Space Harrier

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Développeur : AM R&D Dept. #2
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Testé sur : ArcadeCommodore 64Master SystemAmstrad CPCFM-7PC-6001PC-88Sharp X68000ZX SpectrumAmigaAtari STPC EngineSharp X1FamicomPC (DOS)Game Gear32XSaturn
Disponible sur : 3DS, Switch, Wii (version arcade)
Présent dans les compilations : Yu Suzuki Game Works : Vol. 1 (Dreamcast), SEGA AES 2500 : Vol.20 – Space Harrier 2 : Space Harrier Complete Collection (PlayStation 2, PlayStation 3), SEGA Mega Drive Ultimate Collection (PlayStation 3, Xbox)
En vente sur : Nintendo eShop (Switch)

La saga Space Harrier (jusqu’à 2000) :

  1. Space Harrier (1985)
  2. Space Harrier II (1988)
  3. Space Harrier 3-D (1988)
  4. Planet Harriers (2000)

Version Arcade

Date de sortie : Octobre 1985 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un stick (huit directions) et un bouton
Version testée : Version internationale, révision A
Hardware : Processeurs : Motorola MC68000 10MHz (x2) ; Zilog Z80 4MHz ; Intel 8751 8MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; YM2203 OPN 4MHz ; SEGA PCM 8MHz ; 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 60,054389Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les plus grands succès de l’arcade reposent souvent sur des idées simples. On peut aisément comprendre pourquoi : face à des bornes chargées d’appâter le tout-venant en cherchant à lui en mettre plein les yeux et les oreilles en un minimum de temps afin qu’il daigne se délester de son argent durement acquis, la prime est au plaisir immédiat. On n’a encore jamais vu un joueur débarquer dans une salle d’arcade pour y lire un manuel d’instructions pendant vingt-cinq minutes avant de se mettre à jouer, l’idée a donc plutôt toujours été de composer avec l’accessibilité et l’adrénaline. Pour le premier critère, le mieux est de faire simple : un stick, deux ou trois boutons maximum, avec les commandes directement détaillées sur le panneau, et n’importe qui aura compris le principe en quelques secondes. Pour ce qui est de l’adrénaline, il existe une sensation universelle qui semble fonctionner à tous les coups : la vitesse.

Bienvenue dans Space Harrier !

Les jeux de courses automobiles étant d’ailleurs à peu près aussi vieux que le jeu vidéo lui-même, pourquoi ne pas renouveler un peu le concept en y additionnant les mécanismes d’un jeu de tir ? On pense alors immédiatement à un titre comme After Burner ou, encore plus anciennement dans les salles, un des pères fondateurs d’un autre genre, le tir à la troisième personne : Space Harrier.

Combien de jeux proposent un stage bonus consistant à détruire le décor sur le dos d’un dragon-chat ?

Quel est le concept ? Comme souvent, simplissime : imaginez une dimension futuriste nourrie à l’esthétique SF des années 80, et sobrement nommée Fantasy Zone – un nom qui allait d’ailleurs engendrer une série de shoot-them-up, également chez SEGA. Au sein de cette dimension, des adversaires improbables : des dragons, des têtes volantes à la Zardoz, des astronefs, des mammouths-cyclopes… Oui, ça commence très fort, et on en viendrait presque à trouver naturel de rencontrer ces créatures dans des environnements composés de champignons géants ou de colonnes anciennes. Face à elles, le joueur, sous l’apparence d’un personnage doté d’un jetpack qui fait aussi canon. Le but ? Le même que dans n’importe quel jeu de tir, au fond : parvenir en vie au bout de chacun des 18 niveaux du titre, si possible en détruisant tout ce qui aura eu le malheur de se placer sur votre route.

Entre les obstacles et les tirs ennemis, mieux vaut rester concentré

Bien évidemment, le concept devient beaucoup plus intéressant lorsque vous comprenez que votre personnage est lancé à grande vitesse, qu’il ne ralentit jamais, qu’il peut se déplacer indifféremment n’importe où à l’écran en volant ou en courant, et que la vue du titre vous place juste derrière lui, soit au meilleur endroit pour profiter à fond de ladite vitesse. Votre héros ne se pose pas de questions existentielles : il tire devant lui ; ce sera donc à vous de le guider pour faire feu sur ses ennemis, éviter les centaines d’obstacles entre lesquels il devra louvoyer, et survivre le plus longtemps possible sans qu’il aille s’emplafonner dans un rocher, un tir ou un mammouth géant. Bon courage.

Rien ne vous interdit de courir au sol – cela n’aura aucun impact sur votre vitesse

Comme vous l’aurez certainement déjà compris, l’intérêt comme la difficulté du titre reposent tous les deux sur le même critère : la vitesse folle à laquelle vous et votre personnage serez lancés, nécessitant des réflexes particulièrement affutés afin d’éviter une fin tragique au bout d’une poignée de secondes. Et, à ce titre, il faut souligner le véritable exploit technologique que représentait la borne de SEGA en 1985 : non seulement c’était extrêmement coloré (comparez avec Kung-Fu Master, sorti l’année précédente) mais le moteur 3D capable d’afficher des milliers de sprites et de les faire zoomer à grande vitesse était même si performant que le jeu et les sensations qu’il procure ont objectivement plutôt bien vieillis. Qu’importe que près de 35 ans se soient écoulés depuis la sortie du titre : cela va toujours très vite, et cela continue de demander la même concentration que pour les joueurs de l’époque – même si on peut se douter que ceux-ci n’avaient pas franchement l’habitude de voir un programme tourner à cette vitesse, ni d’y jouer dans une cabine mue par des vérins hydrauliques.

Seule variation : les stages avec un « toit »

C’est d’ailleurs peut-être cette exigence initiale qui aura incité les développeurs de chez SEGA à ne pas juger nécessaire de développer le concept outre-mesure, tant il semblait se suffire à lui-même. Un niveau, un boss, un stage bonus, on change de décor et on recommence : pourquoi en offrir plus ? Mais pour un joueur du XXIe siècle, il faut bien dire que le concept de Space Harrier, même prenant, finit fatalement par s’essouffler au bout d’une petite dizaine de minutes. Un seul mode de tir, aucun bonus, aucun power-up, et à l’exception de ces stages dotés d’un « plafond », on ne peut pas franchement dire que l’action se renouvèle d’un niveau à l’autre. On aurait aimé trouver quelques entorses au principe de base : des niveaux à défilement latéral, des niveaux en intérieur, des plans un peu plus élaborés (imaginez un stage agencé comme la tranchée de l’Étoile Noire dans La Guerre des Étoiles ! Bon, Buck Rogers : Planet of Zoom l’avait déjà fait…)… Au lieu de quoi, le titre a déjà pratiquement tout donné dès les premières secondes de jeu, et en-dehors du scoring – ou éventuellement de la curiosité de voir à quoi ressemblera le prochain niveau – il n’y a pas réellement de raison de prolonger l’expérience dès l’instant où le facteur « adrénaline » ne joue plus.

Attendez-vous à croiser de nombreux dragons en guise de boss

C’est d’autant plus dommage que la réalisation, exceptionnelle pour l’époque, aide grandement le jeu à être toujours aussi amusant aujourd’hui – mais pour une période nettement plus courte. Sachant que le titre en lui-même n’est pas exceptionnellement long (comptez une vingtaine de minutes pour un très bon joueur), seule la difficulté du titre pourra représenter un moteur suffisant pour ne pas vous inviter à passer à autre chose au bout d’une heure de jeu. Certes, un concept n’a pas besoin d’être extrêmement complexe pour occuper un long moment – prenez celui de Tetris, par exemple – mais il faut également reconnaître que les joueurs, eux aussi, ont évolué, et qu’on ne peut que regretter que les très nombreuses idées qu’aurait pu initier Space Harrier soient finalement restées au stade embryonnaire faute d’ambition, de temps ou de moyens. Ce qu’on appellerait, aujourd’hui, un « bon petit jeu ».

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 12/20 En partant d'un concept simple mais brillamment exécuté, Space Harrier sera parvenu à river de très nombreux joueurs à leur siège par sa vitesse et l'adrénaline que celle-ci procurait. Un stick, un bouton et des réflexes fulgurants seront tout ce dont vous aurez besoin pour vous lancer à l'assaut de la Fantasy Zone et vous y amuser... mais pour combien de temps ? En reproduisant à l'identique le même modèle de niveau sans y offrir de réelle variation, ni même de bonus ou quoi que ce soit qui vienne fissurer quelque peu la routine, le titre s'essouffle hélas beaucoup trop vite pour son propre bien - ce qui ne l'empêche pas de rester divertissant tant que vous mordez encore au concept. CE QUI A MAL VIEILLI : – Aucune variation dans le gameplay : ni bonus, ni power-up, et tous les niveaux se ressemblent – Très court – Un autofire n'aurait pas fait de mal

Version Commodore 64

Développeur : AM R&D Dept. #2
Éditeur : Elite Systems Ltd.
Date de sortie : Septembre 1986
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sachant que l’essentiel de Space Harrier repose sur la capacité technique de la borne à afficher des centaines de sprites et à les zoomer à grande vitesse, on pouvait être très inquiet au moment de découvrir la conversion sur Commodore 64, aux capacités infiniment inférieures. Si le portage effectué par Elite Systems ne peut bien évidemment pas lutter avec la version originale, force est de reconnaître qu’il parvient à faire illusion en conservant l’essentiel de la vitesse du titre. Certes, graphiquement, la Fantasy Zone extrêmement colorée a laissé la place à de grands à-plats gris/marron, et on sent bien à cause des nombreux clignotements que le processeur est vite débordé au moment d’afficher un trop grand nombre de sprites. Pour ne rien arranger, le jeu ne compte plus désormais que douze niveaux, qui sont enchainés en boucle – ce qui signifie que de nombreux boss et adversaires sont passés à la trappe, ainsi que les niveaux bonus. Mais la musique est toujours là, tout comme les bruitages, et le tout tourne suffisamment bien pour qu’on puisse s’amuser, quoique sans doute pas plus longtemps que sur la borne d’arcade. À noter que la version américaine, éditée par SEGA, est légèrement supérieure, avec une sensation de vitesse mieux rendue, des sprites plus détaillée, un nouvel écran de chargement et des bruitages modifiés. Dans tous les cas il faudra composer avec une difficulté assez violente, la faute à des éléments de décor vraiment énormes qui vous laissent peu de pmace pour manoeuvrer

D’accord, c’est tout de suite moins impressionnant, mais c’est fluide

NOTE FINALE : 10/20

Porter Space Harrier sur Commodore 64 était un sacré défi, mais force est de reconnaître que celui-ci a été plutôt bien relevé : ça bouge relativement vite, c’est jouable – et avec de la musique et des bruitages, ce qui n’était pas gagné d’avance. Malheureusement, l’expérience déjà limitée sur borne d’arcade se retrouve ici amputée de plus d’un tiers de son contenu, et on peut sérieusement douter de la capacité du titre à se montrer divertissant plus d’une dizaine de minutes.

Version Master System

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 21 décembre 1986 (Japon) – Mars 1987 (États-Unis) – 1987 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1986, la Mega Drive n’existait même pas en rêve, et si SEGA voulait booster la vente de sa jeune Master System, mieux valait ne pas rater les portages de ses succès de l’arcade. À ce titre, si l’on sent les réels efforts accomplis pour cette adaptation de Space Harrier, on sent également que la firme japonaise n’est pas encore parvenue à maîtriser sa machine comme elle le fera, quelques années plus tard, avec des jeux comme Battle OutRun.

C’est déjà plus proche de la version arcade – sauf pour ce qui est de la vitesse…

Autant le dire tout de suite : ce n’est pas la vitesse de cette version de Space Harrier qui va vous garder scotché à votre siège. Disons plutôt qu’on se promène à un bon petit 50 de croisière, ce qui laisse le temps de profiter des graphismes (charmants) et des clignotements de sprites (moins charmants). Les différents éléments sont hélas affichés dans des « blocs » qui font que les sprites se fondent assez mal avec le décor, mais cela reste assez impressionnant pour de la Master System, surtout quand on observe la taille desdits sprites. Au moins ne constate-t-on pas le moindre ralentissement – mais malgré sa lenteur générale, le titre reste très délicat, la faute à ces fameux blocs énormes qui laissent assez peu de place pour manœuvrer.

NOTE FINALE : 10,5/20

Pour sa première console de salon, SEGA offre un portage sérieux, qui aura certainement impressionné beaucoup de joueurs au moment de sa sortie. En dépit d’une réalisation qui correspond sans hésitation au haut du panier pour 1986, force est de reconnaître que Space Harrier donne aujourd’hui l’impression de se trainer un peu, et sa difficulté rehaussée tend à le rendre inutilement frustrant plutôt que de prolonger la durée de vie. Un très bel accomplissement technique, mais pas la version la plus ludique à jouer.

Version Amstrad CPC

Développeur : Elite Systems Ltd.
Éditeur : Elite Systems Ltd.
Date de sortie : Mars 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dans la grande ronde des portages 8 bits de Space Harrier, seul l’Apple ][ semble avoir été oublié. Le CPC, lui, aura bel et bien bénéficié de sa version, avec un résultat assez étrange. Si le titre est relativement bien réalisé, les sprites semblent avoir été remplacés ici par des modèles en 3D vectorielles très basiques, qui font que tous les adversaires comme les obstacles sont désormais « transparents » – par forcément ce qui sert le mieux la lisibilité d’ensemble. Pour ne rien arranger, le défilement du décor du fond de gauche à droite donne le sentiment qu’on ne vole jamais en ligne droite, mais plutôt que notre héros, sensiblement bourré, essaie tant bien que mal de respecter un cap impossible à tenir. Non seulement cela impacte grandement la sensation de vitesse – cela peut même faire mal au cœur – mais en plus, cela n’améliore pas franchement la jouabilité, déjà assez pénalisée par la visibilité réduite. Bref, ce n’est pas très agréable à jouer – c’est dommage, car c’est principalement ce qu’on attend d’un titre de ce genre.

C’est assez joli, mais ça bouge bizarrement

NOTE FINALE : 08/20

En dépit d’une réalisation colorée agrémentée d’une musique sympathique, Space Harrier sur Amstrad CPC doit hélas souffrir de modèles vectoriels qui pénalisent la visibilité et d’une sensation générale étrange, qui donne le sentiment que notre brave héros a beaucoup de mal à maîtriser son jetpack – au point de l’empêcher de voler en ligne droite. En ajoutant une difficulté insurmontable, on se retrouve avec une version à oublier en vitesse. Dommage.

Version FM-7

Développeur : Dempa Shimbunsha
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Système : FM77AV
Ca ne paie peut-être pas de mine comme ça, mais en mouvement, pardon !

Dans le domaine des conversions de hits d’arcade japonais, les systèmes nippons s’en sortaient souvent mieux que leurs équivalents occidentaux – lesquels, il est vrai, avaient rarement accès à grand chose pour espérer programmer leurs conversions (voir l’histoire de Paul Cuisset et Mickaël Sportouch un peu plus bas). Une tendance qui se confirme avec cette version FM-7 qui ne paie pourtant pas de mine techniquement, avec ses seize couleurs, mais qui a le mérite d’être rapide, fidèle à la borne et parfaitement jouable. On perd certes l’écran-titre et les digitalisations sonore, mais la musique est toujoiurs là (et très bien rendue par la puce FM) et surtout, les sensations de jeu sont loin d’être ridicules : à bien des niveaux, ce portage est même largement supérieur à celui publié sur Master System l’année précédente ! Pas d’équilibrage à la truelle, pas de graphismes redessinés avec les pieds, pas d’adaptations foireuses ; c’est bien simple : on s’mause presque autant que sur la borne. Bref, du travail bien fait comme on l’aime. Chapeau.

NOTE FINALE : 11/20

Preuve qu’il n’y avait pas besoin de processeurs mosntrueux alimentant des composants graphiques de pointe pour offrir une conversion parfaitement satisfaisante de Space Harrier, cette version FM-7 accomplit sa mission avec brio en offrant des sensations qui sont très loin d’être ridicules comparés à celle de l’arcade. Le genre de portage qu’on aurait aimé voir en occident.

Version PC-6001

Développeur : Dempa Shimbunsha
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : Mars 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette japonaise
Configuration minimale :
Je sais ce que vous êtes en trainde vous dire… eh bien, vous avez tort

Pour ceux qui ne connaitraient pas la gamme PC-6001 de NEC (et honnêtement, personne ne vous en voudra), il s’agit d’une série de machines d’entrée de gamme, souvent surnommée affectueusement « Papicom », occupant une place assez comparable à celle du ZX Spectrum en termes de capacités techniques. On s’en rend d’ailleurs compte en lançant la partie, puisque les choses deviennent rapidement assez conceptuelles : votre personnage est le seul sprite du jeu, tous les obstacles, les ennemis et leurs tirs étant figurés par de simples carrés ! Oui je sais, c’est un peu effrayant dit comme ça, surtout qu’il n’y a que quatre couleurs à l’écran, mais le mieux est que ça tourne très bien et que ça fait finalement largement le café ! Alors certes, difficile d’en prendre plein les yeux quand il n’y a pour ainsi dire plus rien à voir, mais l’action est fluide, la jouabilité est optimale, la musique est toujours présente (et bien rendue), bref : les sacrifices opérés ont été les bons et l’essentiel de ce qui faisait le fun du jeu a été préservé. Bluffant.

NOTE FINALE : 09,5/20

D’accord, graphiquement parlant, difficile d’en proposer moins que cette version PC-6001 de Space Harrier : on peut même à peine parler de graphismes, d’ailleurs ! Mais le plus impressionnant, c’est que la vitesse et la fluidité de l’action ont été très intelligemment conservées, elles, et qu’on a finalement ici une version plus satisfaisante à jouer que bien des portages occidentaux trop occupés à essayer d’en mettre plein les yeux. Une curioisité qui nous rappelle que c’est toujours le plaisir qui prime, et jamais la réalisation.

Version PC-88

Développeur : Dempa Shimbunsha
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : Septembre 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Une nouvelle fois, ça passe beaucoup mieux en mouvement

Avec la même équipe aux commandes, la même année, sur la même famille de hardware, on se doute que cette version de Space Harrier va fatalement entretenir quelques liens avec celle parue sur PC-6001. C’est parfaitement le cas, ce qui veut dire que les amateurs de gros carrés vont être ravis ! Notons toutefois que cette fois, les ennemis disposent bien d’un sprite : ce sont leurs tirs et les éléments du décor qui n’ont pas cette chance. On ne va pas se mentir, cela ne fait pas que du bien à la lisibilité de l’action, mais la vitesse est toujours à la hauteur, tout comme la jouabilité, et la puce sonore fait parfaitement le travail – on a même récupéré les voix digitalisées. Bref, une nouvelle fois, une version qui ne possède qu’un intérêt purement historique à une époque où il est très facile d’émuler la borne, mais une approche qui faisait sens et qui préservait très bien l’essentiel.

NOTE FINALE : 10/20

Sorte de « version PC-6001 en mieux », ce portage de Space Harrier sur PC-88 fait une nouvelle fois des sacrifices assez culottés sur le plan de la réalisation graphique, mais préserve parfaitement la jouabilité, la fluidité et la réalisation sonore. Un compromis osé, mais pertinent.

Version Sharp X68000

Développeur : Dempa Shimbusha
Éditeur : Micomsoft
Date de sortie : Septembre 1987 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Parmi les ordinateurs les plus « exotiques », le Sharp X68000 était à n’en pas douter une très bonne machine – à condition, néanmoins, d’être prêt à dépenser six fois le prix d’un Amiga 500, mais bon, cela reste encore loin du prix que coûtait alors un PC qui ne faisait tourner que des logiciels de bureautique. De fait, dès 1987, cette version de Space Harrier place le curseur assez haut : ce n’est certes pas au niveau de l’arcade, mais ça s’en rapproche quand même furieusement. Oui, c’est moins fin, la vue est plus rapprochée, et cela va un peu moins vite ; oui, on a également perdu le damier au sol, mais dans l’ensemble, ça tourne très bien, de manière très fluide, et les sensations sont clairement assez proches de celles de l’arcade, en dépit de quelques légères variations de framerate. Néanmoins, le jeu fait clairement mieux que la version Master System à tous les niveaux, particulièrement pour ce qui est du son, d’une fidélité absolue à la version arcade. Bref, du bon boulot.

Pour une version aussi ancienne, c’est clairement dans le haut du panier

NOTE FINALE : 11,5/20

Le Sharp X68000 déçoit rarement, et cette adaptation de Space Harrier a de quoi forcer le respect si l’on se souvient de sa date de sortie. Ce n’est peut-être pas l’équivalent de l’arcade, mais c’est à coup sûr ce qui pouvait s’en rapprocher le plus en 1987. Une conversion réussie.

Version ZX Spectrum

Développeur : Elite Systems Ltd.
Éditeur : Elite Systems Ltd.
Date de sortie : Mars 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko
Possibilité de redéfinir les touches
Franchement, pour la machine, c’est très bien réalisé

Au grand jeu des portages, le ZX Spectrum était a priori l’une des machines les moins bien équipées pour accueillir une adaptation du très exigeant Space Harrier. Mais les petits gars de chez Elite Systems semblent avoir, une fois de plus, rivalisé d’ingéniosité pour proposer une version offrant ce qui se rapproche le plus de l’expérience de l’arcade – ce qui, sur l’ordinateur de Sinclair, n’est pas un mince exploit. Naturellement, en dépit d’une sensation de vitesse assez bien rendue, la superposition des sprites et du décor rend l’action particulièrement difficile à lire – distinguer un tir adverse demandera ici des facultés visuelles quasi surnaturelles. Le jeu en est d’ailleurs probablement conscient, vous offrant un généreux total de vies pour entamer l’aventure – ce qui ne sera pas nécessairement suffisant, tant la difficulté a monté en flèche. Dommage également que la musique soit aux abonnés absents. Mais une très bonne expérience sur machine de salon, néanmoins.

NOTE FINALE : 09,5/20

Très bonne surprise pour ce Space Harrier sur ZX Spectrum, à qui on pouvait difficilement en demander plus sur une machine quasi-monochrome dotée de 48k de mémoire. Bien sûr, la jouabilité souffre des limitations techniques de la machine de Sinclair – difficile de distinguer grand chose dans toute cette superposition de sprites – mais on peut aisément comprendre pourquoi les joueurs de l’époque y croyaient à fond. Reste aujourd’hui une version difficile dont la technique n’impressionnera plus personne, mais qui reste très sympathique à jouer.

Version Amiga

Développeur : Elite Systems Ltd.
Éditeur : Elite Systems Ltd.
Date de sortie : Décembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Curiosité au moment de lancer l’adaptation Amiga de Space Harrier : on trouve au générique, comme sur la version Atari ST, un certain… Paul Cuisset, appelé à devenir célèbre par la suite pour sa participation aux point-and-click de chez Delphine Software et, surtout, à l’immense Flashback. Pour la petite histoire, et comme il l’aura raconté lui-même lors d’une interview donnée à jeuxvideo.com, SEGA n’avait tout simplement rien confié à l’équipe qu’il constituait alors avec Mickaël Sportouch pour adapter le jeu d’arcade : aucune donnée, aucune ligne de code, même pas une image, rien ! Ce qui avait conduit les deux amis, à l’époque, à aller filmer la borne en cachette pour pouvoir dessiner les graphismes à la main et coder le soir venu…* Quand on prend en compte ces conditions de développement plutôt extrêmes, on comprend tout de suite mieux les limites évidentes de cette version : on pense de fait beaucoup plus à l’itération Master System qu’à une version capable de pousser l’Amiga à se sortir les tripes. On trouve ainsi quelques surprises imputables à une technique pas encore au point, comme le fait que le changement de couleur d’un dragon entraîne à sa suite tout le décor. De la lenteur générale à la difficulté outrancière, on retrouve sur la machine de Commodore tous les errements de la version 8 bits, et il faut reconnaître que pour un joueur ayant connu l’Amiga au summum de ses capacités, il y a de quoi se montrer déçu. Une version honnête, néanmoins – et même franchement impressionnante si on pense aux conditions de son développement. Oh, ai-je pensé à mentionner que cette version ne contient que neuf des dix-huit niveaux de la version arcade, obligeant les joueurs désireux de découvrir le reste à investir dans Space Harrier : Return to the Fantasy Zone (uniquement disponible dans une obscure compilation parue en 1991, pour ne rien arranger) ? Oui, ça commence quand même à faire beaucoup…

C’est plus coloré que sur 8 bits, mais ça ne va pas plus vite

*Note : Seul Mickaël Sportouch étant crédité sur cette version, et juste pour les graphismes, j’en déduis que nos deux vétérans se sont un peu mélangés les pinceaux dans leurs souvenirs et que c’est juste la version Atari ST du jeu qu’ils ont développée ensemble, et non la version Amiga (même si celle-ci s’est manifestement appuyée sur leur travail).

NOTE FINALE : 10/20

En constatant les quelques faiblesses de cette version Amiga de Space Harrier, on est en droit de se demander si on se trouve face à un portage de la version arcade ou un portage de la version Master System, tant l’adaptation est proche de celle observée sur la 8 bits de SEGA – pour les qualités comme pour les défauts. Si le jeu est toujours agréable – quoique ridiculement difficile – on est en droit de penser que la machine de Commodore était capable de beaucoup mieux, au hasard, en n’amputant pas la moitié du contenu ! On applaudira malgré tout Paul Cuisset et Mickaël Sportouch, qui auront dû réaliser cette version à partir de rien et sans aucune aide de la part de SEGA.

Les avis de l’époque :

« L’effet 3D, prééminent sur la borne d’arcade, est (enfin !) rendu avec brio sur micro. L’ergonomie du jeu s’en trouve considérablement améliorée et les sensations éprouvées aussi. »

Eric Caberia, Tilt n°65, avril 1989, 17/20

Version Atari ST

Développeurs : Paul Cuisset et Mickaël Sportouch
Éditeur : Elite Systems Ltd.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleurs : Joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’Atari ST a également accueilli sa conversion de Space Harrier. Là où on aurait pu s’attendre à lire « voir le test de la version Amiga », il faut reconnaître que le titre est en fait plus différent que ce que sa réalisation pourrait laisser supposer. Sa réalisation, justement, si elle est plutôt dotée de couleurs plus vives que sur Amiga, doit en revanche composer avec une animation plus saccadée, et surtout avec de grandes bandes noires en plus d’une interface assez envahissante à droite de l’écran – et le son n’est pas fantastique non plus. Niveau vitesse, ce n’est pas exactement ébouriffant ; bref, ça ne part pas forcément très bien. Pourtant, une fois la manette en mains, les sensations sont assez bonnes, et la difficulté est nettement moins injuste que sur la machine de Commodore – en fait, c’est plus agréable à jouer que sur Amiga ou sur Master System. Pas forcément le portage le plus sexy, mais l’un des plus intéressants à jouer.

On retrouve toujours une familiarité certaine entre les versions Amiga et Atari ST

NOTE FINALE : 10,5/20

Ce n’est pas nécessairement la version la plus clinquante, mais ce Space Harrier sur Atari ST est plutôt une agréable surprise une fois le joystick en mains. Certes, on a déjà vu plus rapide ou plus fluide, mais la difficulté est mieux équilibrée que sur la plupart des autres portages. Bref, peut-être pas une démonstration technique de haute volée, mais un titre suffisamment ludique pour passer un bon moment.

Version PC Engine

Développeur : Dempa Shimbusha
Éditeur : NEC Technologies, Inc.
Date de sortie : 9 décembre 1988 (Japon) – 15 février 1990 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On sait à quel point la petite console de NEC était capable du meilleur, mais l’exemple de Golden Axe s’est chargé de nous rappeler qu’elle était également capable du pire. Pour ce qui est de Space Harrier, la console 8/16 bits parvient en tous cas à placer le curseur légèrement au-dessus de ce qu’avait accompli la Master System : en dépit de la faible résolution, c’est toujours très joli, les sprites ne clignotent pas et n’apparaissent pas en « bloc », et la jouabilité est infiniment moins punitive que sur la machine de SEGA. La vitesse est également meilleure, et la musique est de bonne qualité. Certes, c’est graphiquement toujours très éloigné de l’arcade, mais ça n’en fait pas moins une des meilleures versions disponibles au moment de sa sortie.

Ce n’est pas sublime, mais c’est efficace

NOTE FINALE : 11/20

Au petit jeu du portage de Space Harrier, la 8 bits de NEC se permet de battre celle de SEGA à son propre jeu : c’est plus rapide, c’est plus jouable et c’est infiniment moins frustrant. Graphiquement parlant, la PC Engine s’en tire également très bien, même si sa résolution limitée empêche le jeu d’aller côtoyer les meilleures versions 16 bits. Une expérience de jeu qui n’est pas à des kilomètres de celle de l’arcade.

Version Sharp X1

Développeur : Kure Software Koubou
Éditeur : Dempa Shimbusha
Date de sortie : 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Au fond, les japonais avaient tout compris

Petite curiosité, annonçant la transition qui s’opérait sur le marché japonais : le Sharp X1 aura été servi APRÈS son successeur direct, le Sharp X68000. On retrouve d’ailleurs une autre équipe aux commandes, même si l’inspiration une fois la partie lancée est évidente : on a affaire à une sorte de « version médiane » entre les version PC-6001 et PC-88. Les gros carrés en guise de décors et de tirs sont donc de retour, et la réalisation est juste légèrement inférieure à celle observée sur PC-88 (même si certains trouveront sans doute que l’aspect « tramé » du ciel lui conférant un petit aspect « Apple II » est plutôt plus joli qu’un grand aplat). La musique est toujours là, mais plus les voix digitalisées (l’absence de vidéo vous confirmera au passage que l’écran-titre n’est toujours pas revenu), et la jouabilité comme la vitesse sont une nouvelle fois les grandes gagnantes de ce portage. En résumé : à peu près ce à quoi on était en droit de s’attendre.

NOTE FINALE : 10/20

Space Harrier sur Sharp X1 reprend la philosophie des portages observés sur PC-88 et PC-6001 avec un résultat très proche de la meilleure des deux versions. Si voler au-dessus d’abstractions graphiques ne vous dérange pas tant que vous le faites à bonne vitesse, c’est une nouvelle fois une itération qui sauvegarde l’essentiel du côté ludique.

Version Famicom

Développeur : TAKARA Co., Ltd.
Éditeur : TAKARA Co., Ltd.
Date de sortie : 6 Janvier 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Mystères et subtilité des portages : un jeu SEGA sur une console Nintendo ! Ce n’était certes pas le premier, mais des titres comme Wonder Boy avaient au moins eu l’exquise politesse de changer de nom et de subir un ravalement de façade avant d’aller s’aventurer chez la concurrence. Pas de ça avec Space Harrier, même si la date de sortie du titre l’aura sans doute empêché de faire beaucoup d’ombre à la version parue sur Master System trois ans plus tôt. Techniquement, on peut dire que les deux titres se valent : certes, les sprites sont plus petits sur NES, et ça clignote tous azimuts, mais l’effet de « bloc » a également disparu et le jeu est globalement un peu plus nerveux et un peu plus fluide que sur la machine de SEGA. Niveau jouabilité, en revanche, le fait que lesdits sprites ne prennent pas la moitié de l’écran rend le personnage beaucoup plus aisé à manœuvrer, et le titre sensiblement moins punitif.

Ceci n’est pas un jeu Master System

NOTE FINALE : 11/20

Camouflet suprême : Space Harrier sur Famicom tient la dragée haute à la version Master System, et pousse même le vice jusqu’à proposer une adaptation sensiblement plus agréable à jouer. S’il faudra composer avec des sprites minuscules, le jeu reste en revanche agréablement rapide, et la palette de couleurs change des dégradés vert-gris qui pullulaient un peu trop sur la machine. Un bon portage.

Version PC (DOS)

Développeurs : David R. Mattern et Brian A. Rice
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Juillet 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquette 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Portage, PC, 1989 : trois mots qui permettent à eux seuls de deviner à quoi s’attendre au moment de lancer cette version de Space Harrier. De fait, plutôt que d’adapter la version arcade, c’est clairement du côté des versions 16 bits que va puiser ce portage. Graphiquement, sans être extraordinaire, le résultat est plutôt satisfaisant et semble tirer parti des cartes VGA – c’est même un peu plus joli que sur Atari ST, qui figurait pourtant dans le haut du panier à ce niveau. Excellente idée : le titre est même jouable à la souris. Deux gros problèmes viennent en revanche empoisonner cette version : premièrement, du côté sonore, ce sera le haut-parleur interne et rien d’autre. On se farcira donc le thème du jeu façon « bip-bip » en boucle, avec pour seul bruitage le « Aaaargh » lâché par votre héros en cas de mort subite (c’est à dire souvent). Plus ennuyeux : le titre n’a pas de limitateur de vitesse. Traduit en clair, il vous faudra tâtonner sous DOSBox – ou trouver un vieux PC qui tourne à la bonne vitesse – pour espérer bénéficier d’une version à peu près jouable.

Pour ce qui est des graphismes, ça va encore. Pour ce qui est du reste…

NOTE FINALE : 10/20

Space Harrier sur PC pourrait sans aucun doute être considéré comme une bonne adaptation s’il ne souffrait pas d’une réalisation sonore indigne de rivaliser avec les versions 8 bits, et surtout d’une vitesse très aléatoire qui vous demandera pas mal de réglages au niveau émulation ou matériel pour enfin profiter d’une expérience de jeu acceptable. C’est dommage, car les graphismes étaient plutôt réussis, et la maniabilité à la souris était une très bonne trouvaille.

Version Game Gear

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Novembre 1991 (Amérique du Nord) – Décembre 1991 (Europe) – 28 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Six ans après sa parution, Space Harrier jouissait apparemment encore d’un réputation suffisamment flatteuse, au milieu du catalogue de chez SEGA, pour se voir porter sur la Game Gear. On était en droit d’espérer que le temps écoulé ait été mis à contribution pour peaufiner une adaptation basée sur la version Master System, et tirant profit à la fois des progrès effectués sur la période et du hardware légèrement supérieure de la console portable. Malheureusement, on ne peut pas dire que ça soit le sentiment que laisse le jeu une fois la console en mains : d’accord, le titre a subi quelques modifications ; il y a davantage d’action, un système de mots de passe et un nouvel écran-titre. Par contre, on ne peut pas dire que la réalisation soit en net progrès : non seulement le programme est toujours incapable de superposer des sprites (au bout de six ans ! Come on !), mais en plus la petitesse de la fenêtre de jeu s’accommode assez mal de l’énormité de votre personnage, qui devient ici d’autant plus facile à toucher que le besoin de faire tenir un maximum de choses à l’écran tend à transformer le titre en joyeux foutoir. Ce n’est pas pour autant désagréable à jouer, mais on était en droit d’espérer un programme un peu plus ambitieux en 1991.

Ceci n’est toujours pas un jeu Master System… Quoique…

NOTE FINALE : 10,5/20

« Sensiblement la même chose que sur Master System avec un très vague coup de peinture neuve », voilà qui pourrait décrire à la perfection l’itération Game Gear de Space Harrier. Si le jeu ne souffre pas trop de la petitesse de l’écran et propose une action débridée dès les premiers instants, il faut également admettre qu’il commence furieusement à sentir le recyclage paresseux et le remplissage opportuniste de catalogue à peu de frais. Un titre sympathique, mais pas nécessairement de ceux qu’on était prêt à acquérir au prix fort en 1991.

Version 32X

Développeur : Rutubo Games
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 3 décembre 1994 (Japon) – Janvier 1995 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Preuve de l’aura d’un titre comme Space Harrier à l’échelle de SEGA, l’adaptation du jeu aura fait partie des titres de lancement de l’éphémère 32X en 1994, soit neuf ans après la version arcade ! Ce laps de temps aura-t-il été suffisant pour pouvoir enfin offrir une itération à la hauteur de la borne ? Eh bien… Pas tout à fait, mais les différences commencent à être assez subtiles. Le jeu va clairement moins vite que dans sa version originale, mais on sent qu’il s’agit plus là d’un choix que d’une contrainte technique (où peut-être est-ce tout simplement dû à la version PAL), car l’animation est très fluide et à des kilomètres des portages précédents – cela a en tous cas le mérite de rendre l’action plus lisible et le titre plus abordable. Seul prix à payer : une fenêtre de jeu très légèrement rabotée, mais rien de franchement dramatique. Cette version gagne également un écran des options permettant de régler la difficulté entre quatre modes, et de choisir d’inverser l’axe vertical pour donner une jouabilité plus « manche à balai ». Dans l’ensemble, une version pas encore tout à fait aussi impressionnante que celle parue sur arcade – quoique de très peu – mais paradoxalement plutôt plus intéressante à jouer.

Bon, d’accord, là ça commence vraiment à ressembler à l’arcade

NOTE FINALE : 12/20

Il aura fallu attendre l’émergence des premières consoles 32 bits pour y avoir droit, mais Space Harrier sur 32X peut enfin prétendre rivaliser avec l’original. C’est peut-être un peu plus lent, surtout en PAL, mais cela rend le jeu un peu plus jouable et un peu plus intéressant. Dommage qu’on n’ait le droit à aucune nouveauté en-dehors d’un écran des options, mais cette fois, on a enfin le sentiment de profiter de l’expérience originale.

Version Saturn
SEGA AGES : Volume 1

Développeur : Rutubo Games
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 17 juillet 1996 (Japon) – 19 décembre 1996 (Europe) – 7 novembre 1997 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Space Harrier aura décidément été le mètre-étalon de toutes les consoles publiée par SEGA jusqu’à la Dreamcast. Deux ans après la 32X, c’était la Saturn qui entendait offrir enfin la copie conforme de la version arcade, au cœur d’une collection intitulée SEGA AGES – en occident, il était d’ailleurs directement vendu dans une compilation incluant également OutRun et After Burner II. Et cette fois, au moins, pas de jaloux : la Saturn utilise sa puissance pour offrir une copie conforme de la version arcade, en 60 images par seconde, avec en bonus un menu des options encore un peu plus étoffé que sur 32X (avec notamment un Sound Test, pour les amateurs de ce genre de choses). Inutile de tergiverser : référez-vous au test de la version arcade, cela ira plus vite.

Welcome to the Fantasy Zone !

NOTE FINALE : 12,5/20

Il aura donc fallu plus de dix ans pour voir débarquer une conversion parfaite de la version arcade de Space Harrier dans les foyers – ce qui situe assez bien l’accomplissement technique que représentait le jeu à sa sortie. Sur Saturn, le jeu débarque à l’identique avec juste un peu plus d’options, et le seul reproche qu’on puisse lui faire est de ne pas intégrer de nouveautés tirant parti du support CD, mais au moins, pas de chichis : c’est de peu la meilleure version disponible.

Golden Axe

Développeur : Team Shinobi
Éditeur : SEGA Europe Ltd.
Testé sur : ArcadeMaster SystemMega DriveAmigaAmstrad CPCArcade (Mega-Tech)Atari STCommodore 64PC Engine CDZX SpectrumPC (DOS)
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, Linux, Macintosh, PlayStation 2, PlayStation 3, Switch, Wii, Windows, WonderSwan Color, Xbox 360, Xbox One, Xbox Series X/S – Figure au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini (version Mega Drive)
Disponible dans la compilation : Sega Classics Arcade Collection (Mega-CD)
En vente sur : Microsoft Store (version arcade, Xbox One – Xbox Series), Steam (version Mega Drive, Windows)

La saga Golden Axe (jusqu’à 2000) :

1 – Golden Axe (1989)
2 – Golden Axe Warrior (1991)
3 – Golden Axe II (1991)
4 – Ax Battler : A Legend of Golden Axe (1991)
5 – Golden Axe : The Revenge of Death Adder (1992)
6 – Golden Axe III (1993)
7 – Golden Axe : The Duel (1994)

Version Arcade

Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et trois boutons
Version testée : Version internationale, set 3
Hardware : SEGA System 16B
Processeurs : Motorola MC68000 10MHz ; Zilog Z80 5MHz ; Intel 8751 8MHz
Son : Haut-parleur ; YM2151 OPM 4MHz ; NEC uPD7759 640kHz ; Netlist Sound Device ; 1 canal
Vidéo : 320 x 224 (H) 60,054389Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les vents de fraicheur qui soufflent parfois sur le paysage vidéoludique peuvent prendre les formes les plus étranges.

Prenons l’âge d’or du beat-them-all : la fin des années 80. Porté par des succès critiques et commerciaux comme Renegade et Double Dragon, le genre semblait avoir trouvé à la fois ses marques et sa vitesse de croisière. Désormais, la recette était bien connue en occident : des gangs de loubards, des combats de rue et de la castagne (je dis « en occident » car, avant d’être passé à la moulinette à idées, Renegade avait en fait choisi une voie sensiblement différente en mettant en scène des rivalités entre groupes de lycéens japonais). Dès lors, les surprises étaient rares, et il était établi qu’un beat-them-all consistait à opposer un vigilante à la Charles Bronson aux populations des rues mal famées d’une ville américaine lambda de la fin du XXe siècle ou du début du XXIe.

Jusqu’à l’instant salutaire où quelques studios commencèrent à ressentir l’envie de renouveler un peu le concept. Après tout, quitte à s’échanger des coups de barre à mine ou de batte de baseball, pourquoi ne pas imaginer qu’on puisse faire la même chose avec des épées ou des haches à deux mains ? Avec le recul, il est presque incroyable qu’il ait fallu attendre 1989 pour qu’un grand succès de l’arcade (parce qu’il y avait bien eu Kabuki-Z dans le Japon médiéval mais, heu, comment dire…) se décide à reprendre la formule consacrée pour la déplacer dans un univers médiéval-fantastique avec la sortie d’un des piliers du genre : Golden Axe.

Le scénario du titre de la Team Shinobi ne surprendra personne : Conan le Barbare et Thulsa Doom étant déjà pris, on a fait appel à des modèles de remplacement sobrement nommés Death Adder dans le rôle du méchant, et Ax Battler, Gilius Thunderhead et Tyris Flare dans le rôle des gentils ayant bien évidemment tous perdu au moins un membre de leur famille à cause du big boss. Ajoutez une histoire de roi et reine retenus prisonniers par Death Adder, et vous aurez alors tous les prétextes nécessaires pour vous mettre en route vers le château du maléfique tyran et restaurer la justice à grand coups de latte dans ses gencives, comme c’était la coutume.

La prise en main à trois boutons ne devrait, à ce titre, pas vous prendre par surprise : un bouton sert à frapper, l’autre à sauter… et le dernier, plus original, vous permettra de faire usage de magie. Cette sorte de « smart bomb » dont le rôle est de vous aider à faire le ménage à l’écran nécessitera d’accumuler des fioles lâchées par des sortes de petits gnomes très énervants, jusqu’à atteindre certains « paliers » qui impacteront la puissance de votre sortilège. Histoire de rendre les choses encore plus intéressantes, chacun des trois personnages susmentionnés dispose de ses aptitudes et de son affinité magique propres.

Gilius, le nain, frappera ainsi très fort avec sa hache, mais sa magie de foudre sera également la moins puissante. À l’autre extrémité du spectre, Tyris, l’amazone, aura une magie de feu dévastatrice mais pourra moins compter sur sa force physique brute. Ax, comme vous l’aurez déjà compris, correspondra à la solution consensuelle en étant équilibré dans tous les domaines. Si proposer des personnages aux caractéristiques différentes constituait déjà une nouveauté rafraichissante en 1989, il est en revanche dommage qu’il soit impossible pour deux joueurs d’incarner le même personnage au cours d’une partie – et qu’il soit impossible de connaître lesdites caractéristiques autrement qu’au feeling, en expérimentant avec les trois personnages. Cela n’en constitue pas moins une excellente trouvaille.

Le reste des possibilités est moins innovant : il n’y a pas de chope à proprement parler, les projections sont automatiques, et l’attaque vers l’arrière disponible en pressant simultanément saut+attaque n’est pas assez efficace pour servir à quelque chose. Il n’y a donc pas de prise de dégagement, et peu de réelles alternatives au fait de marteler le bouton d’attaque. Apprécions quand même deux bonnes idées : la possibilité de courir et de charger en poussant deux fois le stick dans la même direction, et surtout l’apparition de montures ressemblant à des dragons (ou à une espèce de créature à bec tout droit venue d’Altered Beast, également chez SEGA) qui remplaceront les armes habituellement laissées par les ennemis dans les autres beat-them-all. Avouez qu’une bonne grosse boule de feu de dragon dans le tas d’adversaires, c’est quand même plus grisant qu’un coup de chaîne de vélo !

Mine de rien, cela commence à faire pas mal d’excellentes idées, et cela prouve que SEGA n’était pas décidé à simplement reprendre un beat-them-all lambda pour le repeindre à la sauce médiévale. On regrettera à ce titre que les adversaires, eux, soient tous purement humanoïdes et qu’on n’ait pas utilisé l’excuse de la magie pour affronter des créatures un peu plus dépaysantes (il y a bien quelques squelettes, allez…). À noter que les rares modèles d’ennemis ne sont d’ailleurs pas très variés, tout comme les quelques boss qui doivent en fait correspondre à deux modèles plus Death Adder. C’est la première vraie faiblesse d’un titre qui réalisait jusqu’ici un sans faute – une lacune qui n’avait strictement rien de rédhibitoire en 1989, mais qui passera un peu plus difficilement auprès des joueurs du XXIe siècle.

La deuxième vraie faiblesse repose plutôt dans le gameplay à proprement parler : comme on l’a vu, le système de combat du jeu ne peut pas être considéré comme étant technique. En-dehors du bourrinage de base, la seule alternative d’engagement doit correspondre au fait de courir pour faire une charge, et les sauts ne portent pas assez loin et sont trop facilement interceptés pour être réellement utiles. Pour ne rien arranger, vous pouvez toucher votre coéquipier – et il est impossible de changer cet état de fait – et les adversaires n’ont pas l’exquise politesse de ceux de Double Dragon : non seulement ils n’hésiteront jamais à vous frapper dans le dos, mais cela constituera même leur obsession pendant toute la partie, si possible en vous fonçant dessus. Autant dire que le jeu est à ce titre particulièrement délicat lorsqu’on y joue seul : 95% du temps de jeu sera passé à se faire prendre en sandwich sans pouvoir y faire grand chose, et toute votre jauge de magie étant vidée à chaque fois que vous voudrez en faire usage, bon courage pour vous désengager lorsque vous êtes au milieu de trois adversaires. Un peu frustrant…

Le jeu n’est de toute façon pas assez long (comptez une vingtaine de minutes) pour avoir le temps de devenir redondant, mais il faut reconnaître qu’une certaine lenteur associée à un manque de possibilités font qu’on prend nettement moins de plaisir à y jouer aujourd’hui qu’en 1989. La réalisation, si elle reste très honnête, fait quand même la part belle aux éternelles même teintes gris-marron, la musique est assez discrète et les bruitages digitalisés – repompés sans vergogne dans Rambo et Conan le Barbare –  deviennent vite répétitifs. Si les lieux explorés se veulent dépaysants (un village sur une tortue, un trajet sur un aigle géant…), dans les faits, on n’est quand même jamais surpris par ce que le titre nous propose. Cela laisse le sentiment désagréable que l’univers du jeu a été sérieusement sous-exploité, mais si on se replace dans la position d’un joueur de l’époque face à une borne d’arcade, le concept restait largement assez novateur pour avoir envie de remettre une pièce. Reste aujourd’hui un titre nettement moins innovant mais jouissant toujours de l’aura si particulière d’avoir été le premier du genre.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 14,5/20 Véritable bouffée d'air frais au sein d'un monde vidéoludique infesté par les clones de Double Dragon et leurs combats urbains au moment de sa sortie, Golden Axe reste un titre dépaysant dans un genre qui aura périclité avant de réellement prendre le temps d'explorer tous les univers originaux. Jouer à Conan le Barbare, seul ou à deux, est toujours une curiosité qui vaut la peine d'être vécue, particulièrement grâce à l'ajout bienvenu des montures et du très graphique système de magie. Reste que les combats pas très techniques et le rythme assez poussif du titre de la Team Shinobi risque, aujourd'hui, de repousser beaucoup des nouveaux joueurs qui auraient la curiosité de découvrir les succès de l'arcade d'antan. CE QUI A MAL VIEILLI : – La réalisation, un peu terne, a bien du mal à rivaliser avec celle des titres des années 90 – Univers graphiquement et ludiquement sous-exploité – Pas de chope et des projections automatiques : les possibilités ne sont pas immenses

Version Master System

Développeur : Team Shinobi
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 1989 (Europe) – 1er mars 1990 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version occidentale
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Passer de l’arcade à un système 8 bits est toujours un casse-tête de programmation, et on sent bien que SEGA y aura été confronté à son tour au moment de porter Golden Axe sur Master System. Parmi les nombreuses questions en pareille situation, la première est certainement de décider quoi couper. À ce niveau, la réponse de SEGA aura été assez radicale : non seulement il n’y a plus de mode deux joueurs, mais il n’y a également plus qu’un seul personnage disponible ! Ax Battler sera désormais le seul guerrier à partir défier Death Adder, mais pour l’occasion, on lui offre le choix de son système de magie entre ceux des trois des personnages d’origine, et pour fêter cela on le renomme Tarik. Au moins dira-t-on que l’essentiel a été préservé à ce niveau.

Niveau réalisation, il faut reconnaître que le travail est plutôt impressionnant pour un jeu 8 bits sorti en 1989. Les sprites sont grands, c’est coloré, cela bouge relativement bien – même s’il est difficile de ne pas remarquer que les animations ont été grandement simplifiées. La magie est également relativement impressionnante si l’on considère les capacités de la Master System. En revanche, il n’y a pour ainsi dire jamais plus de trois personnages à l’écran, la mise en scène a disparu, et la jouabilité est devenue plus hachée et plus poussive. Si tout le contenu – montures comprises – est toujours présent, il faut bien avouer que la magie opère nettement moins bien, notamment parce que la fâcheuse habitude des adversaires de se placer dans votre dos devient réellement insupportable maintenant que vous êtes condamné à les affronter seul. La vraie question est : la Master System pouvait-elle réellement offrir mieux ?

NOTE FINALE : 09/20

Au moment de porter Golden Axe sur sa Master System, SEGA aura commis une erreur qu’il répètera quelques années plus tard avec Streets of Rage : celui de miser, avant tout, sur la réalisation, au détriment du jeu en lui-même. Certes, la réalisation graphique est solide pour une console 8 bits, et le jeu s’efforce de sauvegarder l’essentiel de la jouabilité originale ; malheureusement, le fait d’avoir perdu les deux tiers du roster ainsi et surtout que le mode deux joueurs condamne le jeu à s’afficher comme un succédané assez frustrant de la version arcade. Difficile, aujourd’hui, de s’amuser plus de quelques minutes en y jouant.

Version Mega Drive

Développeur : Team Shinobi
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 23 décembre 1989 (Japon) – Février 1990 (États-Unis) – Novembre 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version internationale 1.1
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au rang des premières machines servies au moment de porter Golden Axe, quoi de plus normal que de trouver la Mega Drive ? La 16 bits flambant neuve de SEGA était a priori un des choix les plus logiques et les plus adaptés pour recevoir le titre-phare, surtout à une époque où la machine était encore désespérément en manque de titres marquants depuis son lancement raté un an et demi plus tôt. En 1989, les jeux commençaient (enfin) à aller un peu mieux : le portage de Ghouls’n Ghosts, en août, avait été un des premiers à réellement marquer les esprits, et pour les fêtes de Noël, la Team Shinobi aura mis les bouchées double avec pas moins de deux titres majeurs : The Revenge of Shinobi d’un côté, et ce portage de Golden Axe de l’autre.

Dès l’écran-titre, on remarque en tous cas que le jeu se veut plus accessible : non seulement un mode « beginner » (débutant) a fait son apparition, mais il est également possible de passer par les options pour vous attribuer jusqu’à cinq points de vie en lieu et place des trois d’origine. Peut-être pas les options les plus nécessaires étant donné la brièveté du jeu, mais on appréciera l’effort. Mais là, en revanche, où on applaudit des deux mains, c’est pour l’ajout d’un niveau supplémentaire ! En effet, une fois Death Adder vaincu, le roi vous ouvrira une porte pour vous laisser découvrir le « donneur d’ordres » dans un stage entouré de précipices – de quoi prolonger encore un peu l’aventure, qui en avait besoin, et donner lieu à un combat final encore un peu plus spectaculaire que le premier.

Du côté de la réalisation, si le titre est indéniablement inférieur graphiquement à la version arcade, il faut reconnaître qu’on peut comprendre pourquoi les joueurs de l’époque avaient parfois vraiment le sentiment de lancer la borne sur leur télévision : cela reste très joli, et très proche dans la palette de couleurs et la taille des sprites de ce qu’on avait pu observer sur System 16. Les vraies pertes se situent plutôt du côté de la mise en scène : fini, les villageois qui fuient (uniquement au premier niveau, curieusement : on les retrouvera bel et bien dès le stage suivant) ; fini, les scènes de torture, et la mort de votre ami Alex au lancement du jeu est désormais remplacée par un monologue de votre héros. Difficile de dire s’il s’agit là de censure ou des limitations techniques de la machine ou de la contenance de la cartouche (même la borne d’arcade ramait quand il y avait trop de monde à l’écran), mais cela rend le jeu un petit peu moins vivant.

Du côté sonore, les bruitages digitalisés sont toujours là, relativement honnêtes mais – nouvelle surprise – la musique s’interrompt chaque fois que l’un d’eux retentit. Rien de très grave, mais on sent bien là des tracas inhérents à un jeu programmé sur une machine en début de vie. Mais pour ce qui est de la jouabilité, au moins, rien à redire : les trois boutons de la manette permettent de retrouver le confort de l’arcade, les animations sont fluides, les sensations sont très proches de la version originale, bref, l’essentiel a été préservé et la magie opère encore très bien.

NOTE FINALE : 14,5/20

SEGA avait promis l’arcade à domicile : si ce n’est pas encore complètement vrai pour ce Golden Axe, il faut reconnaître qu’il y avait malgré tout largement matière à bluffer les joueurs de l’époque. Certes, c’est un petit peu moins beau, les sons sont légèrement inférieurs, une partie de la mise en scène est passée à la trappe ; néanmoins, le cœur du jeu est toujours là et les sensations sont indéniablement très proches de celles de l’arcade une fois qu’on a la manette en mains – on bénéficie même d’un niveau supplémentaire qui constitue une très bonne raison d’investir dans cette version. Un portage irréprochable, surtout si l’on considère l’année de sa sortie.

Du côté des fans :

Les fans sont souvent des puristes qui attachent de l’importance à des détails que des joueurs moins perfectionnistes ne verraient peut-être même pas. Parmi les déceptions récurrentes, sur les titres développés sur une Mega Drive en début de vie, figure souvent le choix des teintes, trop éloignées de celles de l’arcade. Un certain Gabriel Pyron s’est mis en tête de corriger ce fait, grâce à un hack disponible à cette adresse, et qui nécessitera un patcheur de type IPS pour être appliqué. Le résultat fera fondre le cœur des nostalgiques, en se rapprochant beaucoup plus fidèlement des teintes de la version arcade. Le résultat est parfois subtil, parfois spectaculaire, et peut être visionné ci-dessous. Une bonne occasion d’approcher de la version ultime.

Reconnaissez que ça a de la gueule

Version Amiga

Développeurs : Probe Software Ltd. – Dementia
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Golden Axe aura également été porté sur une vaste sélection d’ordinateurs 8 et 16 bits, sous la houlette de Virgin. À une époque où l’Amiga avait déjà eu l’occasion de faire des miracles (Shadow of the Beast, par exemple, était sorti l’année précédente), la version vendue sur la machine de Commodore risquait de se présenter comme un bon aperçu de ce qu’on était en droit d’espérer pour les autres machines. Du côté du contenu, au moins, tout est toujours présent : le mode deux joueurs, les montures, tous les niveaux, les trois personnages, l’ensemble des coups – on a même récupéré une partie de la mise en scène, avec quelques villageois qui fuient. En revanche, n’espérez pas de menu des options : on lance le jeu, on choisit son personnage et basta.

Graphiquement parlant, le jeu est très correct sans pour autant pousser l’Amiga dans ses derniers retranchements – on est très loin des 128 couleurs et des défilements parallaxes de Shadow of the Beast, justement. Mais le titre reste relativement fin, agréable à l’œil, et utilise raisonnablement bien la palette de couleurs de la machine de Commodore. Niveau son, la très grande majorité des cris digitalisés a disparu et les thèmes musicaux tournent vite en boucle, mais les bruitages des coups sont toujours là. En revanche, du côté de la jouabilité, sauter vous demandera de faire attaque+haut ou attaque+diagonale haut, autant dire que ce n’est pas extrêmement pratique. On s’y fait malgré tout avec un peu de pratique. En revanche, l’animation est nettement plus poussive que sur Mega Drive, et les masques de collision sont très imprécis – sans compter cette caractéristique énervante qu’à le défilement à ne jamais réussir à suivre votre personnage. Autant de détails qui finissent par peser.

NOTE FINALE : 13/20

Correcte sans être ébouriffante, cette version Amiga de Golden Axe n’en met certes ni plein les yeux ni plein les oreilles, mais a l’avantage de préserver l’intégralité du contenu du jeu, y compris l’indispensable mode deux joueurs. La jouabilité à deux boutons pourra nécessiter un temps d’adaptation, mais on peut toujours passer un bon moment avec un ami, ce qui est l’essentiel. Pas le portage le plus impressionnant jamais vu sur la machine de Commodore, mais certainement pas le pire.

Les avis de l’époque :

« Golden Axe mérite d’être l’un des grands succès de la fin de l’année, car les conversions d’arcade de cette qualité se comptent sur les doigts d’une main ces temps-ci. La version Amiga est presque aussi réussie que celle de la Megadrive, ce qui n’est pas un mince exploit, et elle est très nettement supérieure à celle du CD Rom NEC. Que l’on ne vienne plus nous dire qu’il n’est pas possible d’égaler les conversions consoles sur micro : il suffit seulement que les programmeurs s’en donnent la peine ! »


Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, Janvier 1991, 18/20

Version Amstrad CPC

Développeurs : Probe Software Ltd. – Paradise Software
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Après son escapade décevante sur Master System, Golden Axe allait-il mieux s’en sortir sur un autre système 8 bits ? Dès le lancement, on est déjà rassuré : après un bel écran-titre accompagné d’une reprise du thème du jeu, le programme nous propose immédiatement de configurer les commandes des deux joueurs, sachant qu’il est possible de jouer à deux joysticks et d’utiliser le clavier – la magie étant de toute façon à placer sur une touche du clavier dans tous les cas.

Une fois la partie commencée, on doit certes composer avec une réalisation qui n’a plus grand chose à voir avec la borne d’arcade, mais cela reste dans le haut du panier de ce que le CPC a pu offrir : c’est coloré et suffisamment lisible pour qu’on comprenne toujours ce qui se passe à l’écran. La jouabilité est d’ailleurs devenue un peu plus nerveuse, le jeu tournant plus vite, et l’intégralité du contenu du jeu est toujours là – sauf les effets de mise en scène, mais honnêtement, on s’y attendait un peu. Si la musique ne se fait plus entendre une fois en jeu, les bruitages des coups sont toujours là – en un mot : l’essentiel, et c’était à n’en pas douter le bon choix à faire.

NOTE FINALE : 10,5/20

Contrairement au choix opéré par SEGA sur sa Master System, Virgin aura choisi de ne pratiquement rien sacrifier au moment de porter Golden Axe sur Amstrad CPC. C’était indéniablement le bon choix, car non seulement on peut toujours passer un très bon moment à deux joueurs, avec des commandes entièrement configurables, mais en plus la réalisation est plus qu’honnête et le jeu tourne très bien. Un très bon portage.

Version Arcade (Mega-Tech)

Développeur : Team Shinobi
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Hardware : Processeurs : Motorola MC68000 7,670453MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz (x2)
Son : Haut-parleur (x2) – SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; YM2612 OPN2 7,670453MHz ; SEGA 315-5246 SMS2 VDP 10,738620MHz ; SEGA VDP PSG 3,579540MHz – 2 canaux
Vidéo : 256 x 224 (H) ; 320×224 (H) 59,922738Hz

Les habitués doivent commencer à connaître la chanson : Mega-Tech, c’était grosso modo une Mega Drive dans une salle d’arcade – histoire de promouvoir la bête, vous vous en doutez. Les joueurs européens auront donc eu tout loisir de pouvoir comparer Golden Axe version Mega Drive à son alter ego sur la borne voisine, au détail près qu’un crédit leur achetait ici cinq minutes de jeu. Comme toujours, un deuxième écran vous résume le scénario du jeu, vous décrit la fonction des boutons et vous permet de choisir votre jeu (il était possible de connecter jusqu’à dix cartouches simultanément). Une expérience qui n’est aujourd’hui disponible que via l’émulation, et pour des motifs purement historiques puisque vous aurez tout aussi vite fait de lancer le jeu sur votre console ou via une des versions dématérialisées.

NOTE FINALE : 14,5/20

Au rang des grands classiques, Golden Axe version Mega-Tech est une copie conforme de la version Mega Drive où les crédits vous achètent du temps de jeu. Introuvable aujourd’hui, sauf via l’émulation, mais si jamais vous vous demandiez de quoi il était question, maintenant, vous savez.

Version Atari ST

Développeur : Probe Software Ltd. – Dementia
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 260 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au moment d’aborder la version ST de Golden Axe, les vieux briscards et les connaisseurs du site s’attendront certainement à un couplet du style « la même chose que sur Amiga ». Force est de reconnaître que les deux versions sont, comme très souvent, extrêmement proches. Toutefois, sur le plan de la réalisation, cette version ST doit également composer avec quelques faiblesses qui n’étaient pas présentes dans la version Amiga. Ainsi, non seulement la fenêtre de jeu est entourée de larges bandes (une constante sur ST à cause de l’overscan), mais une interface envahissante s’est en plus invitée histoire de réduire encore la fenêtre de jeu. Même avec cet artifice, le défilement est saccadé, l’animation est plus poussive, et il faudra même composer avec des chargements en plein niveau ! Cela ne pénalise au final heureusement pas trop l’expérience de jeu, mais cette version reste clairement inférieure à celle parue sur la machine de Commodore.

NOTE FINALE : 12,5/20

Aussi proche qu’elle parvienne à être du portage sur Amiga, cette version Atari ST de Golden Axe doit malheureusement composer avec de nombreuses limitations techniques (ralentissements, chargements) qui n’étaient pas présentes chez son concurrent direct. L’essentiel de l’expérience est heureusement toujours présent, mode deux joueurs inclus, ce qui fait que le titre est toujours agréable à parcourir – mais cette bataille entre les deux machines reines des années 80 est malgré tout remportée par l’ordinateur de Commodore.

Version Commodore 64

Développeur : Probe Software Ltd. – Visual FX
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les portages, c’est un peu comme les loteries : ce ne sont pas toujours les mêmes qui gagnent. Prenez le Commodore 64 : là où l’autre machine de Commodore avait remporté la guerre des ordinateurs 8 bits pour Strider, elle se retrouve cette fois clairement du côté des vaincus. Mettons-nous tout de suite à l’aise avec les points qui fâchent : le mode deux joueurs est passé à la trappe, il n’y a plus que deux types de montures, et il n’y aura jamais plus d’un adversaire à la fois à l’écran ! En ce qui concerne l’éternel dilemme « musique ou bruitages ? », le jeu a le bon goût de vous laisser trancher entre les deux en début de partie (la musique est très réussie, mais elle tourne vite en boucle). Quant à la jouabilité, elle fait le travail, même si je n’aurai jamais réellement compris comment on était censé employer la magie avec un seul bouton (je l’ai fait à plusieurs reprises, mais de façon totalement accidentelle). Cela commence à faire beaucoup, mais il faut reconnaître que la réalisation graphique, elle, est plutôt réussie. Forcément, avec seulement deux sprites à l’écran, cela laisse de la mémoire pour soigner la présentation – mais était-il réellement nécessaire de sacrifier autant de choses juste pour des graphismes un peu plus travaillés ?

NOTE FINALE : 08/20

À la terrible question « contenu ou présentation ? », Virgin aura à son tour commis la tragique erreur déjà faite par SEGA au moment de porter Golden Axe sur Master System. Autant être clair : la version Commodore 64 du titre de la Team Shinobi est la plus mauvaise de toutes, la faute à un contenu et une jouabilité mutilés. Quelques décors honnêtes ne valaient certainement pas la perte du mode deux joueurs, ni le fait de limiter le jeu à une suite de duels. Un portage à fuir.

Version PC Engine CD

Développeur : Renovation Game
Éditeur : Telenet Japan Co., Ltd.
Date de sortie : Mars 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : CD System Card 2.0 requise

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

SEGA s’est aussi présenté chez la concurrence, comme le prouve la sortie de Golden Axe sur le support CD-ROM de la PC Engine. En fait, il existait même un accord entre SEGA et NEC, que la firme au hérisson bleu se sera hâtée de ne pas renouveler, afin de cesser de proposer ses titres-phares sur des machines qui risquaient fort de faire de la concurrence à sa Mega Drive flambant neuve. Mais qui dit CD dit également « il faut bien le remplir ! », et puisque le jeu d’origine était assez léger pour tenir sur une disquette floppy, la solution paraissait évidente : mettons des vidéos !

Une intro animée, tout d’abord, histoire de placer l’ambiance et de nous rappeler que Death Adder est un grand méchant (entouré de jeunes femmes parce que bon, c’est plus esthétique) qui est tellement méchant qu’on peut même le ressusciter avec un casque envahi par des vipères, d’où son nom (« adder » signifiant « vipère » en anglais, vous aurez au moins appris quelque chose aujourd’hui). Aucune référence à la hache dorée où que ce soit, mais c’est pas grave, on la garde. Mais comme il restait encore beaucoup de place, pourquoi ne pas carrément offrir une vidéo de présentation pour chaque personnage, dans le style animé également ? Allez hop ! À vous la joie de découvrir la souffrance secrète de Gilus et Ax, ou bien l’intérêt pas du tout putassier de placer une caméra derrière Tyris et à hauteur de son postérieur, histoire de bien vous rappeler à quel point les amazones détestent s’embarrasser d’une armure plus grande qu’un string. Difficile d’en prendre plein les yeux aujourd’hui, mais on ne pourra pas accuser l’équipe de développement de ne pas avoir soigné l’enrobage. Ceci dit, les vidéos, c’est très bien, mais qu’en est-il du jeu en lui-même ?

Allons à l’essentiel : c’est raté. Premier problème : après avoir tenté de nous en mettre plein les yeux avec ses dessins animés et avec les courbes de Tyris, le jeu se ramasse en beauté. Certes, on a vu largement pire, en particulier sur les autres systèmes 8 bits, mais quand on sait de quoi est réellement capable la console de NEC (voir l’adaptation de Street Fighter II’, par exemple) , on ne peut que faire la moue devant cette bouillie de pixels même pas au niveau de ce qu’offrait la Master System : les sprites sont grotesques, les masques de collision sont atroces, les proportions sont ratées, on a droit à deux grandes bandes noires pour réduire la fenêtre de jeu, les décors disparaissent pendant les sortilèges, et même comme ça le programme trouve le moyen d’avoir des ralentissements ! Heureusement qu’on peut au moins profiter de la musique CD – d’ailleurs pas franchement marquante – pour nous rappeler sur quelle machine on joue. Surtout, des adaptations assez malheureuses ont été faites dans la disposition des adversaires : le troisième niveau est désormais pratiquement vide, tandis que le quatrième est rempli à ras-bord. Mais ce qui ne passe vraiment pas, c’est la disparition du mode deux joueurs ! C’est aussi inexplicable qu’impardonnable, et cela finit de condamner cette version à l’oubli.

NOTE FINALE : 08/20

Si SEGA craignait que la console de NEC vienne rivaliser avec la Mega Drive, ce portage raté de Golden Axe a dû les rassurer. Mal réalisée, mal équilibrée, difficilement jouable, mutilée au point d’en perdre son mode deux joueurs, cette version fait passer la PC Engine pour une machine à peine capable de lutter avec la Master System. Remplir un CD d’animations ne suffit pas : on préfère largement avoir un jeu correct. À ne découvrir que par curiosité.

Version ZX Spectrum

Développeur : Probe Software Ltd. – Paradise Software
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Cursor, Fuller, Kempston et Sinclair
Version testée : Version disquette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration Minimale : RAM : 48ko
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Grand habitué des portages d’arcade, le ZX Spectrum aura bien évidemment profité de sa propre version de Golden Axe. Au menu du jeu : mode deux joueurs, configuration des touches, totalité du contenu de la version arcade ; on sent que le portage n’a pas été bâclé. Certes, techniquement, la machine de Sinclair connait de sérieuses limitations : il n’y aura plus de musique passé l’écran-titre et il faudra composer avec de petits ajustements, comme le fait que les personnages-joueurs ne puissent plus se taper dessus. Mais pour le reste, on pouvait difficilement en demander plus à cette version : c’est fluide, c’est jouable, c’est amusant et ça ne ralentit jamais. Certainement pas de quoi amener les joueurs du XXIe siècle à comprendre ce que les nostalgiques peuvent bien trouver à cette machine, mais une expérience agréable pour tous les autres.

NOTE FINALE : 10/20

Si vous voulez un bon beat-them-all jouable à deux sur ZX Spectrum, ne cherchez pas plus loin : Golden Axe devrait vous combler à tous les niveaux. Si le portage souffre comme toujours des limitations techniques de la machine de Sinclair, il n’en propose pas moins une expérience ludique tout à fait agréable. À essayer.

Version PC (DOS)

Développeurs : John et Ken Sanderson
Éditeur : SEGA of America, Inc.
Date de sortie : Juillet 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25 et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration Minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les lecteurs assidus du site le savent : on ressent toujours une certaine appréhension au moment de lancer la conversion d’un jeu d’arcade de la fin des années 80 sur PC. On sait qu’on est à peu près condamné à composer avec une version moche, lente et injouable – mais on se souvient aussi que, les choses allant très vite, la démocratisation des modèles AT avait commencé à propulser la machine d’IBM au rang de machine de jeu qu’il paraissait totalement incongru de lui accoler quelques mois plus tôt.

À tel point qu’au moment de lancer Golden Axe sur PC, porté par les frères Sanderson, c’est le choc : enfin un portage qui tire réellement parti des 256 couleurs du VGA ! Osons même le dire : c’est pratiquement aussi beau que sur arcade, ce à quoi on n’était pas encore franchement habitué à l’époque. Certes, c’est moins détaillé : on ne voit plus, par exemple, la carapace de la tortue géante, remplacée par du sol générique (comme c’était également le cas dans la version Mega Drive), mais cela fait néanmoins largement illusion. Pour ne rien gâcher, le programme tire également parti des cartes-son de l’époque – pas de la Roland MT32, malheureusement – et si les bruitages « crachent » un peu trop, étant produits par le haut-parleur interne, ils demeurent très correct, tout comme la musique. En fait, seule la jouabilité au joystick est un peu déstabilisante : pousser le stick à fond dans une direction vous fera dorénavant courir d’office, et il faudra apprendre à y aller doucement pour ne pas foncer inopportunément dans le vide. On récupère même toutes les options ajoutées sur Mega Drive, y compris le niveau supplémentaire, avec en prime un mode « duel » anecdotique mais qui a le mérite d’exister. Le seul reproche qu’on pouvait adresser au titre à l’époque – et qui n’a plus réellement de sens aujourd’hui – est qu’il nécessitait une grosse configuration pour être fluide. Mais pour ceux qui en bénéficiaient alors, quelle excellente surprise !

NOTE FINALE : 14/20

Le PC des années 80 ne nous y avait certainement pas habitué, mais le fait est que ce portage de Golden Axe (directement repris de la version Mega Drive) est un des meilleurs, tous systèmes confondus. Avec des graphismes qui n’ont pas à rougir de la comparaison avec l’arcade et une réalisation sonore qui tient la route (dommage que les bruitages soient restés cantonnés au haut-parleur interne), seule la jouabilité pourra nécessiter un léger temps d’adaptation. Mais avec l’ajout des options déjà observées sur Mega Drive, c’est clairement une version à tester pour tous ceux qui n’ont pas une borne d’arcade sous la main.

Sid Meier’s Railroad Tycoon

Développeur : MPS Labs
Éditeur : Microprose Software, Inc.
Titre alternatif : Railroad Tycoon (titre usuel)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STMacintoshPC-98
Version non testée : FM Towns
Également testé : Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe
Testé sur : PC (DOS)PC-98

La saga Railroad Tycoon (jusqu’à 2000) :

  1. Sid Meier’s Railroad Tycoon (1990)
  2. Railroad Tycoon II (1998)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Juin 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25 (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0* – RAM : 512ko**
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Tandy/PCjr, Tandy DAC (TL/SL)
*MS-DOS 5.0 requis pour la version CD-ROM
**640ko requis pour le mode VGA, 4Mo requis pour la version CD-ROM

Vidéo – L’introduction du jeu :

Lorsque l’on cherche à comprendre ce que nous propose réellement un jeu vidéo au fil des âges, on retrouve grosso modo cinq activités qui pourraient à elle seule résumer la quasi-totalité de la production vidéoludique depuis les années 70 : éviter des obstacles, détruire des trucs, tuer des gens, résoudre des énigmes… et aller travailler.

Si cette dernière catégorie peut surprendre – après tout, le jeu vidéo est plutôt une manière de s’évader, et on préfère généralement effectuer une activité professionnelle pour toucher un salaire et non payer pour aller bosser – il faut bien comprendre qu’au lieu de vous demander d’aller changer une ampoule ou de remplacer la chasse d’eau, l’idée était généralement de vous confronter à des métiers un peu plus ambitieux que celui d’ouvrier non-qualifié. En fait, plutôt que dans la position du travailleur, le jeu vidéo a souvent considéré comme plus pertinent de vous placer dans celle de l’entrepreneur ou du gestionnaire. Après tout, il n’est pas nécessairement donné au commun des mortels de se retrouver à la tête d’une puissante chaîne d’hôtels, d’une ville… ou d’une compagnie de chemins de fer.

Si, en 1990, Sid Meier ne s’était pas encore fait un nom au point d’être connu à l’échelle planétaire auprès des joueurs, il avait déjà pu démontrer tout son savoir-faire en terme de simulations historiques (et sa tendance mégalomane à inscrire son nom partout) grâce à Sid Meier’s Pirates! en 1987 – un titre qui évoquera encore d’interminables parties mêlées d’aventure et de chasse au trésor aux vieux briscards émus. Mais même au XXIe siècle où son nom est immédiatement associé à la saga Civilization, combien ignorent encore que Sid est également l’initiateur d’une autre grande série, celle des Tycoon, qui avant même de vous proposer de diriger des pizzérias, des zoos ou des hôtels, vous plaçait dans le costume d’un des grands pontes du chemin de fer avec Railroad Tycoon ?

Le titre édité par Microprose vous propose a priori un objectif simple: créer votre compagnie de chemin de fer à l’une des époques pionnières sélectionnables en début de partie, depuis la côte est des États-Unis en 1830 jusqu’à l’Europe en 1900 (un choix de date d’ailleurs assez étrange dans ce dernier cas : le vieux continent était déjà largement couvert de voies ferrées au début du XXe siècle). Selon le niveau de difficulté sélectionné, une partie pourra s’étendre sur 40 à 100 ans et, à l’instar de SimCity, il n’y a pas de réel objectif en-dehors de la prospérité – et de ce plaisir inexplicable qu’on ressent à aller construire des trucs partout – la différence étant que le jeu bénéficie bel et bien d’une fin et d’un score qui vous aidera à mesurer la qualité de votre performance. La difficulté, modulable selon plusieurs critères, aura un impact tant sur votre score que sur votre façon de jouer comme nous le verrons bientôt ; mais avant d’entrer dans les détails, commençons déjà par le commencement : vos premiers instants dans Railroad Tycoon.

Quel que soit le cadre choisi, le titre commencera par vous placer devant une carte très imposante – qu’il s’agisse du Royaume-Uni ou d’un continent entier, attendez-vous à découvrir un terrain de jeu comprenant à chaque fois pas loin d’une centaine de villes. Ces villes, d’ailleurs, comme tout ce qui les entoure, ne sont pas de simples espaces symboliques matérialisés par une case, mais bien des assemblages de différentes habitations, services et commerce qui auront un impact durable sur les marchandises que vous souhaiterez transporter à l’aide de vos trains.

Une petite bourgade de quelques milliers d’habitants n’offrira pas autant de clients qu’une mégalopole, et une mine de charbon ne fournira pas les mêmes matières premières qu’une scierie ou qu’un puits de pétrole. Votre première préoccupation, celle à laquelle vous ne devrez pas hésiter à consacrer plusieurs minutes, sera donc de trouver l’endroit idéal pour démarrer votre compagnie, le plus souvent dans une position centrale peuplée ou riche en ressources, afin qu’elle constitue la première pierre de votre future empire. L’intérêt sera de penser à long terme dès le début du jeu, car si vous serez libre de construire votre première ligne n’importe où sur la carte, toutes les suivantes devront nécessairement partir de votre réseau initial – d’où l’intérêt de ne pas aller s’isoler dans une zone prometteuse, mais entourée de régions économiquement sans intérêt.

Le plus simple est généralement de commencer par relier deux grandes villes : les transports de passagers et de courrier devraient vous assurer un revenu stable et modérément impacté par la conjoncture économique. Vous allez donc utiliser votre capital de départ pour construire une voie de chemin de fer tronçon par tronçon, en réfléchissant bien à votre trajet pour éviter les détours inutiles, les reliefs qui pénaliseraient la vitesse de vos trains, et les fleuves qui vous imposeraient de construire d’imposants – et coûteux – ponts qui auraient eux aussi un impact sur la vitesse de pointe de vos machines. Puis vous construisez deux gares dont la taille définira le rayon d’action, et vous achetez votre premier train.

Ce sera l’occasion pour vous de sélectionner votre locomotive parmi une sélection qui ira en s’étendant au gré de la partie et des avancées technologiques. Loin d’être purement esthétique, ce choix mérite d’être médité, car chaque machine a ses capacités propres, et un train capable de rouler très vite ne sera pas nécessairement la meilleure sélection pour aborder une côte à 5% ni pour trainer six wagons à sa suite. Mieux vaut donc savoir quelle quantité de marchandises vous vous apprêtez à transporter et sur quel type de terrain avant d’investir. Après quoi, vous aurez accès à une interface très complète qui vous permettra non seulement de composer votre train wagon par wagon, mais aussi de choisir son trajet, ses arrêts – libre à vous de lui faire desservir plusieurs gares – et même de changer la composition de son chargement à chaque étape. Après quoi, il quittera votre dépôt, et vous pourrez commencer à l’observer sur la carte du jeu, en temps réel, tout en suivant les rentrées d’argent qu’il génère.

Bien évidemment, il n’y aurait que peu d’intérêt à ce que votre empire ferroviaire se limite à une seule ligne et à un unique train. L’intérêt va donc être de partir à la recherche des trajets rentables, ce qui va vous obliger – particulièrement dans les niveaux de difficulté élevés – à vous pencher sur l’économie locale. S’il est tout à fait possible, à bas niveau, de transporter n’importe quoi n’importe où en ne vous souciant que de remplir vos wagons, il faudra rapidement commencer à s’intéresser à acheminer des matières premières vers les industries locales. Transporter du pétrole vers une ville, c’est une chose, mais le transporter vers une ville dotée d’une raffinerie est déjà beaucoup plus censé. Et une industrie rendue fonctionnelle par vos apports de matières premières génèrera à son tour de nouvelles ressources plus précieuses que vous serez libre de transporter vers un endroit qui en a besoin – ce qui devient bien plus intéressant. Rapidement, votre réseau ne se contentera pas de relier des villes, mais servira carrément d’infrastructure à une large part de l’économie locale qui ne pourra fonctionner que grâce à votre compagnie… ou aux sociétés adverses qui ne manqueront pas d’apparaître au gré du jeu afin de vous disputer vos précieuses parts de marché.

Car le jeu ne rate bien évidemment pas l’occasion de vous confronter à une concurrence, qui ne se contentera pas de construire ses propres lignes, mais qui pourra également chercher à prendre le contrôle de votre compagnie en en achetant des parts – tout comme vous serez libre de faire la même chose, à condition, naturellement, d’en avoir les moyens. Autant dire que dans les niveaux de difficulté les plus élevés, là où le réalisme est le plus poussé, une part importante de vos ressources devra être consacrée au fait de garder le contrôle de votre entreprise, et de savoir investir ou vendre au bon moment afin de gagner en bourse ce que vous ne serez pas parvenu à obtenir par le commerce.

Il faudra aussi se préoccuper de l’entretien de vos locomotives, des fluctuations de l’économie, des inévitables accidents qui pourront se produire, des industries qui ne manqueront pas de se développer en temps réel… En fait, en dépit de l’absence d’objectif, on ne s’ennuie tout simplement jamais, les motifs de préoccupation ne manquant pas au gré du jeu – surtout lorsque vous commencez à vous retrouver à la tête d’un empire de plusieurs dizaines de lignes. Certes, on aurait pu apprécier d’avoir des missions avec des buts précis à remplir dans le temps – ce qui sera fait, et bien fait, dans le deuxième épisode – mais cela n’empêche pas le titre d’être doté de ce très parlant syndrome du « allez, je joue encore cinq minutes » alors que la nuit est déjà bien avancée.

Les vrais reproches à faire à Railroad Tycoon, au fond, se situeraient plutôt au niveau de la réalisation, et surtout de l’interface du jeu. Soyons francs : même en 1990, on trouvait ça moche. Le mode VGA du jeu est en fait en 16 couleurs, il n’y a aucun moyen d’augmenter la résolution, et la musique se limite à quelques jingles composés avec des vieux morceaux libres de droits et aux bruitages de vos trains – pour le reste, ce sera un silence de mort.

Plus grave, maitriser l’interface nécessitera vraisemblablement un long passage dans le manuel, le simple fait de poser des rails étant anti-naturel au possible – on regrettera, à ce titre, que la souris soit aussi lourdement sous-exploitée. Au moins sera-t-on heureux d’apprendre que le jeu comme le manuel ont été traduits en français – dans un français assez brut de décoffrage en ce qui concerne le programme, mais il y a de toute façon assez peu de choses à traduire. Bref, tous ceux qui voudront lancer une partie en imaginant devenir un magnat en dix minutes en seront pour leurs frais : maîtriser tous les tenants et les aboutissants du jeu risque de réclamer plusieurs heures, le temps de découvrir et d’expérimenter les possibilités du titre. Le bon côté étant qu’il faudra, dans tous les cas, plusieurs semaines pour pouvoir prétendre en avoir fait le tour – encore faudra-t-il, naturellement, avoir accepté de souffrir quelques heures pour dompter enfin la bête et se lancer à la conquête du marché du rail.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1990 (Tilt n°85, décembre 1990) – Prix spécial du jury

NOTE FINALE : 16,5/20 Programme de gestion très complet et d'une richesse toujours aussi impressionnante près de trente ans après sa sortie, Sid Meier's Railroad Tycoon propose une épopée prenante capable de vous garder le nez au-dessus de vos trains pendant plusieurs dizaines d'heures. Si les mécanismes de jeu savent se montrer abordables pour se complexifier au gré de vos exigences,  dévoilant des possibilités de plus en plus étendues et de plus en plus intriquées les unes avec les autres, il faudra malheureusement composer avec une interface inutilement lourde ainsi qu'avec une réalisation des plus spartiates. Si cela ne devrait pas freiner les puristes, les nouveaux joueurs trouveront sans doute bien plus facilement leur bonheur avec les autres épisodes de la série. CE QUI A MAL VIEILLI : – Interface inutilement lourde qui ne tire pas réellement profit de la souris – Réalisation hideuse, même en 1990 – Même si le contenu est impressionnant, le jeu est finalement cantonné à un mode « bac à sable » – Difficile de retrouver une ligne spécifique lorsque les trains commencent à s'accumuler

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Railroad Tycoon sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Le système de jeu de Railroad Tycoon ressemble un peu à celui de Sim City. La prise en main est si facile qu’on entre rapidement dans le jeu. J’avoue que, dès que j’ai eu ce logiciel entre les mains, je ne l’ai plus lâché : c’est pire que Tetris ! Il n’y a pas de temps mort car le joueur a mille choses à faire. De plus, le réalisme a été très soigné et le jeu est très visuel. »


Dany Boolauck, Tilt n°79, Juin 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sid Meier’s Railroad Tycoon aura également bénéficié de son adaptation sur les autres ordinateurs 16 bits, l’année suivant celle de sa sortie. Sans surprise, le jeu en lui-même n’a connu que peu de modifications – osons même dire que les mécanismes comme les possibilités sont strictement identiques à celles aperçues sur PC. La seule modification se trouve du côté de la réalisation : bon, d’accord, c’est plus coloré, mais ça ne casse toujours pas trois pattes à un canard. La musique n’étant pas franchement supérieure, elle non plus, à ce qu’on pouvait entendre sur la machine d’IBM, on ne peut pas dire qu’un possesseur de la version originale ait une bonne raison d’investir dans celle-ci… sauf, peut-être, l’existence d’une version française dont je n’ai jamais trouvé la trace sur PC. À noter que les utilisateurs d’Amiga 600, privés de pavé numérique, ne pourront tout simplement pas jouer au jeu puisqu’il ne pourront pas poser de voies ferrées.

NOTE FINALE : 16,5/20

Railroad Tycoon a beau bénéficier de quelques couleurs de plus une fois porté sur Amiga, on ne peut pas franchement dire que le résultat ait valu un an d’attente. La réalisation du titre ne fait clairement pas partie de ses points forts, même et surtout sur une machine qu’on sait capable de faire infiniment mieux que ça, mais le plaisir de jeu est toujours intact, on s’efforcera donc de ne pas bouder notre plaisir – surtout à présent que le jeu est traduit en français.

Version Atari ST

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Octobre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À quoi était-on en droit de s’attendre en lançant la version Atari ST de Sid Meier’s Railroad Tycoon ? À un calque de la version Amiga. Et que trouve-t-on en lançant le jeu ? Un calque de la version Amiga – à quelques nuances près qui vous demanderont généralement de regarder les graphismes de très près pour constater qu’il y a des couleurs en moins, et la qualité sonore a comme très souvent souffert de la transition, mais honnêtement, rien de catastrophique, surtout pour le nombre de fois que vous risquez d’entendre la musique une fois l’écran-titre franchi. Pour le reste, tout est exactement identique à la version originale, je vous renvoie donc au test de la version PC.

NOTE FINALE : 16,5/20

Portage sans surprise, Sid Meier’s Railroad Tycoon sur Atari ST propose un calque fidèle de la version Amiga – qui n’avait elle-même pas grand chose de plus à offrir que la version PC. Le jeu est toujours aussi prenant, mais dommage que Microprose n’ait jamais vu l’intérêt de se préoccuper de la réalisation.

Version Macintosh

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Quadra 900 avec MacOS 8.1
Configuration minimale : Système : Macintosh Plus – OS : System 6.0 – RAM : 1Mo*
Modes graphiques supportés : 8 bits, monochrome
*2Mo pour la version couleur

Il aurait été dommage pour Sid Meier’s Railroad Tycoon de faire l’impasse sur un ordinateur de bureau comme le Macintosh. Bonne nouvelle : le titre aura bel et bien débarqué sur la machine d’Apple, et il y aura débarqué à la fois en haute résolution et en couleurs (même s’il est possible de jouer en noir et blanc, où la réalisation demeure très lisible). Si le contenu n’a pas changé d’une virgule, on pourra apprécier quelques petits agréments de confort comme la possibilité de redimensionner les différentes fenêtres de jeu en fonction de la taille de votre bureau, et le rendu sonore est très correct, bien au-dessus de l’Atari ST, même s’il est toujours aussi discret. Pour le coup, aucune de ces quelques nouveautés tenant en large partie à l’intégration à l’interface de System ou de MacOS ne transcendent l’expérience de jeu, mais en termes de prise en main et de lisibilité, on tient largement de quoi rivaliser avec ce que proposera la version « Deluxe » trois ans plus tard – d’autant qu’il est enfin possible d’utiliser la souris pour poser des voies, en conjonction avec la touche Maj. Bref, exactement ce qu’on était venu chercher.

NOTE FINALE : 17/20

Sid Meier’s Railroad Tycoon sur Macintosh vient offrir exactement ce qu’on était en droit d’espérer, à savoir l’intégration harmonieuse de la haute résolution et de l’interface de l’OS. Ce n’est peut-être pas beaucoup plus beau ni immensément plus jouable, mais c’est d’une lisibilité à tout épreuve, et c’est plus agréable à prendre en main. Un bon point de départ pour les amateurs du genre.

Version PC-98

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Japan K.K.
Date de sortie : 6 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Carte son supportée : Roland MT-32

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Microprose aura fait partie des entreprises vidéoludiques occidentales prêtes à investir sur le marché japonais – une décision somme toute logique, le hardware des systèmes locaux étant souvent très proche de celui du PC. Cela explique d’ailleurs peut-être pourquoi ce portage de Sid Meier’s Railroad Tycoon semble tout droit venu du PC – incluant jusqu’à la reconnaissance de la Roland MT-32 – alors que la résolution native du PC-98 aurait pu nourrir l’espoir de trouver l’équivalent de la version Macintosh. Rien de tout cela, hélas : la haute résolution n’est utilisée que pour afficher les caractères japonais, car le jeu a été intégralement traduit pour l’occasion. Pour tout le reste, c’est à peu de chose près la copie conforme de la version PC avec ses graphismes seize couleurs en 320×200, au détail près que l’on pose désormais les rails avec la touche Alt plutôt qu’avec la touche Maj. Au moins n’aurez-vous pas à vous griffer le visage en vous lamentant de ne pas posséder un ordinateur du cru : pour le coup, c’est exactement comme sur PC… mais réservé aux joueurs parlant le japonais.

NOTE FINALE : 16,5/20

Inutile de chercher les nouveauté ou une refonte graphique : Sid Meier’s Railroad Tycoon sur PC-98, comme souvent avec MicroProse, n’est rien de plus que la copie carbone de la version PC traduite en japonais. Autant dire une curiosité qui n’aura que peu de raisons de retenir les joueurs occidentaux.

 Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe

Développeur : MPS Labs
Éditeur : Microprose Software, Inc.
Testé sur : PC (DOS)PC-98

Version PC (DOS)

Date de sortie : Juillet 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 640ko* – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Modes graphiques supportés : SVGA (640×400)
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, Covox Sound Master, Genereal MIDI, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum/Plus, Roland MT-32/LAPC-I/RAP-10, Sound Blaster/Pro/16
*1Mo requis pour la version CD-ROM

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme d’autres titres parus à la même époque (au hasard : Sid Meier’s Pirates!), Railroad Tycoon aura connu, trois ans après sa sortie, une édition « Deluxe » vendue au prix fort. Celle-ci aura connu une genèse assez particulière, détaillé dans un fichier texte de la version PC : suite au portage sur PC-98 pour le marché japonais, en 1991, Microprose aura découvert que les orientaux étaient encore moins emballés que les européens par les graphismes en EGA basse résolution. Il fut donc décidé de redessiner les graphismes, toujours en 16 couleurs, mais en 640×400, et, tant qu’à faire, d’y rajouter quelques bruitages digitalisés, de redessiner les menus, d’y adjoindre quelques nouveaux scénarios et de la proposer également au marché européen – et exclusivement sur PC, cette fois.

Concrètement, cette refonte graphique tient quand même furieusement du gadget : la résolution a beau être plus élevée, force est de reconnaître que c’est largement aussi moche – et en 1993, cela commençait à faire tache. Les menus sont certes beaucoup plus travaillés qu’auparavant, mais on ne peut pas dire qu’ils représentent une énorme partie de l’expérience de jeu – et l’interface n’a pas bougé d’un iota ! Quant à la réalisation sonore, elle s’est effectivement améliorée – on appréciera ou non les différentes digitalisations comme les bruitages plus ou moins idiots qui se font entendre chaque fois que vous cliquerez sur une industrie, mais difficile d’y voir une raison de mettre une nouvelle fois la main à la poche, même si bénéficier de thèmes musicaux pendant la partie est un ajout bienvenu. Le véritable intérêt de cette version résidera plutôt dans les nouveaux scénarios : certes, la carte dédiée à l’Angleterre a disparu pour des raisons mystérieuses, mais on pourra se jeter sur des cadres un peu plus dépaysants comme l’Afrique ou l’Amérique du Sud. Pas de quoi se précipiter sur cette version Deluxe pour les possesseurs de la version originale, mais une alternative acceptable pour ceux qui voudraient découvrir le premier épisode de la saga.

NOTE FINALE : 17/20

Inutile de se mentir : dans les faits, cette version Deluxe tient plus du patch que du titre à part entière. Les graphismes, même en haute résolution, sont toujours aussi hideux, et l’interface aurait bien bénéficié d’une refonte. Reste que le contenu s’est étoffé et que le jeu est toujours aussi agréable à jouer, mais vendre cette version à peine retouchée au prix fort était quand même assez gonflé.

Version PC-98

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Japan K.K.
Date de sortie : 2 avril 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Une fois qu’on a compris que l’itération PC-98 de Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe est la version qui aura servi de base à la version PC occidentale, on a d’ores et déjà dit l’essentiel. Le même jeu ? Pour l’essentiel, oui : le contenu, les graphismes et l’interface sont exactement les mêmes, et j’espère qu’un employé de chez MicroProse viendra un jour nous expliquer pourquoi la carte de l’Angleterre a disparu (parce que ce n’est certainement pas lié à une question de droits !). Du côté des différences, en-dehors du fait que le titre soit bien évidemment intégralement en japonais, la qualité musicale est légèrement inférieure à celle de la version occidentale : on n’a pas le droit ici aux bruitages digitalisés. Encore une fois, rien de fondamentalement traumatisant, et rien qui justifie de bouder la version PC pour lui préférer ce portage, mais au moins, maintenant, vous savez que vous n’avez rien raté.

NOTE FINALE : 17/20

Peu de surprises pour cette version PC-98 de Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe : c’est exactement la même chose que sur PC, mais en japonais, et avec quelques fioritures en moins du côté sonore. Si vous voulez découvrir le jeu, autant commencer directement par la version PC.

Toki

Développeur : Tad Corporation
Éditeur : Tad Corporation
Titre original : ジュジュ伝説 (JuJu Densetsu)
Testé sur : ArcadeAmigaAtari STCommodore 64NESLynxMega Drive
Disponible sur : iiRcade, iPhone
Le remake : Toki (2018 – Blacknut, MacOS X, PlayStation 4, Switch, Windows, Xbox One)

Version Arcade

Date de sortie : 8 décembre 1989 (Japon) – 22 février 1990 (États-Unis) – 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et deux boutons
Version testée : Version internationale
Hardware : Processeurs : Motorola MC68000 10MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz
Son : Haut-parleur ; YM3812 OPL2 3,579545MHz : OKI MSM6295 ADPCM 1MHz ; 1 canal
Vidéo : 256 x 224 (H) 59,630292Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Reconnaissons-le d’emblée, le quotidien du héros de jeu de plateforme est atrocement banal. Depuis qu’un certain plombier italien s’est mis en tête de partir secourir une princesse sans même avoir eu l’idée de vérifier au préalable dans quel château elle pouvait bien se trouver, les kidnappings de petites amies conventionnées sont allés croissant chez les personnages de jeu vidéo. C’est bien simple : on ne peut tout simplement plus folâtrer dans les prairies de l’insouciance avec sa dulcinée sans la voir enlevée sous son nez par une méchante sorcière ou par un sorcier maléfique – même Mickey n’est pas épargné ! C’est, quoi qu’on en dise, relativement pénalisant pour entretenir une vie de couple qui n’aspire qu’au calme et à la sécurité.

Prenez le cas de Toki. Parti en promenade avec sa copine Miho, il fallait bien sûr qu’il croise le chemin du sorcier maléfique Bashtar, qui non seulement se hâte d’enlever Miho (bon ça, c’est dans le contrat, on lui pardonne) mais pousse même le bouchon jusqu’à transformer Toki en singe ! Ça, c’est un coup bas, et cela offre dorénavant à notre simiesque héros deux bonnes raisons de se lancer à la poursuite de sa bien-aimée, à travers six niveaux bien évidemment remplis d’embuches (c’est aussi dans le contrat, mais pourquoi les grands méchants doivent-ils toujours aller se réfugier aussi loin ?).

Vous voici donc dans la peau d’un singe. Voyez le bon côté des choses : Bashtar aurait aussi bien pu se contenter de vous transformer en amibe, ce qui aurait sans doute donné un jeu très différent. La bonne nouvelle est que, loin de vous avoir rendu inoffensif, cette transformation vous a au contraire permis de continuer à sauter et à grimper aux lianes de plus belle.

Mieux encore : Toki a la capacité de cracher des projectiles qui, au gré des bonus, peuvent même en venir à se transformer en authentiques jets de flammes, voire en boules de feu – Bashtar aura décidément été plutôt généreux dans le choix de sa malédiction. La mauvaise nouvelle, en revanche, est que cette transformation semble vous avoir rendu un brin… disons, fragile. Traduit en clair : un seul tir, un seul coup, un seul contact, et notre héros partira au paradis des singes. Oui, c’est encore plus fragile que ce bon roi Arthur dans Ghosts’n Goblins et, comme nous allons le voir, les deux titres partagent d’ailleurs plusieurs points communs.

Le premier est la prise en main immédiate : deux boutons, un pour sauter, l’autre pour tirer, on a rarement fait plus simple. Toki peut d’ailleurs tirer au-dessus de lui ou en diagonale, ce qui l’aidera à nettoyer les impuretés jusque dans les recoins, ce qui sera d’autant plus indispensable que l’opposition rivalise d’ingéniosité pour prendre notre singe en traitre. Créatures volantes, diablotins armés de tridents (tiens, encore comme dans Ghosts’n Goblins !), singes sauteurs, geysers, jets de lave, pics, colonnes piégées et même machines anciennes activées par d’autres primates qui ne sont décidément pas dans votre camp ; tout y passe avec une variété d’ailleurs relativement agréable.

Si le thème « tribal » reste à l’ordre du jour pendant la totalité du jeu, enchainant les poncifs avec une belle constance (jungle, royaume de glace, royaume de feu…), on appréciera en revanche la diversité des situations rencontrées, avec des séquences sous-marines, un très délicat passage sur un chariot, et les habituels boss qui ne vous laisseront aucun droit à l’erreur – tout comme le reste du titre puisque, rappelons-le, le moindre pixel en contact avec votre héros suffira à lui faire casser sa pipe.

Autant d’ailleurs en profiter pour aborder le point le plus clivant de ce très sympathique Toki : sa difficulté. Si le titre ne se montre jamais aussi ridiculement impossible que le titre de Capcom évoqué un peu plus haut, on imagine mal un joueur assez surdoué pour qualifier le jeu de Tad Corporation de « facile ». Le logiciel est extrêmement délicat, même pour un jeu d’arcade destiné à vous faire cracher vos pièces, et partage avec d’autres programmes au concept similaire comme l’époque en proposait par brouettes le fait d’être un pur die-and-retry : vos réflexes vous rendront sans doute bien des services, mais je doute qu’ils soient suffisants pour vous aider à venir à bout de l’aventure.

Chaque écran est littéralement rempli de mauvaises surprises, et chercher à avancer trop vite – poussé, comme toujours, par l’habituelle et agaçante limite de temps – se traduira par une mort aussi systématique que si vous cherchez à progresser trop lentement. Les boss, en particulier, ont plusieurs variations dans leurs patterns qui les rendent particulièrement frustrants même lorsque l’on sait à quoi s’attendre – et, dans le même ordre d’idées, est-il nécessaire de préciser que vous ne bénéficierez que de cinq continues pour terminer le dernier monde, faute de quoi ce sera le game over bête et méchant ?

Autant dire que les joueurs nerveux ou pas très patients sont à peu près certains de passer un très mauvais moment sur Toki, là où les amateurs de challenge seront au contraire aux anges. Pour un titre de 1989, la réalisation est magnifique, notamment grâce à cette patte graphique très cartoon qui rend l’univers aussi coloré que sympathique dès les premières secondes de jeu.

Les sprites sont imposants, la fluidité n’est jamais prise en défaut, et si on risque de laisser la vie quelques centaines de fois avant de vaincre Bashtar et ses sbires, la jouabilité ne sera jamais à blâmer tant notre singe répond au doigt et à l’œil. Les niveaux proposent des situations suffisamment renouvelées pour qu’on ait envie de s’accrocher afin de connaître la suite, l’action est prenante sans être épuisante, et on ne s’ennuie pour ainsi dire jamais, ce qui est très bon signe. Les bonus sont bien pensés, et vos différents modes de tir peuvent réellement changer la donne – les phases sous-marines sont, à ce titre, de véritables petits shoot-them-up. Bref, on s’amuse, ce qui est quand même l’objectif premier.

On ne sera donc pas surpris d’apprendre que ce Toki aura connu un joli succès au sein des salles d’arcade, au point de le voir porter sur une partie des machines domestiques de l’époque. Cela n’aura visiblement pas suffi à sauver Tad Corporation de la faillite à peine deux mois plus tard, mais cela leur aura néanmoins permis de laisser un très bon jeu de plus derrière eux (et accessoirement, de vendre le code source de la suite planifiée à Altron Corp. pour que ceux-ci en fassent Little Magic, mais ceci est une autre histoire). Si vous ne deviez vous souvenir que d’un seul de leurs titres, encore plus que de Cabal, ce serait probablement de celui-là.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 17/20 Sans rien proposer de réellement révolutionnaire, Toki réussit néanmoins un amalgame quasi-parfait entre une réalisation accomplie, une jouabilité nerveuse, une prise en main exemplaire et une difficulté redoutable sans jamais être injuste. Accompagner le singe dans son expédition à la recherche de sa dulcinée se révèle être une expérience aussi intense qu'amusante, souvent surprenante et jamais ennuyeuse. Il faudra certes se montrer patient pour venir à bout des milliers d'embuches qui parsèment les six niveaux du titre, mais on y reviendra avec suffisamment de plaisir pour que le titre se révèle encore, trente ans après sa sortie, comme une expérience particulièrement agréable. Un excellent jeu de plateforme. CE QUI A MAL VIEILLI : – Doit-on répéter que le jeu est difficile ? – Certains boss tirent un peu en longueur – On en vient presque à regretter que le jeu n'ait pas initié une série ; malheureusement, Tad Corporation aura mis la clé sous la porte avant de pouvoir concrétiser le projet

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Toki sur une borne d’arcade :

Version Amiga

Développeur : Ocean France
Éditeur : Ocean Sofware Ltd.
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Deux ans après sa sortie sur bornes d’arcade, Toki aura commencé à se voir porté sur les machines de salon, sous la houlette d’Ocean. On sait comme les adaptations de l’époque étaient capables du meilleur comme (surtout) du pire, mais en découvrant cette version Amiga, on sera heureux de la ranger dans la première catégorie. Certes, la réalisation a nécessité quelques sacrifices, et les grandes bandes noires qui entourent la surface de jeu en 224×200 seront là pour vous le rappeler.

Mais passé cette minuscule déception, il faut reconnaître que les graphismes restent très proches de la qualité observée en arcade – on est à des kilomètres d’un portage bâclé à la Strider. Les sprites sont d’une belle taille, la palette de couleurs de l’Amiga est bien employée, la musique est pêchue tout en restant globalement fidèle aux thèmes de l’arcade, bref, on ne se sent pas roulé. Le jeu vous propose assez de vies pour ne pas vous sentir floué, ainsi qu’un système de continues (qui vous fera reprendre au début du niveau). La jouabilité a été adaptée pour n’utiliser qu’un seul bouton : dorénavant, pousser le stick vers le haut vous fera sauter, et si vous voulez choisir la direction de votre tir, il faudra commencer par laisser le bouton appuyé, ce qui est un peu moins confortable que sur arcade mais reste un bon compromis. On remarquera également que le scrolling est parfois bloqué, et que le trajet a été légèrement simplifié par rapport à l’original (quelques adversaires en moins, mais aussi quelques bonus qui ne sont plus là). En résumé : une excellente surprise.

NOTE FINALE : 16/20

Au moment de porter Toki sur Amiga, Ocean aura globalement fait les bons choix, et on aurait difficilement pu proposer une version plus proche de la version arcade sur la machine de Commodore. Si la jouabilité à un seul bouton pourra demander un léger temps d’adaptation, on comprendra aisément à quel point les joueurs de l’époque ont dû se montrer satisfaits de pouvoir bénéficier du titre de Tad Corporation pratiquement à l’identique, avec des sensations de jeu très bien préservées. Dommage que tous les portages des succès de l’arcade n’aient pas été effectués avec un tel soin.

Les avis de l’époque :

« La réalisation de ce programme est très soignée et toutes les grandes scènes du jeu d’arcade sont au rendez-vous. La fenêtre de jeu n’est pas aussi grande qu’on l’aurait souhaité, mais les sprites sont de très bonne facture et les décors variés. (…) Mais, plus important encore, la jouabilité est excellente et votre personnage répond parfaitement à la moindre commande. »

Alain Huygues-Lacour, Tilt n°88, mars 1991, 18/20

Version Atari ST

Développeur : Ocean France
Éditeur : Ocean Sofware Ltd.
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Porté, comme la version Amiga, par l’équipe d’Ocean France, Toki sur Atari ST présente les mêmes qualités que sur la machine de Commodore, avec des graphismes détaillés, une jouabilité identique, et une musique de qualité légèrement inférieure. Il y a moins de couleurs à l’écran et quelques décors moins détaillés (ce qui prouve, une fois n’est pas coutume, que la version Amiga a réellement été optimisée pour la machine), mais le détail qui vient pénaliser cette version est surtout l’apparition de ralentissements lorsqu’il y a un peu trop de monde – ou de trop gros sprites – à l’écran. Au niveau des détails qui tuent, on remarquera que Miho est mystérieusement devenue brune, sans doute le charme inexplicable des portages d’antan…

NOTE FINALE : 15,5/20

Porté par Ocean avec autant de sérieux que sur Amiga, Toki version Atari ST propose un calque presque fidèle de l’adaptation parue sur la machine de Commodore – presque, car, en-dehors d’un défilement plus fluide et de quelques adversaires en plus, il faudra dorénavant également composer avec des ralentissements, avec quelques couleurs en moins et avec une musique un peu moins pêchue. Pas de quoi bouder cette version, qui reste un excellent portage, pour autant.

Version Commodore 64

Développeur : Ocean Software Ltd.
Éditeur : Ocean Sofware Ltd.
Date de sortie : Novembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Premier portage sur machine 8 bits pour Toki, qui se débrouille comme il peut. Si, graphiquement, le jeu s’en tire assez bien, il faudra en revanche composer avec un seul et unique thème musical pendant tout le jeu (qui évoque d’ailleurs autant Arkanoid que Toki) – quand il y a de la musique. La jouabilité est un peu plus poussive, et surtout le dernier niveau est purement et simplement passé à la trappe. Cela reste un portage très honnête pour le Commodore 64, mais pas vraiment l’adaptation qu’on vous encouragera à tester pour découvrir le jeu.

NOTE FINALE : 11,5/20

Passé à la sauce 8 bits, Toki devient comme on pouvait le craindre une bouillie marronâtre où la magie originelle peine sérieusement à exister. Si l’essentiel du jeu est toujours là et se laisse découvrir sans trop de casse, une certaine lourdeur associé à la disparition de tout le dernier niveau font de ce portage une version qu’on se contentera de recommander aux nostalgiques.

Version NES

Développeur : Tad Corporation
Éditeur : Tad Corporation
Date de sortie : 19 juillet 1991 (Japon) – Décembre 1991 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 3Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Toki s’en est jusqu’ici bien sorti sur les systèmes 16 bits, et un peu moins bien sur les 8bits. Du côté de la NES, en tous cas, pas de mauvaise surprise : on retrouve cette fois tout le contenu de la borne d’arcade et, autre bonne nouvelle, le jeu a fait le choix d’une palette de couleurs pastelles rarement utilisée sur la 8 bits de Nintendo, qui donnerait presque l’illusion de jouer sur Master System ! Le jeu est très coloré, parfaitement jouable, et il est également moins punitif que les autres versions – notre héros a ici deux points de vie, les boss laissent des bonus à leur mort, etc. Bref, non seulement on passe un bon moment, mais cette version pourra également représenter une alternative tout à fait honnête pour ceux que la difficulté du titre original faisait hurler.

NOTE FINALE : 14/20

Toki sur NES est le parfait exemple d’un portage réussi sur une console 8 bits. Fidèle à la borne d’arcade, le jeu offre une expérience toujours aussi ludique tout en la rendant plus abordable – une sorte d’initiation au titre d’origine qui conviendra parfaitement à ceux qui trouvaient la version arcade un peu trop frustrante. À essayer.

Version Lynx

Développeur : Tad Corporation
Éditeur : Atari Corporation
Date de sortie : Février 1992 (Amérique du Nord) – Septembre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Toki aura décidément vécu une relation privilégiée avec Atari, puisqu’il aura fait partie des très rares titres à gratifier la Lynx de sa présence. Comme souvent, la petitesse de l’écran oblige à faire rentrer beaucoup de choses dans une minuscule surface, mais il faut reconnaître que le programme s’en acquitte plutôt bien. Les sprites réussissent à ne pas ressembler à des bouillies de pixels, l’univers est très coloré, et sans rivaliser avec les moutures 16 bits, on aurait difficilement pu tirer davantage d’une résolution aussi limitée. Le jeu a retrouvé une jouabilité à deux boutons, et propose l’intégralité du contenu de la version arcade (moins la carte). Certes, c’est un peu plus lent, mais cela permet de rendre le jeu un tantinet plus simple. Du beau boulot.

NOTE FINALE : 13,5/20

Le défi n’était pas gagné d’avance et pourtant Toki sur Lynx remplit parfaitement sa mission, en proposant l’intégralité du contenu de la version arcade dans une version qui fait honneur aux capacités de la portable d’Atari. En dépit de la résolution limitée, le jeu reste parfaitement jouable et lisible, et si l’action n’est pas aussi nerveuse que dans la version d’origine, on prend toujours beaucoup de plaisir en y jouant. Sans doute l’un des meilleurs jeux de plateforme de la console.

Version Mega Drive
Toki : Going Ape Spit

Développeur : Santos
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 31 janvier 1992 (Japon) – Mars 1992 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version internationale, révision A
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Après l’excellent portage sur Amiga, on était en droit de se montrer optimiste en découvrant cette version de Toki sur Mega Drive. Malheureusement, Ocean n’est plus aux commandes, et il est rapidement évident que l’équipe de Santos mobilisée pour l’occasion n’était alors vraiment pas à l’aise avec le hardware de la Mega Drive (le studio serait acheté par SEGA la même année, renommé « Megasoft », et on le retrouverait deux ans plus tard à la réalisation de Shinobi III avec une équipe largement renouvelée). D’entrée de jeu, disons-le tout net : c’est moche. Le côté « cartoon » très coloré de la version originale a laissé la place à un camaïeu gris/vert qui donne pratiquement l’impression de jouer sur NES.

Les niveaux sont désormais constitués de blocs tous semblables paresseusement collés devant des décors sans âme ni imagination, et ce que le jeu offre à voir n’est même pas au niveau de certains titres de lancement de la console – en dépit de quelques défilements parallaxes réussis. Difficile de se dire que le jeu tourne sur le même hardware que Sonic the Hedgehog – la comparaison est très, très cruelle. Mais le pire reste à venir : les niveaux du jeu ont été entièrement redessinés. Ce qui pourrait traduire la marque d’une certaine ambition s’avère dans les fait être le fruit d’un naufrage : incapable de gérer correctement les allocations de mémoire de la Mega Drive, l’équipe de Santos a décidé de morceler l’aventure en une suite de petits tableaux – même sur C64, on n’avait pas osé ! La frénésie et la nervosité qui caractérisaient la version arcade ont désormais laissé la place à de grands couloirs vides et très mal pensés où Toki se traine à deux à l’heure. Bref, on a plus l’impression d’être face à du contenu « dilué » plus que face à du contenu augmenté, et la magie n’opère vraiment pas au même niveau que l’arcade. Reste un petit jeu d’action/plateforme plan-plan comme la machine en connait des dizaines – jouable, ce qui n’est déjà pas si mal, mais vraiment pas très marquant.

NOTE FINALE : 13,5/20

Transposé sur Mega Drive dans une version qui se veut plus ambitieuse, Toki y devient certes un jeu plus long et un peu plus accessible, mais aussi plus convenu que sur borne d’arcade. En dépit de quelques effets réussis, la réalisation générale pâtit de la répétition des mêmes grands blocs, et les niveaux ressemblent un peu trop souvent à de grands couloirs vides. Le jeu n’est pas devenu mauvais pour autant, juste très générique et sans éclat, pour ne pas dire fade.

Skweek

Développeur : Loriciels
Éditeur : Loriciels
Titres alternatifs : スクウィーク (Japon), Slider (Game Gear)
Testé sur : AmigaAtari STPC (DOS)Amstrad CPCGame GearPC Engine

La saga Skweek (jusqu’à 2000) :

  1. Skweek (1989)
  2. Super Skweek (1990)
  3. Tiny Skweeks (1992)
  4. Fury of the Furries (1994)

Version Amiga

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Lorsqu’il s’agit d’évoquer les années 80 dans l’univers du jeu vidéo, les premiers noms qui reviennent naturellement sont ceux des titres de légende, les pères fondateurs qui ont eu un impact majeur sur un genre, voire sur l’industrie dans son entier, parfois au point d’initier une nouvelle façon de jouer. N’importe quel joueur vaguement intéressé par le sujet sera capable de vous citer immédiatement des logiciels comme Populous, Doom, Alone in the Dark ou Dungeon Master – autant de références obligatoires du retrogaming.

Ce qu’il faut bien réaliser, néanmoins, c’est que pour le joueur d’alors, le quotidien n’était pas fait que de titres indépassables chargés de révolutionner sa façon de jouer. En fait, 99% des programmes proposés à la vente n’avaient d’autre ambition que de proposer à l’acheteur quelque chose qui lui était familier. Combien de jeux de plateforme peuvent être considérés comme de simples clones du principe inauguré par Super Mario ? Et même pour le joueur contemporain, il n’y a pas parfois rien de plus appréciable que de savoir très exactement à quoi s’attendre au moment de prendre la manette : un principe simple, une prise en main immédiate avec un stick et un bouton et voilà du fun instantané. Eh bien c’était déjà vrai il y a trente ans.

Prenez Skweek, par exemple. Imaginez une planète rose peuplée d’adorables boules de poils – les Skweeks – jusqu’à ce qu’un tyran infâme nommé Pitark ne décide de venir asservir tout ce beau monde et de couvrir les terres d’un skweeticide (sic) bleu, forçant ainsi les femelles a fuir sur la planète voisine de Refuznoid. Pourquoi juste les femelles ? On n’en sait rien et on s’en fout, cela vous donne désormais un objectif tout trouvé : à la mort de Pitark, les Skweeks décident de se débarrasser du skweeticide (re-sic) pour faire revenir les Skweekettes (re-re-sic). Traduit en clair, il va être temps de repeindre la planète en rose aux commandes d’un Skweek qui donne son nom au titre. Et c’est parti !

Chacun des 99 niveaux du jeu répond donc à un principe immuable : peindre toutes les cases bleues en rose, selon la méthode la plus simple qui soit, à savoir en passant dessus. Un compteur à droite de l’écran vous indiquera le nombre de cases restantes, au cœur d’une interface très complète vous délivrant à peu près toutes les informations pertinentes, et qui mérite qu’on s’y attarde un moment. En-dessous de votre score figure une série de diodes colorées, représentant le nombre total de vie restantes – sachant qu’il n’y a pas de continue. Viennent ensuite le compteur de cases et l’indicateur de temps restant – car oui, les niveaux sont chronométrés et oui, le timing a été calculé pour être relativement serré. Apprendre à optimiser votre trajet pour éviter les allez-et-retours superflus va rapidement devenir une nécessité, faute de quoi, vous risquez de payer votre lenteur au prix fort. Un radar affichant le bonus apparu aléatoirement (un à la fois) est également présent, et vous sera très utile pour savoir dans quelle direction vous précipiter si jamais vous voyez apparaître un objet intéressant – sachant que ceux-ci ne restent que quelques secondes.

Vous pouvez également voir le score d’un éventuel deuxième joueur (impossible de jouer à deux simultanément, malheureusement) ainsi que l’emplacement prévu pour quatre nounours, en haut de l’interface. Parvenez à ramasser les quatre au fil de vos pérégrinations et vous gagnerez la bagatelle de cinq vies, ainsi qu’un aller direct pour le niveau suivant. En revanche, méfiez-vous : passer sur un nounours que vous possédez déjà n’aura pour seul effet que de le faire disparaître de votre inventaire.

L’opposition à votre quête prendra la forme de monstres libérés par des générateurs sur lesquels il est par conséquent très dangereux de passer. Ces différents adversaires ont des comportements et des capacités variés : certains se contentent d’errer au hasard, d’autres vous tirent dessus, d’autre encore sont capable de détruire les murs – ce qui peut d’autant plus vous compliquer la vie que chaque mur détruit se transformera en case bleue supplémentaire. Il n’est ainsi pas rare de penser avoir fini un niveau pour découvrir que de nouvelles cases sont apparues entretemps, nous obligeant à reparcourir le niveau en catastrophe avant d’atteindre la fatale limite de temps.

On appréciera d’ailleurs l’inventivité du level design du titre qui, loin de se contenter d’empiler 99 niveaux organisés sur la même idée, s’évertue à renouveler les situations. Ainsi, il existe des cases de glace qui vous empêchent de changer de direction une fois que votre Skweek est engagé dessus, et qui vous imposeront souvent de vous jeter à l’aveuglette, parfois vers une mort certaine, ainsi que des flèches qui vous ralentiront si vous avez la mauvaise idée de les prendre à contre-sens, mais aussi des blocs qui font exploser le sol sous vos pieds, des cases friables, des téléporteurs… Un niveau entièrement organisé autour de cases de glace constituera probablement un aspirateur à vie la première fois que vous y mettrez les pieds, tandis que d’autres idées seront plus surprenantes, comme ce stage constitué de cases qui apparaissent au fur et à mesure ! Bref, en dépit de la simplicité apparente du concept, on trouve largement matière à continuer l’aventure avec plaisir, ce qui est une excellente nouvelle.

L’autre très bonne trouvaille du titre est son système de bonus. Si une partie d’entre eux n’est utile qu’au scoring – encore aurez-vous tout intérêt à courir derrière le score, puisqu’il sera votre principal pourvoyeur de vies – les autres sont suffisamment bien pensés pour contribuer à rendre la partie plus intéressante. Ainsi, si votre Skweek dispose d’un tir de base très limité, il pourra bénéficier d’un véritable arsenal apte à grandement lui simplifier la tâche : tir dans quatre ou huit directions, tir qui gèle les adversaire, tir qui détruit les murs, sans oublier les habituels turbo, rallonge de temps, invincibilité, ou la porte de sortie qui vous emmène directement au prochain stage.

Plus intéressant : la chaussure, qui vous empêchera de déraper sur la glace ou d’être entraîné par les flèches, ou le paquet cadeau, dont le contenu peut être une bonne comme une mauvaise surprise. Soyez chanceux et vous y trouverez la totale : tous les bonus du jeu d’un seul coup. En revanche, vous pouvez également y dénicher des malus comme des commandes inversées ou bien une maladie qui vous fera repeindre les cases en bleu ! Bref, à vous de considérer si le jeu en vaut la chandelle, mais attendez-vous à laisser la vie de nombreuses fois pour avoir hérité du mauvais objet au mauvais moment (ah, le taux de mortalité dû au turbo…).

Côté réalisation, le jeu est très agréablement coloré, comme les captures d’écran vous l’auront déjà fait comprendre. L’animation est irréprochable, on ne rencontre jamais un seul ralentissement, et les commandes répondent bien, que ce soit au clavier ou au joystick. Certes, on pourra regretter un total manque de variété dans les environnements (des cases, des murs, un fond coloré et basta) mais le tout a le mérite de rester parfaitement lisible en toute circonstance.

À noter également que le titre propose un mode « aléatoire » (en pressant la barre espace sur le menu) qui vous permettra de ne pas refaire systématiquement tous les niveaux dans le même ordre à chaque fois, une très bonne idée ! Seul bémol : le programme ne comporte que deux thèmes musicaux, qui sont en plus très répétitifs, ce qui fait que vous risquez de mettre plusieurs décennies à vous les sortir du crâne – c’est d’autant plus dommage que ce ne sont clairement pas les thèmes les plus mémorables qu’on ait entendus sur Amiga. Mais à ce détail près, le jeu est toujours aussi amusant si vous savez à quoi vous attendre : parfois, c’est précisément la simplicité qui est le meilleur argument ludique.

Vidéo – Les dix premières minutes de jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleur jeu d’action – Versions Atari ST et Amiga

NOTE FINALE : 15,5/20 La seule faiblesse de Skweek est également sa principale force : quatre directions, un bouton et un principe qu'on aura assimilé au bout de trois secondes ; qui a dit que la simplicité était un défaut ? Grâce à une prise en main immédiate et à un game design bien fichu, le titre de Loriciels offre l'exemple-type du jeu qu'on lance pour une partie de cinq minutes et auquel on se surprend à jouer une heure. Tout juste pourra-t-on regretter que la réalisation, en particulier la réalisation sonore, ne soit pas un tantinet plus ambitieuse, mais si vous cherchez une façon efficace de vous distraire en vous débranchant le cerveau, Skweek reste indéniablement une bonne pioche. CE QUI A MAL VIEILLI : – Deux thèmes musicaux, surtout aussi répétitifs, ce n'est pas assez – Un certain manque d'ambition dans la réalisation

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Skweek sur un écran cathodique :

Version Atari ST

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Porté sur Atari ST (à moins qu’il n’ait été développé dessus, pour être honnête je ne suis parvenu à trouver aucune information fiable à ce sujet, mais on sait à quel point la machine d’Atari était populaire en France), Skweek jouit d’une réalisation et d’un contenu quasi-identique à ce que proposait la version Amiga. Graphiquement, c’est toujours aussi coloré – on peut même dire que les deux versions sont jumelles, à l’exception notable d’une résolution un peu plus basse – le contenu est le même, bref, c’est du bonheur. Cerise sur le gâteau : vous bénéficierez même d’un troisième thème musical histoire de pimenter un peu les choses. Que demander de plus ?

NOTE FINALE : 16/20

Skweek sur Atari ST ne réserve aucune mauvaise surprise – en fait, le titre parvient même à être très légèrement supérieur à la version Amiga grâce à la présence d’un troisième thème musical qui vient apporter un peu d’une diversité bienvenue. Bref, une très bonne manière de découvrir un jeu très sympathique.

Les avis de l’époque :

« Un scénario élémentaire n’est pas forcément insipide. Skweek vous en apporte la preuve. C’est un jeu dangereux : vous courez le risque de ne plus pouvoir vous détacher de votre machine. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°66, mai 1989, 17/20

Version PC (DOS)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La fin des années 80 correspond à une période où les portages PC étaient encore systématiquement catastrophiques. À ce titre, si Skweek ne révolutionne pas à lui tout seul les capacités de la machine d’IBM, le jeu s’en sort plutôt mieux que ce qu’on pouvait craindre. Certes, côté graphique, l’EGA fait ce qu’il peut, ce qui se ressent surtout dans les fonds devenus bien grisâtres en lieu des place des déluges de couleurs des versions Amiga et Atari ST. Le défilement a même disparu pour laisser place à des transitions assez brutales, mais ce n’est pas trop pénalisant. Côté musical, en revanche, si le jeu ne tire parti que du haut-parleur interne, celui-ci s’en sort malgré tout plutôt bien. Difficile d’espérer beaucoup mieux en 1989 – l’AdLib n’était pas encore arrivée en France, et le VGA était encore loin d’être un standard établi. Bref, rien de très emballant pour le joueur contemporain, mais un portage qui composait plutôt le haut du panier de l’époque.

NOTE FINALE : 14/20

Skweek sur PC est bien moins coloré que sur les autres ordinateurs 16 bits. Le haut-parleur interne distribue les deux thèmes de la version Amiga en s’en sortant très honnêtement, et le contenu du jeu n’a pas changé d’un iota. Bref, une version un peu décevante, mais pas de quoi hurler au scandale non plus – pour un jeu de 1989.

Version Amstrad CPC

Signe des temps, Skweek n’aura été porté que sur un seul ordinateur 8 bits – alors que ceux-ci représentaient sans peine le marché le plus prolifique des années 80. Mais quitte à ne pas multiplier les portages, autant s’efforcer de faire les choses bien. C’est probablement ce que s’est dit l’équipe de Loriciels en travaillant sur cette version qui est, disons-le d’entrée, absolument irréprochable. Non seulement le contenu n’a pas varié d’un iota depuis la version Amiga, non seulement les deux thèmes musicaux se font toujours entendre (au détriment des bruitages, mais c’était clairement le bon choix), mais en plus la réalisation graphique peut carrément rivaliser avec la version PC en dépit d’une résolution inférieure ! Le titre étant toujours parfaitement jouable, on tient là à n’en pas douter un des tout meilleurs jeux du genre sur Amstrad CPC.

NOTE FINALE : 14/20

Skweek sur CPC est la parfaite démonstration de ce que la machine d’Amstrad avait réellement dans le ventre : malgré le hardware inférieur aux ordinateurs 16 bits, le plaisir de jeu est absolument intact. Difficile de faire un quelconque reproche avec cette version fluide, jouable et agréable à l’œil comme à l’oreille. Clairement un titre à posséder sur CPC.

Version Game Gear
Slider

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Skweek aura également connu deux escapades sur consoles en 1991. Sur Game Gear, tout d’abord, où le titre aura mystérieusement gagné le nom de Slider sur le marché occidental alors qu’il continuait à s’appeler Skweek au Japon. Les mystères du marketing… En lançant le jeu, on constate qu’il a hérité d’un nouveau thème musical en plus des anciens, dont les tonalités évoqueront Alex Kidd. La surprise intervient plutôt en lançant le premier niveau : on met quelque secondes à réaliser que, si les stages sont identiques à ceux des autres versions, ils ont cette fois été « tournés » pour que le défilement se fasse sur un axe horizontal plutôt que vertical – un très bon moyen de rentabiliser au maximum l’écran de la Game Gear. Cerise sur le gâteau : afin de s’adapter à son support, le titre a également la très bonne idée de proposer un mot de passe à la conclusion de chaque niveau ! Du coup, le mode aléatoire a disparu, mais il n’avait plus de réelle raison d’être. Quant à la réalisation, elle fait parfaitement honneur à la 8 bits de SEGA. Bref, une nouvelle fois, un portage qui n’a pas été bâclé.

L’orientation surprend au début, mais on retrouve très vite ses marques

NOTE FINALE : 14/20

En devenant Slider sur Game Gear, Skweek n’a rien perdu de sa substantifique moelle. Au contraire : parfaitement adapté au support grâce à l’emploi d’un défilement horizontal et d’un système de mot de passe, le titre se pratique toujours avec autant de plaisir. Un très bon portage, qui ferait presque regretter que le titre de Loriciels ne soit jamais allé tenter sa chance sur les consoles 16 bits.

Version PC Engine

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Curieusement, c’est plutôt sur le marché oriental que Skweek put tenter sa chance sur console de salon. On est d’autant plus en droit de se demander pourquoi que le contenu du titre est toujours parfaitement identique aux autres versions, au détail près que le mode aléatoire a été remplacé par un système de mot de passe hérité de la version Game Gear, et qu’un des thèmes musicaux du jeu a encore été modifié. Pour le reste, on est en terrain connu, et la réalisation est très proche des versions Amiga et Atari ST en dépit d’une résolution légèrement inférieure. Bref, aucune surprise, mais une version parfaitement fonctionnelle.

NOTE FINALE : 15,5/20

Les versions se suivent et se ressemblent pour Skweek, mais c’est finalement plutôt une bonne nouvelle. Sans mettre à genou le hardware de la PC Engine, ce portage fait très exactement ce qu’on était en droit d’attendre de lui et reproduit pratiquement à l’identique les sensations de jeu de la version originale. Que demander de plus ?

LES AVIS DE L’ÉPOQUE :

« Ceux qui ont adoré Skweek sur micro-ordinateur ne vont pas être déçus. Rien n’a été oublié ! L’ambiance si particulière de ce jeu d’action/réflexion est restée intacte : musique gaie, animation fluide et humoristique, graphismes colorés… (…) Un très grand jeu pour tous, de 7 à 77ans. »

Pingos, Console + n°1, Septembre 1991, 92%

Jumping Jack Son

Développeurs : Christophe Laboureau, Didier Chanfray et Charles Callet
Éditeur : Infogrames Europe SA
Titre alternatif : Jumping Jack’Son (écran-titre)
Testé sur : Atari STAmiga
Disponible sur : Antstream

Version Atari ST

Date de sortie : Janvier 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Vous est-il déjà arrivé d’écouter un morceau de musique et de vous dire « Tiens, qu’est-ce que ça donnerait si on en faisait un jeu vidéo ? »

L’idée, pour incongrue qu’elle puisse paraître, n’est pourtant pas neuve. On se souvient, par exemple, de l’énorme influence qu’avait eu le Lac des Cygnes de Tchaïkovski sur le développement de Loom. Mais un des éléments qui participent à la magie du début des années 90 est l’existence de ces titres improbables, souvent réalisés par des petites équipes, et qui basaient l’essentiel de leur gameplay sur une idée plus ou moins bizarre qui ne ressemblait à rien d’autre – un domaine dans lequel les Français étaient d’ailleurs passés maîtres, à tel point que je vous mets au défi de parvenir, encore aujourd’hui, à trouver un jeu qui ressemble à un OVNI comme l’Arche du Captain Blood. On sera donc à peine surpris de découvrir qu’un groupe de trois personnes, mené par Christophe Laboureau, aura programmé en 1990 un programme inspiré d’un morceau des Rolling Stones : Jumping Jack Son.

Le pitch du jeu, comme souvent, est d’une simplicité confondante : le héros de l’aventure, une espèce de petite créature tendance punk-rock nommée Jack, vit dans une réalité où les instruments de musique classique se sont mis en tête de se débarrasser une bonne fois pour toute de ce qui représente pour eux l’hérésie absolue : la musique rock. Bien décidé à ne pas rester les bras ballants pendant qu’on s’en prend à son unique passion, Jack entreprend de collecter les vinyles (ah, quelle époque…) éparpillés dans les niveaux du jeu pour aller les replacer sur les platines dédiées – et ainsi ne pas laisser mourir le rock’n roll.

Ce prétexte aussi sympathique qu’idiot va matérialiser, mine de rien, un concept limpide et génial qui sera le socle, l’objectif et la plus grande idée du jeu : dans chaque niveau se situent des zones musicales constituées de dalles colorées. En sautillant sur chacune d’entre elles en rythme, Jack les fait changer de couleur – en même temps que ses cheveux, brillante trouvaille pour que vous puissiez voir ce qui se passe sous les pieds de votre personnage. Une fois la zone unifiée, un disque de la même couleur fera son apparition : allez le placer sur une platine au coloris équivalent, selon un mode qui évoque déjà Tiny Skweeks paru l’année suivante, et le vinyle commencera à jouer l’une des pistes musicales de Jumpin’ Jack Flash : la batterie, la basse, la guitare, etc. Activez toutes les platines d’un stage, et vous pourrez rejoindre la sortie pour passer au niveau suivant. Simple, non ?

Évidemment, histoire de pimenter un peu les choses, il vous faudra à la fois composer avec des instruments de musique hostiles bien décidés à ne pas vous laisser ressusciter le rock, et avec un level design de plus en plus complexe qui constituera le véritable aspect « réflexion » du titre. Les ennemis ont chacun leur propre façon de vous nuire : certains suivent un trajet prévu d’avance, d’autres se promènent au hasard, d’autres encore vous collent aux basques et ne vous lâchent jamais. Sachant qu’un seul contact avec eux signifie la mort, mieux vaut les éviter avec soin, où déposer une des cassettes de votre inventaire au sol pour leur bloquer la route quelques instants. Pour ce qui est du level design, le jeu se divise en deux modes de seize niveaux chacun, faisant office de niveaux de difficulté.

Si le mode « A » est relativement simple, les choses commencent à se corser à mi-chemin, quant au mode « B », il monte encore la barre d’un cran et il faudra souvent s’accrocher pour venir à bout d’un stage. Ceux-ci seront d’autant plus coriaces que, si le jeu propose un système de mots de passe tous les quatre niveaux, obtenir ceux-ci vous demandera de réussir un challenge assez compliqué d’une seule traite, faute de quoi, le précieux sésame vous échappera ! Une méthode assez fourbe pour augmenter la durée de vie – le titre n’ambitionne pas, de toute façon, de vous occuper pendant des dizaines d’heures, mais il sait se montrer largement assez addictif pour que vous puissiez nourrir l’envie de le finir.

On appréciera, par exemple, les petites trouvailles faites pour vous surprendre d’un niveau à l’autre : passages secrets, téléporteurs, tapis roulants, tout y passe, et ce qui peut parfois passer pour une promenade de santé au premier regard peut rapidement se transformer en parcours du combattant où se déplacer anarchiquement en ne comptant que sur ses réflexes est le plus sûr moyen de finir sur l’écran de game over. Le jeu compte également son lot de bonus, et si la plupart n’ont d’autre objectif que le scoring (une autre époque…), on notera également l’existence de ces juke-box qui vous faciliteront la vie en vous autorisant à transporter deux, voire trois disques à la fois là où vous ne pouvez originellement n’en porter qu’un. Bref, on a affaire à un programme bien ficelé, qu’on comprend en une poignée de secondes et sur lequel on peut s’amuser des heures.

Niveau réalisation, Jumping Jack Son ne fait pas honte à l’Atari ST : la réalisation graphique, très colorée et très agréable, fait immédiatement penser à Skweek – sans doute à cause de la vue aérienne et du système de dalles. Niveau sonore, on sera heureux de voir que la machine d’Atari s’en tire cette fois avec les honneurs, elle qui bénéficiait trop souvent d’une bande-son à peine supérieure au haut-parleur interne du PC : certes, ce n’est pas encore au niveau de ce que pouvait proposer l’Amiga, mais cela reste très au-dessus de la grande majorité du catalogue de l’Atari ST sur la période.

Le thème de Jumpin’ Jack Flash est reproduit avec soin (bon, juste quelques mesures, on se doute que les Rolling Stones n’avaient pas exactement donné leur accord….), et l’Atari ST se sort les tripes pour que la qualité de la musique fasse honneur au programme – dommage que les bruitages des divers instruments interrompent systématiquement les pistes musicales. Bref, une très bonne pioche dans la catégorie « jeux comme on n’en fait plus », largement apte à vous faire passer un très bon moment. Que demander de plus ?

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15/20 Ni tout à fait un jeu d'action, ni complètement un jeu de réflexion, Jumping Jack Son réunit les influences les plus improbables, depuis Skweek jusqu'aux Rolling Stones, pour proposer un de ces logiciels inimitables comme seules les années 80-90 savaient en offrir. Grâce à un principe ingénieux et plus profond qu'il en a l'air, le titre offre une expérience plaisante qui saura mettre à contribution vos réflexes sans délaisser pour autant votre matière grise. On aurait volontiers rempilé pour davantage de niveaux, davantage d'idées – et davantage de thèmes musicaux, tant qu'à faire, parce qu'on fait rapidement une indigestion de Jumpin' Jack Flash – mais pour s'amuser quelques heures avec un jeu qui ne ressemble pas à grand chose d'autre, le contrat est parfaitement rempli. Encore un titre étonnant à (re)découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – On aurait apprécié plus de 32 niveaux – Dommage que le mode deux joueurs soit en alternance - il y avait sans doute un concept à creuser – Les niveaux permettant d'obtenir les mots de passe sont parmi les plus durs du jeu... – Avec un peu plus d'ambition, le jeu aurait vraiment pu laisser une trace indélébile dans l'histoire du jeu vidéo

Les avis de l’époque :

« Voilà un petit jeu d’action amusant. L’idée est originale et la réalisation sympathique. J’en ferais quelques parties avec plaisir, mais je pense que l’on risque de s’en lasser assez rapidement. Ce n’est pas aussi ludique que Skweek, ni aussi intéressant que Bombuzal. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°78, Mai 1990, 15/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Jumping Jack Son sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeurs : Christophe Laboureau, Stéphane Picq, Damien Petit et P. Sciro
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mai 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme la quasi-totalité des jeux développés sur Atari ST, Jumping Jack Son était destiné à sortir sur Amiga un jour ou l’autre – ce qui fut fait quelques mois plus tard. Sans surprise, le contenu du jeu n’a pas changé d’un iota, et on retrouve toujours les deux modes de difficulté avec le système de mots de passe, le mode démo et le mode deux joueurs en alternance.

Du côté graphique, on se retrouve avec un calque fidèle de la version Atari ST, qui était déjà très agréable à l’œil, on ne s’en plaindra donc pas. En revanche, on sait que s’il était un domaine où l’Amiga pouvait faire la leçon à tout le monde en 1990, c’est bien le son. On retrouve d’ailleurs aux crédits de ce portage un certain Stéphane Picq, dont le nom ne manquera pas de tirer une larme aux nostalgiques de Dune. Et de fait, pour un titre reposant sur la musique, on est très heureux de profiter des capacités de la puce Paula : le son ne crache plus comme sur ST, et les différentes pistes peuvent désormais se superposer sans heurts et sans être interrompues par les bruitages. À noter également que si l’écran-titre reprend sans vergogne Jumpin’ Jack Flash, les platines en jeu offrent une partition différente qui rend le thème musical bien moins répétitif – ce qui est un gros plus. La maniabilité, elle, est toujours irréprochable.

NOTE FINALE : 15,5/20

Sans révolutionner en rien tout ce qui avait fait le sel de la version ST, Jumping Jack Son sur Amiga a le bon goût de tirer intelligemment parti des capacités sonores de la machine de Commodore pour offrir une partition de qualité supérieure – ce qui, dans un titre largement basé sur la musique, est très appréciable. Rendu plus agréable que jamais par des thèmes entrainants et un son qui ne crache plus, ce portage en devient légèrement meilleur que la version originale, et reste sans conteste le meilleur moyen, aujourd’hui, de découvrir le très sympathique titre de Christophe Laboureau et son équipe.

Strider (Arcade)

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Titre original : ストライダー飛竜 (Strider Hiryū)
Testé sur : ArcadeAmigaAmstrad CPCAtari STCommodore 64PC (DOS)ZX SpectrumMega DriveMaster SystemSharp X68000PC Engine CDPlayStation
Disponible sur : Wii
Présent dans la compilation : Capcom Classics Collection : Volume 2 (PlayStation 2, Xbox)

La saga Strider (jusqu’à 2000) :

  1. Strider (Arcade) (1989)
  2. Strider (NES) (1989)
  3. Strider 2 (Tiertex) (1990)
  4. Strider 2 (Capcom) (1999)

Version Arcade

Date de sortie : Mars 1989 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Anglais, japonais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et deux boutons
Version testée : Version américaine, B-Board 89624B-2
Hardware : Capcom Play System (CPS)
Processeurs : Motorola MC68000 10MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz
Son : Haut-parleur ; YM2151 OPM 3,579545MHz ; OKI MSM6295 ADPCM 1MHz ; 1 canal
Vidéo : 384 x 224 (H) 59.637405 Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les joueurs les plus curieux, au sein de la génération actuelle, se seront peut-être posés un jour, au gré de longues minutes de désœuvrement solitaire, les questions les plus étranges, comme : « Qu’est-ce qu’un minitel ? », « Est-ce que les oiseaux transpirent ? », ou bien « À quoi pouvaient bien ressembler les jeux qui impressionnaient tout le monde il y a trente ans ? »

En ce qui concerne cette dernière question, la réponse demande d’imaginer une époque où les machines domestiques étaient supplantées par les bornes qu’on trouvait dans les salles d’arcade. Si jouer à un jeu de rôle de légende ou à un jeu de stratégie d’exception pouvait sans difficulté être réalisé sur Amiga, Atari ST ou même parfois sur Apple II, du côté de la plateforme, du jeu d’action, du shoot-them-up ou du défouraillage défoulatoire tous azimuts, la réponse n’était tout simplement pas du côté des ordinateurs de bureau et à peine du côté des consoles de salon. À la fin des années 80, ce n’était un mystère pour personne : le joueur qui voulait réellement en prendre plein les yeux et les oreilles devait se munir d’un peu de monnaie et partir s’essayer à Double Dragon, à Operation Wolf ou à Strider dans une salle près de chez lui.

Strider, justement, n’est pas seulement le jeu qui nous intéresse aujourd’hui – ce fut aussi un grand succès de l’arcade, du type même qui faisait dire à n’importe quel joueur coincé sur son Commodore 64 ou sur son ZX Spectrum : « Bon sang, ce que j’aimerais pouvoir jouer à un truc pareil chez moi ». Pourquoi ? Eh bien c’est la question à laquelle nous allons nous intéresser à présent.

Le scénario, pur produit de la fin des années 80, vous place dans un futur (pas trop) éloigné, en 2048 pour être précis. Le Grand Maître Maléfique communiste Meio règne d’une main de fer depuis sa base en Russie communiste, afin de dominer l’univers en érigeant un tyrannie mégalomane communiste. Heureusement, un grand héros pas communiste du tout nommé Hiryu, Strider de classe A (comme la Mercedes du même nom), approche en deltaplane du territoire communiste afin de vaincre une bonne fois pour toutes le maléfique représentant du communisme qui menace le monde pas communiste.

Si je me permets d’insister lourdement sur ce contexte politique à peu près aussi fin qu’une cuisse de rugbyman, c’est pour bien réinscrire Strider dans une période reaganienne décomplexée, où tous les héros de la pop culture, de Rambo à Chuck Norris jusqu’aux ninjas de chez Capcom, finissaient invariablement par aller affronter la menace rouge avec une évidence tellement aveuglante qu’elle se passait généralement d’explications plus complexes que la bonne vieille opposition bien/mal transformée en USA/URSS. Loin d’être anecdotique, ce contexte se retrouve immédiatement en jeu, avec des paysages moscovites futuristes, des robots à chapka, des interventions cinématiques d’une espèce de Gorbatchev de pacotille, et même un premier boss qui prend la forme de la Douma russe réunie pour se muter en dragon équipé d’une faucille et d’un marteau ! Une autre époque, et pas seulement sur le plan technologique…

Bon, mais ceci dit, on parle d’un jeu d’action/plateforme, alors sur le plan ludique à proprement parler, qu’en est-il ? Vous contrôlez bien sûr le Strider Hiryu, sorte de ninja futuriste, équipé d’une épée et de pas grand chose d’autre. Le gameplay, simplissime, n’emploie d’ailleurs que deux boutons : un pour sauter et l’autre pour frapper – utiliser le bouton de saut en étant accroupi vous permettra également de réaliser une glissade qui saura se montrer utile à plusieurs reprises. Est-ce à dire qu’il s’agit là de toute l’étendue de vos capacités ? Pas tout à fait : votre Strider est un adepte de la varappe.

Non seulement escalader un mur ne lui pose aucun problème, mais sauter d’une paroi à une autre se fait d’une façon encore plus simple que dans le Batman de Sunsoft, puisqu’il n’y aura aucune forme de timing à respecter. Mieux encore : votre personnage peut directement s’accrocher aux plateformes par en-dessous, et grimper sur elles d’une simple pression du stick. Mine de rien, cette simple trouvaille permet au jeu de se montrer un tantinet plus imaginatif dans le level design, et la mobilité va rapidement devoir devenir une seconde nature dans des environnements qui risquent de vous demander de vous faufiler à peu près n’importe où pour progresser.

Il devient alors beaucoup plus évident d’imaginer ce qui a pu emballer les joueurs à l’époque de la sortie du jeu : enchainer les saltos, rebondir sur les murs s’accrocher au plafond – ou au sol, car il vous arrivera à plusieurs reprises de devoir composer avec une gravité inversée – le tout en jonglant entre les piques, les mines, les soldats et les robots, sans oublier une espèce de chasseur de primes fortement inspiré de Bobba Fett, cela changeait un peu de Super Mario. Il est également possible de ramasser plusieurs bonus, comme ces espèces de drones qui vous aideront à faire le ménage, ou surtout un sabre king size qui améliorera drastiquement votre allonge.

Le gameplay est extrêmement dynamique, et se monte toujours aussi aisé à prendre en main – même si l’imprécision de vos différentes cabrioles risque parfois de vous faire mordre votre stick, d’autant que le jeu est à peu près aussi difficile qu’il est court (comptez une vingtaine de minutes pour en voir le bout). Les moments d’accalmie sont très rares, et vous demandent généralement de composer avec des pièges mortel qui auront de grandes chances de vous coûter quelques pièces la première fois que vous les rencontrerez, bref, on est bien face à un jeu d’arcade.

Le deuxième aspect emballant, pour un joueur de 1989, est à chercher du côté de la réalisation : pour l’époque, pas d’erreur, ça en jetait. Entre les sprites gigantesques, l’abondance de boss et de sous-boss, le côté spectaculaire de votre personnage qui ne peut pas faire un saut sans partir en salto et le petit aspect « mise en scène » (comme lorsque la Douma évoquée plus haut se transforme en dragon), on en prenait vraiment plein les mirettes – un aspect qui jouera certainement moins auprès du joueur moderne, qui trouvera au mieux le titre graphiquement sympathique, sans plus. Au niveau musical, on retrouve les sonorités « made in Capcom » qu’on trouvait déjà dans des titres comme Willow, et sans être ébouriffants, certains thèmes ont une fâcheuse capacité à vous rester dans le crâne un sacré bout de temps.

Que reste-t-il, alors, de la claque ressentie par les joueurs de la fin des années 90 ? Pas grand chose, pour être honnête : on est face à un jeu efficace mais imprécis, souvent bordélique et très court, dont la difficulté monte rapidement en flèche et qui nécessitera un peu de pratique pour ne pas se ramasser lors de scènes de plateforme pas toujours très lisibles. Une très bonne occasion de retrouver exactement ce qu’on cherchait en arcade à l’époque, à savoir le plaisir instantané et un gameplay basé avant tout sur les réflexes, mais rien qui n’ait été repris des milliers de fois, et souvent en mieux, depuis. Une curiosité à découvrir pour votre culture générale plus qu’un indispensable.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleure adaptation d’arcade – Versions Amiga, Atari ST et CPC

NOTE FINALE : 14/20 Perçu à sa sortie comme une véritable claque qui vous en mettait plein les yeux tout en vous chargeant d'adrénaline grâce à son action frénétique, Strider doit aujourd'hui composer avec une concurrence qui s'est énormément développée en trente ans. En dépit de quelques aspects originaux comme la capacité de votre personnage à s'accrocher partout, le titre de Capcom délivre aujourd'hui une expérience qui peine énormément à surprendre, et qui se montre aussi brève qu'elle est intense – et exigeante. En un mot, un parfait titre pour mettre votre habileté à l'épreuve sans vous embarrasser avec une prise en main nécessitant plus de deux boutons. Un assez bon représentant de ce qu'on espérait trouver en se rendant dans une salle d'arcade à l'époque. CE QUI A MAL VIEILLI : – Difficulté arcade : attendez-vous à mourir souvent – Cinq niveaux, vingt minutes de jeu : le titre est vraiment court – L'aspect « plateforme » n'est pas toujours extrêmement précis – Le sous-texte politique ne plaira pas nécessairement à tout le monde

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Strider sur une borne d’arcade :

Version Amiga

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – OS : Kickstart 1.0 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Tiertex se sera occupé du portage de la quasi-totalité des versions de Strider, et ce dès 1989 – on se doute donc que le travail a été fait assez rapidement. Et c’est en lançant la version Amiga – alors la machine la plus adaptée pour transcrire un succès de l’arcade – qu’on comprend immédiatement pourquoi les joueurs de l’époque étaient impressionnés par ce qu’ils voyaient sur les bornes d’arcade. Dire que la réalisation a perdu de sa superbe est en effet un euphémisme, et pourtant, tout le monde trouvait cette version magnifique à sa sortie. Avec le regard du joueur du XXIe siècle, le constat est cruel : c’est très sombre et affreusement pixelisé, la faute à une interface qui vient bouffer la moitié de l’écran à elle seule. Le jeu est toujours jouable, bien que sensiblement plus lent, mais on est très loin de la frénésie originale. Les thèmes musicaux sont travestis sans génie plutôt que repris (au moins peut-on profiter de la musique en même temps que des bruitages, bon point), la plupart des pièges ont été revus pour être plus dangereux – mais ils sont également plus simples à éviter. Et le jeu en lui-même a été expurgé de nombreuses séquences fortes : les murs du niveau quatre ne se rapprochent plus, les phases a gravité inversées sont en grande partie passées à la trappe – le générateur du niveau trois est heureusement toujours présent. En dehors de tous ces défauts, il faut reconnaître qu’on s’amuse encore en jouant, mais on sait également avec le recul que l’Amiga était capable de faire infiniment mieux que ça – il suffit de voir Shadow of the Beast sorti la même année.

NOTE FINALE : 11/20

Strider sur Amiga est très, très loin de la version arcade, la faute à une interface envahissante et à un manque d’ambition assez navrant. Oubliez la claque graphique et l’action débridée : on se retrouve désormais avec un petit jeu de plateforme très sage, moins maniable mais plus simple, dont on fait le tour affreusement vite. On comprend mieux, après dix minutes de jeu, ce qui pouvait faire rêver les joueurs d’alors en entrant dans une salle d’arcade : l’informatique de salon était encore à des kilomètres de pouvoir rivaliser.

Les avis de l’époque :

« La réalisation de Tiertex est exemplaire : graphisme, animation, scrolling multi-directionnel et bande sonore, tout est irréprochable. Souvent, des graphismes d’une telle qualité sont réalisés au détriment de la rapidité et de l’animation et, plus grave encore, la jouabilité n’est pas toujours à la hauteur. Mais ce n’est pas le cas de The Strider (sic) qui est un jeu difficile, mais parfaitement jouable du début à la fin du soft. (…) The Strider (re-sic) est une grande conversion d’arcade qui mérite de figurer parmi les plus grands succès de l’année. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°70, Octobre 1989, 18/20

Version Amstrad CPC

Développeur : Tiertex Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pas besoin d’être un génie pour comprendre que, afin de parvenir à sortir autant de portages d’un même jeu sur toute une gamme de systèmes 8 et 16bits n’ayant rien à voir entre eux en aussi peu de temps, U.S. Gold a utilisé la bonne vieille méthode du « ce sera la même version pour tout le monde et on verra bien comment on réussit à faire rentrer ça sur le support ». On ne sera donc pas surpris de trouver sur CPC une version reprise à 95% du ZX Spectrum. Oui, c’est moche, oui, les décors sont limités la plupart du temps à un vaste fond noir, oui, le CPC était capable de mieux que ça et non, ce n’était vraiment pas la peine de rajouter de grandes bandes noires autour de la surface de jeu : on commence vraiment à avoir l’impression de jouer sur un timbre-poste. Les seules différences avec la version 16 bits proviennent donc de l’absence de musique en jeu (on n’aura droit qu’à un jingle entre les niveaux) et à la simplification de plusieurs parties des stages – beaucoup de pièges sont ainsi purement et simplement passés à la trappe, si j’ose dire. Côté jouabilité, ce n’est pas extraordinaire, mais le titre délivre plus ou moins l’expérience à laquelle on pouvait s’attendre sur la machine d’Amstrad : on avance, on saute, on tape, et c’est rarement très complexe. Bref, le monument de l’arcade s’est transformé en petit jeu popcorn.

NOTE FINALE : 07/20

Avec un jeu déjà décevant sur ordinateurs 16 bits, on ne s’attendait pas à des miracles sur CPC. Sans surprise, porté sur la machine d’Amstrad, Strider est devenu un ersatz de la version Amiga, soit le portage édulcoré d’une adaptation déjà fainéante. C’est toujours à peu près jouable, mais on ne peut pas dire que ça ait encore grand chose à voir avec l’expérience de jeu que procurait la version originale. Autant dire un jeu d’action/plateforme comme la machine en avait déjà des dizaines.

Les avis de l’époque :

« Strider est un grand jeu d’arcade et il faut bien reconnaître que la version CPC est très réussie. Le graphisme est excellent, en dépit d’un manque de variété dans les couleurs, et le scrolling multidirectionnel est surprenant. Quelques scènes ont disparu et il n’est pas possible de faire des glissades avant, mais le jeu reste le même, pour l’essentiel notamment les sauts périlleux de Strider qui sont vraiment très spectaculaire (sic). »

Alain Huygues-Lacour, Tilt n°71, Novembre 1989, 18/20

Version Atari ST

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En règle générale, on sait à quoi s’attendre avec un portage sur Atari ST, et la réponse pourrait tenir en une phrase : « Voir la version Amiga ». C’est à peu près le menu ici, même si comme souvent l’Atari ST offre également une réalisation sonore un peu moins aboutie et un défilement légèrement moins fluide – mais assurément pas de quoi se relever la nuit. Bref, si vous voulez absolument jouer sur Atari ST, vous savez à quoi vous attendre ; dans n’importe quel autre cas de figure, vous serez mieux avisé de lancer la borne d’arcade.

NOTE FINALE : 11/20

C’est Strider, c’est sensiblement la même chose que sur Amiga, et ça a toujours aussi mal vieilli sur le plan technique. Pour le reste, le portage demeure relativement jouable, mais vu le nombre d’alternatives qualitativement supérieures, on réservera quand même cette version aux passionnés de la machine d’Atari.

Les avis de l’époque :

« En découvrant cette petite merveille sur Amiga, l’une des premières choses qui me soit venue à l’esprit était qu’il serait étonnant qu’on puisse faire aussi bien sur ST. Eh bien c’est faux, là encore Tiertex a fait des miracles. La bande sonore est moins performante et le scrolling à peine plus saccadé, mais globalement, c’est aussi superbe. Un must. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°70, Octobre 1989, 18/20

Version Commodore 64

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Après un portage raté sur CPC, c’est avec une certaine méfiance qu’on accueille ce Strider sur C64… Et on a peut-être tort, car il est évident dès les premières secondes que la réalisation et très supérieure : graphismes plus colorés, animation mieux découpée, et une chouette musique présente en jeu – on est bien plus proche des versions 16 bits que de la bouillie constatée sur CPC. Malheureusement, le tableau n’est pas non plus totalement idyllique : si le jeu est toujours jouable, il a été amputé d’énormément de choses : impossible de s’accrocher aux plateformes par en-dessous, plus de loups en Sibérie, beaucoup de pièges ont disparu, les gardes peuvent maintenant vous tirer dessus – ce qui vous oblige à abuser de la glissade… Plus grave : la Douma du premier niveau et son dragon communiste ont désormais purement et simplement disparu, tout comme une grande partie des scènes marquantes du jeu. Et pour ne rien arranger, la difficulté est délirante : les tirs adverses vont dix fois plus vite que vous, et ils sont pratiquement impossibles à éviter. On se retrouve donc avec un titre très différent de la version arcade, ce qui n’est pas vraiment une surprise, mais on comprend aisément que les joueurs de l’époque aient eu envie d’y croire à mort.

NOTE FINALE : 09,5/20

Strider sur Commodore 64 ne peut évidemment prétendre s’approcher de la version arcade, mais il humilie aisément le portage sur CPC et délivre une expérience, certes largement amputée de son contenu, mais qui a le mérite d’être jouable et relativement prenante – quoi que difficile pour de mauvaises raisons. Dommage que le titre n’offre pas la totalité de l’expérience originale, il en avait les moyens.

Version PC (DOS)

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25 et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086
Modes graphiques supportés : CGA, EGA
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme les joueurs de la vieille génération le savent bien, la place du PC au sein des machines de jeu à la fin des années 80 était simple à décrire : bon dernier. Alors que les cartes sonores commençaient à apparaître, et que des titres comme Budokan ou Mean Streets tiraient déjà parti du VGA, Strider se charge de nous rappeler immédiatement à quoi pouvait ressembler le cahier des charges pour un portage de l’arcade vers le PC en 1989 : 16 couleurs, haut-parleur interne, et impossible de reconfigurer les touches (qui n’ont même pas l’intelligence de tirer parti des flèches). Sans surprise, c’est tellement moche qu’on a presque l’impression de jouer à la version CPC, la jouabilité est inutilement alourdie par cette configuration imposée au clavier (fort heureusement, les choses se passent mieux au joystick), et l’ambiance sonore se limite à quelques « bips » en guise de bruitage. Bref, nostalgie ou curiosité mises à part, c’est strictement sans intérêt pour un joueur du XXIe siècle. Allez hop, poubelle.

NOTE FINALE : 08/20

Au rang des vrais portages feignants, Strider sur PC renvoie la machine d’IBM à un rang inférieur aux ordinateurs 8 bits en proposant cette version hideuse, silencieuse et jamais pensée pour être jouable. C’est lent, poussif et même pas à la hauteur de ce que proposait le C64 – difficile d’imaginer que Wing Commander sortirait sur la même machine moins d’un an plus tard. Bref, une pièce de musée chargée de rappeler aux générations futures cette époque oubliée où le PC n’était bon qu’à faire rire tout le monde – sauf ses possesseurs.

Version ZX Spectrum

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joysticks Kempston et Sinclair
Version testée : Version disquette testée sur sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko*
*Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko

Sorti également sur l’ordinateur de Sinclair, Strider y livre à peu près la prestation que l’on pouvait craindre, à savoir celle de la version CPC en plus moche – mais aussi en plus jouable. Cette fois, pas de chichis sur les couleurs : il n’y en a pas. Ou plutôt, les quatre seules couleurs visibles en-dehors du blanc sont cantonnées à l’interface, un choix que l’on qualifiera de « triste ». Autant dire que, graphiquement parlant, le jeu pique sévèrement les yeux, mais force est de reconnaître que l’animation est détaillée et que ça tourne beaucoup mieux que sur la machine d’Amstrad. Surtout, cette version a le mérite de ne connaître aucune des coupes de la version Commodore 64 : le boss du niveau un est bien là, tout comme les loups en Sibérie. Niveau musical, passé l’écran-titre, c’est le silence le plus total.

NOTE FINALE : 08,5/20

Poussé au maximum de ses capacités, le ZX Spectrum n’était déjà pas un monstre de technologie, alors quand on y développait des jeux dans l’urgence et sans aucune ambition… Strider reste jouable, avec un contenu honnête, et éveillera sans doute une lueur nostalgique dans le regard des utilisateurs de la machine de Sinclair mais, passé la curiosité, difficile de voir comment un joueur du XXIe siècle pourrait trouver un quelconque intérêt dans cette version.

Version Mega Drive

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 29 septembre 1990 (Japon) – Novembre 1990 (États-Unis) – Mai 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais, traduction française par Terminus traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien avant le lancement de la Neo Geo, c’était la Mega Drive qui avait l’ambition de représenter l’arcade à domicile. Il faut avouer qu’après ses errements initiaux, la 16 bits de SEGA avait su proposer, dans les mois suivants sa commercialisation, des transcription très fidèles de grands succès comme Golden Axe, Outrun ou Altered Beast – tous des jeux SEGA, naturellement. Lorsque Capcom avait pour la première fois débarqué sur la Mega Drive (en laissant néanmoins aux programmeurs de SEGA la charge d’assurer eux-mêmes le portage) avec Ghouls’n Ghosts, les joueurs avaient commencé à se frotter les mains à l’idée d’accueillir d’autres succès de l’arcade. Dans les faits, ils ne se seront pas nécessairement bousculés au portillon, mais en plus de titres comme Forgotten Worlds ou MERCS, la console de SEGA aura bel et bien accueilli Strider – qui représente, au passage, un des meilleurs portages du genre.

Oh, certes, les sprites sont parfois un tout petit peu moins imposants, la palette de couleurs est légèrement moins étendue, les dégradés sont moins fins, et les digitalisations sonores qui accompagnaient les scènes placées entre les niveaux ont disparu (sauf dans la version japonaise). Mais je vous garantis que n’importe quel joueur de 1990 n’y voyait que du feu : Strider sur Mega Drive, c’était la borne d’arcade dans une cartouche, point barre. Il faut reconnaître que ce portage boxe dans une toute autre catégorie que ce qu’avaient pu offrir l’Amiga ou l’Atari ST : loin du simple ersatz pour faire « comme si » vous jouiez à la borne d’arcade, la version Mega Drive de Strider vous délivre exactement les sensations de l’original sur CPS-1, ainsi qu’un contenu qui n’a été amputé d’aucun détail, animation ou scène forte. Bref, c’était absolument bluffant – et un nouvel argument massue pour vendre la 16 bits flambant neuve de chez SEGA sur le vieux continent à sa sortie.

NOTE FINALE : 13,5/20

Strider sur Mega Drive a beau être légèrement inférieur à la version arcade, il faut vraiment commencer à placer les deux versions côte à côte pour distinguer les différences. Paru sur une machine encore en début de vie, le portage du titre de Capcom hurle son ambition, au point d’avoir largement contribué à placer d’entrée de jeu la machine de SEGA dans la cour des grandes. Si le jeu ne décrochera plus la mâchoire de personne aujourd’hui, cette version reste de très loin l’une des plus fidèles à l’arcade, et une excellente alternative pour découvrir le titre. Un coup de maître.

Les avis de l’époque :

« Les versions Amiga et ST de Strider sont réussies, mais elles ne peuvent en aucune façon soutenir la comparaison avec celle de la Megadrive (sic). Le jeu est bien sûr en plein écran et les sprites sont de grande taille, comme dans le jeu d’arcade. De plus, les magnifiques décors sont très soignés et le scrolling différentiel est fluide. (…) Une grande conversion d’arcade. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°83, Novembre 1990, 18/20

Version Master System

Développeur : Tiertex Design Studios
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Juin 1991 (États-Unis) – Novembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1991, La Master System n’était pas au mieux de sa forme mais elle se portait encore bien, merci pour elle. L’idée d’y porter un jeu comme Strider, à présent que les développeurs avaient eu le temps d’apprendre à maîtriser la bête, pouvait ressembler à un bon moyen de montrer ce que la petite 8 bits de SEGA avait encore dans le ventre. Malheureusement, SEGA était occupé avec la Mega Drive, et c’est donc Tiertex qui aura hérité du bébé. Graphiquement, c’est déjà assez limite – même si ça n’est pas à des kilomètres des versions parues sur ordinateur, dont cette adaptation est d’ailleurs assez proche, et pour cause. En revanche, l’animation est d’une lenteur à pleurer, et les sauts en particuliers donnent l’impression d’être effectués en slow motion. Du côté de l’action, ça n’est pas beaucoup plus trépidant, avec un adversaire tous les cinq écrans, et le même thème musical répété en boucle pendant tout le stage finit par coller une migraine. Ajoutez des adaptations assez malheureuses, comme le fait que n’importe quel ennemi puisse désormais vous tirer dessus, et que la réactivité des commandes soit à la hauteur de l’animation, et vous mesurerez la différence avec la version Mega Drive – c’était peut-être ça, l’objectif de ce portage, en fin de compte.

NOTE FINALE : 09/20

Strider sur Master Sytem est un cruel symbole du passage de relai entre la Mega Drive et sa grande sœur : techniquement dépassé, ludiquement sans grand intérêt, ce portage aurait sans doute grandement bénéficié des mêmes choix que ceux effectués sur la version NES. Malheureusement, le titre ressemble davantage à une caricature du succès de Capcom qu’à une adaptation. À oublier.

Les avis de l’époque :

« Au premier abord, le jeu a l’air intéressant, avec de bons sprites et des scrollings en arrière-plan. Mais dès les premières minutes, la médiocrité du système de contrôle saute aux yeux. Le jeu est lent et présente de véritables inconvénients : Strider n’est pas rapide et ne résiste pas aux tirs ennemis. »


Julian, Consoles + n°0, Juillet-Août 1991, 67%

Version Sharp X68000
Strider Hiryū

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 27 novembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus) / japonais (narration)
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Curieusement, Strider aura attendu la fin de l’année 1992 pour daigner arriver sur Sharp X68000 – un choix d’autant plus surprenant que le CPS1 qui faisait tourner la borne était lui-même bâti sur une architecture proche du Sharp X68000 (même s’il est également possible que cette prétendue proximité entre les deux hardwares soit en grande partie un mythe, je laisse les experts débattre de la question)… Capcom étant aux commandes, on n’aura heureusement pas de mauvaises surprises à la Tiertex ici. En-dehors d’un menu des options qui vous permettra de régler la difficulté et de choisir le nombre de vies, on se retrouve ici face à un portage très proche de la version arcade – ou en tous cas, de la version arcade japonaise, ce qui signifie que les voix digitalisées signent leur grand retour, y compris le cri très énervant que pousse Strider à chaque fois qu’il frappe, c’est à dire cinquante fois par minute. Graphiquement, on sera surpris de constater quelques manques (les étoiles du premier niveau ont par exemple disparu, ne me demandez pas pourquoi) et surtout une surabondance d’effacements de sprites (la borne en connaissait quelques-uns, mais rien de comparable). Une fois n’est pas coutume, on ne se retrouve donc pas avec une version qui enterre toutes les autres – le jeu est certes bien meilleur que toutes les adaptations sur ordinateur, mais difficile de le placer au-dessus de la version Mega Drive, qui avait certes placé la barre très haut.

NOTE FINALE : 13,5/20

Pour une fois, les joueurs européens n’auront pas à pleurer des larmes de sang de n’avoir jamais pu approcher un Sharp X68000 : ce portage de Strider Hiryū est certes très proche de l’arcade, mais pas tout à fait à sa hauteur, et il n’y a vraiment pas de quoi revendre sa cartouche Mega Drive pour aller investir dans cette version du jeu. Du travail correct, mais on sent que Capcom ne s’est pas foulé outre mesure.

Version PC Engine CD
Strider Hiryū

Développeur : Dice Co., Ltd.
Éditeur : NEC Avenue, Ltd.
Date de sortie : 22 septembre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus) / japonais (narration)
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Arcade Card supportée

Vidéo – L’introduction du jeu :

On aurait pu penser qu’en 1994, à un moment qui correspondait au début de la fin pour la génération 16 bits, il était un peu tard pour songer à adapter Strider sur la PC Engine. Ce n’était visiblement pas l’avis de Capcom, qui réalisa un peu tard que le jeu n’avait pas encore honoré la console de NEC de sa présence (le fait qu’une version Super Nintendo n’ait jamais vu le jour a d’autant plus de quoi interroger, surtout quand on sait à quel point Capcom aimait à développer pour cette machine). À un moment où tous les yeux étaient déjà tournés vers la PlayStation et la Saturn, le titre débarqua donc sur PC Engine CD. Et histoire de justifier l’attente (et de remplir un peu le support), il décida d’arriver avec quelques arguments, mais jugez plutôt.

CD-ROM oblige, ce Strider Hiryū arrive avec sa part de scènes cinématiques en introduction, bien sûr, mais aussi entre les niveaux – et même pendant les niveaux puisque chaque boss ou mini-boss se sentira désormais obligé de vous sortir son petit speech introductif en voix digitalisées avec son portrait sous forme de vignette. Un choix qui casse un peu le rythme, mais qui a l’avantage de soigner l’enrobage tout en détaillant l’univers du jeu à ceux qui auront la chance de comprendre le japonais. Histoire de ne pas s’arrêter là, le titre propose également une musique réenregistrée, avec des version orchestrales très fidèles aux thèmes originaux mais de bien meilleure qualité. Et pour achever tout le monde, cette version bénéficie même d’un niveau supplémentaire, situé dans le désert, et venant s’intercaler à la suite du premier stage histoire de gonfler encore un peu la durée de vie du jeu. Bref, ça commence à avoir toutes les caractéristiques de la version ultime…

Sauf que voilà, l’équipe de Dice pêche précisément par les deux aspects qui avaient fait la notoriété de la version arcade : la jouabilité et la réalisation graphique. La PC Engine avait largement eu l’occasion de prouver, en 1994, qu’elle était tout à fait capable de rivaliser techniquement avec la Mega Drive dans bien des domaines, à plus forte raison face à un portage de 1990.

Malheureusement, entre la résolution limitée et une palette de couleur mal choisie, on sent immédiatement que cette version ne joue pas dans la même cour. Ce ne serait pas trop grave si la jouabilité n’était pas aussi raide, avec des masques de collision ratés et des sauts qui sortent mal, et dans l’ensemble on a souvent les pires difficultés pour amener notre héros là où on pensait le faire. Autant dire qu’une fois le pad en mains, on déchante un peu, et on se dit que tout ce contenu bonus ne pèse finalement pas très lourd à partir du moment où le jeu est moins amusant à jouer. Ceci dit, si la curiosité vous pousse vers cette version, il est certainement possible de dompter son maniement assez particulier avec un peu d’entrainement, mais ce n’est certainement pas la meilleure itération pour découvrir le jeu.

NOTE FINALE : 12,5/20

Bilan contrasté pour Strider Hiryū sur PC Engine CD : si on appréciera la présence de cinématiques, la musique réorchestrée et le niveau bonus, la réalisation graphique et surtout la jouabilité ne suivent pas. Autant dire qu’en 1994, le jeu sera passé totalement inaperçu et que, de nos jours, il s’approche davantage d’une curiosité que de la version ultime de jeu.

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeurs : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : 24 février 2000 (Japon) – Mars 2000 (Europe) – Juillet 2000 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le cas de cette version PlayStation de Strider est un peu particulier : elle aura en fait été exclusivement vendue… sous la forme d’un CD bonus offert dans la boîte de Strider 2, l’adaptation de la borne d’arcade de Capcom (et non celle du jeu de Tiertex, vous vous en doutez). Pour l’occasion, on retrouve naturellement un portage très fidèle à la borne, bien que la résolution soit un peu différente (365×224 ici) et que, de façon plus surprenante, les bruitages soient devenus un peu plus sourds. Au rang des nouveautés, l’apparition d’un menu des options rappelant beaucoup celui du deuxième opus, et qui inclut une dizaine de modes de difficulté, des options de configuration, et même la possibilité de disposer d’une bande sonore remixée. Le résultat est une question de goût, mais on remarquera que de nombreuses variations de mélodies présentes dans les niveaux originaux ne subsistent pas dans ce mode, et que les morceaux tournent vite en boucle. Mon conseil : préférez les thèmes de base. Pour le reste, les joueurs désireux de découvrir ce premier opus avant de lancer le deuxième épisode pourront donc le faire ici dans des conditions quasi-idéales, mais méfiez-vous : la difficulté par défaut du jeu est plus élevée que celle de la borne.

NOTE FINALE : 14/20

Pas de mauvaise surprise : ce portage de Strider sur un système 32 bits apporte tout ce qu’offrait la borne d’arcade, plus quelques bonus bienvenus dont la possibilité de profiter de thèmes musicaux remixés. On peut regretter que Capcom n’en ait pas également profité pour corriger les quelques imprécisions du gameplay, mais en tant que pur portage, rien à redire.

Mean Streets

Développeur : Access Software, Inc.
Éditeur : Access Software, Inc.
Titres alternatifs : Tex Murphy : Mean Streets (Steam.com), Tex Murphy 1 – Mean Streets (Gog.com)
Testé sur : PC (DOS)Commodore 64AmigaAtari ST
Disponible sur : Linux (Ubuntu 16.04, Ubuntu 18.04), Macintosh, Windows (7, 10)
En vente sur : GOG.com (Linux, Macintosh, Windows), Steam.com (Linux, Macintosh, Windows)

La saga Tex Murphy (jusqu’à 2000) :

  1. Mean Streets (1989)
  2. Martian Memorandum (1991)
  3. Under a Killing Moon (1994)
  4. The Pandora Directive (1996)
  5. Tex Murphy : Overseer (1997)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″ (x6) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 3.0 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

« Montre-moi quelle affiche de film célèbre est plagiée par la couverture de ta boîte de jeu et je te dirai qui tu es. »

Pour tous les spécialistes de la science-fiction, pour tous les fans d’Harrison Ford, pour tous les amateurs de Ridley Scott, une étrange impression de déjà-vu s’est probablement manifestée en observant la boîte de Mean Streets, et pour cause : difficile de ne pas y voir de lien avec l’affiche de Blade Runner. Imaginez la Californie du futur, ses villes tentaculaires, sa nuit permanente, ses terres arides transformées en décharges géantes et ses voitures volantes. Familier ? Pas de « Réplicants » ici, toutefois, mais des mutants déformés ou dévisagés par les retombées nucléaires. Et au milieu du chaos, un détective privé anachronique vêtu d’un imperméable à la Boggart, et dont les amateurs de jeux d’aventure seront amené à réentendre parler à plusieurs reprises : Tex Murphy.

Bien avant d’accéder à la renommée à l’ère du CD-ROM et des FMV par le biais d’Under a Killing Moon, Tex écumait en effet déjà la côte ouest du futur à bord de son speeder, avec ses poings, son flingue et ses poches vides. Nous sommes en 2033, et une femme évidemment fatale vient de vous confier une enquête très bien payée : découvrir les réelles causes de la mort de son père, Carl Linsky. Lequel s’est apparemment suicidé en se jetant du haut d’un pont devant témoin, ce qui semble définitivement exclure la piste du meurtre. Mais vous pencher sur les activités de la victime vous amènera rapidement à découvrir un homme inquiet qui craignait pour sa vie, et surtout un mystérieux projet nommé « Overlord » qui va vous obliger à naviguer entre les grands pontes, les petites frappes et les nervis de cet étrange parti politique néo-fasciste appelé « Law and Order » afin de réussir à faire la lumière sur toute cette affaire.

Comme vous l’aurez déjà deviné, le jeu vous place naturellement dans la peau de Tex Murphy, déjà incarné à l’écran par Chris Jones – comme ce sera le cas durant toute la saga pendant plus de vingt-cinq ans – à la recherche de la vérité sur la mort de Carl Linsky. Nous sommes en 1989, le concept du point-and-click commence à peine à exister, et la plupart des jeux d’aventure se jouent encore à l’aide d’indigestes lignes de commande. Mais Mean Streets, lui, est un jeu très ambitieux, et cette ambition se ressent déjà dans la multitude des possibilités offertes par le titre.

Concrètement, le logiciel développé par Access Software va vous confronter à trois types de situation : des phases de simulation, des phases d’action et des phases d’aventure. Les amateurs de point-and-click auront probablement déjà tiqué, tant le mélange des genres est quelque chose qui sera rapidement passé de mode, et pour de très bonnes raisons. Mean Streets a heureusement la bonne idée de ne pas trop s’éparpiller en faisant le choix de simplifier au maximum les phases ne relevant pas de l’aventure pure et dure. Pour ce qui est de la simulation, elle est assez basique : elle consistera à piloter votre voiture volante d’un point à un autre pour mener l’enquête, dans une carte en 3D surface pleine qui en envoyait sans doute plein les yeux à l’époque et qui réemployait pour l’occasion une partie du code d’Echelon, développé deux ans plus tôt par Bruce Carver, le fondateur d’Access Software.

La conduite est assez simple, et les commandes vous seront résumées sur un écran d’aide affiché par un simple pression de la touche H, et il existe même un pilotage automatique qui vous permettra de voyager au gré des coordonnées que vous découvrirez au fil de la partie sans à avoir à vous battre avec les commandes. Seul inconvénient : attendez-vous à passer beaucoup de temps dans votre voiture, et même si cette idée participe indéniablement à l’immersion du joueur, d’un point de vue strictement ludique, il aurait sans doute été beaucoup plus intéressant de vous contenter de choisir votre destination sur une carte et de vous y rendre immédiatement. En l’état, les trajets ne sont jamais très longs – une minute grand maximum – mais ce pilotage automatique qui juge nécessaire de vous placer au pixel près au-dessus d’un point avant de se décider à vous y poser vous fera perdre un temps que vous pourriez consacrer à quelque chose de plus intéressant, dommage.

Deuxième type : les phases d’action. Il vous arrivera, en trainant dans des quartiers mal famés, de vous faire agresser par des malfrats. Vous vous retrouverez alors dans un mini-jeu consistant à avancer vers la droite en tuant les ennemis qui se dirigent vers vous. Je vous rassure : ce n’est vraiment pas compliqué, mais on ne peut pas dire que ça soit très intéressant non plus. Pour ceux qui auraient du mal, il est de toute façon possible de régler la difficulté de ces phases dans le menu des options. Disons que ça casse la routine.

Car bien évidemment, le cœur du jeu consistera à mener l’enquête. Si le programme se contentera parfois de vous balancer une simple description textuelle, l’aventure se déroulera principalement de deux manières : en interrogeant des gens et en passant plusieurs lieux au peigne fin. C’est bien sûr, et de très loin, la partie la plus intéressante du jeu, et celle-ci vous demandera de prendre soigneusement des notes tant vous risquez rapidement de crouler sous les noms, les coordonnées, les termes obscurs et les fausses pistes. Mais vous risquez de vite vous prendre au jeu, car le scénario est suffisamment bien mené pour vous donner envie d’en savoir plus – au moins jusqu’à ce que l’identité du ou des coupables devienne évidente, et que vous vous trouviez embarqué dans une résolution un peu plus fastidieuse vous demandant de trouver huit cartes magnétiques et les mot de passe correspondants, où les choses commencent à s’essouffler un peu.

Mais avant d’en arriver là, il faudra vous comporter comme un authentique privé de cinéma, et la chose pourrait se révéler un peu plus compliquée que vous ne l’aviez prévu. Non seulement il faudra poser les bonnes questions – en tapant les noms qui vous intéressent manuellement, d’où le besoin vital de prendre des notes en cours de jeu – mais il faudra également parfois faire usage de vos poings, ou graisser la patte de témoins peu causant. Dans le même ordre d’idée, vous bénéficiez d’un visiophone vous autorisant à contacter votre secrétaire, qui pourra mener des recherches pour vous, ou votre indic, Lee Chin, qui le fera, elle, contre espèces sonnantes et trébuchantes. Vous remarquerez que cela fait déjà plusieurs fois qu’on évoque l’argent, dans ce test : celui-ci risque effectivement de vous être d’une utilité vitale, et le pécule a priori confortable de 10.000$ avec lequel vous commencez le jeu pourrait fondre comme neige au soleil à force de devoir mettre la main à la poche pour faire parler les gens peu causants. Il vous est heureusement possible, lors de vos analyses de scènes de crime, de trouver des objets de valeur que vous pourrez vendre directement depuis votre inventaire histoire de vous refaire la cerise.

Ces phases d’analyse, d’ailleurs, sont de loin les plus complètes et les plus délicates. L’interface assez lourde, entièrement au clavier (le jeu n’utilise jamais la souris), vous permettra de fouiller partout avec une efficacité maximale, même si vous devrez également parfois composer avec l’urgence de désactiver en 5 ou 10 minutes une alarme qui se serait enclenchée à votre entrée. Certains éléments importants sont très bien cachés, mais il est de toute façon toujours possible de revenir sur place après coup. Ce sera même parfois nécessaire, le temps de trouver des gants de protection pour éviter de vous entailler les doigts ou un tournevis qui vous permettrait de démonter un système de sécurité – Tex a heureusement le bon goût d’employer automatiquement n’importe lequel des objets figurant dans son inventaire.

Il faudra souvent retourner tous les meubles, fouiller méthodiquement le moindre recoin, pour accéder enfin aux éléments qui vous permettront de faire avancer votre enquête – le jeu est heureusement assez bien agencé de ce côté-là. Comptez facilement entre quinze et vingt heures pour venir à bout du jeu une première fois – sans doute beaucoup plus si vous tournez en rond, car les endroits à fouiller sont nombreux et les indices parfois rares, surtout si vous avez oublié de noter un nom important. Il est heureusement possible de réinterroger tout le monde au cas où vous auriez le sentiment d’avoir oublié quelque chose. On pourra également apprécier les petites références plus ou moins cachés à Star Trek ou à Retour vers le Futur.

Niveau réalisation, nous sommes en 1989, et il faut reconnaître qu’Access Software a mis le paquet. Le jeu est certes très loin de représenter le pinacle du pixel art, mais il était l’un des tous premiers programmes à tirer parti du VGA, dont il fait un usage parfois maladroit, mais incontestablement bien plus agréable à l’œil que ce que permettaient les 16 couleurs de l’EGA. On remarquera le recours récurrent à des images digitalisées, profitant pour l’occasion de l’expérience accumulée par le studio en développant Leader Board puis World Class Leader Board (l’animation du golfeur avait été obtenue en filmant Roger Carver et en tirant parti d’une technologie de digitalisation primitive) qui allaient devenir, un an plus tard, la série des Links.

Autre innovation, le « Realsound » vanté en grandes lettres sur la boîte. De quoi s’agit-il ? Eh bien tout simplement d’une autre innovation de Bruce Carver : un procédé permettant de tirer le meilleur du haut-parleur interne du PC. De fait, même si les thèmes musicaux sont aussi courts que rares, ils sont d’une qualité assez bluffante, et les quelques digitalisations vocales du titre pourraient sans difficulté faire rougir une Sound Blaster ! Malheureusement, c’est quand même le silence qui vous accompagnera pendant le plus clair de la partie, et l’aspect révolutionnaire du « Realsound » n’aura finalement eu aucune valeur face à la rapide démocratisation des cartes sons intervenant à la même époque. Mais pour 1989, soyons honnêtes, Mean Streets représente clairement le haut du panier, et une véritable prouesse technologique. Rappelons qu’il était encore courant de trouver des jeux développés en EGA deux ans après sa sortie…

Le défaut qui passera le plus mal, pour le joueur actuel, restera malgré tout l’absence (à ma connaissance) de localisation du jeu en français sur PC : s’aventurer dans cette aventure sans une bonne maîtrise de l’anglais n’a pas plus d’intérêt que de lire un polar sans en comprendre un traitre mot. C’est dommage, car une fois la prise en main digérée – soit une poignée de minutes – l’enquête, pour légèrement datée qu’elle soit, est néanmoins rapidement prenante ; suffisamment, sans doute, pour vous pousser à la mener à son terme. Et qui sait ? Vous pourriez bien apprendre à l’apprécier au point de souhaiter le revoir, ce fameux Tex Murphy.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20

Quelque peu empesé par une prise en main au clavier et par une multitude de phases plus ou moins utiles qui trahissent son âge, Mean Streets n'en demeure pas moins une enquête plaisante dans une Californie futuriste à la Blade Runner où l'atmosphère des films noirs se mêle parfaitement à l'ambiance post-apocalyptique. Mener l'enquête sur la mort de Carl Linsky vous demandera d'être méthodique, scrupuleux et de prendre des notes, mais la façon dont l'univers se dévoile, bien servi par une écriture efficace, vous donnera une bonne raison de chercher à en savoir plus. Dommage, malgré tout, que le jeu vous impose de multiplier des allez-et-retours dispensables et qu'il soit inaccessible aux non-anglophones. Une première aventure de Tex Murphy à (re)découvrir.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Réalisation révolutionnaire pour l'époque, mais sérieusement datée aujourd'hui
– On passe au final plus de temps à conduire sa voiture qu'à mener l'enquête
– Interface au clavier qui aurait largement bénéficié de l'usage de la souris
– Le mélange des genres n'est pas la meilleure idée de la série
– Entièrement en anglais, et en anglais d'un bon niveau

Version Commodore 64

Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Mean Streets représentant, à sa manière, la pointe de la technologie en 1989, on pouvait se demander comment le jeu allait s’en tirer sur le modeste ordinateur 8 bits de Commodore. Eh bien, étonnamment, pas tout-à-fait aussi mal qu’on pouvait le craindre : ¨l’équipe de The Code Monkeys a fait le choix de ne rien couper dans le jeu – à part la musique après l’écran-titre et les rares digitalisations, mais l’ambiance sonore était déjà particulièrement discrète sur PC – et non seulement toute l’aventure est toujours là, mais la réalisation est plus qu’honnête.

On a même conservé les phases de survol en 3D ! Force est de constater, malgré tout, que ça se traine un peu et qu’il n’y a plus grand chose à voir lors des phases en voiture, mais on appréciera l’ambition intacte du titre. Le jeu est toujours aussi sympathique, même s’il vous faudra jongler entre le clavier et le joystick, et surtout composer avec des temps de chargement à rallonge et avec des changements de disquette intempestifs, ce qui, dans un jeu où l’on passait déjà beaucoup de temps à attendre sur PC, est vite dommageable. Bref, jouer demandera une bonne dose de patience, mais l’effort reste louable.

NOTE FINALE : 10/20

Porter Mean Streets sur Commodore 64 tenait plus du défi que de la promenade de santé, mais The Code Monkeys a entrepris la chose avec beaucoup de sérieux, au point de conférer une expérience de jeu étonnamment proche de celle sur PC. Si la réalisation est réellement impressionnante pour la machine 8 bits, il faudra malgré tout composer avec une lenteur handicapante, encore plombée par des temps de chargement à rallonge et de fréquents changements de disquettes, qui réservera cette version aux nostalgiques patients.

Version Amiga

Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Mean Streets fut certainement l’un des tout premiers exemples de jeu porté depuis le PC vers l’Amiga plutôt que dans le sens inverse ; il fut aussi certainement le premier titre à être techniquement inférieur sur la machine de Commodore. En termes de réalisation, si ce portage est clairement moins coloré qu’en VGA, on ne peut pas dire que l’on perde énormément au change, et les graphismes font largement le boulot.

Côté son, en revanche, si l’unique thème musical du jeu est toujours là en qualité Paula (c’est à dire mieux que le haut-parleur interne du PC, comme on pouvait s’en douter), la plupart des bruitages ont disparu et vos vols au-dessus de la Californie se feront désormais dans un silence de mort. La vraie surprise vient plutôt de l’existence d’une version française que je n’ai jamais rencontrée sur PC : celle-ci a le mérite d’exister et de proposer des phrases construites dans un français à peu près correct, en dépit de plusieurs fautes d’orthographe, de quelques contresens et d’un certain nombre de trahisons. Pour un joueur ne maitrisant pas un mot d’anglais, autant dire qu’elle représentera le Saint Graal, mais les anglophones auront toutes les raisons de s’en tenir éloignés.

NOTE FINALE : 13/20

Mean Streets sur Amiga propose une version techniquement inférieure à celle parue sur PC, sans que l’on perde énormément au change, et a surtout l’avantage d’exister dans une version française certes très perfectible mais qui a au moins le mérite de permettre aux non-anglophones de s’intéresser à l’enquête. Pour tous les joueurs allergiques à la langue de Shakespeare, c’est une alternative très satisfaisante, mais les autres n’auront pas de réelle raison de la préférer à sa consœur sur PC.

Les avis de l’époque :

« Le système de fouille est une merveille de simplicité et il offre un grand confort d’emploi, sans jamais ralentir le rythme du jeu. Vous ferez parfois de mauvaises rencontres en arrivant sur les lieux que vous désirez inspecter, et il vous faudra alors dégainer pour faire face aux gangsters qui cherchent à vous abattre. Cette partie du jeu n’offre vraiment aucun intérêt, mais il faut quand même faire très attention si vous ne souhaitez pas mourir. (…) Mean Streets présente une intrigue fort bien construite, car les interrogatoires et les indices vous permettent de progresser très logiquement dans votre enquête. »


Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, Janvier 1991, 17/20

Version Atari ST

Développeur : The Code Monkeys Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Qui dit portage sur Amiga dit également portage sur Atari ST. Sans surprise, Mean Streets ne fait pas exception à la règle, et propose une version pratiquement calquée sur celle parue sur la machine de Commodore. Graphiquement, les nuances sont infimes, pour ne pas dire indécelables. Sur le plan sonore, on pouvait craindre le pire, mais le dispositif Realsound conçu par Access pour le PC fait également des merveilles sur l’Atari ST, et le thème musical fait pratiquement jeu égal avec ce que produisait la puce Paula. En revanche, je sais qu’une version française du jeu existe, mais bon courage pour mettre la main dessus.

NOTE FINALE : 13/20

Pas de surprise pour ce Mean Streets sur Atari ST, qui offre une expérience quasi-identique à celle disponible sur Amiga. En revanche, bon courage pour le trouver en français.

Les avis de l’époque :

« La réalisation est excellente, le programme utilisant tour à tour 3D vectorielle pour la simulation de vol et graphismes plus classiques mais très fouillés pour les lieux à visiter. De nombreuses animations graphiques et sonores digitalisées renforcent l’ambiance. (…) Une excellente enquête policière, riche et prenante. »

Jacques Harbonn, Tilt n°88, Mars 1991, 17/20

Dungeon Master

BONUS : Une interview (en anglais) de David Darrow, l’illustrateur de la boîte du jeu, expliquant comment l’image a été réalisée, à lire ici.

Développeur : FTL Games
Éditeur : FTL Games
Titres alternatifs : Crystal Dragon (titre de travail), ダンジョン・マスター (graphie japonaise)
Testé sur : Atari STAmigaApple IIgsFM TownsPC-98Super NintendoPC (DOS)
Version non testée : Sharp X68000

La saga Dungeon Master (jusqu’à 2000) :

  1. Dungeon Master (1987)
  2. Dungeon Master : Chaos Strikes Back – Expansion Set #1 (1989)
  3. Dungeon Master : Theron’s Quest (1992)
  4. Dungeon Master II : Skullkeep (1993)
  5. Dungeon Master Nexus (1998)

Version Atari ST

Date de sortie : 15 décembre 1987
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette 1.3 française testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Le groupe d’aventuriers marche à l’intérieur des couloirs obscurs. La torche crépite. La pierre est glissante. La lumière dansante dessine des visages grimaçants sur les reliefs des murs. On s’arrête pour dresser un feu de camp ; le clerc en profite pour tenir le plan du donjon à jour. On discute, à voix basse, on prépare les potions et les sortilèges pour l’expédition de demain. Le guerrier qui monte la garde fait signe à tout le monde de se taire. On tend l’oreille. Des grognements résonnent, près, tout près… Le groupe se relève dans l’urgence et se prépare au combat.

Au milieu des années 80, les jeux de rôles, fussent-ils sur papier ou sur ordinateur, étaient encore très largement une affaire d’imagination. La fenêtre de jeu à proprement parler occupait d’ailleurs généralement la portion congrue de l’écran ; le gros de l’interface était mobilisé à afficher des statistiques, des caractéristiques, des listes de commandes, des descriptions textuelles. Pour peu que l’on morde au concept – et que l’on parle anglais, le plus souvent – il fallait reconnaître que la magie opérait malgré tout, à condition de dépasser une prise en main laborieuse et une réalisation… austère. Si s’enfoncer au fond du donjon de Wizardry procurait son lot de sueurs froides, cela restait avant tout dû à l’effrayante difficulté du titre. Les combats comme l’exploration constituaient une affaire lente, méthodique, qu’on pouvait tout à fait mener en buvant un café et en fumant une cigarette, voire en lisant son journal. On planifiait, on réfléchissait, on pesait le pour et le contre ; bref, on jouait à un jeu de rôle comme on aurait joué aux échecs : avec la tête bien froide et beaucoup de temps devant soi.

Le truc, c’est qu’on se sentait impliqué par ce qui se passait en jeu comme on l’aurait été en lisant un livre : en laissant l’imagination faire tout le boulot. On visualisait le donjon, les créatures, les scènes de bataille, les trésors, mais on n’avait jamais le sentiment de le vivre comme si on y était, au point de regarder nerveusement derrière soi, de tendre l’oreille à l’affut du moindre bruit suspect, ou de bien s’assurer d’être dans un endroit sûr avant de continuer à dessiner le plan du donjon afin d’éviter de se faire attaquer par surprise. Ça n’était tout simplement pas comme ça que se jouait un jeu de rôle vidéoludique.

Jusqu’à Dungeon Master.

Imaginons ensemble un scénario classique. Au fin-fond de son donjon, le Seigneur Gris cherchait un moyen de créer un monde harmonieux en utilisant le pouvoir de la Gemme de Puissance ensevelie au cœur de la montagne. Encore fallait-il pour cela parvenir à extraire la fameuse gemme ; malheureusement, une erreur d’incantation provoqua rien de moins qu’une explosion suffisamment puissante pour changer le cours de la réalité. Le Seigneur Gris lui-même fut divisé en deux entités : une moitié positive, chassée du monde matériel et condamnée à errer dans les limbes, et une moitié négative, qui s’appropria le donjon avec l’objectif affiché de détruire ce qu’il restait du monde. Le Seigneur Gris avait également un apprenti, Theron, que l’explosion avait réduit au stade de simple esprit sans forme matérielle. Librasulus, la moitié positive, le chargea de pénétrer dans le donjon pour ramener à la vie quatre champions afin de les diriger dans leur quête. Ces quatre aventuriers devraient s’emparer du Bâton de Feu qui leur permettrait ensuite de mettre la main sur la Gemme de Puissance et de restaurer la réalité. Ils devraient bien évidemment, pour se faire, affronter les pièges et les monstres placés par la part négative du Seigneur gris, Lord Chaos…

Vous allez donc incarner Theron et, à travers lui, les quatre aventuriers que vous choisirez de ressusciter lors des premières minutes de jeu. Première originalité, en effet – et très bonne trouvaille en terme d’immersion – vous ne « créez » pas à proprement parler votre groupe ; vous visitez le premier niveau du donjon où sont conservés les âmes de vingt-quatre champions. Vous pourrez consulter leurs caractéristiques, leurs aptitudes dans quatre classes (guerrier/ninja/prêtre/voleur) ainsi que l’équipement avec lequel ils débuteront la partie. Vous pourrez également choisir de leur faire oublier leur connaissances, en échange d’un bonus à leurs caractéristiques – ce qui vous laissera, au passage, l’occasion de les renommer. On appréciera l’éclectisme des héros à disposition, tirant leur inspiration des poncifs de l’heroic fantasy, mais aussi de personnages littéraires (Halk rappelle furieusement Conan le barbare) ou historique (Leif est inspiré de l’explorateur Leif Erikson).

Les habitués du jeu de rôle auront déjà relevé le fait que chaque personnage puisse posséder plus d’une seule classe. Il est en effet tout à fait possible, dans Dungeon Master, de voir un guerrier lancer une boule de feu ou un magicien se vêtir d’une armure lourde. Leur niveau d’aptitude dans chacune des quatre classes (depuis l’ignorance totale jusqu’au rang de Grand Maître) décidera de leur efficacité dans ce rang de compétence. Ainsi, si un magicien néophyte devra parfois s’y prendre à plusieurs reprises pour lancer les sortilèges les plus simples, un mage plus expérimenté pourra se frotter à des sortilèges de plus en plus complexes sans rencontrer de difficulté. Il en va de même pour la précision d’un guerrier, ou pour la capacité d’un prêtre à créer des potions. Et comment faire progresser son niveau d’aptitude ? Eh bien selon un système simplissime qui sera repris jusque dans Lands of Lore ou dans la série des Elder Scrolls : en pratiquant, tout simplement.

Concrètement, oubliez les points d’expérience : si vous voulez progresser dans le métier de guerrier, tapez au corps-à-corps, si vous voulez progresser au rang de magicien, jetez des sorts, si vous voulez devenir un ninja accompli, utilisez des armes à distance, etc. C’est simple comme bonjour, et cela permet à un personnage débutant de s’entraîner à peu de frais, puisque rien ne vous empêche, par exemple, de lui faire jeter ses armes contre un mur jusqu’à ce que son niveau de ninja ait augmenté. Cela permet, en tout cas, à la progression de votre groupe de se faire de la façon la plus fluide et la plus naturelle qui soit, d’autant que chaque montée en grade s’accompagnera d’un bonus de statistiques.

Mais la véritable révolution du jeu, on s’en doute, ne se situe pas là. Même si le titre était déjà, par sa réalisation, extrêmement immersif pour l’époque (les graphismes du jeu, qui ont d’ailleurs très bien vieilli, passaient pour absolument superbes en 1987), l’idée de génie est en réalité une trouvaille toute simple : le fait que le jeu se déroule intégralement en temps réel.

Dorénavant, lorsque vous hésitez sur la route à suivre en arrivant à une intersection, il faudra vous attendre à vous faire agresser par une ou plusieurs créatures que vous n’aviez pas vues ou entendues venir pendant que vous réfléchissiez. Il faut bien visualiser ce qu’était un jeu de rôle en 1987 pour comprendre l’étendue de la claque que Dungeon Master représentait alors : plus besoin de trésors d’imagination pour se croire au milieu d’un donjon, on y était ! Les montres ont leur vie propre, chacun a son comportement en combat, et il faut désormais les affronter en se souciant de problématiques qui n’avaient jusqu’alors aucun sens, comme de se montrer mobile ou tirer parti de la configuration des lieux. Vous apprendrez ainsi très vite à faire usage des nombreuses portes placées sur votre route pour les faire se refermer sur les monstres qui vous agressent, et ainsi essayer de les écraser dans la manœuvre. Et plus question, désormais, de prendre un café en jouant : attendez-vous à faire des bonds de plusieurs mètres de haut en vous faisant surprendre par un adversaire imprévu alors que vous étiez sagement en train de dresser le plan du niveau : le dungeon crawler vient de naître, et il va vous apprendre à développer des réflexes de survie que vous n’aviez encore jamais imaginés.

Tout cela est bien beau, mais la surprise n’a plus franchement cours pour un joueur du XXIe siècle. Dungeon Master aura initié une longue lignée de clones, d’Eye of the Beholder à Lands of Lore en passant par Stonekeep, Black Crypt, Captive ou les récents épisodes de Legend of Grimrock. Tout le monde connait peu ou prou les ficelles, à présent : un groupe de quatre aventuriers disposés en deux lignes, les deux personnages à l’arrière ne peuvent pas directement se battre au corps à corps – ce qui fait qu’on réserve ces places aux jeteurs de sorts, etc. Des leviers, des clefs, des passages secrets, des puits, des téléporteurs, des messages énigmatiques gravés à-même les murs, des énigmes… Il y a déjà tout cela, dans Dungeon Master – et on ne peut d’ailleurs qu’être admiratif en voyant avec quelle exhaustivité tous les mécanismes du genre étaient déjà présents dans ce titre précurseur. Mais le jeu de FTL Games présente-t-il toujours un quelconque intérêt pour le joueur moderne qui le découvrirait aujourd’hui sans le filtre de la nostalgie ?

La réponse est oui, mille fois oui, et tient à deux critères : la qualité irréprochable du level design, et l’ingéniosité des mécanismes de jeu. La progression dans les quatorze étages du jeu est réellement passionnante, tant les niveaux sont parfaitement agencés, sachant demander à chaque fois de nouvelles approches – pour un titre de 1987, la mise en place progressive de tous les mécanismes de gameplay et leur introduction au joueur est plus qu’intelligente, elle est proprement extraordinaire. Les premiers niveaux sont un didacticiel déguisé, une piste guidée pour vous aider à assimiler progressivement toute la logique qui se révèlera indispensable au moment de prétendre aborder les profondeurs du donjon, qui sont proprement redoutables. Et non seulement ça marche mais, plus incroyable encore, ça marche pour ainsi dire exactement aussi bien qu’il y a trente-cinq ans ! Il est d’ailleurs à noter que le jeu bénéficie de plusieurs fins, chose encore très rare à l’époque : il vous est ainsi parfaitement possible de ramener le Bâton de Feu à la surface après avoir mis la main dessus sans vous préoccuper de la Gemme de Puissance ; je vous laisse découvrir ce qui se produira si vous optez pour cette solution. En fait, le titre de FTL Games est très difficile à prendre en défaut au niveau de ses possibilités et de son contenu, et on se prend très vite au jeu une fois qu’on a fait l’effort de lui consacrer une ou deux heures.

On appréciera également le système de magie à base de syllabes, un peu à la façon de ce qu’allait proposer Ultima V un an plus tard, mais en plus graphique. Surtout, le fait que le jeu gère à la fois la nourriture, la boisson, le repos et la lumière est extrêmement efficace pour placer l’atmosphère du donjon, et pour faire peser sur vos épaules une pression constante. Si la nourriture ne constituera pas un problème au début du jeu, les ressources vont aller en s’amenuisant, et vous serez parfois bien inspirés de revenir quelques niveaux en arrière, le temps de trouver des zones où réapparaissent des montres ayant l’énorme avantage d’être comestibles, pour éviter de voir votre groupe surpuissant mourir bêtement d’inanition. De la même manière, vous apprendrez à conserver vos gourdes comme des trésors, et à croiser la moindre fontaine vous permettant de les remplir avec un énorme soupir de soulagement, surtout dans les derniers niveaux. Et voir la lumière décliner alors que des montres errent dans les parages et que vos magiciens sont désespérément à cours de mana fait également toujours son petit effet…

Seul réel défaut de Dungeon Master : son interface, pour bien pensée qu’elle soit, aura aussi eu la tâche ingrate d’essuyer les plâtres et de se révéler un tantinet plus lourde, à l’emploi, que ce que proposeront ses successeurs. Par exemple, accéder à l’inventaire d’un de vos personnages pour y saisir une potion et la passer à un autre de vos héros afin qu’il la boive est une opération laborieuse qui prend du temps – suffisamment pour vous interdire d’y avoir recours au milieu d’un combat. Dans le même ordre d’idée, il faudra recomposer intégralement un sortilège à chaque fois que vous voudrez le lancer, ce qui vous obligera bien souvent à préparer votre sort à l’avance pour avoir une chance de l’utiliser en plein affrontement. Et mieux vaut avoir une bonne mémoire, tant consulter ses notes pour se souvenir d’un sortilège pendant qu’on se fait taper dessus est une mauvaise idée…

Niveau réalisation, comme cela a déjà été évoqué, Dungeon Master était absolument superbe pour 1987, et reste très agréable à l’œil pour un titre en 16 couleurs. Tous les monstres sont animés, se déplacent, attaquent, vous tirent dessus ou vous jettent des sorts, les grilles grincent, les torches brûlent… En revanche, il n’existe qu’un seul type de décor – attendez-vous à voir les mêmes murs gris du début à la fin du jeu.

On touche d’ailleurs là autant à une contrainte technique qu’à une volonté de game design : Doug Bell, l’un des créateurs du jeu, tenait à ce que le logiciel tienne sur une seule disquette afin que le joueur n’ait jamais à briser l’immersion en ayant à changer de disque au beau milieu de l’action. Le programme allait même jusqu’à lancer de faux accès-disques afin de vous faire croire qu’il était en train de charger un monstre ! On notera aussi qu’il n’y a pas le moindre thème musical, mais le silence est de toute façon très efficace pour mettre en valeur les quelques bruitages du jeu – on regrettera en revanche qu’on ne puisse pas entendre les monstres bouger ou que le son soit en mono ; des détails qui seront corrigés au gré des portages.

Difficile d’en prendre plein la vue et les oreilles, mais on a toujours autant le sentiment d’être perdu au fond d’un donjon où le danger peut venir de partout, ce qui est très exactement l’objectif du jeu – rempli, à tous les niveaux, même plus de trente ans après. Comptez facilement une trentaine d’heures pour venir à bout du titre.

Un mot, enfin, sur la version française, qui a le mérite d’exister. Si celle-ci est riche en coquilles à tous les niveaux, du manuel au jeu proprement dit (vos personnages ne sont pas empoisonnés, ils sont « vénéneux »…), elle ne pénalise heureusement pas l’expérience de jeu, et vous n’aurez pas à vous arracher les cheveux face à une énigme pour cause d’énoncé traduit n’importe comment. Bref, rien d’inoubliable, mais une excellente occasion pour les non-anglophones de ne pas se sentir lésés.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

Récompenses :

  • Best Role Playing Game (Meilleur jeu de rôle) – Powerplay, 1988
  • Tilt d’or 1988 – Meilleure animation sonore (version Atari ST)
  • Tilt d’or 1988 – Meilleur jeu de rôle (version Atari ST)
  • #2 Top Atari ST Classic Games – ST Format, 1991
  • #4 in « 50 finest Atari ST games of all times » (50 meilleurs jeux Atari ST de tous les temps) – ST Format, 1993

NOTE FINALE : 18/20 Véritable miracle vidéoludique, Dungeon Master aura fait, à sa sortie, l'effet d'un grand coup de chiffon sur la poussière qui menaçait déjà de recouvrir l'univers du jeu de rôle informatique. Proposant une expérience extraordinairement immersive, où le joueur avait pour la première fois la sensation d'évoluer en temps réel au milieu d'un donjon, le titre de FTL Games aura contribué à démocratiser et à populariser un genre que sa complexité réservait alors à un public de niche aussi patient qu'imaginatif. L'ingéniosité de la conception des niveaux, ainsi que des mécanismes de jeu, fait que l'expérience est encore très agréable plus de trente ans après sa sortie. Rien d'étonnant, donc, à ce que Dungeon Master reste aujourd'hui un des jeux de rôles les plus célèbres jamais créés. Objectivement, il le mérite. CE QUI A MAL VIEILLI : – Interface parfois un peu poussive – Réalisation sonore encore sous-exploitée – Difficulté à l'ancienne

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dungeon Master sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« On peut résumer Dungeon Master en un seul mot : FABULEUX ! Cela valait vraiment la peine d’attendre sa sortie pendant deux ans. Dungeon Master est au jeu de rôle ce que « Star Wars » est au cinéma. Il supplante, et de loin, tous les jeux de rôle du même style. Son système même est extraordinaire. Un écran assez large remplace la petite fenêtre en 3D habituellement utilisé dans les Sorcelleries (sic) et Bard’s Tale. L’impact visuel est stupéfiant, on a l’impression d’ÊTRE dans le donjon ! »

Dany Boolauck, Tilt n°52, Mars 1988, 18/20


Version Amiga

Développeur : FTL Games
Éditeur : FTL Games
Date de sortie : Octobre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette 3.60 testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Dungeon Master aura été l’un des plus fantastiques moments de gloire pour les possesseurs d’Atari ST, LE jeu capable de rendre jaloux tous les joueurs coincés sur leur Apple II, leur Commodore 64 ou leur PC. Bien évidemment, après son gigantesque succès critique et, rapidement, commercial, le titre de FTL Games ne pouvait pas rester cantonné sur la machine d’Atari. Justement, l’ordinateur de Commodore venait d’apparaître dans les magasins spécialisés, et avait largement les capacités techniques pour pouvoir prétendre faire tourner Dungeon Master… ce qu’il fait d’ailleurs très bien, dans une version pratiquement identique à celle parue sur Atari ST – à condition, toutefois, de posséder un modèle à 1Mb de RAM. Le jeu était d’ailleurs parfois vendu en bundle avec l’extension de mémoire AmiRAM. Le jeu ne profite donc pas de la palette étendue de l’Amiga : la réalisation est restée en 16 couleurs, comme elle le restera d’une machine à l’autre au mépris des années. Niveau sonore, le jeu est cette fois en stéréo, et on entend désormais les monstres se déplacer – un gros plus pour l’ambiance. À noter également que le jeu aura été mis à jour au gré de ses sorties, jusqu’à aboutir à la version 3.6, laquelle corrige quelques petits détails énervants de la version ST. Ainsi, vous pouvez désormais boire directement aux fontaines sans avoir à remplir au préalable une gourde, et il est possible de cliquer sur les parois pour déceler les murs illusoires plutôt que de rentrer dedans (ce qui faisait du dégât). Bref, du peaufinage bienvenu.

NOTE FINALE : 18,5/20

À première vue totalement identique à la version ST, Dungeon Master sur Amiga profite en fait de toute une série de petites améliorations, particulièrement dans sa version 3.6, qui rendent l’expérience globalement plus agréable et plus immersive. Le fait d’entendre les monstres se déplacer autour de vous en stéréo rajoute à l’ambiance générale, et le titre est toujours aussi prenant. Une très bonne pioche, donc.

Version Apple IIgs

Développeur : FTL Games
Éditeur : FTL Games
Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette 2.1
Configuration minimale : RAM : 1Mo

La nouvelle machine d’Apple aura disposé de sa propre version de Dungeon Master, avant d’être laissée à l’abandon pour ne pas faire d’ombre au Macintosh. Développée en parallèle de la version Atari ST, elle aura en fait disposé d’un clone exact de la version 3.6 sur Amiga, au pixel près. Seule petite nuance : l’existence d’un « Kid Dungeon », sorte de donjon d’initiation pour débutants, composé de trois niveaux, et accessible au lancement du jeu.

NOTE FINALE : 18,5/20

En 1989, Dungeon Master était toujours un grand jeu, et l’Apple II GS aura pu bénéficier d’une version identique à celle parue sur Amiga – et même enrichie d’un petit donjon simplifié supplémentaire. Le jeu est toujours aussi bon, mais dommage qu’il ne tire pas réellement parti des capacités de la machine d’Apple.

Version FM Towns

Développeur : FTL Games
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Novembre 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dungeon Master est une saga qui aura connu une relation privilégiée avec le Japon, au point que Dungeon Master II sorte en priorité sur le marché japonais. Signe de cette relation (qu’on pourrait d’ailleurs plus largement étendre au jeu de rôle occidental des années 80), le portage du jeu sur les meilleurs systèmes domestiques de l’époque, à commencer par le FM Towns. Assuré par FTL eux-mêmes, ce portage est tout simplement une conversion fidèle à 99% de la version originale, à trois nuances près : quelques minuscules variations dans la taille de l’interface (qui ne changent rien à celle de la fenêtre de jeu) dans la version en japonais, la présence d’une vingtaine de thèmes musicaux au long du jeu (ainsi qu’à l’écran de lancement, où le thème sera repris plus tard sur la version PC), qui ont l’avantage d’offrir une ambiance un peu plus variée que le simple silence de mort, mais qui ne sont pas suffisamment marquants pour représenter une véritable plus-value à mes yeux (et surtout à mes oreilles). Disons simplement qu’on était en droit d’attendre quelque chose de plus pesant, de plus intrigant et de moins… je ne sais pas, neutre ? Enfin, pour ceux qui craignaient de devoir décrypter le jeu en japonais, vous serez heureux d’apprendre que la version anglaise est disponible sur le CD-ROM, via un exécutable dédié. Bref, la même chose, mais avec de la musique, pourquoi se plaindre ?

NOTE FINALE : 18,5/20

Dungeon Master sur FM Towns n’est vraiment pas grand chose de plus que le titre original traduit en japonais avec quelques thèmes musicaux, d’ailleurs assez inégaux, en bonus. Le titre étant également jouable en anglais, voici un très bon moyen de découvrir le titre de FTL Games en musique.

Version PC-98

Développeur : FTL Games
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : 9 février 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Système : PC9801 VM/VX

Après le FM Towns, le PC-98 et le Sharp X68000 auront eu le droit à leur adaptation de Dungeon Master au cours de l’année 1990. Dans le cas qui nous intéresse ici, inutile d’espérer réentendre les thèmes musicaux présents sur CD-ROM : on en revient à l’exact équivalent de ce qu’on pouvait entendre dans la version originale. Graphiquement, et de façon assez curieuse (le PC-98 affichant 16 couleurs, exactement comme l’Atari ST), les graphismes sont un peu différents dans cette version. Traduit en clair : les monstres sont affichés dans une palette de couleurs plus réduite que sur les autres machines, et il n’y a plus dorénavant que trois niveaux d’éclairage. Si, dans l’absolu, cela ne dégrade pas dramatiquement l’expérience de jeu, le fait qu’à peu près toutes les autres versions fassent mieux sur le plan graphique, additionné au fait que ce portage soit exclusivement disponible en japonais, conduira le joueur lambda à ne pas se donner le mal de dénicher cette version.

NOTE FINALE : 17,5/20

Petite déception pour cette version PC-98 de Dungeon Master, qui affiche des lacunes graphiques, certes assez discrètes, qui n’existent pas dans les autres portages. Sachant que cette adaptation n’offre de toute façon rien qui sorte de l’ordinaire, et qu’elle n’existe qu’en japonais, on ne la recommandera qu’aux collectionneurs.

Version Super Nintendo

Développeur : FTL Games
Éditeur : JVC Musical Industries Europe, Ltd.
Date de sortie : 20 décembre 1991 (Japon) – Août 1992 (Europe) – Juin 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Dungeon Master se sera également autorisé une escapade sur console de salon, en 1991, sur Super Nintendo. La machine du plombier moustachu était alors en début de vie, et cela se sent en contemplant la réalisation du titre, plutôt décevante. La résolution de la 16 bits de Nintendo est en effet toujours aussi limitée, ce qui fait beaucoup de mal à la finesse des graphismes originaux, tandis que les couleurs, elles, ne semblent pas bénéficier de la palette étendue de la console. Traduit en clair, c’est moins beau que sur Atari ST, ce qui n’est pas complètement normal quand on sait de quoi la Super Nintendo est capable.

Du côté des ajouts, cette version a au moins le mérite de bénéficier d’une introduction qui aura la générosité de vous présenter le scénario sans avoir à lire tout le manuel. Bon, cela reste un simple pavé textuel avec une image dans le fond, mais on appréciera l’effort. On notera également que cette version est la seule à bénéficier d’un thème musical, hélas vite répétitif et retranscrivant assez mal l’atmosphère générale, pendant toute la partie. Les monstres, eux, font toujours du bruit et le jeu a le bon goût d’être en stéréo. La vraie zone d’ombre, cependant, était constituée par la maniabilité au pad – pas encore de souris Super Nintendo, en 1991. Le titre fait le maximum à ce niveau, en vous laissant déplacer normalement le curseur, mais surtout en activant un mode déplacement d’une simple pression sur Select qui vous permettra alors de bouger en utilisant les flèches et les deux boutons de tranche. Cela demande un petit temps d’adaptation, et il reste assez délicat de parvenir à se battre en tournant autour des monstres, mais on pouvait difficilement faire mieux. On ne pourra que regretter que la version française n’ait jamais fait le trajet jusqu’à ce portage, en revanche.

NOTE FINALE : 15/20

Le portage de Dungeon Master sur Super Nintendo n’a pas été bâclé, c’est indéniable. La maniabilité au pad ne rivalisera jamais avec celle à la souris, mais elle a été très intelligemment pensée. La plus grosse déception se trouve plutôt au niveau de la réalisation, tout juste passable, qui ne rivalise vraiment pas avec ce qu’offraient les versions sur ordinateurs. Une curiosité, mais définitivement pas la version à privilégier pour découvrir le jeu.

Version PC (DOS)

Développeur : FTL Games
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Août 1992
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette 3.4
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Disney Sound Source, FTL Sound Adapter, haut-parleur interne, Sound Blaster

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Cinq ans… Il aura fallu pas moins de cinq ans pour voir enfin Dungeon Master débarquer sur PC. L’attente avait été si longue, si insupportable, que la concurrence en avait profité pour s’infiltrer dans la brèche et pour proposer un concurrent très sérieux, à savoir la série des Eye of the Beholder qui non seulement avait doté le PC de « son » Dungeon Master, mais avait même fini par supplanter le maître en proposant une réalisation et un contenu à la hauteur de la nouvelle génération de machines en 256 couleurs. On pouvait donc s’attendre à ce que FTL Games cherche à se faire pardonner pour son retard, en proposant une version largement optimisée de son titre légendaire.

Perdu.

Le FTL Sound Adapter, uniquement commercialisé avec la version américaine du jeu (source : http://dmweb.free.fr)

Incroyable mais vrai : FTL Games aura tout simplement choisi de fermer les yeux sur cinq ans de production vidéoludique pour proposer une version en 16 couleurs globalement identique à celle parue sur Atari ST en 1987. En 1992 ! Certes, le titre profite de toutes les améliorations de la version 3.6 (encore heureux !), et récupère même pour l’occasion le thème musical de l’écran-titre (et uniquement celui-là) entendu sur FM Towns. C’est également la seule version à bénéficier d’une cinématique de fin, d’ailleurs pas très impressionnante, même à l’époque. Par contre, le titre est repassé en mono (!) et ne supporte pas la Roland MT-32… À noter d’ailleurs que le titre était vendu aux États-Unis avec un périphérique à brancher sur le port joystick et qui était censé améliorer la qualité sonore du jeu (le thème musical de l’écran-titre est ainsi plus long avec lui). Reste que les quelques ajouts purement anecdotiques n’auront pas empêché ce portage de subir un four à sa sortie, dépassé par une concurrence en pleine bourre : Lands of Lore allait sortir quelques mois plus tard. Sérieusement, dans quelle grotte les développeurs de FTL avaient-ils bien pu rester cachés pendant cinq ans ?

NOTE FINALE : 18,5/20

Si Dungeon Master sur PC est objectivement la meilleure version occidentale du titre – quoique d’assez peu – elle aura surtout souffert d’une date de sortie hallucinante, qui l’aura vue débarquer cinq ans après la version ST sur des machines qui avaient déjà eu l’occasion de faire tourner des élèves désormais bien supérieurs au maître. Le jeu de rôle informatique avait même eu le temps de vivre sa deuxième révolution avec la sortie d’Ultima Underworld. Prise en étau entre la saga des Eye of the Beholder et la sortie de Lands of Lore, cette version PC aura rapidement sombré dans l’anonymat, mais reste la plus agréable à jouer pour ceux qui souhaiteraient découvrir le titre aujourd’hui.

Les avis de l’époque :

« Pourquoi diable ont-ils attendu si longtemps pour produire cette version PC ? Ce jeu, qui aurait été un très grand jeu il y a seulement quelques mois, est maintenant un peu dépassé. Il pourra cependant intéresser les nostalgiques et les grands débutants. Un monument de l’histoire du jeu vidéo qui tente un come back… »

Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°106, Octobre 1992, 16/20

The Secret of Monkey Island

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STFM TownsMacintoshSEGA CD
Disponible sur : Browser, iPad, iPhone, Macintosh, PlayStation 3, Windows, Xbox 360 (The Secret of Monkey Island : Édition Spéciale)
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

La saga Monkey Island (jusqu’à 2000) :

  1. The Secret of Monkey Island (1990)
  2. Monkey Island 2 : LeChuck’s Revenge (1991)
  3. The Curse of Monkey Island (1997)
  4. Escape from Monkey Island (2000)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Octobre 1990 (version EGA) – Décembre 1990 (version VGA) – Août 1993 (version CD-ROM)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Versions testées : Versions EGA, VGA et CD-ROM émulées sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 (version disquette), Intel 80286 (version CD-ROM) – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA (version VGA), Tandy/PCjr, VGA (version VGA)
Cartes sonores supportées : AdLib, Game Blaster, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I (via un patch pour la version EGA), Sound Blaster, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu (VGA) :

Au plus profond des Caraïbes…


Voilà déjà une phrase qui plante immédiatement le décor. Le XVIIe siècle, l’âge d’or de la piraterie, le rhum, le grog, les corsaires, les ports improbables où la vie ne valait pas cher, les échanges de coups de canons entre les galions et les corvettes, et des îles plus ou moins connues éparpillées par dizaines entre la mer des Sargasses et Maracaibo. Avouez que ça fait rêver, non ?

Autres temps, autres mœurs : nous sommes en 1990, à un des tournants de l’âge d’or du jeu vidéo, et Lucasfilm Games est en pleine forme. Après avoir connu un joli succès d’estime avec des titres comme Maniac Mansion ou Zak McKracken, le studio américain commençait à se faire un nom plus que respectable au sein de l’univers vidéoludique. Pourtant, le changement de décennie allait s’annoncer comme une année charnière, avec la parution de deux titres qui marqueront les mémoires pour des raisons différentes : l’excellent Loom et le légendaire The Secret of Monkey Island.

Prenez un jeune freluquet au nom improbable de Guybrush Threepwood. Imaginez-le en train de débarquer, une nuit, sur l’île de Mêlée™, en clamant haut et fort son unique objectif : devenir un pirate. Bien évidemment, rejoindre les Frères de la côte et consort ne se décrète pas : il faudra d’abord commencer par faire ses preuves face au conseil des pirates, en apprenant à maîtriser des disciplines constituant le B-A-BA de la piraterie : l’escrime, le vol et la chasse au trésor. Il faudra, surtout, composer avec la population… disons, « pittoresque » de l’île, apprendre à décrypter la logique très particulières des cartes aux trésors, composer avec le vaudou … et peut-être même rencontrer l’amour et affronter le fantôme du terrible pirate LeChuck, quitte, pour cela, à découvrir le secret de la légendaire Île aux Singes…

The Secret of Monkey Island est un jeu d’aventure conçu par Ron Gilbert, avec le secours de Tim Schafer et Dave Grossman dont on retrouvera, par la suite, les noms au générique de titres comme Day of the tentacle ou Full Throttle. Il s’agit, comme on peut s’en douter, d’un point-and-click vous plaçant aux commandes de Guybrush Threepwood, bien décidé à réaliser son rêve en embarquant dans une aventure qui le mènera bien au-delà de l’Île de Mêlée, via un scénario ouvertement inspiré du roman Sur des mers plus ignorées… de Tim Powers, publié en anglais trois ans plus tôt. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’à l’origine, le titre avait été considéré comme un possible jeu de rôle allant largement puiser dans Sid Meier’s Pirates! (Ron Gilbert cite même Ultima parmi ses inspirations) avant de revenir rapidement à une forme plus classique.

L’interface du titre repose, comme c’était déjà le cas pour tous les titres du studio depuis Maniac Mansion, sur une interface intégralement contrôlée à la souris et basée sur une série de verbes d’action servant à dicter vos actions sur votre inventaire ou sur le reste de l’environnement. Autant dire que la prise en main du titre nécessitera difficilement plus d’une poignée de secondes, d’autant qu’il bénéficie de ce qui deviendra la fameuse « philosophie Lucasfilm » qui fait que non seulement le jeu est non-bloquant (comprenez par là qu’il ne vous sera jamais nécessaire de recharger une partie pour avoir pris une mauvaise décision) mais également que votre personnage ne peut pas mourir (bon, en fait, il peut, lors d’une occasion particulière dans le jeu, mais il faut vraiment le vouloir).

Une philosophie d’ailleurs totalement imputable à Ron Gilbert qui, après avoir travaillé sur Indiana Jones and the Last Crusade, avait cherché à matérialiser ses réflexions sur le game design des jeux d’aventure via un manifeste intitulé, dans son style inimitable, Why Adventure Games Suck (soit en français : « Pourquoi les jeux d’aventure craignent ») et publié en décembre 1989 dans The Journal of Computer Game Design –  un document fondateur dans l’histoire du point-and-click, et peut-être l’un des plus importants de l’histoire du game design, rien que ça. Ce moment historique où un joueur n’aurait plus besoin de recommencer une partie depuis le début pour avoir oublié de ramasser un objet apparemment sans importance dans un jeu d’aventure, c’est The Secret of Monkey Island qui en aura été une des premières manifestations – avec Loom, paru quelques mois plus tôt.

Tant qu’à faire, la valeur d’un jeu d’aventure, on le sait, se mesure en partie à la qualité de sa réalisation, mais surtout à celles de son écriture et de la conception de ses énigmes. Sans surprise, Ron Gilbert et sa fine équipe seront parvenus à réaliser une alchimie si parfaite de ces trois critères que le titre en est venu à inscrire son nom bien au-delà du monde du jeu vidéo.

Le premier point devant absolument être mentionné est l’humour du titre, et sa capacité à faire mouche avec une belle régularité. La légende veut que Dave Grossman et Tim Schafer aient des humours très différents, au point de se voir confier des sections différentes du jeu, et que la rencontre de l’ironie pince-sans-rire de l’un avec les gags beaucoup plus visuels de l’autre aurait au final eu un effet détonnant. Si l’humour du titre est très différent de l’approche « Tex Avery-esque » de Day of the Tentacle, par exemple, le constant décalage entre son univers et les personnages, parfois farouchement anachroniques, qui y évoluent, est très efficace. Le jeu comporte à ce niveau quantité de morceaux de bravoures gravés au fer rouge dans la mémoire des joueurs, comme ces fameux combats au sabre se jouant… à la manière de concours d’insultes, dont les répliques savoureuses ont été écrites par l’écrivain Orson Scott Card (dont je vous recommande au passage l’excellent cycle d’Ender) ou encore cette scène absolument fabuleuse où toute l’action se déroule derrière un mur, hors de la vue du joueur, et où le déroulement des événements est en fait narré par la ligne de commande au milieu de l’interface ! Autant dire qu’il n’était pas encore fréquent, à l’époque, de rire jusqu’à en avoir les larmes aux yeux devant un jeu vidéo, et que Monkey Island est venu bousculer cela avec un aplomb qui force le respect.

Les énigmes, elles aussi, savent se montrer aussi absurdes que retorses – sans jamais se montrer illogiques pour autant. Quand vous évoluez dans un univers où il est parfaitement évident de trouver un poulet en caoutchouc avec une poulie au milieu, et où le grog est si corrosif qu’il vous permet de faire fondre des serrures, autant vous habituer à changer votre façon de penser – la qualité globale des énigmes du jeu mérite dans tous les cas d’être saluée pour sa faculté à mettre exactement dans le mille d’un bout à l’autre.

Quitte, d’ailleurs, à vous pousser à vous arracher les cheveux un bon moment, car le titre est loin d’être facile, mais il n’est absolument jamais difficile pour de mauvaises raisons – une preuve définitive, au passage, qu’un joueur n’avait pas besoin d’aboutir à un game over toutes les deux minutes pour rencontrer des difficultés à terminer un jeu d’aventure, et une parfaite démonstration de la leçon de game design que Ron Gilbert venait de livrer au reste de l’industrie. Non seulement on ne peut pas « perdre » au sens d’être obligé de recommencer la partie ou de repartir d’une sauvegarde, mais en plus la difficulté ne repose jamais sur un objet de deux pixels de haut dissimulé à un endroit absurde. Apprendre à tenter les actions les plus improbables sur touts les objets passant à portée de votre main pourra en revanche rapidement devenir une seconde nature.

La bonne nouvelle est que l’aventure est d’autant plus agréable à parcourir que la réalisation du titre figure clairement dans le haut du panier de l’année 1990. Dans sa version originale en EGA, le titre tire déjà merveilleusement parti des 16 couleurs de sa palette pour afficher des décors grandioses et des animations soignées. Mais le programme aura également connu, quelques semaines après sa sortie, une version VGA en 256 couleurs qui relève encore le niveau d’un cran, particulièrement lors des portraits en plein écran, absolument superbes.

Dans les deux versions, le titre est très agréable à l’œil, et démontre déjà le savoir-faire indéniable des graphistes de chez Lucasfilm à cette époque. Niveau musical, le titre tire avantage des cartes AdLib et Sound Blaster, en proposant notamment ce fameux thème reggae qui sera réutilisé tout au long de la saga. Comme pour Loom, un patch ajoutant la gestion de la Roland MT-32 aura également été publié quelques semaines après la sortie du jeu, même s’il présente le défaut difficilement pardonnable de ne fonctionner qu’avec la version originale en anglais – un vrai faux pas (cela ne concerne apparemment que la version EGA). On regrettera juste que la musique ne se fasse pas toujours entendre, laissant trop souvent la place à de grands silences un peu oppressants.

L’un des coups de génie de la saga, cependant, et l’un de ceux qui lui vaut d’être encore aujourd’hui le centre de débats passionnés entre les fans, est l’existence d’un second niveau de lecture du jeu.

En effet, le deuxième épisode de la saga (et le dernier à avoir été écrit par Ron Gilbert avant Return to Monkey Island en 2022) se sera terminé par une révélation majeure que je ne vais évidemment pas vous spoiler, mais qui aura jeté un regard nouveau sur l’aventure vécue au cours des deux premiers épisodes – et notamment sur certains écrans ayant fait cogiter les joueurs pendant des nombreuses heures. Cette idée absolument géniale permet, encore aujourd’hui, de redécouvrir le jeu après avoir fini sa suite et de chercher entre les lignes des indices pour comprendre le véritable secret de l’Île aux Singes – même près de trente ans après. Le genre de petits détails qui transforment un très bon jeu en un titre de légende.

Quelques mots, en conclusion, sur la version française du titre. Celle-ci, malgré de réels efforts, est hélas passablement décevante. En-dehors d’un nombre dérangeant de coquilles, fautes d’accord (les traducteurs des jeux Lucas semblent avoir des problèmes récurrents pour distinguer un futur d’un conditionnel) et autres mots traduits n’importe comment (non, « exhilarating » ne veut pas dire « exhilarant » !!!), la plus grosse perte se situe au niveau de la traduction de l’humour en lui-même. Certes, cet humour passablement absurde et très anglo-saxon n’est pas forcément facile à rendre en français, mais en-dehors de quantités de gags tombant à plat, certains ont purement et simplement été ignorés ou mal compris – un travers qui restera hélas vrai pendant l’essentiel de la série. Pas de quoi fuir cette version pour les joueurs en froid avec la langue de Shakespeare, mais je ne peux que recommander aux anglophones de s’en tenir à la version originale, sous peine de voir le jeu amputé d’une partie de son humour.

La version CD-ROM :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Qui dit « début des années 90 » dit quasi-obligatoirement « CD-ROM » dans la même phrase, surtout dans le domaine du jeu d’aventure qui se prêtait particulièrement à la transposition sur galette numérique. Après le fiasco qu’avait été la version CD de Loom, on était en droit de se montrer méfiant face à ce portage de Monkey Island, qui ne reproduit heureusement pas les mêmes erreurs. Pas de coupes, cette fois : le contenu du CD est strictement équivalent à ce que proposait la version sur disquettes, la protection de copie en moins, naturellement.

Côté graphique, le titre reprend sans surprise la réalisation de la version VGA, en prenant malgré tout le soin de dépoussiérer l’interface : les verbes « allumer » et « éteindre » ont disparu (et pour cause : ils ne servaient à rien), et surtout, l’inventaire bénéficie dorénavant d’une représentation intégralement graphique qui préfigure Day of the Tentacle, et s’avère moins tristounette que la simple liste textuelle des autres versions. Autant dire qu’on tient là la plus belle et la plus accessible de toutes les versions, au moins jusqu’à la sortie de l’Édition Spéciale de 2009.

Côté son, évidemment, on attend cette version CD au tournant, et on sera heureux de profiter d’une musique qui enterre sans discussion possible les thèmes entendus sur Amiga ou avec une Roland MT-32. Je vous laisse profiter du thème, audible dans la vidéo ci-dessus, pour vous faire un avis. Le jeu bénéficie également de nouveaux bruitages de toute beauté, qui vous permettront enfin d’entendre la mer et le cri des mouettes sur la jetée près du SCUMM bar. En revanche, déception du côté des voix, puisqu’il n’y a tout simplement pas de doublages dans cette version, pas plus qu’il n’y en aura dans la suite. Il faudra donc attendre le troisième épisode, en 1999, pour connaître enfin la voix de Guybrush Threepwood, ce qui est un peu dommage.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :

NOTE FINALE : 18/20 (versions EGA/VGA) - 19/20 (version CD-ROM) Rencontre improbable entre un humour absurde à la Monty Python, un univers délicieusement décalé où les fantômes pirates côtoient les cannibales végétariens, et un souffle épique portés par les ports des Caraïbes, The Secret of Monkey Island est peut-être l'un des représentants les plus mémorables et les plus accomplis d'un genre qu'il a largement contribué à populariser. Louvoyant entre les morceaux de bravoure et les scènes cultes, ballotés entre les énigmes retorses et les bijoux d'écriture, le navire mené par Ron Gilbert et son excellent équipage aura été mené à bon port avec une maestria rare, qui lui vaut d'être resté amarré à la légende près de trente ans après sa sortie. Une aventure à vivre au moins une fois, avec le reste de la saga dans la foulée. CE QUI A MAL VIEILLI : – Certaines énigmes particulièrement machiavéliques – Version française décevante – Pas de gestion de la Roland MT-32 sur les versions localisées (version EGA) – Connaîtra-t-on un jour le véritable secret de l'Île aux Singes ?

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Secret of Monkey Island sur un écran cathodique (version EGA) :

Les avis de l’époque :

« The Secret of Monkey Island est un de ces bons jeux d’aventure qui paraissent régulièrement. Il n’a rien d’exceptionnel mais il procure de longues heures de passionnantes recherches. Je le recommande donc uniquement aux mordus des aventures en tous genres. Aux autres, je dirais qu’ils ne ratent rien d’impérissable. »

Dany Boolauck, Tilt n°82, Octobre 1990, 15/20

Version Amiga

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS
Date de sortie : Janvier 1991 (Europe) – Juin 1991 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On aurait pu penser, en voyant la version Amiga de The Secret of Monkey Island paraître quelques semaines à peine après la version PC, que ce portage serait un simple clone des versions PC EGA et Atari ST, comme cela avait été le cas pour Loom. Mais grosse surprise en lançant le jeu : le titre est bien décidé à profiter de toute la palette de couleurs de la machine de Commodore, et le travail sur les portraits, notamment (ou le fait que le coucher de soleil du début du jeu ait là aussi disparu), tend à indiquer que cette version aura été développée en même temps que la version VGA.

Concrètement, le jeu est graphiquement plus détaillé que dans les version EGA et Atari ST, même si on perd également une partie des choix très marqués en terme de palette chromatique – et que le jeu est sensiblement plus lent. On sera donc tenté de placer ce portage au-dessus de la version originale, mais en-dessous de la version VGA. Côté musique, en revanche, l’Amiga met tout le monde d’accord : à part la Roland MT-32, aucune carte son ne rivalise avec ce qu’offre la puce Paula. Le fameux thème reggae du jeu est vraiment splendide, à tel point qu’on a bien du mal à se décider à le couper au lancement du jeu (lancez la vidéo, si vous ne me croyez pas !), et cela reste vrai pour les autres morceaux de musique pendant le reste de la partie. C’est bien simple : il faudra attendre les versions CD-ROM du jeu pour supplanter l’itération Amiga. En terme de contenu et de déroulement du jeu, en revanche, le titre est très exactement identique aux autres versions.

NOTE FINALE : 18/20

Tirant, pour une fois, intégralement parti des capacités de l’Amiga, The Secret of Monkey Island dispose, sur la machine de Commodore, d’une excellente version qui n’est supplantée graphiquement que par la version VGA et musicalement que par les itérations CD.

Version Atari ST

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS (France)
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double-face (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1Mo
Écran monochrome supporté
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Peu de grosses surprises pour cette version Atari ST de The Secret of Monkey Island. Comme on pouvait s’y attendre, le jeu est graphiquement un calque de la version EGA, et l’aventure n’a pas changé d’un iota en passant sur la machine d’Atari. En revanche, la grosse déception se situe du côté sonore : non seulement ce portage rivalise à peine avec ce qu’était capable de produire le haut-parleur interne du PC, mais en plus, plusieurs des thèmes musicaux du titre ont purement et simplement disparu ! C’est d’autant plus dommage qu’il était tout à fait possible de connecter une Roland MT-32 à un Atari ST mais, contrairement à la version PC, aucun patch n’a a ma connaissance vu le jour pour en tirer parti. Cela ne pénalise heureusement que légèrement le jeu, mais suffit à faire de cette version la moins bonne de toutes celles parue sur le marché.

NOTE FINALE : 17,5/20

Ça a le gout de la version EGA, ça a la texture de la version EGA, ça pourrait être une simple copie conforme de la version EGA ; malheureusement, les limitations sonores de l’Atari ST additionnées à des coupes injustifiées dans les thèmes musicaux du jeu font de cette version de The Secret of Monkey Island le mouton noir de tous les portages du titre. Un joli mouton noir, mais quand même.

Version FM Towns

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : Septembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme Loom, paru la même année, The Secret of Monkey Island aura connu les joies d’un portage sur FM Towns. Mais contrairement à son collègue, qui s’était érigé en sorte de « version absolue » du jeu, la faute aux (très) nombreux errements de la version CD-ROM, les choses seront ici beaucoup plus simples : cette version est la copie conforme de celle parue sur PC (comprendre : la version CD-ROM, naturellement)… à quelques curieux détails près – le pirate qui tournoyait sur le lustre du SCUMM Bar a disparu, par exemple. Graphismes en 256 couleurs, bande sonore numérique, il ne manque une nouvelle fois que les doublages, mais pour le reste on ne voit pas trop ce qu’on pourrait demander de plus – on récupère même l’inventaire dessiné, à la Monkey Island 2. Pour ne rien gâcher, il ne sera même pas nécessaire ici de savoir lire le japonais, puisque la version anglaise est disponible au lancement. Évidemment, dénicher cette version a d’autant moins d’intérêt que celle parue sur PC, elle, n’a rien de rare, mais si jamais vous avez envie de découvrir le jeu sur la machine de Fujitsu, eh bien rien ne devrait vous encourager à changer d’idée.

NOTE FINALE : 19/20

Pas de version ultime ici, ou plutôt à peu près la même que celle qui aura été distribuée à la même époque sur PC : The Secret of Monkey Island sur FM Towns n’est rien d’autre que la transcription (presque) fidèle de la version CD-ROM du jeu, et en anglais s’il vous plait. Si, pour une raison quelconque, vous êtres bien décidé à ne pas la découvrir directement sur PC, voilà au moins une alternative qui ne vous privera pas de grand chose de plus que de la version française.

Version Macintosh

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68020 – OS : System 6.0.7 – RAM : 2Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1992, le Macintosh avait beau être toujours considéré comme un ordinateur de bureau (cela a-t-il vraiment changé ?), il commençait à pouvoir afficher sans difficulté exactement ce que proposait un PC de pointe. Cela se ressent d’ailleurs dans ce portage de The Secret of Monkey Island : graphiquement, c’est une pure transcription pixel perfect de la version VGA du jeu – cela tombe bien, c’était la plus belle. Au niveau sonore, le résultat est déjà un peu plus ouvert au débat : je le trouve personnellement plutôt inférieur à ce que laissait entendre une AdLib – et donc à des kilomètres d’une Roland MT-32 – mais on reste très au-dessus de ce qu’offrait la version Atari ST. Le résultat final ne devrait donc frustrer personne, même si on pourra regretter que la version CD-ROM n’ait pas fait le trajet jusqu’à la machine d’Apple.

NOTE FINALE : 18/20

Aucune mauvaise surprise pour The Secret of Monkey Island sur Macintosh, qui débarque dans une version graphiquement identique à l’itération VGA, avec une réalisation sonore qui ne fera certes pas oublier la version CD-ROM, mais qui ne devrait faire fuir personne non plus.

Version SEGA CD

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : JVC Musical Industries, Inc.
Date de sortie : 23 septembre 1993 (Japon) – Novembre 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Manette, Mega Mouse
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Voyant débarque le Mega-CD dans les foyers européens, Lucasfilm y vit fort naturellement l’occasion rêvée de porter toute sa gamme de jeux d’aventure sur un support CD qui était fait pour cela, et sur une machine dont l’architecture était assez proche de celle de l’Amiga. The Secret of Monkey Island fut donc envoyé en éclaireur, histoire de juger de la viabilité du marché pour leur gamme de jeux… et de décider de ne pas prolonger l’expérience, après que le jeu a connu un bide commercial.

On pourra très certainement attribuer ce bide aux difficultés rencontrées par le Mega-CD, à cette époque, pour trouver son public, la faute à un catalogue de titres se résumant à l’époque à 90% à une suite de jeux en FMV. Car le portage effectué sur la machine de SEGA, lui, est irréprochable. Jugez plutôt : niveau sonore, le titre est identique à la version PC CD-ROM sortie un an plus tôt, de la musique aux bruitages. Graphiquement, le Mega-CD ne peut évidemment pas rivaliser avec les 256 couleurs de la version PC, il reprend donc ceux de la version Amiga en plus sombre (j’ai augmenté la luminosité sur les captures) – l’interface retouchée en plus. La maniabilité au pad est un tout petit peu moins naturelle qu’à la souris, mais le titre reste parfaitement jouable, bref, un sans-faute presque intégral. Je dis « presque », car en plus des temps de chargement à répétition, la version française n’aura pas fait le chemin jusque sur la machine de SEGA, et pour cause : le jeu ne sera jamais sorti en Europe.

NOTE FINALE : 18/20

Porté sur Mega-CD, The Secret of Monkey Island y délivre une copie presque parfaite, la réalisation tirant le meilleur du hardware de la machine de SEGA. La qualité de la musique CD est toujours irréprochable, et la maniabilité au pad est limpide. Dommage, en revanche, que cette version soit strictement réservée aux anglophones – et qu’elle soit aussi sombre.