Développeur : Technosoft Co., Ltd.
Éditeur : Technosoft Co., Ltd.
Titre original : サンダーフォースIII
Testé sur : Mega Drive
Disponible sur : Switch – Figure au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini
Également testé : Thunder Force AC sur : Arcade – Super Nintendo
La saga Thunder Force (jusqu’à 2000) :
- Thunder Force (1983)
- Thunder Force II (1988)
- Thunder Force III (1990)
- Thunder Force IV (1992)
- Thunder Force V (1997)
Version Mega Drive
Date de sortie : 8 juin 1990 (Japon) – 7 novembre 1990 (Amérique du Nord, France) |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Joypad |
Version testée : Version européenne |
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Lorsque la Mega Drive débarqua enfin sur le sol européen à la fin de l’année 1990 (soit plus de deux ans après sa sortie au Japon, excusez du peu), elle pouvait se vanter d’être une des machines les plus puissantes disponible à la vente – et pour un prix très inférieur à ce que coutait un Amiga, un Atari ST, sans même parler d’un PC haut-de-gamme.
Alors que tout le vieux continent était encore plongé dans une frénésie 8 bits remportée haut-la-main par Nintendo, SEGA avait décidé de frapper un grand coup en s’appuyant sur un argument massue : la Mega Drive, c’était une salle d’arcade à la maison. Un argument que la ludothèque balbutiante de la console aura d’ailleurs eu grand peine à concrétiser avant l’année 1989 et l’apparition de portages – enfin ! – à la hauteur comme ceux de Ghouls’n Ghosts ou de Golden Axe.
Bref, autant dire que si cette affirmation s’était avérée un tantinet présomptueuse (et ce alors que s’avançait la Neo Geo qui était, elle, une vraie borne d’arcade), les choses avaient déjà changé – en bien – au tournant de l’année 1990, et qu’aux yeux des joueurs qui venaient à peine de quitter leur partie de Super Mario Bros. 3, l’illusion entretenue par des titres comme The Revenge of Shinobi ou M.U.S.H.A. était presque parfaite.
Grâce à des sprites imposants, à une palette de couleurs infiniment plus riche et à des capacités sonores qui flattaient les oreilles (Oh ! Des voix digitalisées !), les premiers acquéreurs occidentaux de la machine de Sega pouvaient se décrocher la mâchoire tant Altered Beast, le jeu vendu en bundle avec la console, semblait effectivement proche de sa version arcade. À une époque où le VGA commençait à peine à faire son apparition sur PC, il faut comprendre que même les possesseurs de machines coutant parfois jusqu’à dix fois plus cher que la Mega Drive en prenaient plein les mirettes. Au milieu des très nombreux portages de jeux d’arcade qui allaient participer à la réputation de la console 16 bits de Sega, d’autres petites bombes venues faire étalage des capacités de la machine participèrent également à sa légende. Thunder Force III fit partie de la première fournée de jeux à venir nourrir le fantasme selon lequel la Mega Drive en avait suffisamment sous le capot pour rivaliser avec ce qui sortait dans les salles d’arcade de l’époque.
Nous avons donc affaire ici à un shoot-them-up à scrolling horizontal nous envoyant affronter un bio-ordinateur appelé ORM pour les habituelles raisons de sauvegarde de la galaxie.
Dès l’écran-titre, la qualité sonore du jeu nous en envoie plein les oreilles, et c’est avec un certain enthousiasme que l’on s’apprête à lancer la partie en appuyant sur Start – l’écran des options nécessite une manipulation si complexe qu’il fait presque office de cheat code, et il n’y a malheureusement pas de mode 2 joueurs, on ne perd donc pas de temps. Le titre de Technosoft nous propose alors de choisir notre première destination parmi cinq planètes – qu’il faudra impérativement finir, dans n’importe quel ordre, avant de pouvoir accéder aux deux derniers niveaux puis au double-boss final. Un petit écran nous présente brièvement le nom de notre destination, son boss ainsi que le point faible de celui-ci, puis on entame la partie sans plus de préambule.
J’insiste ici brièvement sur l’année de sortie du jeu : 1990. Parce que je peux vous dire qu’à l’époque, la réalisation du jeu était très impressionnante. Tellement impressionnante, d’ailleurs, qu’elle le restait plusieurs années plus tard, et qu’il aura pratiquement fallu attendre la sortie de Thunder Force IV fin 1992 pour démontrer, une bonne fois pour toute, qu’il était possible de faire encore mieux sur la console de Sega. Visuellement, le jeu semble tirer parti d’à peu près tout ce que la Mega Drive a à offrir : les graphismes sont sublimes, rehaussés d’effets rarement employés à l’époque – comme la magnifique distorsion qui anime l’arrière-plan de Gorgon, la planète volcanique.
Le jeu bouge très bien, n’hésite pas à vous faire subir des accélérations subites ou à changer le sens du scrolling, ni à noyer l’écran sous les tirs, les adversaires et les dangers venus du décor lui-même. Le plus impressionnant étant que le jeu reste, en toute circonstance, d’une fluidité à toute épreuve, et que vous n’aurez jamais à déplorer le plus infime effacement de sprite – visiblement, dès 1990, Technosoft avait déjà parfaitement apprivoisé la 16 bits de Sega. Ajoutez à cela une bande-son très pêchue, d’une efficacité redoutable et d’une grande variété (un thème différent par niveau et un thème différent par boss, on ne se fout pas de nous), avec des voix digitalisées claires – une rareté sur Mega Drive – et vous comprendrez rapidement que la concurrence de l’époque, qu’elle fut sur ordinateurs ou sur machines de salon, n’avait tout simplement pas les armes pour rivaliser. Pour ne rien gâcher, les environnements sont variés, explorant à peu près tous les isotopes récurrents – jungle, glace, lave, etc – sans oublier les grands classiques comme le niveau constitué d’un vaisseau géant à détruire, à la R-Type.
Le gameplay en lui-même est d’une simplicité à toute épreuve – ce qui ne le rend pas moins bon, très loin de là. Les trois boutons du pad de la Mega Drive sont mis à contribution : A vous permettra de choisir la vitesse de votre vaisseau (car aller trop vite peut avoir des effets désastreux dans les espaces exigus, alors qu’au contraire, d’autres moments vous interdiront de lambiner), B correspondra au tir et C vous permettra d’alterner entre une des sept armes du titre, votre vaisseau commençant uniquement avec un tir avant et un tir arrière qui risquent de vite montrer leur limites avant que vous ne mettiez la main sur le reste de l’arsenal du jeu ou sur un des précieux bonus.
Ceux-ci versent également dans le classicisme : un module de deux satellites gravitant autour de votre vaisseau, un bouclier capable d’encaisser trois coups, et une vie, généralement placée dans des endroits particulièrement difficiles à atteindre. Mieux vaudra tirer parti de tout cela sans faire de faux pas, car votre vaisseau meurt au premier contact, et si la perte d’une vie ne vous fera pas recommencer le niveau, elle vous fera en revanche perdre vos satellites et l’arme que vous étiez en train d’utiliser.
La mémorisation du déroulement des niveaux sera, à ce titre, votre meilleure arme pour espérer survivre jusqu’au terme du jeu. Si Thunder Force III n’est ni particulièrement difficile, ni particulièrement long (le jeu peut se terminer en moins d’une demi-heure, mais je vous promets que celle-ci sera intense), attendez-vous à y laisser des plumes le temps d’assimiler les (très nombreuses) mauvaises surprises qui se dresseront sur votre route. L’un de vos pires ennemis sera d’ailleurs le décor : le jeu n’hésite pas à mettre en scène des pans entiers se rapprochant de vous, des scrollings changeant de sens sans prévenir, des projections de roche, de lave ou de glace, des goulets d’étranglements et autres obstacles contre lesquels vous serez pratiquement obligé d’aller vous emplafonner lors de leur première apparition.
La vieille méthode du « rester aussi proche que possible du bord gauche de l’écran » est ici à proscrire, les ennemis arrivant régulièrement par derrière, ou par dessus, ou par en-dessous, ce qui fait que votre mobilité, encore bien d’avantage que vos tirs, sera la clé de votre survie à long terme. C’est bien simple : un trop grand manque de réactivité, et le titre de Technosoft aura vite fait de se transformer en die-and-retry, histoire de vous faire retenir à la dure qu’il faudra penser à éviter, lors de la prochaine partie, cette grande barre rocheuse contre laquelle vous vous êtes misérablement écrasé. On appréciera grandement, en revanche, le fait que toutes les armes du jeu soient en autofire : vous n’aurez besoin ni de matraquer votre innocent bouton B, ni d’investir dans une nouvelle manette afin d’éviter une lésion du pouce.
Au final, on tient sans doute là l’un des tout meilleurs shoot-them-up de la Mega Drive – et peut-être même de toute la production vidéoludique au moment de sa sortie. Un jeu plaisant, nerveux, ni trop frustrant ni trop simple, apte à vous faire comprendre en quelques instants à quoi ressemblaient les rares titres capables de faire rêver tous les joueurs de l’époque.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
Récompenses :
- Tilt d’or 1990 (Tilt n°85, décembre 1990) – Meilleur shoot-them-up (ex-aequo avec Battle Squadron)
NOTE FINALE : 17/20 Véritable démonstration technique au moment de sa sortie, Thunder Force III est également un shoot-them-up percutant et efficace qui aura immédiatement propulsé la Mega Drive au beau milieu de la cour des grands. Si sa réalisation impressionne naturellement nettement moins de nos jours, le jeu de Technosoft demeure un titre majeur de la machine de SEGA, un titre d'arcade jouissif aux mélodies mémorables et à la jouabilité nerveuse qui saura vous retenir pendant de nombreuses heures, le temps de parvenir à le dompter. CE QUI A MAL VIEILLI : – Les boss, et en particulier le dernier, sont trop simples quand on est bien équipé
Les avis de l’époque :
« La réalisation de Thunder Force est vraiment impressionnante, à tel point que l’on a parfois du mal à en croire ses yeux. Les graphismes sont tout simplement superbes, tant en ce qui concerne les sprites que les décors. (…) Un spectacle à couper le souffle ! S’il n’y avait que cela, on se lasserait assez vite de ce programme, mais ce n’est pas le cas, car la jouabilité est excellente et on se prend tout de suite au jeu. »
Alain Huygues-Lacour, Tilt n°81, Septembre 1990, 17/20
« Bien que son principe ne soit pas très original […], ce soft m’a enthousiasmé par son et sa superbe réalisation (Rhâââ, les monstres de fin de niveau !). Encore un jeu comme ça et je file m’acheter une Megadrive. »
Olivier Scamps, ibid.
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Thunder Force III sur un écran cathodique :
Version Arcade
Thunder Force AC
Développeur : Technosoft Co., Ltd. |
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd. |
Date de sortie : Décembre 1990 (Japon) |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : Borne |
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et trois boutons |
Version testée : Version internationale |
Hardware : SEGA System C-2 Processeur : Motorola MC68000 8,948862MHz Son : SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; haut-parleur ; YM3438 OPN2C 7,670453MHz ; NEC uPD7759 640kHz ; 1 canal Vidéo : 256 x 224 (H) 59,922743Hz |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
En dépit de son nom ronflant annonçant une version exclusive à l’arcade, Thunder Force AC se révèle bel et bien être une adaptation du Thunder Force III sorti sur Mega Drive et testé ci-dessus. Très bonne occasion, a priori, de réellement comparer les capacités de l’arcade avec celle de la console de Sega… sauf que le jeu a été porté sur le Sega System C2, à peu près équivalent en terme de hardware de celui de la Mega Drive. Ceux qui espéraient une orgie graphique et sonore encore plus impressionnante que celle livrée sur la console de salon en seront donc pour leurs frais : cette version arcade est graphiquement extrêmement proche de la version Mega Drive – au détail près que, pour une raison mystérieuse, l’interface a été déplacée au bas de l’écran. Niveau son, Thunder Force AC souffle le chaud et le froid : si les bruitages sont de meilleure qualité, et les digitalisations plus nombreuses (on appréciera ou non le « Oh, damn it ! » qui résonne à chaque fois que vous perdez une vie), la musique perd en revanche en dynamisme, et est globalement inférieure à celle de la version console. Un comble pour une borne d’arcade !
En terme de déroulement du jeu, on dira que ce Thunder Force là n’a pas changé de nom uniquement pour l’esbroufe. Si les différences entre les versions salon et arcade ne saute pas aux yeux dès le premier stage, cela n’empêchera pas de constater immédiatement que le choix des niveaux et l’écran chargé de les présenter sont désormais aux abonnés absents. De fait, même si on remarque quelques modifications mineures, quelques passages amputés – et un sentiment général qui laisse la désagréable impression que le jeu est devenu bizarrement beaucoup plus mou-du-genou – le véritable bouleversement n’intervient qu’à partir du niveau 4. Les planètes Haides et Ellis ont en effet subi une refonte totale : plus de niveau des glaces, plus de niveau des grottes, on se retrouve dorénavant avec un champ d’astéroïdes assez plan-plan avec un boss pas très inspiré, et un énième niveau mécanique au plan particulièrement retors et dont le décor risque de vous coûter cher – au sens propre, puisque l’on parle d’une borne d’arcade. Le jeu ne m’a pas paru plus difficile que la version console – les nouveaux niveaux peuvent être piégeux, mais je doute que cette version ait fait cracher beaucoup de pièces aux joueurs aguerris.
NOTE FINALE : 15/20
Grosse déception que ce Thunder Force AC, qui peine à retrouver le rythme et l’adrénaline de Thunder Force III sur Mega Drive. En fermant les yeux sur des coupes pas toujours très heureuses, on pourra néanmoins apprécier de découvrir des niveaux alternatifs qui font de cette version une curiosité à essayer pour les fans ayant retourné Thunder Force III, à défaut de mieux.
Version Super Nintendo
Thunder Spirits
Développeur : Technosoft Co., Ltd. |
Éditeurs : Toshiba-EMI Ltd. (Japon) – Seika Corporation (Amérique du Nord) |
Date de sortie : 27 décembre 1991 (Japon) – Mars 1992 (Amérique du Nord) |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Joypad |
Version testée : Version américaine |
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Surprise : Thunder Force AC a également été porté – sans la participation de SEGA, cela va de soi – sur la machine concurrente de Nintendo, dès 1991. Si cette version n’est pas restée dans les mémoires, c’est tout simplement parce qu’elle reprend absolument toute la liste des faiblesses de la version arcade, en en ajoutant de nouvelles.
Tout d’abord, le jeu est graphiquement moins abouti que sur Mega Drive et sur arcade, malgré une palette plus étendue qui aurait dû autoriser la Super Nintendo à faire mieux que rivaliser. Plus que des couleurs, le plus gros problème vient de la résolution inférieure de la machine de Nintendo : les graphismes perdent énormément en finesse, et la surface de jeu s’en retrouve réduite de manière d’autant plus grotesque que personne n’a eu l’idée de diminuer la taille de l’interface. Remarque, trente secondes de jeu peuvent également aider à fournir une explication à cette surface de jeu réduite : visiblement programmé avec les pieds (et sévèrement bridé par un processeur anémique), ce Thunder Spirits accuse de nombreux ralentissements, et des effacements de sprites qui rappellent les pires heures de la NES. C’est bien simple : par endroits, pour peu qu’il y ait un peu trop de monde à l’écran, c’est tout bonnement injouable, et il n’est pas rare de se faire détruire par un tir qu’on n’avait même pas vu. Ultime faute de goût : plus d’autofire sur les tirs, attendez-vous donc à matraquer votre manette – cela l’abimera de toute façon moins que le nombre de fois où vous allez l’expédier contre le mur.
Niveau sonore, ce n’est pas mieux : musicalement, ça ne rivalise pas avec la version Mega Drive, et les bruitages font pitié comparés à ceux de la version arcade. Dans l’ensemble, le gameplay est miraculeusement devenu d’une mollesse léthargique, et on passe plus de temps à pester contre le titre qu’à s’amuser.
NOTE FINALE : 13/20
Véritable pierre philosophale inversée apte à transformer l’or en plomb, cette version Super Nintendo est certainement le plus beau cadeau jamais fait à SEGA pour prouver que sa Mega Drive avait largement les moyens de lutter techniquement avec sa concurrente. Moins lisible, moins rapide, d’une mollesse dérangeante et au trois-quarts injouable, ce Thunder Spirits aura au moins eu le bon goût de changer de nom afin de ne pas salir la glorieuse saga dont il est issu. Ce qui fonctionne encore sonne le toc, et le framerate inconstant laisse plus que jamais le sentiment de jouer à un jeu qui n’a simplement jamais été pensé pour ce hardware.