STAR WARS : Rebel Assault

Développeur : LucasArts Entertainment Company, LLC
Éditeur : LucasArts Entertainment Company, LLC
Testé sur : PC & MacintoshMega-CD3DO
Disponible sur : Linux (Ubuntu 14.04, Ubuntu 16.04, Ubuntu 18.04), Mac OS X (10.7.0+), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com, Steam.com (version DOS vendue dans un pack comprenant Rebel Assault 1 et 2)

La série Rebel Assault (jusqu’à 2000) :

  1. STAR WARS : Rebel Assault (1993)
  2. STAR WARS : Rebel Assault II – The Hidden Empire (1995)

Version PC & Macintosh

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’arrivée du CD-ROM sur les ordinateurs occidentaux, au début des années 1990, aura représenté à la fois une révolution et le début d’un surprenant paradoxe. Une révolution de par l’explosion des capacités de stockage : un CD pouvait contenir 450 fois plus de données qu’une disquette 3,5 pouces – un sacré bouleversement en termes de possibilités !

Mais également un étrange paradoxe, donc, en découlant : à peine les développeurs disposèrent-ils de plus de place qu’ils n’en avaient jamais rêvé qu’ils ne tardèrent pas à découvrir que ce n’était pas encore assez… Ainsi, si le premier jeu à être paru exclusivement sur CD-ROM en occident, The 7th Guest, aura vu le jour en 1993 (le Japon, lui, aura découvert le support dès la deuxième moitié des années 1980), dès l’année suivante, des titres comme Wing Commander III ou Under a Killing Moon se démenaient déjà pour ne tenir que sur trois ou quatre CD ! Les choses allaient décidément extrêmement vite, à cette époque… Et de place de stockage ainsi que de vitesse de l’évolution informatique, il sera question ici au moment d’évoquer Rebel Assault.

En quoi consiste le titre imaginé par Vince Lee ? En la concrétisation d’un fantasme déjà très vivace en 1993 : vivre La Guerre des Étoiles à la première personne. Pas dans la peau de Luke Skywalker, d’ailleurs évacué de cette version, mais bien dans celle d’un (ou une) pilote bien décidé(e) à accomplir exactement la même chose, au point, comme dans X-Wing, de s’en aller détruire l’Étoile Noire lui(ou elle)-même.

Mais avant de pouvoir concourir au Graal éternel de la série, il faudra commencer par faire ses preuves dans les canyons de Tatooine, dans les champs d’astéroïdes, dans les assauts de destroyers impériaux et même – petite entorse à la chronologie de la saga – à la surface de la planète Hoth. Au fil des quinze niveaux du jeu, c’est donc bien une sorte de best of de STAR WARS qui va être proposé au joueur – qui n’attendait bien évidemment que ça pour voir enfin ce que ce fameux support révolutionnaire avait réellement dans le ventre.

« En mettre plein les yeux » était d’ailleurs certainement le premier objectif figurant dans le cahier des charges au moment de réaliser le programme. On avait enfin la place pour caser de la musique numérique et des extraits de vidéo tirées directement des films ? On allait s’en servir ! Et je peux vous dire que l’introduction visible en ouverture du test suffisait à coller des frissons à n’importe qui s’approchant d’un PC à cette époque.

Quand on sortait du monde des programmes occupant 15 à 20 mégas, pour les plus ambitieux, pour basculer dans ceux en mobilisant 640, le gouffre qui s’était ainsi créé du jour au lendemain était immédiatement visible – et audible. Tout à coup, on se baladait dans des décors et des séquences puisées directement dans le film, avec des dialogues intégralement parlé et des effets comme on n’avait encore jamais eu d’en voir à l’époque, et on lançait la première partie en frissonnant d’anticipation tant le simple fait d’entendre le thème culte de John Williams en qualité CD (encore assez basse, ironiquement) avait suffit à nous charger d’adrénaline.

Mais en quoi consistait au juste ce titre révolutionnaire qui venait de nous transporter aux portes du Nirvana ? Eh bien, en le recyclage d’un concept antédiluvien, lui : le rail shooter. Concrètement, 90% du jeu consistera à promener un curseur sur un écran pour faire feu sur ce qui viendra à notre rencontre, les 10% restant consistant à déplacer un vaisseau à la place du curseur, ou à choisir sa direction dans un très délicat passage de labyrinthe à l’intérieur de la base de Hoth. Oui, derrière son orgie technologique, Rebel Assault ne dissimule au fond qu’un clone de n’importe quel jeu de tir façon Operation Wolf – et le pire, c’est qu’il ne le fait même pas spécialement bien.

Quelqu’un chez LucasArts a en effet fatalement dû réaliser que promener un curseur sur l’écran à l’aide de la souris ne demandait pas des compétences extraordinaires. L’idée a donc été… de rendre la jouabilité du titre infecte. Concrètement, pensez d’ores et déjà à préparer un joystick, et conseil : prenez bien le temps de le calibrer correctement. Parce que jamais vous n’aviez imaginé à quel point placer un curseur précisément à l’endroit où on le souhaite pouvait être une gageure.

Entre la latence et l’imprécision de la chose, l’essentiel de la difficulté du titre proviendra de votre capacité (ou non) à domestiquer cette foutue jouabilité, qui vire parfois à la farce – attendez de rater systématiquement des adversaires situés à moins de deux mètres de vous dans les couloirs de la base de Hoth pour comprendre ce que je veux dire. Sachant que les séquences de pilotage se réduisent de toute façon à déplacer un sprite sur une vidéo projetée en fond, bon courage également pour deviner à quel moment vous allez toucher le décor et à quel moment le programme considère que vous ne risquez rien. Bref, le prix du rêve d’enfant qui nous envoyait jouer à Star Wars « comme si on y était » est cruel : il faudra accepter un jeu où chaque instant passé est un combat entre le joueur et son joystick, qui n’y est pourtant pas pour grand chose, le pauvre.

Pour ne rien arranger, si la jouabilité ne s’est certainement pas arrangée avec le temps, l’enrobage, lui, aura violemment accusé les plus de vingt-cinq ans nous séparant de la sortie du titre. Concrètement, ce qui faisait rêver tout le monde en 1993 sent dramatiquement la naphtaline, à l’ère du 4K, du Blu-Ray et des jeux pesant 150 gigas.

Les vidéos qui impressionnaient tant à l’époque s’affirment aujourd’hui comme ce qu’elles sont : de dramatiques bouillies de pixels encodées directement avec les pieds. Même la musique respire les balbutiements de la compression audio : on a l’impression d’entendre la version numérique d’un enregistrement réalisé sur cassette depuis la pièce d’à côté. Pire encore : faute de place, on retrouve certains avatars oubliés de cette période pionnière, à l’instar de ces images fixes où seuls les yeux et la bouche des personnages étaient animés, comme dans Inca II. Dire que le procédé a mal vieilli serait un euphémisme, et on se retrouve face à un titre dont le principal argument de vente, à savoir la réalisation, est aujourd’hui tragiquement dépassé à tous les niveaux, même et surtout pour les fans du pixel art. Dès lors, que reste-t-il à sauver ?

Aussi improbable que cela puisse paraître, le fait est que Rebel Assault conserve encore les restes d’une certaine magie, en dépit de ses très, très nombreux défauts. Le mirage du rêve d’enfant qui attendait depuis toujours de pouvoir – enfin ! – jouer à La Guerre des Étoiles se manifeste encore, par bribes, tandis qu’on se surprend à laisser pour la vingtième fois sa chance à une mission qui aurait été bouclée depuis deux heures si la jouabilité avait eu le bon goût d’être décente. Inutile de dire que la nostalgie – ou le fait d’être un fan irréductible de Star Wars – seront sans doute indispensables pour vous pousser à vous montrer patient avec le jeu et à vous accrocher le temps de dompter son maniement. Dans le cas contraire, le temps a déjà rendu son jugement et celui-ci est implacable : peine capitale d’oubli, sans espoir de réhabilitation.

Vidéo – Le premier chapitre du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’argent 1993 – Meilleur jeu CD (Tilt n°121, décembre 1993)

NOTE FINALE : 11/20 STAR WARS : Rebel Assault est sans doute l'un des meilleurs représentants de la période folle qu'aura représenté l'arrivée du CD-ROM sur les ordinateurs domestiques : un jeu qui décrochait la mâchoire de toute la famille en 1993, et qui n'impressionnait déjà plus grand monde un an plus tard... Une fois l'aspect tape-à-l’œil mis de côté, que reste-t-il ? Un rail shooter dont le maquillage ne fait clairement plus illusion, basique dans ses mécanismes, plombé par une jouabilité médiocre, et dont l'éventuel capital sympathie tient exclusivement à la nostalgie ou à l'univers dans lequel il se déroule. Sachant que le voyage est aussi éprouvant que l'enrobage est daté, rares seront les joueurs découvrant le titre au XXIe siècle qui pourront espérer tomber sous son charme. Mais si jamais vous voulez savoir à quoi ressemblait la pointe de la technologie vidéoludique au début des années 90, vous en aurez ici un exemple parlant... et un peu cruel. CE QUI A MAL VIEILLI : – Imprécision notoire : on sait où on tire, mais on ne sait jamais où on va, et on a bien du mal à y aller – Très difficile, en grande partie à cause de la jouabilité – Réalisation dont on perçoit aujourd'hui immédiatement les ficelles - et les énormes limites

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Rebel Assault sur un écran cathodique :

Version Mega-CD

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En dépit de la rareté des machines occidentales ayant adopté le support CD en 1993, Rebel Assault ne sera pas resté cantonné au PC. En plus des versions Macintosh et 3DO, une autre machine aura également accueilli le rail shooter de LucasArts : le Mega-CD. Si ce n’est en soi pas très surprenant (la machine de SEGA aura souvent servi de passerelle entre les ordinateurs et les consoles, comme le rappellent les portages de titres comme Eye of the Beholder, Dungeon Master II, Dune ou Monkey Island), la grande question restait de savoir comment le Mega-CD allait s’en tirer sans pouvoir compter sur la puissance de son processeur ni, surtout, sur les 256 couleurs de la palette du VGA. La réponse tient en un mot : mal.

Dès les premiers instants, on sent que le lecteur CD tire la langue, avec des temps d’accès bien plus importants que sur PC. Dès que les premières images apparaissent, on voit bien à quel point on a perdu en couleurs : ce n’est même plus de la bouillie de pixels, c’est du gruau. Le jeu n’étant de toute façon plus très beau selon les critères modernes, on pourrait penser que cela ne change finalement pas grand chose, mais allez donc distinguer quelque chose dans ces scènes illisibles, et vous allez vite comprendre. Pire encore, si le pad de la Mega Drive est sensiblement plus précis que ce que propose un joystick sur PC, la jouabilité est toujours aussi catastrophique – peut-être même pire. Ainsi, lors de la première mission, mon vaisseau était systématiquement déporté sur la gauche au premier virage, et même avec la flèche de droite enfoncé au maximum, il était impossible de s’éloigner de la paroi, provoquant ainsi un game over pratiquement inéluctable au bout de quinze secondes de jeu ! Les choses s’améliorent heureusement un peu par la suite, et les phases de shoot pur sont indéniablement plus précises que sur PC, mais on commence à se demander si on a réellement envie d’être précis en bougeant un curseur sur une bouillie illisible, de toute façon. Même la musique connait des latences et des dégradations à cause de la faiblesse du processeur, bref, on sent bien que ce n’est pas sur Mega-CD que Rebel Assault va connaître sa rédemption.

NOTE FINALE : 09/20

Rebel Assault étant un logiciel qui faisait presque davantage office de benchmark que de jeu à proprement parler, on ne sera pas très surpris qu’il s’affirme plus comme un révélateur de toutes les limites du Mega-CD que comme un programme transcendant son support. Sachant que l’essentiel de l’expérience de jeu se limite dorénavant à essayer de distinguer quelque chose dans une soupe marron/noire pendant l’essentiel de la partie, et que la jouabilité est parfois si bancale qu’on en vient à se demander si le titre a jamais été testé, autant dire que le peu de magie que conservait encore la version PC fond ici comme neige au soleil.

Version 3DO

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On tend à l’oublier, mais avant la PlayStation ou la Saturn, la grosse révolution 32 bits qui faisait frétiller d’aise dans les rédactions journalistiques, c’était la 3DO. Si un prix bien trop élevé additionné à une politique éditoriale rédhibitoire auront eu raison de la machine, il faut bien reconnaître qu’elle avait malgré tout quelques arguments pour faire rêver à l’époque.

Avec cette version de Rebel Assault sur 3DO, au moins, les choses sont claires : en termes de réalisation, c’est la copie carbone de l’itération PC – ce qui n’est déjà pas rien, la version originale tournant sur des configurations encore bien plus coûteuses que la console. Son, image : pas de problème, ça tourne toujours aussi bien, et la jouabilité est même sensiblement plus précise… au niveau du joystick, en tous cas, car les masques de collision sont toujours aussi catastrophiques, et on a bien du mal à deviner à quel endroit on se fera toucher et à quel endroit on s’en sortira indemne. Cependant, le résultat est clairement meilleur pendant les phases de tir, ce qui fait sans doute de cette version la moins frustrante, d’une courte tête.

NOTE FINALE : 11,5/20

la 3DO pouvait rivaliser avec bien des modèles de PC, et ce portage de STAR WARS : Rebel Assault en est un excellent exemple : c’est techniquement parfaitement identique à la version originale, et c’est même sensiblement plus précis pendant les phases de tir. Tant qu’à faire, autant préférer cette version aux autres.

Rex Nebular and the Cosmic Gender Bender

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Testé sur : PC (MS-DOS)
Version non testée : Macintosh
Disponible sur : Linux, Windows
En vente sur : Gog.com, Steam.com (Linux, Windows)

Les jeux basés sur le moteur MADS :

  1. Rex Nebular and the Cosmic Gender Bender (1992)
  2. Return of the Phantom (1993)
  3. Dragonsphere (1994)
  4. Once Upon a Forest (1995)

Version PC (MS-DOS)

Date de sortie : Décembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC-DOS/MS-DOS 4.0 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Covox Sound Master, Covox Speech Thing, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’introduction du jeu :

MicroProse. Voilà une société à laquelle il faudrait penser, un jour, à consacrer un dossier, tant il y aurait de choses à dire sur la compagnie cofondée par un certain Sid Meier – et qui évoquera bien des souvenirs enrobés de nostalgie aux joueurs de l’ancienne génération.

Certains écrans font VRAIMENT penser aux productions Sierra

Songez qu’en 1992, MicroProse avait déjà dix ans. Et, comme cela a déjà été évoqué en ces pages, la compagnie alors principalement connue à l’époque pour ses simulations et ses jeux de stratégie était en train de chercher à sortir un peu de sa zone de confort pour s’attaquer à d’autres des genres-rois de la période : le jeu de rôle et surtout le jeu d’aventure. Dans le premier cas, cela aura donné cette année-là Challenge of the Five Realms et surtout Darklands. Dans le second, c’était l’occasion d’étrenner le moteur pompeusement intitulé Microprose Adventure Development System (ou MADS), qui ne comptera finalement que quatre titres à son actif. Et le premier jeu à en avoir tiré parti est sans doute le plus célèbre : Rex Nebular and the Cosmic Gender Bender.

Bienvenue dans un univers qui annonce tout de suite la couleur

L’histoire vous est narrée dans l’introduction visible en ouverture du test : vous êtes (fort logiquement) Rex Nebular, sorte d’aventurier macho du futur très « hansoloesque », de retour de mission pour le commandant Stone, lequel vous a envoyé chercher un vase ancien contre monnaie sonnante et trébuchante. Êtes-vous parvenu à mettre la main sur le fameux artéfact ? C’est ce qu’un Rex de mauvais poil va entreprendre de raconter à Stone, fort courroucé d’une expédition qui aura eu l’occasion de venir à bout de son vaisseau spatial, le Cochon Glissant, et qui, plus grave encore, aura également égratigné sa virilité…

Vous aimez la finesse ? Bon, vous allez peut-être être déçu…

Voilà pour le pitch de départ, qui vous voit donc débuter la partie au fond de l’océan, dans un appareil en ruines, pourchassé par des femmes ayant un sérieux contentieux à régler avec la gent masculine. L’occasion de découvrir une interface très inspirée de celle des production LucasArts de l’époque : une liste de verbes à gauche, un inventaire à droite. Seule absence marquante : pas de verbe « utiliser » au menu. Et pour cause, chacun des (très nombreux) objets en votre possession profitera de sa propre liste d’actions, comptant généralement au moins une action absurde (si vous ramassez un bras tranché, ne soyez donc pas surpris que le jeu vous propose de lui serrer la main). Un très bon moyen d’aborder deux éléments clés du jeu : sa tonalité et son humour.

La deuxième moitié du jeu serait sans doute très intéressante si on y croisait davantage de monde

L’interface a beau emprunter à LucasArts, difficile de ne pas immédiatement penser à l’autre compagnie maîtresse des jeux d’aventure de l’époque, Sierra On-Line, en lançant le jeu. Qu’il s’agisse de l’esthétique VGA très fouillée où on sent que le pixel art a rapidement cédé devant un scanner et une application 3D, ou des grands pavés descriptifs accompagnant la moindre des actions du jeu, comment ne pas immédiatement penser à Space Quest (qui s’apprêtait alors à publier son cinquième épisode) et ne pas trouver à Rex de faux airs de Roger Wilco ?

Devenir une femme ne change finalement pas grand chose

Dès les premiers plans sur le cockpit de votre vaisseau dans lequel on pourra distinguer, pêle-mêle, des dés pendus au rétroviseur, une cheminée, une voiture radiocommandée ou un panier de basket au-dessus d’une corbeille à papier, on comprend rapidement que le titre de Kenn Nishiuye ne se prend pas trop au sérieux. Autant le dire tout de suite : l’aventure vous mettant aux prises avec une planète intégralement dominée par les femmes aurait largement pu être imaginé par Mark Crowe, Scott Murphy et Al Lowe, tant leur influence semble prégnante à chaque écran du jeu. Al Lowe ? Eh oui car, thématique oblige, le jeu fait également appel – à très faible dose – à un érotisme léger qui oblige d’ailleurs le jeu à proposer une option afin de censurer les rares scènes salaces, au cas où vous seriez dangereusement émoustillé par la vue d’une paire de seins de trois pixels de large.

Les descriptions restent les passages les plus drôles du jeu

L’humour, quant à lui, repose principalement sur deux mécanismes : de longues descriptions textuelles, comme on l’a vu, proposant souvent un côté décalé assez mordant, et le décalage entre votre macho d’aventurier et le monde féminisé dans lequel il évolue. Autant dire que sans une solide maîtrise de l’anglais écrit, vous risquez de vous ennuyer ferme, tant le jeu n’a que rarement recours à des gags visuels – et tant ceux-ci font rarement mouche. Un reproche qu’on pourra d’ailleurs appliquer à la quasi-totalité du jeu, hélas.

Ces cinématiques qui vous voient circuler d’un point à l’autre de la ville sont hélas impossibles à passer

À chercher à louvoyer quelque part entre Space Quest, Leisure Suit Larry et Maniac Mansion, il arrive en effet assez souvent que ce Rex Nebular s’égare en route. Le jeu, très ardu dans son ensemble (il propose heureusement trois modes de difficulté), semble chercher sa philosophie en même temps que son récit pendant la plus grande partie de l’aventure. Alors qu’on s’attend à évoluer au contact d’une société dominée par les femmes pendant l’essentiel de l’aventure, cet aspect n’occupe finalement qu’une place assez mineure de l’histoire, vous invitant à passer un bon quart du jeu à la surface d’une planète lambda où il n’y a rien à voir, un autre quart dans des couloirs tous semblables où les interactions avec les femmes sont extrêmement limitées à tous les niveaux, et enfin une moitié dans « Machopolis », une ville autrefois habitée par les hommes et désormais… totalement désertée !

À quoi bon faire un jeu de SF pour y proposer ces paysages façon Afrique de carte postale ?

Résultat : alors qu’on s’attendait à enchainer des dialogues hilarants et des situations ubuesques, bien encouragé par la promesse du « changeur de sexe » (gender-bender) du titre, on se retrouve au final avec de vagues séquences beaufisantes de type « les femmes veulent être indépendantes mais elles rêvent en secret d’un mâle pour les fertiliser, lol » et autres références hyper-datées qui font qu’on a bien du mal à s’attacher à un univers qui n’a aucune profondeur et, pour tout dire, pratiquement aucune idée.

Ce vase insignifiant est censé vous motiver à avancer pendant des dizaines d’heures

D’autant que, plutôt que de tomber dans la farce et d’accepter de verser ouvertement dans la caricature, le titre passe son temps à chercher à se donner un côté adulte, avec son érotisme cheap d’un côté mais aussi avec des séquences de gore qui semblent totalement hors de propos dans un programme qui ne sait jamais s’il doit évoluer au premier, au deuxième ou au troisième degré. Écueil assez parlant à ce niveau, le jeu s’obstine jusqu’au bout à s’accrocher à la quête la plus insignifiante qui soit dans un univers de guerre des sexes : trouver ce foutu vase n’ayant absolument aucun lien avec le reste de l’intrigue. On se retrouve au final avec un titre qui fait penser à Martian Memorandum, avec un humour à peine plus fin, mais avec un univers et une enquête nettement moins travaillés.

Si seulement l’idée de la guerre des sexes avait été mieux exploitée…

Si ceux espérant se payer une bonne tranche de rigolade en s’essayant au jeu feraient bien de visionner en préambule quelques extraits du titre afin d’éviter une douche froide, les amateurs de défi relevé, eux, devraient passer un bien meilleur moment, à condition d’apprécier à la fois les énigmes corsées et légèrement fastidieuses (ah, la composition d’explosifs, ah, les piles à recharger, ah, les lasers à détourner…) ainsi qu’une bonne dose de chasse au pixel dans un environnement qui ne vous affiche jamais aucune information en promenant votre curseur : il faudra cliquer partout.

Attendez-vous à chercher des objets de deux pixels de haut dans des décors surchargés de détails

On meurt également souvent mais, pas de panique, le programme vous renvoie alors immédiatement à l’écran précédent. On regrettera en revanche que le jeu ne rebondisse jamais sur le fait que l’histoire est racontée à la première personne : Stone pourrait réagir au fait que vous lui racontiez votre mort alors que vous êtes en fait piqué juste devant lui (le genre de détail auquel avait pensé Monkey Island 2, par exemple) ; mais non, rien n’est prévu pour vous rappeler le point de départ du récit. Si, en dépit de tous ces reproches, Rex Nebular n’est pas à proprement parler un mauvais jeu, il ressemble plus à une promesse déçue, à un titre qui aurait pu être beaucoup d’autres choses mieux pensées et infiniment plus intéressantes à condition d’un game design mieux arrêté et d’une philosophie plus réfléchie.

Le titre met beaucoup trop de temps à décoller

Même la réalisation a perdu énormément de son charme, la plupart de ses digitalisations baveuses soutenant souvent très mal la comparaison avec des chef d’œuvre du pixel art comme The Legend of Kyrandia, paru la même année. Et quand on voit les monuments comme Day of the Tentacle qui s’apprêtaient à débarquer, en plein âge d’or du genre, on n’est au final pas très surpris que ce Rex Nebular ait quelque peu glissé dans l’oubli, ni que MicroProse n’ait jamais vraiment réussi à se faire un nom dans un domaine où la compagnie américaine avait manifestement pris le train avec un peu de retard. Reste un jeu qui parlera principalement aux nostalgiques et aux joueurs les plus avides de découvrir cette fameuse grande période du jeu d’aventure.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1992 (Tilt n°109, décembre 1992) – Meilleur jeu d’aventure Micro

NOTE FINALE : 14/20 Pour son entrée dans le monde du point-and-click, MicroProse aura décidé de composer avec des ingrédients éprouvés : une dose de LucasArts, un gros morceau de Space Quest, une pincée de Leisure Suit Larry... Le résultat est ce Rex Nebular imparfait dont l'intrigue à base de guerre des sexes est finalement dramatiquement sous-exploitée, n'offrant que des poncifs rebattus et accusant un gros coup de vieux sans jamais oser verser franchement dans la folie douce qu'elle laissait espérer. Dans un univers qui manque trop de personnalité pour marquer durablement les esprits, on pourra se laisser porter par un humour parfois plus fin qu'il n'en a l'air, mais reposant intégralement sur une bonne connaissance de l'anglais. Une balade souvent éprouvante qui pourra se montrer sympathique sur la durée, mais qui risque hélas de laisser pas mal de monde sur le bas côté. CE QUI A MAL VIEILLI : – Un humour reposant beaucoup sur le texte et qui impose de bien maîtriser l'anglais... – ...et un côté beauf, heureusement à petites doses, mais qui peine franchement à faire sourire – Un univers qui sonne creux et auquel on ne s'attache pas – Une réalisation assez froide très loin de rivaliser avec les meilleurs titres de la période – Très difficile – Beaucoup d'allées-et-venues entrecoupées de cinématiques impossibles à passer dans la deuxième moitié du jeu

Les avis de l’époque :

« Le scénario combine magistralement science-fiction et humour décapant, sans tomber à aucun moment dans la vulgarité. L’intrigue est très bien menée et les énigmes demandent plus que jamais de la réflexion. […] Un chef d’œuvre qui n’a pas volé son Tilt d’or, même face au tout récent King’s Quest VI de Sierra. »

Thomas Alexandre, Tilt n°109, décembre 1992

Ultima VII : la porte noire

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Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titre original : Ultima VII : The Black Gate
Titres alternatifs : Ultima VII : Die Schwarze Pforte (Allemagne), 創世紀7:黑月之門 (Chine), Ultima : The Black Gate (Super Nintendo)
Testé sur : PC (DOS)SNES
L’extension du jeu : Forge of Virtue
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – au sein de la compilation Ultima 7 The Complete Edition
En vente sur : Gog .com (Mac, Windows)

La saga Ultima (jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Mars 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25 et 3,5″ (x6)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 SX – OS : PC/MS-DOS 4.0 – RAM : 2Mo
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Roland MT-32, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au début des années 90, ORIGIN Systems était au beau milieu de ce qu’on pourrait considérer comme son âge d’or. Depuis Wing Commander en 1990, chacun des jeux publiés par la compagnie fondée par Richard Garriott était attendu comme le messie, et faisait généralement à sa sortie l’effet d’une superproduction pensée pour mettre les PC dernière génération à genoux. Car oui, c’était devenu officiel autour de 1991, mais l’ordinateur ultime pour le jeu, en dépit de son prix, était bien devenu le PC – soit l’ordinateur que strictement personne n’aurait pensé à acquérir pour jouer à peine deux ans auparavant. Comme le temps passe…

Rarement on aura eu l’occasion de visiter un univers aussi détaillé

Ce n’était certainement pas l’année 1992 qui allait faire mentir cette réputation : le même mois, soit en mars, la glorieuse saga Ultima allait sortir pas moins de deux épisodes – et deux opus majeurs, pour ne rien gâcher : pendant qu’Ultima Underworld entamait la révolution 3D qui allait sévir pendant toute la décennie, Ultima VII, lui, débutait la dernière trilogie de la saga avec une ambition correspondant assez bien au nouveau statut de la compagnie : à renverser les murs. Dire que le jeu était attendu au tournant serait un euphémisme, mais même si c’est plutôt Underworld qui avait retenu la lumière à l’époque – ce qui n’était pas volé, loin de là – le nouveau titre de la saga « canonique », lui, avait peut-être également accompli à sa façon plusieurs révolutions moins voyantes mais tout aussi capitales dans l’histoire du jeu de rôle vidéoludique.

Vos compagnons n’hésitent pas à intervenir durant les conversations

Le scénario place l’ambiance d’entrée de jeu : alors que vous êtes, comme au début de chaque épisode, occupé à vivre votre existence sur Terre, un visage rouge apparait un jour sur l’écran de votre ordinateur pour se revendiquer comme le nouveau suzerain de Britannia avant de se présenter comme étant le « Gardien ». À peine le temps de digérer son intervention que vous réalisez qu’une porte de lune s’est levée dans votre cercle de pierre. Congédiant la prudence la plus élémentaire, vous la franchissez pour atterrir directement dans la ville de Trinsic, où vos retrouvailles avec votre vieil ami Iolo sont rapidement écourtées afin de vous demander d’enquêter sur un meurtre horrible ayant eu lieu la nuit précédente. Un meurtre qui sera l’occasion de vous intéresser aux agissements d’une nouvelle secte religieuse qui se fait appeler la Confrérie…

Les dragons sont coriaces, mais bien moins dangereux que dans les autres épisodes

Changement de trilogie, changement d’approche, changement d’ambition, changement de moteur. Il y aura énormément de choses à dire sur cet épisode, alors autant commencer par la plus flagrante : son interface. Beaucoup de joueurs contemporains rechignent à découvrir les jeux de rôles du siècle dernier parce qu’ils pressentent qu’ils vont passer de douloureux moments, le nez dans le manuel, à comprendre comment diable ils sont censés jouer.

Pour en apprendre plus sur la Confrérie, il faudra commencer par l’infiltrer

Ici, le premier choc est celui de la modernité : Ultima VII est intégralement jouable à la souris, et son maniement est si ergonomique qu’il ne faut qu’une poignée de secondes pour se sentir à l’aise. Un clic gauche sur un objet vous donne son nom, un double-clic vous permet de l’utiliser, un « cliquer-glisser » vous permet de le déplacer. Le clic droit, lui, servira au déplacement : plus le curseur est éloigné de votre personnage, et plus vous irez vite. Et voilà, vous savez jouer. Double-cliquez sur un personnage et vous lui parlerez, sur un coffre et vous l’ouvrirez, sur une torche et vous l’allumerez, sur un de vos compagnons et vous afficherez son inventaire ; faites glisser un objet jusqu’à vous et vous l’empocherez : c’est limpide, et ça fait du bien.

Pour accéder à certains endroits, il faudra se montrer ingénieux !

Le deuxième bouleversement vient de la discrétion de l’interface en question : toutes les informations étant accessibles en quelques clics, le jeu fait le choix de s’afficher en plein-écran, et ne fait apparaître les fenêtres nécessaires qu’à la demande. Un très bon moyen de profiter de la réalisation du jeu, affiché dans une perspective cavalière un peu étrange mais avec un luxe de détails absolument incroyable – et en tirant merveilleusement parti de la palette de 256 couleurs du VGA. La moindre bouteille, le moindre couvert, le plus petit brin d’herbe est visible à l’écran : la notion de « monde virtuel » touche ici à la perfection.

Le jeu regorge d’Easter eggs, comme ce vaisseau Kilrathi

Car non seulement tout est parfaitement agencé, mais tout, absolument tout a une fonction ! Il vous est ainsi parfaitement possible de ramasser un pinceau, de l’utiliser sur une palette avant de peindre un portrait sur une toile à partir de rien ! Encore plus fort : vous pouvez couper du blé, aller le placer sous la meule d’un moulin, en tirer de la farine, la mélanger avec de l’eau, et placer la boule de pâte ainsi façonnée dans un four pour faire votre propre pain – le niveau de possibilités est impressionnant, au point de transformer par moments l’univers du jeu en véritable bac à sable où l’on passe plus de temps à expérimenter qu’à suivre le cours de l’aventure.

Skara Brae a connu un sort rappelant beaucoup celui de Magincia dans Ultima IV

Certains joueurs se sont ainsi amusés à transporter des caisses sur une île déserte pour façonner des sortes de petites citadelles sur mesure pour entreposer leurs objets – ça ne sert certes pas à grand chose, mais on peut le faire, et c’est ça qui est fascinant. Dans le même ordre d’idées, vous pouvez attaquer n’importe qui, entreprendre de mener un casse à l’hôtel des monnaies de Britain, ou vous comporter en parfait kleptomane – méfiez-vous quand même des réactions de vos compagnons, qui risquent de ne pas être très enthousiastes en voyant l’Avatar se comporter comme un sagouin.

Le système de multi-fenêtrage permet de profiter du plein-écran

On notera d’ailleurs que ceux-ci participent régulièrement aux conversations pour donner leur opinion ou prendre votre défense, voire s’exprimer au cours du jeu, comme tous les PNJs, à l’aide de messages qui s’affichent tout simplement au-dessus de leur tête. Cela contribue non seulement à leur donner beaucoup de personnalité, mais également à rendre l’univers encore plus vivant : il sera fréquent de voir un citadin sortir de chez lui pour ouvrir ses volets et s’exclamer que sa maison est bien plus agréable avec un peu de lumière, on voit des enfants se poursuivre en criant « chat, à toi ! », les adversaires lâchent parfois des jurons ou des commentaires bien sentis pendant les combats… L’univers du jeu a indéniablement gagné en maturité, comme en atteste d’ailleurs la présence de nombreuses scènes de gore ou même de nudité qui tendent à offrir un monde « sans filtre » dans lequel on se sent immédiatement investi. Une vraie claque !

Le scénario devient rapidement prenant, et multiplie les références au troisième épisode

Notons d’ailleurs que le monde a encore gagné en taille. Ainsi, la ville de Britain, cantonnée à une dizaine de bâtiments dans Ultima VI, est par exemple gigantesque, et vous demandera pas mal de temps avant de prétendre en avoir visité chaque bâtisse et interrogé chaque citoyen. Lesquels sont plus bavards que jamais, profitant d’un système de dialogue vous demandant dorénavant simplement de sélectionner un mot-clé dans une liste, laissant ainsi à votre clavier l’occasion de prendre définitivement la poussière. Tout cela donne énormément de chair à un scénario passionnant, dont la principale faiblesse demeure le rôle cousu de fil blanc réservé à cette fameuse « Confrérie » sortie de nulle part et dont chaque membre pue l’opportunisme ou l’hypocrisie au bout de dix secondes de jeu.

Découvrez des créatures étranges, comme les Emps

Fort heureusement, l’enquête vous demandant de comprendre qui a bien pu vous faire venir sur Britannia ainsi que l’identité et les objectifs du Gardien est particulièrement prenante, des kilomètres au-dessus de celle du précédent opus, au point de vous donner parfois le sentiment de jouer à un jeu d’aventure plus encore qu’à un jeu de rôle. Le récit fait de nombreuses références aux anciens épisodes, particulièrement à Ultima III (une tendance qui se prolongera dans Forge of Virtue et plus encore dans Serpent Isle), et comporte pour la première fois des quêtes secondaires n’ayant aucune incidence sur la résolution de l’aventure mais rapportant de l’expérience en plus de renforcer, une fois encore, la crédibilité de l’univers. Il y a véritablement matière à y passer des dizaines d’heures.

Le tapis volant fait son grand retour

S’il faut aborder les quelques défauts du jeu, profitons-en d’ailleurs pour évoquer le problème des quêtes « à tiroirs ». Concrètement, il est assez fréquent, dans le déroulement de l’aventure principale, qu’on vous demande d’aller voir un personnage « a », qui lui même vous envoie remplir un objectif « b », lequel vous envoie à votre tour trouver un objet « c », qui nécessite de parler à une personne « d »… et ainsi de suite, ce qui oblige à accomplir une longue liste de sous-sous-sous-sous-objectifs avant de prétendre pouvoir régler enfin la question pour laquelle on cherchait à intervenir. On en vient rapidement à prendre des notes car, à force d’être trimballé ainsi à hue et à dia, on en oublie parfois ce qu’on était parti faire à l’origine. Corollaire immédiat : attendez-vous à effectuer des va-et-vient par dizaines.

Découvrir la vérité sur le dysfonctionnement de la magie vous obligera à visiter des endroits dangereux

Il arrive à plusieurs occasions que vous deviez faire la navette entre des PNJs pas facile à trouver, dans des zones très vastes, et que personne ne voie aucun problème à vous envoyer à l’autre bout du monde pour une tâche triviale. C’est par moments un tantinet énervant, surtout quand on ne maîtrise pas les subtilités des sorts « marque » et « rappel » qui peuvent vous faire gagner beaucoup de temps, à condition de comprendre leur fonctionnement un peu… contraignant. Bref, on se déplace beaucoup, et on finit parfois par se lasser de reprendre la même route pour la dixième fois.

Le jeu n’hésite pas à faire usage de gore

Autre écueil, et sans doute le plus dommageable de tous : le système de combat. Concrètement, ceux-ci se déroulent en temps réel, ce qui signifie que vous ne contrôlez que l’Avatar – le reste du groupe agira en fonction de consignes assez basiques décidées à l’avance, de type « concentrez vos attaques sur l’ennemi le plus fort ». L’ennui, c’est que vous ne ferez de toute façon pas grand chose : un affrontement lambda se résumera à double-cliquer sur un monstre et à attendre de voir ce qui se passe. À moins d’utiliser un sortilège, vous serez largement spectateur de toutes les escarmouches du jeu – qui ont certes l’avantage de se résoudre assez vite, mais on est très loin des mécanismes de tactical-RPG des quatre précédents épisodes.

Tous les livres sont lisibles, et contiennent fréquemment des informations importantes

Dans le même ordre d’idées, les donjons sont généralement assez courts, et repose souvent sur des énigmes et sur un aspect labyrinthique plus que sur un réel challenge. Autant dire que les fans de jeux de rôles basés sur les statistiques risquent d’être très déçus : c’est clairement sur ses aspects narration et exploration qu’Ultima VII rafle tous les suffrages, et nulle part ailleurs. Soyez donc prévenu : si votre passion est de monter un groupe et de le faire progresser de combat en combat, mieux vaut aller tenter votre chance avec des titres à la Pool of Radiance. Mais si vous souhaitez réellement incarner un personnage lâché dans un autre monde au sein duquel vous serez libre de faire à peu près n’importe quoi, alors vous tenez à n’en pas douter un des jeux les plus accomplis dans le domaine. Si jamais vous cherchez à comprendre pourquoi certains joueurs ne jurent encore aujourd’hui que par la saga des Ultima, laissez une heure ou deux à ce septième épisode : vous pourriez fort, à votre tour, être conquis.

Il y a de tout en Britannia, même des nudistes !

Quelques mots, en conclusion, sur la version française du titre. Celle-ci fait le choix assez osé du « vieux françois », en réponse au Middle English employé dans la version originale du jeu. Il faut bien reconnaître qu’en dépit de nombreuses coquilles et approximations, cela donne un charme certain au jeu, et ajoute grandement à l’immersion. En revanche, le doubleur français du Gardien, qui nous gratifie de ses interventions au fil du jeu, est très loin de la performance de Bill Johnson en V.O. : sans être honteuse, sa performance est en sous-jeu, et il finit rapidement par nous fatiguer plutôt qu’autre chose.

Smith le cheval parlant est toujours de la partie, et il est devenu bien arrogant, le bougre !

Détail important, en revanche : l’expérience de la localisation se sera limitée, pour Ultima VII, à cette première partie. Comprenez donc que ni Forge of Virtue ni Serpent Isle ni The Silver Seed n’auront jamais bénéficié d’une version française officielle – ce qui signifie qu’il est impossible de faire fonctionner Forge of Virtue avec cette version. La plupart des plateformes de vente en ligne vendant aujourd’hui le titre dans un coffret regroupant Ultima VII, Serpent Isle et leurs deux extensions, cela signifie également que cette version française est, à l’heure actuelle, indisponible à la vente. Un oubli qu’on espère voir corrigé un jour ou l’autre.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 18,5/20 Ultima VII : la porte noire correspond, à n'en pas douter, à un des représentants les plus marquants et les plus accomplis du principe du « monde ouvert ». Au cœur d'une Britannia plus vraie que nature où la seule limite semble être notre imagination, la longue quête pour arrêter le Gardien et venger le père de Spark signe le point de départ d'une expérience grandiose que beaucoup de joueurs ne sont tout simplement jamais parvenus à oublier. L'enquête, le dialogue et l'exploration ont clairement pris le dessus sur des combats confus et des donjons articulés autour de la résolution d'énigmes, mais l'extraordinaire niveau de détails de l'univers, vivant à un niveau encore jamais atteint, nous pousse à passer suffisamment de temps dans l'autre monde pour nous faire amèrement regretter de le quitter. Plus qu'un jeu : une expérience. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une Confrérie pas très subtile – Combats sans intérêt – Quêtes à tiroirs parfois fastidieuses – Beaucoup d'allées-et-venues – Impossible de bénéficier de Forge of Virtue sur la version française du jeu

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima VII sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« J’ai apprécié la qualité du scénario, toujours aussi riche et même plus tortueux que les précédents épisodes, ce qui, je pense, constitue la raison du succès de cette série. En plus, j’ai craqué devant les graphismes, le réalisme de l’univers Britannien (sic), la diversité des situations et les mille trouvailles qui vous donnent envie de fouiller partout ! »

Man-X, Tilt n°100, mars 1992, 19/20

L’extension du jeu :
Ultima VII : Forge of Virtue

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Ultima VII aura été le premier épisode de la saga à avoir bénéficié d’une extension. On pourrait d’ailleurs presque dire « le dernier », le concept n’ayant pas survécu au-delà de Serpent Isle qui est, rappelons-le, la deuxième partie d’Ultima VII (une extension avait initialement été prévue pour Ultima VIII, mais celle-ci aura finalement été annulée à la dernière minute). Forge of Virtue creuse ainsi encore un peu plus le lien tissé ente le septième épisode (Serpent Isle inclus) et Ultima III, en faisant ressortir des océans L’Île du Feu sur laquelle se situait le château d’Exodus. Lord British vous informera que le palais avait été transformé en une suite d’épreuves portant sur les principes de l’amour, de la vérité et du courage en prélude à la quête d’Ultima IV, mais que l’île ayant sombré sous les flots peu après la défaite d’Exodus, il vous incombe dorénavant d’aller découvrir ce qui l’a conduite à remonter à la surface.

Erethian sera votre principal pourvoyeur d’informations et saura vous introduire les enjeux des différentes épreuves

L’extension prendra donc intégralement place à l’intérieur de l’Île du Feu (Lord British vous offrira généreusement un bateau pour vous y rendre) où vous rencontrerez un vieil ermite aveugle nommé Erethian, qui sera une mine d’information sur l’étrange créature « ni homme ni machine » qu’était Exodus et dont la mémoire est, semble-t-il, restée prisonnière à l’intérieur du palais. Une très bonne occasion de développer un peu le lore de la saga, et de vous donner l’occasion de forger une épée extrêmement puissante qui sera appelée à jouer un rôle important dans Serpent Isle. Le contenu de l’extension en lui-même est organisé autour des trois fameuses épreuves : celle de l’amour est assez simple, puisqu’il s’agira principalement de parler à deux golems et de répondre à leurs instructions. L’épreuve de la vérité, en revanche, est très frustrante (ou atrocement simple une fois que vous savez comment la compléter), alors que l’épreuve du courage vous demandera un groupe de bon niveau et bien équipé. Dans l’ensemble, le principal mérite de cette extension – en-dehors de sa façon de développer l’univers – est surtout de vous permettre d’en ressortir avec un personnage outrageusement puissant et une épée virtuellement capable d’abattre n’importe qui (même Lord British !) en un seul coup. L’occasion de prolonger l’expérience de jeu avec d’autant plus de bonne volonté que l’extension est de toute façon comprise par défaut dans toutes les compilations vendant le jeu (en anglais). Quoi qu’on pense de ses éventuelles forces et faiblesses, le seul véritable défaut rédhibitoire de Forge of Virtue est de n’avoir jamais été localisé, et d’être par conséquent totalement incompatible avec la version française d’Ultima VII.

Version SNES
Ultima : The Black Gate

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeurs : FCI – Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 18 novembre 1994 (Japon) – Juin 1995 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 12Mb (version japonaise) ou de 8Mb (version américaine)
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’introduction du jeu :

Après une conversion d’Ultima VI relativement fidèle, on se demandait ce qu’allait nous réserver la Super Nintendo pour le septième épisode de la saga. La réponse, hélas, nous renvoie vers les expérimentations pas toujours heureuses subies par les autres épisodes de la série : c’est toujours Ultima VII, avec la même intrigue, mais le jeu est devenu très différent.

Ce n’est pas moche, mais on a quand même perdu énormément de détails

Comme un peu trop souvent, les dialogues et l’intrigue ont rétréci au lavage. Oubliez l’univers extrêmement détaillé où pratiquement tout est possible : le monde est beaucoup plus petit, moins vivant, les intérieurs sont plus vides… Il n’y a d’ailleurs même plus de groupe : vous serez seul pendant toute l’aventure, et le système de jeu verse clairement du côté de l’action-RPG, avec des combats en temps réel qui nécessiteront de vous exciter sur les boutons de votre manette. En contrepartie, il y a davantage de donjons, et la plupart des objets importants demanderont d’aller vous y frotter, rendant le déroulement du jeu plus convenu et plus linéaire. Les bateaux ont disparu, tout comme le tapis volant, et seuls 16 des 72 sortilèges ont survécu – ils ne nécessitent d’ailleurs plus de réactifs. Pour ne rien arranger, la censure made in Nintendo a encore frappé : oubliez la nudité et le gore, oubliez même carrément les meurtres : cette fois, les victimes ont été enlevées. Comme pour la plupart des précédentes adaptations sur consoles Nintendo, le jeu n’est pas à proprement parler mauvais ; il est simplement exactement aux antipodes des éléments et de la philosophie qui ont fait la réputation de la saga. En résulte un action-RPG assez générique à des kilomètres des cadors de la Super Nintendo comme Secret of Mana, et surtout un titre qui aura toutes les chances de faire fuir à toutes jambes les fans de la série dont il porte le nom. Du coup, on ne sait pas trop à qui ce destine cet opus qui aura bien du mal à soulever l’enthousiasme de quiconque.

Spark n’a dorénavant plus rien à vous dire !

NOTE FINALE : 13/20

Devenu un banal action-RPG amputé d’une très grande partie de ce qui faisait le sel du titre original, Ultima : The Black Gate offre une version lourdement expurgée de l’expérience de base. Certes, il y a davantage de donjons et les combats sont (un peu) plus intéressants que sur PC, mais l’histoire peine à intéresser et l’univers a perdu énormément de son charme. Un jeu assez mineur à l’échelle de la ludothèque de la Super Nintendo.

Ultima VI : The False Prophet

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titres alternatifs : Ultima : The False Prophet (Super Nintendo), ウルティマVI 偽りの予言者 (Ultima VI : Itsuwari no Yogensha, Japon)
Testé sur : PC (DOS)Commodore 64FM TownsPC-98AmigaAtari STSharp X68000SNES
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – au sein de la compilation Ultima 4+5+6
En vente sur : GOG.com (Mac, Windows)

La saga Ultima (jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Mars 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x7) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Covox Sound Master, Game Blaster, haut-parleur interne, Innovation Sound Standard, Roland MT-32/LAPC-I, Tandy/PCjr

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Il est aujourd’hui très difficile de comprendre sans l’avoir vécu ce qu’a bien pu représenter la fin des années 80 en termes vidéoludiques. On croit parfois que la période contemporaine n’a fait que changer les noms des principaux acteurs du secteur en suivant une trajectoire relativement linéaire par rapport à l’époque 8-16 bits – c’est à mon sens une erreur. Une des raisons principales de l’émerveillement permanent dans lequel semblaient évoluer les joueurs des années 80 ne tenait pas juste au côté novateur du domaine vidéoludique, mais également à l’extraordinaire célérité de son évolution.

Dès la création de personnage, on sent que la réalisation a fait un bond

En grossissant le trait, on pourrait presque dire que le joueur lambda d’alors vivait une révolution majeure par an : en 1985, l’Atari ST était l’ordinateur roi dans le secteur ludique, en 1987, c’était l’Amiga 500, et en 1989, voilà que les tout premiers jeux en VGA commençaient à faire leur apparition en même temps que les derniers modèles de PC et que les premières cartes sonores – transformant ainsi un ordinateur uniquement pensé pour la bureautique en une machine de pointe capable de faire tourner des programmes de plus en plus complexes. En 1988, jouer sur PC n’avait absolument aucun sens. En 1990, alors qu’apparaissaient des titres comme Wing Commander, cela commençait soudain à devenir de moins en moins absurde.

Britannia a pris comme un coup de jeune, depuis votre dernière visite !

L’extrême vitesse à laquelle circulait le train de la modernité n’aura pas surpris que les joueurs. Du côté de chez ORIGIN Systems, qui espérait encore achever la deuxième trilogie de la saga Ultima sur l’ordinateur qui l’avait vue naître, à savoir l’Apple II, le constat était sans appel : il était commercialement suicidaire, et techniquement de plus en plus contraignant, de continuer à développer sur un ordinateur 8 bits en 1989. Il aura donc fallu, au moment de programmer le sixième épisode, jeter pas moins d’un an de développement à la poubelle pour repartir de zéro sur un ordinateur qui représentait alors un pari autant qu’une promesse : le PC. Signe des temps, et acte ô combien symbolique : l’Apple II passait le relais à la machine d’IBM, qui allait dorénavant devenir la plateforme de développement privilégiée de la compagnie jusqu’à sa fermeture en 2004. Ainsi naquit Ultima VI.

Combat contre des bandits de grands chemins : ils n’ont aucune chance

L’introduction, narrée en plein écran et en 256 couleurs (et que vous pouvez visionner en ouverture du test), vous décrira le point de départ de votre nouvelle aventure : alors que vous êtes une nouvelle fois revenu sur Terre à la suite d’Ultima V, vous voyez une nuit apparaître une porte de lune – rouge, pour la première fois – dans le cercle de pierres placé près de votre maison. La franchir vous conduit cette fois immédiatement dans une situation critique où vous êtes capturé par les Gargouilles, êtres à l’apparence démoniaque, qui cherchent à vous sacrifier. Sauvé par vos compagnons de toujours, vous trouvez le moyen de prendre la fuite en emportant avec vous un mystérieux livre qui semble mentionner un faux prophète dont les actes ressemblent furieusement aux vôtres…

Le moindre personnage a désormais son propre portrait

Vous voici donc propulsé dans une longue épopée qui vous demandera, pour la première fois, de commencer à vous intéresser à la culture et aux motivations de vos adversaires – de quoi découvrir que même l’Avatar des huit vertus peut méditer, par moments, sur le sang qui couvre ses mains. Ce sera également l’occasion de découvrir une nouvelle fois le royaume de Britannia à hauteur d’homme (ou de femme), et de constater que celui-ci a beaucoup, beaucoup changé.

Fouiller partout vous réservera bien des surprises

Première claque, évidente : la réalisation. La transition depuis l’univers quasi-monochrome de l’Apple ][ jusqu’aux 256 couleurs du VGA aide à mesurer le gouffre technologique qui s’est creusé en à peine deux ans : si l’interface garde une disposition quasiment identique à celle de l’opus précédent, difficile de ne pas remarquer l’orgie de détails et de couleurs dans un univers où le noir n’est plus la teinte dominante.

Les démons et les dragons sont moins puissants qu’auparavant, mais ils restent des adversaires à craindre

L’inventaire de chaque personnage est désormais représenté de manière graphique, chacun des dizaines de PNJ du jeu est doté d’un portrait qui s’affiche lors des dialogues, et surtout, des icônes ont fait leur apparition au bas de l’écran, autorisant enfin le titre à être entièrement jouable à la souris – ou plutôt « presque entièrement », puisque les mots-clés, eux, seront toujours à saisir au clavier. Inutile de dire que la prise en main est beaucoup plus confortable, et que même si certaines actions comme faire passer un objet d’un personnage à un autre sont encore assez laborieuses, il ne sera tout simplement plus nécessaire de conserver la carte de référence à portée de main pendant toute la partie, ce qui est un grand progrès. On remarquera que le jeu reconnait également à peu près toutes les cartes sons disponibles au moment de sa sortie, ce qui permettra de retrouver tous les thèmes de la saga – et quelques petits nouveaux – dans une très bonne qualité. Les bruitages, eux, seront en revanche toujours cantonnés au haut-parleur interne.

Les monstres, comme le reste du monde, sont désormais représentés à l’échelle

Deuxième claque, plus surprenante : l’unification de l’échelle de jeu. Vous vous souvenez comment le jeu changeait d’échelle à chaque fois que vous entriez dans une ville ou un château pour vous en offrir une vue plus détaillée le temps de votre visite ? C’est terminé : l’intégralité de la carte vous est dorénavant proposée à une échelle unique ; où que vous soyez, même en rase campagne, vous pourrez bénéficiez d’une myriade de détails, du plus modeste arbuste jusqu’aux oiseaux ou aux insectes. L’avantage est évident en termes d’immersion : le monde est encore plus réaliste que dans Ultima V, et on pourra régulièrement deviner la fonction d’un bâtiment au premier coup d’œil ; les objets en vente sont disponibles sur les étals, les personnages vivent leur vie, on peut les voir s’asseoir, jouer de la musique… jamais Britannia n’avait été aussi tangible. Les inconvénients, eux sont plus subtils, et méritent par conséquent qu’on leur consacre un peu de temps.

Acquérir un navire se montrera nécessaire à un moment ou à un autre

Tout d’abord, cette échelle unique a pour principal défaut le fait de vous empêcher de voir à plus de quelques mètres autour de vous, ce qui est vite désagréable pendant les phases d’exploration. Deuxième problème : placer les villes et les villages sur la carte de Britannia prend de la place. Traduit en clair : les hectares de plaines qui entouraient le château de Lord British et la ville de Britain dans les deux précédents opus, par exemple, sont désormais intégralement occupés par la ville.

Hommage au quatrième épisode : il faudra à nouveau dénicher les runes

Il en résulte un sentiment paradoxal qui fait que, bien que le monde soit objectivement beaucoup plus grand que dans Ultima V, il paraisse en fait plus petit, l’échelle choisie laissant à penser qu’à peine une centaine de mètres séparent Britain de Cove ou du village de Paws. Le système de monstres errants a également été modifié et il peut arriver qu’on s’éloigne à quelques mètres d’une zone où l’on vient de tuer un groupe d’adversaires avant de faire demi-tour et de réaliser que ceux-ci viennent de réapparaître ! Autant dire quelques écueils qui font que ce fameux changement d’échelle n’aura pas nécessairement suscité l’unanimité au moment de la sortie du jeu.

Certains endroits sont plutôt difficiles d’accès !

Le changement le plus sensible reste cependant le tournant « aventure » pris par le jeu. Si le système de combat n’a finalement connu pratiquement aucun changement depuis l’épisode précédent (on notera malgré tout que vos compagnons se battent désormais automatiquement par défaut, il faudra passer par leurs options pour pouvoir les contrôler), on sent bien qu’il occupe désormais une place moins importante dans un jeu où les dialogues ont énormément gagné en épaisseur.

Les plans révélés par les gemmes ne vous seront cette fois pas très utiles

Les personnages ont à présent des caractères bien établis, et il faudra apprendre à connaître pratiquement tous les habitants du royaume pour espérer mener l’aventure à son terme. On passe énormément de temps à voyager et à discuter, dans le jeu (conseil : apprenez à expérimenter avec votre Orbe des Lunes, qui pourra vous faire gagner énormément de temps), et la dimension « jeu de rôle à l’ancienne » consistant à aligner les combats pour gagner en puissance commence clairement à passer au second plan. Si cela n’est pas forcément un mal en soi, on pourra regretter que cela se traduise, par exemple, par la disparition des donjons visités à la première personne, remplacés par des couloirs labyrinthiques dépourvus des dizaines d’énigmes et de trouvailles auxquelles nous avait habitués la saga, et dont la principale difficulté résidera, une nouvelle fois, dans ce changement d’échelle qui pénalise énormément la cartographie des lieux.

Sincèrement, c’est une façon un peu extrême de protéger l’accès aux archives du Lycaeum…

Même les fameuses gemmes qui vous permettaient d’afficher le plan d’un niveau ne laissent désormais entrevoir que quelques écrans autour de vous, ce qui fait qu’on a parfois l’impression de diriger un groupe de taupes incapables de voir à plus de dix mètres dans des dédales où toutes les salles se ressemblent et où on finit fatalement par trouver le temps un peu long. Dans le même ordre d’idée, l’importance accordée aux vertus est un peu passée au second plan, et le fait de jouer les kleptomanes un peu partout pour vous équiper n’aura dorénavant pratiquement aucune conséquence – le karma n’existe plus, et ce sera finalement à vous de décider si vous voulez toujours vous comporter en Avatar ou pas.

Pour utiliser les sanctuaires, il faudra commencer par en chasser les Gargouilles

C’est d’autant plus dommage que l’aventure en elle-même (qui regorge de références aux cinq premiers épisodes) est toujours aussi prenante – même si on pourra regretter que l’aspect plus sombre emprunté par le cinquième épisode laisse ici la place à un univers plus léger et à un déluge de couleurs, où la menace que font peser les Gargouilles n’est que trop rarement tangible tant personne ne semble s’en préoccuper. Malgré les quelques manques qui laisse deviner le faible temps de développement du jeu, difficile de ne pas être impressionné par la densité de l’univers et par l’intelligence de son approche.

Les dialogues sont bien plus fournis qu’auparavant

Un assez bon symbole du tournant que commençait à opérer la série, de plus en plus lassée des approches porte-monstre-trésor du jeu de rôle traditionnel pour leur préférer un angle privilégiant la narration – autant dire une nouvelle pierre à l’édifice du jeu de rôle moderne. En résulte un épisode qui suscitera parfois quelques regrets chez les fans, mais qui constitue à n’en pas douter, avec le septième épisode, une des meilleures portes d’entrée pour découvrir la saga aujourd’hui.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 17,5/20 Ultima VI : The False Prophet constitue, à bien des niveaux, un épisode charnière de la saga : il amorce à la fois une transition vers un système de jeu davantage porté par la narration, le passage à un monde plus vivant et plus détaillé, l'ouverture vers une réalisation et une interface désormais à la pointe, et la prise du pouvoir du PC à la tête des micro-ordinateurs. En questionnant les actes de l'Avatar et en invitant à s'interroger sur les motivations de ceux que l'on combat, cet opus nous donne l'occasion de devenir, plus que jamais, autant un héros qu'un habitant à part entière du royaume de Britannia. Une nouvelle mutation vers le jeu de rôle moderne qui aura nécessité quelques sacrifices, mais qui demeure aujourd'hui encore une expérience à découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – La quantité de texte pourra faire regretter que le jeu n'ait jamais été traduit en français – Le changement d'échelle n'a pas que des avantages, et la vue rapprochée nous cloisonne quelque peu pendant toute l'aventure – Les vertus n'ont plus aucune implication en terme de gameplay : tuez ou volez à satiété, ça ne changera rien – Les donjons sont bien moins convaincants que dans Ultima V

Les avis de l’époque :

« Ce dernier épisode de la saga Ultima règle de manière magistrale les deux seuls points faibles des épisodes antérieurs : graphisme et son. Le monde et le scénario sont toujours aussi foisonnants comme en témoignent d’ailleurs les sept disquettes (soit 4 Mo de données !) qui constituent le jeu. […] Un jeu de rôle fantastique qui vous tiendra plusieurs centaines d’heures en haleine. »

Jacques Harbonn, Tilt n°78, mai 1990, 18/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima VI sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : Imagitec Design Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25 (x3)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Faute d’avoir pu achever la deuxième trilogie de la saga sur la machine qui l’avait vue naître, ORIGIN Systems décida néanmoins de ne pas infliger le même camouflet au Commodore 64 – quand bien même la machine n’était pas exactement au sommet de sa forme en 1991. Cependant, comme on peut s’en douter, adapter un jeu développé pour des PC derniers cris sur un ordinateur 8 bits allait imposer de nombreux sacrifices, et les joueurs d’alors eurent l’occasion de vérifier ainsi à quelle vitesse le gouffre technologique qui les séparait des systèmes 16 bits était en train de s’élargir.

La réalisation est très correcte, mais Ultima VI était clairement pensé pour tourner sur un 286

Premier accroc évident : l’obligation de jouer directement à partir des disquettes. Sachant que le titre tient sur trois disquettes double-face, et connaissant le goût prononcé du C64 pour le temps de chargement à rallonge, on peut facilement imaginer le calvaire que représente le fait, pour le joueur, d’avoir à remplacer le disque dur. La moindre conversation demande un minimum de deux changements de disquette ! Malgré la perte évidente en terme de contenu (le jeu fait à peine le quart du poids de la version PC), on passe l’essentiel de son temps à insérer et à retirer des disquettes. Pour ne rien arranger, en plus de sa réalisation dépassée, cette version doit également composer avec un nombre hallucinant de coupes : pas de bruitages, pas de musique hors des cinématiques d’introduction et de fin, plus de chevaux (officiellement, les Gargouilles les ont mangés !), plus de gemmes, plus de tonnelets de poudre, moins de sortilèges, un groupe qui ne peut pas dépasser six membres, beaucoup moins d’objets utilisables, il n’y a plus de sacs ni de coffres, moins d’armes et d’armures, les portraits ont disparu… Si on appréciera l’effort d’avoir cherché à porter le jeu dans une adaptation aussi fidèle que possible, il faut bien reconnaître que cet opus se réserve aujourd’hui à des joueurs extrêmement nostalgiques ou fabuleusement patients. Une curiosité à laquelle on aura bien du mal à consacrer plus de quelques minutes.

Le jeu aurait sans doute mieux vieilli si le C64 avait été doté d’un disque dur

NOTE FINALE : 09/20

Comme Ultima V sur NES, Ultima VI sur Commodore 64 aura sans doute péché par excès d’orgueil. Les limitations techniques imposant au joueur de faire figure de disque dur humain et de participer à une incessante valse des disquettes rendent l’expérience de jeu extrêmement fastidieuse, et en dépit d’une volonté de coller au maximum au matériau d’origine, difficile aujourd’hui de louer une expérience de jeu qui consiste à passer la plupart de son temps à attendre. Soyons honnête : curiosité ou nostalgie mises à part, strictement personne n’aura intérêt à s’essayer à cette version aujourd’hui.

Version FM Towns

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme les autres épisodes de la saga l’auront déjà révélé, Ultima est une série qui aura voyagé sur la plupart des ordinateurs japonais de la période – et même sur une partie des consoles. Connaissant les capacités techniques du FM Towns (qui n’était jamais qu’un PC modifié), on sait déjà qu’on n’a pas trop à s’inquiéter pour la réalisation du jeu : comme vous pourrez le voir dans l’introduction, c’est graphiquement identique au VGA, et la musique ne tire hélas pas parti du support CD-ROM mais fait au moins aussi bien que ce que permettait l’AdLib.

Pas un pixel ne manque comparé à la version VGA

La première bonne surprise, comme vous l’aurez constaté, c’est que le titre est disponible intégralement en anglais, ne vous obligeant pour une fois pas à maîtriser le japonais pour pouvoir vous y essayer. Vos premiers instants en jeu vous permettront de remarquer que les bruitages sont de bien meilleure qualité qu’avec le haut-parleur du PC, qu’une fenêtre a fait son apparition en bas de l’écran pour vous permettre de choisir votre langue, de sauvegarder ou de charger votre partie, et surtout lors des dialogues de sélectionner tous les mots-clefs sans avoir besoin de les noter quelque part, ce qui est appréciable. On notera d’ailleurs que cette fenêtre ne réduit pas la taille de la zone de jeu, puisque le titre est désormais affiché en 320×240 (contre 320×200 auparavant) hors des cinématiques. Mais la deuxième et meilleure surprise a justement lieu lors des dialogues : ceux-ci sont désormais intégralement doublés, et en anglais s’il vous plait ! Ce sont d’ailleurs les employés d’ORIGIN qui prêtent leur voix comme ils le feront encore par la suite : Richard Garriott himself doublant ainsi à la fois à Lord British et à Shamino ! De quoi donner un cachet certain à une version qui fait par ailleurs aussi bien que l’originale sur tous les points. Autant dire que si vous avez la chance de posséder un FM Towns et de pouvoir mettre la main sur cette version, ce serait une grave erreur que de vous en priver.

Richard Garriott me parle ! Remarquez au passage les mots-clefs au bas de l’écran

NOTE FINALE : 18/20

Très bonne surprise que cette itération FM Towns d’Ultima VI : non seulement elle est entièrement en anglais, mais elle tire même parti du support pour offrir des dialogues intégralement doublés dans la langue de Shakespeare, ainsi que quelques petites améliorations de confort et même des bruitages améliorés. Son seul défaut ? Parvenir à mettre la main dessus ainsi que sur l’ordinateur pour la faire tourner… Mais si vous y parvenez, c’est sans aucun doute la toute meilleure version du jeu.

Version PC-98

Développeur : Locus Company Ltd.
Éditeur : Pony Canyon Inc.
Date de sortie : 21 novembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus)/japonais (narration)
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Le FM Towns n’aura pas été le seul ordinateur japonais à accueillir Ultima VI : le PC-98 et le Sharp X68000 auront également été sur les rangs. Autant la machine de Fujitsu était taillée sur mesure pour accueillir le jeu avec un minimum d’efforts (un FM Towns étant une variation de PC), autant celle de NEC aura réclamé quelques petites adaptations, la plus flagrante étant sa palette de couleurs limitée à 16 couleurs (les modèles 256 couleurs n’allaient pas tarder à suivre)

En dépit de la palette réduite, les graphismes s’en tirent globalement très bien

Le portage ne tirant aucun parti de la résolution supérieure de la machine (à part pour le texte, plus quelques fioritures dans l’interface), il faudra donc se contenter de graphismes assez proches de ceux qu’afficherait l’Amiga un an plus tard – clairement inférieurs au VGA, donc, mais avec des teintes suffisamment bien choisies pour qu’on voie à peine la différence une fois en jeu. La bande sonore est assez proche de ce que pouvait offrir une AdLib ou une Sound Blaster, mais s’en sort plutôt mieux. On est donc très proche de la version PC – avec un résultat plus convaincant que ce qu’offrait une carte EGA – mais le détail gênant ici est surtout qu’il n’est pas question, cette fois, de jouer en anglais ; ce sera le japonais ou rien, ce qui, dans un jeu reposant très largement sur ses dialogues, réservera de fait cette version aux joueurs doté d’une très bonne connaissance du japonais.

En jeu, la différence avec le VGA ne saute d’ailleurs pas aux yeux

NOTE FINALE : 17/20

Le PC-98 n’était peut-être pas (encore) tout à fait équipé pour rivaliser avec le VGA, mais cela n’empêche pas cette version d’Ultima VI de s’en tirer globalement avec les honneurs. Malheureusement, le fait qu’elle soit cantonnée au japonais la réservera de toute façon à des curieux qui n’auront pratiquement rien à y découvrir qu’ils ne puissent trouver en mieux dans la version PC.

Version Amiga

Développeur : Abersoft Limited
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Avril 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5 (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Signe des temps : Ultima VI aura figuré, au côté de de titres comme Budokan, Mean Streets ou Wing Commander, dans la première fournée de titres à avoir été plus aboutis techniquement sur PC que sur Amiga – un gros tremblement de terre, comme on l’aura vu en ouverture de ce test. De fait, 1992 était même le pire moment pour paraître sur Amiga, car le jeu ne tirait alors pas parti des capacités du nouvel Amiga 1200 – à commencer par son mode AGA. Conséquence immédiate, le jeu passe en 32 couleurs, ce qui ne produit pas des résultats aussi dramatiques qu’on aurait pu le craindre. Certes, la déperdition est assez visible sur les écrans fixes, mais une fois en jeu, on ne peut pas dire que la différence avec le VGA soit toujours flagrante.

On sent bien qu’on a perdu en couleurs, mais ce n’est pas trop pénalisant

Plus grave : une bonne partie de la musique, domaine où la machine de Commodore était la mieux armée pour rivaliser, est également passée à la trappe. Comme un symbole, le thème entendu pendant l’écran-titre est ainsi celui qui était utilisé pendant les donjons sur PC – il sera d’ailleurs réutilisé pendant les combats, ce qui passe heureusement bien car il est très réussi. Les bruitages, eux, ont purement et simplement disparu. Le plus gros défaut, à savoir l’incessante valse des disquettes qui pouvait empoisonner l’expérience sur Amiga 500, est heureusement un mauvais souvenir dès l’instant où on a l’idée de faire tourner le jeu sur un système doté d’un disque dur – cela a également un effet extrêmement bénéfique sur la vitesse générale du jeu, pensé pour tourner sur un PC dernière génération au moment de sa sortie. Ces détails mis à part, l’expérience de jeu est heureusement assez proche de celle de la version PC – mais mieux vaudra s’y essayer sur un Amiga 1200 équipé d’un disque dur. À noter, quand même, l’existence d’un bug qui duplique le contenu de l’inventaire – ça peut avoir l’air sympa dit comme ça, mais cela a surtout un effet dramatique à long terme sur la vitesse du jeu, la présence d’objets supplémentaires puisant sérieusement dans les ressources du processeur.

C’est surtout du côté du son que le jeu a laissé des plumes

NOTE FINALE : 16/20

Le seul vrai défaut de cette conversion d’Ultima VI est d’avoir été pensée pour un Amiga 500 au moment de son développement. Une fois joué sur un système plus récent doté d’un disque dur, le défaut le plus rédhibitoire (à savoir la valse des disquettes) n’est heureusement plus qu’un mauvais souvenir, et le titre tourne enfin à une vitesse décente. La réalisation, hélas, devra toujours se contenter de 32 couleurs et d’une sélection musicale appauvrie – sans parler d’un bug gênant. Pas de quoi transformer Ultima VI en mauvais jeu, mais au moins trois bonnes raisons de lui préférer la version PC.

Version Atari ST

Développeur : Abersoft Limited
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Août 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5 double face (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 1Mo
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Si Ultima VI avait globalement réussi à limiter la casse sur Amiga 500, la question restait de savoir si la machine reine d’Atari allait s’en sortir aussi bien. La réponse, comme souvent, est « non », et on se doute par où le programme va pêcher. Graphiquement, prenez les 32 couleurs de l’Amiga, divisez-les par deux, et vous obtiendrez l’équivalent de la version EGA – avec des couleurs mieux choisies. Autant dire que l’aspect coloré de la version VGA n’a plus vraiment cours ici, même si l’honnêteté oblige à reconnaître qu’on s’habitue relativement vite.

On a encore perdu en couleurs, mais ça reste plus beau qu’en EGA

Une fois passée cette désagréable sensation de jouer avec un filtre rouge, on retrouve la plupart des problèmes constatés sur Amiga 500 plus ou moins à l’identique – une nouvelle fois, avoir la chance de jouer sur un ST équipé d’un disque dur est un énorme plus pour éviter de passer la moitié de son temps à changer des disquettes ou de regarder le titre se trainer misérablement. La musique a encore baissé d’un cran en terme de qualité, et on retrouve les mêmes manques dans la playlist que sur la version Amiga. En revanche, le bug de duplication d’inventaire semble n’avoir pas fait le trajet jusqu’ici.

Comme sur tous les autres systèmes, mieux vaut avoir un disque dur

NOTE FINALE : 15/20

Ultima VI commence vraiment à tirer la langue sur Atari ST. Désormais en 16 couleurs et avec un processeur sonore pas à la hauteur de celui de l’Amiga, la réalisation du jeu commence à montrer de sérieuses limites. Comme sur Amiga, mieux vaudra bénéficier d’un appareil de deuxième génération doté d’un disque dur pour pouvoir profiter d’une expérience de jeu appréciable, mais dans tous les cas, vous serez toujours mieux servi sur PC.

Version Sharp X68000

Développeur : Locus Company Ltd.
Éditeurs : Pony Canyon Inc.
Date de sortie : 19 juin 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus)/japonais (narration)
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

À force d’être ébloui par ses performances lors d’adaptations de bornes d’arcade, on en viendrait presque à oublier que le Sharp X68000 n’était pas, en puissance pure, mieux équipé qu’un PC de pointe du début des années 80 – son hardware était juste conçu plus spécifiquement pour des jeux d’action.

C’est clairement moins coloré que sur PC, mais ça n’est pas moche pour autant

Démonstration ici où l’on se retrouve avec… un portage en seize couleurs, extrêmement proche sur le plan visuel de celui qui avait été réalisé, d’ailleurs pas la même équipe, pour le PC-98 quelques mois plus tôt. Une nouvelle fois, c’est un peu décevant pendant les cinématiques, mais on ne peut pas dire que ça soit franchement traumatisant une fois en jeu. Ce qui est un peu frustrant, en revanche, c’est d’utiliser une haute résolution en 768×512 une fois la partie lancée… pour en meubler la moitié avec un gros cadre inutile ! Bref, on sent bien que Locus Company était davantage occupé à transposer à l’identique le travail réalisé pour la version PC-98 qu’à chercher à réellement tirer parti des capacités de la machine de Sharp, dommage. Au moins le jeu n’est-il pas désagréable à pratiquer pour autant… à condition, naturellement, de parler japonais.

Ca aurait été aussi simple de proposer directement le jeu en basse résolution, non ?

NOTE FINALE : 17/20

On ne peut pas dire qu’on sente que l’équipe de Locust Company se soit sorti les tripes pour réaliser ce portage d’Ultima VI sur Sharp X68000, simple transposition ultra-paresseuse du portage réalisé pour la version PC-98. Si le jeu est toujours aussi agréable à parcourir (si l’on sait lire le japonais), ce n’est sans doute pas la peine de vous ruiner pour dénicher cette version.

Version SNES
Ultima : The False Prophet

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeurs : FCI – Pony Canyon Inc.
Date de sortie : 3 avril 1992 (Japon) – Juillet 1994 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues: Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Les différentes adaptations de la saga proposées sur NES avaient défini une certaine philosophie : il s’agissait d’offrir des jeux plus simples, souvent considérés comme plus adaptés au marché nippon, et qui proposaient une expérience de jeu finalement assez différente de celle du titre de base. Bouleversement complet de cette approche avec la première itération de la saga canonique sur Super Nintendo : cette fois, le contenu est à 90% identique à celui de la version PC. Fini les surprises !

Dommage que de nombreux détails, à commencer par les portraits, aient disparu

S’il fallait immédiatement trouver au moins une qualité majeure à cette adaptation sur la 16 bits de Nintendo, ce serait le passage en plein écran. Le fait de ne plus être enfermé dans une fenêtre de jeu cantonnée à la moitié gauche fait énormément de bien, autorisant enfin à voir à plus de quelques cases de distance et facilitant grandement l’exploration. Les graphismes, bien que moins colorés que ceux de la version PC, restent agréables – dommage que de très nombreux détails aient disparu, en revanche, à commencer par les chaises. L’univers fait tout de suite plus vide, et les cinématiques d’introduction et de conclusion présentées dans des fenêtres minuscules ne rendent pas exactement hommage au travail effectué sur la version VGA.

L’interface est plus lourde qu’à la souris, mais on s’y fait assez vite

Malgré ces quelques récriminations, on tiendrait sans doute ici un portage qui aurait plusieurs arguments à faire valoir face à la version originale si les coupes ne s’étaient pas additionnées, finissant par appauvrir quelque peu l’expérience de jeu. Ainsi, il n’y a plus de création de personnage : vous choisissez juste votre nom, et basta. Dans le même ordre d’idée, il n’y a plus de portraits non plus – on tient là un des plus gros points noirs de cette version, où les différents habitants du royaume perdent énormément en personnalité faute d’être reconnaissables au premier coup d’œil. Comme trop souvent, les conversations ont été simplifiées, le jeu est censuré (plus une goutte de sang), plusieurs sortilèges manquent à l’appel, la taille maximale du groupe n’est plus que de six membres, etc. Rien qui sabote véritablement l’expérience de jeu, mais beaucoup d’éléments qui encourageront malgré tout à lui préférer la version PC, plein écran ou pas.

Le plein-écran fait un bien fou !

NOTE FINALE : 15,5/20

Pour une fois, une console Nintendo hérite d’un portage relativement fidèle d’un épisode de la saga. Ultima : The False Prophet arrive avec ses propres arguments, à commencer par un mode plein écran très séduisant, mais doit également composer avec une série de petites coupes qui, mises bout-à-bout, finissent par pénaliser l’expérience de jeu. On continuera de préférer l’opus PC, mais les joueurs curieux pourront facilement donner une chance à cette version sans avoir à le regretter.

Ultima V : Warriors of Destiny

Cette image provient du site http://boutillon.free.fr

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titres alternatifs : Ultima V : Shukumei no Senshi (Japon), Ultima : Warriors of Destiny (NES)
Testé sur : Apple ][Commodore 64/128PC (DOS)Atari STAmigaPC-98Sharp X68000FM TownsNES
Version non testée : PC-88
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – au sein de la compilation Ultima 4+5+6
En vente sur : Gog .com (Mac, Windows)

La saga Ultima (jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version Apple ][

Date de sortie : Mars 1988
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x8)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II – OS : Aucun – RAM : 64ko*
Mode graphique supporté : Haute résolution
Cartes sonores supportées : Mockingboard A/C/Sound I/Sound II/ Sound Speech I, Passport MIDI, Phasor
*128ko requis pour entendre la musique

Vidéo – L’introduction du jeu :

Que peut-on bien chercher à atteindre lorsque l’on a déjà touché la perfection ?

Cette question, de nombreux fans de la saga Ultima en attendaient la réponse avec impatience en 1988, emballés qu’ils avaient été par le quatrième opus, sorti déjà trois ans plus tôt. Mais le fait est qu’ORIGIN Systems, soudainement occupé à développer quantité de nouveaux titres, d’AutoDuel à 2400 A.D., semblait pour la première fois mettre sa série phare quelque peu de côté. Fort heureusement, le cinquième épisode fut finalement annoncé, toujours sur Apple II, et les joueurs se demandaient quelles nouvelles idées il allait bien pouvoir introduire.

Passage à l’auberge dans un monde devenu plus vivant que jamais

Première surprise en ouvrant la boîte du jeu : le packaging était bien évidemment toujours aussi magnifique, et on héritait une nouvelle fois d’une carte en tissu – mais celle-ci avait énormément de points communs avec celle d’Ultima IV, et pour cause : pour la première fois, le jeu n’introduisait pas un nouvel environnement. L’aventure se déroule toujours sur Britannia, les villes, les donjons et les sanctuaires sont toujours à leur place – même les mantras n’ont pas changé, ce qui fait que les joueurs ayant terminé le précédent épisode se trouveront immédiatement en terrain connu. Pas de panique : le monde du jeu a malgré tout connu de multiples transformations, la plus marquante étant l’absence de Lord British sur le trône…

Les combats sont parmi les plus prenants et les plus complets de la saga

L’introduction du jeu, visible en ouverture du test, vous décrira les événements dans le détail : après être devenu l’Avatar des huit vertus à la fin d’Ultima IV, vous êtes rentré chez vous, sur Terre, pour y reprendre une existence normale. Malgré tous vos efforts, la porte lunaire qui vous avait transporté jusqu’à Britannia n’est jamais réapparue, vous interdisant de retourner visiter le royaume. Mais voilà qu’une nuit, une pièce métallique ornée du symbole du Codex apparait au-dessus de votre lit – ce que vous interprétez immédiatement comme une convocation.

Vous devrez mettre la main sur les joyaux de la couronne

Mais votre arrivée dans le monde que vous avez appris à connaître ne se déroule pas comme prévu : votre ami Shamino, venu vous accueillir, est grièvement blessé par trois apparitions spectrales auxquelles il donne le nom de « Seigneurs des ombres » (Shadowlords). C’est en l’emmenant jusqu’à la hutte d’un autre de vos compagnons, Iolo, que vous finissez par apprendre la situation : Lord British a disparu et le régent Blackthorn règne d’une main de fer, manipulé par les Seigneurs des ombres. Les vertus ont désormais été érigées en loi, la pratique de la magie est interdite et, ironie suprême, les héros que vous étiez jadis, vous et votre groupe, sont désormais devenus des criminels recherchés. C’est donc à vous qu’il appartiendra de retrouver le monarque disparu et de découvrir l’origine des esprits maléfiques qui ont corrompu l’esprit de Blackthorn.

Le Codex est désormais directement accessible sur la carte du jeu – à condition d’avoir une quête sacrée, naturellement…

Changement total d’ambiance, donc, et deuxième quête majeure pour l’Avatar après être parvenu à découvrir le Codex de l’Ultime Sagesse. Vous allez ainsi vous retrouver propulsé dans une Britannia qui a bien changé, vivant dans la peur, sous le joug d’un régime autoritaire qui vous conduira dorénavant à fuir les autorités comme la peste, à vous faire rançonner par les gardes des villes, et à chercher les bribes d’un réseau de résistance qui vous aidera à renverser Blackthorn. Mine de rien, le fait de redécouvrir un monde qu’on avait déjà écumé pendant des dizaines d’heures lors de la précédente aventure est déjà l’une des meilleures idées du programme. Car non seulement on aura, à tous les niveau, l’impression de constamment retrouver de vieux amis, mais on sera également époustouflé par l’évolution de l’univers du jeu en lui-même.

Les donjons sont magnifiques pour de l’Apple II

Loin de se contenter de reprendre la carte d’Ultima IV à l’identique, Ultima V a ainsi l’excellente idée de présenter un monde infiniment plus détaillé – à tel point qu’on a parfois l’impression de le voir acquérir une dimension supplémentaire. Fini, les éternelles abstractions : on vit désormais dans une réalité quotidienne palpable, avec des tables, des chaises, des fourneaux, des tonneaux, des armoires, des lits, des champs entourés de barrières… On peut d’ailleurs déplacer et fouiller le mobilier. Le monde extérieur n’est pas en reste : Britannia compte dorénavant des routes, un grand désert à l’est, des petits cours d’eau où vous ne pourrez vous aventurer qu’en barque, des cascades, des phares… et même un monde souterrain aussi grand que le monde en surface et auquel vous pourrez accéder principalement en traversant les donjons du jeu !

Les Seigneurs des ombres sont des adversaires redoutables – n’espérez pas les vaincre par les armes

Ce n’est pas tout : le jeu est également doté d’un cycle jour/nuit, ce qui signifie que chaque PNJ du jeu a un emploi du temps. Cherchez à entrer dans une ville fortifiée la nuit, et vous aurez de grandes chances de tomber sur des grilles closes. Les marchands ne sont ouverts qu’en journée : vous pourrez les voir aller s’attabler au plus proche restaurant lors des repas, et regagner leur domicile (et leur lit) la nuit.

Le château de Blackthorn : on a déjà vu plus accueillant…

Certains personnages ne seront ainsi accessibles qu’à certaines heures, comme ce somnambule plus bavard pendant son sommeil que durant la journée ! Pour ne rien gâcher, les dialogues ont également sérieusement gagné en épaisseur, et on commence à prendre un réel plaisir à aller interroger tout le monde pour mieux sentir cette fascinante ambiance de pays occupé, avec ses injustices mais aussi avec ses opportunistes, ses bourreaux et ses résistants. On n’avait encore jamais eu l’occasion, à l’époque, de se sentir à ce point impliqué dans la situation politique d’un jeu vidéo – tout était tellement vivant qu’on se sentait investi comme jamais auparavant, et l’antique réalisation à base de briques de l’Apple II n’y changeait strictement rien.

Les éléments les plus importants du jeu nécessiteront des expéditions dantesques pour être récupérés

L’une des grandes forces de cet opus est d’ailleurs d’avoir développé absolument tous les concepts étrennés par Ultima IV trois ans plus tôt. Vous êtes toujours l’Avatar, et aller vous servir dans les coffres du roi, libérer des prisonniers politiques ou vous acoquiner avec la tyrannie sont autant d’actes qui pourront avoir des répercussions, positives comme négatives, sur votre karma. Les combats se sont également améliorés : il est enfin possible de viser ailleurs que dans les quatre directions cardinales, et surtout, chaque adversaire est désormais susceptible de laisser un coffre sur le champ de bataille – fini, donc, le combat éreintant qui ne vous rapporte qu’une poignée de pièces d’or : on ne trouve pas le même butin sur le corps d’un dragon ou sur celui d’un rat !

Il va falloir apprendre à cogiter un peu pour venir à bout des donjons !

À noter, d’ailleurs, que certains adversaires comme les démons ou les dragons sont désormais devenus redoutables. Ils peuvent convoquer des renforts, prendre le contrôle de vos personnages, cracher des boules de feu et autres joyeusetés qui font qu’il sera inenvisageable de penser les affronter avec un groupe de bas niveau. Le système de magie a également gagné en épaisseur : chaque sortilège est désormais composé d’un ensemble de syllabes fonctionnant un peu comme les runes de Dungeon Master et vous permettant de composer des sorts en respectant une certaine logique.

Pour monter de niveau, il faudra dormir et espérer que Lord British vous apparaisse

Ainsi, si vous prononcez « An », qui signifie négation, puis « Nox », qui signifie poison, vous obtiendrez « An Nox » qui sera un antipoison. Il faudra une nouvelle fois faire usage de réactifs, et gagner en puissance, puisque les sorts sont divisés en cercles correspondant aux niveaux des joueurs. Ce qui signifie que seul un personnage de niveau 8 (le niveau maximal du jeu) pourra faire usage de magie du huitième cercle. Laquelle comporte bien évidemment des sorts extrêmement puissants qui pourront avoir un impact dramatique lors des combats les plus exigeants.

Certains endroits sont très bien cachés !

Il serait également criminel de ne pas évoquer les donjons du jeu, une nouvelle fois indispensables, et qui comptent à mes yeux parmi les meilleurs de la saga. Difficile de ne pas admirer leur refonte graphique : on évolue désormais dans de vrais couloirs dessinés à la main, et le résultats est absolument bluffant pour de l’Apple II. Profitons-en d’ailleurs pour souligner la qualité de la réalisation sonore du titre, déjà convaincante avec une Phasor ou une MockingBoard, et à tomber à la renverse avec une interface MIDI Passport Design (un petit exemple ici). Surtout, le level design est particulièrement réussi : chaque donjon a sa propre thématique, et de nombreuses salles regorgent de passages secrets que vous ne pourrez révéler qu’en sondant les murs, voire en utilisant une arme à distance pour atteindre une torche ou une plaque de pression. Bref, on y passe des heures et on se régale.

Bonne nouvelle : vous ne serez plus obligé d’attendre qu’un navire pirate vous attaque pour posséder une embarcation

Toutes ces précisions nous feraient presque oublier le cœur du jeu, à savoir la quête en elle-même. Soyez rassuré : celle-ci est très prenante, et met pleinement à contribution le concept de monde ouvert créé par la saga. Votre enquête vous conduira de ville en ville, de château en château, de forteresse cachée en île non répertoriée afin d’apprendre à connaître un royaume d’une rare richesse.

Pour finir le jeu, il faudra même apprendre à jouer du clavecin !

Il est même possible de trouver un grappin vous permettant d’escalader les montagnes, et le titre est tellement rempli d’objets cachés et de passages secrets qu’on prend véritablement goût à aller fourrer notre nez partout pour découvrir des PNJ dissimulés ou des sortilèges qui n’apparaissent pas dans le manuel. Et comment cartographier le monde souterrain et ses monstres qu’on ne rencontre nulle part ailleurs ? Autant de raisons de consacrer à Ultima V quelques dizaines d’heures que vous n’aurez certainement jamais l’occasion de regretter : le titre pourrait se permettre de donner pas mal de leçons aux jeux de rôles parus au XXIe siècle, et qui proposent rarement la moitié des possibilités offertes ici. Si vous voulez découvrir ce qu’était le jeu de rôle à l’ancienne, prenez le temps de lire le manuel, imprégnez-vous de l’ambiance, laissez une heure ou deux au jeu pour révéler ses possibilités, et vous découvrirez à n’en pas douter une des meilleures expériences du genre.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 18/20 En choisissant de développer l'univers et les mécanismes inaugurés par Ultima IV plutôt que de repartir de zéro, Ultima V : Warriors of Destiny aura clairement été l'épisode de la maturité. Plus grand, plus profond, plus réaliste, plus développé, le cinquième opus de la saga demeure aujourd'hui encore un des plus aboutis, grâce à un monde gigantesque et vivant comme jamais, à des donjons parmi les meilleurs de la série, et à une réflexion intéressante sur ce qui advient lorsque la foi devient un choix imposé. Avec un Apple II poussé dans ses derniers retranchements et un système de jeu particulièrement bien pensé, le titre d'ORIGIN aura fait rentrer l'aventure, le dialogue et la profondeur dans l'univers du jeu de rôle en passant par la grande porte. Une quête passionnante d'un bout à l'autre à découvrir absolument. CE QUI A MAL VIEILLI : – On pouvait difficilement en demander plus à l'Apple II, mais les joueurs contemporains seront peut-être plus à l'aise en découvrant le titre par le biais d'un de ses portages 16 bits – Gestion des munitions un peu frustrante – Sans doute un peu plus accessible et un peu plus marquant aux yeux des joueurs ayant déjà terminé Ultima IV

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima V sur un écran cathodique :

Version Commodore 64/128

Développeur : David Shapiro
Éditeur : MicroProse Ltd.
Date de sortie : Décembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x4)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko*
*Commodore 128 en mode natif nécessaire pour entendre la musique

Vidéo – L’introduction du jeu (C128) :

Comme l’Apple II, le Commodore 64 aura accueilli tous les épisodes de la saga jusqu’en 1988 – il aura même le privilège de bénéficier du sixième épisode là ou la machine d’Apple tirait sa révérence. Le portage, assuré par Dr. Cat, ne se contente pas d’un simple calque de la version originale : le jeu est clairement plus coloré, s’approchant par moments des versions 16 bits. Les donjons, s’ils sont un peu plus détaillés, sont en revanche toujours en une seule couleur.

Techniquement, le jeu connait en revanche plusieurs problèmes. Le premier est que le Commodore 64 ne dispose tout simplement pas d’assez de RAM pour jouer la musique du jeu – le titre est ainsi un des rares à réellement exploiter le Commodore 128 en mode natif, seul moyen de bénéficier de la musique du jeu. Les chargements y sont d’ailleurs sensiblement plus rapides. En revanche, si le jeu reconnait bel et bien le fastloader en mode NTSC, celui-ci ne fonctionne pas sur les modèles PAL, condamnant les joueurs européens à souffrir une nouvelle fois de temps de chargement à rallonge. Le problème est heureusement nettement moins dérangeant sur C128, où les temps de chargement sont de toute façon bien meilleurs tant que vous êtes équipés de lecteurs de disque modèles 1570 ou 1571.

Ça a son charme, non ?

NOTE FINALE : 17,5/20 (C64) – 18/20 (C128)

Ultima V souffre, sur Commodore 64, de plusieurs défauts inhérents au hardware de la machine, à commencer par l’absence de musique et surtout des temps de chargement rédhibitoires sur les modèles européens. Sur Commodore 128, le jeu fonctionne beaucoup mieux et profite même d’une réalisation sensiblement plus colorée que sur Apple II.

Version PC (DOS)

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Juillet 1988
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x4) et 3,5″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme cela avait déjà été le cas sur Ultima IV, les différentes versions 16 bits d’Ultima V auront été développées en parallèle, d’où de très nombreuses similitudes entre les versions PC, Atari ST et Amiga. Graphiquement, le jeu profite cette fois d’une palette de 16 couleurs où chaque tuile a été entièrement redessinée, donnant ainsi à cet épisode une « patte » particulière que n’avait pas la version originale qui puisait encore très majoritairement dans les tuiles de l’opus précédent. L’ensemble est plus coloré, plus détaillé – les Seigneurs des ombres ressemblent ainsi davantage à l’illustration de Denis Loubet, et certains monstres comme les trolls où les démons sont désormais beaucoup plus convaincants. Les donjons profitent également des 16 couleurs, et sont encore plus réussis que dans la version originale. Le gain qualitatif par rapport à Ultima IV est cette fois évident dès l’introduction. En revanche, l’interface sur PC ne tire toujours pas parti de la souris – ce qui est un peu moins gênant qu’auparavant, l’interface ayant beaucoup progressé, et surtout, la musique a disparu puisque les cartes sonores AdLib n’étaient pas encore disponible à la sortie du jeu. Les bruitages sont donc délivrés par le haut-parleur interne, et vous pourrez parfois profiter d’un court morceau de musique lorsqu’un de vos bardes vous joue une berceuse avant de dormir. Dans l’ensemble, on sent une nette amélioration par rapport à la version Apple II – dommage que le son ne suive pas.

C’est quand même un peu plus coloré comme ça !

Du côté des fans :

Pas de refonte graphique cette fois, mais Voyager Dragon aura décidé d’ajouter ce qui manquait à l’itération PC : la musique ! Son patch, téléchargeable ici, ajoute donc tous les thèmes des versions Apple II et Commodore 128 en qualité MIDI, et y ajoute l’unique thème musical de la version Amiga pendant la création de personnage. Un excellent moyen, donc, de bénéficier d’un des meilleurs portages du jeu. Seul problème, le logiciel de configuration utilise DPMI, qui n’est pas émulé nativement sous DOSBox ; arriver à faire fonctionner le patch pourra donc se révéler délicat.

NOTE FINALE : 18,5/20 (version non patchée) – 19/20 (version patchée)

Ultima V sur PC bénéficie grandement de l’apport des 16 couleurs de sa palette, proposant une réalisation graphique bien plus agréable que sur Apple II. Cela se fait malheureusement au prix de la musique – sauf si vous parvenez à faire fonctionner le patch de Voyager Dragon, auquel cas vous bénéficierez d’un des tout meilleurs portages du jeu.

Version Atari ST

Développeur : Binary Vision Ltd.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Avril 1989
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ simple face (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’introduction du jeu :

Il aura fallu attendre 1989 pour voir débarquer Ultima V sur Atari ST. La version PC ayant posé les bases, on ne s’attendra pas à trouver de grosses nuances sur le plan graphique. Seule différence : la présence un tantinet envahissante d’un logo « Ultima V » en bas de la fenêtre de jeu, qui ne sert à rien sauf à prendre de la place. Musicalement, en revanche, le jeu reprend tous les thèmes des versions 8 bits, mais les distribue différemment – pourquoi pas, difficile de savoir la raison de cette réorganisation. Le jeu profite également d’une interface à la souris moins indispensable que dans les épisodes précédents, et souffre également de quelques bugs qui n’auront hélas jamais été corrigés, dont un qui demande d’insérer un disque avant de s’achever en plantage en bonne et due forme (très désagréable quand vous n’avez pas sauvé depuis une heure parce que vous vous trouviez au fond d’un donjon). C’est dommage car, à ces petits détails près, on tiendrait à n’en pas douter l’une des meilleures versions du jeu.

Comme la version PC, mais avec un gros logo qui ne sert à rien

NOTE FINALE : 18,5/20

Ultima V sur Atari ST offre à première vue une sorte de version améliorée du portage paru sur PC, en y ajoutant les thèmes musicaux qui manquaient cruellement à l’expérience DOS. Dommage, malgré tout, que la fenêtre de jeu ait été inutilement rabotée et que quelques bugs n’aient jamais disparu, car on n’était pas loin de toucher la perfection du doigt.

Version Amiga

Développeur : DMA Systems Ltd.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’introduction du jeu :

On aurait pu s’attendre à ce que la version Amiga soit globalement identique à 99% au portage sur Atari ST – avec peut-être un gain sensible en terme de qualité musicale. Et au moment de lancer le jeu, on retrouvera effectivement une copie conforme en terme de réalisation graphique – avec toujours ce logo inutile qui vient grignoter une partie de la surface de jeu. En revanche, du côté sonore, c’est la stupeur : le jeu ne comporte en tout et pour tout qu’un seul et unique thème musical répété en boucle pendant toute la partie ! Même si ce morceau est très sympathique, autant vous dire qu’au bout de quelques heures de jeu, on commence un peu à saturer – c’est d’autant plus inexcusable que l’Amiga était parfaitement capable d’offrir l’intégralité des morceaux présents sur la version ST. Pour ne rien arranger, la saisie au clavier connait également quelques ratés, et il faut parfois appuyer plusieurs fois sur une touche pour qu’elle daigne être reconnue. Enfin, il est impossible de transférer son personnage depuis Ultima IV. Beaucoup d’erreurs pour une version qui aurait pu prétendre à mieux.

Graphiquement, c’est comme sur ST – y compris ce logo inutile

NOTE FINALE : 17/20

La version Amiga d’Ultima V agace quelque peu à force d’accumuler les errements aussi dommageables qu’inexplicables. Même si ceux-ci ne pénalisent au final que marginalement l’expérience de jeu, on ne pourra que regretter de se retrouver cantonné avec un unique thème musical pendant les dizaines d’heures que durera la partie. Mieux vaudra privilégier la version ST.

Version PC-98

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – l’introduction du jeu :

Tout comme les épisodes précédents, Ultima V aura atterri sur PC-98 en 1990, comme sur la plupart des autres systèmes japonais. Sur l’ordinateur de NEC, le jeu offre une réalisation qui devrait mettre tout le monde d’accord, et qui est plus ou moins une version haute-résolution des tuiles employées dans les meilleures versions 16 bits. Le résultat est d’une lisibilité rare, très coloré, et figure à n’en pas douter parmi les plus belles versions du jeu – d’autant que l’introduction a également été redessinée en plus fin, et que les thèmes musicaux sont toujours là dans des versions très agréables. Bref, on tiendrait là à n’en pas douter un candidat sérieux à la version ultime sans un léger petit détail : le fait que le jeu n’existe qu’en japonais – ou plutôt, dans un étrange mélange d’anglais et de japonais qui vous permettra peut-être de jouer aussi facilement que sur les autres systèmes, mais vous interdira de comprendre le moindre dialogue du jeu sans un solide niveau dans la langue de Mishima.

C’est déjà moins abstrait que sur les versions occidentales !

NOTE FINALE : 19/20

Si vous cherchez la version d’Ultima V la mieux réalisée, pas de débat, c’est vers cette itération PC-98 (ou son équivalent sur Sharp X68000) qu’il faudra vous tourner. Tout y est désormais en haute résolution, y compris les donjons, et les thèmes musicaux sont toujours de la partie. En revanche, le jeu vous sera inaccessible si vous ne parlez pas japonais, hélas.

Version Sharp X68000

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – l’introduction du jeu :

Ultima V aura également connu un portage sur Sharp X68000 – et, pour l’occasion, les choses vont aller vite : on a affaire à un clone quasi-parfait de la version PC-98, les deux portages sont d’ailleurs sortis le même jour. Graphiquement, la police d’écriture (japonaise) est un peu différente, et certaines animations ont disparu, mais pour le reste c’est précisément le même jeu, au pixel près. Ce qui signifie une nouvelle fois qu’il vous faudra savoir lire le japonais pour pouvoir espérer tirer quoi que ce soit de cette version, sans quoi, seuls ceux connaissant déjà le titre original par cœur auront une petite chance de pouvoir en voir le bout. Frustrant, mais on commence à avoir l’habitude.

On ne s’en lasse pas

NOTE FINALE : 19/20

Pas de jaloux : si vous n’avez pas de PC-98 pour faire tourner la meilleure version d’Ultima V, il vous reste son clone quasi-parfait sur Sharp X68000 ! Naturellement, cela nécessitera une nouvelle fois de savoir parler (ou du moins lire) le japonais, mais si c’est le cas et que vous avez la chance de posséder à la fois la coûteuse machine de Sharp et une copie du jeu, foncez !

Version FM Towns

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Août 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – l’introduction du jeu :

Autre grand habitué des « versions définitives », le FM Towns aura hébergé un portage d’Ultima V visiblement réalisé en parallèle de celui d’Ultima IV (d’ailleurs commercialisé à peine quatre mois plus tôt)… ce qui en fait hélas une version nettement moins enthousiasmante que les deux précédentes. Commençons par les bons points : on hérite une nouvelle fois d’une mise en contexte historique reprenant une partie des informations que vous donne déjà Iolo à la fin de l’introduction – exclusivement en japonais – et les écrans fixes ont été redessinés avec plus ou moins de bonheur. On bénéficie également de musique qualité CD, mais uniquement pendant la cinématique susmentionnée et pendant l’écran-titre ; le reste du temps, c’est le processeur sonore de la machine qui prend le relai. Graphiquement, en revanche, non seulement le titre reprend les tuiles des versions 16 bits occidentales en se sentant obliger de rajouter une grosse barre rose inutile en haut de la fenêtre de jeu, mais en plus on perd carrément des couleurs au passage ! Rien d’insurmontable, mais quand on connait les caractéristiques de la machine, on se sent un peu roulé… Bonne nouvelle, en revanche : passé la première cinématique, le jeu est intégralement en anglais, avec quelques coquilles en bonus. Bref, une version honnête mais qui ne justifie sans doute pas l’investissement.

Mouais. Bon, rien de grave, mais tant de limitations inexplicables…

NOTE FINALE : 18,5/20

Déception pour cette version FM Towns d’Ultima V qui n’offre pas grand chose de plus que les versions 16 bits occidentales du jeu – et même pour l’occasion, un peu moins, les graphismes ayant perdu en couleurs et la fenêtre de jeu étant rabotée par une grande barre dont on cherche encore la fonction. Heureusement, le jeu en lui-même est toujours aussi bon – et il est en anglais, cette fois.

Version NES
Ultima : Warriors of Destiny

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : FCI
Date de sortie : Janvier 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’introduction du jeu :

Les adaptations NES de la série Ultima réservent toujours de nombreuses surprises, et celle du cinquième épisode ne fait pas exception. La première est la date de sortie du jeu : 1993, soit cinq ans après la version originale – une époque où non seulement la NES était plus qu’en fin de vie, mais où la saga elle-même approchait de la sortie de son huitième épisode ! Un anachronisme qui se retrouve d’ailleurs une fois la partie lancée. Premier choc : loin des graphismes japonisants des précédents opus, cet épisode emprunte le moteur… d’Ultima VI – pourtant bien trop gourmand pour un système 8 bits.

Au début du jeu, on a envie d’y croire…

Les conséquences sont immédiatement palpables, car l’intégralité du monde du jeu est désormais représentée à une échelle unique, et l’univers se veut infiniment plus détaillé, avec notamment un portrait pour chacun des PNJs du jeu ! On ne pourra que se demander pourquoi ce portage n’aura pas été fait sur une Super Nintendo beaucoup mieux équipée pour l’accueillir, mais le fait est que le titre souffre immédiatement de son ambition en se trainant lamentablement. Des dizaines d’autres sacrifices ont dû être effectués : la carte du monde est beaucoup plus petite, il n’y a qu’un seul thème musical une fois la partie commencée, il y a beaucoup moins de personnages et ceux-ci sont bien moins bavards, l’introduction et la séquence de fin sont plus courts, il n’est plus possible de monter à cheval, etc. Au final, le résultat est très étrange et surtout à peu près injouable, la faute à la lenteur générale du programme et à une interface pas du tout pensée pour tenir sur deux boutons. C’est d’autant plus dommage qu’on ne peut qu’imaginer ce qu’aurait pu donner une telle adaptation sur un système assez puissant pour le faire tourner dans des conditions optimales, mais en l’état, on est plus proche du monstre de Frankenstein que d’un titre savamment conçu.

…Malheureusement, on découvre vite que la carte est aussi petite que le jeu est lent

NOTE FINALE : 08/20

Chercher à porter Ultima V sur NES avec le moteur d’Ultima VI, c’est un peu comme vouloir mettre un satellite sur orbite avec un lance-pierre : c’est ambitieux, mais voué à l’échec. Lent, expurgé, pratiquement injouable, le titre risque de venir à bout de vos nerfs bien avant que vous ayez réellement pu débuter l’aventure. Beaucoup d’énergie gaspillée pour un portage qui aurait dû, d’emblée, être pensé pour la Super Nintendo.

Ultima IV : Quest of the Avatar

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titres alternatifs : Ultima IV : Avatar no Tankyu (Japon), Ultima : Quest of the Avatar (NES), Ultima : Seisha e no Michi (Famicom)
Testé sur : Apple ][Commodore 64Atari 8 bitsAtari STMSXPC (DOS)PC-88PC-98Sharp X1AmigaSharp X68000NESMaster SystemFM Towns
Version non testée : FM-7
Disponible sur : iPhone, Ipad – Version PC émulée : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10)
Téléchargeable gratuitement sur : Gog .com (Mac, Windows)

La saga Ultima (Jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version Apple ][

Date de sortie : Novembre 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x4)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II – OS : Aucun – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : Haute résolution
Cartes sonores supportées : Mockingboard A/C/Sound I/Sound Speech I

Vidéo – L’introduction du jeu :

Il existe des polémiques récurrentes dans l’histoire du jeu vidéo, et certaines sont tellement insignifiantes aux yeux du joueur lambda qu’il en vient souvent à oublier – voire à purement ignorer – leur existence. On a connu les éternels procès en violence faits aux FPS – à qui les gens les moins informés aiment à reprocher ce qu’ils tolèrent au cinéma – ou les attaques régulières à l’encontre de titres moralement ambigus comme la saga des Grand Theft Auto.

Le système de combat a été peaufiné, et a plutôt bien vieilli

Mais le jeu de rôle a lui aussi été l’objet de critiques avant même d’exister sous une forme vidéoludique. Et même au tout début des années 80 – soit à une époque où le RPG constituait un genre de niche au milieu d’une activité elle-même de niche – on pouvait déjà trouver, aux États-Unis notamment, des fondamentalistes ou des conservateurs pour hurler contre ces jeux diaboliques et amoraux qui pervertissaient la belle et grande jeunesse américaine.

Le monde de Britannia vous attend… et il pourrait bien vous marquer à jamais

Aussi surprenant que cela puisse paraître, ces attaques auront amené Richard Garriott à s’interroger – et à désirer leur donner tort. De fait, en 1985, le but de n’importe quel jeu de rôle – et les trois premiers Ultima n’y faisaient nullement exception – se limitait fondamentalement à aller tuer quelqu’un. Le plus souvent un magicien maléfique ou un nécromancien mégalomane, chacun au fond de son donjon, mais la dimension « rôle » ne dépassait jamais la gestion d’une feuille de personnage.

Les portes de lune sont toujours là, et pourront vous faire gagner un temps considérable

On n’incarnait finalement rien de plus que dans un jeu de plateforme ou dans un jeu d’action, et les rares décisions à prendre se cantonnaient à savoir comment s’équiper ou quelle direction prendre à un croisement. Les alignements étaient souvent purement cosmétiques, et les backgrounds des différents personnages, fussent-ils joueurs ou non, étaient largement laissés à l’imagination des joueurs. Et, à tout bien y réfléchir, cette pauvreté dans l’approche des mécanismes de jeu se ressentait fatalement dans la crédibilité de l’univers ou dans le plaisir qu’on pouvait prendre à aligner des combats pendant des heures.

Les donjons profitent désormais de leurs petites énigmes et de leurs propres mises en scène. Que pensez-vous qu’il va se passer si j’essaie de m’emparer de ce coffre ?

Richard Garriott se mit donc en tête de créer un jeu de rôle qui ne ressemblerait à aucun autre, et dont l’objectif, pour une fois, ne se limiterait pas à tuer quelqu’un. Et, ce faisant, il engendra une des plus grandes révolutions de l’histoire du jeu de rôle. Ainsi naquit Ultima IV : Quest of the Avatar.

Trouver les objets clefs sera le fruit de très longues heures d’interrogations

L’objectif du jeu est donc donné dans le sous-titre : vous allez chercher à devenir l’Avatar des huit vertus, et partir en quête du Codex de la Sagesse Ultime. Et non, ces huit vertus ne vous demanderont pas d’aller vaincre des boss pour libérer des cristaux mais bien de respecter un code moral – par ailleurs si cohérent et si bien conçu qu’il restera pertinent pendant tout le reste de la série.

Le moteur de jeu a très peu changé depuis Ultima III

Oubliez Sosaria ; le jeu se situe dorénavant sur le royaume de Britannia, toujours gouverné par Lord British. Le jeu adopte une nouvelle carte composée d’un continent massif entouré de plusieurs îles, créant ainsi un nouveau canon puisque – chose rarissime encore aujourd’hui – ce continent restera le terrain de jeu sur lequel évoluera le joueur pendant la très grande majorité du reste de la saga. Vous allez créer un héros – juste un seul – en répondant à des questions présentant chacune des dilemmes moraux avant que vos réponses ne dictent votre classe et vos caractéristiques de départ. Puis vous débuterez votre aventure dans la ville correspondant à votre classe, et devrez démarrer une longue et passionnante enquête vous emmenant jusqu’à l’Abîme, donjon final où vos connaissances du système éthique du jeu seront passées au crible.

Il faudra cette fois apprendre à résister à la tentation !

Ce fameux système éthique, justement, quel est-il ? En découvrir les tenants et les aboutissants étant une des grandes forces du titre – et de la série – je préfère n’aborder ici que les grandes lignes. Les huit vertus dont il est question dans le jeu sont les suivantes : l’honnêteté, la compassion, la valeur, la justice, le sacrifice, l’honneur, la spiritualité et l’humilité. Chacune de ces vertus a une ville qui lui est dédiée, la seule exception étant la ville de Magincia, détruite par les démons sous le poids de son orgueil.

Hawkwind saura vous guider au cours de votre quête personnelle

Chacune de ces vertus correspond également à une classe de personnage (le jeu en comprend donc huit, si vous suivez, un chiffre extrêmement important dans la saga), à un donjon qui correspondra à un aspect opposé de la vertu (ainsi, le donjon associé à Britain, ville de la compassion, est nommé Despise qui signifie « mépriser »), mais aussi à un sanctuaire qui vous permettra de méditer sur cette vertu, à condition de posséder une rune vous autorisant à entrer, et surtout un mantra vous permettant de vous concentrer.

Les gemmes et autres sorts de vision seront indispensables pour espérer vaincre un donjon

Cela fait déjà énormément de choses à assimiler, et c’est ici que le jeu montre sa première qualité : son aspect enquête. Grande nouveauté : les centaines de PNJs qui occupent chacune des villes, des villages et des châteaux du jeu ne se contentent plus de vous débiter une unique ligne de dialogue. Dorénavant, c’est bien une véritable conversation qu’il faudra entretenir avec chacun d’entre eux, grâce à un système de mots-clefs. Tapez « name » en interrogeant en personnage, et il vous donnera son nom, « job » et il vous décrira son métier, « health » et il vous parlera de sa santé, et ainsi de suite.

Les Gremlins sont toujours de la partie, et ils aiment toujours autant vous voler votre nourriture

Bien évidemment, le principe sera de rebondir sur chacune de ses réponses pour découvrir de nouveaux mots-clefs, et aboutir régulièrement à des informations très importantes : tel personnage connait le mantra, interrogez-le ; allez écouter les rumeurs à la taverne de Trinsic pour connaître l’emplacement de la rune ; avez-vous entendu parler des pierres de vertu ? Finir le jeu sans interroger méthodiquement tout le monde est totalement impossible, et vu le grand nombre d’éléments pertinents à retenir, autant vous dire que vous avez tout intérêt à préparer un carnet de notes pour avoir une chance de mener l’aventure jusqu’à son terme.

Pour survivre à la baie des pirates, mieux vaudra avoir l’équipement nécessaire !

Bien évidemment, votre enquête vous amènera régulièrement en terrain hostile, ce qui représente une très bonne transition pour aborder le système de combat du jeu. Ce dernier reprend les grandes lignes de celui d’Ultima III, au détail près qu’il est possible – et même indispensable – de compter jusqu’à huit membres dans votre équipe. Face à ce qui pourrait rapidement s’avérer laborieux, Ultima IV a heureusement l’excellente idée de simplifier la gestion de votre groupe : plus question ici de gérer indépendamment les rations de voyage de chaque personnage, ni de s’échanger les armes ou l’or ; toutes les ressources sont désormais communes à toute l’équipe, ce qui fait un bien fou. Fini, la micro-gestion permanente ! Et si la nourriture est toujours aussi importante, elle ne devrait guère vous demander plus d’une poignée de secondes d’attention toutes les deux ou trois heures de jeu.

Pour mener à bien votre quête, il faudra apprendre à mettre le nez partout

Les affrontements eux-mêmes ont été affinés : le jeu vous dit par exemple à quel degré un adversaire est blessé à chaque fois que vous faites mouche, et les combats sont à la fois moins longs, moins aléatoires et moins frustrants que ceux de l’opus précédent. Le système de magie a également été entièrement refait, et comprend désormais… un sortilège pour chaque touche du clavier, intelligemment attribué à son initiale. Ainsi, « A » correspondra à « Awaken » (réveil), « B » à « Blink » (clin d’oeil), « C » à « Cure » (guérison) et ainsi de suite.

Vous allez apprendre à connaître le royaume de Britannia comme votre poche

Mais il ne suffira plus de connaître un sortilège pour le lancer, il faudra commencer par le préparer en mélangeant des réactifs ! Si la plupart d’entre eux sont disponibles dans des boutiques dont les prix varient largement selon la ville qui les héberge, les réactifs les plus puissants seront à aller cueillir directement sur la carte du jeu, à condition naturellement de savoir où les trouver… Le système est vraiment bien fichu, car une expédition au fond d’un donjon nécessitera une préparation minutieuse pour être bien certain de ne pas tomber à court de sorts au pire moment. Seul inconvénient : les sorts doivent être préparés un par un, ce qui est vite fastidieux (le problème sera heureusement corrigé dès Ultima V). Et puisque l’on parle de donjons, ceux-ci sont désormais réellement passionnants, proposant des salles comportant des combats, bien sûr, mais également de petites énigmes qui vous demanderont de réfléchir un peu pour ouvrir des chemins dissimulés. On notera d’ailleurs que le jeu propose pour la première fois des passages secrets que les joueurs apprendront à reconnaître à certains indices visuels.

Magincia aura payé son orgueil au prix fort… Où trouver des informations sur l’humilité là-dedans ?

Tout cela est déjà très intéressant, et suffirait à faire d’Ultima IV un très bon jeu de rôle, indubitablement supérieur à son prédécesseur. Mais le véritable génie du système de jeu imaginé par Richard Garriott, c’est bien évidemment la mise en application de ces fameuses huit vertus. Car devenir l’Avatar ne se résoudra pas simplement en tuant des monstres, en menant l’enquête et en explorant de donjons : la façon dont vous allez le faire est au moins aussi importante…

Plus question d’acheter ses caractéristiques, cette fois, il ne faudra compter que sur l’expérience

Si vous jouez aujourd’hui encore à n’importe quel jeu de rôle, il y a de très forte chance que personne ne voie aucun problème à ce que votre héros entre partout sans invitation pour se servir dans les tiroirs. Si cela est également possible dans Ultima IV, la grande révolution est que cela aura des répercussions. Imaginez que vous découvriez la chambre du trésor de Britannia et que vous décidiez de vous servir dans les coffres : bon courage, ensuite, pour vanter votre honnêteté au moment de prier dans le sanctuaire idoine… De la même manière, comment croire en votre courage si vous prenez régulièrement la fuite lors des affrontements ? Et pour faire preuve de votre compassion, il pourra non seulement être utile de faire la charité, mais également de laisser fuir les adversaires blessés… tant que ceux-ci ne sont pas des êtres maléfiques, naturellement.

Pour devenir un Avatar, il faudra méditer sur vos actes

Vous l’avez compris : vous pouvez bel et bien faire énormément de choses, mais il faudra cette fois réfléchir à leur portée morale. Agir en assassin kleptomane vous rendra peut-être riche et puissant, mais vous interdira d’accomplir l’objectif du jeu. Évidemment, il n’est pas toujours facile de savoir ce qui est juste et ce qui ne l’est pas : dans le doute, les différents sanctuaires sauront vous expliquer comment gagner en vertu, et le devin présent au château de Lord British saura vous dire à quel point vous avez avancé ou non dans votre cheminement éthique. Mais combien de jeu de rôles vous proposent-ils, près de 35 ans plus tard, de réfléchir à la portée de tous vos actes jusque dans le plus banal et le plus anodin des combats du jeu ?

Certains endroits sont bien cachés

Conclusion évidente : Ultima IV reste aujourd’hui encore un monument majeur de l’histoire du jeu vidéo. Certes, il faudra composer avec une réalisation désuète, avec la nécessité de prendre des notes, de dresser des plans, d’avoir toujours le manuel à portée de main… Mais pour ceux qui feront l’effort, il est surprenant de découvrir à quel point le titre peut encore se montrer extrêmement prenant. Enfin débarrassé de ses grandes phases de grinding répété – vous allez encore énormément vous battre, mais vous aurez toujours quelque chose à faire, et souvent plusieurs dizaines de choses à faire en même temps – Ultima IV devient exactement ce qu’il promet dans son sous-titre : une quête à la fois épique et personnelle pour devenir un être meilleur. Si ça n’est pas la meilleure définition qui soit du jeu de rôle…

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 17/20 Ultima III avait fait trembler les fondations du genre, Ultima IV les aura dynamitées. En choisissant de placer le joueur au centre d'une quête mystique et philosophique plutôt que dans une éternelle chasse-au-grand-méchant, le titre de Richard Garriott aura réellement donné son sens à l'expression « jeu de rôle » en offrant aux dialogues, à l'enquête et jusqu'à la façon d'accomplir les objectifs un rôle central dans ce qui était encore trop souvent un simple simulateur de combats. Débarrassé d'une grande partie des lourdeurs de la première trilogie, à commencer par un recours systématique à un grinding pas toujours passionnant, Ultima IV : Quest of the Avatar aura été une révolution, un OVNI extraordinaire dont beaucoup de titres contemporains gagneraient encore à s'inspirer. Le jeu qui aura définitivement ancré la saga Ultima dans la cour des géants. CE QUI A MAL VIEILLI : – Prise de note obligatoire – Mélanger les sortilèges un à un : fastidieux... – Réalisation datée – Interface toujours assez lourde à l'usage

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima IV : Quest of the Avatar sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : Chuck Bueche
Éditeur : ORIGIN Systems
Date de sortie : Décembre 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’introduction du jeu :

On commence à connaître les forces et les faiblesses inhérentes au hardware du Commodore 64 – auxquelles peuvent rapidement s’ajouter la compétence ou le dévouement des programmeurs. Ce portage ayant une nouvelle fois été réalisé par Chuck « Chuckles » Bueche, on ne sera donc pas surpris de retrouver exactement les mêmes qualités et les mêmes défaut que dans la conversion C64 réalisée pour Ultima III. Au rang des satisfactions, donc, le jeu est un peu plus coloré – et les teintes un peu mieux choisies – que sur Apple ][. La puce sonore du C64 permet également de ne pas nécessiter de posséder de carte son pour bénéficier de la musique (même si on ne profite plus, du coup, que de trois voix là où la Mockingboard en autorisait six). En revanche, les donjons sont une nouvelle fois en noir et blanc, et surtout les temps de chargement sont proprement insupportables, absence de fastloader oblige (comptez déjà cinq bonnes minutes pour espérer lancer le jeu). Le contenu, pour sa part, n’a pas évolué d’un pouce – mais en avait-il besoin ?

Ça n’est pas beaucoup plus coloré que sur Apple II, même si ça va mieux quand on est en ville

NOTE FINALE : 16/20

Sans surprise, Ultima IV : Quest of the Avatar offre sur Commodore 64 une prestation très semblable à celle offerte sur Apple ][. Si les couleurs sont un peu plus cohérentes tant que l’on n’entre pas dans un donjon, le titre doit hélas composer avec des temps de chargement à rallonge qui réserveront l’expérience à des joueurs particulièrement patients.

Du côté des fans :

Comme pour Ultima III avant lui, Ultima IV aura également bénéficié, en 2006, d’une version de fans intitulée Ultima IV Gold. Celle-ci, en plus d’apporter sa dose de correction et d’éléments de triche, a surtout le gros mérite de faire tenir le jeu sur une seule disquette et d’accélérer drastiquement les temps de chargement. Vous pourrez trouver plus de détails à cette adresse et télécharger le jeu ici. Mais ce n’est pas tout ! Le jeu aura également profité d’un remaster effectué par les fans, cette fois en 2015, sous le titre Ultima IV Remastered. Le programme profite ainsi d’une refonte graphique particulièrement visible pendant l’introduction, et qui emprunte énormément de tuiles à Ultima V une fois en jeu. Des améliorations qui aident à faire de cette version une des meilleures adaptations 8 bits du jeu. Vous pouvez la télécharger ici.

Comparez avec la vidéo en ouverture du test : c’est quand même nettement plus beau ! (source : http://wiki.ultimacodex.com)

Version Atari 8 bits

Développeur : David Lubar
Éditeur : ORIGIN Systems
Date de sortie : Février 1986
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Atari 800
Configuration minimale : Modèle NTSC requis pour l’affichage des couleurs

Vidéo – L’introduction du jeu :

La version Atari 8 bits d’Ultima IV est, grosso modo, un portage fidèle de la version Apple II. La principale nuance se situe, comme toujours, au niveau des couleurs : le jeu est affiché en noir et blanc sur les systèmes PAL, et les teintes tendent furieusement à varier d’un modèle à l’autre en NTSC ou en SECAM. Seule véritable perte : le jeu ayant cette fois été programmé pour n’utiliser que 48k de mémoire, une bonne partie des thèmes musicaux sont purement et simplement passés à la trappe. Pour le reste, on demeure en terrain connu.

Les couleurs sur Atari 8 bits : une loterie réservée aux joueurs américains

NOTE FINALE : 16,5/20

Pour sa dernière conversion sur Atari 8 bits, Ultima IV laisse malheureusement quelques plumes du côté de la réalisation musicale. C’est dommage car, pour le reste, le titre est toujours largement aussi bon – mieux vaut pouvoir y jouer, malgré tout, en NTSC.

Version Atari ST

Développeur : Robert Hardy
Éditeur : ORIGIN Systems
Date de sortie : 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Interface MIDI supportée
Écran couleur requis

Vidéo – L’introduction du jeu (Français) :

Petite originalité, pour une fois : toutes les versions 16 bits d’Ultima IV (c’est à dire sur PC, Atari ST et Amiga) ont été formées dans le même moule. Fini, l’interface tantôt bleue, tantôt beige au gré des portages et les orques qui hésitaient entre le vert et le marron : cette fois, la réalisation est semblable à 95% sur les trois machines… à quelques petits détails près, comme souvent. Commençons par l’évolution la plus évidente : les graphismes en 16 couleurs qui rendent la réalisation un peu moins tristounette que sur Apple II, et l’introduction sensiblement mieux réalisée (même s’il n’y a pas non plus de quoi se relever la nuit). On retrouve une nouvelle fois une interface qui profite de la souris, et des thèmes musicaux qui tirent partie des capacités sonores du ST (d’autant plus que le jeu peut tout à fait être connecté à une interface MIDI). Le gros plus, cependant, est l’apparition de murs bien plus détaillés dans les donjons, reléguant finalement les parois en surfaces pleines oranges et bleues au passé. Signalons que ce portage sur Atari ST a un avantage par rapport à celui sur Amiga : il autorise à transférer son personnage vers Ultima V. Notons enfin que l’Atari ST reste une des dernières machines sur lesquelles il soit encore possible de dénicher la version française du jeu, et comme vous pourrez le constater dans la vidéo de l’introduction, le résultat est absolument abominable.

Ah, enfin un peu de couleurs!

NOTE FINALE : 17,5/20

Porté sur Atari ST, Ultima IV bénéficie d’un petit coup de jeune dans tous les secteurs, de la réalisation jusqu’à la maniabilité. Évidemment, il y a peu de chance que vous soyez aujourd’hui ébahi par les graphismes, mais c’est plus coloré, plus détaillé, plus jouable et plus fluide puisqu’il n’y a même plus de changement de disquette à effectuer. Bref, un très bon moyen de découvrir un excellent jeu.

Version MSX

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2

Vidéo – L’introduction du jeu :

Quitte à débarquer sur les systèmes domestiques japonais, Ultima IV n’allait pas faire l’impasse sur le très populaire (du moins au Japon) MSX. Pour l’occasion, pas question de profiter ici de la haute résolution qui semblait faire école sur la plupart des ordinateurs de NEC et de Sharp : il faudra même plutôt composer avec une résolution plus basse que ce qu’on pouvait voir sur les ordinateurs occidentaux. Cependant, le résultat – qui évoque souvent ce qu’allait offrir, trois ans plus tard, la version Master System – reste coloré, lisible et très plaisant, et la musique est bien entendu toujours de la partie. L’interface n’a pas changé d’un millimètre (pas de gestion de la souris ou du pad, donc), mais le seul vrai défaut de cette version demeure le fait d’être restée cantonnée au japonais. Une simple curiosité pour la grande majorité des joueurs occidentaux, donc, qui auront tout loisir de découvrir le titre en anglais sur beaucoup d’autres plateformes, mais une version parfaitement correcte quoi qu’il en soit.

Ca a toujours un certain charme, non ?

NOTE FINALE : 17,5/20

D’une fidélité totale à l’expérience originale, Ultima IV sur MSX profite pour l’occasion de graphismes colorés et parfaitement lisibles en dépit de la faible résolution, et le reste est si fidèlement à sa place qu’on ne pourra guère reprocher à ce portage que de n’être disponible qu’en japonais.

Version PC (DOS)

Développeur : James Van Artsdalen
Éditeur : ORIGIN Systems
Date de sortie : Octobre 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x2) et 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0* – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : CGA, CGA Composite, EGA, Tandy/PCjr
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne
*DOS 2.1 ou 3.2 fortement recommandé

Vidéo – l’introduction du jeu :

Les années passants, le moment arriva enfin où le PC pouvait prétendre rivaliser avec un Apple ][ sans être doté d’un moniteur composite. Le fait de reconnaître les cartes EGA permet à cette version de se hisser graphiquement pratiquement à la hauteur des autres versions 16 bits… malgré quelques manques difficiles à expliquer. Ainsi, sur la carte du monde, les noms des personnages sont désormais en blanc, la bordure extérieure blanche a disparu, les lunes en haut de l’écran sont devenues monochromes… Dans le même ordre d’idée, même les écrans d’introduction ont des teintes moins bien choisies, avec des personnages affichant une teinte de peau couleur « jaune Lego ». Plus grave : les donjons, eux, sont restés en surfaces pleines comme sur les ordinateurs 8 bits ! Niveau son, enfin, les cartes sons AdLib n’ayant fait leur apparition qu’en 1988, il faudra se contenter de quelques « bip-bip » en guise de bruitages et d’un silence de mort en guise de musique. Et l’interface à la souris est également à oublier (elle ne fera son apparition qu’avec Ultima VI, soit le premier jeu de la saga développé directement sur PC). Autant dire que dans un jeu où la réalisation est très secondaire, ce n’est que moyennement pénalisant, mais on ne pourra que regretter de ne pas bénéficier, une nouvelle fois, du portage « ultime ».

Vous pouvez vous amuser à jouer aux sept différences avec la capture d’écran de la version ST

Du côté des fans :

Ultima IV étant tombé dans le domaine public dès la fin des années 90 – une opération destinée à promouvoir la sortie d’Ultima IX – il aura été un des premiers épisodes de la saga a avoir bénéficié de l’attention des fans. Comme pour les deux précédents épisodes parus sur PC, il aura donc vu arriver plusieurs patchs, aujourd’hui regroupés en un seul trouvable à cette adresse. Parmi les apports les plus évidents, dont la liste est disponible ici, un mode VGA en 256 couleurs, et surtout l’ajout des musiques MIDI absentes de la version originale. Quelques bugs dans les dialogues ont également été corrigés, mais attention, certains autres ont également apparu (ils sont mentionnés dans la liste citée plus haut). Dans l’ensemble, un bon moyen de redonner un petit coup de jeune au titre, même si, à titre personnel, je trouve le style des graphismes en VGA trop éloigné du style original et les thèmes musicaux un peu envahissants.

Quitte à dépoussiérer un peu le jeu…

NOTE FINALE : 17/20 (version originale) 17,5/20 (version patchée)

Ultima IV n’aura, pour une fois, pas trop souffert de son transfert sur PC. Certes, on perd la musique des versions 8 bits et quelques couleurs par rapport aux versions 16 bits, mais l’essentiel de l’expérience est là, en plus coloré que sur Apple ][. La version patchée permet de bénéficier de graphismes remis au goût du jour (enfin, un peu plus) et des thèmes musicaux manquants.

Version PC-88

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Année de sortie : Juillet 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Version testée : Version disquette japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – l’introduction du jeu :

La version MSX d’Ultima IV nous aura donné, en quelque sorte, un « guide » de ce à quoi risquent de ressembler la plupart des portages sur les ordinateurs japonais. Confirmation d’ailleurs avec cette itération PC-88 qui en est objectivement très proche – la réalisation ne tire d’ailleurs aucunement bénéfice de la résolution de la machine. Les quelques rares nuances demandent d’ailleurs pratiquement de placer les deux versions côte-à-côte : on a perdu quelques couleurs, et les sprites tendent à être entourés d’un grand bloc noir faute d’effets de transparence. À ces (rares) détails près, on hérite d’un portage qui ne tire certes pas parti de toutes les capacités de la machine, mais qui reste largement apte à rivaliser avec les versions 16 bits occidentales. Dommage que le jeu soit toujours exclusivement en japonais, en revanche.

Ça reste largement plus coloré que les versions occidentales du jeu

NOTE FINALE : 17,5/20

Sorte de portage de la version MSX – avec quelques modestes détails en moins – Ultima IV sur PC-88 ne pousse certainement pas la machine qui l’accueille à se sortir les titres, mais reste un portage tout à fait satisfaisant, à condition, naturellement, de parler le japonais.

Version PC-98

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Année de sortie : 18 juillet 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Version testée : Version disquette japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – l’introduction du jeu :

Sans surprise, la gamme PC-98 de NEC aura également eu droit à sa version d’Ultima IV, d’ailleurs à peu près en même temps que la version PC-88. Contrairement à ce qu’on aurait pu attendre, il ne s’agit d’ailleurs pas d’une simple transcription de la version parue sur la génération précédente : la réalisation tire cette fois bel et bien parti de la haute résolution de la machine, pour s’approcher en jeu de ce qu’offrirait la version Sharp X68000 un an plus tard. Difficile de trouver des reproches à adresser à ces graphismes fins, lisibles et colorés, avec des illustrations nettement mieux réalisées que ce qu’offrent les versions occidentales – en fait, le seul regret viendrait plutôt des donjons, dont les murs demeurent en grands aplats vides plutôt que d’offrir des surfaces un peu plus détaillées. La musique, naturellement, est toujours présente, et de meilleure qualité que sur MSX et PC-88. En revanche et comme on pouvait le craindre, le jeu demeure intégralement en japonais.

Alors ? C’est joli, ça, ou pas ?

NOTE FINALE : 17,5/20

Sur PC-98, Ultima IV est encore un peu plus beau et un peu plus détaillé que sur les autres versions japonaises parues la même année. Une nouvelle fois, la réalisation est donc difficile à prendre en défaut, et cette version constituerait à n’en pas douter une excellente façon de découvrir l’épisode, voire même la saga, si elle n’était pas intégralement en japonais.

Version Sharp X1

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Année de sortie : 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Version testée : Version disquette japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – l’introduction du jeu :

1987 aura décidément été une année particulièrement faste pour les conversions d’Ultima IV sur les ordinateurs japonais. Voici donc le dernier bénéficiaire : le Sharp X1. Et pour le coup, les choses vont aller relativement vite, pour la bonne et simple raison qu’on hérite d’un portage qui est un clone pratiquement parfait de la version parue sur PC-88, avec exactement les mêmes limites – et les mêmes qualités. Une nouvelle fois, on a donc affaire à une itération plus colorée que sur les ordinateurs occidentaux, avec des thèmes musicaux bien rendus, aucune gestion de la souris, et des textes intégralement en japonais. Sans doute pas de quoi justifier de remuer ciel et terre pour dénicher cette version, mais si jamais vous parlez la langue de Mishima et que vous avez la chance d’avoir un Sharp X1 sous la main, vous ne devriez pas regretter de découvrir le jeu de cette manière.

Oui, je sais, du côté des ordinateurs japonais aussi ça commence à se ressembler…

NOTE FINALE : 17,5/20

Ultima IV sur Sharp X1 offre une version identique à celle publiée sur PC-88 : c’est assez joli, ça tourne bien, la musique est agréable, et c’est intégralement en japonais. Certainement pas la version ultime, mais rien qui ne soit apte à vous rebuter non plus – tant que vous parlez la langue, naturellement.

Version Amiga

Année de sortie : 1988
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200 doté d’un disque dur
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au moins, pour la version Amiga d’Ultima IV, les choses iront vite : prenez la version Atari ST, améliorez la qualité sonore sans avoir à connecter le jeu à une interface MIDI, et voilà ! Deux versions pratiquement identiques, à une petite nuance près (pour ceux qui suivent) : l’impossibilité d’importer son personnage dans Ultima V. Pour le reste, on profite malgré tout d’un des meilleurs portages sur les systèmes occidentaux.

Oui, je sais, ces images finissent par se ressembler…

NOTE FINALE : 17,5/20

Comme sur Atari ST, Ultima IV profite sur Amiga d’un de ses meilleurs portages dans à peu près tous les domaines. Une valeur sûre pour ceux qui souhaiteraient découvrir le titre aujourd’hui.

Version Sharp X68000

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 décembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Version testée : Version disquette
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Dans le long cortèges des adaptations japonaises d’Ultima IV, le Sharp X68000 aura fait partie de la deuxième fournée : celle de 1988. Il hérite pour l’occasion d’un portage directement repris du PC-98, avec des graphismes en haute résolution très colorés qui font toujours leur petit effet, et une bande-son fidèle aux thèmes de l’Apple ][, mais avec une qualité supérieure. En revanche, il gagne aussi une introduction entièrement redessinée, que vous pourrez d’ailleurs visionner ci-dessus. Comme pour beaucoup de portages sur les ordinateurs japonais, son principal défaut est d’offrir des dialogues inaccessibles à tous ceux qui ne parlent pas la langue – et dans un jeu où ils sont aussi importants, autant dire que c’est un problème. Cette version risque donc de rester davantage comme une curiosité aux yeux de la majorité des joueurs, elle aussi, ce qui est dommage car elle a clairement son charme.

C’est toujours aussi mignon, non ?

NOTE FINALE : 17,5/20

Sans surprise, cette itération Sharp X68000 d’Ultima IV se hisse clairement dans le haut du panier en termes de réalisation, bénéficiant même d’une introduction redessinée qui n’existait pas sur PC-98. Malheureusement, elle restera réservée à des joueurs parfaitement à l’aise avec le japonais écrit, ou connaissant déjà le déroulement du jeu par cœur.

Version NES
Ultima : Quest of the Avatar

Année de sortie : 1989
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

D’une façon intéressante lorsque l’on connait la rivalité qui opposait à l’époque SEGA à Nintendo, Ultima IV sera sorti à la fois sur NES et sur Master System, pour deux approches assez différentes.

Les graphismes du jeu sont relativement agréables

Sur NES, le jeu aura été adapté, exactement comme cela avait été le cas avec Ultima III. La refonte graphique et sonore est l’aspect le plus évident, avec une patte typique des J-RPG de l’époque, et des thèmes musicaux intégralement recomposés par Seiji Toda. Même si l’ensemble pourra déstabiliser quelque peu les joueurs ayant découvert la saga sur ordinateur, la réalisation est indéniablement plus aboutie que celle de l’opus précédent, et le tout a un charme certain. Non, les points clivants de cette version sont plutôt à chercher du côté du contenu.

L’IA des adversaires est bien plus lacunaire que dans la version originale

L’expérience de jeu, dans sa globalité, a été simplifiée – et les choses n’ont fait qu’empirer lorsque le titre a été localisé en occident. Ainsi, ce sont près de 40% des PNJs qui ont disparu du jeu ! Les villes et les donjons sont plus petits, les dialogues ont été remplacés par de simples commentaires (fini, les mots-clefs !), il n’y a plus ni nourriture, ni réactifs, ni gestion du vent… Dans le même ordre d’idée, votre équipe ne peut compter plus de quatre membres simultanément (le reste attendra au château de lord British), on ne voit plus les monstres errants sur la carte du jeu, l’introduction a disparu pour être remplacée par un texte dans le manuel, etc. Cela ne fait pas pour autant de ce portage un mauvais jeu, loin de là, mais cette expérience « light » risque vraiment d’être réservée à des joueurs intimidés par le contenu du jeu de base – et qui trouveront, de toute façon, des centaines de titres plus abordables pour découvrir le genre aujourd’hui.

Même les donjons ont rétréci au lavage

NOTE FINALE : 13/20

Comme cela avait déjà été le cas pour Ultima : Exodus, le principal défi de la version NES d’Ultima IV sera avant tout de parvenir à trouver son public. En faisant le choix de simplifier l’expérience de jeu, le titre est certes devenu plus accessible, mais il a aussi perdu une partie significative de sa richesse – et de son intérêt. Les gens hermétiques aux dialogues par mots-clefs et à l’aspect exploration du jeu apprécieront peut-être cette version un peu plus directe, mais les amateurs de la saga originale auront sans doute beaucoup de mal à y trouver leur compte.

Version Master System

Année de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – l’introduction du jeu :

Sur Master System, changement complet de philosophie : le titre aura été développé par SEGA of America (mais, ironiquement, jamais distribué aux États-Unis) et s’applique cette fois à être d’une fidélité totale au titre original. Et la bonne nouvelle est qu’il le fait très bien ! Dès la boîte de jeu, on retrouve l’illustration originale de Denis Loubet, avec la carte (cette fois sur papier), l’histoire de Britannia et le livre de la sagesse mystique fournis dans des formats réduits.

Tant pis pour les donjons en vue subjective, mais on s’y fait très vite

Cette fois, le jeu contient l’intégralité de l’introduction, des graphismes plus colorés que sur les versions informatiques sans trahir pour autant la patte de l’univers, les thèmes originaux remixés de manière très satisfaisante – il ne manque pratiquement rien. Les système de mot-clef a été conservé mais, faute de clavier, il fonctionne un peu à la manière de celui d’Ultima VII : vous ne pouvez aborder un sujet avec un personnage que si lui ou quelqu’un d’autre vous a déjà informé qu’il détient des connaissances à son propos. Cela interdit donc de faire une partie accélérée avec les informations déjà notées : votre groupe devra commencer par les obtenir.

Les combats sont même plus jouables que sur ordinateur !

L’interface est très bien pensée : pas besoin d’ouvrir le menu face à chaque porte, votre personnage le fera tout seul, et il est enfin possible de préparer plusieurs sortilèges en une fois. Les combats sont restés équivalents à ceux de la version originale – ils sont même légèrement supérieurs, puisqu’ils permettent de viser les adversaire en déplaçant un curseur comme dans Ultima V, autorisant ainsi enfin à attaquer ailleurs que dans les quatre directions cardinales. Seul petit sacrifice : les donjons ne sont plus vus à la première personne (l’exemple de Phantasy Star avait pourtant démontré que la Master System était plus que capable d’afficher ce type de graphismes) et on s’y déplace donc en vue de dessus. Mais à ce détail près, on se retrouve avec une version si bien pensée qu’elle peut sans difficulté postuler à être l’une des meilleures.

Voilà ce qu’on appelle un portage réussi !

NOTE FINALE : 17,5/20

Ultima IV sur Master System accomplit pratiquement un sans faute : c’est jouable, c’est ergonomique, c’est bien pensé, c’est bien réalisé. Le fait de ne plus bénéficier des donjons à la première personne est le seul petit regret que laissera cette version autrement absolument irréprochable.

Version FM Towns

Développeur : ORIGIN Systems, Ic.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Avril 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Pour les amateurs de retrogaming, lancer un jeu sur FM towns est un peu comme ouvrir une boîte de friandise : il est rare qu’on soit déçu par ce qu’on y trouve. Ici, le jeu s’ouvre pour l’occasion sur un menu vous laissant visionner une courte histoire de Sosaria/Britannia avant les événements du jeu (en japonais), avant de vous laisser lancer le titre en lui-même… en anglais, cette fois. On découvre pour l’occasion une introduction entièrement redessinée, avec de la musique CD en soutien, et on lance le jeu avec confiance… avant d’avoir la surprise de découvrir des graphismes directement tirés d’Ultima V, avec l’ajout assez inélégant d’une grande barre rose inutile au sommet de l’image. Un choix assez déstabilisant, surtout pour une machine qui aurait a priori largement pu afficher les mêmes graphismes que ceux de la version Sharp X68000, mais les fans de la saga – et en particulier ceux du cinquième épisode – ne devraient pas être déstabilisés outre-mesure. Dommage que les donjons n’aient, une nouvelle fois, connu aucune amélioration graphique, mais la présence de thèmes musicaux qualité CD et surtout le fait que le jeu soit, cette fois, intégralement praticable en anglais rendent cette version déjà nettement plus intéressante aux yeux du profane (et des autres).

Alors oui, ça surprend, surtout l’énorme barre rose, là

NOTE FINALE : 17,5/20

D’accord, cette version FM Towns d’Ultima IV n’est peut-être pas tout-à-fait celle qu’on attendait, avec ses graphismes basses résolutions repris d’Ultima V, mais le fait que cela lui confère un certain charme additionné à une musique qualité CD et surtout au fait que le jeu soit intégralement jouable en anglais lui confèrent malgré tout des qualités indéniables.

Exodus : Ultima III

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titres alternatifs : Ultima 3 (titre usuel), Ultima : Exodus (versions NES et MSX), Ultima : Kyōfu no Exodus (version Famicom), ウルティマ3 エクソダス (version PC-98)
Testé sur : Apple ][Atari 8 bitsCommodore 64MacintoshPC (DOS)PC-88AmigaAtari STNESMSXFM Towns
Versions non testées : FM-7, PC-98, Sharp X1
Disponible sur : Version PC émulée vendue au sein de la compilation Ultima Trilogy : I · II · III : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – Version Shareware Macintosh : Mac OS
En vente sur : Gog.com (Mac, Windows), LairWare.com (version Shareware Macintosh)

La saga Ultima (Jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version Apple ][

Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II – OS : Apple DOS 3.3 – RAM : 48ko
Mode graphique supporté : Haute résolution
Cartes sonores supportées : Mockingboard Sound I, Mockingboard Sound II, Mockingboard Sound/Speech I

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Ultima, épisode trois.


Le premier opus de la saga avait, on s’en souvient, révolutionné le monde du jeu de rôle et assis la réputation de son créateur Richard Garriott. En dépit d’une ambition un peu trop poussée et d’une réalisation buguée qui en fait aujourd’hui le mal-aimé de la série, Ultima II n’en avait pas moins surpassé le succès de son prédécesseur, s’écoulant à plus de 100.000 exemplaires – de quoi donner des ailes et surtout des moyens financiers à Lord British.

Lord British, inamovible, vous fera monter de niveau

Justement, les relations avec Sierra On-Line, qui avait distribué le deuxième épisode, n’étaient pas exactement au beau fixe ; une très bonne excuse pour que Richard Garriott s’en aille fonder une société qui allait faire date dans l’histoire vidéoludique : ORIGIN Systems. Et pour inaugurer cette société flambant neuve, quoi de mieux que le titre que tous les rôlistes de l’époque attendaient : Ultima III, alias Exodus ?

Partez à la découverte du monde de Sosaria

Sur le papier, force est de reconnaître qu’on a toutes les raisons de craindre une nouvelle resucée à peine modifiée de tous les principes inaugurés par le premier Ultima – c’était d’ailleurs extrêmement courant à l’époque, et ce n’est pas la saga des Wizardry qui n’aura pour ainsi dire pas apporté la moindre modification à son système de jeu pendant les trois premiers épisodes qui viendra affirmer le contraire. Le scénario propose ainsi une nouvelle fois d’aller tuer un grand méchant : après Mondain et Minax, c’est leur progéniture Exodus qui menace à présent le royaume de Sosaria – lequel a d’ailleurs changé de géographie depuis le premier épisode. Mais c’est au moment de rempiler pour une quête qui sent le réchauffé qu’on découvre que l’aventure pourrait en réalité s’avérer bien plus originale que ce à quoi on s’attendait.

Le système de combats a enfin cessé de se limiter à un bête échange de coups en duel avec un unique adversaire

Dès l’écran de création de personnage, on sent immédiatement que le système de jeu a sérieusement pris de l’épaisseur. Les différentes races disponibles, par exemple, n’auront pas les mêmes plafonds en terme de caractéristiques, et choisir les fragiles fuzzy pour en faire des guerriers est une aussi mauvaise idée que de choisir les puissants nains pour en faire des magiciens.

Pour posséder un navire, il faudra une fois de plus commencer par vous en emparer

Autre exemple d’une bonne dose d’injection de Donjons & Dragons : loin des simples archétypes des deux premiers épisodes, Exodus comporte cette fois pas moins de onze classes, chacune ayant accès à différentes armes, armures et types de sortilèges. Un paladin pourra ainsi lancer des sorts de clerc, alors qu’un druide pourra jeter à la fois des sorts de clerc et de magicien, le prix à payer étant un plus faible réservoir de mana.

Les canons des frégates sont extrêmement puissants, n’hésitez pas à les utiliser pour faire le ménage

Des sorts de clerc et de magicien ? Oui, et une sacrée pelletée d’entre eux : oubliez les quatre minables enchantements que votre personnage pouvait jeter, dans le meilleur des cas, dans Ultima II ; on trouve pas moins d’une trentaine de sorts répartis entre les deux écoles, chacun attribué à une touche différente du clavier. On peut dire que la magie fait enfin sa véritable entrée dans la saga, et elle va considérablement étendre vos possibilités une fois en jeu : soin, téléportation, destruction de pièges, sorts de masse, tout y passe, et cela contribue à transcender un système de combat qui en avait sérieusement besoin.

Non seulement compléter les donjons sera désormais indispensable, mais en plus, c’est devenu intéressant !

Celui-ci profite d’ailleurs d’une autre idée géniale qui est la véritable révolution du titre : vous n’êtes plus aux commandes d’un héros solitaire, mais bien d’un groupe de quatre personnes. Vous vous souvenez des échanges de coups sur la carte du jeu ? Oubliez-les : vous contrôlez toujours un unique avatar (représentant en fait l’intégralité de votre communauté) lors des déplacements en ville ou à la surface du globe.

Découvrir le continent perdu d’Ambrosia est toujours un grand moment

Mais que vous veniez à croiser un monstre errant et, surprise, le combat se déroule alors sur un nouvel écran où vous pourrez faire agir vos quatre héros au tour par tour, parfois face à une dizaine d’adversaires qui auront eux aussi accès à des capacités diverses. Cela semble familier ? Ne cherchez pas : ce mécanisme fondamental de n’importe quel J-RPG, c’est bel et bien Ultima III qui l’a créé. Conséquence immédiate : les combats, qui constituent une des composantes majeures du jeu, sont bien plus tactiques, bien plus riches et cent fois plus intéressants que ce que la saga avait pu offrir jusque là.

Ce mystérieux serpent jouera également un rôle majeur, comme quantité d’autres éléments du jeu, dans Serpent Isle

La difficulté en profite d’ailleurs pour monter de plusieurs crans, car entre l’impossibilité de fuir et la sauvegarde automatique, il est tout à fait possible qu’un groupe prometteur se fasse purement et simplement exterminer en tombant malencontreusement nez à nez avec un vol de dragons, vous obligeant alors à recréer une équipe à partir de rien. Le grinding sera une nouvelle fois le moteur d’une grande partie du jeu, l’or étant toujours aussi indispensable pour acquérir votre équipement, vos rations, et plus tard vos améliorations de caractéristiques.

Augmenter vos caractéristiques vous demandera d’abord de découvrir comment vous y prendre

Exodus est en effet, plus que jamais, un jeu basé sur l’exploration – et le fait que vous ne sachiez pas comment augmenter vos statistiques au début de la partie est parfaitement volontaire. Il faudra une nouvelle fois mener l’enquête en interrogeant les très nombreux PNJs du jeu, qui sauront enfin vous donner des indices pertinents et vous inviter dans un monde rempli de bonnes idées.

Les sanctuaires, des éléments capitaux dans la saga des Ultima

Saurez-vous dénicher la cité cachée de Dawn, qui n’apparait qu’à certaines phases de lune ? Trouverez-vous l’accès au continent perdu d’Ambrosia ? Saurez-vous découvrir la vraie nature d’Exodus et trouver le moyen de le vaincre ? Saurez-vous vous enfoncer au plus profond des donjons, qui profitent pour la première fois de murs en surfaces pleines, et qui se révèlent enfin aussi bien conçus qu’indispensables à la réalisation de votre quête ?

Une exploration poussée se verra bien souvent récompensée

Autant en profiter pour le préciser de suite, Ultima III est, à coup sûr, l’épisode de la trilogie originelle qui a le mieux vieilli, et de très loin. Certes, il faudra encore composer avec une interface assez lourde et avec une réalisation antédiluvienne (même si les thèmes musicaux font leur première apparition pour peu que votre Apple II soit équipé d’une Mockingboard), mais on a enfin l’impression de jouer à un véritable jeu de rôle – et le fait que l’expérience ait cette fois une utilité y est sans doute pour quelque chose.

Aller au fond d’un donjon est une chose, mais il s’agira encore d’en ressortir !

Pour peu que l’on prenne le temps d’apprivoiser le titre, on prend cette fois réellement plaisir à bâtir ses groupes successifs jusqu’à parvenir à en construire un capable de s’aventurer dans le vaste monde. Les villes sont remplies de couloirs difficiles d’accès, de personnages impossibles à rejoindre sans avoir trouvé une marque ou un bonus permettant de franchir les flammes ou les champs de force, et on a tout intérêt à noter les informations que nous donnent les habitants de Sosaria sous peine de ne jamais parvenir à accéder au donjon final et à son affrontement ô combien surprenant.

Les monstres ne sont pas tous hostiles, ce qui ne les rend pas polis pour autant !

Bref, pour peu que l’on s’intéresse à l’histoire du jeu de rôle et que l’on morde à ce concept de monde où tout est à découvrir, on n’a cette fois plus besoin d’être poussé par la nostalgie pour se lancer dans un programme qui constitue un des actes de naissance du jeu de rôle moderne. Tous les fans vous le diront : si jamais vous souhaitez découvrir la saga, oubliez les deux premiers opus et commencez par là – et si en plus vous pouvez mettre la main sur la version originale du jeu, avec la splendide illustration de Denis Loubet en couverture et sa magnifique carte en tissu, la magie n’en sera que plus grande. Vous pourrez peut-être alors ressentir cette étrange fascination face à ces jeux dont le principal attrait ludique est précisément de découvrir ce que l’on doit faire.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14,5/20 Ne vous fiez pas à ses airs d'Ultima 1.3 : Exodus : Ultima III aura non seulement représenté un bouleversement dans l'univers du jeu de rôle, mais il constitue également le premier épisode de l'antique saga à avoir réellement résisté à l'usure du temps. Tactique, complexe, imaginatif et prenant, le premier titre publié par ORIGIN Systems représente un des meilleurs exemples de ces jeux basés sur la découverte et l'exploration où le moindre indice peut révéler l'accès à des cités cachées, à des continents perdus ou à des donjons retors. Si l'essentiel de l'aventure repose une fois encore sur les combats, ceux-ci sont devenus suffisamment bien agencés pour nous donner envie, enfin, de passer plusieurs dizaines d'heures à percer le secret du terrible Exodus. Si vous voulez avoir une chance de découvrir ce qu'est la véritable âme du jeu de rôle des années 80, vous ne pouvez tout simplement pas passer à côté de ce jeu. CE QUI A MAL VIEILLI : – Énormément de grinding – Interface assez lourde à l'emploi – N'espérez pas jouer sans le manuel – Difficulté redoutable lors des premières heures de jeu

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Exodus sur un écran cathodique :

Version Atari 8 bits

Développeur : Chuck Bueche
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Atari 800
Configuration minimale : RAM : 48ko
Pour espérer bénéficier de ces couleurs, il faudra obligatoirement jouer en NTSC

Comme les deux premiers opus avant lui, Ultima III aura également profité de sa version Atari 8 bits. Et comme les deux premiers opus avant lui, sa réalisation est extrêmement proche de la version Apple II, l’avantage étant que vous n’aurez cette fois pas besoin d’une carte son pour profiter de la musique. L’inconvénient, en revanche, est que vous devrez une nouvelle fois jouer en noir et blanc sur un téléviseur PAL, et avec des teintes parfois assez psychédéliques en NTSC (celles-ci variaient selon le modèle et ses réglages, les joueurs les plus chanceux pouvaient donc profiter de couleurs équivalentes à celles de la version originale). Pour la petite histoire, cette version (comme beaucoup d’autres) aura été programmée par Chuck « Chuckles » Bueche, camarade de chambre de Richard Garriott au lycée, et co-fondateur d’ORIGIN Systems.

NOTE FINALE : 14,5/20

Sans surprise, Exodus : Ultima III sur Atari 8 bits offre une réalisation très proche de celle observée sur Apple II, les graphismes pouvant souffrir selon le modèle de votre ordinateur et de votre écran tandis que la musique profitera, elle, des bonnes capacités matérielles de la machine dans le domaine. Une bonne alternative pour ceux qui n’auraient pas la version originale sous la main mais voudraient profiter d’un portage très fidèle.

Version Commodore 64

Développeur : Chuck Bueche
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Pas de facéties cette fois-ci pour la version C64 : le jeu est toujours aussi sombre, mais les couleurs restent un peu mieux choisies

Curiosité : Ultima III sur Commodore 64 (une nouvelle fois programmé par Chuck Bueche) est en fait, pour la partie graphique du code, la version Apple II réinterprétée à la volée par le processeur de la machine. Avantage : les graphismes sont plus colorés et plus « logiques » que ceux de la version de base, avec des briques rouges ou des montagnes marrons. Inconvénient : cela rend le jeu plus lent que sur Apple II, et le Fastloader n’existant pas encore en 1983, attendez-vous à aller vous préparer un café à chaque fois que le jeu se lancera. On notera également que les donjons, eux, sont en noir et blanc là où ils étaient en couleurs dans la version originale. En revanche, du côté de la musique, la puce SID du C64 s’en sort bien mieux que la Mockingboard de l’Apple II. À noter également que déplacer ses personnages sur un clavier européen peut se révéler problématique.

NOTE FINALE : 14/20

Si, dans l’absolu, Ultima III sur Commodore 64 profite d’une réalisation très légèrement supérieure à celle de l’Apple II (à part pour ce qui est des donjons), des temps de chargement à rallonge pénalisent l’expérience de jeu, particulièrement aujourd’hui où on a quelque peu perdu l’habitude de rester assis cinq minutes sans rien faire devant un écran de chargement. C’est dommage car, à ce détail près, le jeu est toujours aussi bon.

Du côté des fans :

La lenteur des chargements d’Ultima III aura fait réagir une partie de la communauté, toujours vivace, du Commodore 64. MagerValp aura donc reprogrammé une version nommée Ultima III Gold dont le principal avantage est d’ajouter une gestion du fastloader histoire d’accélérer un peu les choses. On notera que le jeu tient désormais sur une seule face de la disquette, que la sauvegarde automatique a été supprimée, et que plusieurs bugs ont également été corrigés. Les joueurs désireux de découvrir cette version pourront la trouver ici.

Version Macintosh

Développeur : James Van Artsdalen (1985) – LairWare (1995)
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc. (1985) – LairWare (1995)
Date de sortie : Septembre 1985 (version ORIGIN Systems) – 1995 (version LairWare)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version LairWare 1.3 testée sur iMac G3, Mac OS 9.0.4
Configuration minimale :
La version de 1985 est déjà particulièrement ergonomique

Le Macintosh ne faisant jamais tout à fait la même chose que tout le monde, il va falloir s’intéresser ici à deux versions. La première aura été commercialisée en 1985, et peut s’avérer d’autant plus délicate à faire fonctionner qu’elle est dotée d’un système de protection de copie tellement intrusif qu’il peut carrément aller jusqu’à endommager votre lecteur de disquette en cas de copie ! Une faute de goût qui pénalise une version qui ne transportera pas particulièrement par sa réalisation (c’est en haute résolution, certes, mais pas de quoi donner des complexes en version en couleurs, ni même à la version monochrome de l’Atari ST qui tournait, elle, en 640×400 contre 512×382 ici), notamment parce qu’il n’y a pas l’ombre d’une piste musicale, mais bien par l’exceptionnelle lisibilité de son interface. Pratiquement toutes les informations en-dehors des feuilles de personnage sont en permanence à l’écran, et s’il est toujours possible de faire usage des raccourcis clavier, l’usage de la souris apporte un confort franchement bienvenu, en particulier au moment d’équiper les personnages. On a même droit à un menu déroulant pour les sortilèges ! Bref, si vous parvenez à la faire fonctionner, c’est comme très souvent une des versions les plus ergonomiques et les plus jouables.

C’est tout de suite plus lisible, non?

La deuxième version, pour sa part, a la particularité d’être toujours en vente, pour 5$, sur le site de LairWare. On constatera d’ailleurs qu’elle existe en plusieurs versions, et que la plus ancienne offre déjà des graphismes en haute résolution, des thèmes musicaux, des donjons en 3D avec des murs texturés, un outil de création de personnage simplifié qui choisit automatiquement par défaut la meilleure race et les meilleures caractéristiques en fonction de la classe au moment de créer un personnage ; il est même possible de consulter la liste des sortilèges ou la carte du jeu sans avoir à se référer au manuel et, naturellement, le tout est intégralement jouable à la souris. Autant dire que non seulement cette version est la mieux réalisée, mais c’est également la plus ergonomique et de très loin !

Les puristes ne devraient avoir aucune faute de goût à reprocher à cette version

Les dernières versions offrent même de nouvelles possibilités, parmi lesquelles celle de remplacer la réalisation haute résolution par celle des version Apple II, C64, NES, PC ou même Mac noir et blanc originale, mode classique pour les puristes, adaptations de gameplay pour les autres… Bref, autant dire que si vous avez un Mac sous la main, il serait dommage de ne pas tester la démo du jeu histoire de vous laisser le temps de vous faire une opinion : tout le contenu du jeu y est présent à l’exception du continent caché d’Ambrosia, vous devriez donc avoir largement de quoi vous faire une idée.

Les dernières versions vous permettent de paramétrer les graphismes et même l’interface (source: https://www.lairware.com/ultima3)

NOTE FINALE : 15,5/20 (version ORIGIN Systems) – 16/20 (version LairWare)

Le Macintosh est souvent une machine qui met tout le monde d’accord avec les jeux de rôles, et ce n’est pas Ultima III qui va venir faire mentir cette affirmation : on tient ici sans discussion possible deux des meilleures versions du jeu. Celle de LairWare ayant l’avantage d’offrir de nombreuses options de customisation et de fonctionner sur les OS modernes, on ne peut que conseiller d’aller la découvrir.

Version PC (DOS)

Développeur : James Van Artsdalen
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 1.1 – RAM : 128ko
Modes graphiques supportés : CGA, CGA Composite
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne
Le jeu tel qu’il est vendu à l’heure actuelle. Ce n’est pas monochrome, mais presque

Parue une nouvelle fois en 1985, la version PC d’Ultima III souffre, dans les grandes lignes, des mêmes défauts que le portage d’Ultima II : une réalisation pensée pour un mode CGA composite qui n’existe plus (sauf sur certaines versions non-officielles de DOSBox), et un jeu beaucoup trop rapide sur les systèmes puissants (problème heureusement corrigé par ce même DOSBox, qui demeure le seul moyen de faire tourner le programme sur un ordinateur contemporain). Dans le même ordre d’idée, la musique est passée à la trappe, et seuls les bruitages sortiront du haut-parleur interne. Conséquence immédiate : on se retrouve avec la version la plus à la ramasse sur le plan technique, et c’est bien évidemment la seule à être encore disponible à la vente. Fort heureusement, on pourra une nouvelle fois compter sur le secours des fans :

DOSBox Daum vous permettra d’émuler le CGA composite, mais c’est tout de suite plus flou

Du côté des fans:

L’équipe responsable du très bon patch sur Ultima II aura également œuvré sur Ultima III, permettant ainsi à la version PC de se hisser à la hauteur des autres portages. La liste complète des changements peut être consultée à cette adresse, mais l’ajout le plus évident est celui de trois nouveaux modes graphiques, allant de l’émulation du CGA composite aux 256 couleurs du VGA. Le jeu peut également enfin profiter de thèmes musicaux MIDI empruntés aux versions Apple II et C64. On notera également de petits ajustements, rééquilibrages, et même l’existence d’un mod permettant de jouer sur une carte correspondant à celle de l’île de Lord British dans Ultima I. Bref, tout ce qu’il faut pour profiter du jeu dans les meilleures conditions. Vous pourrez trouver le patch ici.

En CGA Composite, on se croirait presque sur Apple II (et l’image est plus nette qu’avec l’émulation sous DOSBox)
En EGA, on se croirait presque dans Ultima IV
En VGA… bon, je crois que vous avez compris l’idée

NOTE FINALE : 13/20 (version originale) – 15/20 (version patchée)

Le PC n’était clairement pas une machine de jeu en 1985, et c’est une nouvelle fois avec le secours des fans que ce qui était l’un des portages les plus limités d’Ultima III devient l’un des meilleurs. Si la version d’origine se joue en 4 couleurs et dans un silence de mort, la version patchée vous laissera le soin de configurer votre expérience en fonction de votre degré de nostalgie. Un très bon moyen de profiter d’une version réellement jouable.

Version PC-88

Développeur : Thinking Rabbit (1985) – ORIGIN Systems, Inc. (1989)
Éditeur : StarCraft, Inc. (1985) – Pony Canyon, Inc. (1989)
Date de sortie : Décembre 1985 (StarCraft) – Novembre 1989 (Pony Canyon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui (StarCraft) – Non (Pony Canyon)
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale :
Version 1985 : ça a son petit charme, mais bon sang que cette interface est envahissante…

Comme cela s’était déjà produit avec Ultima II sur PC-88, Exodus aura également connu deux versions sur l’ordinateur de NEC, la première portée en 1985 par StarCraft avant que Pony Canyon ne reprenne le bébé en 1989. La première version, comme vous pourrez rapidement le constater sur les images, évoquait un peu ce à quoi aurait pu ressembler le titre sur un PC CGA avec une palette différente : la haute résolution est très sous-exploitée, et un titre légèrement envahissant vient réduire une fenêtre de jeu qui s’en serait bien passée, déjà coincée dans une interface colossale. Avec la version de 1989, les choses vont déjà sensiblement mieux : la résolution est plus élevée, la palette de couleurs plus étendue, et on hérite même de thèmes musicaux, cette fois. Néanmoins, la version de 1985 pourra présenter un avantage aux yeux des joueurs européens : celui d’être jouable en anglais, ce qui n’est pas le cas de la version de Pony Canyon. Dans tous les cas, et quitte à découvrir le titre sur un ordinateur japonais, les joueurs seront indéniablement plus inspirés de le faire sur FM Towns.

En 1989, c’est plus lisible et plus beau, pas de problème

NOTE FINALE : 13/20 (version 1985) – 15/20 (version 1989)

Exodus aura eu le droit non pas à une, mais bien à deux apparitions sur PC-88. Si la version de 1985 assure le minimum vital, celle de 1989 sera déjà plus agréable à l’œil et surtout à l’oreille – à condition, néanmoins, de parler japonais.

Version Amiga

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Octobre 1986
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Le bleu iconique de la saga a peut-être disparu, mais c’est quand même moins triste

Ultima III aura été le premier épisode de la saga à débarquer sur Amiga (ce qui lui aura quand même pris trois ans, et pour cause : en 1986, l’Amiga 500 n’était même pas encore sorti). Matériel 16 bits oblige, autant dire que le titre n’a aucun mal à surclasser la version Apple II à tous les niveaux. Graphiquement tout d’abord, on est peut-être à des kilomètres d’un titre comme Dungeon Master, mais il n’empêche que c’est bien plus coloré sans trahir en rien la patte graphique de la saga.

La création de personnage est plus accessible, mais mieux vaut garder le manuel à portée de main malgré tout

Musicalement, la puce Paula permet également de bénéficier de thèmes très réussis. Du côté de la maniabilité, le jeu tire largement profit de la souris: non seulement la création de personnage est désormais bien plus ergonomique, mais on peut facilement consulter les caractéristiques d’un personnage et l’équiper d’un simple clic sur son nom. La plupart des actions du jeu nécessitent toujours de passer par le clavier, mais l’interface est malgré tout plus intuitive. Certes, il s’était passé beaucoup de choses en trois ans, et Ultima III n’était plus franchement à la pointe de la technologie ni du game design en 1986, mais cela n’empêche pas que cette version soit une des meilleures pour espérer découvrir le jeu aujourd’hui. On notera également que le jeu tenait sur une seule disquette, ce qui permettait de ne pas être parasité par les changements de disque pendant une partie. Une excellente version.

Les combats sont quand même plus vivants avec un peu de couleur !

NOTE FINALE : 15,5/20

C’est plus beau, c’est plus jouable, la musique est meilleure : quitte à opter pour une version d’Ultima III, difficile de se tromper avec ce portage sur Amiga. L’usage de la souris fait un bien fou, et l’univers est devenu plus coloré sans trahir en rien l’atmosphère de la saga. Bref, c’est un sans faute.

Version Atari ST

Développeur : Robert Hardy
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Octobre 1986
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Interface MIDI supportée
On est en terrain connu, mais pourquoi s’en plaindre ?

On sait généralement à quoi s’attendre avec une version Atari ST développée parallèlement à une version Amiga, et on n’aura pas de surprise de ce côté : Ultima III sur ST est une version identique à 95% au portage sur Amiga. Du côté des graphismes comme de l’interface, les deux adaptations sont jumelles. La différence est, comme souvent, à aller chercher du côté sonore : la musique est très légèrement inférieure à ce qu’on a pu entendre sur Amiga. Pas de quoi se relever la nuit, mais si vous cherchez absolument une raison pour opter en faveur d’une version plutôt que d’une autre… À noter que le jeu pouvait également être lancé en haute résolution noir & blanc pour les joueurs ne disposant que d’un écran monochrome.

Même les joueurs cantonnés à un écran monochrome ne se sentiront pas lésés

NOTE FINALE : 15,5/20

Ultima III sur Atari ST accomplit sensiblement la même performance que sur Amiga, avec une réalisation sonore légèrement inférieure. Les possesseurs d’écran monochrome, en revanche (s’il en existe encore), seront heureux de profiter d’un mode en noir et blanc, certes, mais aussi en haute résolution.

Version NES
Ultima : Exodus

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : FCI
Date de sortie : 9 octobre 1987 (Japon) – Février 1989 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version américaine
Configuration minimale : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par pile
Il suffit de changer quelques pixels, et on devine immédiatement qu’on est sur NES

ORIGIN Systems aura tenté à de nombreuses reprises de dresser des ponts avec le monde des consoles – une démarche compréhensible quand on mesure à quel point ce marché était bien plus important que le marché informatique. La saga Ultima aura bien évidemment fait office de tête de gondole, avec des philosophies très différentes selon les systèmes. Si certaines conversions se voulaient aussi fidèles que possible aux jeux tels qu’ils étaient paru sur ordinateurs, les consoles estampillées Nintendo auront souvent profité de versions copieusement modifiées, et ce Ultima : Exodus ne fait pas exception.

La feuille de personnage est facilement accessible, mais attendez-vous à passer beaucoup de temps à parcourir des menus

Dans les grandes lignes, l’aventure suit toujours scrupuleusement le même déroulement que celle de la version originale. À l’exception de la patte graphique dont l’évolution est la plus évidente (je vous laisse observer les captures d’écran), le programme aura connu des dizaines de petites modifications altérant parfois drastiquement l’expérience de jeu. En tenir une liste exhaustive s’avèrerait rapidement fastidieux, mais notons quand même que :

  • Le jeu ne peut plus dorénavant être sauvegardé que dans une auberge
  • Les monstres ont une IA plus limitée, mais ont davantage de points de vie
  • Chaque monstre a désormais son propre sprite, plutôt que celui-ci soit partagé au sein d’un même type de monstre
  • De nouveaux objets sont nécessaires pour avancer dans le jeu : par exemple, les armes « exotiques » (devenues entretemps « mystiques ») ne peuvent désormais être déterrées qu’avec une pioche dorée pour les armures et argentée pour les armes.
  • On peut désormais fuir les combats en faisant usage d’un objet appelé « Compass Heart ».
  • Tous les dialogues du jeu ont été modifiés
  • Tous les thèmes musicaux sont différents
  • Les personnages peuvent désormais attraper froid en ouvrant certains coffres, une altération d’état difficile à soigner
  • Des casinos ont fait leur apparition
  • La vitesse de déplacement est impactée par le type de terrain
  • etc.
Les combats ont un peu perdu en finesse

Autant dire qu’on obtient une version assez différente, parfois déstabilisante, mais qui offre l’avantage d’être entièrement jouable avec deux boutons. Les joueurs habitués au J-RPG risquent de trouver la réalisation du jeu assez sommaire et de mettre du temps à adopter le système de jeu, les joueurs sur ordinateur risquent de se sentir nus sans leur clavier ni leur souris, autant dire que ce portage aura probablement un peu de mal à trouver son public – mais les joueurs les plus curieux seront sans doute heureux de découvrir cette version « alternative ».

NOTE FINALE : 14/20

Difficile de noter un jeu qui, malgré des qualités évidentes, se trouve dans la position de ne plaire à personne ; ni aux puristes des versions informatiques qui se sentiront vite perdus sans leur clavier et leur souris, et à qui le changement d’ambiance ne plaira sans doute pas, ni les habitués du J-RPG qui auront du mal à trouver leurs marques. L’essentiel de l’expérience de jeu est pourtant toujours là, et ceux qui feront l’effort de s’impliquer une heure ou deux auront toutes les raisons d’avoir envie de prolonger l’expérience.

Version MSX
Ultima : Exodus

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 1988 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2
Si cette image vous rappelle quelque chose, c’est normal

Quitte à sortir sur les systèmes japonais, il aurait été dommage qu’Exodus fasse l’impasse sur l’un des plus poluaires d’entre eux, à savoir le MSX. On aurait pu s’attendre à une conversion fidèle des versions informatiques, comme sur tous les autres ordinateurs japonais, mais pour l’occasion c’est bel et bien d’un portage de la version NES qu’il s’agit. Un portage d’ailleurs pratiquement identique, que ce soit sur le plan du contenu ou de la réalisation – seul le défilement est un peu moins fluide, comme c’était assez souvent le cas avec la machine. Néanmoins, pour le joueur occidental lambda, cette version souffre d’un handicap auquel avait échappé la cartouche NES : elle n’est jamais sortie du Japon et, par conséquent, n’est pas disponible en anglais. Dès lors, autant dire que ceux qui seraient vraiment curieux de découvrir le jeu dans cette approche « remaniée » seraient aussi bien inspirés de le faire directement sur NES.

NOTE FINALE : 13,5/20

Copie carbone de la version NES (à quelques performances techniques très légèrement en deça près), Exodus sur MSX souffre surtout de n’être disponible qu’en japonais, ce qui le réservera à un public extrêmement ciblé. Le reste se tournera soit vers la version NES traduite en anglais, soit directement vers des versions sur ordinateur globalement supérieures.

Version FM Towns
Ultima Trilogy : I · II · III

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Octobre 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Si vous avez déjà lu les test des deux premiers opus de la série, la nouvelle ne devrait pas en être une pour vous: la première trilogie de la saga Ultima aura été adaptée sur FM Towns en 1990. Exodus aura donc bénéficié, pour l’occasion, du même traitement que les deux précédents épisodes, à savoir une interface (toujours au clavier) légèrement repensée, des graphismes en haute résolution, des bruitages digitalisés, des donjons texturés, et des thèmes musicaux originaux pour accompagner l’aventure en plus d’une petite introduction ajoutée pour l’occasion. Tout le contenu du jeu est là de la première à la dernière molécule – y compris l’animation du groupe d’aventurier rencontrant un sort tragique face à dragon – et le mieux, c’est qu’il est toujours là en anglais, sauf pour les textes de l’introduction, donc. Comme toujours, le résultat est graphiquement très plaisant, avec une fenêtre de jeu bien lisible et des graphismes très colorés qui changent un peu de la dominante noire de la plupart des autres versions – je trouve même le résultat plus « cohérent » par rapport au style graphique de la saga que ce qui a pu être observé sur la version Macintosh. Bref, si l’on peut regretter que l’interface ne tire pas parti de la souris, tout le reste est difficile à attaquer, et cette version peut encore être parcourue aujourd’hui avec grand plaisir.

C’est joli et c’est lisible. Que demander de plus ?

NOTE FINALE : 15,5/20

Si vous possédez la trilogie Ultima originale sur FM Towns, Exodus ne sera clairement pas l’épisode qui vous fera regretter l’investissement. Tout est toujours à sa place dans une version entièrement en anglais qui restera comme une des meilleures, même si l’on peut regretter que l’interface n’ait pas évolué depuis la version Apple II.

Ultima II : The Revenge of the Enchantress…

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Richard Garriott (alias Lord British)
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Titres alternatifs : Ultima II : Revenge of the Enchantress (écran-titre), ウルティマ2 女魔法使いの復讐 (Japon), Ultima II : Revenge of Enchantress (PC-98 – Édition Pony Canyon)
Testé sur : Apple ][Atari 8 bitsCommodore 64PC (DOS)Atari STMacintoshFM-7PC-88PC-98MSXFM Towns
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – Au sein de la compilation Ultima 1+2+3
En vente sur : Gog.com (Mac, Windows)

La saga Ultima (jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

Version Apple ][

Date de sortie : 1982
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple II
Configuration minimale : Système : Apple II – OS : Apple DOS 3.3 – RAM : 48ko
Mode graphique supporté : Haute résolution

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1981, Richard Garriott avait, on s’en souvient, frappé un grand coup avec un jeu de rôle terriblement ambitieux : Ultima. En permettant au joueur de mettre enfin le nez hors des donjons dans un monde ouvert présenté, luxe absolu, dans une interface graphique, le créateur britannique avait soudain laissé sa marque au sein d’une production vidéoludique, certes balbutiante, mais également en plein essor. Et à une époque où la micro-informatique elle-même était un concept en plein rodage (on commençait à peine à sortir de l’ère de la « mini-informatique »), les joueurs pratiquant leur loisir sur un ordinateur personnel constituaient encore une catégorie suffisamment marginale pour que les 50.000 exemplaires d’Ultima vendus représentent alors un véritable tabac apte à donner des idées de suite.

Début de l’aventure: ça ressemble beaucoup à Ultima I, mais cette fois l’eau est animée…

Des idées, justement, Richard Garriott en avait à revendre. Et même si California Pacific Computer, qui avait édité le premier épisode, venait de mettre la clé sous la porte, Sierra On-Line était très intéressé à l’idée de récupérer une future licence à succès.

Mieux vaut ne pas rater sa création de personnage, à cause du bug vous interdisant d’augmenter votre force

Ce qui tombait d’ailleurs bien, car la compagnie américaine était également la seule à bien vouloir distribuer une carte en tissu avec le deuxième épisode, le genre d’exigence dont Richard Garriott était coutumier (cela pourra paraître étrange à l’ère du dématérialisé, mais le packaging aura été un élément important du succès de la saga, à une époque où on n’était habitué ni aux grosses boîtes cartonnées ni aux épais manuels illustrés). Après avoir programmé une aventure proposant des continents lointains, des combats spatiaux et même un voyage temporel, qu’allait cette fois pouvoir offrir Lord British aux joueurs tremblants d’excitation ? L’inspiration sera venue du film Bandits Bandits de Terry Gilliam : le voyage dans le temps allait faire son retour, mais il serait cette fois au cœur de l’expérience de jeu.

Comme dans le premier opus, Lord British fera simplement office de distributeur de points de vie

Vous allez donc une nouvelle fois incarner un héros solitaire, dont vous serez libre de choisir le nom, la race, la classe, le sexe et les caractéristiques. Mais première surprise : cette fois, l’aventure ne se déroule plus sur le royaume lointain de Sosaria mais bel et bien directement sur Terre… et même dans tout le système solaire ! Le scénario repose une nouvelle fois sur un grand méchant : Mondain à peine vaincu, son amante nommée Minax vient crier vengeance. Et elle ne fait pas les choses à moitié, puisqu’on la suspecte d’être intervenue à l’origine des temps pour engendrer une suite d’événements conduisant la planète directement à un holocauste nucléaire en 2111. Votre rôle consistera donc à l’arrêter en trouvant le moyen de l’affronter dans sa tour située à l’Ère des Légendes, à une époque où les dragons, les griffons et les créatures mythologiques parcouraient encore la surface du globe.

Le combat final vous demandera surtout de courir

Le jeu reprend donc, sans surprise, les mécanismes inaugurés par le premier épisode. Les systèmes de combat, de déplacement, de dialogue, de commerce et de transport sont pratiquement identiques, tout comme les donjons qui se visitent toujours à la première personne grâce à un moteur largement inchangé depuis Akalabeth. Seul changement évident : les villes, qui au lieu de se cantonner à un écran simple, emploient désormais les mêmes cases que le reste du jeu et ont sérieusement gagné en taille – vous offrant ainsi l’occasion d’aller débusquer des dizaines de PNJs. Vous débuterez cette fois la partie en Amérique du Nord en 1423, et vous serez libre de débuter une exploration qui vous guidera non seulement de ville en ville et de continent en continent, mais aussi et surtout d’Age en Age puisque Ultima II inaugure un concept qui prendra une forme légèrement différente dans les autres épisodes de la saga : les Portes de Lune (Moongates).

Les donjons sont toujours de la partie, même s’ils ne servent à rien

Ces portails, dont la position et la destination sont consultables sur la fameuse carte en tissu livrée avec le jeu, vous serviront non seulement à vous téléporter dans l’espace mais également dans le temps. Entre le moyen-âge, la Pangée, le monde contemporain, l’Age des Légendes et le monde post-destruction nucléaire, autant dire que la surface de jeu est proprement gigantesque, d’autant que chaque Age comprend ses propres villes, tours et donjons.

Les Portes de Lune, la seule vraie idée originale du jeu

Et encore cela ne comprend-t-il pas les autres planètes du système solaire sur lesquelles vous serez également susceptible de voyager dès que vous aurez pu acquérir le matériel adéquat. Pas de séquences d’arcade avec chasseurs TIE à détruire cette fois-ci : il vous suffira d’entrer des coordonnées de saut consultables dans le manuel (conseil : évitez d’entrer celles du soleil). Mais pour espérer arriver au bout de l’aventure, il vous faudra également découvrir les coordonnées de la mystérieuse planète X…

L’Age des Légendes est un endroit particulièrement dangereux

Sans surprise, le jeu repose une nouvelle fois sur des objectifs atrocement flous qu’il vous faudra quérir en interrogeant tout le monde afin de comprendre comment avoir une chance de vaincre Minax. Le problème est que les informations disponibles sont si rares que parvenir à boucler l’aventure sans avoir une solution sous la main tient de l’exploit.

La nourriture représente la ressource la plus importante du jeu, juste devant l’or

Le simple fait de faire progresser votre personnage, par exemple, est une nouvelle fois particulièrement fumeux : il existe un seul personnage dans tout le jeu capable de faire augmenter vos caractéristiques sans que son identité vous soit communiquée nulle part. Pire encore : c’est l’or et non l’expérience qui vous permettra de progresser, et ça ne marche même pas à tous les coups ! Pour ne rien arranger, la version originale du jeu est truffée de bugs : non seulement il est impossible de faire progresser votre force (conseil, accordez-y au minimum 29 points lors de la création de personnage, sans quoi vous êtes fichu), mais en plus chaque caractéristique dépassant les 99 points est réinitialisée à zéro, et le faire d’avoir un score cumulé d’intelligence et de charisme dépassant les 160 provoquera une hausse délirante des prix!

Les indices du jeu sont plus que lacunaires

Le vrai problème est que tout le programme déborde d’exemples d’un game design mal pensé et d’une aventure un peu trop ambitieuse pour son propre bien. Il est ainsi tout à fait possible de finir le jeu sans jamais mettre les pieds dans un seul donjon : ceux-ci ne servent à rien d’autre qu’à y accomplir du grinding bête et méchant. Dans le même ordre d’idée, une très large partie des planètes du système solaire sont purement et simplement vides : il n’y a strictement rien à y voir ni à y trouver.

Votre personnage n’est pas encore l’Avatar : rien ne vous interdit d’exterminer toute une ville

Surtout, l’essence même du jeu consiste à passer 95% de son temps à aligner des combats à un bouton (plus quatre sortilèges par classe de lanceur de sorts, youpi) pour accumuler de l’or, puisque l’expérience ne sert à rien. La moitié de cet or passera dans l’achat de rations, la gestion de la nourriture étant l’un des principaux dangers du jeu. Mais pour acquérir un bateau, en revanche, l’or ne vous servira à rien : il faudra attendre qu’un équipage de pirate ait le bon goût d’accoster près de vous – et encore, à condition d’avoir des « blue tassles » dans votre inventaire ! La quasi-totalité des objets utiles du jeu sont d’ailleurs lâchés par des voleurs, qui risquent autant de vous voler des consommables (voire des objets importants !) que de vous permettre d’en obtenir. La phase de recherche d’indices est, comme on l’a déjà vu, extrêmement frustrante, d’autant plus que la moitié des éléments importants du jeu se trouvent dans une seule et unique ville située à une seule et unique période. Bref, on sent bien que le déroulement et l’équilibrage de l’aventure n’ont pas spécialement été travaillés, ce qui se ressent dans la durée de vie du jeu, qu’un joueur sachant ce qu’il a à accomplir pourra terminer en un peu plus de trois heures.

Les canons des frégates sont extrêmement puissants. Utilisez-les pour faire le ménage !

Ultima II est souvent considéré comme l’épisode le plus faible de la saga, une affirmation qu’il est difficile de contredire après s’être essayé au jeu. En dépit de l’idée originale du voyage dans le temps (qui ne fait finalement qu’étendre la surface de jeu), les innovations par rapport au premier épisode sont quasiment inexistantes, et l’aspect à la fois mal pensé et mal fini du jeu fait qu’on se retrouve au final devant un simple logiciel de grinding qui peine farouchement à se montrer intéressant, la faute à des combats toujours aussi limités et à une progression encore plus boiteuse que dans le premier opus. En y ajoutant un combat final reposant sur de laborieux allers-et-retours et qui prête plus à sourire qu’autre chose, on se retrouve avec un jeu qui aurait pu être fantastique, mais qui n’est au final qu’une maquette mal dégrossie d’une aventure qui aurait pu être beaucoup plus intéressante. Première leçon du game design : l’ambition n’est rien sans se donner les moyens de la matérialiser.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 08/20 Le principal défaut d'Ultima II : The Revenge of the Enchantress..., comme celui de beaucoup des jeux parus à la même époque, est avant tout d'avoir essuyé les plâtres dans un genre où l'essentiel restait à définir. Le jeu paie ainsi le prix de son ambition délirante par une série d'erreurs de game design, de bugs et de tâtonnements malheureux qui le rendent nettement moins agréable à parcourir près de quarante ans après sa sortie. En dépit d'une mine d'idées qui n'arriveront souvent à maturité que dans les épisodes suivants et d'un univers gigantesque à explorer, l'essentiel de l'expérience se limite trop vite à enchaîner des combats beaucoup trop basiques en cherchant à comprendre où diable on est censé aller et ce qu'on est censé y faire. Sans doute l'épisode le plus faible de la saga, mais c'est parfois le prix à payer quand on cherche à viser les étoiles. CE QUI A MAL VIEILLI : – Le bug de la version originale qui interdit d'augmenter sa force – Les donjons totalement inutiles – Maniabilité au clavier laborieuse – Encore un jeu de rôle où l'expérience ne sert à rien... – Système de combat extrêmement limité – Réalisation antédiluvienne (on parle d'un jeu de 1982...) – Bon courage pour obtenir un bateau – Bon courage pour finir le jeu sans une solution

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima II sur un écran cathodique :

Version Atari 8 bits

Développeur : Chuck Bueche
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Atari 800 NTSC
Configuration minimale : Systèmes : Atari 400/800, Atari XL, Atari XE
Parvenir à jouer avec des océans bleus vous demandera à la fois un écran américain et beaucoup de chance

Ultima II aura été le premier épisode de la saga à être porté sur d’autres systèmes dès sa première parution. Parmi les systèmes populaires de l’époque, les ordinateurs 8 bits d’Atari auront figuré parmi les premiers servis. La conversion est d’ailleurs très basique : c’est un portage très fidèle à la version originale sur Apple II, seule la palette de couleurs étant légèrement modifiée tout en n’employant toujours que 4 couleurs. À noter que ces couleurs reposant d’ailleurs sur une des particularités d’affichage du mode NTSC, la version PAL apparait en noir et blanc. Si une partie des bugs du jeu ont été corrigés (et une partie seulement, le fameux « bug des 99 points » étant toujours de la partie), on regrettera que les capacités sonores des Atari 400 et 800 ne soient absolument pas exploitées, le jeu se contentant de transposer à l’identique les bip-bip de la version Apple II.

NOTE FINALE : 08/20

Pas de grosse révolution à attendre pour Ultima II sur Atari 8 bits : si les possesseurs de systèmes européens regretteront de ne même pas pouvoir profiter des quatre couleurs du jeu, ils profiteront eux aussi de l’avantage d’une version légèrement débuguée. Pas de quoi rendre le jeu grandiose, mais au moins sensiblement plus jouable.

Version Commodore 64

Développeur : Bobbit
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Ah, merci, c’est déjà un peu plus joyeux !

Une fois n’est pas coutume, la version Commodore 64 rue dans les brancards, en proposant un des portages les plus colorés du jeu ! Oubliez les grands fonds noirs des autres conversions, le monde du jeu est subitement devenu nettement moins sombre, ce qui modifie drastiquement l’ambiance du jeu. Il faut certes composer avec des choix étranges, comme ces montagnes violettes, mais il faut reconnaître qu’on a enfin le sentiment d’exploiter un peu la palette de couleurs de la machine. Ce petit détail excepté, on retrouve un jeu très proche de la version originale, à quelques nuances près comme le dragon de l’écran-titre qui a disparu ou le plan de la planète Pluton qui a vu une ville disparaître. N’espérez pas non plus de musique : il n’y en a toujours pas, et les temps de chargement sont toujours aussi insupportables.

NOTE FINALE : 08,5/20

Faute de bouleverser l’expérience de jeu originale, Ultima II sur Commodore 64 a au moins le mérite d’offrir une réalisation un peu plus colorée qui tranche avec les standards choisis par la série jusqu’au sixième épisode. On regrettera en revanche que la réalisation sonore, elle, n’ait pas évolué d’un iota et que le jeu conserve toute une série de bugs.

Version PC (DOS)

Développeur : Chuck Bueche
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 1.1 – RAM : 64ko
Modes graphiques supportés : CGA, CGA composite
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Voici à quoi ressemble le jeu tel qu’il est vendu encore aujourd’hui. C’est… un peu triste.

De tous les portages d’Ultima II, celui paru sur PC est sans doute celui qui nous intéresse le plus, et pour cause : c’est le seul à être encore disponible à la vente aujourd’hui. Mais pour bien comprendre à quoi on s’attaque, il faut se souvenir de la date de sortie du jeu : 1983, soit une époque où l’EGA n’existait même pas, et où les cartes sonores restaient à inventer.

Ironiquement, le jeu était plus beau à la période de sa sortie qu’il ne l’est aujourd’hui. En effet, il tirait parti du mode composite qu’offraient les cartes CGA, à condition d’avoir le moniteur et la connectique appropriée, et qui permettait de contourner une partie des limitations de la palette de base. Plus personne n’employant de moniteurs composites de nos jours, il faudra donc se contenter d’une version en blanc, cyan et magenta encore moins colorée que l’originale sur Apple II – à moins de savoir utiliser les versions non-officielles les plus évoluées de DOSBox, qui émulent parfois le CGA composite. Niveau sonore, les choses ne sont pas plus brillantes, mais on ne peut pas dire que le haut-parleur interne fasse bien pire que les quelques bip-bip de la machine d’Apple.

À titre de comparaison, voilà à quoi ressemble le même écran en CGA composite (ici émulé sous DOSBox SVN)

Pour ne rien arranger, non seulement aucun des bugs des versions 8 bits n’a été corrigé, mais le jeu en ajoute même une nouvelle louche à cause de l’absence de limitateur de vitesse qui fait tourner le titre beaucoup trop vite, et peut même le faire planter à cause d’une erreur « divide-by-zero ». Pire encore : le jeu n’ayant jamais été pensé pour être installé sur un disque dur (et pour cause, en 1983…), la plupart des fichiers présents sur les deux disquettes du jeu portent des noms identiques, qui se retrouvent donc écrasés lorsqu’on les copie dans un même répertoire… Bref, une version qui a cruellement subi les affres du temps, mais fort heureusement les fans se sont attelés à corriger cet état de fait, ce qui nous amène à :

Du côté des fans :

Comme souvent, la lumière sera venue des passionnés. Vous pourrez trouver sur la page The Exodus Project tous les détails sur le patch de fans disponible dans la section « download » du même site. Celui-ci effectue un dépoussiérage extrêmement bienvenu, puisque non seulement il corrige tous les bugs du jeu et le fait enfin tourner à la bonne vitesse, mais il ajoute également une quantité de fonctions dont la liste est disponible à cette adresse et qui permettent, en plus de créer plusieurs personnages sans avoir à réinstaller le jeu, de désactiver la sauvegarde automatique, de choisir la caractéristique que vous voudrez améliorer, ou bien de choisir parmi une variété de mode graphique allant de la reconstitution du mode CGA composite à différents sets en EGA, et même l’émulation des graphismes de la version Commodore 64 ! Il ne manque plus qu’un peu de musique – mais comme aucune des versions commerciale du jeu n’en comportait, on comprendra que les créateurs du patch aient préféré s’abstenir d’aller emprunter des thèmes venus des autres épisodes.

Plusieurs modes EGA sont disponibles, histoire de retrouver le charme caractéristique de la saga sur PC…
Mais pour les puristes, pourquoi ne pas carrément opter pour le CGA composite originel ?
Si vous voulez plus de couleur, optez pour le mode C64…
Et rien ne vous interdit de tenter des graphismes plus détaillés !

NOTE FINALE : 06/20 (version originale) 09,5/20 (version patchée)

Ultima II sur PC aura cruellement subi les affres du temps, sur une version qui n’avait sans doute pas anticipé que des joueurs s’y essaieraient encore sur une évolution du même système plus de 35 ans plus tard. Techniquement dépassée et buguée jusqu’à la moelle, elle devient fort heureusement un jeu beaucoup plus présentable – et surtout infiniment plus jouable – une fois patchée par les fans. Si vous deviez investir dans ce portage, un conseil : précipitez-vous sur le patch.

Version Atari ST

Développeur : Robert Eric Heitman
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : 25 septembre 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
L’interface à la souris fait une énorme différence.

Signe de la renommée de la saga, Ultima II aura également débarqué sur l’Atari ST flambant neuf trois ans après la sortie de la version originale. Et l’interface GEM aura visiblement tapé dans l’œil de Robert Eric Heitman, le responsable de ce portage, puisque le titre est directement intégré dedans ! Conséquence immédiate : l’inventaire est toujours visible à l’écran, ainsi que le nom de l’Age dans lequel vous vous trouvez, et le jeu est intégralement jouable à la souris, déplacements inclus. Vous n’aurez même plus besoin d’entrer une commande d’attaque à chaque assaut : il vous suffira de la sélectionner au préalable et de cliquer sur un adversaire. Du côté de la réalisation, le blanc est désormais la couleur dominante, avec quelques choix étranges comme des montagnes roses, mais le tout est très lumineux et très lisible – il est même possible de faire tourner le jeu en haute résolution monochrome. Sans hésitation l’un des tout meilleurs portages du jeu.

NOTE FINALE : 10,5/20

Avec une interface dépoussiérée et une réalisation plus lumineuse, Ultima II devient immédiatement beaucoup plus agréable à parcourir – dommage que tous les bugs n’aient pas été corrigés. En l’état, cela reste une des meilleures versions pour espérer découvrir le deuxième opus de la saga dans des conditions optimales.

Version Macintosh

Développeur : James Van Artsdalen
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh Plus
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – OS : System 1.0
Difficile de faire plus jouable

Le portage sur Atari ST aura certainement donné des idées à d’autres développeurs. En tous cas, s’il était un ordinateur offrant une interface comparable au GEM, c’était bien le Macintosh, et c’est probablement la réflexion que se sera faite James Van Artsdalen au moment de réaliser ce portage. Évidemment, hardware oblige, il n’y a pas de couleurs, mais on profite d’une réalisation en haute résolution intégralement jouable à la souris où absolument toutes les informations sont présentes en permanence à l’écran, y compris les caractéristiques du personnage (ce qui n’était pas le cas de la version ST). Cerise sur le gâteau : le code ce ce programme a été refait à partir de zéro, ce qui signifie qu’il ne comporte pas les bugs des autres portages. Bref, une autre très bonne surprise.

NOTE FINALE : 10,5/20

Les jeux de rôle connaissaient souvent de très bons portages sur Macintosh, et Ultima II a le bon goût de ne pas faire exception dans ce domaine. Si l’aspect monochrome du titre ne vous rebute pas, vous disposerez d’une interface irréprochable et d’une version bien moins buguée que l’originale. À essayer.

Version FM-7

Développeur : StarCraft, Inc.
Éditeur : StarCraft, Inc.
Dates de sortie : 1985
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Il y avait peut-être moyen de bénéficier d’une fenêtre de jeu plus large, non ?

Les portages japonais des jeux de rôle occidentaux, c’est un peu comme une boîte de chocolats : on ne sait jamais sur quoi on va tomber. Dans le cas de la version d’Ultima II commercialisée par StarCraft, en tous cas, ceux qui espéraient des tuiles redessinées et des graphismes en haute résolution peuvent changer d’idée : sur le plan du contenu comme sur celui de la réalisation, le jeu est très proche de la version originale sur Apple II – et les amateurs de montagnes roses façon Atari ST devraient être aux anges. Si les monstres bénéficient enfin de sprites à l’intérieur des donjons, on pourra regretter que la fenêtre de jeu soit vampirisée par la fenêtre de dialogue en bas de l’écran , par une inutile bande noire en haut, et par les informations déplacées à droite. Oh, et comme dans la quasi-totalité des autres versions, il n’y a pas de musique. Pour le reste, on retrouve exactement le jeu qu’on était venu chercher – à condition de parler japonais.

NOTE FINALE : 07,5/20

Aucune prise de risque de la part de StarCraft, qui aura porté Ultima II sur FM-7 en ne modifiant pratiquement rien par rapport à la version Apple II… sauf la taille de la fenêtre de jeu, qui n’avait vraiment pas besoin de rapetisser de la sorte. En y ajoutant le fait que le titre soit exclusivement disponible en japonais, on réservera ce portage aux amateurs de versions exotiques.

Version PC-88

Développeurs : StarCraft, Inc. (1985) – DeskTop Inc., Miyo-C (1989)
Éditeurs : StarCraft, Inc. (1985) – Pony Canyon, Inc. (1989)
Dates de sortie : Septembre 1985 (StarCraft) – Septembre 1989 (Pony Canyon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Versions testées : Versions disquettes japonaises
Configuration minimale :
Ici, la version de 1985 : ça ressemble à l’Apple II, mais c’est plus fin

Petite curiosité pour le PC-88 : il n’y aura pas eu une mais bien deux versions du jeu publiée sur cette machine, la première en 1985 par StarCraft, et la seconde quatre ans plus tard par Pony Canyon. Dans les deux cas, ce ne sera pas vraiment du côté du contenu qu’il faudra chercher les nouveautés, mais bel et bien de celui de la réalisation : la version de 1985 est tout simplement l’exact équivalent du portage paru simultanément sur FM-7 et PC-98. Dans la version de 1989, on retrouve le style des autres portages assurés par Pony Canyon : même si la résolution est étrange, c’est indéniablement plus coloré, et surtout des thèmes musicaux ont fait leur apparition. Malheureusement, non seulement il faudra toujours jouer au clavier, non seulement on n’a pas toutes les informations disponibles en un coup d’œil comme sur Macintosh, mais surtout le jeu reste intégralement en japonais dans les deux cas. Autant dire que cela réservera ces deux versions à un public très spécifique.

Version 1989 : C’est plus joli, c’est un peu moins lisible, mais il y a de la musique, désormais

NOTE FINALE : 07,5/20 (version 1985) – 10/20 (version 1985)

Ultima II aura eu le droit à pas moins de deux versions sur PC-88, et si celle de 1985 n’offrait pas grand chose de plus que la version originale sur Apple II, celle de 1989 y ajoute une réalisation un peu plus ambitieuse, avec des thèmes musicaux et l’interface graphique traditionnelle de la série. Dommage que dans les deux cas, le titre soit inaccessible à ceux qui ne parlent pas japonais.

Version PC-98

Développeurs : StarCraft, Inc. (1985) – DeskTop Inc., Miyo-C (1989)
Éditeurs : StarCraft, Inc. (1985) – Pony Canyon, Inc. (1989)
Dates de sortie : Septembre 1985 (StarCraft) – 24 Septembre 1989 (Pony Canyon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Versions testées : Versions disquettes japonaises
Configuration minimale :
Version 1989 : graphiquement, c’est tout de suite plus plaisant

Rebelote : sur PC-98, Ultima II aura également eu le doit à un premier portage assuré et distribué par StarCraft en 1985 avant une version rehaussée publiée par Pony Canyon en 1989. Pour ce qui est de la version de 1985, je vous renvoie directement au test du portage sur FM-7, puisqu’il aura été transposé sur la machine de NEC sans en changer un pixel ni chercher en rien à tirer parti des capacités de la machine. Pour celle de 1989, on part cette fois sur les mêmes bases que sur PC-88, avec des thèmes musicaux et des tuiles redessinées, sauf que les graphismes sont désormais affichés en 640×480 et que le résultat est nettement plus convaincant – c’est même plus beau que ce qu’on pourra voir l’année suivante sur FM Towns, où il faudra composer avec deux grosses barres inutiles pour réduire la taille de la fenêtre de jeu. Dommage que le jeu affiche un mélange d’anglais et de japonais assez déstabilisant, et surtout que l’interface soit une nouvelle fois limitée à l’usage du clavier.

NOTE FINALE : 07,5 (version 1985) – 10,5/20 (version 1989)

Un petit coup de chiffon n’a jamais fait de mal ; avec ses graphismes en haute résolution et ses thème musicaux, Ultima II est déjà nettement moins austère sur PC-98. Tant qu’à faire, on n’aurait certainement pas dit non à une interface révisée et à quelques rééquilibrages, mais en l’état, cela reste plus agréable que sur Apple II ou sur PC. La version de 1985, elle, est à éviter.

Version MSX

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Dates de sortie : 1989
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2
C’est moins beau que sur PC-98, mais ça fait également moins « bouillie de pixels » que sur PC-88

Quitte à porter Ultima II sur les systèmes japonais, il eut été surprenant de faire l’impasse sur le MSX. Avec la même équipe aux commandes que pour les autres versions éditées par Pony Canyon, inutile de s’attendre à une surprise : on se retrouve grosso modo avec le même jeu que sur PC-88 et PC-98, la réalisation graphique arrivant à mi-chemin entre les deux versions. Pour le reste, on retrouve une nouvelle fois les thèmes musicaux, le contenu n’a pas bougé d’un micron, et le programme est toujours en japonais.

NOTE FINALE : 10/20

Aucune surprise pour Ultima II sur MSX, qui délivre à peu de choses près la même prestation que dans les autres versions distribuées par Pony Canyon. Ce n’est pas très fin, l’interface est toujours aussi lourde et c’est toujours en japonais, mais cela reste un portage très correct.

Version FM Towns
Ultima Trilogy : I · II · III

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme on l’aura vu lors du test du premier épisode, la première trilogie de la saga Ultima aura été portée en une seule fois sur FM-Towns en 1990. L’occasion de bénéficier une nouvelle fois du traitement de choc qui avait fait tellement de bien au premier opus : des graphismes haute résolution bien plus colorés (repris directement de la version PC-98), des thèmes musicaux, des bruitages digitalisés, des donjons aux murs texturés avec des sprites plutôt que des immondices vectorielles en guise d’ennemis, une introduction refaite pour l’occasion, une interface tirant parti de la souris… Certes, tout cela ne corrige rien des errements ludiques du jeu, puisque le contenu n’a pour ainsi dire pratiquement pas changé, mais on a quand même toutes les raisons d’apprécier un coup de peinture salutaire qui donne un peu moins l’impression d’être prisonnier d’un monde de bonshommes-bâtons en noir et blanc. Vous noterez cependant que j’ai dit « pratiquement » ; certains équilibrages ont bel et bien eu lieu. Par exemple, l’élément tri-lithium, indispensable aux voyages spatiaux, ne peut désormais être trouvé que dans les donjons – donnant ainsi une utilité à ces derniers, qui pouvaient jusqu’ici être évités sans regret. On consomme une unité de « blue tassles » à chaque fois qu’on monte dans une frégate, etc. Sachant que le titre est toujours intégralement en anglais (sauf pour l’introduction, mais je pense que vous saurez surmonter cette perte), on bénéficie une nouvelle fois d’une occasion de découvrir le titre dans des conditions optimales.

Voilà qui ressemble déjà plus à un jeu vidéo

NOTE FINALE : 11/20

On a beau dire, mais un bon coup de peinture neuve fait parfois un bien fou. Porté sur FM Towns, Ultima II n’y devient certes pas un jeu de rôle d’exception, mais il reste nettement plus agréable à parcourir que sur Apple II ou même sur les autres systèmes 16 bits. Quitte à le découvrir, autant le faire via cette excellente adaptation.

Simon Woodroffe’s Simon the Sorcerer II

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Adventure Soft Ltd.
Éditeur : Adventure Soft Ltd.
Titres alternatifs : Simon the Sorcerer II : The Lion, the Wizard and the Wardrobe (écran-titre),魔法师西蒙2 (Chine), שוליית המכשף 2 (Israël), Simon the Sorcerer II : Der Löwe, der Zauberer & der Schrank (Allemagne)
Testé sur : PC (MS-DOS)
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, Macintosh, Windows (7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com, Steam.com (Édition 25ème Anniversaire)

La série Simon the Sorcerer (jusqu’à 2000) :

  1. Simon the Sorcerer (1993)
  2. Simon Woodroffe’s Simon the Sorcerer II (1995)
  3. Simon the Sorcerer’s Pinball (1998)

Version PC (MS-DOS)

Date de sortie : Août 1995
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui (version française intégrale)
Disponible en anglais : Oui
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous ScummVM
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 – OS : MS-DOS 4.0 – RAM : 4Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ki/s)
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, General MIDI, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster

Vidéo – L’introduction du jeu :

Dès la séquence de fin de Simon the Sorcerer, il était à peu près établi qu’une deuxième aventure était sur les rails. Le titre de Simon Woodroffe ayant connu un véritable succès à la fois critique et commercial, tous les voyants semblaient au vert pour initier un nouvelle série à succès capable de rivaliser avec Monkey Island – on aura donc attendu avec confiance la sortie de ce fameux deuxième épisode, qui aura quand même pris pas moins de deux ans.

On ne peut pas dire qu’on se sente dépaysé depuis le premier opus

Une durée qui n’a a priori rien d’exceptionnel, sauf que les choses allaient très vite dans les années 90, et que le genre du point-and-click était alors en train de vivre ce qui ressemblait furieusement au contrecoup de l’âge d’or qu’il venait de traverser. Désormais mis de côté au profit des Doom-like et de la 3D émergente, les jeux d’aventure étaient bel et bien en train d’amorcer une lente et douloureuse agonie, mais ça, ils ne le savaient pas encore. Et du côté de chez Adventure Soft, la prise de risque semblait minimale au moment de resservir au public nécessairement impatient plus ou moins la même chose que deux ans auparavant.

Simon est de retour – et il fait encore n’importe quoi

L’histoire vous est une nouvelle fois narrée par une longue cinématique, cette fois un tantinet plus ambitieuse que celle du premier épisode (mais une nouvelle fois vampirisée par une longue séquence de crédits). Contrairement à ce que la fin du premier opus pouvait laisser supposer, le maléfique sorcier Sordide n’est pas mort – ou pas complètement, disons ; il semble plutôt avoir hérité d’une sorte de statut zombiesque qui n’est pas sans rappeler celui du pirate LeChuck dans Monkey Island 2.

Um Bongo, le personnage qui colle d’emblée un gros malaise

Bien décidé à se venger de celui qui a causé sa perte, il décide d’avoir recours à une armoire magique afin de servir de portail entre les dimensions –  et ainsi, de mettre la main sur Simon. Bien évidemment, les choses ne se passent pas tout à fait comme prévu, et si Simon est bel et bien transporté une nouvelle fois dans l’univers du jeu, il atterrit non pas chez Sordide mais auprès de Calypso (qui ne vit apparemment plus à Fleur Deli) qui lui révèle que pour pouvoir rentrer chez lui, il aura besoin d’une substance rare nommée la Mucusade. Et voilà donc notre anti-héros à nouveau en mission pour une quête qui ressemblera a priori pas mal à celle du premier épisode : vaincre Sordide et repartir.

Vous pourrez retrouver quelques têtes connues

Si deux ans séparent Simon the Sorcerer II de son prédécesseur, on ne peut pas dire que les différences sautent immédiatement aux yeux. Simon est certes un peu plus vieux, et arbore désormais une queue de cheval qui lui vaudra de se faire fréquemment moquer quant à son manque de virilité (on reparlera de l’humour du jeu un peu plus tard), mais on ne peut pas dire que le reste soit dépaysant. L’interface à base de verbes du premier épisode a laissé la place à une nouvelle interface à base d’icônes… qui occupe toujours un bon tiers de la fenêtre de jeu, là où on aurait pu espérer profiter, comme dans Sam & Max, du plein-écran. Pour ne rien arranger, cette interface envahissante est moins lisible que celle du premier opus, ce qui fait que la jouabilité semble y avoir perdu plutôt qu’autre chose.

Attendez-vous à voir du pays

Cet aspect assez paresseux, autant l’évoquer dès maintenant, car on se souvient que le premier épisode était parvenu à placer la barre à un niveau relativement élevé en terme de réalisation. Deux ans plus tard, à une époque où les jeux en FMV à la Gabriel Knight 2 rivalisaient avec les titres en SVGA façon Space Quest 6, Simon the Sorcerer II ne craint apparemment pas de débarquer dans un VGA sans éclat.

Le scénario doit attendre d’entrer dans son derniers tiers pour enfin présenter un peu d’intérêt

Non seulement l’avancée technique depuis le premier opus est loin d’être flagrante, mais on a même plutôt le sentiment que la qualité graphique a reculé en deux ans – un ressenti qu’on peut attribuer en partie au fait que les superbes extérieurs de Simon the Sorcerer ont ici pratiquement disparu au profit d’un environnement devenu à 90% urbain, en tous cas dans la première partie de l’aventure. L’équipe graphique a changé, pas pour le mieux malheureusement, et on aura bien du mal à se sentir émerveillé devant le moindre écran du jeu – d’autant que les sprites sont toujours aussi moches et les animations toujours aussi lacunaires.

Attendez-vous à revoir cet écran très souvent

Quand on compare avec le soin minutieux d’un Day of the Tentacle paru, lui aussi, deux ans plus tôt, on comprend rapidement que Simon the Sorcerer II avait déjà un côté furieusement daté à sa sortie et que les choses ne sont pas franchement allées en s’améliorant au cours des vingt-cinq dernières années. Sans être à proprement parler moche, le titre est, au mieux, relativement quelconque.

L’humour ne met pas toujours dans le mille et reste souvent assez convenu

Un malaise qui vient hélas rapidement à gagner d’autres secteurs du jeu. L’humour très britannique du premier épisode semble se chercher ici un côté plus transgressif – bien incarné, en ce sens, par un Simon en pleine puberté qui se voudrait plus incisif que jamais… mais qui franchit hélas un peu trop souvent la ligne de la beaufitude, particulièrement quand il s’adresse à une femme.

Le jeu comporte bien quelques surprises, mais elles mettent tellement de temps à arriver…

Il parait d’ailleurs difficile de ne pas mentionner le fait que certaines blagues qui pouvaient encore passer dans les années 90 sont aujourd’hui devenues plus que limites, le personnage d’Um Bongo, véritable catalogue ambulant de tous les poncifs racistes sur les noirs africains fourni avec l’accent petit-nègre en VO comme en VF, en étant un assez bon exemple. On se surprend un peu trop souvent à grincer des dents ou à afficher une grimace navrée là où on espérait passer un bon moment. N’est pas Ron Gilbert qui veut…

La réalisation est globalement plutôt décevante

Ces errements se retrouvent d’ailleurs à tous les niveaux, dans une aventure qui peine à décoller faute de véritables enjeux dans ses dix ou quinze premières heures. Après avoir servi de prétexte pendant l’introduction, Sordide disparait ainsi totalement du récit pour la quasi-totalité de l’histoire, et les personnages intéressants ne courant pas les rues, l’univers peine dramatiquement à se montrer aussi magique que celui du premier opus. Tout a un air de déjà-vu, des éternels contes et légendes revisités à une sauce devenue un peu trop prévisible jusqu’aux dialogues interminables où les bons mots sont bien trop rares.

Il y a même un MacDo, et beaucoup de choses à y faire.

Si on visite la ville où se situe l’action avec une certaine curiosité pendant les premières heures, les innombrables allées-et-venues additionnées à des énigmes parfois franchement tirées par les cheveux finissent par instaurer une certaine lassitude qui fait qu’on est presque soulagé de voir la scène de fin se dérouler sous nos yeux. Est-ce à dire pour autant que Simon the Sorcerer II est un mauvais jeu ? Non, loin de là – l’aventure, très longue, va même en s’améliorant sur la durée – mais on devra s’accrocher durant de longs, très long moments avant de se débarrasser de ce mauvais goût de réchauffé qui nous colle au palais dès le lancement du titre.

On aurait apprécié de pouvoir s’évader de la ville de départ un peu plus vite

Du côté de la version française, on remarquera que le jeu a cette fois été entièrement doublée dans la langue de Molière. Le résultat est correct, sans plus – le plus gros défaut étant la faiblesse du casting mobilisé, que j’aurais bien du mal à estimer à plus de trois personnes (à vue de nez, deux hommes et une femme).

Les choix de dialogues sont souvent plus importants qu’ils n’en ont l’air

Si Simon est l’un des personnages qui s’en tire le mieux avec un doubleur souvent en roue libre (qui semble très fier de ses imitations de Stallone), on pourra noter dès l’introduction la tendance du doubleur de Sordide à mettre totalement à côté en terme d’intonation (je pense qu’il découvre ses dialogues au moment où il les lit, comme tous les autres acteurs, d’ailleurs), alors que ce que je pense être l’unique doubleuse du titre mêle à la fois un sous-jeu constant à un parler trainant qui finit par rapidement taper sur les nerfs. La traduction, de son côté, connait les mêmes écueils que dans le premier opus, et même plus : coquilles, contresens… Une nouvelle fois, ce n’est jamais catastrophique, mais on ne peut pas dire que ça soit transcendant non plus – c’est fonctionnel, voilà. Un bon résumé pour un jeu qui remplit son cahier des charges sans jamais le transcender.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15/20 Le propre des miracles, c'est qu'ils ne se produisent qu'une seule fois. En remettant le couvert pour Simon the Sorcerer II, Adventure Soft n'aura malheureusement pas réussi à remettre dans le mille dans tous les secteurs où la compagnie britannique y était parvenue deux ans plus tôt. Entre un humour où le malaisant côtoie un peu trop souvent le graveleux, une réalisation pas à la hauteur de celle du premier opus et une aventure qui met beaucoup trop de temps à décoller, on ne retrouve tout simplement plus grand chose de la magie qui avait su apparaître dans Simon the Sorcerer premier du nom. Le titre de Simon Woodroffe sait malgré tout se montrer prenant, voire même sympathique sur la durée – à condition d'y consacrer beaucoup de temps et de parvenir à passer au-delà de la déception initiale. CE QUI A MAL VIEILLI : – Humour louvoyant un peu trop fréquemment quelque part entre Bigard et Michel Leeb – Certains personnages qui confinent au racisme ordinaire (Um Bongo...) – Réalisation décevante – Interface moins lisible et toujours aussi envahissante que dans le premier épisode – Doublage français qui n'a pas dû mobiliser plus de trois personnes, et encore

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Simon the Sorcerer II sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Tout ceci serait splendide si ce jeu ne ressemblait pas trop au premier. À l’époque, les voix étaient déjà présentes sur un CD, le graphisme était exactement le même et l’interface était plus parlante. Ce manque d’amélioration nuit gravement à l’intérêt du jeu : au bout de deux ans, on aurait pu s’attendre à quelques petits plus notamment au niveau du graphisme. »

Léo de Urlevan, Joystick n°65, novembre 1995, 68%

Simon the Sorcerer II : la version Amiga

Comme le premier épisode, Simon the Sorcerer II aura bel et bien profité d’un portage sur Amiga… en 2001 (!!!). Autant dire que cette date de sortie pour le moins tardive, sept ans après le dépôt de bilan de Commodore, fait de cette itération une version extrêmement confidentielle, à tel point d’ailleurs que je ne suis tout simplement pas parvenu à mettre la main dessus. D’après les quelques informations qui circulent sur le net, ce portage serait graphiquement identique à la version PC (on parle bien sûr ici d’une version AGA) mais n’aurait aucune musique en fond sonore, l’Amiga étant apparemment incapable de jouer nativement des thèmes au format MIDI (information qui parait douteuse, mais je vous la livre telle quelle). Je n’en sais malheureusement pas plus, mais si quelqu’un a eu la chance de mettre la main sur cette version très rare, qu’il n’hésite pas à en parler dans les commentaires.

Simon the Sorcerer

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Adventuresoft Ltd.
Éditeur : Adventure Soft Publishing Ltd.
Titres alternatifs : 魔法师西蒙 (Chine), שוליית המכשף (Shuliyat Hamechashef, Israël)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAmiga CD32
Version non testée : Acorn 32 bits
Disponible sur : iPad, iPhone, Macintosh, Windows (7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com, Steam.com (Édition 25ème Anniversaire)

La série Simon the Sorcerer (jusqu’à 2000) :

  1. Simon the Sorcerer (1993)
  2. Simon Woodroffe’s Simon the Sorcerer II (1995)
  3. Simon the Sorcerer’s Pinball (1998)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Septembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Allemand, anglais, français (voix en anglais, textes en français)
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Versions testées : Version CD-ROM et disquette émulées sous ScummVM
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : MS-DOS 5.0 – RAM : 640ko – Vitesse lecteur CD-ROM : 1X (150ko/s)
Modes graphique supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (version CD-ROM) :

Il en va parfois du jeu vidéo comme du vin rouge : il y a de bonnes et de mauvaises années.

Prenez 1993, par exemple. Pour le jeu d’aventure, c’est un peu l’équivalent de 1959 pour le Pommard : l’année du siècle. Du côté de chez LucasArts : millésime exceptionnel avec Day of the Tentacle et Sam & Max, soit deux des meilleurs titres jamais produits par la firme américaine. Les choses n’allaient pas mal non plus du côté de Sierra Online, avec Freddy Pharkas, Space Quest V, Leisure Suit Larry 6 et surtout Gabriel Knight, là encore un des plus grands jeux d’aventure jamais produits par la société de Ken et Roberta Williams. Cerise sur le gâteau : Westwood Studios touchait également les étoiles avec le deuxième épisode de Legend of Kyrandia : Hand of Fate. Autant dire que s’il fallait isoler un âge d’or du genre, il tiendrait sans difficulté dans cette simple période de douze mois, définitivement gravée dans la légende.

Bienvenue dans un monde de merveille, de magie, et de sorciers qui réveillent les géants à coups de bombardon

D’ailleurs, cette année 1993 fut si exceptionnelle pour le point-and-click qu’elle vit également arriver un outsider inattendu, sous la forme d’Adventuresoft, société britannique venue crânement tenter sa chance avec Simon the Sorcerer.

La carte magique se complètera au fur et à mesure de votre progression

Face aux écrasants concurrents évoqués plus haut, c’était déjà extraordinairement gonflé. Mais l’ambition du jeu imaginé par Simon Woodroffe était visiblement sans limite : non content de débarquer au beau milieu de la production des ténors du genre comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, le titre se permettait même d’aller invoquer des références aussi indépassables que Secret of Monkey Island, Tolkien, C. S. Lewis ou la saga des King’s Quest. Un sacré culot de la part d’un petit David au milieu de tous ces Goliath ! Et de quoi piquer la curiosité du joueur au moment de lancer les improbables aventures du jeune sorcier.

Un conseil de grands pontes qui vous évaluent dans un bar… Où est-ce que j’ai déjà vu ça ?

Vous incarnez donc le jeune Simon, transporté contre son gré dans un monde magique en cherchant à récupérer son chien. Votre mission, que vous l’acceptiez ou non, consistera à arrêter le maléfique sorcier Sordide, principal obstacle entre vous et Calypso, le magicien qui vous a fait atterrir ici. Vous n’aurez pour seul guide qu’une lettre laissée par Calypso lui-même avant de vous retrouvé lâché dans la nature. Premier objectif : devenir un sorcier en commençant par rencontrer le Conseil des Magiciens, justement réuni à l’auberge locale, qui devra d’abord vous faire passer une épreuve…

Le jeu comporte des références à d’autres œuvres dans pratiquement chaque écran

Cela vous rappelle quelque chose ? C’est parfaitement normal : comme cela a déjà été dit, Simon the Sorcerer est un jeu qui regorge de références, et Monkey Island n’est que l’une d’entre elles. En dirigeant votre jeune apprenti sorcier et son cynisme à toute épreuve, doublé d’une libido clairement plus prononcée que celle du premier Guybrush Threepwood venu, vous aurez ainsi le plaisir de trouver de nombreuses références aux contes de fées comme dans n’importe quel King’s Quest, mais cette fois lourdement parodiées : quand les trolls ne font pas grève face aux boucs, c’est Raiponce qui est en fait une truie à demi métamorphosée en femme.

On a toujours besoin d’un plus costaud que soi

On notera aussi un certain « Golem » qui vous appelle « Mon Trésor » et qui fait en fait partie d’une société de fans de Tolkien, un duel contre une sorcière tout droit sorti de Merlin l’Enchanteur, des nains outrageusement portés sur la bière qui sifflent en travaillant, sans oublier des clins d’œil appuyés au cycle de Narnia, comme lorsque vous trouvez une table de sacrifice que votre Simon vous décrira comme « utile pour raser les lions ».

Certains dialogues sont de grands moments

Il y en a partout, dans tous les sens, et le jeu ne se prend strictement jamais au sérieux, quitte à faire intervenir un coup de fil en plein milieu de l’affrontement final. On appréciera d’ailleurs, à ce titre, que le logiciel reprenne non seulement l’interface des jeux LucasArts de l’époque, avec les verbes de commande et l’inventaire graphique, mais également leur philosophie : impossible de mourir ou d’être définitivement bloqué. Votre logique sera donc la seule arme indispensable – à condition que vous puissiez la tordre un peu au besoin, naturellement.

Simon n’hésite jamais à briser le quatrième mur pour se plaindre

Si la plupart des énigmes du jeu sont, à leur manière, parfaitement logiques, il faudra également y placer l’indispensable dose d’absurdité pour espérer triompher de l’aventure – quitte à ce que Simon lui-même vous fasse remarquer que ramasser de l’or avec un aimant au bout d’une corde ne devrait pas fonctionner dans un monde plus cohérent. Si le jeu sait se montrer très drôle, il peut également se montrer parfois un peu trop bavard, et on aimerait que certains des longs échanges qui se produisent entre plusieurs interlocuteurs sans solliciter votre intervention aient la bonté de s’écourter un peu. On regrettera également une certaine dose de chasse au pixel, certains objets comme des boîtes d’allumettes, des pierres ou des brindilles étant rarement évidents à trouver au milieu des (très) nombreux écrans du jeu.

Les extérieurs sont incroyablement travaillés

Car s’il est une autre qualité à reconnaître à Simon the Sorcerer, c’est bien l’étendue de sa surface de jeu. Loin de se cantonner à une ville, voire à une simple maison comme l’excellent Day of the Tentacle, le titre de Simon Woodroffe vous place à côté d’une gigantesque forêt placée au pied de montagnes enneigées que vous pourrez parcourir d’un bout à l’autre au sein de ce qui doit facilement représenter une bonne cinquantaine d’écrans.

Ne craignez pas trop pour votre vie : il est impossible de mourir

Cerise sur le gâteau : les extérieurs sont absolument magnifiques. Peut-être pas au point de rivaliser avec un Legend of Kyrandia pratiquement indépassable en la matière, ni avec la patte inimitable des productions LucasArts d’alors, mais on sera surpris du soin hallucinant du détail du moindre écran, avec ces visages dessinés dans la pierre et ces multiples décors d’une poésie rare qui donnent toute sa raison d’être à la carte magique livrée en début de partie, laquelle vous permettra fort heureusement d’écourter les très nombreux aller-et-retours que vous allez devoir effectuer. Même ainsi, il arrive que l’on tourne un peu en rond, peinant à retrouver un personnage ou un site particulier au sein de cet univers ô combien ambitieux mais que l’on apprend à connaître avec une sympathie indéniable au cours de la trentaine d’heures que pourra nécessiter le jeu.

N’y a-t-il donc rien de sacré dans ce jeu ?

Les rares reproches que l’on puisse formuler à l’encontre d’un titre auquel on finit rapidement par s’attacher tiendraient plus à quelques point de détails de la réalisation. On regrettera, par exemple, que les cinématiques d’introduction comme de fin soient simplement réalisées avec le moteur du jeu plutôt que de nous offrir des mises en scènes plus travaillées, avec des plans de coupes, des illustrations, voire des images de synthèse, comme celles que proposait la concurrence.

L’univers du jeu a vraiment beaucoup de charme

La fin est également un tantinet décevante, vous privant des remerciements et des félicitations que vous étiez en droit d’attendre pour vous précipiter immédiatement dans une future suite. Mais dans l’ensemble, on est rarement déçu de l’extraordinaire promenade qui nous est offerte, et on accueille rapidement Simon au sein du panthéon des personnages marquants de l’âge d’or du point-and-click où sa place était pourtant loin d’être gagnée d’avance. Mais hé, quand on connait le personnage, on sait les miracles qu’il est capable d’accomplir simplement au culot.

L’absurde, marque de fabrique britannique au moins depuis Lewis Carroll

Un mot enfin sur la version française du jeu, qui a le mérite d’être relativement efficace en dépit d’un certain nombre d’erreurs de débutants (« rude » en anglais ne veut pas dire « rude » en français, confusion entre « sting » et « stink », plusieurs tournures calquées sur l’anglais…). Rien de trop pénalisant pour un joueur français, heureusement, et on ne trouve heureusement pas les nombreux errements orthographiques et/ou grammaticaux des productions Sierra de l’époque. Aucune raison de bouder cette version, donc. Pour ce qui est de la version CD, elle n’ajoute rien d’autre que des doublages – en Anglais, malheureusement, ce qui n’enlève malgré tout rien à la qualité du travail, exécuté de manière très professionnelle. On appréciera quelques grands moments, comme la conversation avec les vers à bois, particulièrement efficace.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (CD-ROM) :

Récompenses :

  • Tilt de bronze 1993 (Tilt n°121, décembre 1993) – Meilleur jeu d’aventure

NOTE FINALE : 17/20 C'est réellement un fameux tour de magie qu'a accompli Simon the Sorcerer, en parvenant à se faire un nom au cœur de la plus grande année de toute l'histoire du point-and-click. Porté par un humour à toute épreuve et une réalisation qui côtoie souvent le merveilleux, le titre de Simon Woodroffe ose tout, parfois à contre-courant des attentes de l'époque, et parvient à écrire une histoire longue, mémorable et particulièrement efficace. Lâché dans un univers hyper-référencé doté d'une véritable magie, on accompagne le jeune sorcier jusqu'au terme de son périple sans jamais ressentir la lassitude, en dépit de quelques dialogues qui tirent parfois un peu en longueur, et on l'abandonne à contrecœur tant on était prêt à l'accompagner pour une aventure de plus – ce qui sera heureusement possible grâce à Simon the Sorcerer II. Un quasi sans-faute miraculeux, et un titre à (re)découvrir d'urgence CE QUI A MAL VIEILLI : – Dialogues parfois inutilement longs – On peut vite se perdre, même avec la carte magique – Cinématiques un peu plan-plan réalisées directement avec le moteur du jeu – Fin un peu décevante

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Simon the Sorcerer sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« J’adore les Lucas et Simon est de la trempe des softs de l’éditeur américain. On baigne littéralement dans le bonheur avec une ambiance magnifique digne des meilleurs contes de fées. Le système et la réalisation sont largement à la hauteur et parfois supérieurs aux Lucas. Le seul reproche que j’aurai à faire, c’est le manque d’originalité de l’histoire. »

Michel Houng, Génération 4 n°58, septembre 1993, 89%

« Franchement, je ne pensais pas trouver de sitôt un programme capable de rivaliser avec Day of the Tentacle. Dès les premières secondes du jeu, on est sous le charme de l’animation et de la richesse des décors. Mais heureusement, Simon the Sorcerer ne se contente pas d’être un beau jeu, il a aussi du coffre. »

Jacques Harbonn, Tilt n°118, octobre 1993, 88%

Version Amiga

Date de sortie : Février 1994
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x9)
Contrôleur : Souris
Versions testées : Versions disquette OCS et AGA testées sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo (1,5Mo en cas d’installation sur disque dur)
Modes graphiques supportés : AGA, OCS/ECS
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (AGA) :

En 1994, Commodore n’était pas franchement au sommet de sa forme (et pour cause : la société était sur le point de faire faillite), mais cela, le joueur lambda ne le savait pas forcément. Techniquement, le bon vieil Amiga 500 commençait à être sérieusement largué face à la concurrence des consoles de salon et des PC dopés aux hormones – mais les amigaïstes convaincus avaient bon espoir que l’Amiga 1200 allait changer la donne… quand bien même la machine flambant neuve avait sans doute perdu la guerre avant même sa commercialisation.

Graphiquement, même avec 64 couleurs, on ne se sent pas roulé. Il faut bien regarder pour voir la différence… (Amiga 500)

Pour les fans de jeu d’aventure, en tous cas, pas de jaloux pour ce qui est de la version AGA : elle est graphiquement identique à la version PC. La qualité musicale n’a également pas de quoi rougir de la comparaison avec la Roland MT-32, même s’il faudra en revanche obligatoirement se passer des voix, aucune version CD n’ayant vu le jour sur Amiga 1200. On pouvait se montrer un peu plus inquiet pour la version en 64 couleurs, mais force est de reconnaître que celle-ci s’en sort beaucoup mieux que l’itération Amiga de Legend of Kyrandia.

…mais évidemment, en AGA, c’est encore un peu plus détaillé

La palette de couleurs est très bien utilisée, et même si le jeu est légèrement moins beau, il reste très agréable à l’œil. En revanche, et pour une raison mystérieuse, la moitié de l’introduction a sauté dans cette version : vous vous retrouvez donc en jeu directement après la séquence de crédits sans rien voir des causes ni du déroulement de l’arrivée de Simon dans le monde magique. C’est… surprenant, et surtout dommageable, car cela prive encore un peu plus le jeu de sa dimension cinématique. À ce détail près, le contenu du jeu est strictement identique – et il existe également en français.

NOTE FINALE : 17/20 (version AGA), 16,5/20 (version OCS/ECS)

Simon the Sorcerer livre, dans sa version AGA, une version extrêmement proche de la version parue sur disquettes sur PC – son seul défaut, en somme, étant de n’avoir jamais bénéficié d’une version doublée sur CD-ROM. La version ECS, elle, impressionne par sa qualité visuelle en dépit de la palette réduite, mais doit également composer avec une coupe malheureuse qui ne s’imposait pas vraiment.

Version Amiga CD32

Date de sortie : Juillet 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Parlons peu, parlons bien. Prenez la version PC CD-ROM de Simon the Sorcerer, mettez-y la musique de la version Amiga, jouez-y au pad, et voilà ! Vous avez un portage ma foi très fidèle à la meilleure version du jeu (à quelques ratés dans la synchronisation des voix digitalisées près), même si cela n’aura visiblement pas suffi à sauver l’éphémère console de Commodore de son tragique destin. Quoi qu’il en soit, on tient là à n’en pas douter l’un des meilleurs jeux d’aventure de l’Amiga CD32 – qui n’en compte de toute façon pas beaucoup, ce qui offre encore une raison supplémentaire de ne pas laisser passer celui-là. En revanche, il n’existe à ma connaissance pas de version française du jeu dans cette version.

C’est toujours très exactement le même jeu – moins la V.F., qui n’aurait pourtant pas pris beaucoup de place sur le CD-ROM

NOTE FINALE : 17/20

Portage extrêmement proche de la version PC CD, Simon the Sorcerer sur Amiga CD32 profite à la fois des qualités de l’AGA et de celles du support CD pour offrir une version identique à 99% à l’originale – seule la musique reprend les sonorités des versions disquette sur Amiga, mais les voix, elles, sont là et c’est bien tout ce qu’on leur demande.