Développeurs : Christophe Laboureau, Didier Chanfray et Charles Callet Éditeur : Infogrames Europe SA Titre alternatif :Jumping Jack’Son (écran-titre) Testé sur :Atari ST – Amiga
Version Atari ST
Date de sortie : Janvier 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Vous est-il déjà arrivé d’écouter un morceau de musique et de vous dire « Tiens, qu’est-ce que ça donnerait si on en faisait un jeu vidéo ? »
L’idée, pour incongrue qu’elle puisse paraître, n’est pourtant pas neuve. On se souvient, par exemple, de l’énorme influence qu’avait eu le Lac des Cygnes de Tchaïkovski sur le développement de Loom. Mais un des éléments qui participent à la magie du début des années 90 est l’existence de ces titres improbables, souvent réalisés par des petites équipes, et qui basaient l’essentiel de leur gameplay sur une idée plus ou moins bizarre qui ne ressemblait à rien d’autre – un domaine dans lequel les Français étaient d’ailleurs passés maîtres, à tel point que je vous mets au défi de parvenir, encore aujourd’hui, à trouver un jeu qui ressemble à un OVNI comme l’Arche du Captain Blood. On sera donc à peine surpris de découvrir qu’un groupe de trois personnes, mené par Christophe Laboureau, aura programmé en 1990 un programme inspiré d’un morceau des Rolling Stones : Jumping Jack Son.
Le pitch du jeu, comme souvent, est d’une simplicité confondante : le héros de l’aventure, une espèce de petite créature tendance punk-rock nommée Jack, vit dans une réalité où les instruments de musique classique se sont mis en tête de se débarrasser une bonne fois pour toute de ce qui représente pour eux l’hérésie absolue : la musique rock. Bien décidé à ne pas rester les bras ballants pendant qu’on s’en prend à son unique passion, Jack entreprend de collecter les vinyles (ah, quelle époque…) éparpillés dans les niveaux du jeu pour aller les replacer sur les platines dédiées – et ainsi ne pas laisser mourir le rock’n roll.
Ce prétexte aussi sympathique qu’idiot va matérialiser, mine de rien, un concept limpide et génial qui sera le socle, l’objectif et la plus grande idée du jeu : dans chaque niveau se situent des zones musicales constituées de dalles colorées. En sautillant sur chacune d’entre elles en rythme, Jack les fait changer de couleur – en même temps que ses cheveux, brillante trouvaille pour que vous puissiez voir ce qui se passe sous les pieds de votre personnage. Une fois la zone unifiée, un disque de la même couleur fera son apparition : allez le placer sur une platine au coloris équivalent, selon un mode qui évoque déjà Tiny Skweeks paru l’année suivante, et le vinyle commencera à jouer l’une des pistes musicales de Jumpin’ Jack Flash : la batterie, la basse, la guitare, etc. Activez toutes les platines d’un stage, et vous pourrez rejoindre la sortie pour passer au niveau suivant. Simple, non ?
Évidemment, histoire de pimenter un peu les choses, il vous faudra à la fois composer avec des instruments de musique hostiles bien décidés à ne pas vous laisser ressusciter le rock, et avec un level design de plus en plus complexe qui constituera le véritable aspect « réflexion » du titre. Les ennemis ont chacun leur propre façon de vous nuire : certains suivent un trajet prévu d’avance, d’autres se promènent au hasard, d’autres encore vous collent aux basques et ne vous lâchent jamais. Sachant qu’un seul contact avec eux signifie la mort, mieux vaut les éviter avec soin, où déposer une des cassettes de votre inventaire au sol pour leur bloquer la route quelques instants. Pour ce qui est du level design, le jeu se divise en deux modes de seize niveaux chacun, faisant office de niveaux de difficulté.
Si le mode « A » est relativement simple, les choses commencent à se corser à mi-chemin, quant au mode « B », il monte encore la barre d’un cran et il faudra souvent s’accrocher pour venir à bout d’un stage. Ceux-ci seront d’autant plus coriaces que, si le jeu propose un système de mots de passe tous les quatre niveaux, obtenir ceux-ci vous demandera de réussir un challenge assez compliqué d’une seule traite, faute de quoi, le précieux sésame vous échappera ! Une méthode assez fourbe pour augmenter la durée de vie – le titre n’ambitionne pas, de toute façon, de vous occuper pendant des dizaines d’heures, mais il sait se montrer largement assez addictif pour que vous puissiez nourrir l’envie de le finir.
On appréciera, par exemple, les petites trouvailles faites pour vous surprendre d’un niveau à l’autre : passages secrets, téléporteurs, tapis roulants, tout y passe, et ce qui peut parfois passer pour une promenade de santé au premier regard peut rapidement se transformer en parcours du combattant où se déplacer anarchiquement en ne comptant que sur ses réflexes est le plus sûr moyen de finir sur l’écran de game over. Le jeu compte également son lot de bonus, et si la plupart n’ont d’autre objectif que le scoring (une autre époque…), on notera également l’existence de ces juke-box qui vous faciliteront la vie en vous autorisant à transporter deux, voire trois disques à la fois là où vous ne pouvez originellement n’en porter qu’un. Bref, on a affaire à un programme bien ficelé, qu’on comprend en une poignée de secondes et sur lequel on peut s’amuser des heures.
Niveau réalisation, Jumping Jack Son ne fait pas honte à l’Atari ST : la réalisation graphique, très colorée et très agréable, fait immédiatement penser à Skweek – sans doute à cause de la vue aérienne et du système de dalles. Niveau sonore, on sera heureux de voir que la machine d’Atari s’en tire cette fois avec les honneurs, elle qui bénéficiait trop souvent d’une bande-son à peine supérieure au haut-parleur interne du PC : certes, ce n’est pas encore au niveau de ce que pouvait proposer l’Amiga, mais cela reste très au-dessus de la grande majorité du catalogue de l’Atari ST sur la période.
Le thème de Jumpin’ Jack Flash est reproduit avec soin (bon, juste quelques mesures, on se doute que les Rolling Stones n’avaient pas exactement donné leur accord….), et l’Atari ST se sort les tripes pour que la qualité de la musique fasse honneur au programme – dommage que les bruitages des divers instruments interrompent systématiquement les pistes musicales. Bref, une très bonne pioche dans la catégorie « jeux comme on n’en fait plus », largement apte à vous faire passer un très bon moment. Que demander de plus ?
Vidéo – Cinq minutes de jeu :
NOTE FINALE : 15/20
Ni tout à fait un jeu d'action, ni complètement un jeu de réflexion, Jumping Jack Son réunit les influences les plus improbables, depuis Skweek jusqu'aux Rolling Stones, pour proposer un de ces logiciels inimitables comme seules les années 80-90 savaient en offrir. Grâce à un principe ingénieux et plus profond qu'il en a l'air, le titre offre une expérience plaisante qui saura mettre à contribution vos réflexes sans délaisser pour autant votre matière grise. On aurait volontiers rempilé pour davantage de niveaux, davantage d'idées – et davantage de thèmes musicaux, tant qu'à faire, parce qu'on fait rapidement une indigestion de Jumpin' Jack Flash – mais pour s'amuser quelques heures avec un jeu qui ne ressemble pas à grand chose d'autre, le contrat est parfaitement rempli. Encore un titre étonnant à (re)découvrir.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– On aurait apprécié plus de 32 niveaux
– Dommage que le mode deux joueurs soit en alternance - il y avait sans doute un concept à creuser
– Les niveaux permettant d'obtenir les mots de passe sont parmi les plus durs du jeu...
– Avec un peu plus d'ambition, le jeu aurait vraiment pu laisser une trace indélébile dans l'histoire du jeu vidéo
Les avis de l’époque :
« Voilà un petit jeu d’action amusant. L’idée est originale et la réalisation sympathique. J’en ferais quelques parties avec plaisir, mais je pense que l’on risque de s’en lasser assez rapidement. Ce n’est pas aussi ludique que Skweek, ni aussi intéressant que Bombuzal. »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°78, Mai 1990, 15/20
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Jumping Jack Son sur un écran cathodique :
Version Amiga
Développeurs : Christophe Laboureau, Stéphane Picq, Damien Petit et P. Sciro
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mai 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : OCS/ECS Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme la quasi-totalité des jeux développés sur Atari ST, Jumping Jack Son était destiné à sortir sur Amiga un jour ou l’autre – ce qui fut fait quelques mois plus tard. Sans surprise, le contenu du jeu n’a pas changé d’un iota, et on retrouve toujours les deux modes de difficulté avec le système de mots de passe, le mode démo et le mode deux joueurs en alternance.
Du côté graphique, on se retrouve avec un calque fidèle de la version Atari ST, qui était déjà très agréable à l’œil, on ne s’en plaindra donc pas. En revanche, on sait que s’il était un domaine où l’Amiga pouvait faire la leçon à tout le monde en 1990, c’est bien le son. On retrouve d’ailleurs aux crédits de ce portage un certain Stéphane Picq, dont le nom ne manquera pas de tirer une larme aux nostalgiques de Dune. Et de fait, pour un titre reposant sur la musique, on est très heureux de profiter des capacités de la puce Paula : le son ne crache plus comme sur ST, et les différentes pistes peuvent désormais se superposer sans heurts et sans être interrompues par les bruitages. À noter également que si l’écran-titre reprend sans vergogne Jumpin’ Jack Flash, les platines en jeu offrent une partition différente qui rend le thème musical bien moins répétitif – ce qui est un gros plus. La maniabilité, elle, est toujours irréprochable.
NOTE FINALE : 15,5/20
Sans révolutionner en rien tout ce qui avait fait le sel de la version ST, Jumping Jack Son sur Amiga a le bon goût de tirer intelligemment parti des capacités sonores de la machine de Commodore pour offrir une partition de qualité supérieure – ce qui, dans un titre largement basé sur la musique, est très appréciable. Rendu plus agréable que jamais par des thèmes entrainants et un son qui ne crache plus, ce portage en devient légèrement meilleur que la version originale, et reste sans conteste le meilleur moyen, aujourd’hui, de découvrir le très sympathique titre de Christophe Laboureau et son équipe.
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et deux boutons
Version testée : Version américaine, B-Board 89624B-2
Hardware : Capcom Play System (CPS) Processeurs : Motorola MC68000 10MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz Son : Haut-parleur ; YM2151 OPM 3,579545MHz ; OKI MSM6295 ADPCM 1MHz ; 1 canal Vidéo : 384 x 224 (H) 59.637405 Hz
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Les joueurs les plus curieux, au sein de la génération actuelle, se seront peut-être posés un jour, au gré de longues minutes de désœuvrement solitaire, les questions les plus étranges, comme : « Qu’est-ce qu’un minitel ? », « Est-ce que les oiseaux transpirent ? », ou bien « À quoi pouvaient bien ressembler les jeux qui impressionnaient tout le monde il y a trente ans ? »
En ce qui concerne cette dernière question, la réponse demande d’imaginer une époque où les machines domestiques étaient supplantées par les bornes qu’on trouvait dans les salles d’arcade. Si jouer à un jeu de rôle de légende ou à un jeu de stratégie d’exception pouvait sans difficulté être réalisé sur Amiga, Atari ST ou même parfois sur Apple II, du côté de la plateforme, du jeu d’action, du shoot-them-up ou du défouraillage défoulatoire tous azimuts, la réponse n’était tout simplement pas du côté des ordinateurs de bureau et à peine du côté des consoles de salon. À la fin des années 80, ce n’était un mystère pour personne : le joueur qui voulait réellement en prendre plein les yeux et les oreilles devait se munir d’un peu de monnaie et partir s’essayer à Double Dragon, à Operation Wolf ou à Strider dans une salle près de chez lui.
Strider, justement, n’est pas seulement le jeu qui nous intéresse aujourd’hui – ce fut aussi un grand succès de l’arcade, du type même qui faisait dire à n’importe quel joueur coincé sur son Commodore 64 ou sur son ZX Spectrum : « Bon sang, ce que j’aimerais pouvoir jouer à un truc pareil chez moi ». Pourquoi ? Eh bien c’est la question à laquelle nous allons nous intéresser à présent.
Le scénario, pur produit de la fin des années 80, vous place dans un futur (pas trop) éloigné, en 2048 pour être précis. Le Grand Maître Maléfique communiste Meio règne d’une main de fer depuis sa base en Russie communiste, afin de dominer l’univers en érigeant un tyrannie mégalomane communiste. Heureusement, un grand héros pas communiste du tout nommé Hiryu, Strider de classe A (comme la Mercedes du même nom), approche en deltaplane du territoire communiste afin de vaincre une bonne fois pour toutes le maléfique représentant du communisme qui menace le monde pas communiste.
Si je me permets d’insister lourdement sur ce contexte politique à peu près aussi fin qu’une cuisse de rugbyman, c’est pour bien réinscrire Strider dans une période reaganienne décomplexée, où tous les héros de la pop culture, de Rambo à Chuck Norris jusqu’aux ninjas de chez Capcom, finissaient invariablement par aller affronter la menace rouge avec une évidence tellement aveuglante qu’elle se passait généralement d’explications plus complexes que la bonne vieille opposition bien/mal transformée en USA/URSS. Loin d’être anecdotique, ce contexte se retrouve immédiatement en jeu, avec des paysages moscovites futuristes, des robots à chapka, des interventions cinématiques d’une espèce de Gorbatchev de pacotille, et même un premier boss qui prend la forme de la Douma russe réunie pour se muter en dragon équipé d’une faucille et d’un marteau ! Une autre époque, et pas seulement sur le plan technologique…
Bon, mais ceci dit, on parle d’un jeu d’action/plateforme, alors sur le plan ludique à proprement parler, qu’en est-il ? Vous contrôlez bien sûr le Strider Hiryu, sorte de ninja futuriste, équipé d’une épée et de pas grand chose d’autre. Le gameplay, simplissime, n’emploie d’ailleurs que deux boutons : un pour sauter et l’autre pour frapper – utiliser le bouton de saut en étant accroupi vous permettra également de réaliser une glissade qui saura se montrer utile à plusieurs reprises. Est-ce à dire qu’il s’agit là de toute l’étendue de vos capacités ? Pas tout à fait : votre Strider est un adepte de la varappe.
Non seulement escalader un mur ne lui pose aucun problème, mais sauter d’une paroi à une autre se fait d’une façon encore plus simple que dans le Batman de Sunsoft, puisqu’il n’y aura aucune forme de timing à respecter. Mieux encore : votre personnage peut directement s’accrocher aux plateformes par en-dessous, et grimper sur elles d’une simple pression du stick. Mine de rien, cette simple trouvaille permet au jeu de se montrer un tantinet plus imaginatif dans le level design, et la mobilité va rapidement devoir devenir une seconde nature dans des environnements qui risquent de vous demander de vous faufiler à peu près n’importe où pour progresser.
Il devient alors beaucoup plus évident d’imaginer ce qui a pu emballer les joueurs à l’époque de la sortie du jeu : enchainer les saltos, rebondir sur les murs s’accrocher au plafond – ou au sol, car il vous arrivera à plusieurs reprises de devoir composer avec une gravité inversée – le tout en jonglant entre les piques, les mines, les soldats et les robots, sans oublier une espèce de chasseur de primes fortement inspiré de Bobba Fett, cela changeait un peu de Super Mario. Il est également possible de ramasser plusieurs bonus, comme ces espèces de drones qui vous aideront à faire le ménage, ou surtout un sabre king size qui améliorera drastiquement votre allonge.
Le gameplay est extrêmement dynamique, et se monte toujours aussi aisé à prendre en main – même si l’imprécision de vos différentes cabrioles risque parfois de vous faire mordre votre stick, d’autant que le jeu est à peu près aussi difficile qu’il est court (comptez une vingtaine de minutes pour en voir le bout). Les moments d’accalmie sont très rares, et vous demandent généralement de composer avec des pièges mortel qui auront de grandes chances de vous coûter quelques pièces la première fois que vous les rencontrerez, bref, on est bien face à un jeu d’arcade.
Le deuxième aspect emballant, pour un joueur de 1989, est à chercher du côté de la réalisation : pour l’époque, pas d’erreur, ça en jetait. Entre les sprites gigantesques, l’abondance de boss et de sous-boss, le côté spectaculaire de votre personnage qui ne peut pas faire un saut sans partir en salto et le petit aspect « mise en scène » (comme lorsque la Douma évoquée plus haut se transforme en dragon), on en prenait vraiment plein les mirettes – un aspect qui jouera certainement moins auprès du joueur moderne, qui trouvera au mieux le titre graphiquement sympathique, sans plus. Au niveau musical, on retrouve les sonorités « made in Capcom » qu’on trouvait déjà dans des titres comme Willow, et sans être ébouriffants, certains thèmes ont une fâcheuse capacité à vous rester dans le crâne un sacré bout de temps.
Que reste-t-il, alors, de la claque ressentie par les joueurs de la fin des années 90 ? Pas grand chose, pour être honnête : on est face à un jeu efficace mais imprécis, souvent bordélique et très court, dont la difficulté monte rapidement en flèche et qui nécessitera un peu de pratique pour ne pas se ramasser lors de scènes de plateforme pas toujours très lisibles. Une très bonne occasion de retrouver exactement ce qu’on cherchait en arcade à l’époque, à savoir le plaisir instantané et un gameplay basé avant tout sur les réflexes, mais rien qui n’ait été repris des milliers de fois, et souvent en mieux, depuis. Une curiosité à découvrir pour votre culture générale plus qu’un indispensable.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
Récompenses :
Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleure adaptation d’arcade – Versions Amiga, Atari ST et CPC
NOTE FINALE : 14/20
Perçu à sa sortie comme une véritable claque qui vous en mettait plein les yeux tout en vous chargeant d'adrénaline grâce à son action frénétique, Strider doit aujourd'hui composer avec une concurrence qui s'est énormément développée en trente ans. En dépit de quelques aspects originaux comme la capacité de votre personnage à s'accrocher partout, le titre de Capcom délivre aujourd'hui une expérience qui peine énormément à surprendre, et qui se montre aussi brève qu'elle est intense – et exigeante. En un mot, un parfait titre pour mettre votre habileté à l'épreuve sans vous embarrasser avec une prise en main nécessitant plus de deux boutons. Un assez bon représentant de ce qu'on espérait trouver en se rendant dans une salle d'arcade à l'époque.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Difficulté arcade : attendez-vous à mourir souvent
– Cinq niveaux, vingt minutes de jeu : le titre est vraiment court
– L'aspect « plateforme » n'est pas toujours extrêmement précis
– Le sous-texte politique ne plaira pas nécessairement à tout le monde
Version Amiga
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Tiertex se sera occupé du portage de la quasi-totalité des versions de Strider, et ce dès 1989 – on se doute donc que le travail a été fait assez rapidement. Et c’est en lançant la version Amiga – alors la machine la plus adaptée pour transcrire un succès de l’arcade – qu’on comprend immédiatement pourquoi les joueurs de l’époque étaient impressionnés par ce qu’ils voyaient sur les bornes d’arcade. Dire que la réalisation a perdu de sa superbe est en effet un euphémisme, et pourtant, tout le monde trouvait cette version magnifique à sa sortie. Avec le regard du joueur du XXIe siècle, le constat est cruel : c’est très sombre et affreusement pixelisé, la faute à une interface qui vient bouffer la moitié de l’écran à elle seule. Le jeu est toujours jouable, bien que sensiblement plus lent, mais on est très loin de la frénésie originale. Les thèmes musicaux sont travestis sans génie plutôt que repris (au moins peut-on profiter de la musique en même temps que des bruitages, bon point), la plupart des pièges ont été revus pour être plus dangereux – mais ils sont également plus simples à éviter. Et le jeu en lui-même a été expurgé de nombreuses séquences fortes : les murs du niveau quatre ne se rapprochent plus, les phases a gravité inversées sont en grande partie passées à la trappe – le générateur du niveau trois est heureusement toujours présent. En dehors de tous ces défauts, il faut reconnaître qu’on s’amuse encore en jouant, mais on sait également avec le recul que l’Amiga était capable de faire infiniment mieux que ça – il suffit de voir Shadow of the Beast sorti la même année.
Ceci n’est pas une version 8 bits
NOTE FINALE : 11/20
Strider sur Amiga est très, très loin de la version arcade, la faute à une interface envahissante et à un manque d’ambition assez navrant. Oubliez la claque graphique et l’action débridée : on se retrouve désormais avec un petit jeu de plateforme très sage, moins maniable mais plus simple, dont on fait le tour affreusement vite. On comprend mieux, après dix minutes de jeu, ce qui pouvait faire rêver les joueurs d’alors en entrant dans une salle d’arcade : l’informatique de salon était encore à des kilomètres de pouvoir rivaliser.
Les avis de l’époque :
« La réalisation de Tiertex est exemplaire : graphisme, animation, scrolling multi-directionnel et bande sonore, tout est irréprochable. Souvent, des graphismes d’une telle qualité sont réalisés au détriment de la rapidité et de l’animation et, plus grave encore, la jouabilité n’est pas toujours à la hauteur. Mais ce n’est pas le cas de The Strider qui est un jeu difficile, mais parfaitement jouable du début à la fin du soft. (…) The Strider est une grande conversion d’arcade qui mérite de figurer parmi les plus grands succès de l’année. »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°70, Octobre 1989, 18/20
Version Amstrad CPC
Développeur : Tiertex Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko Possibilité de redéfinir les touches
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Pas besoin d’être un génie pour comprendre que, afin de parvenir à sortir autant de portages d’un même jeu sur toute une gamme de systèmes 8 et 16bits n’ayant rien à voir entre eux en aussi peu de temps, U.S. Gold a utilisé la bonne vieille méthode du « ce sera la même version pour tout le monde et on verra bien comment on réussit à faire rentrer ça sur le support ». On ne sera donc pas surpris de trouver sur CPC une version reprise à 95% du ZX Spectrum. Oui, c’est moche, oui, les décors sont limités la plupart du temps à un vaste fond noir, oui, le CPC était capable de mieux que ça et non, ce n’était vraiment pas la peine de rajouter de grandes bandes noires autour de la surface de jeu : on commence vraiment à avoir l’impression de jouer sur un timbre-poste. Les seules différences avec la version 16 bits proviennent donc de l’absence de musique en jeu (on n’aura droit qu’à un jingle entre les niveaux) et à la simplification de plusieurs parties des stages – beaucoup de pièges sont ainsi purement et simplement passés à la trappe, si j’ose dire. Côté jouabilité, ce n’est pas extraordinaire, mais le titre délivre plus ou moins l’expérience à laquelle on pouvait s’attendre sur la machine d’Amstrad : on avance, on saute, on tape, et c’est rarement très complexe. Bref, le monument de l’arcade s’est transformé en petit jeu popcorn.
Vous comprenez mieux, à présent, pourquoi la version arcade faisait rêver?
NOTE FINALE : 07/20
Avec un jeu déjà décevant sur ordinateurs 16 bits, on ne s’attendait pas à des miracles sur CPC. Sans surprise, porté sur la machine d’Amstrad, Strider est devenu un ersatz de la version Amiga, soit le portage édulcoré d’une adaptation déjà fainéante. C’est toujours à peu près jouable, mais on ne peut pas dire que ça ait encore grand chose à voir avec l’expérience de jeu que procurait la version originale. Autant dire un jeu d’action/plateforme comme la machine en avait déjà des dizaines.
Les avis de l’époque :
« Strider est un grand jeu d’arcade et il faut bien reconnaître que la version CPC est très réussie. Le graphisme est excellent, en dépit d’un manque de variété dans les couleurs, et le scrolling multidirectionnel est surprenant. Quelques scènes ont disparu et il n’est pas possible de faire des glissades avant, mais le jeu reste le même, pour l’essentiel notamment les sauts périlleux de Strider qui sont vraiment très spectaculaire (sic). »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°71, Novembre 1989, 18/20
Version Atari ST
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
En règle générale, on sait à quoi s’attendre avec un portage sur Atari ST, et la réponse pourrait tenir en une phrase : « Voir la version Amiga ». C’est à peu près le menu ici, même si comme souvent l’Atari ST offre également une réalisation sonore un peu moins aboutie et un défilement légèrement moins fluide – mais assurément pas de quoi se relever la nuit. Bref, si vous voulez absolument jouer sur Atari ST, vous savez à quoi vous attendre ; dans n’importe quel autre cas de figure, vous serez mieux avisé de lancer la borne d’arcade.
Ça ressemble à l’Amiga, et c’est pour ainsi dire quasiment la même chose
NOTE FINALE : 11/20
C’est Strider, c’est sensiblement la même chose que sur Amiga, et ça a toujours aussi mal vieilli sur le plan technique. Pour le reste, le portage demeure relativement jouable, mais vu le nombre d’alternatives qualitativement supérieures, on réservera quand même cette version aux passionnés de la machine d’Atari.
Les avis de l’époque :
« En découvrant cette petite merveille sur Amiga, l’une des premières choses qui me soit venue à l’esprit était qu’il serait étonnant qu’on puisse faire aussi bien sur ST. Eh bien c’est faux, là encore Tiertex a fait des miracles. La bande sonore est moins performante et le scrolling à peine plus saccadé, mais globalement, c’est aussi superbe. Un must. »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°70, Octobre 1989, 18/20
Version Commodore 64
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Après un portage raté sur CPC, c’est avec une certaine méfiance qu’on accueille ce Strider sur C64… Et on a peut-être tort, car il est évident dès les premières secondes que la réalisation et très supérieure : graphismes plus colorés, animation mieux découpée, et une chouette musique présente en jeu – on est bien plus proche des versions 16 bits que de la bouillie constatée sur CPC. Malheureusement, le tableau n’est pas non plus totalement idyllique : si le jeu est toujours jouable, il a été amputé d’énormément de choses : impossible de s’accrocher aux plateformes par en-dessous, plus de loups en Sibérie, beaucoup de pièges ont disparu, les gardes peuvent maintenant vous tirer dessus – ce qui vous oblige à abuser de la glissade… Plus grave : la Douma du premier niveau et son dragon communiste ont désormais purement et simplement disparu, tout comme une grande partie des scènes marquantes du jeu. Et pour ne rien arranger, la difficulté est délirante : les tirs adverses vont dix fois plus vite que vous, et ils sont pratiquement impossibles à éviter. On se retrouve donc avec un titre très différent de la version arcade, ce qui n’est pas vraiment une surprise, mais on comprend aisément que les joueurs de l’époque aient eu envie d’y croire à mort.
L’essentiel est toujours à sa place, mais on a quand même perdu pas mal de choses en route
NOTE FINALE : 10/20
Strider sur Commodore 64 ne peut évidemment prétendre s’approcher de la version arcade, mais il humilie aisément le portage sur CPC et délivre une expérience, certes largement amputée de son contenu, mais qui a le mérite d’être jouable et relativement prenante – quoi que difficile pour de mauvaises raisons. Dommage que le titre n’offre pas la totalité de l’expérience originale, il en avait les moyens.
Version PC (DOS)
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25 et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 Modes graphiques supportés : CGA, EGA Carte sonore supportée : Haut-parleur interne
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme les joueurs de la vieille génération le savent bien, la place du PC au sein des machines de jeu à la fin des années 80 était simple à décrire : bon dernier. Alors que les cartes sonores commençaient à apparaître, et que des titres comme Budokan ou Mean Streets tiraient déjà parti du VGA, Strider se charge de nous rappeler immédiatement à quoi pouvait ressembler le cahier des charges pour un portage de l’arcade vers le PC en 1989 : 16 couleurs, haut-parleur interne, et impossible de reconfigurer les touches (qui n’ont même pas l’intelligence de tirer parti des flèches). Sans surprise, c’est tellement moche qu’on a presque l’impression de jouer à la version CPC, la jouabilité est inutilement alourdie par cette configuration imposée au clavier (fort heureusement, les choses se passent mieux au joystick), et l’ambiance sonore se limite à quelques « bips » en guise de bruitage. Bref, nostalgie ou curiosité mises à part, c’est strictement sans intérêt pour un joueur du XXIe siècle. Allez hop, poubelle.
Ça fait rêver, hein ?
NOTE FINALE : 08/20
Au rang des vrais portages feignants, Strider sur PC renvoie la machine d’IBM à un rang inférieur aux ordinateurs 8 bits en proposant cette version hideuse, silencieuse et jamais pensée pour être jouable. C’est lent, poussif et même pas à la hauteur de ce que proposait le C64 – difficile d’imaginer que Wing Commander sortirait sur la même machine moins d’un an plus tard. Bref, une pièce de musée chargée de rappeler aux générations futures cette époque oubliée où le PC n’était bon qu’à faire rire tout le monde – sauf ses possesseurs.
Version ZX Spectrum
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joysticks Kempston et Sinclair
Version testée : Version disquette testée sur sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko* *Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko
C’est… plutôt spartiate
Sorti également sur l’ordinateur de Sinclair, Strider y livre à peu près la prestation que l’on pouvait craindre, à savoir celle de la version CPC en plus moche – mais aussi en plus jouable. Cette fois, pas de chichis sur les couleurs : il n’y en a pas. Ou plutôt, les quatre seules couleurs visibles en-dehors du blanc sont cantonnées à l’interface, un choix que l’on qualifiera de « triste ». Autant dire que, graphiquement parlant, le jeu pique sévèrement les yeux, mais force est de reconnaître que l’animation est détaillée et que ça tourne beaucoup mieux que sur la machine d’Amstrad. Surtout, cette version a le mérite de ne connaître aucune des coupes de la version Commodore 64 : le boss du niveau un est bien là, tout comme les loups en Sibérie. Niveau musical, passé l’écran-titre, c’est le silence le plus total.
NOTE FINALE : 08,5/20
Poussé au maximum de ses capacités, le ZX Spectrum n’était déjà pas un monstre de technologie, alors quand on y développait des jeux dans l’urgence et sans aucune ambition… Strider reste jouable, avec un contenu honnête, et éveillera sans doute une lueur nostalgique dans le regard des utilisateurs de la machine de Sinclair mais, passé la curiosité, difficile de voir comment un joueur du XXIe siècle pourrait trouver un quelconque intérêt dans cette version.
Version Mega Drive
Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 29 septembre 1990 (Japon) – Novembre 1990 (États-Unis) – Mai 1991 (Europe)
Bien avant le lancement de la Neo Geo, c’était la Mega Drive qui avait l’ambition de représenter l’arcade à domicile. Il faut avouer qu’après ses errements initiaux, la 16 bits de SEGA avait su proposer, dans les mois suivants sa commercialisation, des transcription très fidèles de grands succès comme Golden Axe, Outrun ou Altered Beast – tous des jeux SEGA, naturellement. Lorsque Capcom avait pour la première fois débarqué sur la Mega Drive (en laissant néanmoins aux programmeurs de SEGA la charge d’assurer eux-mêmes le portage) avec Ghouls’n Ghosts, les joueurs avaient commencé à se frotter les mains à l’idée d’accueillir d’autres succès de l’arcade. Dans les faits, ils ne se seront pas nécessairement bousculés au portillon, mais en plus de titres comme Forgotten Worlds ou MERCS, la console de SEGA aura bel et bien accueilli Strider – qui représente, au passage, un des meilleurs portages du genre.
Ah oui, tout de suite, on s’y croit plus
Oh, certes, les sprites sont parfois un tout petit peu moins imposants, la palette de couleurs est légèrement moins étendue, les dégradés sont moins fins, et les digitalisations sonores qui accompagnaient les scènes placées entre les niveaux ont disparu (sauf dans la version japonaise). Mais je vous garantis que n’importe quel joueur de 1990 n’y voyait que du feu : Strider sur Mega Drive, c’était la borne d’arcade dans une cartouche, point barre. Il faut reconnaître que ce portage boxe dans une toute autre catégorie que ce qu’avaient pu offrir l’Amiga ou l’Atari ST : loin du simple ersatz pour faire « comme si » vous jouiez à la borne d’arcade, la version Mega Drive de Strider vous délivre exactement les sensations de l’original sur CPS-1, ainsi qu’un contenu qui n’a été amputé d’aucun détail, animation ou scène forte. Bref, c’était absolument bluffant – et un nouvel argument massue pour vendre la 16 bits flambant neuve de chez SEGA sur le vieux continent à sa sortie.
Pas de coupe dans cette version – vous aurez le droit à tous les morceaux de bravoure !
NOTE FINALE : 13,5/20
Strider sur Mega Drive a beau être légèrement inférieur à la version arcade, il faut vraiment commencer à placer les deux versions côte à côte pour distinguer les différences. Paru sur une machine encore en début de vie, le portage du titre de Capcom hurle son ambition, au point d’avoir largement contribué à placer d’entrée de jeu la machine de SEGA dans la cour des grandes. Si le jeu ne décrochera plus la mâchoire de personne aujourd’hui, cette version reste de très loin l’une des plus fidèles à l’arcade, et une excellente alternative pour découvrir le titre. Un coup de maître.
Les avis de l’époque :
« Les versions Amiga et ST de Strider sont réussies, mais elles ne peuvent en aucune façon soutenir la comparaison avec celle de la Megadrive. Le jeu est bien sûr en plein écran et les sprites sont de grande taille, comme dans le jeu d’arcade. De plus, les magnifiques décors sont très soignés et le scrolling différentiel est fluide. (…) Une grande conversion d’arcade. »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°83, Novembre 1990, 18/20
Version Master System
Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Juin 1991 (États-Unis) – Novembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
En 1991, La Master System n’était pas au mieux de sa forme mais elle se portait encore bien, merci pour elle. L’idée d’y porter un jeu comme Strider, à présent que les développeurs avaient eu le temps d’apprendre à maîtriser la bête, pouvait ressembler à un bon moyen de montrer ce que la petite 8 bits de SEGA avait encore dans le ventre. Malheureusement, SEGA était occupé avec la Mega Drive, et c’est donc Tiertex qui aura hérité du bébé. Graphiquement, c’est déjà assez limite – même si ça n’est pas à des kilomètres des versions parues sur ordinateur, dont cette adaptation est d’ailleurs assez proche, et pour cause. En revanche, l’animation est d’une lenteur à pleurer, et les sauts en particuliers donnent l’impression d’être effectués en slow motion. Du côté de l’action, ça n’est pas beaucoup plus trépidant, avec un adversaire tous les cinq écrans, et le même thème musical répété en boucle pendant tout le stage finit par coller une migraine. Ajoutez des adaptations assez malheureuses, comme le fait que n’importe quel ennemi puisse désormais vous tirer dessus, et que la réactivité des commandes soit à la hauteur de l’animation, et vous mesurerez la différence avec la version Mega Drive – c’était peut-être ça, l’objectif de ce portage, en fin de compte.
Bon… Après la Mega Drive, ça fait bizarre, mais on a déjà largement vu pire
NOTE FINALE : 09/20
Strider sur Master Sytem est un cruel symbole du passage de relai entre la Mega Drive et sa grande sœur : techniquement dépassé, ludiquement sans grand intérêt, ce portage aurait sans doute grandement bénéficié des mêmes choix que ceux effectués sur la version NES. Malheureusement, le titre ressemble davantage à une caricature du succès de Capcom qu’à une adaptation. À oublier.
Les avis de l’époque :
« Au premier abord, le jeu a l’air intéressant, avec de bons sprites et des scrollings en arrière-plan. Mais dès les premières minutes, la médiocrité du système de contrôle saute aux yeux. Le jeu est lent et présente de véritables inconvénients : Strider n’est pas rapide et ne résiste pas aux tirs ennemis. »
Julian, Consoles + n°0, Juillet-Août 1991, 67%
Version Sharp X68000 Strider Hiryū
Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 27 novembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus) / japonais (narration)
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version japonaise
Configuration minimale : –
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Curieusement, Strider aura attendu la fin de l’année 1992 pour daigner arriver sur Sharp X68000 – un choix d’autant plus surprenant que le CPS1 qui faisait tourner la borne était lui-même bâti sur une architecture proche du Sharp X68000 (même s’il est également possible que cette prétendue proximité entre les deux hardwares soit en grande partie un mythe, je laisse les experts débattre de la question)… Capcom étant aux commandes, on n’aura heureusement pas de mauvaises surprises à la Tiertex ici. En-dehors d’un menu des options qui vous permettra de régler la difficulté et de choisir le nombre de vies, on se retrouve ici face à un portage très proche de la version arcade – ou en tous cas, de la version arcade japonaise, ce qui signifie que les voix digitalisées signent leur grand retour, y compris le cri très énervant que pousse Strider à chaque fois qu’il frappe, c’est à dire cinquante fois par minute. Graphiquement, on sera surpris de constater quelques manques (les étoiles du premier niveau ont par exemple disparu, ne me demandez pas pourquoi) et surtout une surabondance d’effacements de sprites (la borne en connaissait quelques-uns, mais rien de comparable). Une fois n’est pas coutume, on ne se retrouve donc pas avec une version qui enterre toutes les autres – le jeu est certes bien meilleur que toutes les adaptations sur ordinateur, mais difficile de le placer au-dessus de la version Mega Drive, qui avait certes placé la barre très haut.
Graphiquement, on se croirait presque sur arcade – si les étoiles n’avaient pas mystérieusement disparu
NOTE FINALE : 13,5/20
Pour une fois, les joueurs européens n’auront pas à pleurer des larmes de sang de n’avoir jamais pu approcher un Sharp X68000 : ce portage de Strider Hiryū est certes très proche de l’arcade, mais pas tout à fait à sa hauteur, et il n’y a vraiment pas de quoi revendre sa cartouche Mega Drive pour aller investir dans cette version du jeu. Du travail correct, mais on sent que Capcom ne s’est pas foulé outre mesure.
Version PC Engine CD Strider Hiryū
Développeur : Dice Co., Ltd.
Éditeur : NEC Avenue, Ltd.
Date de sortie : 22 septembre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus) / japonais (narration)
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Arcade Card supportée
Vidéo – L’introduction du jeu :
On aurait pu penser qu’en 1994, à un moment qui correspondait au début de la fin pour la génération 16 bits, il était un peu tard pour songer à adapter Strider sur la PC Engine. Ce n’était visiblement pas l’avis de Capcom, qui réalisa un peu tard que le jeu n’avait pas encore honoré la console de NEC de sa présence (le fait qu’une version Super Nintendo n’ait jamais vu le jour a d’autant plus de quoi interroger, surtout quand on sait à quel point Capcom aimait à développer pour cette machine). À un moment où tous les yeux étaient déjà tournés vers la PlayStation et la Saturn, le titre débarqua donc sur PC Engine CD. Et histoire de justifier l’attente (et de remplir un peu le support), il décida d’arriver avec quelques arguments, mais jugez plutôt.
Graphiquement, le jeu ne fait pas honneur à la machine
CD-ROM oblige, ce StriderHiryū arrive avec sa part de scènes cinématiques en introduction, bien sûr, mais aussi entre les niveaux – et même pendant les niveaux puisque chaque boss ou mini-boss se sentira désormais obligé de vous sortir son petit speech introductif en voix digitalisées avec son portrait sous forme de vignette. Un choix qui casse un peu le rythme, mais qui a l’avantage de soigner l’enrobage tout en détaillant l’univers du jeu à ceux qui auront la chance de comprendre le japonais. Histoire de ne pas s’arrêter là, le titre propose également une musique réenregistrée, avec des version orchestrales très fidèles aux thèmes originaux mais de bien meilleure qualité. Et pour achever tout le monde, cette version bénéficie même d’un niveau supplémentaire, situé dans le désert, et venant s’intercaler à la suite du premier stage histoire de gonfler encore un peu la durée de vie du jeu. Bref, ça commence à avoir toutes les caractéristiques de la version ultime…
Le niveau supplémentaire est le bienvenu, même s’il n’a rien d’inoubliable
Sauf que voilà, l’équipe de Dice pêche précisément par les deux aspects qui avaient fait la notoriété de la version arcade : la jouabilité et la réalisation graphique. La PC Engine avait largement eu l’occasion de prouver, en 1994, qu’elle était tout à fait capable de rivaliser techniquement avec la Mega Drive dans bien des domaines, à plus forte raison face à un portage de 1990.
L’action est poussive
Malheureusement, entre la résolution limitée et une palette de couleur mal choisie, on sent immédiatement que cette version ne joue pas dans la même cour. Ce ne serait pas trop grave si la jouabilité n’était pas aussi raide, avec des masques de collision ratés et des sauts qui sortent mal, et dans l’ensemble on a souvent les pires difficultés pour amener notre héros là où on pensait le faire. Autant dire qu’une fois le pad en mains, on déchante un peu, et on se dit que tout ce contenu bonus ne pèse finalement pas très lourd à partir du moment où le jeu est moins amusant à jouer. Ceci dit, si la curiosité vous pousse vers cette version, il est certainement possible de dompter son maniement assez particulier avec un peu d’entrainement, mais ce n’est certainement pas la meilleure itération pour découvrir le jeu.
« Quand on tire on raconte pas sa vie ! »
NOTE FINALE : 12,5/20
Bilan contrasté pour Strider Hiryū sur PC Engine CD : si on appréciera la présence de cinématiques, la musique réorchestrée et le niveau bonus, la réalisation graphique et surtout la jouabilité ne suivent pas. Autant dire qu’en 1994, le jeu sera passé totalement inaperçu et que, de nos jours, il s’approche davantage d’une curiosité que de la version ultime de jeu.
Version PlayStation
Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeurs : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 24 février 2000 (Japon) – Mars 2000 (Europe) – Juillet 2000 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : –
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Le cas de cette version PlayStation de Strider est un peu particulier : elle aura en fait été exclusivement vendue… sous la forme d’un CD bonus offert dans la boîte de Strider 2, l’adaptation de la borne d’arcade de Capcom (et non celle du jeu de Tiertex, vous vous en doutez). Pour l’occasion, on retrouve naturellement un portage très fidèle à la borne, bien que la résolution soit un peu différente (365×224 ici) et que, de façon plus surprenante, les bruitages soient devenus un peu plus sourds. Au rang des nouveautés, l’apparition d’un menu des options rappelant beaucoup celui du deuxième opus, et qui inclut une dizaine de modes de difficulté, des options de configuration, et même la possibilité de disposer d’une bande sonore remixée. Le résultat est une question de goût, mais on remarquera que de nombreuses variations de mélodies présentes dans les niveaux originaux ne subsistent pas dans ce mode, et que les morceaux tournent vite en boucle. Mon conseil : préférez les thèmes de base. Pour le reste, les joueurs désireux de découvrir ce premier opus avant de lancer le deuxième épisode pourront donc le faire ici dans des conditions quasi-idéales, mais méfiez-vous : la difficulté par défaut du jeu est plus élevée que celle de la borne.
Pas de problème, c’est ce qu’on était venu chercher
NOTE FINALE : 14/20
Pas de mauvaise surprise : ce portage de Strider sur un système 32 bits apporte tout ce qu’offrait la borne d’arcade, plus quelques bonus bienvenus dont la possibilité de profiter de thèmes musicaux remixés. On peut regretter que Capcom n’en ait pas également profiter pour corriger les quelques imprécisions du gameplay, mais en tant que pur portage, rien à redire.
« Montre-moi quelle affiche de film célèbre est plagiée par la couverture de ta boîte de jeu et je te dirai qui tu es. »
Le jeu ne prend aucune note pour vous, alors préparez du papier et un crayon
Pour tous les spécialistes de la science-fiction, pour tous les fans d’Harrison Ford, pour tous les amateurs de Ridley Scott, une étrange impression de déjà-vu s’est probablement manifestée en observant la boîte de Mean Streets, et pour cause : difficile de ne pas y voir de lien avec l’affiche de Blade Runner. Imaginez la Californie du futur, ses villes tentaculaires, sa nuit permanente, ses terres arides transformées en décharges géantes et ses voitures volantes. Familier ? Pas de « Réplicants » ici, toutefois, mais des mutants déformés ou dévisagés par les retombées nucléaires. Et au milieu du chaos, un détective privé anachronique vêtu d’un imperméable à la Boggart, et dont les amateurs de jeux d’aventure seront amené à réentendre parler à plusieurs reprises : Tex Murphy.
Montez dans votre véhicule, et préparez-vous à voir du pays
Bien avant d’accéder à la renommée à l’ère du CD-ROM et des FMV par le biais d’Under a Killing Moon, Tex écumait en effet déjà la côte ouest du futur à bord de son speeder, avec ses poings, son flingue et ses poches vides. Nous sommes en 2033, et une femme évidemment fatale vient de vous confier une enquête très bien payée : découvrir les réelles causes de la mort de son père, Carl Linsky. Lequel s’est apparemment suicidé en se jetant du haut d’un pont devant témoin, ce qui semble définitivement exclure la piste du meurtre. Mais vous pencher sur les activités de la victime vous amènera rapidement à découvrir un homme inquiet qui craignait pour sa vie, et surtout un mystérieux projet nommé « Overlord » qui va vous obliger à naviguer entre les grands pontes, les petites frappes et les nervis de cet étrange parti politique néo-fasciste appelé « Law and Order » afin de réussir à faire la lumière sur toute cette affaire.
Votre voiture volante est équipée d’un visiophone et d’un fax – le top du top du futur de 1989 !
Comme vous l’aurez déjà deviné, le jeu vous place naturellement dans la peau de Tex Murphy, déjà incarné à l’écran par Chris Jones – comme ce sera le cas durant toute la saga pendant plus de vingt-cinq ans – à la recherche de la vérité sur la mort de Carl Linsky. Nous sommes en 1989, le concept du point-and-click commence à peine à exister, et la plupart des jeux d’aventure se jouent encore à l’aide d’indigestes lignes de commande. Mais Mean Streets, lui, est un jeu très ambitieux, et cette ambition se ressent déjà dans la multitude des possibilités offertes par le titre.
les digitalisations sont très bien réalisées pour l’époque, et les descriptions qui les accompagnent sont… savoureuses
Concrètement, le logiciel développé par Access Software va vous confronter à trois types de situation : des phases de simulation, des phases d’action et des phases d’aventure. Les amateurs de point-and-click auront probablement déjà tiqué, tant le mélange des genres est quelque chose qui sera rapidement passé de mode, et pour de très bonnes raisons. Mean Streets a heureusement la bonne idée de ne pas trop s’éparpiller en faisant le choix de simplifier au maximum les phases ne relevant pas de l’aventure pure et dure. Pour ce qui est de la simulation, elle est assez basique : elle consistera à piloter votre voiture volante d’un point à un autre pour mener l’enquête, dans une carte en 3D surface pleine qui en envoyait sans doute plein les yeux à l’époque et qui réemployait pour l’occasion une partie du code d’Echelon, développé deux ans plus tôt par Bruce Carver, le fondateur d’Access Software.
Si les gens ne sont pas causants, mettez-leur une bonne droite !
La conduite est assez simple, et les commandes vous seront résumées sur un écran d’aide affiché par un simple pression de la touche H, et il existe même un pilotage automatique qui vous permettra de voyager au gré des coordonnées que vous découvrirez au fil de la partie sans à avoir à vous battre avec les commandes. Seul inconvénient : attendez-vous à passer beaucoup de temps dans votre voiture, et même si cette idée participe indéniablement à l’immersion du joueur, d’un point de vue strictement ludique, il aurait sans doute été beaucoup plus intéressant de vous contenter de choisir votre destination sur une carte et de vous y rendre immédiatement. En l’état, les trajets ne sont jamais très longs – une minute grand maximum – mais ce pilotage automatique qui juge nécessaire de vous placer au pixel près au-dessus d’un point avant de se décider à vous y poser vous fera perdre un temps que vous pourriez consacrer à quelque chose de plus intéressant, dommage.
On ne peut pas dire que les phases d’action soient trépidantes
Deuxième type : les phases d’action. Il vous arrivera, en trainant dans des quartiers mal famés, de vous faire agresser par des malfrats. Vous vous retrouverez alors dans un mini-jeu consistant à avancer vers la droite en tuant les ennemis qui se dirigent vers vous. Je vous rassure : ce n’est vraiment pas compliqué, mais on ne peut pas dire que ça soit très intéressant non plus. Pour ceux qui auraient du mal, il est de toute façon possible de régler la difficulté de ces phases dans le menu des options. Disons que ça casse la routine.
Le chronomètre en haut à droite correspond au temps qu’il vous reste pour trouver l’alarme et la désactiver
Car bien évidemment, le cœur du jeu consistera à mener l’enquête. Si le programme se contentera parfois de vous balancer une simple description textuelle, l’aventure se déroulera principalement de deux manières : en interrogeant des gens et en passant plusieurs lieux au peigne fin. C’est bien sûr, et de très loin, la partie la plus intéressante du jeu, et celle-ci vous demandera de prendre soigneusement des notes tant vous risquez rapidement de crouler sous les noms, les coordonnées, les termes obscurs et les fausses pistes. Mais vous risquez de vite vous prendre au jeu, car le scénario est suffisamment bien mené pour vous donner envie d’en savoir plus – au moins jusqu’à ce que l’identité du ou des coupables devienne évidente, et que vous vous trouviez embarqué dans une résolution un peu plus fastidieuse vous demandant de trouver huit cartes magnétiques et les mot de passe correspondants, où les choses commencent à s’essouffler un peu.
Les enquêtes sur place sont de loin les plus intéressantes
Mais avant d’en arriver là, il faudra vous comporter comme un authentique privé de cinéma, et la chose pourrait se révéler un peu plus compliquée que vous ne l’aviez prévu. Non seulement il faudra poser les bonnes questions – en tapant les noms qui vous intéressent manuellement, d’où le besoin vital de prendre des notes en cours de jeu – mais il faudra également parfois faire usage de vos poings, ou graisser la patte de témoins peu causant. Dans le même ordre d’idée, vous bénéficiez d’un visiophone vous autorisant à contacter votre secrétaire, qui pourra mener des recherches pour vous, ou votre indic, Lee Chin, qui le fera, elle, contre espèces sonnantes et trébuchantes. Vous remarquerez que cela fait déjà plusieurs fois qu’on évoque l’argent, dans ce test : celui-ci risque effectivement de vous être d’une utilité vitale, et le pécule a priori confortable de 10.000$ avec lequel vous commencez le jeu pourrait fondre comme neige au soleil à force de devoir mettre la main à la poche pour faire parler les gens peu causants. Il vous est heureusement possible, lors de vos analyses de scènes de crime, de trouver des objets de valeur que vous pourrez vendre directement depuis votre inventaire histoire de vous refaire la cerise.
Fouiller dans les journaux laissés par les scientifiques sera une très bonne source d’information – à condition de parvenir à y accéder
Ces phases d’analyse, d’ailleurs, sont de loin les plus complètes et les plus délicates. L’interface assez lourde, entièrement au clavier (le jeu n’utilise jamais la souris), vous permettra de fouiller partout avec une efficacité maximale, même si vous devrez également parfois composer avec l’urgence de désactiver en 5 ou 10 minutes une alarme qui se serait enclenchée à votre entrée. Certains éléments importants sont très bien cachés, mais il est de toute façon toujours possible de revenir sur place après coup. Ce sera même parfois nécessaire, le temps de trouver des gants de protection pour éviter de vous entailler les doigts ou un tournevis qui vous permettrait de démonter un système de sécurité – Tex a heureusement le bon goût d’employer automatiquement n’importe lequel des objets figurant dans son inventaire.
Pour progresser, il faudra passer de longues minutes à fouiller chaque meuble de chaque pièce
Il faudra souvent retourner tous les meubles, fouiller méthodiquement le moindre recoin, pour accéder enfin aux éléments qui vous permettront de faire avancer votre enquête – le jeu est heureusement assez bien agencé de ce côté-là. Comptez facilement entre quinze et vingt heures pour venir à bout du jeu une première fois – sans doute beaucoup plus si vous tournez en rond, car les endroits à fouiller sont nombreux et les indices parfois rares, surtout si vous avez oublié de noter un nom important. Il est heureusement possible de réinterroger tout le monde au cas où vous auriez le sentiment d’avoir oublié quelque chose. On pourra également apprécier les petites références plus ou moins cachés à Star Trek ou à Retour vers le Futur.
Le jeu ne se prend pas trop au sérieux quand il s’agit de vous placer face à des mutants
Niveau réalisation, nous sommes en 1989, et il faut reconnaître qu’Access Software a mis le paquet. Le jeu est certes très loin de représenter le pinacle du pixel art, mais il était l’un des tous premiers programmes à tirer parti du VGA, dont il fait un usage parfois maladroit, mais incontestablement bien plus agréable à l’œil que ce que permettaient les 16 couleurs de l’EGA. On remarquera le recours récurrent à des images digitalisées, profitant pour l’occasion de l’expérience accumulée par le studio en développant Leader Board puis World Class Leader Board (l’animation du golfeur avait été obtenue en filmant Roger Carver et en tirant parti d’une technologie de digitalisation primitive) qui allaient devenir, un an plus tard, la série des Links.
Il y a énormément de gens à qui parler, et beaucoup d’endroits à fouiller
Autre innovation, le « Realsound » vanté en grandes lettres sur la boîte. De quoi s’agit-il ? Eh bien tout simplement d’une autre innovation de Bruce Carver : un procédé permettant de tirer le meilleur du haut-parleur interne du PC. De fait, même si les thèmes musicaux sont aussi courts que rares, ils sont d’une qualité assez bluffante, et les quelques digitalisations vocales du titre pourraient sans difficulté faire rougir une Sound Blaster ! Malheureusement, c’est quand même le silence qui vous accompagnera pendant le plus clair de la partie, et l’aspect révolutionnaire du « Realsound » n’aura finalement eu aucune valeur face à la rapide démocratisation des cartes sons intervenant à la même époque. Mais pour 1989, soyons honnêtes, Mean Streets représente clairement le haut du panier, et une véritable prouesse technologique. Rappelons qu’il était encore courant de trouver des jeux développés en EGA deux ans après sa sortie…
La carte se parcoure assez vite, mais on y passe néanmoins trop de temps
Le défaut qui passera le plus mal, pour le joueur actuel, restera malgré tout l’absence (à ma connaissance) de localisation du jeu en français sur PC : s’aventurer dans cette aventure sans une bonne maîtrise de l’anglais n’a pas plus d’intérêt que de lire un polar sans en comprendre un traitre mot. C’est dommage, car une fois la prise en main digérée – soit une poignée de minutes – l’enquête, pour légèrement datée qu’elle soit, est néanmoins rapidement prenante ; suffisamment, sans doute, pour vous pousser à la mener à son terme. Et qui sait ? Vous pourriez bien apprendre à l’apprécier au point de souhaiter le revoir, ce fameux Tex Murphy.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
NOTE FINALE : 13,5/20
Quelque peu empesé par une prise en main au clavier et par une multitude de phases plus ou moins utiles qui trahissent son âge, Mean Streets n'en demeure pas moins une enquête plaisante dans une Californie futuriste à la Blade Runner où l'atmosphère des films noirs se mêle parfaitement à l'ambiance post-apocalyptique. Mener l'enquête sur la mort de Carl Linsky vous demandera d'être méthodique, scrupuleux et de prendre des notes, mais la façon dont l'univers se dévoile, bien servi par une écriture efficace, vous donnera une bonne raison de chercher à en savoir plus. Dommage, malgré tout, que le jeu vous impose de multiplier des allez-et-retours dispensables et qu'il soit inaccessible aux non-anglophones. Une première aventure de Tex Murphy à (re)découvrir.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Réalisation révolutionnaire pour l'époque, mais sérieusement datée aujourd'hui – On passe au final plus de temps à conduire sa voiture qu'à mener l'enquête – Interface au clavier qui aurait largement bénéficié de l'usage de la souris – Le mélange des genres n'est pas la meilleure idée de la série – Entièrement en anglais, et en anglais d'un bon niveau
Version Commodore 64
Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Mean Streets représentant, à sa manière, la pointe de la technologie en 1989, on pouvait se demander comment le jeu allait s’en tirer sur le modeste ordinateur 8 bits de Commodore. Eh bien, étonnamment, pas tout-à-fait aussi mal qu’on pouvait le craindre : ¨l’équipe de The Code Monkeys a fait le choix de ne rien couper dans le jeu – à part la musique après l’écran-titre et les rares digitalisations, mais l’ambiance sonore était déjà particulièrement discrète sur PC – et non seulement toute l’aventure est toujours là, mais la réalisation est plus qu’honnête.
La Californie est devenue une bien morne plaine
On a même conservé les phases de survol en 3D ! Force est de constater, malgré tout, que ça se traine un peu et qu’il n’y a plus grand chose à voir lors des phases en voiture, mais on appréciera l’ambition intacte du titre. Le jeu est toujours aussi sympathique, même s’il vous faudra jongler entre le clavier et le joystick, et surtout composer avec des temps de chargement à rallonge et avec des changements de disquette intempestifs, ce qui, dans un jeu où l’on passait déjà beaucoup de temps à attendre sur PC, est vite dommageable. Bref, jouer demandera une bonne dose de patience, mais l’effort reste louable.
NOTE FINALE : 10/20
Porter Mean Streets sur Commodore 64 tenait plus du défi que de la promenade de santé, mais The Code Monkeys a entrepris la chose avec beaucoup de sérieux, au point de conférer une expérience de jeu étonnamment proche de celle sur PC. Si la réalisation est réellement impressionnante pour la machine 8 bits, il faudra malgré tout composer avec une lenteur handicapante, encore plombée par des temps de chargement à rallonge et de fréquents changements de disquettes, qui réservera cette version aux nostalgiques patients.
Version Amiga
Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Mean Streets fut certainement l’un des tout premiers exemples de jeu porté depuis le PC vers l’Amiga plutôt que dans le sens inverse ; il fut aussi certainement le premier titre à être techniquement inférieur sur la machine de Commodore. En termes de réalisation, si ce portage est clairement moins coloré qu’en VGA, on ne peut pas dire que l’on perde énormément au change, et les graphismes font largement le boulot.
La 3D ne souffre pas du passage sur Amiga
Côté son, en revanche, si l’unique thème musical du jeu est toujours là en qualité Paula (c’est à dire mieux que le haut-parleur interne du PC, comme on pouvait s’en douter), la plupart des bruitages ont disparu et vos vols au-dessus de la Californie se feront désormais dans un silence de mort. La vraie surprise vient plutôt de l’existence d’une version française que je n’ai jamais rencontrée sur PC : celle-ci a le mérite d’exister et de proposer des phrases construites dans un français à peu près correct, en dépit de plusieurs fautes d’orthographe, de quelques contresens et d’un certain nombre de trahisons. Pour un joueur ne maitrisant pas un mot d’anglais, autant dire qu’elle représentera le Saint Graal, mais les anglophones auront toutes les raisons de s’en tenir éloignés.
NOTE FINALE : 13/20
Mean Streets sur Amiga propose une version techniquement inférieure à celle parue sur PC, sans que l’on perde énormément au change, et a surtout l’avantage d’exister dans une version française certes très perfectible mais qui a au moins le mérite de permettre aux non-anglophones de s’intéresser à l’enquête. Pour tous les joueurs allergiques à la langue de Shakespeare, c’est une alternative très satisfaisante, mais les autres n’auront pas de réelle raison de la préférer à sa consœur sur PC.
Les avis de l’époque :
« Le système de fouille est une merveille de simplicité et il offre un grand confort d’emploi, sans jamais ralentir le rythme du jeu. Vous ferez parfois de mauvaises rencontres en arrivant sur les lieux que vous désirez inspecter, et il vous faudra alors dégainer pour faire face aux gangsters qui cherchent à vous abattre. Cette partie du jeu n’offre vraiment aucun intérêt, mais il faut quand même faire très attention si vous ne souhaitez pas mourir. (…) Mean Streets présente une intrigue fort bien construite, car les interrogatoires et les indices vous permettent de progresser très logiquement dans votre enquête. »
Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, Janvier 1991, 17/20
Version Atari ST
Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Qui dit portage sur Amiga dit également portage sur Atari ST. Sans surprise, Mean Streets ne fait pas exception à la règle, et propose une version pratiquement calquée sur celle parue sur la machine de Commodore. Graphiquement, les nuances sont infimes, pour ne pas dire indécelables. Sur le plan sonore, on pouvait craindre le pire, mais le dispositif Realsound conçu par Access pour le PC fait également des merveilles sur l’Atari ST, et le thème musical fait pratiquement jeu égal avec ce que produisait la puce Paula. En revanche, je sais qu’une version française du jeu existe, mais bon courage pour mettre la main dessus.
NOTE FINALE : 13/20
Pas de surprise pour ce Mean Streets sur Atari ST, qui offre une expérience quasi-identique à celle disponible sur Amiga. En revanche, bon courage pour le trouver en français.
Les avis de l’époque :
« La réalisation est excellente, le programme utilisant tour à tour 3D vectorielle pour la simulation de vol et graphismes plus classiques mais très fouillés pour les lieux à visiter. De nombreuses animations graphiques et sonores digitalisées renforcent l’ambiance. (…) Une excellente enquête policière, riche et prenante. »
Développeur: Westwood Associates Éditeur : Strategic Simulations, Inc. Titre alternatif:Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Eye of the Beholder II The Legend of Darkmoon – A LEGEND SERIES Fantasy Role-Playing Saga, Vol. II (boîte) Testé sur:PC (DOS) – Amiga – FM Towns – PC-98 Disponible sur : Linux, Mac OS X, Windows Présent dans les compilations :
Eye of the Beholder / Eye of the Beholder II: The Legend of Darkmoon / Eye of the Beholder III: Assault on Myth Drannor (1995 – Linux, Mac, PC (DOS), Windows)
L’avantage avec les dictons de grands-mères, c’est qu’ils finissent fatalement par se révéler pertinents à un moment ou à un autre. Autant dire qu’après avoir connu un joli succès critique et commercial avec Eye of the Beholder premier du nom, les pontes de SSI n’auront pas mis longtemps à arriver à la conclusion qu’ils tenaient là une potentielle licence à succès. C’est pourquoi quelques mois à peine après la sortie du premier épisode – la même année, c’est dire ! – se présentait déjà sur les étals une suite fort logiquement nommée Eye of the Beholder II. Une promptitude dans le développement qui invitait sérieusement à penser qu’on venait de servir du réchauffé, ce qui, pour succéder à titre propulsé au rang d’alternative à Dungeon Master, faisait un peu tache.
Eye of the Beholder II, le jeu qui s’apprête à vous coller une grosse claque
Cela se confirme d’ailleurs lors des premières minutes de jeu : à un petit ravalement de façade près, l’interface du jeu est strictement identique à celle du premier épisode, tout comme la création de personnages, qui n’a pas évolué d’un iota – même les portraits sont les mêmes, ce qui n’est pas réellement surprenant puisque le jeu fait directement suite à l’aventure face à Xanathar d’Eye of theBeholder.
Les fameux niveaux où vous ne pouvez pas vous reposer
Votre groupe d’aventuriers, désormais auréolé de la gloire d’avoir mis une rouste à ce fameux Spectateur, est mandé une nuit par Khelben « Bâton Noir » Arunsun lui-même. L’archimage s’inquiète une nouvelle fois pour Eauprofonde et vous envoie fouiner près du temple de Darkmoon sur-le-champ afin d’enquêter sur le silence d’un de ses éclaireurs, en prenant néanmoins le temps de vous confier une pièce magique qui vous permettra de communiquer avec lui une fois sur place, avant de vous téléporter sur les lieux. Vous pourrez donc importer votre groupe du premier jeu, où en créer un nouveau de niveau 7-8, pour aller vous frotter à cette nouvelle menace dont vous ignorez tout.
On sera heureux (?) d’affronter enfin des êtres humains
Première bonne nouvelle : contrairement à ce que l’on aurait pu craindre, l’ambition du titre est évidente dès les premiers instants. Par le biais de la magnifique introduction que vous pouvez consulter ci-dessus, tout d’abord, et qui en envoyait plein les mirettes d’entrée de jeu. Par le soin indéniable apporté à la réalisation, ensuite, qui multiplie les illustrations, les personnages animés, et surtout les environnements soigneusement détaillés. Soyons honnête : Fin 1991, Eye of the Beholder II pouvait revendiquer sans excès de fierté le titre de plus beau dungeon crawler jamais sorti jusqu’alors, et le fait de commencer le jeu en extérieur (une relative nouveauté à l’époque, même si des titres comme Captive permettaient déjà de mettre le nez dehors) annonce déjà clairement le fait que le concept du donjon unique à parcourir étage par étage a fait son temps.
Les sorciers sont fragiles, mais font très mal
Plus question, en effet, de se contenter de descendre le plus vite possible jusqu’au fond d’un donjon : le temple de Darkmoon près duquel vous commencez la partie servira en fait de hub entre plusieurs donjons de plus en plus difficiles, et au sein desquels vous mènerez votre enquête afin de savoir qui cherche à nuire à Eauprofonde. Non seulement cela aide à casser l’éternelle routine qui faisait office de règle d’or depuis Dungeon Master, mais c’est également un très bon prétexte pour varier les environnements avec une régularité encore plus spectaculaire que dans le premier opus.
Le titre fourmille d’idées
Forêt, temple, catacombes, tour de marbre, tapis et tentures de velours : on a réellement le sentiment de voir du paysage, dans Eye of the Beholder II, et la lassitude ne s’installe pratiquement jamais en dépit de la taille conséquente de chacun des donjons du jeu. Lesquels risquent de vous occuper un petit bout de temps, car non seulement le jeu est bien plus long que le premier épisode – comptez une bonne vingtaine d’heures au minimum – mais il est également beaucoup plus difficile.
Attendez-vous à croiser beaucoup de monde, cette fois
L’opposition bien plus relevée à laquelle vous devrez faire face en est la première raison. Si les choses commencent doucement, avec des loups ou des soldats qui devraient vous servir de simple mise en bouche, le bestiaire est extrêmement varié et vous mettra aux prises avec des cochonneries qui rivaliseront d’inventivité pour vous compliquer la tâche. Non seulement vous serez toujours susceptible de vous faire empoisonner ou paralyser, mais vous pourrez même également vous faire transformer en pierre – un sort équivalent à la mort si vous n’avez pas encore atteint le niveau vous permettant de lancer le sort vous « dé-pétrifiant » – ou vous prendre des sortilèges de masse qui atteindront tout votre groupe.
Eye of the Beholder II initie également la très bonne idée des clefs qui ressemblent aux serrures qu’elles ouvrent
Vers la deuxième moitié du jeu, la moindre rencontre peut devenir une menace, et on est constamment surpris par le culot et l’inventivité des designers pour vous mener la vie dure lors de vos rencontres. Pour ne rien arranger, le programme n’hésite pas à vous ensevelir sous le nombre d’adversaires, quitte à en expédier plus d’une dizaine à la fois autour de vous – vous allez apprendre à aimer vos magiciens comme jamais vous ne les aviez aimés. Vos clercs aussi, d’ailleurs, puisqu’ils devraient enfin atteindre un niveau leur permettant de relever les morts, ce qui pourrait vous arriver souvent – ce sera même une de vos principales possibilités de recrutement, car certains des membres qui pourront rejoindre votre groupe n’existeront que sous la forme d’ossements au moment où vous les trouverez.
Le jeu se met bien plus en scène que son prédécesseur
Mais plus encore que l’opposition, la difficulté – et tout le génie du titre, pour être honnête – est à mettre au crédit du level design, qui est à n’en pas douter un des tous meilleurs du genre. Si le premier épisode avait déjà placé le curseur assez haut dans ce domaine, il est littéralement humilié par son successeur, qui cumule assez d’idées pour en tirer plusieurs jeux à lui tout seul.
La variété des adversaires est impressionnante
Il serait aussi complexe que criminel de tenir ici la liste intégrale des trouvailles d’Eye of the Beholder II, mais citons néanmoins ces fameux niveaux où il vous est impossible de vous reposer – et donc de récupérer vos points de vie et vos sortilèges -, cette énigme où il faudra utiliser vos sortilèges et votre jugeote pour emprisonner des monstres aux endroits désignés, ce personnage recrutable qui vous laisse en plan une nuit en vous volant du matériel, sans oublier les interventions de votre nouvel ennemi qui cherchera à vous induire en erreur, des énigmes retorses à s’en arracher les cheveux, et le cortège habituel de téléporteurs, de pièges, de murs illusoires et d’objets qui ne trouvent leur utilité que plusieurs heures après les avoir ramassés.
Certains personnages sont très bien dissimulés
Inutile de dire qu’il est strictement impossible d’espérer terminer l’aventure sans dessiner des plans détaillés de chaque niveau, d’autant que le programme n’a aucun scrupule à l’idée de placer des objets indispensables derrière des passages secrets vicieusement cachés, ni pour vous renvoyer plusieurs étages en arrière récupérer cette satanée épée maudite dont vous vous étiez débarrassé avec soulagement uniquement pour découvrir que vous allez finalement en avoir un besoin vital. Mieux vaudra être d’une patience à toute épreuve, car non seulement certaines énigmes sont particulièrement coriaces, mais il est en plus fréquent de devoir retourner explorer des niveaux avec lesquels on pensait en avoir fini pour de bon afin de s’assurer de n’avoir pas raté une clef ou un objet de quête.
Vous recroiserez quelques vieux amis
Autant dire que le titre s’adresse clairement à des joueurs s’étant fait les griffes sur plusieurs logiciels du même genre, ou au moins sur le premier épisode, faute de quoi le néophyte risquera de longtemps cogiter sur des énigmes qui paraitront évidentes pour un vétéran du dungeon crawler. Combien de joueurs débutants auront tourné en rond de nombreuses heures faute d’avoir compris comment ouvrir l’accès au deuxième donjon ?
Les derniers niveaux sont souvent déroutants
Bref, le jeu n’est sans doute pas le mieux désigné pour découvrir le genre, mais pour tous les rôlistes vétérans, c’est pratiquement un rêve devenu réalité – à tel point que les quelques rares défauts entrevus lors du premier épisodes (absence de gestion de la boisson et de la lumière, par exemple) sont devenus ici totalement insignifiants, tant les nouveaux problèmes qui se posent à vous vous occuperont mille fois plus que cet aspect microgestion qui n’amusait déjà plus grand monde. Eye of the Beholder II n’était pas juste une suite magistrale : c’était également le mètre-étalon à partir duquel seraient jugé tous les représentants du dungeon crawler dans les années qui allaient suivre. Pas mal, pour un titre développé en quelques mois.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
NOTE FINALE : 19/20
D'un seul revers de main, Eye of the Beholder II aura littéralement balayé les quelques appréhensions qu'avait pu faire naître sa sortie rapide, quelques mois à peine après un premier épisode qui avait déjà placé la barre très haut. Long, difficile, superbe, varié, d'une créativité rare et d'une imagination surprenante, le titre de Westwood Associates aura définitivement remis les pendules à l'heure en faisant de lui, sans discussion possible, le meilleur dungeon crawler au moment de sa sortie – un titre que bien peu de logiciels du même type auront d'ailleurs été en mesure de lui disputer depuis lors. N'importe quel amateur du genre doit absolument y avoir joué au moins une fois dans sa vie, faute de quoi il passerait à n'en pas douter à côté d'une des expériences les plus marquantes jamais proposées dans le domaine du jeu de rôle. Une merveille.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Certaines énigmes sont à s'arracher les cheveux
– Les derniers combats ne font aucun cadeau
– Revenir loin en arrière sera souvent une nécessité si vous n'êtes pas atrocement méthodique
– Il est tout à fait possible d'expédier des objets indispensables à des endroits où on ne pourra jamais les récupérer - mieux vaut éviter de faire n'importe quoi
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Eye of the Beholder II sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Superbe ! Je ne peux rien dire d’autre. EO2 est un jeu très agréable à pratiquer. Il ne s’agit pas seulement d’un jeu où les combats constituent l’essentiel du jeu. Ils sont nombreux, certes, mais le jeu est conçu de manière à ce que les dialogues et les réactions des personnages (y compris les vôtres) donnent à la partie une atmosphère de jeu d’aventure, ce qui, en général, fait cruellement défaut dans ce type de logiciel. »
Dany Boolauck, Joystick n°23, Janvier 1992, 95%
« The Legend of Darkmoon ne souffre d’aucun défaut et les amateurs de jeu de rôle ne doivent absolument pas le manquer. De nombreux ataristes (comme moi) ont acheté un ST pour jouer à Dungeon Master. Eye 2 est le premier jeu de ce type à justifier l’achat d’un PC ! »
Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°99, Février 1992, 19/20
Version Amiga
Développeur : Westwood Associates
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Mai 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo Modes graphiques : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Tout comme le premier épisode avant lui, Eye of the Beholder II aura également connu son portage sur Amiga quelques mois après la version PC. Sans surprise, l’ambition du titre en exige beaucoup de la machine de Commodore, et s’essayer au jeu sans disque dur commence à représenter une gageure.
Sur certains écrans, le jeu s’en sort graphiquement très bien…
Dès l’introduction, le ton est donné : graphiquement, l’Amiga fait ce qu’il peut, et s’il est encore capable de faire de très jolies choses, il est indéniablement à des kilomètres de la version PC. La musique, elle, est jouée beaucoup plus lentement, et la plupart des bruitages ont disparu – ce n’est heureusement pas le cas durant la partie, où la puce Paula fait même plutôt mieux que ce que permettaient l’AdLib et la Sound Blaster. En revanche, du côté des décors, cela va du très honnête (la forêt du début du jeu) au moins emballant (les catacombes virent un peu à la bouillie de pixels). Les graphismes sont moins fins, les dégradés virent un peu trop souvent à l’aplat ou au gros pâté, et les temps de chargement pénalisent l’expérience – même si, comme on peut s’en douter, les choses vont beaucoup mieux dès l’instant où l’on lance le titre sur un Amiga 1200 doté d’un disque dur. Si le jeu est intrinsèquement toujours aussi bon, le ravissement permanent de la version PC laisse la place à quelque chose de plus blasé, et le titre aura certainement eu à souffrir de la comparaison avec des titres comme Black Crypt là où la version originale régnait en maître. À noter qu’une version AGA aura été développée bien des années plus tard par des fans, consultez le test du premier Eye of the Beholder si vous désirez en savoir plus.
…mais dans l’ensemble, les dégradés sont moins fins, ce qui n’est pas non plus une catastrophe
NOTE FINALE : 18,5/20
Ne vous y trompez pas : Eye of the Beholder II sur Amiga est toujours un très bon jeu, particulièrement pour ceux qui auront eu la chance de le découvrir sur un Amiga 1200 doté d’un disque dur. On sent quand même rapidement à quel point cette version souffre de la comparaison avec sa consœur sur PC, notamment sur le plan graphique où le gouffre qui commençait à se former avec le VGA est visible à chaque écran. Reste un excellent dungeon crawler, et un que vous auriez tort de ne pas découvrir dans tous les cas.
Les avis de l’époque :
« Mis à part des changements de disquettes un peu trop fréquents, Eye of the Beholder 2 se révèle parfait techniquement et propose un savoureux mélange d’énigmes et de combats, qui enthousiasmera les amateurs de jeux de rôles sur micro. Mais la routine « couloir/monstre/trésor » inhérente à ce type de jeu commence à lasser. »
Marc Lacombe, Tilt n° 104, juillet 1992, 17/20
Version FM Towns
Développeur : Cybelle
Éditeur : Arrow Micro-Techs Corp.
Date de sortie : Novembre 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : Systèmes : FM Towns/II, MX/MA/ME, Marty
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Comme beaucoup de jeux de rôles occidentaux, Eye of the Beholder II aura fini par faire le trajet jusqu’au FM Towns.
On ne peut pas dire que la réalisation ait souffert du portage
Naturellement, il l’aura fait dans une version CD-ROM qui s’avère n’être qu’un portage à 99,9% identique à la version PC, les pistes numériques jouées n’étant pas grand chose de plus que l’équivalent de ce que jouait une carte sonore Sound Blaster dans la version MS-DOS. C’est un peu décevant, mais pour le reste, on ne peut pas se plaindre d’avoir été floué : c’est bel et bien l’un des meilleurs dungeon crawler jamais programmé qui est disponible dans une copie conforme pratiquement au pixel près… mais en japonais. Autant dire que si vous ne parlez pas la langue, sauf à avoir développé une allergie irréversible pour le PC, inutile d’aller remuer ciel et terre pour une version qui n’apporte pratiquement rien par rapport à l’originale. Cela n’empêche pas, dans tous les cas, le jeu d’être toujours aussi bon.
Tout est à sa place, et c’est tant mieux
NOTE FINALE : 19/20
Eye of the Beholder II arrive sur FM Towns avec une prise de risque minimale : c’est pratiquement le même jeu que sur PC, à l’exception de quelques petits ajouts mineurs très anecdotiques. Le CD-ROM n’est pas réellement mis à contribution, et le jeu est évidemment réservé à ceux qui parlent japonais, mais si c’est votre cas, vous pouvez foncer les yeux fermés.
Version PC-98
Développeur : Westwood Associates
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 19 Novembre 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Systèmes : FM Towns/II, MX/MA/ME, Marty
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Autre grand habitué des conversions de jeux de rôles occidentaux, le PC-98 aura lui aussi eu le droit à son portage d’Eye of the Beholder II. Comme sur FM Towns, le résultat nous rappelle surtout à quel point les ordinateurs personnels étaient en train de se standardiser à l’échelle internationale : c’est, à bien des niveaux, un calque pixel perfect de la version PC, avec la possibilité de jouer en 16 ou en 256 couleurs. La petite nuance, en-dehors du fait que le jeu soit désormais en japonais (l’interface, elle, est encore en anglais, ce qui rend l’essentiel du jeu relativement praticable même sans parler un mot de japonais), est surtout la reconnaissance d’interfaces MIDI qui n’étaient pas gérées par la version originale – il est donc tout à fait possible de découvrir le titre avec une Roland MT-32 ou avec n’importe quelle carte sonore compatible avec le standard MPU-401. Selon votre configuration, cela peut offrir un résultat plus convaincant que sur PC ou même sur Amiga, les bruitages étant gérés, pour leur part, par la carte FM de la machine. Bref, une nouvelle fois, rien de fondamentalement neuf (le contenu n’a pas changé d’un micron), mais ceux qui savent lire le japonais seront éventuellement heureux de découvrir une réalisation sonore un peu plus avancée.
Graphiquement, c’est l’exact équivalent de la version PC
NOTE FINALE : 19/20
Pas de grand bouleversement pour cette version PC-98 d’Eye of the Beholder II, qui est essentiellement la copie carbone de l’itération PC originale. Les joueurs capables de franchir la barrière de la langue pourront être heureux de bénéficier d’une réalisation sonore tirant parti du standard MPU-401.
Développeur : Westwood Associates Éditeur : Strategic Simulations, Inc. Titre alternatif :Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Eye of the Beholder – A LEGEND SERIES Fantasy Role-Playing Saga, Vol. I (Boîte), Dungeons & Dragons : Eye of the Beholder (Game Boy Advance) Testé sur :PC (DOS) – Amiga – PC-98 – Mega-CD – SNES Disponible sur : Game Boy Advance, Linux, Macintosh, Windows Présent dans les compilations :
Eye of the Beholder / Eye of the Beholder II : The Legend of Darkmoon / Eye of the Beholder III : Assault on Myth Drannor (1995 – Linux, Macintosh, PC (DOS), Windows)
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 640ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr Système de protection de copie par consultation du manuel
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
En 1991, le rôliste possesseur de PC était presque totalement comblé. La sortie de la nouvelle génération de processeurs équipant les modèles AT, couplée à la démocratisation du VGA et des premières cartes sons, avait fini par installer définitivement la machine d’IBM dans le paysage vidéoludique. La saga Ultima avait enfin déserté l’Apple II pour être développée sur PC, SSI avait investi dans Donjons & Dragons pour inonder le marché de titres tirant profit de la licence, de Pool of Radiance à Pools of Darkness en passant par la saga des Krynn ; bref tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes.
La création de personnages vous laisse une liberté totale
À un détail près.
Ce détail fort agaçant, c’étaient les rires gras des possesseurs d’Atari ST et d’Amiga, qui pouvaient se pavaner en jouant à l’excellent Dungeon Master, et même à sa suite Chaos Strikes Back, pendant que le joueur PC rongeait misérablement son frein. Le titre révolutionnaire de FTL Games était en effet déjà sorti depuis quatre ans – autant dire une éternité – et semblait bien décidé à snober jusqu’au bout les PCistes, frustrés de devoir tromper l’ennui sur des clones comme Bloodwych qui ne jouaient pas dans la même cour que leur illustre modèle. Jusqu’à ce qu’enfin la revanche arrive, et qu’elle s’intitule Eye of the Beholder.
Toute ressemblance avec un jeu dont le titre commence par Dungeon serait purement fortuite… ou pas
Le titre de Westwood Associates partage en effet une filiation évidente avec Dungeon Master : parcourir un donjon case par case, avec des combats en temps réel, avant d’aller affronter le grand méchant tout au fond. Mais, loin de se contenter d’être un simple ersatz du titre de FTL Games, Eye of the Beholder arrive avec ses propres arguments, bien décidé à utiliser les quatre années le séparant de la sortie de son maître pour se donner les moyens de rivaliser avec lui.
Évidemment, attendez-vous à trouver des dizaines de clefs et d’interrupteurs
Le scénario choisit, tout d’abord, de mettre à profit l’univers des Royaumes Oubliés pour vous envoyer dans les égouts d’Eauprofonde, à la recherche d’un mal mystérieux sur lequel il vous faudra enquêter. Mais à peine votre groupe aura-t-il parcouru quelques mètres dans les souterrains de la ville qu’un éboulement soigneusement provoqué viendra barrer la sortie. La seule échappatoire, dorénavant, sera de parcourir les douze niveaux du jeu pour découvrir l’identité de votre adversaire et en profiter pour lui régler son compte.
Le soin apporté à la réalisation tranche un peu avec les éternels couloirs gris auxquels nous avait habitués le père fondateur du genre
Première originalité, en quelque sorte : plus question d’aller choisir vos personnages parmi une sélection de héros pré-créés comme c’était le cas dans Dungeon Master. Le jeu s’appuie sur la deuxième édition des règles de Donjons & Dragons pour vous proposer de créer vos quatre avatars, en vous laissant le soin de choisir leur classe, leurs caractéristiques, leur nom et leur portrait. Le jeu autorise les personnages multi-classés, et vous pouvez choisir de vous conformer au tirage au sort de leurs statistiques ou bien de les éditer manuellement sans aucune contrainte. Il est donc très facile de se faire une équipe de personnages ayant 18 dans toutes les caractéristiques si vous le désirez, sachant que cela n’aura finalement qu’un impact modéré sur la difficulté du titre. Puis vous pouvez lancer la partie et débuter l’exploration des égouts d’Eauprofonde.
Le poison ou la paralysie font partie des joyeusetés qui peuvent décimer votre équipe
Le premier détail qui saute aux yeux, naturellement, est la réalisation du titre. Nous sommes en 1991, et réaliser un jeu en 16 couleurs sur des machines permettant d’en afficher seize fois plus n’aurait aucun sens. Le logiciel tire donc parfaitement parti des 256 couleurs de sa palette pour distiller immédiatement une ambiance marquée, bien décidé à supplanter celle de son illustre modèle. Cela fonctionne d’autant mieux que, contrairement au titre de FTL Games qui affichait sempiternellement les mêmes murs d’un bout à l’autre de l’aventure, Eye of the Beholder aura le bon goût de vous faire parcourir pas moins de cinq environnements différents au cours de la partie, ce qui participe énormément à l’envie d’aller encore un peu plus loin pour découvrir ce que le jeu a à offrir. Les monstres, s’ils ne sont animés qu’en trois images, sont très bien réalisés et immédiatement reconnaissables, et le jeu a également la bonne idée de proposer une cinématique d’introduction et une ambiance sonore tirant parti des cartes AdLib et Sound Blaster. Pas de musique une fois en jeu, mais on entend les monstres se déplacer dans le lointain, les personnages crier, bref on s’y croit largement autant que dans le donjon de ce bon vieux Lord Chaos, et c’est une très bonne chose.
J’espère que vous aimez les téléporteurs, parce que vous allez en voir beaucoup
L’interface visuelle devrait d’ailleurs immédiatement mettre à l’aise les habitués de Dungeon Master : On y retrouve à peu près tout ce que proposait le jeu de FTL Games, à quelques détails près. Ainsi, on a désormais en permanence une boussole (très pratique au demeurant) au milieu de l’écran, l’apparition de l’inventaire ne masque plus la fenêtre de jeu, et il est beaucoup plus facile de faire transiter un objet d’un personnage à un autre. Seul regret : la fenêtre de jeu est plus petite que dans Dungeon master, mais on n’y pense même plus après quelques minutes de jeu.
À peu près tout le bestiaire de Donjons & Dragons répond présent – y compris les Drows
Les différences auraient pu s’arrêter là et Eye of the Beholder s’efforcer de calquer au maximum le déroulement de son modèle, mais l’équipe de Westwood Associates, qui s’apprêtait à se faire un nom, avait bien l’intention d’apporter ses idées propres histoire de renouveler un peu l’approche. Tout d’abord, Donjons & Dragons oblige, plus question de composer ses sorts comme dans Dungeon Master : on les choisira tout bêtement dans une liste après les avoir appris. Pas de mana ici : les magiciens comme les clercs ne peuvent lancer qu’un nombre limités de sort avant de devoir se reposer. Le jeu gère toujours la nourriture, mais plus l’eau ni la lumière. Et si parvenir à trouver de la nourriture pourra représenter une pression réelle lors des premiers niveaux du titre, les choses changent drastiquement à partir du moment où votre clerc (si vous en avez un, bien sûr) apprend le sortilège lui permettant d’invoquer des vivres. Si cette simplification de la microgestion pourra choquer les puristes – l’état de santé de vos personnages ainsi que la gestion de la lumière étant un souci constant dans Dungeon Master – il faut bien reconnaître que cela a également l’avantage de vous permettre de vous concentrer sur l’exploration sans avoir à consulter des jauges de faim ou de soif tous les deux cents mètres, ce qui présente également bien des avantages.
Ces portails vous permettront de voyager entre les niveaux du donjon… à condition d’avoir les clefs nécessaires
Le vrai critère pour décider de la qualité de l’aventure, on s’en doute, tiendra malgré tout à la qualité du level design. Et si Eye of the Beholder propose, à ce titre, des niveaux souvent beaucoup plus tortueux que ceux de Dungeon Master – avec quantité de passages secrets, de téléporteurs impromptus, d’interrupteurs cachés, de chausse-trappes, et ce dès le deuxième niveau – il est également plus simple et nettement plus court que son illustre modèle (comptez entre huit et douze heures environ pour en venir à bout). En revanche, le jeu est également bien moins linéaire, vous proposant divers passages alternatifs, des raccourcis sous la forme de portails magiques, et surtout des quêtes faisant leur apparition au fil du déroulement du jeu, puisque non seulement vous pourrez rencontrer des PNJs et discuter avec eux – première grande nouveauté du programme – mais vous pourrez également en recruter certains et donc agrandir la taille de votre groupe jusqu’à six personnages !
Pourquoi les sorciers maléfiques vous détaillent-ils toujours leurs plans avant d’essayer de vous tuer ?
C’est bien simple, le déroulement peut changer drastiquement d’une partie à l’autre – il arrive même que les plans des niveaux subissent quelques petites altérations dans le placement des boutons et des leviers – et si vous pouvez tout à fait vous précipiter vers le fond du donjon pour aller faire sa fête au boss final, vous aurez également l’opportunité d’en apprendre plus sur votre ennemi, sur le conflit entre les nains et les drows, et même de résoudre la confrontation finale par le biais d’un piège plutôt que par la force brute ! Le joueur bien décidé à retourner chaque pierre pourra ainsi bénéficier d’une durée de vie pratiquement doublée comparée à celle du joueur pressé, et apprendre des dizaines de choses – une très bonne raison de relancer le titre une deuxième fois après l’avoir fini, donc. Raffinement ultime : le jeu comporte également une quête cachée par niveau (douze au total, donc) qui vous permettra à chaque fois de mettre la main sur du matériel magique. Il est ainsi possible de dégotter une dague +4 dès le premier sous-sol, je vous laisse découvrir comment.
Le jeu propose également son lot de quêtes secondaires et de personnages à enrôler
Le tableau serait presque idyllique s’il n’avait pas également fallu composer avec les calculs de boutiquiers de l’époque. Je m’explique : SSI, au moment de lancer le jeu, tablait sur le fait que la très grande majorité des joueurs n’en verrait jamais le bout (on constatera d’ailleurs à quel point ils sous-estimaient les rôlistes de l’époque, qui en avaient vu d’autres). Histoire de limiter les coûts et de faire tenir le jeu sur quatre disquettes, ils décidèrent donc… de supprimer la cinématique de fin, pour la remplacer par un simple message de félicitations au retour à l’invite DOS. Un vrai faux pas pour les joueurs de l’époque, qui avaient de quoi se sentir floués du fruit de leurs efforts – cela fit d’ailleurs suffisamment de bruit pour que SSI se décide à réintroduire la cinématique de fin… dans la version Amiga.
Les adversaires sont assez variés
Cette petite faute de goût mise à part, il faut bien reconnaître que le coup d’essai de Westwood Associates avait déjà tout d’un coup de maître, et que si Eye of the Beholder n’avait pas encore les arguments pour renvoyer Dungeon Master dans les oubliettes de l’histoire vidéoludique, il avait déjà largement ceux pour contenter les rôlistes sur PC, et surtout pour faire taire définitivement les ataristes et les amigaïstes qui ricanaient bêtement. Et ça, ça n’a pas de prix.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
Récompenses :
Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Nommé dans la catégorie « Meilleur jeu de rôle sur micro »
NOTE FINALE : 16,5/20
Sorti de nulle part à une époque où personne ne l'attendait plus, Eye of the Beholder est venu réaliser l'un des plus grands fantasmes des rôlistes qui jouaient sur PC en dotant enfin la machine d'IBM de « son » Dungeon Master. Porté par une équipe de Westwood Associates qui allait rapidement se faire un nom dans l'univers vidéoludique, le titre ne se contente pas de reprendre les codes de son illustre modèle mais en profite également, sans aucun complexe, pour débarquer avec ses propres idées, introduisant ainsi des quêtes, des PNJS, une non-linéarité et une variété bienvenues. Tout juste pourra-t-on regretter que l'aspect « survie » de l'aventure soit devenu purement anecdotique, et que le titre soit assez facile – et surtout assez court. Mais pour les amateurs de dungeon crawler, cela reste un titre à essayer absolument – rares sont ceux qui le regretteront.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– L'abondance de téléporteurs et l'impossibilité d'afficher des coordonnées compliquent énormément la cartographie du donjon
– Beaucoup de mécanismes de Donjons & Dragons passent purement et simplement à la trappe, et l'aspect « jeu de rôle » est finalement assez mineur
– On aurait largement signé pour cinq ou six niveaux de plus
– La cinématique de fin caviardée pour que le jeu prenne moins de place
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Eye of the Beholder sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Malgré quelques défauts de jeunesse qui seront sans doute réparés dans les épisodes ultérieurs (SSI nous a habitués à de multiples suites…), ce jeu est tout simplement fabuleux. Les graphismes sont absolument magnifiques (en VGA 256 couleurs), que ce soit pour les monstres, les personnages ou pour les murs des donjons. Eye of the Beholder nous propose, en plus, cinq types de souterrains différents : voilà qui nous change de Dungeon Master ! En revanche, la représentation en 3D ne prend qu’un tiers de l’écran, et seule l’utilisation des 256 couleurs du MCGA permet d’atteindre une telle qualité d’image. »
Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°90, Mai 1991, 18/20
Version Amiga
Développeur : Westwood Associates
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Mai 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée Système de protection de copie par consultation du manuel
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Eye of the Beholder a beau être resté, aux yeux de la postérité, le Dungeon Master sur PC que les rôlistes de l’époque avaient attendu de leurs vœux, cela ne l’a pas empêché de poursuivre sa carrière sur la machine de Commodore où la concurrence était pourtant bien plus féroce – justement à cause de Dungeon Master et de Chaos Strikes Back. L’occasion de mesurer les première retombées de cette époque charnière où le PC était devenu, mine de rien, une machine plus puissante que l’Amiga et l’Atari ST.
On sent bien qu’on a perdu quelques couleurs, mais pas de quoi hurler non plus
Inutile d’ailleurs de s’attarder sur le contenu du titre, résolument identique à celui de la version originale à un petit détail près : la présence d’une cinématique de fin, ultime pied-de-nez aux PCistes qui trouvaient encore le moyen de se voir privés d’un privilège accordé aux amigaïstes. Une fois cette injustice mise à part, on ira plutôt chercher les différences du côté de la réalisation, comme on pouvait s’en douter. À ce niveau, le logiciel de Westwood Associates doit bien évidemment composer avec une palette réduite. C’est clairement moins beau que sur PC – on n’en avait pas encore l’habitude à l’époque – mais force est de reconnaître que le résultat reste très honnête, et toujours largement apte à faire la leçon à Dungeon Master. On sent quand même les dégradés aplanis à la truelle, et le tout n’atteint pas la finesse que proposera Black Crypt l’année suivante. En revanche, côté sonore, l’Amiga rivalise largement avec l’AdLib et la Sound Blaster, particulièrement pour ce qui est des bruitages, un peu plus pêchus sur cette version.
L’interface passe désormais en nuances de rouge, ce qui modifie un peu l’ambiance, mine de rien
NOTE FINALE : 16/20
Eye of the Beholder n’occupe évidemment pas la même place dans le cœur des joueurs Amiga que dans celui des rôlistes PC, trop heureux d’obtenir enfin le clone de Dungeon Master dont on les avait privés depuis si longtemps. Cela n’empêche pourtant pas ce portage de s’en tirer avec les honneurs, en récupérant notamment la cinématique de fin dont la version PC s’était vue amputée. La réalisation graphique ne rivalise évidemment pas avec les 256 couleurs du VGA, mais le voyage au fond des égouts d’Eauprofonde est toujours aussi prenant, alors pourquoi se priver ?
Du côté des fans :
Cette image, qui provient du site https://gamesnostalgia.com, devrait vous aider à vous faire une idée de ce à quoi ressemble la version AGA
Même si on verse ici dans une autre sorte de retrogaming, il existe une version AGA du jeu développée en 2006 par des fans – et nécessitant donc un Amiga 1200 ou 4000, comme vous pouvez vous en douter. Celle-ci offre des graphismes sensiblement identiques à ceux de la version PC, en 256 couleurs. Plus intéressant, elle propose également une carte automatique accessible en cliquant sur la boussole (blasphème !), et surtout une version française. Des apports équivalents ont également été faits à la version Amiga du deuxième épisode. Bref, un bon moyen de se souvenir que la communauté Amiga est encore en vie, et qu’elle est toujours active.
Version PC-98
Développeur : Opera House Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 18 juin 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : –
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Les jeux de rôle occidentaux avaient tendance à être assez populaires au Japon – davantage, en tous cas, que le reste de la production vidéoludique européenne et américaine. Eye of the Beholder aura donc, comme beaucoup d’autres titres du genre avant et après lui, atterri sur la gamme PC-98 de NEC. La limite la plus évidente de la machine apparaîtra assez rapidement : le jeu n’est plus qu’en seize couleurs, et la résolution native élevée de la machine n’est mise à contribution que pour afficher le texte – désormais intégralement en japonais, comme on pouvait s’y attendre. Le résultat est loin d’être hideux, mais il ne rivalise bien évidemment pas avec le VGA, ni même avec ce qu’affichait l’Amiga. La bonne nouvelle, en revanche, c’est qu’il y a désormais de la musique, et que celle-ci colle assez bien à l’ambiance du jeu – sans aller chercher dans des sonorités électroniques comme le ferait la version Mega-CD deux ans plus tard. Le résultat est globalement sympathique, même si l’absence de version anglaise du jeu risque de poser pas mal de problèmes aux joueurs ne connaissant pas le titre originel par cœur, en particulier pour ce qui est de la création de personnages.
C’est ce qu’on était venu chercher, mais dommage que les graphismes ne soient pas plus colorés – ou plus fins
NOTE FINALE : 15,5/20
Porté sur l’ordinateur de NEC, Eye of the Beholder ne perd rien de ce qui faisait sa force, mais devra désormais composer avec des graphismes nettement moins impressionnants, en seize couleurs. En revanche, la présence de thèmes musicaux est clairement la bienvenue. Dommage que le titre soit intégralement en japonais.
Version Mega-CD
Développeur : Opera House Inc.
Éditeur : FCI Inc.
Date de sortie : 22 avril 1994 (Japon) – Août 1994 (États-Unis) – Décembre 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joyoad, SEGA Mouse
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou via la CD BackUp RAM Cart
Vidéo – L’introduction du jeu :
Surprise : Eye of the Beholder aura également tenté l’escapade sur Mega-CD, trois ans après sa sortie initiale sur PC. La plateforme de SEGA aura ainsi pu profiter de plusieurs très bons dungeon crawler, puisqu’elle aura aussi accueilli le portage de Dungeon Master II.
Cette version se défend techniquement très bien
Le jeu en lui-même propose exactement la même aventure que sur les autres supports, en bénéficiant au passage de la cinématique de fin dont avait été privée la version PC – et dans une version différente de celle sur Amiga, ce qui montre que l’on n’a pas affaire à un simple portage. Le titre profite d’ailleurs du support CD-ROM pour proposer des thèmes musicaux (composés par Yuzo Koshiro !) n’ayant rien à voir avec ceux des versions informatiques, dans un style électronique qui tranche radicalement avec l’atmosphère médiévale – ce qui ne conviendra sans doute pas à tout le monde – mais la musique, cette fois, vous accompagne en jeu au lieu de s’arrêter à l’écran-titre. Surtout, cette version est la seule à proposer des doublages, d’une qualité assez honnête, et surtout les bruitages sont de bien meilleure qualité. Rien à redire de ce côté, donc.
C’est moins coloré que sur PC, mais bien plus détaillé que sur Amiga
Graphiquement parlant, si le jeu doit composer avec les mêmes limitations que sur Amiga, n’hésitons pas à dire qu’il s’en sort beaucoup mieux. Certes, c’est toujours moins coloré que sur PC, mais l’ambiance est beaucoup plus proche de ce qu’offrait la version originale que ce qu’on avait pu voir sur la machine de Commodore. Surtout, les animations des monstres ont été retravaillées, tout comme celles de vos personnages : non seulement les combats sont immensément plus fluides, mais vous pourrez en plus voir l’animation de l’impact de vos coups, un peu à la façon des premiers Final Fantasy ! Bref, encore une fois, du travail fait avec grand soin. En termes de prise en main, là encore, c’est le sans faute. Non seulement la jouabilité au pad est entièrement configurable – le titre vous laisse choisir entre trois modes de jouabilité et vous laisse même sélectionner la vitesse du curseur – mais en plus, le logiciel a l’excellente idée de reconnaître la souris vendue sur Mega Drive. On peut donc profiter d’une jouabilité presque aussi bonne que sur PC – presque car, naturellement, pas question d’utiliser les flèches du clavier pour se déplacer ici. Au final, un portage absolument irréprochable, qui pourrait même convaincre les fans de la première heure de replonger le temps de découvrir cette version.
Les combats sont plus vivants que jamais. Remarquez comme les pieds des kobolds sont cette fois dans l’eau, contrairement aux autres versions
NOTE FINALE : 16,5/20
Eye of the Beholder sur Mega-CD est une excellente surprise : non seulement le titre rivalise sans peine avec la version PC sur tous les points à part les graphismes, mais il profite même d’animations améliorées et de musiques CD, ainsi que d’une gestion de la souris qui font qu’on voit difficilement comment cette version aurait pu être de meilleure qualité. De la jouabilité à la réalisation, le titre ne déçoit absolument jamais, et seul le choix d’une musique aux accents électronique pourra éventuellement décevoir une partie des joueurs. Une version à (re)découvrir.
Version SNES
Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom U.S.A., Inc.
Date de sortie : 18 mars 1994 (Japon) – Avril 1994 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad, souris Super Nintendo
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb Système de sauvegarde par pile
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Après avoir accueilli son propre portage de Dungeon Master, quoi de plus naturel que de voir la 16 bits de Nintendo recevoir son portage d’Eye of the Beholder ? La machine de la firme au plombier doit d’ailleurs composer avec les mêmes limitations que pour le jeu de FTL Games : une résolution limitée et une jouabilité au pad… au détail près qu’Eye of the Beholder, lui, tire profit de la souris Super Nintendo.
Hé ! Où est passé mon bouton « modify » ?
Niveau contenu, tout d’abord, le jeu est identique aux autres versions, à une nuance près : il n’est plus possible de modifier les statistiques de ses personnages pendant leur création. Ce choix étrange oblige à multiplier les lancers de dés jusqu’à obtenir enfin le héros de vos rêves, ce qui peut prendre inutilement un temps considérable, surtout si vous êtes du genre perfectionniste. Bref, une lourdeur qui ne dérangera pas les puristes mais qui énervera prodigieusement le commun des mortels, dommage.
En terme de réalisation, ensuite, ce portage s’en tire clairement beaucoup mieux que celui de Dungeon Master – sorti, il est vrai, trois ans plus tôt. La résolution limitée de la Super Nintendo oblige à tasser pas mal de choses, mais la console s’en tire plutôt bien et l’interface n’a pas à souffrir des quelques modifications qui y ont été apportées. Les graphismes utilisent assez bien la large palette de la machine, et s’ils sont moins fins que sur Mega-CD, ils sont également plus colorés. En revanche, les animations ne profitent pas des améliorations constatées sur CD. Niveau sonore, la musique passe très bien et à l’avantage de coller au thème entendu sur ordinateurs, ce qui choquera sans doute moins les puristes que le choix radical opéré sur la console de SEGA. Les bruitages, eux, sont de bonne qualité.
Ce n’est pas magnifique, mais c’est joli et lisible
Du côté des contrôles, les possesseurs de la souris seront aux anges – ceux du pad ne devraient pas trop se plaindre, eux non plus, tant la jouabilité a une nouvelle fois été très bien pensée. Avec un peu de pratique, on apprend très rapidement à manœuvrer presque aussi vite que sur ordinateur, d’autant que le titre accumule les bonnes trouvailles – comme le fait de vous faire passer automatiquement à l’arme suivante chaque fois que vous frappez un monstre. J’irais même jusqu’à dire qu’un joueur chevronné pourra parvenir à être plus efficace au pad qu’un joueur au clavier et à la souris sur ordinateur, un bel exploit !
Eye of the Beholder est décidément un jeu très réussi quelle que soit la plateforme qui l’accueille
NOTE FINALE : 16/20
Réalisation de bonne qualité, jouabilité irréprochable ; Eye of the Beholder sur Super Nintendo évite la quasi-totalité des écueils qu’on pouvait s’attendre à trouver sur sa route et livre une expérience de jeu très satisfaisante. Dommage, malgré tout, que la création de personnage soit particulièrement exigeante dans cette version.
BONUS : Une interview (en anglais) de David Darrow, l’illustrateur de la boîte du jeu, expliquant comment l’image a été réalisée, à lire ici.
Développeur : FTL Games Éditeur : FTL Games Titres alternatifs :Crystal Dragon (titre de travail), ダンジョン・マスター (graphie japonaise) Testé sur :Atari ST – Amiga – Apple IIgs – FM Towns – PC-98 – Super Nintendo – PC (DOS) Version non testée : Sharp X68000
Version testée : Version disquette 1.3 française testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Le groupe d’aventuriers marche à l’intérieur des couloirs obscurs. La torche crépite. La pierre est glissante. La lumière dansante dessine des visages grimaçants sur les reliefs des murs. On s’arrête pour dresser un feu de camp ; le clerc en profite pour tenir le plan du donjon à jour. On discute, à voix basse, on prépare les potions et les sortilèges pour l’expédition de demain. Le guerrier qui monte la garde fait signe à tout le monde de se taire. On tend l’oreille. Des grognements résonnent, près, tout près… Le groupe se relève dans l’urgence et se prépare au combat.
Le début du jeu consistera à aller choisir vos personnages. Réfléchissez bien !
Au milieu des années 80, les jeux de rôles, fussent-ils sur papier ou sur ordinateur, étaient encore très largement une affaire d’imagination. La fenêtre de jeu à proprement parler occupait d’ailleurs généralement la portion congrue de l’écran ; le gros de l’interface était mobilisé à afficher des statistiques, des caractéristiques, des listes de commandes, des descriptions textuelles. Pour peu que l’on morde au concept – et que l’on parle anglais, le plus souvent – il fallait reconnaître que la magie opérait malgré tout, à condition de dépasser une prise en main laborieuse et une réalisation… austère. Si s’enfoncer au fond du donjon de Wizardry procurait son lot de sueurs froides, cela restait avant tout dû à l’effrayante difficulté du titre. Les combats comme l’exploration constituaient une affaire lente, méthodique, qu’on pouvait tout à fait mener en buvant un café et en fumant une cigarette, voire en lisant son journal. On planifiait, on réfléchissait, on pesait le pour et le contre ; bref, on jouait à un jeu de rôle comme on aurait joué aux échecs : avec la tête bien froide et beaucoup de temps devant soi.
Le dungeon crawler résumé en un écran : des déplacements en case par case, des pièges, des énigmes
Le truc, c’est qu’on se sentait impliqué par ce qui se passait en jeu comme on l’aurait été en lisant un livre : en laissant l’imagination faire tout le boulot. On visualisait le donjon, les créatures, les scènes de bataille, les trésors, mais on n’avait jamais le sentiment de le vivre comme si on y était, au point de regarder nerveusement derrière soi, de tendre l’oreille à l’affut du moindre bruit suspect, ou de bien s’assurer d’être dans un endroit sûr avant de continuer à dessiner le plan du donjon afin d’éviter de se faire attaquer par surprise. Ça n’était tout simplement pas comme ça que se jouait un jeu de rôle vidéoludique.
Jusqu’à Dungeon Master.
Lisez attentivement tous les parchemins que vous trouverez
Imaginons ensemble un scénario classique. Au fin-fond de son donjon, le Seigneur Gris cherchait un moyen de créer un monde harmonieux en utilisant le pouvoir de la Gemme de Puissance ensevelie au cœur de la montagne. Encore fallait-il pour cela parvenir à extraire la fameuse gemme ; malheureusement, une erreur d’incantation provoqua rien de moins qu’une explosion suffisamment puissante pour changer le cours de la réalité. Le Seigneur Gris lui-même fut divisé en deux entités : une moitié positive, chassée du monde matériel et condamnée à errer dans les limbes, et une moitié négative, qui s’appropria le donjon avec l’objectif affiché de détruire ce qu’il restait du monde. Le Seigneur Gris avait également un apprenti, Theron, que l’explosion avait réduit au stade de simple esprit sans forme matérielle. Librasulus, la moitié positive, le chargea de pénétrer dans le donjon pour ramener à la vie quatre champions afin de les diriger dans leur quête. Ces quatre aventuriers devraient s’emparer du Bâton de Feu qui leur permettrait ensuite de mettre la main sur la Gemme de Puissance et de restaurer la réalité. Ils devraient bien évidemment, pour se faire, affronter les pièges et les monstres placés par la part négative du Seigneur gris, Lord Chaos…
Chaque adversaire a ses point faibles. Mieux vaut affronter celui-ci au corps-à-corps
Vous allez donc incarner Theron et, à travers lui, les quatre aventuriers que vous choisirez de ressusciter lors des premières minutes de jeu. Première originalité, en effet – et très bonne trouvaille en terme d’immersion – vous ne « créez » pas à proprement parler votre groupe ; vous visitez le premier niveau du donjon où sont conservés les âmes de vingt-quatre champions. Vous pourrez consulter leurs caractéristiques, leurs aptitudes dans quatre classes (guerrier/ninja/prêtre/voleur) ainsi que l’équipement avec lequel ils débuteront la partie. Vous pourrez également choisir de leur faire oublier leur connaissances, en échange d’un bonus à leurs caractéristiques – ce qui vous laissera, au passage, l’occasion de les renommer. On appréciera l’éclectisme des héros à disposition, tirant leur inspiration des poncifs de l’heroic fantasy, mais aussi de personnages littéraires (Halk rappelle furieusement Conan le barbare) ou historique (Leif est inspiré de l’explorateur Leif Erikson).
Il y a plusieurs façons d’ouvrir une porte – la magie et la force brute en font partie
Les habitués du jeu de rôle auront déjà relevé le fait que chaque personnage puisse posséder plus d’une seule classe. Il est en effet tout à fait possible, dans Dungeon Master, de voir un guerrier lancer une boule de feu ou un magicien se vêtir d’une armure lourde. Leur niveau d’aptitude dans chacune des quatre classes (depuis l’ignorance totale jusqu’au rang de Grand Maître) décidera de leur efficacité dans ce rang de compétence. Ainsi, si un magicien néophyte devra parfois s’y prendre à plusieurs reprises pour lancer les sortilèges les plus simples, un mage plus expérimenté pourra se frotter à des sortilèges de plus en plus complexes sans rencontrer de difficulté. Il en va de même pour la précision d’un guerrier, ou pour la capacité d’un prêtre à créer des potions. Et comment faire progresser son niveau d’aptitude ? Eh bien selon un système simplissime qui sera repris jusque dans Lands of Lore ou dans la série des Elder Scrolls : en pratiquant, tout simplement.
Les statistiques en rouge correspondent à celles qui ont augmenté lors de votre montée en grade
Concrètement, oubliez les points d’expérience : si vous voulez progresser dans le métier de guerrier, tapez au corps-à-corps, si vous voulez progresser au rang de magicien, jetez des sorts, si vous voulez devenir un ninja accompli, utilisez des armes à distance, etc. C’est simple comme bonjour, et cela permet à un personnage débutant de s’entraîner à peu de frais, puisque rien ne vous empêche, par exemple, de lui faire jeter ses armes contre un mur jusqu’à ce que son niveau de ninja ait augmenté. Cela permet, en tout cas, à la progression de votre groupe de se faire de la façon la plus fluide et la plus naturelle qui soit, d’autant que chaque montée en grade s’accompagnera d’un bonus de statistiques.
Vous allez apprendre à bénir les adversaires qui vous laissent de la nourriture
Mais la véritable révolution du jeu, on s’en doute, ne se situe pas là. Même si le titre était déjà, par sa réalisation, extrêmement immersif pour l’époque (les graphismes du jeu, qui ont d’ailleurs très bien vieilli, passaient pour absolument superbes en 1987), l’idée de génie est en réalité une trouvaille toute simple : le fait que le jeu se déroule intégralement en temps réel.
Un groupe de monstres est un défi beaucoup plus délicat à relever qu’un adversaire seul
Dorénavant, lorsque vous hésitez sur la route à suivre en arrivant à une intersection, il faudra vous attendre à vous faire agresser par une ou plusieurs créatures que vous n’aviez pas vues ou entendues venir pendant que vous réfléchissiez. Il faut bien visualiser ce qu’était un jeu de rôle en 1987 pour comprendre l’étendue de la claque que Dungeon Master représentait alors : plus besoin de trésors d’imagination pour se croire au milieu d’un donjon, on y était ! Les montres ont leur vie propre, chacun a son comportement en combat, et il faut désormais les affronter en se souciant de problématiques qui n’avaient jusqu’alors aucun sens, comme de se montrer mobile ou tirer parti de la configuration des lieux. Vous apprendrez ainsi très vite à faire usage des nombreuses portes placées sur votre route pour les faire se refermer sur les monstres qui vous agressent, et ainsi essayer de les écraser dans la manœuvre. Et plus question, désormais, de prendre un café en jouant : attendez-vous à faire des bonds de plusieurs mètres de haut en vous faisant surprendre par un adversaire imprévu alors que vous étiez sagement en train de dresser le plan du niveau : le dungeon crawler vient de naître, et il va vous apprendre à développer des réflexes de survie que vous n’aviez encore jamais imaginés.
On admirera avec quelle ingéniosité le titre parvient à se mettre en scène
Tout cela est bien beau, mais la surprise n’a plus franchement cours pour un joueur du XXIe siècle. Dungeon Master aura initié une longue lignée de clones, d’Eye of the Beholder à Lands of Lore en passant par Stonekeep, Black Crypt, Captive ou les récents épisodes de Legend of Grimrock. Tout le monde connait peu ou prou les ficelles, à présent : un groupe de quatre aventuriers disposés en deux lignes, les deux personnages à l’arrière ne peuvent pas directement se battre au corps à corps – ce qui fait qu’on réserve ces places aux jeteurs de sorts, etc. Des leviers, des clefs, des passages secrets, des puits, des téléporteurs, des messages énigmatiques gravés à-même les murs, des énigmes… Il y a déjà tout cela, dans Dungeon Master – et on ne peut d’ailleurs qu’être admiratif en voyant avec quelle exhaustivité tous les mécanismes du genre étaient déjà présents dans ce titre précurseur. Mais le jeu de FTL Games présente-t-il toujours un quelconque intérêt pour le joueur moderne qui le découvrirait aujourd’hui sans le filtre de la nostalgie ?
N’oubliez pas que vous n’êtes pas les seuls à pouvoir tirer à distance !
La réponse est oui, mille fois oui, et tient à deux critères : la qualité irréprochable du level design, et l’ingéniosité des mécanismes de jeu. La progression dans les quatorze étages du jeu est réellement passionnante, tant les niveaux sont parfaitement agencés, sachant demander à chaque fois de nouvelles approches – pour un titre de 1987, la mise en place progressive de tous les mécanismes de gameplay et leur introduction au joueur est plus qu’intelligente, elle est proprement extraordinaire. Les premiers niveaux sont un didacticiel déguisé, une piste guidée pour vous aider à assimiler progressivement toute la logique qui se révèlera indispensable au moment de prétendre aborder les profondeurs du donjon, qui sont proprement redoutables. Et non seulement ça marche mais, plus incroyable encore, ça marche pour ainsi dire exactement aussi bien qu’il y a trente-cinq ans ! Il est d’ailleurs à noter que le jeu bénéficie de plusieurs fins, chose encore très rare à l’époque : il vous est ainsi parfaitement possible de ramener le Bâton de Feu à la surface après avoir mis la main dessus sans vous préoccuper de la Gemme de Puissance ; je vous laisse découvrir ce qui se produira si vous optez pour cette solution. En fait, le titre de FTL Games est très difficile à prendre en défaut au niveau de ses possibilités et de son contenu, et on se prend très vite au jeu une fois qu’on a fait l’effort de lui consacrer une ou deux heures.
Les choses peuvent très vite mal tourner
On appréciera également le système de magie à base de syllabes, un peu à la façon de ce qu’allait proposer UltimaVun an plus tard, mais en plus graphique. Surtout, le fait que le jeu gère à la fois la nourriture, la boisson, le repos et la lumière est extrêmement efficace pour placer l’atmosphère du donjon, et pour faire peser sur vos épaules une pression constante. Si la nourriture ne constituera pas un problème au début du jeu, les ressources vont aller en s’amenuisant, et vous serez parfois bien inspirés de revenir quelques niveaux en arrière, le temps de trouver des zones où réapparaissent des montres ayant l’énorme avantage d’être comestibles, pour éviter de voir votre groupe surpuissant mourir bêtement d’inanition. De la même manière, vous apprendrez à conserver vos gourdes comme des trésors, et à croiser la moindre fontaine vous permettant de les remplir avec un énorme soupir de soulagement, surtout dans les derniers niveaux. Et voir la lumière décliner alors que des montres errent dans les parages et que vos magiciens sont désespérément à cours de mana fait également toujours son petit effet…
Coincer les ennemis sous une porte va vite devenir une seconde nature
Seul réel défaut de Dungeon Master : son interface, pour bien pensée qu’elle soit, aura aussi eu la tâche ingrate d’essuyer les plâtres et de se révéler un tantinet plus lourde, à l’emploi, que ce que proposeront ses successeurs. Par exemple, accéder à l’inventaire d’un de vos personnages pour y saisir une potion et la passer à un autre de vos héros afin qu’il la boive est une opération laborieuse qui prend du temps – suffisamment pour vous interdire d’y avoir recours au milieu d’un combat. Dans le même ordre d’idée, il faudra recomposer intégralement un sortilège à chaque fois que vous voudrez le lancer, ce qui vous obligera bien souvent à préparer votre sort à l’avance pour avoir une chance de l’utiliser en plein affrontement. Et mieux vaut avoir une bonne mémoire, tant consulter ses notes pour se souvenir d’un sortilège pendant qu’on se fait taper dessus est une mauvaise idée…
Les interrupteurs sont parfois très bien cachés
Niveau réalisation, comme cela a déjà été évoqué, Dungeon Master était absolument superbe pour 1987, et reste très agréable à l’œil pour un titre en 16 couleurs. Tous les monstres sont animés, se déplacent, attaquent, vous tirent dessus ou vous jettent des sorts, les grilles grincent, les torches brûlent… En revanche, il n’existe qu’un seul type de décor – attendez-vous à voir les mêmes murs gris du début à la fin du jeu.
Ces autels permettront de relever vos morts – hélas, ils sont très rares
On touche d’ailleurs là autant à une contrainte technique qu’à une volonté de game design : Doug Bell, l’un des créateurs du jeu, tenait à ce que le logiciel tienne sur une seule disquette afin que le joueur n’ait jamais à briser l’immersion en ayant à changer de disque au beau milieu de l’action. Le programme allait même jusqu’à lancer de faux accès-disques afin de vous faire croire qu’il était en train de charger un monstre ! On notera aussi qu’il n’y a pas le moindre thème musical, mais le silence est de toute façon très efficace pour mettre en valeur les quelques bruitages du jeu – on regrettera en revanche qu’on ne puisse pas entendre les monstres bouger ou que le son soit en mono ; des détails qui seront corrigés au gré des portages.
Les éléments de décor attirent immédiatement l’attention
Difficile d’en prendre plein la vue et les oreilles, mais on a toujours autant le sentiment d’être perdu au fond d’un donjon où le danger peut venir de partout, ce qui est très exactement l’objectif du jeu – rempli, à tous les niveaux, même plus de trente ans après. Comptez facilement une trentaine d’heures pour venir à bout du titre.
Un mot, enfin, sur la version française, qui a le mérite d’exister. Si celle-ci est riche en coquilles à tous les niveaux, du manuel au jeu proprement dit (vos personnages ne sont pas empoisonnés, ils sont « vénéneux »…), elle ne pénalise heureusement pas l’expérience de jeu, et vous n’aurez pas à vous arracher les cheveux face à une énigme pour cause d’énoncé traduit n’importe comment. Bref, rien d’inoubliable, mais une excellente occasion pour les non-anglophones de ne pas se sentir lésés.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
Récompenses :
Best Role Playing Game (Meilleur jeu de rôle) – Powerplay, 1988
Tilt d’or 1988 – Meilleur jeu de rôle (version Atari ST)
#2 Top Atari ST Classic Games – ST Format, 1991
#4 in « 50 finest Atari ST games of all times » (50 meilleurs jeux Atari ST de tous les temps) – ST Format, 1993
NOTE FINALE : 18/20
Véritable miracle vidéoludique, Dungeon Master aura fait, à sa sortie, l'effet d'un grand coup de chiffon sur la poussière qui menaçait déjà de recouvrir l'univers du jeu de rôle informatique. Proposant une expérience extraordinairement immersive, où le joueur avait pour la première fois la sensation d'évoluer en temps réel au milieu d'un donjon, le titre de FTL Games aura contribué à démocratiser et à populariser un genre que sa complexité réservait alors à un public de niche aussi patient qu'imaginatif. L'ingéniosité de la conception des niveaux, ainsi que des mécanismes de jeu, fait que l'expérience est encore très agréable plus de trente ans après sa sortie. Rien d'étonnant, donc, à ce que DungeonMaster reste aujourd'hui un des jeux de rôles les plus célèbres jamais créés. Objectivement, il le mérite.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Interface parfois un peu poussive
– Réalisation sonore encore sous-exploitée
– Difficulté à l'ancienne
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dungeon Master sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« On peut résumer Dungeon Master en un seul mot : FABULEUX ! Cela valait vraiment la peine d’attendre sa sortie pendant deux ans. Dungeon Master est au jeu de rôle ce que « Star Wars » est au cinéma. Il supplante, et de loin, tous les jeux de rôle du même style. Son système même est extraordinaire. Un écran assez large remplace la petite fenêtre en 3D habituellement utilisé dans les Sorcelleries (sic) et Bard’s Tale. L’impact visuel est stupéfiant, on a l’impression d’ÊTRE dans le donjon ! »
Dany Boolauck, Tilt n°52, Mars 1988, 18/20
Version Amiga
Développeur : FTL Games
Éditeur : FTL Games
Date de sortie : Octobre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette 3.60 testée sur Amiga 500
Les graphismes n’ont pas bougé, mais l’ambiance sonore est encore meilleure
Dungeon Master aura été l’un des plus fantastiques moments de gloire pour les possesseurs d’Atari ST, LE jeu capable de rendre jaloux tous les joueurs coincés sur leur Apple II, leur Commodore 64 ou leur PC. Bien évidemment, après son gigantesque succès critique et, rapidement, commercial, le titre de FTL Games ne pouvait pas rester cantonné sur la machine d’Atari. Justement, l’ordinateur de Commodore venait d’apparaître dans les magasins spécialisés, et avait largement les capacités techniques pour pouvoir prétendre faire tourner Dungeon Master… ce qu’il fait d’ailleurs très bien, dans une version pratiquement identique à celle parue sur Atari ST – à condition, toutefois, de posséder un modèle à 1Mb de RAM. Le jeu était d’ailleurs parfois vendu en bundle avec l’extension de mémoire AmiRAM. Le jeu ne profite donc pas de la palette étendue de l’Amiga : la réalisation est restée en 16 couleurs, comme elle le restera d’une machine à l’autre au mépris des années. Niveau sonore, le jeu est cette fois en stéréo, et on entend désormais les monstres se déplacer – un gros plus pour l’ambiance. À noter également que le jeu aura été mis à jour au gré de ses sorties, jusqu’à aboutir à la version 3.6, laquelle corrige quelques petits détails énervants de la version ST. Ainsi, vous pouvez désormais boire directement aux fontaines sans avoir à remplir au préalable une gourde, et il est possible de cliquer sur les parois pour déceler les murs illusoires plutôt que de rentrer dedans (ce qui faisait du dégât). Bref, du peaufinage bienvenu.
NOTE FINALE : 18,5/20
À première vue totalement identique à la version ST, Dungeon Master sur Amiga profite en fait de toute une série de petites améliorations, particulièrement dans sa version 3.6, qui rendent l’expérience globalement plus agréable et plus immersive. Le fait d’entendre les monstres se déplacer autour de vous en stéréo rajoute à l’ambiance générale, et le titre est toujours aussi prenant. Une très bonne pioche, donc.
Version Apple IIgs
Développeur : FTL Games
Éditeur : FTL Games
Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette 2.1
Configuration minimale : RAM : 1Mo
On ne se sent pas dépaysés, hein ?
La nouvelle machine d’Apple aura disposé de sa propre version de Dungeon Master, avant d’être laissée à l’abandon pour ne pas faire d’ombre au Macintosh. Développée en parallèle de la version Atari ST, elle aura en fait disposé d’un clone exact de la version 3.6 sur Amiga, au pixel près. Seule petite nuance : l’existence d’un « Kid Dungeon », sorte de donjon d’initiation pour débutants, composé de trois niveaux, et accessible au lancement du jeu.
NOTE FINALE : 18,5/20
En 1989, Dungeon Master était toujours un grand jeu, et l’Apple II GS aura pu bénéficier d’une version identique à celle parue sur Amiga – et même enrichie d’un petit donjon simplifié supplémentaire. Le jeu est toujours aussi bon, mais dommage qu’il ne tire pas réellement parti des capacités de la machine d’Apple.
Version FM Towns
Développeur : FTL Games
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Novembre 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : –
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Dungeon Master est une saga qui aura connu une relation privilégiée avec le Japon, au point que Dungeon Master II sorte en priorité sur le marché japonais. Signe de cette relation (qu’on pourrait d’ailleurs plus largement étendre au jeu de rôle occidental des années 80), le portage du jeu sur les meilleurs systèmes domestiques de l’époque, à commencer par le FM Towns. Assuré par FTL eux-mêmes, ce portage est tout simplement une conversion fidèle à 99% de la version originale, à trois nuances près : quelques minuscules variations dans la taille de l’interface (qui ne changent rien à celle de la fenêtre de jeu) dans la version en japonais, la présence d’une vingtaine de thèmes musicaux au long du jeu (ainsi qu’à l’écran de lancement, où le thème sera repris plus tard sur la version PC), qui ont l’avantage d’offrir une ambiance un peu plus variée que le simple silence de mort, mais qui ne sont pas suffisamment marquants pour représenter une véritable plus-value à mes yeux (et surtout à mes oreilles). Disons simplement qu’on était en droit d’attendre quelque chose de plus pesant, de plus intrigant et de moins… je ne sais pas, neutre ? Enfin, pour ceux qui craignaient de devoir décrypter le jeu en japonais, vous serez heureux d’apprendre que la version anglaise est disponible sur le CD-ROM, via un exécutable dédié. Bref, la même chose, mais avec de la musique, pourquoi se plaindre ?
On se croirait sur Amiga ou sur Atari ST, mais avec de la musique sur la chaîne Hi-Fi
NOTE FINALE : 18,5/20
Dungeon Master sur FM Towns n’est vraiment pas grand chose de plus que le titre original traduit en japonais avec quelques thèmes musicaux, d’ailleurs assez inégaux, en bonus. Le titre étant également jouable en anglais, voici un très bon moyen de découvrir le titre de FTL Games en musique.
Version PC-98
Développeur : FTL Games
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : 9 février 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Système : PC9801 VM/VX
On a perdu quelques couleurs, même si c’est très discret
Après le FM Towns, le PC-98 et le Sharp X68000 auront eu le droit à leur adaptation de Dungeon Master au cours de l’année 1990. Dans le cas qui nous intéresse ici, inutile d’espérer réentendre les thèmes musicaux présents sur CD-ROM : on en revient à l’exact équivalent de ce qu’on pouvait entendre dans la version originale. Graphiquement, et de façon assez curieuse (le PC-98 affichant 16 couleurs, exactement comme l’Atari ST), les graphismes sont un peu différents dans cette version. Traduit en clair : les monstres sont affichés dans une palette de couleurs plus réduite que sur les autres machines, et il n’y a plus dorénavant que trois niveaux d’éclairage. Si, dans l’absolu, cela ne dégrade pas dramatiquement l’expérience de jeu, le fait qu’à peu près toutes les autres versions fassent mieux sur le plan graphique, additionné au fait que ce portage soit exclusivement disponible en japonais, conduira le joueur lambda à ne pas se donner le mal de dénicher cette version.
NOTE FINALE : 17,5/20
Petite déception pour cette version PC-98 de Dungeon Master, qui affiche des lacunes graphiques, certes assez discrètes, qui n’existent pas dans les autres portages. Sachant que cette adaptation n’offre de toute façon rien qui sorte de l’ordinaire, et qu’elle n’existe qu’en japonais, on ne la recommandera qu’aux collectionneurs.
Version Super Nintendo
Développeur : FTL Games
Éditeur : JVC Musical Industries Europe, Ltd.
Date de sortie : 20 décembre 1991 (Japon) – Août 1992 (Europe) – Juin 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb Système de sauvegarde par pile
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Dungeon Master se sera également autorisé une escapade sur console de salon, en 1991, sur Super Nintendo. La machine du plombier moustachu était alors en début de vie, et cela se sent en contemplant la réalisation du titre, plutôt décevante. La résolution de la 16 bits de Nintendo est en effet toujours aussi limitée, ce qui fait beaucoup de mal à la finesse des graphismes originaux, tandis que les couleurs, elles, ne semblent pas bénéficier de la palette étendue de la console. Traduit en clair, c’est moins beau que sur Atari ST, ce qui n’est pas complètement normal quand on sait de quoi la Super Nintendo est capable.
Consulter les statistiques des personnages vous demande désormais de jongler entre deux écrans
Du côté des ajouts, cette version a au moins le mérite de bénéficier d’une introduction qui aura la générosité de vous présenter le scénario sans avoir à lire tout le manuel. Bon, cela reste un simple pavé textuel avec une image dans le fond, mais on appréciera l’effort. On notera également que cette version est la seule à bénéficier d’un thème musical, hélas vite répétitif et retranscrivant assez mal l’atmosphère générale, pendant toute la partie. Les monstres, eux, font toujours du bruit et le jeu a le bon goût d’être en stéréo. La vraie zone d’ombre, cependant, était constituée par la maniabilité au pad – pas encore de souris Super Nintendo, en 1991. Le titre fait le maximum à ce niveau, en vous laissant déplacer normalement le curseur, mais surtout en activant un mode déplacement d’une simple pression sur Select qui vous permettra alors de bouger en utilisant les flèches et les deux boutons de tranche. Cela demande un petit temps d’adaptation, et il reste assez délicat de parvenir à se battre en tournant autour des monstres, mais on pouvait difficilement faire mieux. On ne pourra que regretter que la version française n’ait jamais fait le trajet jusqu’à ce portage, en revanche.
La réalisation n’est pas inoubliable
NOTE FINALE : 15/20
Le portage de Dungeon Master sur Super Nintendo n’a pas été bâclé, c’est indéniable. La maniabilité au pad ne rivalisera jamais avec celle à la souris, mais elle a été très intelligemment pensée. La plus grosse déception se trouve plutôt au niveau de la réalisation, tout juste passable, qui ne rivalise vraiment pas avec ce qu’offraient les versions sur ordinateurs. Une curiosité, mais définitivement pas la version à privilégier pour découvrir le jeu.
Version PC (DOS)
Développeur : FTL Games
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Août 1992
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette 3.4
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, Disney Sound Source, FTL Sound Adapter, haut-parleur interne, Sound Blaster
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Cinq ans… Il aura fallu pas moins de cinq ans pour voir enfin Dungeon Master débarquer sur PC. L’attente avait été si longue, si insupportable, que la concurrence en avait profité pour s’infiltrer dans la brèche et pour proposer un concurrent très sérieux, à savoir la série des Eye of the Beholder qui non seulement avait doté le PC de « son » Dungeon Master, mais avait même fini par supplanter le maître en proposant une réalisation et un contenu à la hauteur de la nouvelle génération de machines en 256 couleurs. On pouvait donc s’attendre à ce que FTL Games cherche à se faire pardonner pour son retard, en proposant une version largement optimisée de son titre légendaire.
Perdu.
Le FTL Sound Adapter, uniquement commercialisé avec la version américaine du jeu (source : http://dmweb.free.fr)
Incroyable mais vrai : FTL Games aura tout simplement choisi de fermer les yeux sur cinq ans de production vidéoludique pour proposer une version en 16 couleurs globalement identique à celle parue sur Atari ST en 1987. En 1992 ! Certes, le titre profite de toutes les améliorations de la version 3.6 (encore heureux !), et récupère même pour l’occasion le thème musical de l’écran-titre (et uniquement celui-là) entendu sur FM Towns. C’est également la seule version à bénéficier d’une cinématique de fin, d’ailleurs pas très impressionnante, même à l’époque. Par contre, le titre est repassé en mono (!) et ne supporte pas la Roland MT-32… À noter d’ailleurs que le titre était vendu aux États-Unis avec un périphérique à brancher sur le port joystick et qui était censé améliorer la qualité sonore du jeu (le thème musical de l’écran-titre est ainsi plus long avec lui). Reste que les quelques ajouts purement anecdotiques n’auront pas empêché ce portage de subir un four à sa sortie, dépassé par une concurrence en pleine bourre : Lands of Lore allait sortir quelques mois plus tard. Sérieusement, dans quelle grotte les développeurs de FTL avaient-ils bien pu rester cachés pendant cinq ans ?
En 1992, le PC était capable de beaucoup, beaucoup mieux que ça
NOTE FINALE : 18,5/20
Si Dungeon Master sur PC est objectivement la meilleure version occidentale du titre – quoique d’assez peu – elle aura surtout souffert d’une date de sortie hallucinante, qui l’aura vue débarquer cinq ans après la version ST sur des machines qui avaient déjà eu l’occasion de faire tourner des élèves désormais bien supérieurs au maître. Le jeu de rôle informatique avait même eu le temps de vivre sa deuxième révolution avec la sortie d’Ultima Underworld. Prise en étau entre la saga des Eye of the Beholder et la sortie de Lands of Lore, cette version PC aura rapidement sombré dans l’anonymat, mais reste la plus agréable à jouer pour ceux qui souhaiteraient découvrir le titre aujourd’hui.
Les avis de l’époque :
« Pourquoi diable ont-ils attendu si longtemps pour produire cette version PC ? Ce jeu, qui aurait été un très grand jeu il y a seulement quelques mois, est maintenant un peu dépassé. Il pourra cependant intéresser les nostalgiques et les grands débutants. Un monument de l’histoire du jeu vidéo qui tente un come back… »
Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°106, Octobre 1992, 16/20
Développeur : Lucasfilm Games LLC Éditeur : Lucasfilm Games LLC Testé sur :PC (DOS) – Amiga – Atari ST – FM Towns – Macintosh – SEGA CD Disponible sur : Browser, iPad, iPhone, Macintosh, PlayStation 3, Windows, Xbox 360 (The Secret of Monkey Island : Édition Spéciale) En vente sur :GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)
La saga Monkey Island (jusqu’à 2000) :
The Secret of Monkey Island (1990)
Monkey Island 2 : LeChuck’s Revenge (1991)
The Curse of Monkey Island (1997)
Escape from Monkey Island (2000)
Version PC (DOS)
Date de sortie : Octobre 1990 (version EGA) – Décembre 1990 (version VGA) – Août 1993 (version CD-ROM)
Versions testées : Versions EGA, VGA et CD-ROM émulées sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 (version disquette), Intel 80286 (version CD-ROM) – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 640ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA (version VGA), Tandy/PCjr, VGA (version VGA) Cartes sonores supportées : AdLib, Game Blaster, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I (via un patch pour la version EGA), Sound Blaster, Tandy/PCjr
Vidéo – L’écran-titre du jeu (VGA) :
Au plus profond des Caraïbes…
Voilà déjà une phrase qui plante immédiatement le décor. Le XVIIe siècle, l’âge d’or de la piraterie, le rhum, le grog, les corsaires, les ports improbables où la vie ne valait pas cher, les échanges de coups de canons entre les galions et les corvettes, et des îles plus ou moins connues éparpillées par dizaines entre la mer des Sargasses et Maracaibo. Avouez que ça fait rêver, non ?
The Secret of Monkey Island, un certain sens de la mise en scène (VGA)
Autres temps, autres mœurs : nous sommes en 1990, à un des tournants de l’âge d’or du jeu vidéo, et Lucasfilm Games est en pleine forme. Après avoir connu un joli succès d’estime avec des titres comme Maniac Mansion ou Zak McKracken, le studio américain commençait à se faire un nom plus que respectable au sein de l’univers vidéoludique. Pourtant, le changement de décennie allait s’annoncer comme une année charnière, avec la parution de deux titres qui marqueront les mémoires pour des raisons différentes : l’excellent Loom et le légendaire The Secret of Monkey Island.
Guybrush Threepwood réussira-t-il à triompher de toutes les épreuves ? (EGA)
Prenez un jeune freluquet au nom improbable de Guybrush Threepwood. Imaginez-le en train de débarquer, une nuit, sur l’île de Mêlée™, en clamant haut et fort son unique objectif : devenir un pirate. Bien évidemment, rejoindre les Frères de la côte et consort ne se décrète pas : il faudra d’abord commencer par faire ses preuves face au conseil des pirates, en apprenant à maîtriser des disciplines constituant le B-A-BA de la piraterie : l’escrime, le vol et la chasse au trésor. Il faudra, surtout, composer avec la population… disons, « pittoresque » de l’île, apprendre à décrypter la logique très particulières des cartes aux trésors, composer avec le vaudou … et peut-être même rencontrer l’amour et affronter le fantôme du terrible pirate LeChuck, quitte, pour cela, à découvrir le secret de la légendaire Île aux Singes…
On était capable de très jolies choses avec 16 couleurs, en 1990 (EGA)
The Secret of Monkey Island est un jeu d’aventure conçu par Ron Gilbert, avec le secours de Tim Schafer et Dave Grossman dont on retrouvera, par la suite, les noms au générique de titres comme Day of the tentacle ou Full Throttle. Il s’agit, comme on peut s’en douter, d’un point-and-click vous plaçant aux commandes de Guybrush Threepwood, bien décidé à réaliser son rêve en embarquant dans une aventure qui le mènera bien au-delà de l’Île de Mêlée, via un scénario ouvertement inspiré du roman Sur des mers plus ignorées… de Tim Powers, publié en anglais trois ans plus tôt. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’à l’origine, le titre avait été considéré comme un possible jeu de rôle allant largement puiser dans Sid Meier’s Pirates! (Ron Gilbert cite même Ultima parmi ses inspirations) avant de revenir rapidement à une forme plus classique.
Le jeu multiplie les références à Loom, sorti la même année (EGA)
L’interface du titre repose, comme c’était déjà le cas pour tous les titres du studio depuis Maniac Mansion, sur une interface intégralement contrôlée à la souris et basée sur une série de verbes d’action servant à dicter vos actions sur votre inventaire ou sur le reste de l’environnement. Autant dire que la prise en main du titre nécessitera difficilement plus d’une poignée de secondes, d’autant qu’il bénéficie de ce qui deviendra la fameuse « philosophie Lucasfilm » qui fait que non seulement le jeu est non-bloquant (comprenez par là qu’il ne vous sera jamais nécessaire de recharger une partie pour avoir pris une mauvaise décision) mais également que votre personnage ne peut pas mourir (bon, en fait, il peut, lors d’une occasion particulière dans le jeu, mais il faut vraiment le vouloir).
Il faut trouver un trésor pour devenir pirate, donc les pirates vendent des cartes au trésor. Logique. (VGA)
Une philosophie d’ailleurs totalement imputable à Ron Gilbert qui, après avoir travaillé sur Indiana Jonesand the Last Crusade, avait cherché à matérialiser ses réflexions sur le game design des jeux d’aventure via un manifeste intitulé, dans son style inimitable, Why Adventure Games Suck (soit en français : « Pourquoi les jeux d’aventure craignent ») et publié en décembre 1989 dans The Journal of Computer Game Design – un document fondateur dans l’histoire du point-and-click, et peut-être l’un des plus importants de l’histoire du game design, rien que ça. Ce moment historique où un joueur n’aurait plus besoin de recommencer une partie depuis le début pour avoir oublié de ramasser un objet apparemment sans importance dans un jeu d’aventure, c’est The Secret of Monkey Island qui en aura été une des premières manifestations – avec Loom, paru quelques mois plus tôt.
L’Ile de Mêlée devrait vous servir de terrain de jeu pendant un bon moment (VGA)
Tant qu’à faire, la valeur d’un jeu d’aventure, on le sait, se mesure en partie à la qualité de sa réalisation, mais surtout à celles de son écriture et de la conception de ses énigmes. Sans surprise, Ron Gilbert et sa fine équipe seront parvenus à réaliser une alchimie si parfaite de ces trois critères que le titre en est venu à inscrire son nom bien au-delà du monde du jeu vidéo.
Le gouverneur Marley, votre chasse au trésor à vous (EGA)
Le premier point devant absolument être mentionné est l’humour du titre, et sa capacité à faire mouche avec une belle régularité. La légende veut que Dave Grossman et Tim Schafer aient des humours très différents, au point de se voir confier des sections différentes du jeu, et que la rencontre de l’ironie pince-sans-rire de l’un avec les gags beaucoup plus visuels de l’autre aurait au final eu un effet détonnant. Si l’humour du titre est très différent de l’approche « Tex Avery-esque » de Day of the Tentacle, par exemple, le constant décalage entre son univers et les personnages, parfois farouchement anachroniques, qui y évoluent, est très efficace. Le jeu comporte à ce niveau quantité de morceaux de bravoures gravés au fer rouge dans la mémoire des joueurs, comme ces fameux combats au sabre se jouant… à la manière de concours d’insultes, dont les répliques savoureuses ont été écrites par l’écrivain Orson Scott Card (dont je vous recommande au passage l’excellent cycle d’Ender) ou encore cette scène absolument fabuleuse où toute l’action se déroule derrière un mur, hors de la vue du joueur, et où le déroulement des événements est en fait narré par la ligne de commande au milieu de l’interface ! Autant dire qu’il n’était pas encore fréquent, à l’époque, de rire jusqu’à en avoir les larmes aux yeux devant un jeu vidéo, et que Monkey Island est venu bousculer cela avec un aplomb qui force le respect.
Un pont, un troll, logique. Même dans ses choix les plus surprenants, le titre retombe toujours sur ses pattes (VGA)
Les énigmes, elles aussi, savent se montrer aussi absurdes que retorses – sans jamais se montrer illogiques pour autant. Quand vous évoluez dans un univers où il est parfaitement évident de trouver un poulet en caoutchouc avec une poulie au milieu, et où le grog est si corrosif qu’il vous permet de faire fondre des serrures, autant vous habituer à changer votre façon de penser – la qualité globale des énigmes du jeu mérite dans tous les cas d’être saluée pour sa faculté à mettre exactement dans le mille d’un bout à l’autre.
L’humour de la VF n’est hélas pas au niveau de celui de la VO (EGA)
Quitte, d’ailleurs, à vous pousser à vous arracher les cheveux un bon moment, car le titre est loin d’être facile, mais il n’est absolument jamais difficile pour de mauvaises raisons – une preuve définitive, au passage, qu’un joueur n’avait pas besoin d’aboutir à un game over toutes les deux minutes pour rencontrer des difficultés à terminer un jeu d’aventure, et une parfaite démonstration de la leçon de game design que Ron Gilbert venait de livrer au reste de l’industrie. Non seulement on ne peut pas « perdre » au sens d’être obligé de recommencer la partie ou de repartir d’une sauvegarde, mais en plus la difficulté ne repose jamais sur un objet de deux pixels de haut dissimulé à un endroit absurde. Apprendre à tenter les actions les plus improbables sur touts les objets passant à portée de votre main pourra en revanche rapidement devenir une seconde nature.
Les gros plans sont particulièrement réussis, surtout en 256 couleurs (VGA)
La bonne nouvelle est que l’aventure est d’autant plus agréable à parcourir que la réalisation du titre figure clairement dans le haut du panier de l’année 1990. Dans sa version originale en EGA, le titre tire déjà merveilleusement parti des 16 couleurs de sa palette pour afficher des décors grandioses et des animations soignées. Mais le programme aura également connu, quelques semaines après sa sortie, une version VGA en 256 couleurs qui relève encore le niveau d’un cran, particulièrement lors des portraits en plein écran, absolument superbes.
Les combats de sabre, un des nombreux moments cultes du jeu (EGA)
Dans les deux versions, le titre est très agréable à l’œil, et démontre déjà le savoir-faire indéniable des graphistes de chez Lucasfilm à cette époque. Niveau musical, le titre tire avantage des cartes AdLib et Sound Blaster, en proposant notamment ce fameux thème reggae qui sera réutilisé tout au long de la saga. Comme pour Loom, un patch ajoutant la gestion de la Roland MT-32 aura également été publié quelques semaines après la sortie du jeu, même s’il présente le défaut difficilement pardonnable de ne fonctionner qu’avec la version originale en anglais – un vrai faux pas (cela ne concerne apparemment que la version EGA). On regrettera juste que la musique ne se fasse pas toujours entendre, laissant trop souvent la place à de grands silences un peu oppressants.
L’univers du jeu, aussi délirant soit-il, est toujours animé d’une certaine cohérence. Même quand on rencontre des cannibales qui s’inquiètent de leur régime (EGA)
L’un des coups de génie de la saga, cependant, et l’un de ceux qui lui vaut d’être encore aujourd’hui le centre de débats passionnés entre les fans, est l’existence d’un second niveau de lecture du jeu.
Vous serez heureux de goûter enfin à la lumière du jour dans la deuxième partie du jeu (EGA)
En effet, le deuxième épisode de la saga (et le dernier à avoir été écrit par Ron Gilbert avant Return to Monkey Island en 2022) se sera terminé par une révélation majeure que je ne vais évidemment pas vous spoiler, mais qui aura jeté un regard nouveau sur l’aventure vécue au cours des deux premiers épisodes – et notamment sur certains écrans ayant fait cogiter les joueurs pendant des nombreuses heures. Cette idée absolument géniale permet, encore aujourd’hui, de redécouvrir le jeu après avoir fini sa suite et de chercher entre les lignes des indices pour comprendre le véritable secret de l’Île aux Singes – même près de trente ans après. Le genre de petits détails qui transforment un très bon jeu en un titre de légende.
On trouve de tout, sur l’île de Mêlée ! (VGA)
Quelques mots, en conclusion, sur la version française du titre. Celle-ci, malgré de réels efforts, est hélas passablement décevante. En-dehors d’un nombre dérangeant de coquilles, fautes d’accord (les traducteurs des jeux Lucas semblent avoir des problèmes récurrents pour distinguer un futur d’un conditionnel) et autres mots traduits n’importe comment (non, « exhilarating » ne veut pas dire « exhilarant » !!!), la plus grosse perte se situe au niveau de la traduction de l’humour en lui-même. Certes, cet humour passablement absurde et très anglo-saxon n’est pas forcément facile à rendre en français, mais en-dehors de quantités de gags tombant à plat, certains ont purement et simplement été ignorés ou mal compris – un travers qui restera hélas vrai pendant l’essentiel de la série. Pas de quoi fuir cette version pour les joueurs en froid avec la langue de Shakespeare, mais je ne peux que recommander aux anglophones de s’en tenir à la version originale, sous peine de voir le jeu amputé d’une partie de son humour.
La version CD-ROM :
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Qui dit « début des années 90 » dit quasi-obligatoirement « CD-ROM » dans la même phrase, surtout dans le domaine du jeu d’aventure qui se prêtait particulièrement à la transposition sur galette numérique. Après le fiasco qu’avait été la version CD de Loom, on était en droit de se montrer méfiant face à ce portage de Monkey Island, qui ne reproduit heureusement pas les mêmes erreurs. Pas de coupes, cette fois : le contenu du CD est strictement équivalent à ce que proposait la version sur disquettes, la protection de copie en moins, naturellement.
L’interface, en bas de l’écran, est désormais bien moins austère
Côté graphique, le titre reprend sans surprise la réalisation de la version VGA, en prenant malgré tout le soin de dépoussiérer l’interface : les verbes « allumer » et « éteindre » ont disparu (et pour cause : ils ne servaient à rien), et surtout, l’inventaire bénéficie dorénavant d’une représentation intégralement graphique qui préfigure Day of the Tentacle, et s’avère moins tristounette que la simple liste textuelle des autres versions. Autant dire qu’on tient là la plus belle et la plus accessible de toutes les versions, au moins jusqu’à la sortie de l’Édition Spéciale de 2009.
Le coucher de soleil du début de la version EGA a disparu, en 256 couleurs
Côté son, évidemment, on attend cette version CD au tournant, et on sera heureux de profiter d’une musique qui enterre sans discussion possible les thèmes entendus sur Amiga ou avec une Roland MT-32. Je vous laisse profiter du thème, audible dans la vidéo ci-dessus, pour vous faire un avis. Le jeu bénéficie également de nouveaux bruitages de toute beauté, qui vous permettront enfin d’entendre la mer et le cri des mouettes sur la jetée près du SCUMM bar. En revanche, déception du côté des voix, puisqu’il n’y a tout simplement pas de doublages dans cette version, pas plus qu’il n’y en aura dans la suite. Il faudra donc attendre le troisième épisode, en 1999, pour connaître enfin la voix de Guybrush Threepwood, ce qui est un peu dommage.
Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :
NOTE FINALE : 18/20 (versions EGA/VGA) - 19/20 (version CD-ROM)
Rencontre improbable entre un humour absurde à la Monty Python, un univers délicieusement décalé où les fantômes pirates côtoient les cannibales végétariens, et un souffle épique portés par les ports des Caraïbes, TheSecret of Monkey Island est peut-être l'un des représentants les plus mémorables et les plus accomplis d'un genre qu'il a largement contribué à populariser. Louvoyant entre les morceaux de bravoure et les scènes cultes, ballotés entre les énigmes retorses et les bijoux d'écriture, le navire mené par Ron Gilbert et son excellent équipage aura été mené à bon port avec une maestria rare, qui lui vaut d'être resté amarré à la légende près de trente ans après sa sortie. Une aventure à vivre au moins une fois, avec le reste de la saga dans la foulée.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Certaines énigmes particulièrement machiavéliques
– Version française décevante
– Pas de gestion de la Roland MT-32 sur les versions localisées (version EGA)
– Connaîtra-t-on un jour le véritable secret de l'Île aux Singes ?
Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Secret of Monkey Island sur un écran cathodique (version EGA) :
Les avis de l’époque :
« The Secret of Monkey Island est un de ces bons jeux d’aventure qui paraissent régulièrement. Il n’a rien d’exceptionnel mais il procure de longues heures de passionnantes recherches. Je le recommande donc uniquement aux mordus des aventures en tous genres. Aux autres, je dirais qu’ils ne ratent rien d’impérissable. »
Dany Boolauck, Tilt n°82, Octobre 1990, 15/20
Version Amiga
Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS
Date de sortie : Janvier 1991 (Europe) – Juin 1991 (États-Unis)
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation possible sur disque dur
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
On aurait pu penser, en voyant la version Amiga de The Secret of Monkey Island paraître quelques semaines à peine après la version PC, que ce portage serait un simple clone des versions PC EGA et Atari ST, comme cela avait été le cas pour Loom. Mais grosse surprise en lançant le jeu : le titre est bien décidé à profiter de toute la palette de couleurs de la machine de Commodore, et le travail sur les portraits, notamment (ou le fait que le coucher de soleil du début du jeu ait là aussi disparu), tend à indiquer que cette version aura été développée en même temps que la version VGA.
Les portraits vont clairement lorgner du côté de la version VGA
Concrètement, le jeu est graphiquement plus détaillé que dans les version EGA et Atari ST, même si on perd également une partie des choix très marqués en terme de palette chromatique – et que le jeu est sensiblement plus lent. On sera donc tenté de placer ce portage au-dessus de la version originale, mais en-dessous de la version VGA. Côté musique, en revanche, l’Amiga met tout le monde d’accord : à part la Roland MT-32, aucune carte son ne rivalise avec ce qu’offre la puce Paula. Le fameux thème reggae du jeu est vraiment splendide, à tel point qu’on a bien du mal à se décider à le couper au lancement du jeu (lancez la vidéo, si vous ne me croyez pas !), et cela reste vrai pour les autres morceaux de musique pendant le reste de la partie. C’est bien simple : il faudra attendre les versions CD-ROM du jeu pour supplanter l’itération Amiga. En terme de contenu et de déroulement du jeu, en revanche, le titre est très exactement identique aux autres versions.
Le jeu est plus beau et plus détaillé qu’en 16 couleurs
NOTE FINALE : 18/20
Tirant, pour une fois, intégralement parti des capacités de l’Amiga, The Secret of Monkey Island dispose, sur la machine de Commodore, d’une excellente version qui n’est supplantée graphiquement que par la version VGA et musicalement que par les itérations CD.
Version Atari ST
Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS (France)
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double-face (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1Mo Écran monochrome supporté Installation possible sur disque dur
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Peu de grosses surprises pour cette version Atari ST de The Secret of Monkey Island. Comme on pouvait s’y attendre, le jeu est graphiquement un calque de la version EGA, et l’aventure n’a pas changé d’un iota en passant sur la machine d’Atari. En revanche, la grosse déception se situe du côté sonore : non seulement ce portage rivalise à peine avec ce qu’était capable de produire le haut-parleur interne du PC, mais en plus, plusieurs des thèmes musicaux du titre ont purement et simplement disparu ! C’est d’autant plus dommage qu’il était tout à fait possible de connecter une Roland MT-32 à un Atari ST mais, contrairement à la version PC, aucun patch n’a a ma connaissance vu le jour pour en tirer parti. Cela ne pénalise heureusement que légèrement le jeu, mais suffit à faire de cette version la moins bonne de toutes celles parue sur le marché.
Pas de quoi se sentir dépaysé, pour les possesseurs de la version EGA
NOTE FINALE : 17,5/20
Ça a le gout de la version EGA, ça a la texture de la version EGA, ça pourrait être une simple copie conforme de la version EGA ; malheureusement, les limitations sonores de l’Atari ST additionnées à des coupes injustifiées dans les thèmes musicaux du jeu font de cette version de The Secret of Monkey Island le mouton noir de tous les portages du titre. Un joli mouton noir, mais quand même.
Version FM Towns
Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : Septembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme Loom, paru la même année, The Secret of Monkey Island aura connu les joies d’un portage sur FM Towns. Mais contrairement à son collègue, qui s’était érigé en sorte de « version absolue » du jeu, la faute aux (très) nombreux errements de la version CD-ROM, les choses seront ici beaucoup plus simples : cette version est la copie conforme de celle parue sur PC (comprendre : la version CD-ROM, naturellement)… à quelques curieux détails près – le pirate qui tournoyait sur le lustre du SCUMM Bar a disparu, par exemple. Graphismes en 256 couleurs, bande sonore numérique, il ne manque une nouvelle fois que les doublages, mais pour le reste on ne voit pas trop ce qu’on pourrait demander de plus – on récupère même l’inventaire dessiné, à la Monkey Island 2. Pour ne rien gâcher, il ne sera même pas nécessaire ici de savoir lire le japonais, puisque la version anglaise est disponible au lancement. Évidemment, dénicher cette version a d’autant moins d’intérêt que celle parue sur PC, elle, n’a rien de rare, mais si jamais vous avez envie de découvrir le jeu sur la machine de Fujitsu, eh bien rien ne devrait vous encourager à changer d’idée.
Hmm… Il ne manquerait pas quelqu’un, là ?
NOTE FINALE : 19/20
Pas de version ultime ici, ou plutôt à peu près la même que celle qui aura été distribuée à la même époque sur PC : The Secret of Monkey Island sur FM Towns n’est rien d’autre que la transcription (presque) fidèle de la version CD-ROM du jeu, et en anglais s’il vous plait. Si, pour une raison quelconque, vous êtres bien décidé à ne pas la découvrir directement sur PC, voilà au moins une alternative qui ne vous privera pas de grand chose de plus que de la version française.
Version Macintosh
Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68020 – OS : System 6.0.7 – RAM : 2Mo
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
En 1992, le Macintosh avait beau être toujours considéré comme un ordinateur de bureau (cela a-t-il vraiment changé ?), il commençait à pouvoir afficher sans difficulté exactement ce que proposait un PC de pointe. Cela se ressent d’ailleurs dans ce portage de The Secret of Monkey Island : graphiquement, c’est une pure transcription pixel perfect de la version VGA du jeu – cela tombe bien, c’était la plus belle. Au niveau sonore, le résultat est déjà un peu plus ouvert au débat : je le trouve personnellement plutôt inférieur à ce que laissait entendre une AdLib – et donc à des kilomètres d’une Roland MT-32 – mais on reste très au-dessus de ce qu’offrait la version Atari ST. Le résultat final ne devrait donc frustrer personne, même si on pourra regretter que la version CD-ROM n’ait pas fait le trajet jusqu’à la machine d’Apple.
On sait ce qu’on est venu chercher, et on l’obtient
NOTE FINALE : 18/20
Aucune mauvaise surprise pour The Secret of Monkey Island sur Macintosh, qui débarque dans une version graphiquement identique à l’itération VGA, avec une réalisation sonore qui ne fera certes pas oublier la version CD-ROM, mais qui ne devrait faire fuir personne non plus.
Version SEGA CD
Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : JVC Musical Industries, Inc.
Date de sortie : 23 septembre 1993 (Japon) – Novembre 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Manette, Mega Mouse
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Voyant débarque le Mega-CD dans les foyers européens, Lucasfilm y vit fort naturellement l’occasion rêvée de porter toute sa gamme de jeux d’aventure sur un support CD qui était fait pour cela, et sur une machine dont l’architecture était assez proche de celle de l’Amiga. The Secret of Monkey Island fut donc envoyé en éclaireur, histoire de juger de la viabilité du marché pour leur gamme de jeux… et de décider de ne pas prolonger l’expérience, après que le jeu a connu un bide commercial.
C’est largement aussi beau que sur Amiga, même si le jeu est étrangement devenu très sombre
On pourra très certainement attribuer ce bide aux difficultés rencontrées par le Mega-CD, à cette époque, pour trouver son public, la faute à un catalogue de titres se résumant à l’époque à 90% à une suite de jeux en FMV. Car le portage effectué sur la machine de SEGA, lui, est irréprochable. Jugez plutôt : niveau sonore, le titre est identique à la version PC CD-ROM sortie un an plus tôt, de la musique aux bruitages. Graphiquement, le Mega-CD ne peut évidemment pas rivaliser avec les 256 couleurs de la version PC, il reprend donc ceux de la version Amiga en plus sombre (j’ai augmenté la luminosité sur les captures) – l’interface retouchée en plus. La maniabilité au pad est un tout petit peu moins naturelle qu’à la souris, mais le titre reste parfaitement jouable, bref, un sans-faute presque intégral. Je dis « presque », car en plus des temps de chargement à répétition, la version française n’aura pas fait le chemin jusque sur la machine de SEGA, et pour cause : le jeu ne sera jamais sorti en Europe.
Mieux vaut pousser un peu la luminosité de votre écran (comme ici), sinon on n’y voit rien du tout
NOTE FINALE : 18/20
Porté sur Mega-CD, The Secret of Monkey Island y délivre une copie presque parfaite, la réalisation tirant le meilleur du hardware de la machine de SEGA. La qualité de la musique CD est toujours irréprochable, et la maniabilité au pad est limpide. Dommage, en revanche, que cette version soit strictement réservée aux anglophones – et qu’elle soit aussi sombre.
NOTE :En dépit de mes meilleurs efforts pour présenter les différentes versions du jeu dans l’ordre de leur parution, il s’avère après coup que mes premières informations se sont révélées inexactes. Pour faire simple : la toute première mouture du jeu aura en fait été développée sur Commodore 64 – mais il ne s’agissait alors que de la version de travail, un brouillon ou une alpha, selon votre goût. Après la fondation de Maxis, le jeu aura été développé en parallèle sur Amiga et sur Macintosh, mais c’est bien la version Macintosh qui aura été publiée en premier (février 1989), avant la version Commodore 64 (avril 1989) et la version Amiga (mai 1989). L’ordre présenté ici n’est donc pas le bon, et la version « phare » du test principal aurait du être la version Macintosh, et pas la version Amiga. Cela ne change bien évidemment rien au contenu du test, ni à la note attribuée au jeu, mais dans un soucis de cohérence, il m’apparaissait important de préciser l’origine de ce qui pourrait être perçu comme une entorse à la ligne éditoriale du site. Merci de votre compréhension 🙂
Version Amiga
Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée Imprimante supportée *Existe en version optimisée pour les modèles à 1Mo
Les plus grandes idées arrivent parfois de la plus étrange des façons.
Gotlib avait autrefois contribué à populariser la fameuse légende selon laquelle Isaac Newton aurait mis au point la loi de la gravitation universelle en se prenant une pomme sur la tête. On se souvient également comment Archimède énonça le théorème qui porte son nom simplement en s’allongeant dans sa baignoire. Et qui sait ? Peut-être Benjamin Franklin a-t-il tout découvert sur l’électricité en prenant un coup de jus après avoir enfilé son gilet.
Les fans de statistiques seront aux anges
Le cas de Will Wright, qui nous intéresse aujourd’hui, est presque aussi marquant : ce serait en travaillant sur le level design de Raid on Bungeling Bay sur Commodore 64 que notre développeur aurait découvert que concevoir les niveaux sur l’éditeur créé pour l’occasion était plus amusant que le jeu en lui-même. Inspiré par le succès du Pinball Construction Set d’Electronic Arts, qui proposait déjà aux joueurs de concevoir leur propre table de flipper, et par le recueil de nouvelles La Cybériade de Stanislas Lem, il décida de concevoir un programme qui consisterait à développer une ville, en se basant en partie sur les travaux de l’ingénieur Jay Wright Forrester. Problème : aucun éditeur n’est franchement emballé par ce qui ressemble à une impasse vidéoludique ; qui, en effet, pourrait bien vouloir jouer à un titre qui n’a ni condition de victoire, ni condition de défaite et qui n’a pas de fin ? De fait, à chaque nouvelle version posée sur son bureau, la compagnie Brøderbund avec qui Will Wright était sous contrat ne semblait avoir qu’une seule question à poser : quand est-ce que ce concept allait se transformer en véritable jeu ? Il aura donc fallu attendre que Will Wright créé de lui-même la compagnie Maxis pour pouvoir voir apparaître dans les étals un titre dont à peu près n’importe qui a déjà dû entendre parler au moins une fois dans sa vie : SimCity.
Faire grandir sa ville sera parfois plus compliqué qu’on pourrait le penser
Le principe, sur le papier, est simplissime : construire une ville. Et si vous cherchez des objectifs, tâchez donc d’en faire la plus grande, ou la plus belle, ou même d’essayer de reproduire la ville dans laquelle vous avez grandi pour voir si elle se développe de la même façon dans le jeu. La méthode conventionnée est donc, d’abord, de choisir un terrain pour y bâtir votre cité.
Vous avez courroucé Godzilla !
Si la création de la carte du jeu est présentée comme étant aléatoire, elle correspond en fait à une variation sur les mêmes modèles (une île ou un terrain traversé par un fleuve). Il vous est hélas impossible d’éditer la carte (il faudra pour cela attendre une extension payante sobrement nommée Terrain Editor), mais il vous est en revanche permis de choisir le nom de votre ville, ainsi que le mode de difficulté qui définira votre pécule de départ (soit entre 5000 et 20000 dollars, la création du SimFlouze n’ayant pas encore été actée à l’époque). Après quoi, il ne vous reste plus qu’à lancer la partie.
Les quartiers situés au bord de l’eau pourront facilement devenir les plus luxueux
Comment débuter, justement ? Le terrain a beau être complètement vierge, toutes les zones ne se valent pas : la présence d’une forêt, ou le fait de construire sur une plage, participeront à augmenter la valeur du terrain. Mais avant de vous préoccuper de tout cela, il vous faudra une source d’énergie pour alimenter votre ville : une centrale électrique. Ce qui vous donnera l’occasion de faire votre premier choix : une centrale à charbon sera moins chère mais plus polluante qu’une centrale nucléaire qui, en contrepartie, peut également être amenée à vous sauter au visage un jour. Puis vous construisez des zones divisées en trois types : résidentielles, industrielles ou commerciales. Afin qu’elles soient alimentées par votre centrale, vous édifiez des pylônes électriques, et afin que les résidents puissent voyager de l’une à l’autre, vous commencez à tracer des routes ou des lignes de chemin de fer. Et très rapidement, il est fascinant de constater à quel point Will Wright avait raison et avec quelle facilité on se pique au jeu.
Ironie suprême : ma caserne de pompiers a pris feu…
Vos différentes zones vont effectivement rapidement commencer à se développer, et le fait de les voir évoluer en snacks sordides et en bidonvilles crasseux plutôt qu’en services de luxe vous amènera à commencer à vous pencher sur les différentes subtilités du programme. Toute une série de cartes, de graphiques et de sondages d’opinion seront heureusement disponibles à tout moment de la partie pour vous aider à mettre le doigt sur ce qui gêne les habitants de votre toute nouvelle ville. Par exemple, construire des zones résidentielles à deux pas des industries aura certes le mérite d’écourter les trajets, mais personne n’est très emballé à l’idée de vivre à côté d’une usine polluante, n’espérez donc pas voir le prix du terrain monter en flèche.
Le seul écran de victoire interviendra lors des scénarios
Construire des parcs publics sera un bon moyen de rajouter un peu de verdure et d’oxygène dans vos avenues, tout comme le fait de laisser une place importante aux trains, moins polluants que des milliers de voitures. Si la criminalité monte en flèche, il sera temps de penser à construire des commissariats, et votre premier incendie venant dévaster des quartiers entiers de votre mégalopole vous fera penser à ne pas négliger les casernes de pompier. Il arrivera également que votre population croissante commence à nourrir des exigences, comme celle de construire un stade pour héberger l’équipe locale, ou de construire un port ou un aéroport pour booster le commerce et l’industrie. Le principal problème restant que ces exigences ont un prix.
L’explosion d’une centrale nucléaire vous obligera à composer avec des terres inhabitables pour un très long moment
En effet, la véritable difficulté du titre – et pratiquement la seule, pour être honnête – viendra du besoin constant de réussir à équilibrer vos comptes. Construire des bâtiments a un coût, tout comme les entretenir, et tous vos services publics, de la police jusqu’à la voirie, représenteront des frais. Votre seule source de revenus, en-dehors de votre pécule de départ, étant les impôts locaux, mieux vaudra bien réfléchir à votre développement pour réussir à dégager un bénéfice le plus vite possible, sans quoi vous serez condamné à regarder votre ville évoluer sans vous tandis que ses services se dégraderont faute de fonds suffisants. La tentation d’augmenter les impôts pourra être grande, mais cela finira fatalement par freiner drastiquement les ardeurs de ceux qui voudraient venir s’installer chez vous. Bref, il va falloir apprendre à expérimenter, ce qui est justement le cœur du jeu.
Si votre ville ne se développe pas, pensez à consulter tous vos indicateurs
Histoire de pimenter un peu les choses, le titre de Will Wright n’a pas oublié que la gestion d’une ville n’est pas toujours un long fleuve tranquille – en fait, il aura même constaté que rien n’amusait tant les joueurs que de détruire leur création. SimCity prévoit toute une série de catastrophes, par ailleurs activables dans un menu à la demande, et qui vous obligeront à anticiper l’imprévisible – d’autant plus qu’il est impossible de les désactiver. Incendies, raz-de-marées, tremblements de terre, ouragans, toutes les catastrophes naturelles sont susceptibles de frapper votre ville un jour. Plus original : une pollution excessive pourra finir par attirer… un monstre géant à la Godzilla ! On notera également que, dans certaines versions du jeu, raser une église se traduira systématiquement par l’apparition d’une tornade… Et bien sûr, les avions peuvent s’écraser et les centrales nucléaires sauter ; bref, il faudra apprendre à être à la fois prévoyant et réactif.
Les scénarios seront l’occasion de composer avec la pression du temps
Au cas où recommencer sempiternellement à construire une ville à partir de rien commencerait à vous paraître un peu redondant après quelques dizaines d’heure, le jeu propose également une dizaine de scénarios vous demandant de résoudre, dans un temps limité, un problème donné tout en conservant la confiance de vos citoyens. Cela pourra aller de la résolution d’embouteillages à la reconstruction post-catastrophe naturelle, en passant par l’insécurité rampante et même… l’ennui. Un bon moyen de varier les plaisirs entre deux parties standard – même si les problèmes rencontrés appellent rarement des résolutions très variées : on construit, on règle les problèmes et on s’efforce d’équilibrer le budget.
Si vous ne savez pas ce qui fonctionne mal dans votre cité, ses habitants, eux, le savent
Niveau réalisation, le titre fait le travail, et on finit assez rapidement par se croire au dessus d’une vraie petite ville avec ses voitures, ses trains, ses avions, ses bateaux et son activité florissante. Certes, on a déjà vu largement plus beau sur Amiga, mais les graphismes sont lisibles et plaisants à regarder. En revanche, on ne pourra que regretter l’absence du moindre fond sonore, d’autant que les rares bruitages du titre se comptent sur les doigts d’une seule main : un peu triste… Surtout, si on peut aisément comprendre la révolution qu’a représenté, à plusieurs niveaux, le titre à sa sortie, on regrettera un certain nombre de manques corrigé dans ses suites successives : pas de gestion de la distribution de l’eau, ni de l’éducation, ni de la collecte des ordures, pas de métro, pas de bus, pas d’autoroute… Malgré tout, il reste impressionnant de constater, en dépit de son âge, à quel vitesse le jeu de Maxis peut (re)devenir prenant dès qu’on fait l’erreur d’y consacrer deux minutes. La simplicité de ses mécanismes en fait encore aujourd’hui une excellente initiation au genre du city builder qu’il aura lui-même créé, l’amenant à rejoindre la courte liste de ces titres qui peuvent encore nous prendre au piège plusieurs heures près de trente ans après leur sortie. C’est quand même un signe, non ?
La version optimisée pour les modèles à 1Mo :
C’est encore un peu plus joli, alors pourquoi se priver ?
À noter que si toutes les captures d’écran présentées ci-dessus proviennent de la version Amiga 500 « standard », une autre itération aura également été publiée vers la même période, cette fois pour tirer spécifiquement parti des machines dotées d’un méga de mémoire. Si celle-ci reprend l’interface et le contenu de la version de base, elle en profite en revanche pour offrir des graphismes plus colorés – cela est particulièrement visible sur la barre d’icônes à droite de l’écran, cette fois intégralement en couleurs plutôt que dans sa teinte grisâtre d’origine. On notera que les bruitages sont également plus nombreux – toujours pas de musique, hélas. Pas nécessairement un bouleversement, donc – le gameplay, lui, n’a pas changé d’un iota – mais autant dire que tous les possesseurs d’un Amiga doté de suffisamment de mémoire auront tout intérêt à privilégier cette version par rapport à la précédente.
Vidéo – Quinze minutes de jeu (version 1Mo) :
Récompenses :
Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Jeu le plus original – Version Macintosh
Tilt d’or 1989 (ibid.) – Nommé au titre de meilleur jeu réflexion/stratégie (remporté par Populous) – Version Macintosh
NOTE FINALE : 14/20SimCity est le parfait exemple d'un de ces concepts simples mais géniaux auxquels personne ne voulait croire et qui a fini par tout renverser devant lui. Pas d'autres objectifs que ceux que vous vous fixez, pas de fin à proprement parler, et alors ? Initiant le concept de « bac à sable » qui a eu tout loisir de se populariser depuis, le titre de Maxis vous fera découvrir le plaisir de regarder croître votre ville en vous efforçant de satisfaire au maximum votre population, quitte à repousser les crises les plus soudaines et les plus improbables. Si le genre du City Builder a plutôt bien prospéré au fil des ans, offrant au joueur moderne des alternatives plus riches et plus poussées, le plaisir est toujours au rendez-vous, et les mécanismes présidant à l'équilibre de toute votre petite société sont toujours aussi efficaces. Cela vaut bien la peine de se lancer.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Silence pesant en guise de fond sonore
– Possibilités infimes comparées aux autres épisodes de la saga
– Le jeu peut se maîtriser assez vite, après quoi, il se renouvèle peu
Bonus – Ce à quoi peut ressembler SimCity sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
Rien à faire, voici un hit de tout premier ordre ! […] Graphiquement, la partie est superbe. Sur la carte, la représentation des cités est très réaliste. Peu à peu, l’écran s’anime, un avion s’envole, les voitures peuplent vos routes, un feu se déclare à la centrale nucléaire… du temps réel qui fait craquer.
Olivier Hautefeuille, Tilt n°74, Janvier 1990, 18/20
Les extensions du jeu
Titre des extensions :SimCity : Terrain Editor – SimCity Architecture 1 : Future Cities – SimCity Architecture 2 : Ancient Cities
Plateformes :SimCity : Terrain Editor : Amiga, Atari ST, FM Towns, Macintosh, PC (DOS), PC-98, Sharp X68000 SimCity Architecture 1 : Future Cities : Amiga, Atari ST, Macintosh, PC (DOS) SimCity Architecture 2 : Ancient Cities : Amiga, Atari ST, Macintosh, PC (DOS)
D’ordinaire, comme cela avait été le cas pour Vroom ou Populous, chaque extension d’un jeu fait l’objet d’un test. Si je vais, pour cette fois, faire une exception à cette règle, c’est pour une raison très simple : il n’y a tout simplement pas assez de matière à tester dans les extensions du jeu pour justifier, à mes yeux, de les noter.
À vous les joies des villes du futur… (PC EGA HR)
SimCity : Terrain Editor, sorti à partir de 1989 sur la plupart des plateformes ayant accueilli le jeu de base, vous propose exactement ce qu’indique son titre : éditer la carte, et rien d’autre. Si cela était suffisamment innovant à l’époque pour justifier une extension vendue au prix fort, force est de reconnaître que la fonction est relativement anecdotique, au point d’avoir été systématiquement intégrée d’entrée de jeu à tous les autres épisodes de la saga.
Le cas de SimCity Architecture 1 : Future Cities et de SimCity Architecture 2 : Ancient Cities est un peu différent. Sorties à partir de 1990 sur PC, Macintosh, Atari ST et Amiga (ne soyez pas surpris par les dates de sorties : les sorties européennes ont inversé l’ordre des extensions) – et sur aucune autre machine, même si elles seront intégrées par défaut dans certaines éditions ultérieures dont la version CDTV – ces deux extensions n’apportent… strictement rien en terme de gameplay. En fait, il s’agit dans les deux cas de différentes variations purement graphiques, entre lesquelles vous pouvez d’ailleurs passer à la volée sans que cela ne modifie le plan de la ville que vous êtes en train de bâtir.
…à moins que vous ne préfériez le Far West… (PC EGA HR)
La première extension vous propose de transformer votre ville en cité américaine futuriste, en cité européenne futuriste, ou en colonie lunaire. Si cela est dépaysant dans les trois cas, on regrettera surtout une palette à dominante de gris qui tend à rendre le tout un peu tristounet. La deuxième extension est un peu plus colorée et un peu plus agréable à l’œil en vous proposant cette fois l’Asie médiévale, l’Europe médiévale ou le Far West. Détail amusant : l’électricité y est remplacée par l’eau. Si ces modifications graphiques aident à renouveler un peu le plaisir que l’on peut prendre à bâtir une ville, le fait que l’on puisse passer de l’une à l’autre fait que l’on peut très facilement voir tout ce qu’une extension a à offrir en une dizaine de minutes, d’où un intérêt relativement limité, même à court terme. Ces extensions peuvent de toute façon se montrer d’autant plus délicates à trouver que le jeu de base n’est, à l’heure actuelle, plus en vente nulle part, pas même sur les sites de vente en ligne.
… et pourquoi pas l’Europe médiévale ? (PC VGA)
Version Macintosh
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Maxis Software Inc.
Date de sortie : Février 1989 (version noir & blanc) – 1992 (version couleur)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh Plus avec System 7.0
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – OS : System 6.0.2 – RAM : 512ko* Imprimante supportée *2Mo requis pour la version couleur
En noir et blanc, la lisibilité reste excellente…
Développé parallèlement à la version Amiga, SimCity sur Macintosh compose avec un hardware davantage pensé pour la bureautique que pour le jeu, mais s’en sort néanmoins très bien. Certes, le titre est désormais monochrome, mais il a vu sa résolution doubler, ce qui lui permet de rester parfaitement lisible – et même davantage que sur Amiga. L’interface de la machine d’Apple se prête particulièrement bien au multi-fenêtrage, et le confort de jeu n’a rien à envier à celui de la version de la machine de Commodore. Côté sonore, en revanche, c’est toujours le calme plat. En termes de contenu, le titre s’affirme comme la copie conforme de la version Amiga, à une nuance près : il est possible de désactiver les catastrophes, ce qui aura le mérite de vous débarrasser d’une composante aléatoire au cas où vous n’accrocheriez pas au concept. À noter que si la première version du jeu était exclusivement monochrome, une réédition couleur (généralement vendue avec l’extension SimCity : Terrain Editor) aura vu le jour par la suite, dont la réalisation est alors extrêmement proche de celle observée sur PC dans la version EGA haute résolution – c’est à dire toujours aussi lisible, mais nettement moins grisâtre.
En couleur, là c’est carrément l’extase !
NOTE FINALE : 14/20 (version noir et blanc) – 15/20 (version couleur)
SimCity sur Macintosh est peut-être rendu un peu triste par la réalisation monochrome, mais il faut reconnaître qu’on aurait difficilement pu en demander plus à ce portage tant il tire parfaitement parti des capacités et de l’interface de la machine d’Apple, à commencer par la haute résolution. Si on regrettera que l’ambiance sonore soit toujours quasi-inexistante, on appréciera que les développeurs aient trouvé le temps de peaufiner encore un peu le titre.
Les avis de l’époque :
« Sim City fait partie des jeux irrésistibles. Quand on commence une partie, on ne s’arrête qu’au petit matin ! Le réalisme, sans être très poussé, reste crédible. […] Voilà donc un superbe logiciel de stratégie/simulation pour vos nuits blanches ! »
Dany Boolauck, Tilt n°71, Novembre 1989, 17/20
Version Amstrad CPC
Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Franchement, cette version s’en tire très bien
Première excursion sur un ordinateur 8 bits, pour SimCity, et celle-ci est plutôt encourageante. En dépit de sa résolution et de sa palette de couleurs limitées, le CPC livre une réalisation très satisfaisante, avec l’interface reléguée en haut de l’écran et une fenêtre de jeu où l’action est claire, et où les graphismes restent assez proches de ceux des autres versions. Les scénarios sont toujours là, tout comme la totalité des bâtiments, des catastrophes et des indicateurs, et c’est toujours aussi discret du côté sonore – mais les rares bruitages du titre sont bel et bien présents. Le jeu tourne assez vite pour qu’on ne passe pas son temps à attendre qu’il se passe quelque chose ; bref, une version absolument irréprochable.
NOTE FINALE : 13,5/20
Loin du portage opportuniste qu’on aurait pu craindre, SimCity sur Amstrad CPC tire le meilleur du hardware de la machine et offre une expérience extrêmement proche de celles proposées sur les ordinateurs 16 bits. Tout est à sa place, rien n’a été sacrifié, le déroulement est fluide et la réalisation est exemplaire. Une très bonne surprise.
Version Commodore 64
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Maxis Software Inc.
Date de sortie : Avril 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Ne réglez pas votre écran : c’est bien ce à quoi ressemble le jeu
Après le très bon travail réalisé sur les versions Macintosh et CPC, on pouvait nourrir de grands espoirs pour ce SimCity sur Commodore 64. Seulement, il se trouve que cette version a une histoire très particulière, et pour cause : c’était tout simplement la première version développée par Will Wright pour la montrer aux décideurs de Brøderbund – lesquels, on s’en souvient, n’auront jamais réellement compris le concept du jeu. Bien qu’elle ait mis deux ans pour arriver sur le marché, elle n’aura jamais été retouchée depuis sa conception, ce qui signifie qu’on se retrouve là face à une pièce de musée dont la réalisation et les mécanismes sont en fait le brouillon grossier de la version définitive parue sur Amiga et sur Macintosh. Conséquence : dès l’instant où l’on franchit le temps de chargement interminable de l’écran-titre, la douche est très, très froide : pour commencer, c’est absolument hideux. Certes, la réalisation graphique n’a jamais été le critère déterminant pour prendre du plaisir sur SimCity, mais on en arrive au stade où c’est tout bonnement illisible : les maisons sont de simples pâtés noirs, et le seul moyen de distinguer un quartier riche d’un quartier pauvre tient à juger de la taille du pâté ! Bien évidemment, vous pouvez également tirer un trait sur le son, mais ce n’est que le début du carnage : l’interface est d’une lourdeur sans nom, demandant de jongler entre le clavier et le joystick en permanence, et surtout, la moitié des bâtiments ne sont tout simplement pas inclus. Non seulement vous pouvez oublier le stade, par exemple, mais aussi les casernes de pompier et les commissariats ! Je vous laisse imaginer la cohérence d’un scénario comme celui de Detroit, qui vous demande de réduire la criminalité, alors que celle-ci n’est tout simplement plus gérée par le jeu ! Autant dire qu’il y a ici de quoi comprendre un peu mieux les doutes de Brøderbund, et surtout de quoi grincer les dents devant une version qui aura crânement assumé ses deux ans de retard sans jamais être retravaillée.
NOTE FINALE : 06/20
Vraie sortie de route pour ce SimCity sur Commodore 64, qui correspond en fait au brouillon du jeu commercialisé tel quel deux ans plus tard. En résulte un jeu absolument hideux au point d’en être illisible, dépourvu d’ambiance sonore, à la jouabilité d’une rare lourdeur et avec un contenu embryonnaire. Cela commence à faire beaucoup ! À n’en pas douter la pire version du jeu, et de très loin ; un véritable crachat au visage des joueurs du C64. Une honte.
Version PC (DOS)
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ (x2) et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : CGA (monochrome), EGA (basse et haute résolution), Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Résolutions supportées : 320×200 (16 et 256 couleurs), 640×200 (monochrome), 640×350 (16 couleurs), 640×480 (monochrome), 720×348 (monochrome) Cartes sonores supportées : Covox Sound Master, haut-parleur interne, Tandy Imprimante supportée *640ko requis pour le mode EGA
Préfèrerez-vous profiter des 256 couleurs du VGA…
On a déjà souvent répété ici à quel point le PC était tout sauf une machine de jeu à la fin des années 80. On sera donc d’autant plus surpris de constater avec quel sérieux ce portage de SimCity gère la quasi-totalité des modes graphiques disponibles en 1989, de l’Hercules à l’EGA en passant par le Tandy, allant même jusqu’à y ajouter le VGA par patch quelques mois plus tard. Mais la meilleure nouvelle de toute reste le fait que le titre gère l’EGA… en 640×350. On se retrouve alors avec un titre profitant d’une réalisation presque aussi fine que la version Macintosh couleur (laquelle peut être adaptée à la résolution du bureau), au détail près que la version PC est sortie trois ans plus tôt ! La lisibilité des graphismes offre alors un confort de jeu des plus appréciables, en-dehors d’un format un peu étrange (les bâtiments apparaissent quelque peu « étirés » sur un écran au format 4/3), et ceux qui préfèreront jouer en VGA profiteront alors d’une réalisation plus proche de celle de la version Amiga, mais en plus coloré ! Le meilleur des deux mondes, en un mot. On appréciera d’ailleurs que le jeu reste très lisible quelque soit le mode graphique adopté, avec notamment un mode Hercules qui peut largement regarder le Macintosh monochrome dans les yeux et même un mode CGA en 640×200. Pour ne rien gâcher, le jeu reconnait également la Covox Sound Master, et même s’il n’y a toujours pas de musique, tous les sons, depuis le haut-parleur interne jusqu’à la carte du Tandy, sont supérieurs à ceux entendus sur la version Amiga, avec même une très convaincante digitalisation pour vous prévenir des embouteillages. Le jeu reprend tous les ajouts de la version Macintosh, et fait un sans-faute comme on avait rarement eu l’occasion de voir le PC en réaliser en 1989.
… ou bien de la résolution supérieure de l’EGA ?
Ceux qui ne jurent que par la précision seront d’ailleurs heureux de pouvoir profiter d’un mode VGA monochrome en 640×480……et même les possesseurs de carte Hercules n’ont pas dû se sentir roulés
NOTE FINALE : 15/20
Incroyable mais vrai : en 1989, cette version de SimCity se paie déjà le luxe de donner une leçon à la version Amiga. Plus belle ou plus lisible, profitant d’une interface améliorée et même d’une qualité sonore supérieure, il n’est pas difficile de comprendre pourquoi ce portage a connu un carton planétaire sur la machine d’IBM qui commençait pourtant à peine à avoir les armes pour rivaliser avec celle de Commodore. Le jeu y est encore très agréable à jouer de nos jours, et cette version du titre de Maxis peut sans peine se qualifier comme étant une des meilleures.
Version Atari ST
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Hé, c’est plus beau dès l’écran-titre !
Reconnaissons-le : tester un jeu sur Atari ST a tendance à être une tâche sans intérêt. Le nombre de portages se limitant à un simple copier/coller de la version Amiga, le plus souvent en moins bien, est si important qu’on en viendrait presque à penser que la machine d’Atari ne représentait que le modèle d’entrée de gamme de la gamme d’ordinateurs de Commodore. Et puis, de temps à autre, un éditeur faisant son travail vient nous rappeler que cette tendance ne se vérifie pas 100% du temps : justement, SimCity appartient à cette catégorie de jeux portés intelligemment.
Ainsi, non seulement le jeu est largement aussi beau que sur Amiga, mais il profite de l’interface développée à partir de la version Macintosh, bien mieux agencée. Il profite également de tous les ajouts des versions PC et Mac, et le son est de bien meilleur qualité que sur la machine de Commodore. Seul regret : un titre un peu lent sur les modèles dotés de 512k de RAM, mais rien de bien grave.
Enfin un titre qui n’a pas à rougir de la comparaison avec l’Amiga !
NOTE FINALE : 14,5/20
Loin de se contenter d’un portage paresseux de la version parue sur Amiga, comme c’était trop souvent la norme à l’époque, SimCity sur Atari ST intègre toutes les modifications des versions parues entretemps pour offrir, une fois n’est pas coutume, une version en tout point supérieure à celle de la machine de Commodore. Le plaisir de jeu est intact, la réalisation est aussi colorée qu’agréable, et le charme opère encore aujourd’hui. Une très bonne version.
Version BBC Micro
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Superior Software Ltd.
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version cassette
Configuration minimale : –
On a tout ce qu’on est venu chercher, non ?
Curiosité : déjà âgé de près de dix ans et alors que sa production était arrêtée depuis 1986, le BBC Micro accueillait encore des jeux en 1990. Dans le cas de SimCity, qui nous intéresse aujourd’hui, on sent immédiatement toutes les limitations de l’ordinateur 8 bits… ce qui ne l’empêche objectivement pas de s’en tirer de façon très correcte – très loin de ce que proposait le Commodore 64, donc. On a beau être dans une version encore bien plus brute de décoffrage que celle qui débarquera la même année sur ZX Spectrum, l’essentiel du contenu est là, même si toute l’interface a désormais été ramenée sous la forme d’icônes en bas de l’écran. On constatera ici quelques curiosités : il n’y a plus que trois types de catastrophes, les impôts commencent par défaut à 0%, et pas question ici de jouer avec une souris, ni même avec des flèches directionnelles puisqu’il n’y en a pas sur le clavier de la machine : il faudra tout faire au clavier avec le touches W, X, ù et !. Que du bonheur ! Et bien évidemment, la réalisation en basse résolution avec huit couleurs est purement fonctionnelle, sans parler des « bruitages » qui gargouillent hors du haut-parleur. Autant dire qu’on ne s’essaiera aujourd’hui à cette version que par pure curiosité, mais les joueurs de l’époque n’ont certainement pas dû se sentir roulés.
NOTE FINALE : 11/20
Le BBC Micro aura lui aussi eu droit à sa version de SimCity, avec l’essentiel proposé dans une réalisation minimaliste mais lisible et efficace qui a sans doute mieux vieilli que la maniabilité au clavier. Si on ne s’y essaiera aujourd’hui qu’avec une bonne dose de patience en réserve, l’expérience de jeu demeure agréable.
Version Electron
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Superior Software Ltd.
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version cassette
Configuration minimale : –
Il ne faut pas être claustrophobe !
L’Electron n’étant fondamentalement qu’une version « entrée de gamme » de BBC Micro (bien que n’étant pas compatible avec ses logiciels), on peut imaginer à quoi ressemblera SimCity sur l’autre machine d’Acorn : à la même chose, mais en sensiblement moins bien. En l’occurrence, les deux versions du jeu pourraient passer pour rigoureusement identiques sans quelques petits détails, comme le fait que la résolution ait encore été rabotée d’une trentaine de pixels dans le sens dans la hauteur, et qu’on ait encore perdu quelques couleurs. Autant dire qu’on commence à se sentir sévèrement à l’étroit, et le fait que le jeu se pratique toujours intégralement au clavier et sans l’once d’un pavé numérique ou de touches fléchées n’améliore pas franchement l’expérience. L’essentiel a beau être toujours là – avec les mêmes coupes que sur BBC Micro – on sent bien que c’est typiquement le genre de versions sur laquelle il faudrait être un tantinet masochiste pour se lancer aujourd’hui. Néanmoins, les joueurs les plus patients se retrouveront bel et bien face à un portage fonctionnel de SimCity – soit très exactement ce qu’ils étaient venus chercher.
NOTE FINALE : 10,5/20
SimCity commence à se sentir très, très à l’étroit sur Electron – mais il fonctionne, et il a toujours beaucoup plus de choses à y offrir que la version Commodore 64, au hasard. Difficile aujourd’hui de s’escrimer avec le clavier pour aller placer des bâtiments sur un demi-écran, mais si jamais c’est le genre de contingence qui ne vous dérange pas, vous retrouverez l’essentiel du jeu et de ses qualités.
Version FM Towns
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo
Le jeu en anglais réserve déjà quelques surprises, avec ici une ville graphiquement futuriste…
Fort de son succès planétaire, SimCity aura commencé à débarquer sur les systèmes japonais au début des années 90. Au sein de la première fournée des machines concernées se sera trouvé le FM Towns, qui pour le coup vous propose de jouer en anglais ou en japonais, à votre convenance. A priori, le titre ressemble comme deux gouttes d’eau à la version PC EGA, avec des graphismes en haute résolution mais une palette légèrement différente. Première différence : on bénéficie cette fois de thèmes musicaux, et les bruitages sont naturellement meilleurs qu’avec le haut-parleur interne de l’ordinateur d’IBM. La deuxième différence, elle, nécessitera de jouer assez longtemps ou bien de lancer un scénario futuriste : cette version est une des seules à voir ses bâtiments et ses infrastructures changer de graphismes avec le temps, pour voir les routes être remplacées par des tubes futuristes, ou les industries à charbon par des structures avancées ! Une caractéristique qui se retrouve d’ailleurs à un autre niveau si on a la curiosité de jouer en japonais, car on constatera alors que les graphismes s’adaptent aux caractéristiques de la région, avec des routes en terre, des industries agricoles, et un stade remplacé par une arène de sumos lorsque l’on joue en 1900 ! Des petits détails qui ne métamorphosent pas l’expérience ludique – surtout que les data disks de graphismes n’ont apparemment pas fait le chemin jusqu’à cette version – mais largement de quoi contenter les curieux qui penseraient que ce jeu ne peut plus les surprendre. Perdu !
…mais c’est encore plus surprenant en japonais, avec ici une ville à l’esthétique plus originale !
NOTE FINALE : 15,5/20
Curiosité que cette itération FM Towns de SimCity qui, en plus de proposer de la musique, a le bon goût d’adapter une partie de ses graphismes à la date et à la région ! Si les aspects les plus « dépaysants » demanderont de pratiquer le titre en japonais, on retrouve de toute façon avec grand plaisir tout le contenu du jeu de base. Bref, une très bonne pioche.
Version Sharp X68000
Développeur : Foretune Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 7 septembre 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : –
Simple, efficace, et hyper-lisible
Le parcours de SimCity sur les ordinateurs japonais se sera naturellement poursuivi jusqu’à un autre des systèmes en forme de la période : le Sharp X68000. Le studio Foretune en charge du portage n’aura pour le coup pris aucun risque : c’est grosso modo une copie carbone de l’itération PC, même s’il est possible de jouer dans une résolution plus élevée. N’espérez pas entendre ici les thèmes musicaux présents sur FM Towns, ni profiter des petites retouches graphiques qu’on y trouvait : même les bruitages sont présentés à l’identique. Très honnêtement, ce n’est pas franchement un drame, tant la version PC était de toute façon une des plus efficaces, tout juste regrettera-t-on que les menus soient désormais en japonais. Pour le reste, on ne gagne ni ne perd rien, et c’est sans doute très bien comme ça.
NOTE FINALE : 15/20
Importée pratiquement telle quelle depuis le PC, l’itération Sharp X68000 de SimCity est donc tout aussi efficace, même si on en vient à regretter qu’on n’ait pas pu profiter au passage de quelques bonus en termes de réalisation comme ceux présents sur la version FM Towns. Si les menus en japonais ne vous dérangent pas, vous pouvez foncer.
Version ZX Spectrum
Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Août 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko
Prends ça, Commodore 64 !
SimCity sur Commodore 64 ayant laissé, avouons-le, un assez mauvais souvenir, on était en droit de se demander comment le titre de Maxis allait s’en sortir lors d’un nouveau portage sur ordinateur 8 bits. Surtout en considérant que le hardware de la machine de Sinclair est, sur le papier, inférieur à celui de la machine de Commodore. Heureusement, confié à des développeurs compétents, un jeu peut donner des résultats très différents, et cette très bonne version ZX Spectrum est là pour nous le rappeler. En termes de réalisation, difficile d’en demander plus au Spectrum : c’est coloré, c’est fin, c’est lisible, toute l’interface est disponible au niveau de l’écran ; bref, c’est le sans-faute. Niveau sonore, c’est toujours le calme plat à quelques bruitages près, et la jouabilité au clavier est un peu moins naturelle qu’à la souris, mais on retrouve très vite ses marques. Seul regret : les scénarios ont disparu, mais l’essentiel du jeu est toujours là – contrairement au massacre observé sur C64.
NOTE FINALE : 13/20
SimCity, porté sur ZX Spectrum, fait mieux que se défendre : on voit difficilement comment le plus chevronné des programmeurs aurait réussi à tirer davantage de l’ordinateur de Sinclair. Comme souvent sur cette machine, les limitations techniques empêchent cette version d’aller rivaliser avec celles parues sur les ordinateurs 16 bits – mais d’assez peu, il faut bien le reconnaître. On tient peut-être là un des meilleurs jeux jamais publié sur le ZX Spectrum. Une version qui a dû faire bien des heureux à l’époque.
Version Amiga CDTV
Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Septembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Souris, télécommande
Version testée : Version CD-ROM
Configuration minimale : Système de sauvegarde par carte mémoire
L’interface en plein écran pourrait passer pour une bonne chose, sauf qu’en fait, non
Lancé en grande pompe avec l’espoir de rivaliser avec le CD-i, alors considéré comme la machine du futur, l’Amiga CDTV aura réussi l’exploit de connaître un bide encore plus retentissant que son concurrent direct – un des pires de l’histoire informatique, pour être honnête. On comprendra dès lors que trouver un jeu développé pour tenir spécifiquement compte des capacités de la machine est une rareté. Eh bien, devinez quoi : SimCity en fait partie. La version publiée sur l’éphémère appareil multimédia de Commodore ne se moque pas du monde, constatez plutôt : non seulement elle ne se contente pas de reprendre les graphismes de la version originale, mais elle va même jusqu’à intégrer certains des univers graphiques des deux extensions parues sur Amiga et PC, à savoir l’Europe médiévale, le Far West et une ville futuriste originale. Les scénarios sont toujours là, et réadaptés pour tenir compte de ces nouvelles périodes : la mission vous demandant de réguler la circulation à Berne se déroulant par exemple… au XVIIe siècle. Reste que l’interface est en quasi-plein écran, et que le jeu s’en tire graphiquement mieux que lors de la version de 1989, pourtant parue sur un hardware très semblable (le CDTV n’étant rien d’autre qu’un Amiga 500 avec un lecteur CD).
Voilà le menu que vous devrez faire apparaître à chaque fois que vous désirerez construire quelque chose, c’est à dire toutes les deux secondes
En revanche, l’aspect multimédia de la machine de Commodore est paradoxalement ce qui aura fait le plus de mal au titre de Maxis. Comprenez par là que le jeu doit désormais se passer de clavier et de souris, et composer avec l’espèce de télécommande horrible qui était vendue avec l’appareil. C’est un gros problème, car non seulement cela rend le titre infiniment moins jouable, mais le jeu a également été pensé pour être joué sur un téléviseur, ce qui signifie que toute l’interface a été cachée sur un écran à part. Il vous faudra donc presser une touche pour faire apparaître le menu de construction, ce qui alourdit inutilement l’expérience. Tous les menus et indicateurs sont également accessibles par des touches dédiées, mais bon sang que cette maniabilité peut être antinaturelle. Autant dire qu’une fois la curiosité passée, on grince rapidement des dents à jouer à cette version inutilement alourdie en cherchant à se rendre accessible.
La présence de différents sets graphiques est une bonne chose
NOTE FINALE : 12/20
D’accord, SimCity est l’un des très rares jeux qui aient effectivement été pensés pour être employés comme des logiciels multimédia sur le CDTV. C’est hélas sa plus mauvaise idée, le titre de Maxis n’étant absolument pas adapté à un maniement à la télécommande, et cette version qui aurait pu être une très bonne alternative si elle avait simplement accepté de reproduire la jouabilité originelle avec une souris et un clavier se transforme dès lors en un chemin de croix qui vire à la caricature. Dommage, car le contenu est sérieux – même si le CD ne sert, disons-le tout net, à rien – mais la lubie de vouloir concurrencer le CD-i était de toute façon une erreur dès l’origine. Un beau gâchis.
Version Super Nintendo
Développeur : Nintendo Co. Ltd.
Éditeur : Nintendo Co. Ltd.
Date de sortie : 26 avril 1991 (Japon) – Août 1991 (États-Unis) – Août 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version française
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb Système de sauvegarde par puce
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Après avoir fait une grande carrière sur ordinateur, SimCity se sera fait plutôt discret sur consoles de salon, où le genre du city builder n’aura jamais réellement connu son essor. Seule machine servie sur toute la période 16 bits, la Super Nintendo livre une version à la fois fidèle et intelligemment repensée qui préfigure déjà, à plusieurs niveaux, de certaines des idées qui seront introduites deux ans plus tard dans SimCity 2000.
Le Docteur Wright viendra régulièrement s’adresser à vous
Première inquiétude à dissiper : la jouabilité. Si le titre de Maxis ne tire hélas pas parti de la souris Super Nintendo – sortie plus tard -, il faut reconnaître que la jouabilité au pad est assez bien pensée. On peut se contenter de déplacer le curseur partout sur l’écran, comme sur ordinateur, ou bien utiliser Select pour accéder directement au menu de construction, ou Start pour accéder à l’équivalent de la barre des tâches permettant de consulter les différents indicateurs, les cartes, de convoquer les catastrophes ou de sauvegarder. Y sert à activer le défilement, et X fait disparaître l’interface pour jouer en plein-écran, bref, c’est très bien pensé, même si cela reste plus lent qu’avec une souris.
Très bonne idée : votre ville change au gré des saisons
Niveau réalisation, SimCity s’en tire là encore très bien. Non seulement c’est agréable à l’œil et très coloré, mais le jeu n’accuse jamais aucun clignotement de sprite ni aucun ralentissement. On aurait aimé pouvoir faire passer le temps un peu plus vite, car on se retrouve parfois à attendre deux bonnes minutes pour toucher l’argent en fin d’année, mais ça reste du beau travail. Surtout, le titre a la très bonne idée de varier ses graphismes et sa palette de couleurs en fonction de la saison, et il arrive que des bâtiments placés côte-à-côte « fusionnent » pour n’en former qu’un seul, cassant un peu le côté « ville lego » des autres versions. Pour ne rien gâcher, le jeu profite enfin de plusieurs thèmes musicaux en plus des bruitages, et l’ambiance générale est très agréable.
Tous les indicateurs du jeu sont toujours là
Mais la meilleure surprise vient peut-être du contenu. En plus de tout ce qu’offrait la version originale, SimCity version Super Nintendo propose en plus un didacticiel, ainsi que la présence d’un petit personnage baptisé Docteur Wright qui viendra vous délivrer des conseils et vous informer du développement de la ville, et en français, s’il vous plait ! Mais ce n’est pas tout : au fur et à mesure de la croissance de votre ville, vous débloquerez l’accès à de nouveaux bâtiments qui vous offriront tous un bonus bienvenu par rapport à vos revenus ou à votre croissance. Vous pourrez ainsi disposer de votre propre maison, que vous pourrez regarder s’agrandir en même temps que votre ville, mais aussi une banque qui vous permettra d’emprunter de l’argent, un casino qui augmentera vos revenus, un parc, un zoo… et même une statue dorée de Mario. À noter également que le monstre qui peut parfois attaquer votre ville est cette fois incarné par… Bowser.
NOTE FINALE : 17/20
SimCity sur Super Nintendo est, à tous les niveaux, une excellente surprise. Loin de se reposer sur ses lauriers pour proposer une simple copie du titre de 1989, cette version a la très bonne idée de se rendre plus accessible, plus conviviale, plus détaillée et surtout plus riche, grâce à l’excellente idée de ces nouveaux bâtiments qui se débloquent au fur et à mesure, qui sera reprise dans SimCity 2000. Certes, la maniabilité au pad ne rivalisera jamais avec une bonne vieille souris, et on aurait parfois apprécié que le jeu puisse tourner encore un peu plus vite, mais l’expérience reste supérieure à celle qu’on avait connue jusqu’ici sur ordinateur. Une excellente pioche.
Version PC (Windows 3.x) SimCity for Windows
Développeur : Maxis Software Inc.
Éditeur : Maxis Software Inc.
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25 (x2) et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : Windows 3.0 – RAM : 2Mo Modes graphiques supportés : EGA, VGA
C’était vraiment le minimum, un an avant SimCity 2000…
Non, vous ne rêvez pas, SimCity aura même connu sa version conçue spécifiquement pour Windows 3.1. Qu’apporte l’intégration du jeu dans l’interface de Windows ? Eh bien, principalement, le fait de jouer à la résolution de votre bureau. Si votre résolution est très élevée, vous pourrez même avoir toute la carte du jeu sous les yeux d’un seul coup. Autre avantage : le jeu tourne toujours très bien sous Windows Vista (en revanche, vous pouvez oublier sous Windows 10). Le contenu du jeu n’a pas changé d’un poil depuis la version MS-DOS, mais cette version est compatible avec les différentes extensions (celles-ci semblent même être intégrées par défaut dans la version Classic). C’est également l’une des seules sur ordinateur à proposer une musique MIDI (qui risque de vite tourner en rond), plus quelques bruitages au format WAV. Les graphismes, eux, sont toujours en 16 couleurs. À noter qu’une deuxième édition aura été publiée en 1995, cette fois sous le titre Sim City Classic, et que celle-ci fonctionne sous Windows 95 en autorisant à jouer en 256 couleurs.
Tant qu’à faire, toutes les extensions sont compatibles, et on ne va pas s’en plaindre
NOTE FINALE : 15/20
SimCity for Windows a beau ne rien proposer de neuf, le jeu a à moins le mérite de contenir un thème musical, des bruitages améliorés et une résolution adaptée. Dommage qu’il soit toujours en 16 couleurs (sauf dans la version Sim City Classic) et qu’il ne propose aucune des nouveautés de la version Super Nintendo, sans quoi on ne serait vraiment pas loin de l’édition ultime.
L’arrivée du CD-ROM aura fait l’effet d’un tsunami dans l’univers de la micro-informatique : bénéficier d’une capacité de stockage multipliée par 300 par rapport à la bonne vieille disquette ouvrait des possibilités réjouissantes. Sans surprise, bien avant de voir débarquer des titres pleinement pensés pour tirer parti du nouveau support, on aura avant tout dû composer avec des CD-ROM remplis à la va-vite avec ce qui prenait le plus de place, et qui faisait son petit effet dans les chaumières : les vidéos.
Enfin une version en SVGA ! Bon, les couleurs choisies sont quand même un peu tristes
Faisons rapidement la liste des nouveautés de cette nouvelle version de SimCity : la plus appréciable, et de loin, est que le jeu est désormais jouable en SVGA. Fini de tergiverser entre la haute résolution et les 256 couleurs : désormais, vous avez les deux en même temps ! Le titre bénéficie également de tout nouveaux bruitages digitalisés, absolument pas pensés pour un jeu où on passe son temps à construire et donc à réentendre ces bruitages en boucle, ce qui fait qu’on attend rarement plus de dix minutes avant de les couper plutôt que de se trimballer une migraine pour le restant de la partie. Dommage… On bénéficie également d’une aide audio qui vous redit sensiblement la même chose que les messages qui défilaient dans la barre supérieure dans les autres versions, et qui se fera entendre même lorsque vous aurez fait le choix de la désactiver, pas très sérieux… Mais bon, ça, ce n’est pas trop gênant.
Ah, l’époque bénie des vidéos ! Ça aidait au moins des petits acteurs à cachetonner… Notez qu’elles pouvaient être affichées en plein écran
La vraie nouveauté, ce sont donc ces vidéos qui n’attendent que de vous en mettre plein les mirettes avec leur budget de deux Carambar et un Mars. Soyons honnêtes : celles-ci ne se prennent pas trop au sérieux, savent se montrer amusantes (on appréciera de voir votre responsable de la police se faire détrousser en pleine rue parce que vous n’avez pas mis assez de commissariats), et bénéficient d’un doublage français professionnel qui fait très bien le travail (pour la petite histoire, Maxis avait d’abord cru pouvoir vendre la version doublée en québecois dans tous les territoires francophones, avant que les retours des journalistes français hilares ne les fassent changer d’avis). C’est amusant une ou deux fois, un peu moins la dixième, et on se retrouve sans surprise à les couper à leur tour au bout de deux ou trois heures de jeu. Bref, des ajouts un peu gadgets, mais qui n’empêchent pas cette version de figurer dans le haut du panier.
NOTE FINALE : 15/20
En dépit d’un louable effort pour tirer parti de la technologie de l’époque, force est de reconnaître que les ajouts de cette itération CD de SimCity sont, pour la très grande majorité, tout à fait dispensables. Après avoir fait le tour des vidéos du jeu en deux heures et avoir coupé les bruitages insupportables, on ne retiendra au final de cette version que ses graphismes en SVGA, ce qui n’est déjà pas mal. Certainement pas de quoi justifier l’achat pour ceux ayant encore une copie de la version originale sous la main, mais une bonne version malgré tout.
Bonus :
Un article très complet sur la naissance de SimCity (en anglais, hélas), qui m’aura permis d’ajouter quelques précisions à ce test. Un grand merci à Olivier Scamps pour avoir fait remonter cet article jusqu’à moi 🙂 Vous pouvez le consulter à cette adresse.
Date de sortie : Avril 1989 (Europe) – Juillet 1989 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : OCS/ECS Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Dans le monde vidéoludique, les jeux d’exception ne sont pas les seuls à connaître la célébrité. Ils entraînent parfois dans leur sillage des studios de développement entiers, des éditeurs… voire même des programmeurs, propulsés sous le feu des projecteurs par le succès de leur créature. Parmi les pionniers, les premiers à avoir mis un visage sur la production informatique, on pourra par exemple penser à Richard Garriott, immortel créateur de la saga Ultima, à Chris Roberts, génial concepteur des Wing Commander, ou encore Geoff Crammond, auteur de The Sentinel et de Formula One Grand Prix… et surtout, Peter Molyneux. Un nom qui, contrairement aux autres, aura des chances de parler encore aux moins de trente-cinq ans.
Un début de partie typique vous verra débuter avec quelques hommes éparpillés sur une terre inhospitalière
Il faut bien comprendre qu’avant de devenir le symbole vivant des promesses extravagantes non-tenues, de l’ambition démesurée, des projets Kickstarter frôlant l’escroquerie et des vaporwares, Peter Molyneux s’était avant tout fait un nom grâce à une série de succès critiques et commerciaux : Fable, pour les plus jeunes, mais avant cela Theme Hospital, Theme Park, Dungeon Keeper… et à la racine de tout, le fondateur du God game, le jeu qui nous intéresse aujourd’hui : Populous.
La lutte entre les deux « papes » pourra rapidement devenir un enjeu majeur de la partie
Revenons en 1989. S’il est alors un genre de niche, sur toutes les machines du marché, c’est bien celui du jeu de stratégie – plus encore que le jeu de rôle, porté par des monuments comme Bard’s Tale ou Dungeon Master qui se sont chargés de le populariser. L’austérité du genre, qui cumule des tares comme des interfaces aussi opaques qu’incompréhensibles et une réalisation rarement plus emballante qu’un tableau Excel, en fait le repoussoir idéal pour le grand public, plutôt à la recherche de titres à la prise en main immédiate comme ceux qui pullulent alors dans les salles d’arcade. Certes, des jeux comme Defender of the Crown sont venus dépoussiérer un peu le genre, notamment en rehaussant considérablement les attentes en terme de réalisation, mais ils sont restés l’exception plutôt que la règle. Et puis Populous est arrivé.
Le nom de votre prochaine destination fera également office de mot de passe
Oubliez les soldats, les généraux, les rois : le titre de Bullfrog vous place directement dans la peau d’un dieu, rien de moins. L’objectif est simple : vous faire une place au sommet de la hiérarchie divine en mettant au pas les autres divinités qui se mettront sur votre route. Mais être un dieu n’est pas nécessairement aussi simple qu’on le croit, et votre quasi-omnipotence dépend d’un facteur critique : la foi que vos fidèles placent en vous. Et comme les dieux ne s’affrontent apparemment ni au catch ni au bras de fer, ce sont bel et bien vos ouailles qui vont devoir mener le combat, en votre nom, histoire de vous permettre d’accéder enfin à la toute-puissance. À vous, donc, le plaisir de parcourir les 500 niveaux du jeu pour devenir enfin l’unique big boss du panthéon.
Le chevalier est un pouvoir qui peut faire beaucoup de dégâts
Le jeu vous place devant une interface qui pourra demander quelques explications aux yeux du profane. En haut à gauche se trouve la carte du niveau que vous êtes en train de jouer, qui vous offrira une vue aérienne de votre royaume. Au centre de l’écran se situe la fenêtre principale, celle sur laquelle vous allez intervenir la très grande majorité du temps. C’est là que vous allez aider vos quelques fidèles – habillés en bleu – à se renforcer, à se multiplier et à s’étendre, jusqu’à l’inévitable instant où ils croiseront la route des ouailles de votre adversaire – habillés en rouge – et à se mettre joyeusement sur la gueule au lieu de fraterniser. Et comment les aider, justement ? De la façon la plus simple qui soit – pour un dieu, s’entend – : en aplanissant au maximum le terrain, afin de laisser à vos fidèles la place de construire des bâtiments de plus en plus monumentaux, depuis la simple tente jusqu’au colossal château fort.
Aplanir un volcan est une tâche qui prend beaucoup de temps, tâchez d’utiliser celui-ci à votre avantage
Un clic gauche augmente l’altitude d’une parcelle de terrain, un clic droit la rabaisse ; difficile de faire plus accessible. Plus l’habitation d’un de vos fidèles sera vaste, et plus il y gagnera en force avec le temps. Revers de la médaille : vos ouailles ne sortant de chez elles pour fonder une autre « ville » que lorsqu’elles ont atteint leur puissance maximale, une civilisation composée de puissants châteaux mettra également bien plus de temps à s’étendre qu’une communauté composée de maisons de plus petite taille. Il faudra donc trouver le bon équilibre entre la croissance et la puissance pour avoir une chance de ne pas se faire déborder par l’adversaire.
Plus l’environnement est hostile, et plus vos hommes mettront de temps à se multiplier
En haut à droite se situent deux indicateurs importants. Le premier est une barre de mana, qui vous indique à la fois l’étendue de votre pouvoir sacré et les pouvoirs divins que cela vous permet d’activer. Plus vous aurez de fidèles, plus ceux-ci seront puissants, et plus vite cette barre grimpera. Si, au début d’une partie, le simple fait de niveler le territoire peut venir à bout de vos réserves assez vite, vous deviendrez rapidement libre d’invoquer des tremblements de terre, des marécages mortels, des volcans ou des raz-de-marée faisant disparaitre des continents entiers sous les flots, voire un Armageddon qui fera disparaître tous les bâtiments à l’écran pour clore la partie par une mêlée générale au centre de la carte. Le bouclier visible au-dessus de cette barre vous communiquera parfois des informations sur un de vos fidèles – de façon très aléatoire, hélas – et les deux jauges qui l’entourent représentent la force respective des deux camps, très importantes à consulter avant de lancer un Armageddon ou un assaut en bonne et due forme, donc.
Les marécages peuvent faire des ravages, mais n’oubliez pas qu’ils tuent indifféremment des deux côtés
Enfin, en bas à gauche se trouve la liste de tous les pouvoirs que vous êtes susceptible d’employer – et qui varieront selon les niveaux, tout comme ceux de votre adversaire. Si, lors des premières parties, vous serez généralement doté d’un arsenal conséquent pendant que votre opposant sera privé de tout, vous vous doutez bien que cela ira en se compliquant au fur et à mesure, et que les restrictions que vous imposera progressivement le jeu auront un impact déterminant sur votre façon de jouer – tout comme les pouvoirs dont dispose votre ennemi. Le simple fait qu’il ait la possibilité de convoquer un raz-de-marée, par exemple, pourra vous obliger à bâtir tout votre empire sur les hauteurs pour éviter de le voir disparaître d’un seul coup au pire moment.
Prêtez bien attention aux pouvoirs utilisables dans un camp comme dans l’autre : votre stratégie en dépendra
Notez également la présence d’icônes pour dicter à votre peuple son comportement général, de manière plus ou moins efficace : il pourra ainsi chercher à s’étendre, chercher à « fusionner » pour gagner en puissance, chercher à aller se frotter à l’ennemi ou bien converger vers votre « pape », un fidèle particulier que vous pourrez guider en positionnant un « aimant papal » (!) et qui sera votre seul moyen d’avoir une prise directe sur l’endroit où se rendront vos ouailles. N’hésitez pas à le placer au milieu du camp adverse au moment où vous voudrez pimenter un peu les choses : résultat garanti. N’oubliez pas, cependant, que votre adversaire a tout à fait le droit de faire exactement la même chose.
Le jeu dispose d’un didacticiel qui n’est finalement qu’un niveau comme les autres avec beaucoup plus de mana
Je vous rassure tout de suite : même si le titre comporte 500 niveaux, vous n’aurez pas à les finir tous pour arriver à la fin du jeu. Populous reprend en fait un système hérité de The Sentinel : selon vos performances et votre score, vous vous verrez propulsé jusqu’à sept ou huit niveaux plus loin. Il vous restera cependant largement assez de matière pour vous garder occupé une bonne vingtaine d’heures, et pour apprendre à réadapter vos stratégies selon les situations. Pas trop quand même : si le jeu était très innovant pour l’époque, les joueurs actuels, un peu plus habitués à gérer des dizaines de critères en temps réel, devraient vite trouver leurs marques – et pester contre le manque de contrôle que l’on exerce sur nos ouailles, qui font parfois, avouons-le, un peu n’importe quoi. Il faudra également se doter d’un certain don d’ubiquité : l’ordinateur n’a pas le bon goût de vous prévenir de ce qui se passe, et il faut souvent attendre, par exemple, d’entendre le bruit caractéristique d’un fidèle en train de patauger dans des marécages pour apprendre que votre adversaire vient d’utiliser ce pouvoir contre vous. Reste que le principe, lui, a plutôt bien vieilli, et qu’on se prend rapidement à s’amuser à jouer à dieu en allant donner une bonne leçon à ces impudents en rouge.
Les choses se compliquent lorsque vos deux empires se retrouvent au contact
À ce niveau, la réalisation était irréprochable pour un titre de 1989, et a toujours un charme certain. L’action est lisible, le monde est vivant, les environnements variés (ce qui a d’ailleurs un effet sur la difficulté du jeu). Bon, certes, au bout d’un moment, on se lasse un peu de voir sempiternellement les mêmes personnages et les mêmes bâtiments, mais les extensions viendront corriger ce détail. Le tout a encore un charme certain, y compris la musique mi-oppressante mi-planante qui apporte une certaine tension. Et puis, cerise sur le gâteau, il était possible à l’époque d’y jouer à deux par modem ou câble, et on sait à quel point ce type de jeu ne prend réellement toute sa valeur que face à un autre être humain. Et en cross-platform, s’il vous plaît, un jouer PC pouvant tout à fait affronter un jouer Amiga ! C’est évidemment un peu plus compliqué de nos jours, les Amiga fonctionnels courant moins les rues, mais cela fait partie de la somme des excellentes idées qui avaient contribué, à l’époque, à rendre le titre incontournable.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
Récompenses :
Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleur jeu de réflexion/stratégie – Versions Amiga et Atari ST
Tilt d’or 1989 (ibid.) – Nommé au titre de jeu le plus original (remporté par SimCity) – Versions Amiga et Atari ST
Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Meilleur jeu de stratégie sur console – Version Super Famicom
NOTE FINALE : 14/20Populous était un titre aussi novateur qu'ambitieux à l'époque de sa parution, et l'efficacité quasi-intacte du système de jeu imaginé par les studios Bullfrog près de trente ans après sa sortie montre à quel point celui-ci avait été bien pensé. Évidemment, le joueur actuel, moins impressionné par un genre qui aura eu tout loisir de se développer à sa manière depuis lors, regrettera sans doute un certain manque de variété et de renouvellement dans les pouvoirs à employer et dans les décors traversés. Reste que sur le plan du plaisir de jeu, l'alchimie fonctionne toujours, et on se démène rapidement, dans les niveaux les plus avancés, pour trouver la faille face à un adversaire de plus en plus puissant et de plus en plus surnuméraire. Un monument fondateur.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Interface demandant un peu de pratique
– Assez répétitif sur la durée
– Manque de variété dans les stratégies et les univers rencontrés
– Un seul thème musical au-delà de l'écran-titre
Les avis de l’époque :
« Entièrement animé et bénéficiant d’un scénario captivant et d’une excellente réalisation, Populous est un remarquable logiciel. Le fond sonore est… divin, la convivialité parfaite ! Original, prenant, Populous est une bouffée d’air frais dans le monde de la micro-ludique. J’ose le dire, il est beau et fabuleux ! »
Dany Boolauck, Tilt n°65, Avril 1989, 18/20
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Populous sur un écran cathodique :
Date de sortie : Septembre 1989 Testé sur : Amiga, Atari ST, PC (DOS), PC-98, Sharp X68000, PC Engine Duo
Populous ayant connu un succès commercial aussi immédiat que fulgurant, on pouvait s’attendre à ce qu’une suite soit rapidement mise en chantier. Mais celle-ci n’étant pas appelée à paraître avant 1991, on pouvait également imaginer qu’Electronic Arts chercherait des façons plus immédiates d’engranger encore un peu plus d’argent. Gagné ! Quelques mois à peine après la sortie du jeu paraissait sa première extension (on parlait alors de Data Disk) : Promised Lands, qui se verra décliner d’ailleurs sur plusieurs machines au fil des années. En quoi peut donc consister cette extension ? 500 nouveaux niveaux ? Eh bien… pas vraiment.
Dites bonjour aux nouveaux univers graphiques ! Ici, la révolution française.
En fait, l’extension reprend les 500 niveaux du jeu original pratiquement à l’identique. La difficulté a juste été augmentée drastiquement, et les choses devraient se compliquer beaucoup plus vite que lors de votre premier passage : très rapidement, l’adversaire est largement avantagé par rapport à vous, et vous ne pourrez plus compter sur un rapport de force largement à votre avantage dans la première moitié du jeu comme c’était le cas dans le jeu de base. Un bon moyen de re-signer pour une deuxième partie ? Sur le papier, c’est quand même un peu léger, alors la vraie innovation va prendre une autre forme : la réalisation.
Ici, les cowboys face aux indiens. Bon, d’accord, les bâtiments changent, mais pas trop les décors…
Promised Lands propose en effet de nouveaux univers graphiques, particulièrement dépaysants, qui auront pour objectif de vous faire oublier vos sempiternels fidèles en peaux de bête bleues ou rouge. Oubliez les plaines glacées et les terres volcaniques : cette fois, vous pourrez vous balader dans la révolution française (!), sur une planète extraterrestre, sur un monde composé de legos, dans un western opposant les cowboys aux indiens (et où les gentils sont les indiens, ça change !), et même, symbole ultime de l’époque, dans un univers informatique opposant… Atari à Commodore (et où on remarquera, d’ailleurs, que le méchant est Atari) !
…Alors voilà quelque chose de plus original : Silly World ! Le monde Lego et la guerre Atari/Commodore sont également très dépaysants
Si tout cela pourrait sembler totalement gadget à première vue, il faut reconnaître que cette extension a le grand mérite d’offrir au jeu une partie de la variété qui lui manquait – faire le tour des différents univers graphiques proposés vous demandera de boucler au minimum une dizaine de niveaux, ce qui, vu la difficulté du titre, devrait déjà vous occuper un petit moment. Le challenge rehaussé du titre sera d’ailleurs une bonne occasion, pour les mordus de la première heure, de remettre le bleu de chauffe pour venir à bout d’un jeu devenu bien plus coriace. On regrettera, en revanche, que le système de jeu n’ait, pour sa part, pas changé d’un iota : on retrouve exactement les mêmes pouvoirs et les mêmes possibilités que dans le jeu de base, et le thème musical n’a pas changé non plus. À noter que la version Super Nintendo de Populous intègre par défaut les environnements de Promised Lands en ajoutant même un inédit : le monde pâtissier.
NOTE FINALE : 13,5/20
Sans transcender en rien le principe du jeu de base, Promised Lands a au moins le mérite de réenchanter un peu un titre dont on avait parfois un peu trop rapidement fait le tour, en offrant des univers imaginatifs et une difficulté augmentée qui offrent un très bon prétexte pour se replonger, une deuxième fois, dans les 500 niveaux du jeu. On aurait aimé un peu plus de prise de risques – des nouveaux niveaux, des nouveaux pouvoirs – mais il faut bien reconnaître qu’on s’amuse toujours autant, à condition d’aimer le challenge. À essayer.
Populous : The Final Frontier
Date de sortie : Novembre 1989 Testé sur : Amiga, Atari ST
D’accord, ça change, mais on s’en lasse quand même assez vite
Ce deuxième Data Disk pour Populous est un peu particulier. Vous auriez eu bien du mal à le trouver en magasins, et pour cause : il s’agissait d’un disque promotionnel vendu avec le magazine britannique « The One ». Mine de rien, celui-ci vous offre quand même 500 nouveaux niveaux, avec un seul et unique nouveau cadre, de type « planète extraterrestre », pour changer un peu. On ne se moquait pas du monde, niveau promo, à l’époque !
En terme de système de jeu, le titre de Bullfrog n’a toujours pas changé d’un iota, mais il faut reconnaître que les fidèles des deux camps se reproduisent très vite, dans cette version, ce qui rend le gameplay beaucoup plus nerveux et complique un peu les choses. À moins d’être un mordu total du jeu original, je doute que vous trouviez la patience pour finir cette extension qui devient vite redondante, mais on appréciera l’idée.
Au moins, on ne pourra pas accuser les graphistes de chez Bullfrog de s’être tournés les pouces
NOTE FINALE : 11/20
Sur le plan purement ludique, Final Frontier est une extension gadget qui devrait divertir les joueurs les plus patients pendant une heure ou deux avant qu’ils ne soient tentés de passer à autre chose. Les joueurs les plus fanatiques bénéficieront malgré tout de 500 nouveaux niveaux, mine de rien, ce qui montre à quel point les opérations de promo des années 90 pouvaient se montrer ambitieuses. Une curiosité.
Version Atari ST
Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Écran couleur requis Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme à peu près tous les jeux de l’époque, Populous aura bien évidemment connu son adaptation sur Atari ST. Aucune surprise au niveau du contenu : le jeu est très exactement identique, et les graphismes sont les mêmes au pixel près – ce qui nous montre, au passage, que Bullfrog n’avait pas utilisé l’Amiga à son plein potentiel. Seule différence de taille : la musique. Si celle-ci est toujours présente lors des crédits qui suivent l’écran-titre, quoique dans une version étrangement rabotée se débarrassant de l’ouverture planante de la version Amiga et mélangeant un peu anarchiquement le reste, le jeu, lui, se fera nécessairement dans un silence de mort à peine entrecoupé des quelques rares bruitages du titre, ce qui est quand même un peu dommage.
Le jeu est visuellement identique à la version Amiga
NOTE FINALE : 13,5/20
L’Atari ST livre la version de Populous à laquelle on pouvait s’attendre : un parfait clone du jeu paru sur Amiga. Dommage, malgré tout, que la musique soit passée à la trappe dans la manœuvre : on ne me fera jamais croire que la machine d’Atari n’était pas capable de jouer un thème sonore pendant la partie.
Version PC (DOS)
Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0 – RAM : 384ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Chose encore assez rare pour être signalée en 1989 : la version PC de Populous n’aura, pour une fois, pas à rougir de la comparaison avec les versions Amiga et Atari ST. Graphiquement, dès l’EGA, c’est parfaitement identique, tout comme le contenu et la jouabilité. Deux nuances, malgré tout : l’écran-titre a été remplacé par une version mettant un peu plus en avant le combat de divinités, ce qui aura ses détracteurs comme ses défenseurs, et n’est de toute façon que très anecdotique. Deuxièmement, le jeu a la bonne idée de reconnaître l’AdLib (et donc par extension la Sound Blaster) et la Roland MT-32 ce qui, au moment de sa sortie, était encore très loin d’être la norme. Et si le thème a encore une fois perdu son ouverture planante, sa partie pêchue, elle, est très bien rendue quelle que soit la carte son, et reste très honnête avec le haut-parleur PC. C’est d’ailleurs elle qui vous accompagnera pendant la partie, puisque le deuxième thème de la version Amiga n’a pas fait la route jusque sur PC. Le résultat est très bon, même si le côté cyclique du morceau risque de fatalement vous pousser à couper la musique au bout de quelques heures de jeu. Oh, et le personnage qui vous délivre les mot de passe entre les niveaux n’est plus animé et n’a plus sa courte digitalisation, mais je pense que tout le monde s’en remettra.
Vous allez commencer à bien connaître cet écran
NOTE FINALE : 14/20
Les portages de cette qualité étaient encore rares, sur PC, en 1989, et Bullfrog ne s’est pas moqué du monde en livrant une version identique graphiquement à la version Amiga, et capable de rivaliser avec son illustre modèle dès l’instant où vous aviez une carte sonore – la version MT-32 du thème peut largement faire oublier l’original sur Amiga. Tout est toujours à sa place et le jeu est toujours aussi jouable, alors pourquoi se priver ?
Version Mega Drive
Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Juillet 1990 (États-Unis) – Décembre 1990 (Europe) – 9 août 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Fort de son succès, Populous devait fatalement partir un jour à l’assaut des consoles de salon. La Mega Drive aura fait partie des premières machines servies, et s’en sort honorablement. Comme un symbole, le jeu utilise l’écran-titre des version ST et Amiga avec une musique assez proche de la version PC – en un peu moins bon qu’avec une Roland MT-32, mais pas de quoi rougir. Il rajoute même une petite introduction textuelle. Une fois en jeu, on se retrouve en revanche avec un simple battement de cœur en guise de fond sonore, un peu comme sur Amiga, mais sans les nappes planantes par-dessus. Un peu dommage.
Le curseur est un peu lent, mais la jouabilité se dompte très bien avec un peu de pratique
Graphiquement, le jeu est un peu moins coloré que sur les ordinateurs 16 bits – une tare étrangement répandue sur les jeux Mega Drive de la période, qui avaient une fâcheuse tendance à afficher des couleurs très sombres. La jouabilité au pad, d’ailleurs, pourra demander un petit temps d’adaptation, mais s’en sort relativement bien : A sert à monter le terrain, C à le rabaisser, et maintenir B vous aide à scroller sur la carte du jeu. Utiliser les pouvoirs vous demandera toujours d’aller déplacer un curseur sur l’une des icônes correspondantes, ce qui est un peu plus lent que sur ordinateur, mais rarement pénalisant. En revanche, et comme on pouvait le craindre, le mode deux joueurs a définitivement disparu – adapter l’interface à un écran splitté n’aurait de toute façon pas été une mince affaire. On notera aussi que cette cartouche ne fonctionne que sur les premiers modèles de Mega Drive, soyez donc prévenu.
Le jeu aurait pu être un tout petit peu plus coloré. C’est sombre
NOTE FINALE : 13,5/20
Sans pousser la Mega Drive dans ses derniers retranchements, Populous sera au moins parvenu à préserver l’essentiel de l’expérience de jeu sans que la jouabilité au pad ne soit pénalisante. Si la réalisation est honnête, elle pouvait largement prétendre à mieux, et la disparition du mode deux joueurs, aussi compréhensible soit-elle, reste dommageable. Une version sympathique, mais globalement inférieure à celles parues sur ordinateurs.
Version PC-98
Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 16 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langues : Anglais (menus)/ japonais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme beaucoup de jeux occidentaux ayant connu un succès international, Populous aura été porté jusque sur les systèmes japonais où il avait l’avantage de ne pas avoir à affronter la barrière de la langue, le jeu ne reposant pas exactement sur le texte. Sur PC-98, on sent bien que la philosophie n’était pas de chercher à réinventer la roue mais bien d’offrir un portage le plus fidèle possible à la version Amiga, ce qui est d’ailleurs assez bien fait. La haute résolution native de la machine n’est mise à contribution que pour adoucir certains dégradés, et la musique s’applique à correspondre au maximum à ce qu’on avait pu entendre sur la machine de Commodore – oh, et tant qu’à faire, le jeu par modem est toujours de la partie. Bref, une transcription très fidèle et qui n’a rien de particulier à offrir pour le joueur occidental ayant déjà découvert le titre sur une autre plateforme, mais qui demeure une alternative irréprochable pour ceux qui n’auraient qu’un PC-98 sous la main.
Quelques détails sont légèrement plus fins, mais il faut vraiment bien regarder
NOTE FINALE : 14/20
Populous sur PC-98 s’inscrit fidèlement dans la philosophie des portages extrêmement respectueux : à quelques infimes nuances près, cela reste la version Amiga dans une itération qui s’attèle à lui être fidèle au pixel près – et qui y parvient très bien.
Version Sharp X68000
Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 23 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langues : Anglais (menus)/ japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Inutile de faire durer le suspense : porté par la même équipe, publié par le même éditeur et sorti à une semaine d’écart à peine de la version PC-98, Populous version Sharp X68000 n’en est rien de plus que la transposition quasi-parfaite. Même s’il y a quelque chose de frustrant à voir le monstre de puissance qu’était l’ordinateur de Sharp ne rien offrir de plus qu’un Amiga 500 (le jeu peut même se montrer sensiblement plus lent sur un modèle de base, pourtant cadencé à 10MHz), le portage accomplit sa mission avec une fidélité à toute épreuve, seules les sonorités musicales pouvant connaître de légères nuances d’une machine à l’autre. Inutile de faire la fine bouche : on était venu chercher un portage et c’est exactement ce qu’on obtient. Tant pis pour une éventuelle prise de risques que personne n’a visiblement jamais exigée d’Infinity.
Une différence ? Où ça ? Pourquoi faire ?
NOTE FINALE : 14/20
Comme sur PC-98, la version Sharp X68000 de Populous s’attèle à offrir une reproduction aussi fidèle que possible de la version Amiga sans chercher à la développer ou à la modifier en rien – et y parvient parfaitement. Pas de bonus exotiques à se mettre sous la dent pour les curieux, donc, mais ceux qui auraient tout simplement envie de jouer au hit de Bullfrog sur la machine de Sharp pourront le faire sans regrets.
Version Super Nintendo
Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 16 décembre 1990 (Japon) – Septembre 1991 (Amérique du Nord) – 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Dans la grande valse des portages, la 16 bits de Nintendo n’aura pas été oubliée. Paru sur une Super Nintendo en début de vie, Populous n’aura pas eu la chance de bénéficier de la gestion de la souris vendue parallèlement à la console – et pour cause, le périphérique n’avait pas encore été créé au moment de la sortie du jeu. La maniabilité au pad nécessitera d’ailleurs un temps d’adaptation encore plus long que sur Mega Drive, la faute à un curseur qui se déplace de zone à zone plutôt que de manière fluide, ce qui risque de décontenancer tous ceux qui y auront joué sur ordinateur. Utiliser les pouvoirs nécessite désormais une pression sur la touche Select pour faire basculer le curseur dans la zone concernée. En revanche, le défilement est haché et le titre, dans son ensemble, est assez lent.
Le jeu intègre les graphismes de Promised Lands, avec quelques petites réadaptations
Graphiquement, le jeu est plus coloré que sur Mega Drive, et pourrait sans doute prétendre enfoncer les versions sur ordinateurs si la Super Nintendo bénéficiait d’une résolution un peu moins limitée. Fort heureusement, plutôt que de sacrifier la fenêtre principale, les développeurs ont eu la bonne idée de répartir l’interface des deux côtés de la fenêtre de jeu. Reste que le jeu a toujours ce côté « sombre » qui n’était pas nécessaire. En revanche, on récupère les environnements graphiques de Promised Lands avec même un petit inédit en bonus ! Pour ce qui est de la musique, si le thème principal ne restera pas dans les mémoires, la musique en jeu reprend le morceau entendu sur Amiga en y ajoutant des souffles de vent, ce qui fait son petit effet. La courte introduction entrevue sur Mega Drive a disparu, tout comme le mode deux joueurs.
L’interface aura été un peu bousculée au passage
NOTE FINALE : 14/20
Si la version Super Nintendo de Populous s’avère graphiquement légèrement supérieure à celle parue sur Mega Drive l’année précédente, elle souffre en revanche d’une prise en main encore moins naturelle qui risque de faire regretter la souris à bien des joueurs, et d’une lenteur générale qui nuit au plaisir de jeu. La disparition du mode deux joueurs est toujours aussi regrettable mais on appréciera l’intégration des environnements de Promised Lands, et même de l’ajout d’un environnement inédit.
Version Master System
Développeur : Code to Go
Éditeur : TecMagik
Date de sortie : Octobre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
La Mega Drive n’aura pas été la seule console SEGA à bénéficier de son portage de Populous : la Master Sytem aura également été sur les rangs. Arrivé en 1991, à un moment où la 8 bits commençait à arriver en fin de vie, le titre de Bullfrog décide de placer le curseur assez haut. C’est bien simple, graphiquement parlant, c’est presque aussi beau que sur Mega Drive ! Bien sûr, c’est un peu moins fin, c’est moins coloré, la fenêtre de jeu est bien plus petite, mais les teintes sont plus vives, et ça reste très agréable à l’œil – et pour ne rien gâcher, on hérite également des environnements de Promised Lands. Il faudra en revanche faire sans la musique, qui ne franchira pas l’écran-titre.
Comme sur Super Nintendo, cette version intègre les environnements de Promised Lands
Le vrai problème, à vrai dire, était d’adapter la maniabilité du jeu à une manette à deux boutons. Ne nous mentons pas : le résultat est catastrophique. Un bouton sert à passer de la fenêtre principale à l’interface, et vice-versa. L’autre sert à modifier le terrain, selon qu’on l’emploie simultanément avec la flèche haut ou la flèche bas. C’est déjà assez lourd. Mais le pire, c’est ce maudit curseur qui se déplace de zone à zone, selon des diagonales qui n’ont rien à voir avec l’orientation de votre croix directionnelle ! Pousser la croix vers le haut vous fait aller en haut à gauche, et la croix vers le bas en bas à droite. Si vous jugez plus naturel que le « nord » se trouve en haut à droite (ce qui était d’ailleurs la direction indiquée sur la carte dans toutes les autres versions), dommage pour vous, parce qu’alors c’est absolument injouable ! C’est bien simple, en cinq minutes d’efforts, je ne suis même pas parvenu à aplanir suffisamment de terrain pour créer un château. Un seul château ! Autant dire que la dimension stratégique du jeu passe directement au second plan, et qu’on passe plus de temps à s’énerver tout seul qu’à réellement affronter notre adversaire.
« Gnnnn… tu vas aller là où je te le demande, espèce de sale truc à moitié incontrôlable ??? »
NOTE FINALE : 11/20
À première vue, la version Master System de Populous partait sur de très bonnes bases, avec une réalisation solide qui promettait beaucoup. Hélas, la prise en main absolument calamiteuse fait qu’on passe plus de temps à lutter contre sa manette pour essayer de faire aller ce maudit curseur là où l’on voudrait qu’il aille plutôt qu’à affronter un adversaire, qu’on risque fort de ne jamais voir tant le jeu donne envie d’éteindre sa console au bout de cinq minutes. Ceux qui parviendront à dompter un maniement anti-naturel bénéficieront d’une conversion fidèle, mais le reste risque de souffrir le martyr.
Les avis de l’époque :
« Le plus étonnant dans cette cartouche est moins le côté génial de ce jeu, qui a été décliné sur presque tous les micros et consoles (avec notamment une version splendide pour la PC Engine), que le travail fantastique des programmeurs de Tecmagik. La version Sega est fabuleuse pour une console 8 bits de ce type. (…) Un travail de grande qualité pour un éditeur qui débute sur le marché des consoles. »
F. Orlans, Consoles + n°0, Juillet-Août 1991, 95%
Version PC Engine
Développeur : AlfaSystem Co., Ltd.
Éditeur : Hudson Soft Company, Ltd.
Date de sortie : 5 avril 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Last but not least, la vaillante 8 bits de chez NEC aura également bénéficié de son portage. En terme de réalisation, et comme souvent avec la PC Engine, la petite console de salon peut largement donner une leçon aux versions 16 bits, puisqu’elle enterre les versions Super Nintendo et Mega Drive. On est graphiquement extrêmement proche de la version Amiga – il faudra hélas composer avec un grand cadre noir autour de la fenêtre de jeu. La musique reprend plutôt bien les thèmes de la version originale. Comme souvent, l’inquiétude va plutôt se situer du côté des contrôles. À ce niveau-là, la PC Engine fait un choix équivalent à celui de la version Mega Drive : on déplace librement le curseur à l’écran, un bouton sert à élever le terrain et l’autre à le rabaisser. Du coup, c’est le bouton qui permettait d’accélérer le défilement qui a été sacrifié, ce qui fait plus de dégâts qu’on pourrait le penser tant le scrolling se traine. C’est loin d’être injouable, mais c’est fou comme un jeu comme Populous permet de réaliser à quel point certains gameplay sont pensés pour être joué à la souris et rien d’autre. À condition de prendre le pli, le jeu reste très proche des versions sur ordinateur, mais dommage qu’il ne soit pas un peu plus nerveux.
On est quand même moins à l’aise qu’avec une souris entre les mains
NOTE FINALE : 13,5/20
Populous version PC Engine est un clone bien réalisé de l’épisode original sur Amiga. Si graphiquement il sera très difficile de reprocher quoi que ce soit à la 8 bits de NEC (à part ce cadre noir), la lenteur du scrolling additionnée à une jouabilité rendue pénible par le fait de n’avoir que deux boutons rendent la prise en main plus délicate qu’il ne le faudrait, et font regretter que les souris ne se soient jamais démocratisées sur console. Reste un portage satisfaisant, largement apte à rivaliser avec les versions 16 bits.
Version Acorn 32 bits
Développeur : Richard Walker
Éditeurs : Electronic Arts, Inc. – Krisalis Software Ltd.
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur A3000
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
On ne le sait pas forcément, mais une famille d’ordinateurs 32 bits était en vente dès 1987, sous la forme de la gamme Archimedes d’Acorn – laquelle, en dépit de réelles qualités, n’aura connu qu’un succès assez restreint hors du marché britannique, et même en son sein. Pas franchement pensée pour le jeu (comme le montre le fait qu’elle aura dû attendre trois ans pour accueillir un succès planétaire comme Populous), la machine nous prouve néanmoins qu’elle pouvait facilement proposer l’équivalent de l’Amiga, au pixel près. Naturellement, ni la jouabilité ni le contenu n’ont évolué d’un pouce, mais en-dehors de la conservation du mode deux joueurs, la meilleure surprise provient sans doute de la réalisation musicale (dont vous pourrez profiter dans la vidéo de l’écran-titre), qui tient sans difficulté la dragée haute à ce que pouvait proposer la Roland MT-32, tout en conservant l’atmosphère et les thèmes planants de l’Amiga une fois en jeu. Bref, une version techniquement irréprochable, qui ne pousse clairement pas l’Archimedes dans ses derniers retranchements, mais qui nous rappelle qu’on aurait pu avoir une très solide machine de jeu sur le marché si telle avait été la volonté d’Acorn.
Bien évidemment, pas un pixel de manque sur la très bonne gamme d’ordinateurs d’Acorn
NOTE FINALE : 14/20
Aucune mauvaise surprise pour la gamme 32 bits d’Acorn, qui propose non seulement une réalisation graphique totalement équivalente à celle de l’Amiga, mais également une réalisation sonore qui peut se vanter de figurer parmi les meilleures, toutes machines confondues. Que du bonheur.
Version Game Boy
Développeur : Enigma Variations Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 22 février 1993 (Europe) – 28 mai 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Jusqu’ici, on n’aura rencontré que des machines sur lesquelles porter Populous n’était que rarement un réel défi technique (à l’exception peut-être de la version Master System), et pour lesquelles la transcription nécessitait rarement qu’on effectue des modifications au niveau de l’interface. Comme on peut s’en douter, les choses vont être sensiblement différentes sur Game Boy, où proposer toutes les informations en permanence à l’écran est bien entendu impossible. Le choix opéré a été le plus rationnel : basculer la carte sur Select, les pouvoirs sur Start… et le reste nulle part, ce qui fait qu’il est très difficile de juger de l’avancée de votre adversaire sans aller y jeter un œil vous-même. Le vrai problème, cependant, est que les cartes ont sérieusement rétréci au lavage – ce qui, en un sens, est cohérent, mais modifie grandement la façon d’aborder des parties où on est systématiquement au contact de l’adversaire au bout de trente secondes. Sachant que la maniabilité au curseur à la fois lente et imprécise et souffre de latences assez pénibles, on ne peut pas dire qu’on passe un grand moment sur cette version monochrome, surtout à une époque où le plus dépassé des smartphones devrait pouvoir faire tourner la version originale sans se fouler. Bref, à moins de souhaiter jouer spécifiquement sur Game Boy, le mieux est sans doute d’éviter ce portage.
Sincèrement, c’est à peu près aussi emballant que ça en a l’air
NOTE FINALE : 08/20
Porter Populous sur Game Boy était un défi, et il paraissait de toute évidence insurmontable. L’interface, désormais répartie sur trois écrans, perd énormément en convivialité et en précision, avec beaucoup d’informations passées à la trappe, et des cartes rendues minuscules n’empêchent pas un déroulement poussif. C’est certes jouable avec un peu de pratique et beaucoup de patience, mais ce n’est vraiment pas grand chose de plus qu’une curiosité à l’heure actuelle.
Version Macintosh
Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : 1993
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Quadra 900 avec Mac OS 8.1
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe
C’est plus fin, mais quel est l’intérêt de proposer une résolution en 640×480 si c’est pour afficher deux grandes bandes noires ?
Parmi les dernières machines à hériter d’un portage de Populous, voici à présent le Macintosh, qui aura dû attendre plus de quatre ans. Histoire de bénéficier un peu de cette longue attente, le titre affiche pour l’occasion des graphismes pouvant monter jusqu’en 640×480, avec des sprites lissés. Le résultat est propre et très lisible, sans transcender en rien ce qu’offraient les autres versions (quitte à bénéficier d’une résolution doublée, il eut peut-être mieux valu augmenter la taille de la fenêtre de jeu, mais je chipote). En revanche, je ne serais tout simplement jamais parvenu à faire fonctionner la musique du jeu quelle que soit la configuration testée, et ce portage ayant visiblement bénéficié d’un succès assez confidentiel, je ne serais même pas parvenu à dénicher une vidéo de gameplay pour voir si mon cas relevait de la règle ou de l’exception. Dans tous les cas, le déroulement du jeu en lui-même n’a pas changé d’un iota, vous savez donc ce que vous venez chercher.
NOTE FINALE : 13,5/20
Populous clôture sa route sur Macintosh, avec une version sans surprise qui pourrait tirer son épingle du jeu grâce à ses graphismes plus fins si la musique n’avait pas totalement disparu.
Existe-t-il un jeu qui puisse symboliser une machine à lui tout seul ?
Bien sûr, l’exercice, comme n’importe quel forme de jugement, est largement subjectif. Les cas de Nintendo et de SEGA, tous les deux dotés de mascottes universellement connues, sont hors-concours. La carrière du PC est trop longue, mais en ce qui concerne des machines inscrites dans leur époque, comme l’Atari ST ou l’Amiga, la question est déjà un peu plus pertinente. Pour un joueur de la fin des années 80, en tous cas, le débat aurait été plus simple : la plus grande claque parue sur Atari ST s’appelait encore Dungeon Master. Et sur Amiga, alors, que penser ? Defender of the Crown ? Wings ? Ou bien, plus certainement, un titre qui avait définitivement assis la (fugace) supériorité de la machine de Commodore : Shadow of the Beast.
Si vous avez possédé un jour un Amiga, cette image vient de rendre vos yeux brillants
Revenons en 1989. À une époque où le VGA commençait à peine à poindre le bout de son nez et où personne n’aurait eu l’idée saugrenue de considérer le PC comme une machine de jeu, à une époque où ni la Mega Drive ni la Super Nintendo n’étaient disponibles en Europe, les deux ordinateurs 16 bits étaient les machines reines. Chaque studio rivalisait d’ingéniosité pour sortir le prochain hit sur l’une des deux machines, et certains se faisaient déjà fort de pousser ces dernières dans leurs ultimes retranchements. Shadow of the Beast aura été le titre qui, à cette époque, aura mis tout le monde d’accord – et la liste de prix longue comme le bras qu’aura reçu le jeu ne fera que vous le confirmer. En 1989, on n’avait encore rien vu qui puisse rivaliser avec ça.
Le titre peut prendre une tournure très surprenante !
Résumons rapidement le scénario. Un jeune enfant nommé Aarbron fut enlevé par les prêtres du Dieu Bestial, Maletoth, qui le métamorphosèrent à force de drogues en un messager hideux. Il passa de nombreuses années à accomplir sa tâche, sa volonté annihilée, jusqu’à ce qu’il assiste un jour à un sacrifice rituel. Au moment précis où la dague s’enfonçait dans le cœur du malheureux sacrifié, Aarbron reconnut la victime : c’était son père. Ses souvenirs désormais réveillés par cet événement traumatique, le monstre qui avait autrefois été Aarbron prit la fuite en jurant de se venger du Dieu Bestial qui lui avait tout pris. C’est à cet instant que vous entrez en jeu, pour guider le messager dans la quête qui le mènera jusqu’à Maletoth en personne.
Si vous rencontrez ce boss sans le pouvoir qui permet de le vaincre, vous êtes mort, dommage
Shadow of the Beast vous place donc face à un jeu d’action/plateforme comme il en existait déjà des centaines à la fin des années 80. Les possibilités qui s’offrent à vous sont simplissimes : vous pouvez marcher, sauter, frapper, et strictement rien d’autre. Certes, les derniers passages du jeu réservent quelques surprises à ce niveau, mais pour l’essentiel de la partie, les choses sont placées : on a affaire à un gameplay à l’ancienne, et qui le revendique bien fort.
Cette barrière aura fait hurler plus d’un joueur
Deux petites originalités, malgré tout : d’abord, le titre de Reflections Interactive fait l’effort d’introduire ses environnements par des écrans fixes accompagnés de textes défilant qui aident à offrir au jeu un petit côté « aventure » qui participe pour beaucoup à l’immersion. Surtout, l’architecture du jeu est ouverte : dès le lancement de la partie, rien ne vous interdit de partir sur la gauche, où vous pourrez visiter un arbre creux. À droite, choisirez-vous de descendre dans le puits ? Ou bien poursuivrez-vous jusqu’au château ?
L’ambiance assez glauque du jeu est particulièrement efficace
Dans tous les cas, profitez donc de la visite pour ouvrir bien grand les yeux, parce que pour énoncer l’évidence, c’est beau. Si les joueurs actuels ne verront pas nécessairement ce qui pouvait ébahir ceux de 1989, il faut bien comprendre l’exploit technique que représentait alors un titre comme Shadow of the Beast : contournant les limitations de l’Amiga pour offrir 128 couleurs à l’écran et jusqu’à treize niveaux de défilements parallaxes en simultané, le titre décrochait toutes les mâchoires, à raison. Non seulement l’animation est irréprochable, non seulement l’univers graphique du titre dégage une atmosphère fantastique, non seulement il n’y a jamais la moindre trace du plus petit ralentissement, mais il faut en plus profiter à fond de l’excellente musique qui n’a, pour le coup, pas pris une seule ride. Je me répète, mais l’ambiance générale du titre est absolument fabuleuse.
Ces écrans fixes participent beaucoup à l’immersion du joueur
On a vraiment l’impression d’être sur un autre monde en train de guider notre créature jusqu’à l’objet de sa vengeance et tout, de la « patte » graphique du jeu jusqu’à ses sonorités, respire l’Amiga comme pratiquement aucun autre jeu n’en est capable. Croisez n’importe quel nostalgique de la machine de Commodore, et vous pouvez être certain qu’il vous parlera de ce jeu : c’était un de ces uppercuts qui arrivaient à vous faire croire, l’espace d’un instant, que vous possédiez une machine capable de rivaliser avec ce qu’offraient les salles d’arcade – qui représentaient, rappelons-le, le sommet du monde vidéoludique d’alors. Pour le commun des mortels, Shadow of the Beast, c’était LE jeu qui vous faisait détester les possesseurs d’Amiga.
La taille des sprites était très impressionnante pour l’époque
Lesquels pouvaient certes se pavaner en montrant le jeu à tous leurs proches, mais ne le faisaient généralement qu’après une longue pratique, sous peine de finir humiliés en public. Et pour cause : le jeu, comme souvent à cette époque, est très difficile. Le concept du die-and-retry était en vogue dans les années 80 et, à ce titre, Shadow of the Beast est un digne héritier du genre : pratiquement tous les pièges du jeu sont inévitables si vous ne savez pas par avance où ils se situent, et les adversaires qui vous foncent droit dessus demandent le plus souvent un timing parfait pour être touchés, la faute à la portée réduite de votre frappe de mouche.
Le combat final est imminent
Pire encore : si le jeu propose une structure ouverte, comme on l’a vu, vaincre le titre demande en fait d’accomplir votre visite dans un ordre précis, faute de quoi il pourra vous manquer un objet pour progresser plus loin, voire un pouvoir vous permettant de vaincre un boss. C’est d’autant plus frustrant que le jeu ne nous délivre pratiquement aucune forme d’indice, et qu’il est bien souvent impossible de faire demi-tour lorsque l’on arrive dans une « impasse ». La seule solution est alors de se faire tuer, ou de se suicider en pressant Échap, et sachant que vous ne disposez que d’une seule vie et d’aucun continue, vous recommencerez alors le jeu depuis le début ! Croyez-moi, quand cela vous arrive après une heure de jeu, mieux vaut avoir les nerfs solides – surtout que, pour ne rien arranger, chaque changement d’environnement du jeu s’accompagne d’un fastidieux échange entre les deux disquettes du jeu qui devient vite fatigant, particulièrement si vos parties ne dépassent pas cinq minutes.
Si vous ne savez pas quoi faire, un conseil : tapez !
Autant dire que cet aspect, nostalgie mise à part, est de très loin celui qui a le plus mal vieilli : si recommencer un jeu depuis le début une dizaine de fois simplement pour passer une difficulté située à quarante minutes de là ne vous fait pas rêver, attendez-vous à souffrir. C’est hélas une caractéristique assez banale des titres des années 80, et celle qui sera la plus modifiée lors des différents portages du titre, tant l’accessibilité était devenue une notion chère au début des années 90. Dans tous les cas, l’expérience demeure aussi unique qu’elle est exigeante – et reste le meilleur symbole de ce qu’était l’Amiga.
Les extérieurs sont magnifiques
Vidéo – Cinq minutes de jeu :
Récompenses :
Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleur graphisme
NOTE FINALE : 14/20
Shadow of the Beast est un titre à part, un miracle, un monument érigé tout entier à la gloire de l'Amiga - et avec une telle maestria qu'il aura réussi, pratiquement à lui seul, à installer la machine de Commodore dans la légende de l'âge d'or vidéoludique. Tous les nostalgiques de la fin des années 80 vous en parleront avec des sanglots dans la voix et des étoiles dans les yeux, pour sa musique, pour ses graphismes, pour son univers, pour son atmosphère, pour cette magie si particulière de l'ère 8-16 bits qu'aucune machine dernière génération ne sera jamais parvenue à recréer avec tous les polygones du monde. Les joueurs actuels lèveront sans doute un sourcil interrogateur en découvrant la banalité du gameplay, mais la réalisation hors-norme du titre parviendra peut-être encore à transporter certains d'entre eux jusque dans cet univers si dépaysant dans lequel se sont perdus tant de joueurs de l'ancienne génération. Un bijou - daté, mais un bijou quand même.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Difficulté à l'ancienne : une seule vie, aucun continue – Gameplay à l'ancienne : on avance, on saute, on tape – Aspect die-and-retry assumé : si vous arrivez au mauvais endroit sans le bon objet, vous êtes mort – Valse des disquettes assez fastidieuse
Les avis de l’époque :
« The Shadow of the Beast (sic) est un exploit technique, un défi qui veut dire : « Voilà ce que nous savons faire ». Les treize niveaux de scrolling différentiel sont d’une étonnante fluidité. Les graphismes sont déments (128 couleurs à l’écran !). La taille des sprites n’ont (sic) rien à envier à ceux des bornes d’arcade. Les fonds musicaux de David Whittaler (sic) sont superbes. Reste l’intérêt de jeu qui fait les frais de ces exploits techniques. »
Dany Boolauck, Tilt n°71, Novembre 1989, 17/20
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Shadow of the Beast sur un écran cathodique :
Version Amstrad CPC
Développeurs : Steve Marsen et David Cooke
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
D’accord : on est très loin des 128 couleurs de la version Amiga. Mais c’est jouable et ça bouge très bien.
Au moment d’arriver sur les ordinateurs 8 bits, on peut penser qu’un jeu pensé comme une démo technique pour l’Amiga serait condamné à se ramasser aussi cruellement que l’avait fait la version Atari ST la même année. De fait, Shadow of the Beast sur CPC ne boxe évidemment pas, graphiquement parlant, dans la même catégorie que la version Amiga – on a une nouvelle fois affaire à un « Speccy Port », à savoir une simple transposition en plus coloré de la version ZX Spectrum du jeu. La fenêtre de jeu a été réduite, il y a très peu de couleurs, mais l’équipe de développement est parvenue à conserver un défilement parallaxe et l’action est extrêmement claire. Surtout, ce portage sur CPC s’échine à rester le plus proche possible du déroulement de la version Amiga, à deux ou trois adaptations graphique près, et il le fait extrêmement bien : tout est là, du moindre écran de transition à la musique, et la difficulté étant nettement moins exigeante que dans la version originale, force est de constater qu’on s’amuse plutôt bien, et même franchement mieux que sur la version ST ! Le titre n’est peut-être pas le meilleur jeu d’action/plateforme du CPC, mais il peut clairement prétendre au haut du panier, et on y reviendra avec plaisir. Une excellente surprise.
On sera heureux de constater que tout le contenu du jeu est toujours là
NOTE FINALE : 12/20
En composant avec ses armes, cette version CPC de Shadow of the Beast livre une prestation de grande qualité, bien évidemment incapable de lutter avec la réalisation de la version Amiga mais se donnant du mal pour s’en approcher le plus possible – avec succès. L’ambiance est moins magique, mais le côté sombre est bien restitué. Surtout, l’action est extrêmement lisible, et la jouabilité est irréprochable – plus précise, même, que sur Amiga. Un bon jeu d’action/plateforme sur Amstrad CPC.
Les avis de l’époque :
« Après la décevante conversion de ce jeu sur ST, on pouvait penser que ce chef d’œuvre de l’Amiga supporterait encore plus mal le passage sur CPC. Mais Gremlin a vraiment bien fait les choses, car cette version présente d’excellents graphismes et le scrolling différentiel est surprenant. Cela dit, si Shadow of the Beast bénéficie d’une superbe réalisation, il n’est pas tout à fait aussi convaincant du côté de l’intérêt de jeu. »
Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 14/20
Version Atari ST
Développeur : Mark McCubbin
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Écran couleur requis
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
S’il existait une communauté qui rêvait de montrer aux joueurs Amiga de quoi la concurrence était capable, c’était bien les joueurs Atari ST. Après un camouflet comme Shadow of the Beast, les ataristes étaient en droit d’attendre une version qui repoussait les capacités techniques de leur machine exactement comme Reflections Interactive l’avait fait sur celle de Commodore.
Et en plus, le jeu est encore plus mal équilibré !
Malheureusement, Psygnosis s’intéressait surtout à la viabilité commerciale du portage, ce qui signifie que la seule version du jeu spécifiquement portée sur Atari ST ne le fut que pour des modèles de base à 512k de mémoire, là où le flambant neuf STE aurait certainement été plus indiqué. Le résultat se constate immédiatement : graphiquement, le jeu n’a absolument aucune chance de rivaliser avec l’Amiga. Non seulement les 16 couleurs de la palette font pâle figure par rapport aux 128 de la version originale, mais le nombre de défilements parallaxes a été drastiquement réduit, le jeu n’est plus en plein écran, et la musique ne se fait plus entendre que pendant l’introduction et le game over ! Pour ne rien arranger, certains adversaires ont été modifiés et demandent un timing encore plus précis que sur Amiga. Bref, ce qui devait être une revanche s’avéra, au final, être l’un des premiers clous dans le cercueil de l’Atari ST, définitivement vaincu par les capacités de son rival de toujours.
Ah oui, effectivement, on sent qu’on a perdu quelques couleurs. Et ça bouge beaucoup moins bien.
NOTE FINALE : 10/20
Comme un symbole, l’un des jeux les plus marquants de toute la ludothèque de l’Amiga devint, une fois porté sur son plus grand concurrent, l’annonciateur du début de la fin pour la machine d’Atari. À des kilomètres de la prouesse réalisée sur l’ordinateur de Commodore, Shadow of the Beast sur ST devient un pâle ersatz, une sordide caricature de la version originale, où l’atmosphère si enchanteresse aperçue sur Amiga agonise à cause d’une palette de couleurs à l’agonie et d’un silence de mort en guise de musique. Reste un jeu d’action/plateforme relativement médiocre où la magie n’opère jamais. La fin d’un rêve.
Version Commodore 64
Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue: Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche
Configuration minimale : RAM : 64ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Après avoir fait briller la machine phare de Commodore, Shadow of the Beast allait-il se montrer aussi généreux avec son vénérable ancêtre ? Eh bien, sans vouloir casser le suspense… pas vraiment. Oh, certes, graphiquement, c’est loin d’être catastrophique – on admirera même l’effort louable réalisé quant au nombre de défilements parallaxes, toujours aussi impressionnant.
C’est vraiment la musique qui sauve l’ambiance
En revanche, on ne peut pas dire que ça soit superbe non plus, et la plupart des fioritures, comme les illustrations qui accompagnaient les écrans de chargement, sont passées à la trappe. Les temps de chargement sont améliorés par le support cartouche, ce qui est plutôt une bonne nouvelle, quant à l’aspect sonore, on appréciera surtout la qualité de la musique, qui est vraiment excellente – préférez-la aux bruitages, puisque vous devrez de toute façon choisir entre les deux. Si le jeu suit fidèlement le déroulement de la version Amiga, les points de vie sont passés à 25, histoire de rendre le jeu plus accessible. Puis, regrettant sans doute a posteriori cet accès de mansuétude, l’équipe de développement a décidé de rajouter des pièges partout, ce qui n’était pas forcément nécessaire. Pour ne rien arranger, les masques de collision sont toujours aussi problématiques, et certains monstres sont littéralement impossibles à toucher sans prendre de dégâts. Bref, ce n’est ni impressionnant ni franchement amusant, mais on retiendra l’ambiance.
Graphiquement, le jeu se défend à peu près bien. Surtout en extérieur.
NOTE FINALE : 10,5/20
Malgré de réels efforts du côté de la réalisation graphique – qui aura très peu de chances d’impressionner le joueur de moins de quarante ans – Shadow of the Beast sur C64 a perdu trop de choses en route pour être beaucoup qu’un énième jeu d’action/plateforme passablement médiocre. L’équilibrage a été revu, pas nécessairement en mieux, et même si la musique fait toujours mouche, la réalisation graphique n’impressionne plus. Mais bon, à tout prendre, ça reste meilleur que sur ST.
Version ZX Spectrum
Développeur : Gremlin Graphics Software Limited
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, ZX Microdrive
Contrôleurs : Clavier, joystick Kempston
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko* *Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko
Là, c’est encore à peu près lisible, mais je vous garantis que quand ça bouge, ça fait vite mal aux yeux
Dès les premiers instants passés sur la version ZX Spectrum de Shadow of the Beast, il est évident qu’on tient la version sur laquelle s’est basé le portage sur CPC. On retrouve le style si particulier des graphismes, avec ces deux serpents qui encadrent l’interface, et la jouabilité est toujours l’une des meilleures, toutes versions confondues. La musique est également de la partie – à condition de jouer sur une machine dotée de 128ko de RAM – et nous rappelle que la machine de Sinclair était largement capable de se défendre dans ce domaine. Bref, a priori, c’est du tout bon. Les seuls vrais défauts du titre, comme souvent avec le ZX Spectrum, viennent des limitations techniques du hardware. Graphiquement, le jeu fait moins bien que sur CPC : la fenêtre de jeu est désespérément monochrome, et on aurait préféré qu’elle bénéficie des quelques couleurs aperçues dans l’interface, tant les extérieurs ressemblent à une bouillie jaunâtre où on a bien du mal à distinguer les sprites par-dessus le décor. Les choses se passent heureusement mieux en intérieur.
Tout le contenu du jeu est là, et le tout est parfaitement jouable
NOTE FINALE : 10/20
Shadow of the Beast sur ZX Spectrum s’en tire bien, tant le jeu reprend du mieux qu’il le peut les meilleurs aspects du très bon portage sur Amstrad CPC. Le titre est toujours aussi jouable, bien moins frustrant que les versions 16 bits – toute la partie en extérieur, en revanche, est inutilement compliquée par une visibilité qui aura souffert de la réalisation monochrome.
Version FM Towns
Développeur : The Creative Assembly Ltd.
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : Septembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo
Vidéo – L’introduction du jeu :
Le fait est peu connu chez nous – et pour cause, le jeu n’a jamais quitté le Japon – mais Shadow of the Beast aura également connu une adaptation sur le célèbre ordinateur japonais. Connaissant les capacités techniques du FM Towns, on sait qu’on est face à un hardware qui aura confortablement les moyens d’assurer une conversion à la hauteur du titre original sur Amiga, reste juste à savoir si le travail a été fait correctement ou non.
Premier contact. C’est un peu différent, mais ça fonctionne bien
La première réponse intervient dès le lancement du jeu, après une très courte introduction qui aura au moins le mérite de vous placer immédiatement dans l’ambiance : on se prend la sublime musique du titre en qualité CD en plein visage, et on a de quoi en ressentir des frissons. Du côté des graphismes, l’ambiance est légèrement différente : on ne retrouve pas les dégradés crépusculaires des extérieurs, le dirigeable a disparu, et l’ensemble fait parfois un peu plus vide que sur Amiga sans qu’on sache trop pourquoi. On ne retrouve pas ce problème en intérieur, où la réalisation n’a clairement pas à rougir de la comparaison ; en revanche, la plupart des écrans de transition ont été remplacés par des petites animations de chargement, et tous les textes ont disparu. Si les fanatiques de la version Amiga pourront hurler à la trahison au moindre pixel de travers, il faut reconnaître que l’ambiance si particulière du logiciel est toujours bien présente, et que cette version n’a objectivement que peu de choses à envier à son illustre modèle. Mieux : elle bénéficie même d’une jouabilité un peu mieux adaptée et d’une difficulté revue à la baisse, avec un héros qui voit notamment ses points de vie doublés. Autant dire une excellente alternative pour ceux qui aimeraient composer avec un défi un peu plus abordable sur celui de la version originale.
On ne peut vraiment pas dire que ça soit beaucoup moins beau que sur Amiga
NOTE FINALE : 14,5/20
Au rang des très bonnes alternatives à la version Amiga, Shadow of the Beast sur FM Towns figure à n’en pas douter parmi les candidats les plus sérieux. On a peut-être perdu quelques détails graphiques, l’ambiance est parfois légèrement différente, mais entre la musique CD et l’aspect plus abordable d’un défi qui reste malgré tout redoutable, nul doute que ce très bon portage peut aujourd’hui se laisser découvrir avec plaisir.
Version Mega Drive
Développeur : WJS Design
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Novembre 1991 (Europe, États-Unis) – 23 mars 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
On a souvent évoqué la proximité du hardware entre les deux machines – en particulier du côté de leur processeur – pour expliquer pourquoi la Mega Drive était la machine rêvée pour porter un jeu en provenance de l’Amiga. La console 16 bits de SEGA était, sur le papier, la mieux armée pour offrir l’expérience la plus proche possible de la version originale. Y parvient-elle ?
Les couleurs sont un peu plus vives, les dégradés un peu moins fins, mais ça reste très beau
Eh bien, pas tout à fait, pour être honnête, mais elle n’en est vraiment pas loin. On ne retrouve certes pas les 128 couleurs affichées sur la version Amiga, mais la Mega Drive n’en offre pas moins une réalisation graphique qui n’a pas à rougir de la comparaison – plus fidèle, en un sens, que celle de la version FM Towns. La résolution est même supérieure à celle de la version Amiga (320×224 contre 288×200), ce qui permet de disposer d’une fenêtre de jeu plus large. De la même façon, la musique est légèrement en-dessous de celle de la version originale, mais ne trahit en rien l’ambiance si particulière du jeu. Bref, ça a le goût de Shadow of the Beast, ça a l’odeur de Shadow of the Beast, et cela reste encore aujourd’hui une des versions les plus proches de celle parue sur Amiga. Seules nuances : l’unique téléporteur du jeu est désormais accompagné d’un sympathique effet graphique, le premier écran narratif du jeu a disparu, pour des raisons mystérieuses, et un score a fait son apparition. Le titre est aussi légèrement plus rapide que sur Amiga, mais la jouabilité est également un peu meilleure, ce qui compense. Le jeu reste néanmoins toujours aussi dur – même si les ennemis sont nettement moins difficiles à toucher dans cette version. À noter également, pour les curieux, que la version japonaise n’a pas été réalisée par la même équipe que la version occidentale et profite, pour l’occasion, de graphismes sensiblement différents.
Ce n’est pas encore tout à fait la version Amiga, mais ça commence à y ressembler !
NOTE FINALE : 13,5/20
À la poursuite de l’intouchable version Amiga, Shadow of the Beast sur Mega Drive assume avec panache son statut d’outsider en délivrant une des meilleures versions du jeu. C’est un tout petit peu moins beau, la musique est un tout petit peu moins prenante, mais l’atmosphère si unique du titre a plutôt bien survécu au voyage jusqu’à la 16 bits de SEGA. Dommage que le jeu soit (presque) toujours aussi frustrant, en revanche : les joueurs étaient déjà devenus un petit peu moins patients, en 1991.
Du côté des fans :
Les teintes de la version Mega Drive vous paraissent encore trop éloignées de celles de la version Amiga ? Un certain Gabriel Pyron s’est visiblement fait la même réflexion, puisqu’il a mis au point un hack disponible à cette adresse afin de proposer des couleurs plus fidèles à l’original. En revanche, je ne sais pas si ce hack est réservé à la version japonaise du jeu. Le résultat est visible ci-dessous :
Version Master System
Développeur : TecMagik Entertainment Ltd.
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : 21 novembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Servie après sa petite sœur, à une époque assez tardive, la Master System offre sans doute la version de Shadow of the Beast la plus éloignée de l’originale. Oh, pas de révolution en vue au premier coup d’œil, mais on remarque rapidement que le level design du jeu a légèrement changé, et que le bouton I de la manette affiche désormais un inventaire. Ainsi, rentrer dans l’arbre à l’ouest de la position de départ vous demandera désormais de trouver une clé opportunément placée juste à côté. Plusieurs étapes du jeu vous demanderont ainsi d’avoir trouvé un objet placé quelque part dans un des niveaux pour pouvoir avancer – pourquoi pas, mais le côté « exploration » du titre n’était pas nécessairement celui qui avait laissé les meilleurs souvenirs. Tout le contenu du jeu est toujours là, de la séquence de shoot-them-up au boss final, et on aura même droit à une petite animation de fin avec un sprite tout droit tiré de Shadow of the Beast II.
Le cheminement est un peu différent, mais les habitués devraient vite retrouver leurs marques
Niveau réalisation, on se doute bien que le titre ne peut pas lutter avec une version qui supplantait déjà celle parue sur Mega Drive, mais le résultat reste honnête – un peu en-dessous de ce qu’on pouvait espérer d’une Master System en fin de vie, malgré tout. La musique reprend les thèmes originaux avec une certaine réussite, et la palette limitée de la console n’empêche pas ce portage d’être la plus réussie, techniquement parlant, des versions 8 bits. Dommage que la jouabilité soit toujours aussi frustrante et les masques de collisions aussi énervants – mais vous disposerez désormais de trois vies, avec des checkpoints au début des zones, ce qui aide à faire passer la pilule.
On est assez loin de l’ambiance originale, mais on ne pouvait pas en demander beaucoup plus à la Master System
Récompenses :
Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Meilleure action/aventure sur console
NOTE FINALE : 12/20
Faisant, pour la première fois, le choix de s’éloigner quelque peu de l’expérience originale, Shadow of the Beast sur Master System livre une prestation honnête sans être ébouriffante. Si la réalisation est correcte – les extérieurs restent dramatiquement vides – les quelques ajouts ne métamorphosent pas l’expérience de jeu, qui reste toujours inutilement frustrante pour de mauvaises raisons, en dépit des vies supplémentaires. Reste l’une des plus abouties des versions 8 bits, mais pas forcément celle sur laquelle on s’amuse le plus.
Version Lynx
Développeur : Digital Developments
Éditeurs : Atari Corporation – Psygnosis Limited
Date de sortie : Juillet 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Curiosité : Shadow of the Beast a également été porté sur Lynx, venant ainsi enrichir une ludothèque qui en avait furieusement besoin. Porté sur le minuscule écran de la portable d’Atari, le titre y perd un peu de sa superbe, mais reste très agréable, les couleurs vives obtenant ici de meilleurs résultat que sur les consoles de salon.
Dommage que l’équilibrage n’ait pas été revu, parce qu’en l’état, bon courage pour survivre cinq minutes
La vraie surprise, en revanche, vient du jeu en lui-même : comme la version Master System parue la même année, ce portage fait le choix de s’éloigner du level design de la version Amiga, et dans des proportions encore plus évidentes. Dès le premier écran du jeu, la présence d’un étrange humanoïde à côté d’un canon géant – avec le puits immédiatement situé derrière lui – nous informe que le jeu n’est plus tout à fait le même, tout comme la présence d’une jauge de vie en bas de l’écran. Ce n’est qu’une fois rentré dans l’arbre que les choses deviennent évidentes : les niveaux ont été rallongés, et enrichis en phases de plateforme – ce qui n’était pourtant pas l’angle principal du titre. Ces phases sont heureusement assez faciles, contrairement aux affrontements, qui sont toujours aussi durs (ah, ces cochonneries de chauve-souris qui ne meurent même pas en un coup !). Le titre a quand même la générosité, cette fois, de vous accorder trois continues (qui correspondent en fait à la même chose que les trois « vies » de la version Master System). Bref, le titre a évolué, et ne fera pas nécessairement l’unanimité pour ça, mais vaut la peine d’être testé pour vous faire une idée.
« Heu… Bonjour, monsieur? Attendez, c’est bien Shadow of the Beast, ici ? »
NOTE FINALE : 10,5/20
Porté sur la Lynx d’Atari, Shadow of the Beast y est devenu un titre assez différent, préférant ramener le gameplay du côté de la plateforme. Si l’ambiance y perd un peu, le titre n’est pas pour autant désagréable, loin de là – à condition de bien être conscient qu’il est toujours aussi dur. Sans doute un des meilleurs jeux du genre sur la Lynx, mais également la version la plus éloignée du programme de Reflections Interactive.
Version PC Engine CD
Développeur : DMA Design Limited
Éditeurs : Psygnosis Limited – Turbo Technologies, Inc.
Date de sortie : 27 mars 1992 (Japon) – Décembre 1992 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Super System Card requise
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Le premier Shadow of the Beast aura décidément connu une carrière florissante sur consoles. L’une des dernières servies aura été l’itération CD de la PC Engine, trois ans après la sortie sur Amiga. Et, comme souvent avec la « fausse » 8 bits de NEC, la petite machine fait mieux que se défendre face aux versions parues sur machines 16 bits. Le fait que le jeu soit paru sur CD-ROM, tout d’abord, lui permet non seulement de récupérer la bande-son de la version FM Towns, mais également son introduction animée, enrichie, pour l’occasion, de quelques plans vous montrant un cavalier ressemblant furieusement à un Nazgul faire usage de magie noire pour se glisser chez ce pauvre Aarbron. De quoi s’y croire un peu plus, même si les textes qui apparaissaient pendant les transitions ont disparu pour laisser place, désormais, à de courtes animations.
Le jeu est désormais bien plus agréable à prendre en main
Graphiquement, le titre se place entre les versions FM Towns et Mega Drive, en étant plaisant à l’œil sans réellement retrouver l’ambiance si particulière de la version Amiga – la faute, encore une fois, à des couleurs un peu trop vives, mais pas de quoi crier au scandale. La vraie perte se situe plutôt au niveau de la résolution assez basse de la console de NEC, mais on s’habitue très vite. Si les décors sont moins fouillés que sur la machine de Commodore, on appréciera en revanche l’apparition de quelques petites fioritures, comme des yeux ou des visages se découpant dans le mur du fond de la zone de l’arbre : très bon point pour l’ambiance. L’animation, comme souvent, est irréprochable. Mais la meilleure surprise est sans doute du côté de la jouabilité : le titre est bien plus accessible que sur Amiga. Cela ne vous empêchera pas de vous arracher les cheveux sur certains passages, mais plus question de hurler contre les masques de collision : toucher un adversaire n’avait jamais été aussi simple. On retrouve la fluidité et la précision observée sur les versions CPC et ZX Spectrum, et cela fait énormément de bien à un jeu qui commençait sérieusement à accuser son âge en 1992.
L’ambiance est plus légère, et la forêt a perdu quelques arbres, mais c’est quand même très joli
NOTE FINALE : 14,5/20
Shadow of the Beast sur PC Engine CD n’aura certes pas reproduit la claque si spécifique à la version Amiga. L’atmosphère graphique a un peu perdu, même si la musique CD est un vrai bonus. En revanche, en terme de plaisir de jeu, le titre est infiniment plus satisfaisant que la frustration continue offerte par la version originale. Les nostalgiques du jeu ne vous parleront que de la version Amiga, tant elle aura été intimement liée à la légende de la machine de Commodore, mais pour le joueur moderne, cette version est certainement l’une des plus agréables à prendre en main. Un portage intelligent et très bien réalisé.
Version non publiée : Super Shadow of the Beast sur Super Nintendo
Développeur : IGS
Éditeur : Non publié
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
État : Prototype
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Par souci d’exhaustivité, il convient également de mentionner qu’une version Super Nintendo de Shadow of the Beast avait été dévoilée au CES de 1992. Pourquoi cette version n’aura au final jamais été commercialisée, très bonne question à laquelle seuls les développeurs doivent avoir une réponse, mais le fait est que, contrairement à des dizaines d’autres jeux annulés, une version jouable du jeu circule à l’heure actuelle sur internet. Celle-ci, visiblement très avancée, nous montre que le titre était très proche du terme de son développement… et qu’il contenait également de nombreuses adaptations par rapport au titre de base : nouveaux ennemis, level design revu, certains sprites modifiés…
Rendre le jeu encore un peu plus difficile n’était vraiment pas nécessaire
Ce qui n’a malheureusement pas changé, c’est la difficulté du jeu : dans le mode par défaut, c’est même encore pire que sur Amiga ! Certains des premiers ennemis, comme les chauve-souris qui apparaissent lors des premiers écrans du jeu, sont déjà pratiquement inapprochables sans prendre un coup, et on ne peut pas dire que la philosophie générale fasse faux bond à celle de la version originale. Les choses se passent un peu mieux en mode novice, mais on sent une nouvelle fois qu’on est plus face à un logiciel pour hardcore gamers. La réalisation est assez réussie, même si l’ambiance graphique s’éloigne du titre original, avec ses teintes plus colorées et son aspect légèrement plus générique, et les thèmes musicaux font illusion sans atteindre la qualité de ceux de David Whittaker. Dans l’ensemble, c’est typiquement le genre de version qu’on ne sait pas trop à qui conseiller : les puristes iront directement vers la version Amiga, et ceux à la recherche d’une expérience plus accessible préfèreront sans doute découvrir le jeu sur PC Engine CD ou sur FM Towns.
C’est techniquement solide, mais l’ambiance n’est peut-être pas assez tranchée
NOTE FINALE : 13/20
On ne saura jamais pourquoi cette version parfaitement jouable de Super Shadow of the Beast n’aura jamais été commercialisé, mais peut-être que sa difficulté surgonflée ne sera pas apparue comme un choix pertinent. Si l’ensemble reste très correct à condition d’avoir les nerfs solides, ce n’est certainement pas la première version vers laquelle se diriger pour découvrir le jeu.