où elle connu une fin tragique lors des phases de shoot-them-up. Bref, strictement rien de révolutionnaire, ce qui est un peu décevant pour un jeu dont on attendait un peu de folie et beaucoup d’idées.

Globalement, on sent que ce Keio Flying Squadron 2 est le digne héritier de son prédécesseur en ce que la véritable star du jeu reste son univers. De ce côté-là, la Saturn nous montre ce qu’elle a dans le ventre avec toute la panoplie, et l’univers hyper-coloré du jeu est parfaitement mis en valeur par les gros sprites, les effets de zoom et l’indéniable variété des décors et des situations.

Entre gags idiots et petites énigmes, le déroulement s’efforce de fuir la monotonie, intégrant pour l’occasion un système de score assez unique : certains ennemis, bonus et attaques vous font gagner des points, et d’autres vous en font perdre. S’atteler à avoir un score le plus élevée – ou le plus bas – possible aura ici une application concrète, sous la forme d’un menu où il sera possible de débloquer des artworks et des fiches détaillées traitant des éléments du jeu ; une motivation pour les perfectionnistes qui n’aura donc aucune incidence sur l’expérience de ceux qui préfèreront se concentrer sur la partie en elle-même sans s’embarrasser de ce type de fioritures. Toujours est-il que la réalisation met indéniablement dans le mille, et qu’on apprécie les multiples petites trouvailles, comme la présence d’un tournoi d’arts martiaux au niveau quatre ou le boss final assez… original. Au rang des déceptions, la fameuse princesse ennemie qui ne fait qu’une poignée d’apparitions et qui ne joue fondamentalement aucun rôle est clairement sous-exploitée, et l’intrigue du jeu (davantage un prétexte, certes) sent le réchauffé comparée à celle du premier épisode.

En fait, le seul véritable reproche qu’on pourrait adresser à ce Keio Flying Squadron 2, c’est d’être un jeu de plateforme qui aurait facilement pu voir le jour cinq ans plus tôt avec un gros coup de peinture. La réalisation est en 32 bits, mais pas le game design, pourrait-on dire ; non seulement les mécanismes sont hyper-basiques, mais l’aventure peut être bouclée en moins d’1H30, ce qui commençait à paraître un peu dépassé dans un univers vidéoludique où apparaissaient des Rayman – et bientôt des Super Mario 64.

Derrière son côté rafraichissant, le titre de Victor Entertainment est vraiment un représentant de la vieille école, celle qui commençait précisément à vivre son agonie sous les coups de boutoir de la 3D triomphante et qu’une bonne partie des joueurs observait déjà avec dédain comme un vestige d’un passé qu’ils avaient espéré révolu en investissant dans la nouvelle génération de consoles. Paradoxalement, cet aspect « old school » est aussi précisément ce qui fera une large partie de son charme auprès des retrogamers, qui trouveront dans son pixel art un attrait qu’ils n’accorderont pas forcément à la 3D taillée à la serpe des jeux qui triomphaient alors. « Classique » est donc un terme qui résumera parfaitement l’expérience de jeu en dépit de ses efforts pour surprendre le joueur : c’est de la bonne vieille plateforme vue et revue, mais avec une héroïne improbable dans un univers qui dépote. Parfois, c’est tout ce qu’on est venu chercher, et c’est tant mieux.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16,5/20

« Surprendre ! » Tel semble avoir été le mot d'ordre de ce Keio Flying Squadron 2 – en commençant par ne pas être le shoot-them-up que tout le monde attendait, mais bien un jeu de plateforme bona fide avec quelques (rares) séquences à dos de dragon. Comme son prédécesseur, c'est un déluge foutraque de couleurs tirant merveilleusement parti des capacités de la console, d'éléments japonisants dont on se demande encore par quel miracle ils ont pu arriver en Europe, et d'un louable souci de variété dans les situations comme dans les décors. En dépit d'un cahier des charge parfaitement rempli et d'un système de score très original, on ne peut pas s'empêcher de penser que le titre de Victor Entertainment n'est jamais tout-à-fait aussi original qu'il voudrait l'être, la faute à des mécanismes vus et revus qui, additionnés à une jouabilité un peu flottante et pas toujours très précise, rendent parfois le déroulement un peu plus fastidieux qu'il ne le devrait. Certainement pas de quoi faire fuir les amateurs, qui passeront sans doute un excellent moment d'un bout à l'autre, mais une piste pour comprendre pourquoi le genre, quels que soient ses efforts, semblait tragiquement arriver en bout de course au sein de la génération 32 bits. Divertissant, mais étrangement convenu.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une jouabilité un peu pénalisée par son aspect flottant et ses sprites énormes
– Des mécanismes usés jusqu'à la corde
– Une durée de vie vraiment chiche comparée aux nouveaux canons de la période, type Rayman

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Keio Flying Squadron 2 sur un écran cathodique :

Die Hard Trilogy

Développeur : Probe Entertainment Ltd.
Éditeur : Fox Interactive, Inc.
Titre alternatif : Jungla de Cristal : La Trilogía (Espagne)
Testé sur : PlayStationPC (Windows 9x)Saturn

La licence Die Hard en jeu vidéo (jusqu’à 2000) :

  1. Die Hard (Activision) (1989)
  2. Die Hard (PC Engine) (1990)
  3. Die Hard (NES) (1991)
  4. Die Hard 2 : Die Harder (1992)
  5. Die Hard Arcade (1996)
  6. Die Hard Trilogy (1996)
  7. Die Hard Trilogy 2 : Viva Las Vegas (2000)

Version PlayStation

Date de sortie : 31 août 1996 (Amérique du Nord) – Novembre 1996 (Europe) – 13 décembre 1996 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, italien, français, suédois
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Hyper Blaster, joypad, NeGcon, PlayStation Mouse
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (1 bloc)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il fallait bien que justice se fasse. Huit ans après sa sortie, Piège de cristal s’était avéré un tel tabac critique et commercial que le film de John McTiernan était entretemps devenu à la fois une licence et une trilogie – lesquelles rencontraient un succès qui ne se démentait d’ailleurs pas. Et à l’heure où le moindre blockbuster avait le droit à son adaptation sur à peu près toutes les plateformes vidéoludiques de la création, quel était le bilan pour ces films intitulés Die Hard au pays de l’Oncle Sam ?

À peine une poignée de titres maladroits pour le premier opus, un simple jeu de tir immonde pour 58 minutes pour vivre, et pour Une journée en enfer… rien, nib, même pas un timide jeu d’action avec des extraits du long-métrage. Pire qu’une anomalie : un scandale. Alors l’équipe de Probe Entertainment s’est avancée et, miséricordieuse, décida d’offrir non pas une adaptation tardive du dernier épisode (alors paru un an plus tôt), mais carrément… une version ludique de la trilogie tout entière. Un chœur céleste s’éleva alors tandis que résonnaient les trompettes de la renommée, mais sur terre, quelques béotiens craintifs osaient poser la question : proposer trois jeu en un seul et baptiser l’ensemble Die Hard Trilogy, n’est-ce pas le plus sur moyen de s’éparpiller et de proposer, au final, trois expériences médiocres plutôt qu’un unique bon jeu ?

Le défi est certes gonflé, et il est assumé dès le menu principal : Die Hard Trilogy ne cherche donc pas à proposer une aventure continue où l’on revivrait les passages marquants des trois premiers films (oui, il y en a eu d’autres depuis) mais propose tout simplement de jouer à trois jeux différents, chacun dédié à un opus en particulier.

Et histoire de montrer qu’il ne s’agit pas là d’un simple artifice prétendant offrir trois contenus là où il ne s’agirait en réalité que d’un seul et même jeu divisé en trois, chaque opus dispose de son moteur et de son gameplay propre, rien de moins ! Piège de cristal prendra ici la forme d’un run-and-gun à la troisième personne – un peu à l’image du très visionnaire titre de Dynamix paru en 1989 –, 58 minutes pour vivre correspondra à un jeu de tir à la première personne façon Virtua Cop – soit la direction déjà choisie par la très médiocre adaptation de 1992 – et Une journée en enfer donnera lieu… à un jeu de conduite dans un environnement ouvert ce qui, mine de rien, n’était pas exactement un concept courant trois ans avant Driver. Bref, un contenu très ambitieux, quoique ouvertement typé arcade, et qui mérite largement qu’on s’attarde indépendamment sur chacune de ses composantes.

Le menu de Piège de Cristal est peut-être le plus copieux de tous. Pas de réelle finasserie ou d’aspect réflexion/exploration malvenu ici : l’objectif est d’accompagner John MacClane sur pas moins de vingt étages du Nakatomi Plaza en l’aidant à disposer des centaines de terroristes sur son chemin – et en lui permettant, s’il le souhaite, de libérer des otages qui sont là aussi beaucoup plus nombreux que dans le film.

Le TPS n’était peut-être pas encore un genre tout-à-fait maitrisé en 1996, mais la bonne surprise est que ce jeu s’en sort très bien : notre pseudo-Bruce Willis peut faire des pas de côté, des roulades, accumuler différents types de grenades pour faire le ménage, et si les armes automatiques qu’il pourra collecter disposeront de munitions limitées, ce ne sera pas le cas de son inépuisable pistolet de départ. Chaque étage du bâtiment fonctionne de la même manière : l’idée est de tuer tous les terroristes, dont le nombre est indiqué en haut à droite, puis de filer en moins de trente seconde vers l’ascenseur pour y désamorcer une bombe avant qu’elle n’explose. En dépit de l’aspect fondamentalement redondant d’un gratte-ciel, le jeu s’efforce de varier au maximum les environnements, les étages en chantier succédant aux bureaux ou aux suites de luxe, et jouer au chat et à la souris avec des ennemis qui ont le goût d’être assez stupides pour que leur nombre ne constitue pas une force inarrêtable est particulièrement jouissif.

Les renforts ennemis débarquent régulièrement, poussant le joueur à chercher les précieux bonus de soins et autres M-16 et gilets par balle, et il ne s’agira pas ici d’une expédition emballée en vingt minutes comme pour Die Hard Arcade puisque ce simple premier jeu demandera déjà facilement deux heures pour être bouclé ! À condition d’être bon, naturellement, car non seulement votre personnage n’a que deux vies et aucun continue, mais en plus il ne faudra pas compter sur un mécanisme de sauvegarde : ce sera à faire d’un bloc, à prendre ou à laisser ! Une approche un peu extrême, surtout pour les joueurs qui n’aiment pas les longues séances de jeu, mais le gameplay est si viscéralement efficace qu’on ne voit pas le temps passer, en dépit du manque de renouvellement de l’action. En fait, c’est même si bon que ce Piège de cristal aurait largement pu être vendu seul sans que personne ne trouve rien à y redire, et aurait même constitué un des meilleurs jeux d’action de la machine. Reconnaissez que ça commence bien ! Seul regret : une visée pas toujours très précise qui pose parfois de gros problèmes lorsqu’un adversaire n’est pas exactement en face de nous ou, plus gênant, pas à la même hauteur.

En ce qui concerne 58 minutes pour vivre, la description donnée plus haut dit déjà l’essentiel : c’est un clone totalement décomplexé de Virtua Cop. La bonne nouvelle, c’est qu’il le fait très bien, en offrant une action nettement plus frénétique que celle de son modèle : ça tire et ça pète dans tous les sens, le décor est mis en miettes en même temps que les terroristes, et massacrer les passants innocents n’a d’incidence que sur le score !

Le jeu assume d’ailleurs pleinement un côté « over the top » avec un gore puéril, et quant à proposer de revivre le film, il ne s’embarrasse ici d’aucune bribe de cohérence, quitte à faire débarquer des ennemis sur les ailes d’un avion volant à haute altitude : le réalisme ? Dans un Die Hard ? Quel intérêt ? Une excellente approche qui permet à l’adrénaline de ne jamais retomber tandis que les lance-roquettes ou les fusils à pompe pullulent littéralement dans les caisses et sur les corps des ennemis, et même si les choses finissent par devenir un peu confuses et qu’on ne sait pas toujours pourquoi on gagne ou on perd un point de vie au milieu de tout ce foutoir, on s’amuse, que ce soit au pad ou au light gun – notez au passage que si l’Hyper Blaster de Konami et même la PlayStation Mouse sont reconnus, ce n’est pas le cas du GunCon de Namco, ne comptez donc pas rentabiliser le pistolet de Time Crisis ici.

Enfin, Une journée en enfer propose un programme un peu plus surprenant : de la conduite. S’agirait-il de rattraper des criminels au terme d’une course poursuite, à la Chase H.Q. ? Que nenni, le concept est encore plus direct que cela : votre mission sera de dénicher des bombes, qui peuvent être cachée dans n’importe quoi (ou n’importe qui !), grâce à la direction indiquée en haut à gauche, et de les désamorcer en les… percutant, à pleine vitesse, avant de recommencer jusqu’à la fin du niveau.

L’objectif est donc à chaque fois d’aller le plus vite possible d’un point A à un point B, en vous laissant décider du trajet optimal et en vous autorisant un écart pour aller chercher des bonus de temps, des turbos ou même pour changer de véhicule tandis que le chronomètre tourne – et le timing est sacrément serré ! Des trois jeux, c’est sans conteste le plus difficile, laissant très peu de marge de manœuvre pour passer d’une cible à l’autre, ce qui oblige souvent à connaître à l’avance la position des prochaines bombes pour avoir une chance de s’en sortir. C’est parfois frustrant, souvent injuste, pas d’une grande précision – et on aurait vraiment apprécié d’avoir une carte à consulter – mais c’est suffisamment efficace pour qu’on prenne le pli en trente secondes, et c’est assurément le titre qui se prête le mieux à une petite partie de cinq minutes sur le pouce. Bref, une nouvelle fois, il y avait sans doute matière à faire encore un peu mieux, mais la vraie surprise est surtout que ça soit aussi bon.

Car le véritable miracle de ce Die Hard Trilogy, c’est que chaque jeu pris indépendamment est déjà très satisfaisant, mais que le fait de pouvoir alterner entre les trois permet d’évacuer l’aspect intrinsèquement répétitif d’un gameplay arcade assumé d’un bout à l’autre. Exactement comme les films dont il est tiré, le jeu de Probe Entertainment a le mérite d’être un divertissement extrêmement efficace qui sait s’affranchir de tout ce qui gêne pour privilégier la pure efficacité, avec juste ce qu’il faut de spectacle et d’adrénaline pour ne jamais sentir pointer l’ennui – l’une des meilleures adaptations qu’on puisse imaginer dans le genre.

On en viendrait presque à regretter que le studio n’ait pas commercialisé trois titres indépendants offrant chacun quelques heures de plaisir en plus et des mécanismes un peu plus rodés, parce que le concept de base était à chaque fois suffisamment bon pour justifier de passer trois fois à la caisse ! En l’état, on aurait presque eu envie que le logiciel fasse parfois le choix de s’affranchir encore plus franchement des films, en proposant par exemple un mode deux joueurs qui aurait été particulièrement bienvenu dans 58 minutes pour vivre. On remarquera également quelques petits errements techniques – des grosses baisses de framerate dans ce même 58 minutes pour vivre, par exemple  ; autant de petits détails qui, mis bout-à-bout, expliquent que le titre n’écopent pas d’une note encore plus élevée, tant il dégouline d’un potentiel dont il a déjà su tirer des miracles. Mais si jamais vous cherchez un jeu d’action ludique, à la fois accessible et exigeant, avec suffisamment de variété pour vous empêcher de reposer la manette, ne cherchez pas plus longtemps : ce Die Hard Trilogy est le jeu qu’il vous faut.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 17,5/20 Adapter toute la trilogie initiée par Piège de cristal pour en faire trois jeux différents réunis en un seul ? L'ambition affichée par Die Hard Trilogy avait de quoi laisser perplexe, pour ne pas dire qu'elle faisait craindre le pire, tant on sait à quel point développer un seul jeu vidéo est déjà complexe, alors trois... Eh bien manifestement, les miracles existent, et l'équipe de Probe Entertainment, entre toutes, a été provisoirement touchée par la grâce : trois gameplay, trois approches, et les trois sont excellentes ! On est certes face à trois jeux d'arcade qui ne s'embarrassent pas de fioritures, mais cela ne signifie pas pour autant qu'ils manquent de profondeur ou d'efficacité, et le mieux est que chacun a largement matière à vous tenir en haleine pendant des heures au minimum – ne fut-ce que parce que la difficulté, elle, ne fait pas de cadeaux. Certaines séquences – le premier jeu, notamment – auraient certainement mérité un système de sauvegarde, et d'autres auraient pu bénéficier de quelques ajouts (une carte dans Une journée en enfer, au hasard ?), mais dans l'ensemble, l'action est à la fois prenante, accessible et spectaculaire et on y revient avec un plaisir toujours égal ne fut-ce que pour vérifier si on ne pourrait pas aller encore un peu plus loin. Clairement une excellente surprise, et un jeu à posséder d'urgence que vous aimiez ou non la licence.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Aucun paramétrage de la difficulté – et les jeux ne sont pas faciles ! – Piège de cristal aurait mérité un système de sauvegarde... – ...et un système de visée un peu plus précis – Quelques baisses de framerate dans 58 minutes pour vivre... – ...et une action parfois confuse – Une journée en enfer vraiment trop difficile

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Die Hard Trilogy sur un écran cathodique :

Version PC (Windows 9x)

Développeur : Probe Entertainment Ltd.
Éditeur : Fox Interactive, Inc.
Date de sortie : Septembre 1996
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, italien, français, suédois
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 16Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2x (300ko/s)
Résolutions supportées : 320×200, 320×240, 400×300, 512×384, 600×400, 640×480, 800×600

S’il existait une machine capable de rivaliser avec la PlayStation en termes de 3D en 1996, c’était bien le PC. Priver la machine de sa version de Die Hard Trilogy aurait donc sans doute été une erreur, et sur le papier, cette itération devrait être la meilleure – surtout avec la reconnaissance des premières cartes accélératrices 3D rajoutée par patch quelques mois après la sortie du jeu. On retrouve d’ailleurs toutes les options de configuration dont on pourrait rêver, avec le choix de la résolution, de la distance d’affichage des détails et le paramétrage des touches du clavier ou du joystick. Ça, c’est pour la théorie.

Dans les faits, et comme on peut s’en douter, le jeu ne tournera pas sur une version récente de Windows, ce qui signifie que vous pouvez tirer un trait sur les cartes accélératrices à moins d’avoir une configuration d’époque ou de savoir vous en tirer avec les machines virtuelles (à l’heure actuelle, je ne suis parvenu à émuler une carte accélératrice que sous PCem). Mieux vaut y arriver, car en mode logiciel, le jeu est atrocement gourmand, affiche des graphismes qui ne sont pas à la hauteur de ceux de la PlayStation même avec tous les réglages à fond (pas d’éclairage coloré ici, par exemple) – la faute, en particulier, à des personnages et mêmes des véhicules composés à partir d’un étrange mélange de 3D et de sprites. Et si vous employez toute la puissance de votre processeur moderne, là il tourne dix fois trop vite (uniquement Piège de cristal, curieusement, les deux autres jeux n’ayant pas ce problème) ! En mode accéléré, le jeu est certes plus fin, mais mieux vaut désactiver le filtrage bilinéaire pour ne pas avoir droit à une bouillie floue. L’autre (gros) problème, c’est que Windows 95 n’était pas encore pensé pour gérer des manettes à huit boutons comme celle de la machine de Sony, vous risquez donc de vous retrouver à jouer au clavier OU à la souris (non, on ne peut pas cumuler les deux sur un même jeu), pour une ergonomie pire que médiocre – les choses s’améliorent heureusement sous Windows 98. Bref, sur du matériel actuel, faire tourner le jeu dans des conditions décentes demandera un peu de métier, pour un résultat qui ne transcendera de toute façon pas ce qu’on peut trouver sur console (sauf à ne jurer que par une résolution plus élevée).

NOTE FINALE : 16/20

La note correspond ici à un Die Hard Trilogy tournant dans des conditions idéales, avec une carte accélératrice, pour profiter d’une version alors plus fine que sur PlayStation mais pas nécessairement plus belle et surtout nettement moins jouable. En revanche, sans une configuration d’époque ou une machine virtuelle bien maitrisée, vous pouvez retirer plusieurs points, à supposer que vous parveniez seulement à faire fonctionner le jeu, tant aboutir à une expérience fluide et jouable pourra s’avérer problématique de nos jours.

Version Saturn

Développeur : Virtually Unreal Ltd.
Éditeurs : Fox Interactive, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Enterprises Ltd (Japon) – Electronic Arts, Inc. (Europe)
Date de sortie : 21 janvier 1997 (Amérique du Nord) – 31 janvier 1997 (Japon) – 28 février 1997 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, italien, français, suédois
Support : CD-ROM
Contrôleurs : 3D Control Pad, Arcade Racer, joypad, Shuttle Mouse, Virtua Gun
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou Saturn Backup Memory

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour la version Saturn de Die Hard Trilogy, Probe Entertainment aura préféré laisser la main à un autre studio qui aura eu la charge de porter le jeu sur un hardware que beaucoup en occident considéraient comme inférieur à celui de la machine de Sony.

De fait, même si la casse a été relativement bien circonscrite, on sent indéniablement que cette adaptation a laissé quelques plumes : la résolution est plus basse, les modèles ont moins de polygones, certains effets ont disparu (la transparence étant un grand classique), les temps de chargement sont parfois un peu plus long, et le framerate est globalement plus bas que sur PlayStation – c’est particulièrement sensible sur la partie 58 minutes pour vivre du jeu, qui pédale dans la semoule de façon encore plus spectaculaire que chez la concurrente. La bonne nouvelle reste que ces quelques sacrifices ne pénalisent pas vraiment l’expérience de jeu (sauf pour 58 minutes pour vivre, justement) et que globalement on n’y fait plus vraiment attention au bout de cinq minutes. Dans l’ensemble, on s’amuse toujours autant, ce qui est sans doute un meilleur consensus que si le titre s’était rendu injouable en cherchant à sauver quelques polygones. Clairement un des meilleurs jeux d’action de la machine.

NOTE FINALE : 17/20

Die Hard Trilogy aura dû opérer quelques menus sacrifices sur le plan de la réalisation pour préserver l’expérience sur Saturn. Globalement, ces quelques effets et polygones en moins ne dégradent en rien le plaisir ressenti en jouant – sauf dans la partie 58 minutes pour vivre du jeu, où le framerate en chute libre peut parfois poser quelques problèmes, particulièrement en jouant au pad. Pas de quoi être trop triste de découvrir le jeu sur la console de SEGA, néanmoins.