Thunder Force IV

Développeur : Technosoft Co., Ltd.
Éditeur : Technosoft Co., Ltd.
Titre original : サンダーフォースIV
Titres alternatifs : Lightening Force : Quest for the Darkstar (Amérique du Nord), SEGA AGES Thunder Force IV (collection SEGA AGES)
Testé sur : Mega Drive
Disponible sur : Switch
En vente sur : Nintendo eShop (Switch)

La saga Thunder Force (jusqu’à 2000) :

  1. Thunder Force (1983)
  2. Thunder Force II (1988)
  3. Thunder Force III (1990)
  4. Thunder Force IV (1992)
  5. Thunder Force V (1997)

Version Mega Drive

Date de sortie : 24 juillet 1992 (Japon) – Septembre 1992 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1990, Thunder Force III avait été autant un coup de tonnerre qu’un coup de maître dans le monde des shoot-them-up. Impressionnant au point de rivaliser avec certaines des bornes d’arcade de l’époque, il était immédiatement devenu le représentant indétrônable des capacités techniques de la Mega Drive : C’était évident, on aurait beaucoup, beaucoup de mal à faire mieux – techniquement parlant – sur la 16 bits de Sega. Partant de ce constat, quel jeu pourrait bien être le mieux armé pour aller ravir à Thunder Force III son titre de plus grand shoot-them-up de la Mega Drive ? Sa suite directe, pardi…

Il aura donc fallu deux ans pour que l’équipe de Techno Soft se décide à remettre le couvert histoire de nous démontrer que la console de Sega n’avait pas encore montré tout ce qu’elle avait dans le ventre. Le scénario de Thunder Force IV – pour ceux qui y prêteraient un quelconque intérêt – prend place directement après la fin de l’opus précédent. L’empire ORN à peine tombé, une coalition composée de ses vestiges et de ses alliés forme l’empire Vios et, devinez quoi, la fédération galactique prenant rapidement une nouvelle raclée, elle décide d’envoyer un nouveau super-chasseur expérimental : le FIRE-LEO 04 Rynex (à vos souhaits). C’est évidemment aux commandes de ce vaisseau que vous allez devoir venir à bout des dix niveaux du jeu.

Après une rapide introduction (visible au-dessus) qui vous met tout de suite à l’aise, Thunder Force IV reprend immédiatement la formule de son aîné : vous pourrez choisir de faire les quatre premiers niveaux dans l’ordre de votre choix, avant d’enchaîner les six derniers. Une fois votre sélection arrêtée, le jeu commence, et il est temps de vérifier si, oui ou non, ce nouvel opus de la saga parvient à faire mieux que son prédécesseur.

Graphiquement parlant, inutile de faire durer le suspense – surtout si vous avez déjà posé les yeux sur les captures d’écran du jeu – c’est absolument magnifique. Il suffit, dès les premières minutes de jeu, d’apprécier la profusion de détails et le sentiment de profondeur offert par le scrolling différentiel de la planète Strite pour admirer le savoir-faire de Techno Soft. Difficile de croire, par moments, qu’on n’est pas en train de jouer sur une bonne d’arcade : les sprites à l’écran sont nombreux, certains sont gigantesques (le boss final du jeu doit occuper 80% de l’écran à lui seul !), l’animation est rapide, l’action est encore plus frénétique qu’auparavant – à tel point, d’ailleurs, qu’elle ferait presque passer l’épisode précédent pour un titre ennuyeux.

La palette graphique de la Mega Drive est poussée dans ses derniers retranchements, les couleurs sont sublimes, l’ambiance est parfaite ; bref, le jeu est vraiment très impressionnant. Niveau sonore, la 16 bits de Sega nous rappelle également qu’elle en a sous le capot, les musiques extrêmement variées et pêchues étant littéralement noyées sous l’avalanche de bruitages qui dynamisent très efficacement l’action. Ultime degré de finition : le jeu a été programmé pour tourner à la même vitesse en version PAL et NTSC : fini de profiter d’une version 16% plus lente que les versions japonaises et américaines ! Seul bémol à ce concerto de louanges : quelques (rares) ralentissements auxquels Thunder Force III, lui, ne nous avait pas habitués.

Il faut dire qu’on voit difficilement comment le jeu pourrait en faire plus : chaque niveau profite désormais d’un défilement vertical, qui double littéralement votre surface de jeu. Le titre n’hésite pas à redoubler d’imagination pour trouver des éléments de gameplay aptes à vous surprendre : ennemis arrivant depuis la profondeur, viseurs à l’écran vous prenant pour cible en vue subjective, adversaires surgissant du sable, monstre s’accrochant aux parois pour les attirer et vous écraser entre elles…

Ajoutez-y quelques mini-boss très impressionnants, et une narration visuelle assez inédite pour un shoot-them-up (comme ces vaisseaux venant vous donner un coup de main, au niveau 5, contre la première apparition de ce qui deviendra l’avant-dernier boss, avant de vous confier une arme à laquelle vous n’aviez pas accès jusqu’ici) et vous comprendrez qu’il est très difficile de s’ennuyer en jouant à Thunder Force IV. Le jeu, en plus d’être environ deux fois plus long que l’épisode précédent (comptez une cinquantaine de minutes pour le finir), est également beaucoup plus dur. La où la connaissance des niveaux restait votre meilleure arme dans Thunder Force III, ça ne suffira pas ici : de très bons réflexes seront également nécessaires.

Niveau système de jeu, les aficionados du troisième épisode ne devraient pas être trop dépaysés : il est toujours possible de changer la vitesse de son vaisseau avec le bouton A, et on retrouve les bonus habituels : satellites (Claws), bouclier, et vies scientifiquement placées aux pires endroits. Les armes, elles, sont toujours au nombre de cinq, mais ont subi une petite rénovation. Le Blade fait office de tir puissant, le Rail Gun vous permet de concentrer vos tirs vers l’arrière (ce qui est souvent indispensable), le Snake arrose au-dessus et en-dessous de votre vaisseau en laissant l’avant et l’arrière vulnérables, le Hunter est un tir à tête chercheuse (très pratique pour savoir où se situe le point faible des boss, par exemple).

Le Free Way, lui, est un peu plus technique : il est composé d’un tir minable orienté dans la direction vers laquelle vous vous dirigez, et d’une salve de puissants missiles dans la direction opposée. En faire usage de manière efficace vous imposera donc de « fuir » constamment ce que vous visez, ce qui peut demander un temps d’adaptation. Mais ce n’est pas fini : à partir de la fin du niveau 5, vous aurez également accès à une nouvelle arme qui viendra remplacer vos satellites. Celle-ci peut lâcher un tir surpuissant couvrant une bonne partie de l’écran, à condition de la laisser charger, c’est à dire de s’arrêter de tirer pendant plusieurs secondes… inutile de dire que cela peut s’avérer redoutable – à condition d’aimer prendre des risques.

Revenons rapidement sur la difficulté du titre : l’un de rares reproches adressés à Thunder Force III était la relative simplicité des boss, généralement vite expédiés – surtout avec un vaisseau bien équipé.

Eh bien, vous pouvez oublier ce reproche : les boss sont désormais de véritables défis, qui virent d’ailleurs parfois à l’épreuve d’endurance. Ils comprennent tous plusieurs phases, se transforment, parcourent tout l’écran, et leurs patterns sont bien plus difficiles à mémoriser que ceux du précédent opus. La durée de ces affrontements, souvent dantesques (le premier boss doit représenter plus de la moitié de la durée du premier niveau !), aura au moins le mérite de vous laisser l’occasion d’admirer ces boss sous toutes les coutures, tant ils sont absolument superbes. Une des multiples occasions de rester rivé à son siège, tant Thunder Force IV est une véritable démonstration, la quintessence de ce qu’on pouvait espérer tirer d’une Mega Drive, aussi bien sur le plan technique qu’au niveau ludique. Et ça, ça n’a vraiment pas de prix.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 19/20 À l'heure où le genre du shoot-them-up, victime de son foudroyant succès, arrivait au zénith qui annonçait son inéluctable déclin, Thunder Force IV sera parvenu à représenter une démonstration technique comme non seulement personne n'en pensait la Mega Drive capable – et elle avait pourtant déjà largement fait ses preuves, en 1992 – mais qui pouvait même se permettre de donner pas mal de leçons à des titres parus sur Neo Geo. En-dehors du mode deux joueurs, il y a dans le titre de Technosoft à peu près tout ce qu'on peut venir chercher dans un shoot-them-up à défilement horizontal : une réalisation sublime, une adrénaline qui ne retombe jamais, des idées à foison, une prise en main immédiate avec juste ce qu'il faut de profondeur pour récompenser la technicité... Plus qu'une simple vitrine technologique, Thunder Force IV est un candidat sérieux au titre de meilleur shoot-them-up de toute l'ère 16 bits. Rien que ça. CE QUI A MAL VIEILLI : – Certains boss sont véritablement increvables – Plusieurs patterns de boss – et certains niveaux – tiennent du die-and-retry : vous êtes pratiquement obligé d'y laisser la vie lors de votre premier passage

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Thunder Force IV sur un écran cathodique :

R-Type

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com

Développeur : Irem Corp.
Éditeur : Irem Corp.
Testé sur : ArcadeAtari STCommodore 64Master SystemMSXPC EngineZX SpectrumAmigaAmstrad CPCSharp X68000Game BoyPC Engine CDPlayStation
Version non testée : PC-88
Disponible sur : Android, Antstream, iPad, iPhone, J2ME, Nintendo 3DS, Ouya, PlayStation 3, PSP, Wii, Wii U
Présent dans les compilations : R-Types (PlayStation, PlayStation 3, PSP), R-Type Dimensions (Luna, Switch, PlayStation 3, PlayStation 4, Windows, Xbox 360)
En vente sur : Version PC Engine : Nintendo eShop (Wii, Wii U)
Version arcade : Google Play, Apple.com

La saga R-Type (jusqu’à 2000) :

  1. R-Type (1987)
  2. R-Type II (1989)
  3. Super R-Type (1991)
  4. R-Type Leo (1992)
  5. R-Type III : The Third Lightning (1993)
  6. R-Type Delta (1998)

Version Arcade

Date de sortie : Juillet 1987
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Borne
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et deux boutons
Version testée : Version internationale
Hardware : Irem M-72
Processeurs : NEC V30 8MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz
Son : Haut-parleur ; YM2151 OPM 3,579545MHz ; 1 canal
Vidéo : 384 x 256 (H) 55,017606Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour chaque catégorie de jeux vidéo, il existe au moins un titre-référence, une légende, un programme que les vieux briscards évoqueront avec une larme à l’œil et dont tous les jeunes joueurs auront fatalement entendu parler un jour sans avoir nécessairement eu l’occasion de poser les mains dessus. Pour les jeux de plateforme, des titres comme Super Mario Bros. ou Sonic the Hedgehog seront fatalement évoqués, difficile de parler de jeux d’action à la première personne sans mentionner Doom… et dans le cadre du shoot-them-up, au milieu des Gradius ou des Xenon II, un titre reviendra immanquablement : R-Type.

Les choses se compliquent très, très vite

Nous sommes en 1987, et la société Irem s’apprête à faire pas mal de bruit. Nous sommes à une époque où les bornes d’arcade sont reines, techniquement loin, très loin au-dessus de ce que peuvent espérer offrir les ordinateurs ou les consoles de salon. Une époque où il n’est pas rare qu’un titre majeur suscite un engouement tel que de véritables files d’attente se forment, à longueur de journée, devant la borne chargée de le faire tourner. Une époque où des joueurs aguerris sont prêts à dilapider toute leur monnaie histoire de se frotter à ce que les salles de l’époque avaient à offrir de mieux. Et croyez-moi, pour venir à bout d’un titre comme R-Type, de la monnaie, il valait mieux en avoir plein les poches…

Probablement l’un des boss les plus célèbres de toute l’histoire du shoot-them-up

R-Type est un shoot-them-up à défilement horizontal vous plaçant aux commandes d’un vaisseau modèle R-9 pour – comme c’est original – aller sauver à vous tout seul la galaxie du terrible empire extraterrestre Bydo. Pour se faire, vous allez devoir traverser huit niveaux particulièrement vicieux avant de vaincre le boss final, et d’être autorisé à recommencer le jeu depuis le début puisque je rappelle que nous sommes sur arcade et qu’après tout, vous avez payé pour ça, non ? Si le jeu a connu à l’époque un carton planétaire, c’est parce qu’il a bénéficié de deux grandes qualités qui étaient appelées à faire école et à être – comme toutes les bonnes idées – régulièrement pillées par la suite.

Après le clin d’œil à Alien, le clin d’œil à Star Wars avec ce compacteur d’ordures (qui va vous en faire baver)

Commençons pas la plus évidente, celle qui sautait immédiatement aux yeux dès l’instant où on croisait fugacement l’écran de la borne d’arcade : sa réalisation. En 1987, le jeu pouvait se targuer de faire partie des plus beaux titres disponibles sur arcade, et même s’il ne déclenchera plus aujourd’hui aucune forme de décrochement de mâchoire, il faut reconnaître que les graphismes ont plutôt bien vieilli. Cela est certainement dû à la principale trouvaille dans le design du jeu, à savoir ce côté organique empruntant ouvertement à des artistes comme Giger, et offrant un cadre à la fois original, dérangeant, et surtout tranchant radicalement avec les éternels déballages mécaniques qui étaient la norme au sein des shoot-them-up futuristes de l’époque. À ce titre, le boss du premier niveau est entré dans la légende – et constitue encore aujourd’hui une des figures les plus connues de l’histoire du jeu vidéo des années 80. Bref, c’était beau, c’était neuf, et dans un lieu où l’on venait dépenser de l’argent pour en prendre plein les mirettes, c’était une condition sine qua non pour espérer se faire un nom – mission accomplie.

Freud aurait sans doute eu beaucoup de choses à dire sur ce boss

La seconde sautera moins aux yeux des joueurs découvrant R-Type trente ans (eh oui, déjà) après sa sortie, et tient à la jouabilité du titre. En-dehors de l’habituel lot d’armes spéciales, de bonus de vitesse et autre satellites venant accroître votre puissance de feu, deux innovations majeures viennent en effet enrichir le gameplay du titre – tellement majeures qu’elle sont désormais devenues relativement banales au sein de l’univers des shoot-them-up. Tout d’abord, une pression prolongée sur votre bouton de tir vous permettra de remplir une jauge pour le charger, permettant ainsi de relâcher un projectile bien plus dévastateur. Et surtout, le jeu met à votre disposition un bonus particulièrement utile : un module qui peut venir se fixer à votre vaisseau.

Vous allez apprendre à haïr ces petits vaisseaux qui laissent un trainée derrière eux

En plus de vous offrir un bouclier fort appréciable – le module étant capable d’arrêter les tirs venus s’écraser contre lui – celui-ci a la particularité d’être détachable : non seulement vous pouvez l’éloigner de votre vaisseau et continuer à tirer avec lui – ce qui peut se révéler infiniment précieux pour couvrir une plus grande partie de l’écran – mais en plus, rien ne vous interdit de l’accrocher à l’arrière de votre R-9. Ce qui non seulement vous offrira une protection contre les adversaires surgissant dans votre dos – et croyez-moi, les bougres ne s’en privent pas – mais vous autorisera également à tirer derrière vous, ce qui sera quasiment obligatoire pour franchir certains passages du jeu, à commencer par le vaisseau géant du niveau 3 dont le boss final est pratiquement impossible à vaincre si vous ne disposez pas du fameux module.

R-Type aura également initié ce grand classique qu’est le niveau composé d’un vaisseau géant à détruire

Ce qui nous amène à aborder le dernier élément ayant concouru à la légende du titre – mais celui-là ne fera pas que des heureux : sa difficulté. Oui, tout le monde a entendu parler de la difficulté des jeux d’arcade, dont la mission principale était de faire cracher des pièces aux joueurs venus se frotter à eux – on comprendra donc aisément que la plupart des jeux de l’époque demandaient déjà un solide niveau de maîtrise avant d’autoriser des parties de plus de deux minutes. Et à ce titre, R-Type ne va pas déroger à la légende : le jeu est d’une difficulté infernale, et si les deux premiers niveaux sont encore à peu près faisables, la suite du jeu tient autant de l’épreuve de contrôle de soi que d’un révélateur du masochisme des joueurs de l’époque.

Arriver au boss final se mérite. Quant à le vaincre, n’en parlons pas

Vous pensez être doué ? Allez vous frotter à ce titre, et vous verrez très vite si vous avez raison. Soyons clair : les réflexes ne suffiront pas. Connaître par cœur le déroulement des niveaux est pratiquement obligatoire, la faute à un level design d’un rare sadisme où le décor sera un de vos pires ennemis, mais où les nombreuses cochonneries débarquant de tous les côtés de l’écran feront tout pour lui disputer ce titre. En fait, vous allez avoir de nombreuses occasions de constater que les bonus du jeu peuvent très rapidement se retourner contre vous. Certaines situations demandent une arme ou un bonus précis pour avoir une chance d’être franchies sans être un jedi et naturellement, le jeu, dans son sadisme assumé, se délecte de l’opportunité de vous offrir les armes les moins adaptées à ce qui se présente à vous. L’un des bonus que vous allez le plus vite apprendre à détester, par exemple, est ce petit « S » qui augmente la vitesse de déplacement de votre astronef. Ayez le malheur d’en ramasser trop, et vous aurez l’occasion de pleurer des larmes de sang lors des manœuvres extrêmement délicates, souvent au pixel près, que vous demandent les derniers niveaux du titre (si vous arrivez jusque là !). Car en plus d’être monstrueusement difficile, le jeu est également atrocement punitif : non seulement un tir suffit à atomiser votre super vaisseau prétendument surarmé (sans rire, le blindage, ils ne connaissent pas dans le futur ?), mais surtout, cela se traduira alors par une perte de tous vos bonus – armes comprises – et un retour au dernier checkpoint (et ils sont rares).

Si vous souffriez d’un excès de sadisme à la fin des années 80, vous pouviez encore postuler chez Irem

C’est à dire qu’un joueur de l’époque pouvait tout à fait engloutir des fortunes sans avancer d’un pouce, car tant que vous n’avez pas fini une section du jeu, il vous faudra la recommencer ad vitam eternam jusqu’à ce que vous en veniez à bout – ou qu’elle ne vienne à bout de vous. Et puisque le jeu est déjà infernal avec un vaisseau doté de tout l’armement, je vous laisse juger de vos chances lorsque vous devez repartir à poil… à tel point que certains joueurs chevronnés préfèrent reprendre le jeu depuis le début en cas de perte d’une vie. Oui, c’est difficile à ce point.

Au fin fond de la salle d’arcade, tout le monde vous entendra hurler

Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain ? Loin de là : la jouabilité est irréprochable, et la difficulté du titre n’a rien d’exceptionnel si on considère son année de sortie. R-Type est le vestige d’une époque où jouer à un jeu avec l’optique de le finir relevait de l’anomalie ou de l’ambition démesurée : on jouait avant tout pour le score, et rarement très longtemps – je peux vous dire que vous risquez d’être dans un drôle d’état après une heure passée sur le même niveau. Un bon moyen de mesurer ce qui sépare le plaisir de jeu actuel de celui que l’on recherchait il y a une génération de cela…

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 18/20 R-Type, c'est la rencontre entre un gameplay intelligemment novateur et une esthétique qui fait mouche pour composer un des shoot-them-up les plus iconiques de toute l'histoire vidéoludique. Plus encore que la difficulté redoutable, en particulier dans sa deuxième partie, le titre d'Irem impose avant tout sa formidable ambiance à travers des morceaux de bravoure dont certains (le vaisseau géant, au hasard) sont tout simplement devenus depuis des passages obligés du genre. Symbole de l'ère où les salles d'arcade étaient considérées comme le pinacle technique et ludique indépassable, R-Type demeure aujourd'hui un titre fascinant et d'une rare exigence auquel n'importe quel fan de shoot-them-up doit nécessairement avoir joué au moins une fois dans sa vie. Une référence. CE QUI A MAL VIEILLI : – C'est. Vraiment. Dur. – Pas exactement le type de jeu auquel on joue pour se détendre

Version Atari ST

Développeur : Images Design
Éditeur : Electric Dreams Software
Date de sortie : Novembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : RAM : 512ko
Écran couleur requis

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’Atari ST a été parmi les premiers servis pour bénéficier d’une conversion du hit d’Irem, mais il n’est pas celui qui s’en tire le mieux. Graphiquement, si le jeu offre un rendu plus que décent pour une palette de 16 couleurs, la résolution limitée de la machine rend la marge de manœuvre atrocement étroite pour votre R-9 – qui occupe d’ailleurs une place démesurée à l’écran (le sprite doit faire deux fois la taille de celui de la version arcade !). Plutôt que d’opter pour la très intelligente solution adoptée par la PC Engine en autorisant un défilement vertical, Electric Dreams a opté pour une méthode plus crue : ça ne rentre pas dans l’image ? On va tasser au pied pour que ça rentre quand même ! Inutile de dire que, vu le monde à l’écran, le jeu est encore plus difficile sur cette version, d’autant que – pour ne rien arranger – les crédits ne sont pas illimités ! C’est d’autant plus dommageable que la musique est de bonne qualité, et que le jeu tourne (relativement) bien. Mais il aurait fallu ajouter un défilement vertical à l’écran, ou bien redessiner les sprites, car en l’état, le jeu ressemble vite à un simulateur d’embouteillage sur le périphérique nord. Autant dire que ce qui passait pour un portage exceptionnel à l’époque respire désormais un côté « Système D » un peu moins glorieux, mais le jeu demeure jouable, à défaut d’avoir été équilibré correctement.

On se sent un peu à l’étroit…

NOTE FINALE : 11/20

Une réalisation honnête n’est pas toujours la meilleure chose à privilégier sur le gameplay, et cette version souffre de chercher à tasser sur un écran de jeu minuscule tout ce qu’affichait la version arcade. Si la réalisation et la jouabilité sont correctes, on regrettera un équilibrage fait au doigt mouillé qui gonfle encore la difficulté d’un jeu qui n’en avait pas besoin – surtout avec des crédits limités.


Version Commodore 64

Développeur : Rainbow Arts Software GmbH
Éditeur : Electric Dreams Software
Date de sortie : Novembre 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Assuré par Rainbow Arts, ce portage de R-Type sur la machine de Commodore est – reconnaissons-le – très bien ficelé. Le jeu est lisible, coloré, tourne bien, a conservé les fonds, est parfaitement jouable et a même une musique d’excellente qualité pour le support. Seul le niveau 6 manque à l’appel, tout le reste y est, ce qui vu la faible puissance du Commodore 64 n’est pas un mince exploit. En revanche, la sortie du jeu a été précipitée, ce qui engendre, en plus du niveau manquant, quelques problèmes : par exemple, le jeu ne sauvegarde pas les scores et le mode deux joueurs (comprenez : en alternance, comme sur tous les autres supports) ne fonctionne pas. Pour ne rien arranger, le boss final n’a plus qu’une seule attaque, ce qui le rend beaucoup plus simple, et il n’y a plus de séquence de fin : le jeu… s’arrête. Le multiload est très mal géré, d’où des temps de chargement à rallonge. Ce portage est également connu pour avoir réutilisé le moteur d’un autre shoot-them-up, Katakis, que beaucoup de joueurs lui trouvent supérieur – mais ce n’est pas mon cas. Sans doute un des portages les plus impressionnants de la ludothèque du Commodore 64.

Cette version n’a vraiment pas à rougir de sa prestation

NOTE FINALE : 13,5/20

Faire tenir une borne d’arcade dans un C64 n’était pas chose facile, mais Rainbow Arts l’a fait en un temps record (six semaines et demi !). En dépit de nombreux problèmes dus à ce développement accéléré, le jeu reste agréable à jouer, et la musique est sans aucun doute l’une des meilleures de tous les supports 8 bits  et peut-être même d’une partie des supports 16 bits.


Version Master System

Développeur : Compile
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 1er octobre 1988 (Japon) – Décembre 1998 (États-Unis et Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Gestion de la puce sonore YM2413

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La version Master System de R-Type passe généralement pour une des meilleures versions de toutes les plate-formes 8 bits, ce qui n’est qu’à moitié surprenant lorsqu’on retrouve aux commandes une équipe du nom de… Compile, sans doute les maîtres incontestés du genre sur consoles ! Ils étaient visiblement déjà très doués en 1988, les bougres : c’est beau, ça tourne bien, la jouabilité est irréprochable, et les ralentissements sont rares. D’entrée de jeu, on sent immédiatement qu’on ne joue pas dans la même cour que la plupart des portages effectués sur ordinateur : c’est sans doute moins détaillé et moins coloré que sur arcade, mais bon sang ça se défend quand même sacrément bien. Même la musique n’a pas à rougir de la comparaison. Et histoire de faire pencher encore un peu plus la balance, cette version contient même un niveau secret accessible au niveau quatre !

Je connais bien des ordinateurs 16 bits qui ont dû être jaloux…

Alors, le portage ultime ? Eh bien, à son niveau, il n’est vraiment éclipsé que par le fantastique portage sur PC Engine – les consoles 8 bits étaient vraiment très en forme, sur ce coup-là ! Sa seule véritable « tare » est de souffrir d’un nombre assez important de clignotements de sprites – ce qui, vu le monde à l’écran, n’est pas franchement une surprise, mais risque de compliquer un peu les choses en termes de lisibilité lors de certains des passages les plus exigeants du jeu. Un détail certes gênant, mais le titre m’étant apparu comme un peu plus simple que sur la borne, il n’y a pas non plus de quoi dégrader irrévocablement l’expérience de jeu. Bien sûr, aujourd’hui, on se dirigera plus volontiers directement vers la borne, mais la présence d’un niveau inédit reste une carotte suffisante pour avoir une très bonne raison de se laisser tenter par cette excellente version. Sans hésitation l’un des meilleurs shoot-them-up de la Master System.

Récompenses :

  • Tilt d’or 1989 – Meilleur shoot-them-up sur console (Tilt n°72, décembre 1989)

NOTE FINALE : 15,5/20

Compile était déjà une équipe de sorciers en 1988, et leur magie accomplit des exploits avec ce superbe R-Type sur Master System qui a de quoi coller pas mal de complexes à des machines bien plus puissantes. La réalisation est difficilement attaquable, et il ne manque rien – on a même droit à un niveau supplémentaire pour ceux qui sauront le débusquer. Seuls les clignotements de sprites et quelques ralentissements ternissent (un peu) le tableau.

Les avis de l’époque :

« Sega réussit une adaptation irréprochable de R-Type sur console. Les graphismes sont excellents. On appréciera tout particulièrement les monstres, réellement impressionnants. L’animation est précise et l’action s’accompagne d’une bande sonore de qualité. (…) Toutes ces qualités font de R-Type le meilleur shoot-them-up sur la console Sega. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°62, Janvier 1989, 17/20


Version MSX

Développeur : ISCO, Inc.
Éditeur : Irem Corp.
Date de sortie : 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick, manette
Version testée : Version cartouche testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 1
Hé, ho, calmez-vous un peu sur les projectiles !

Les ordinateurs japonais ont également eu droit à leurs portages, et le MSX ne fait pas exception. Les graphismes sont clairs, la musique est présente, le jeu tourne correctement. Cette version est globalement assez agréable à parcourir, mais souffre de deux défauts. La première vient du défilement du jeu, qui avance par légers à-coups plutôt que de façon fluide (une caractéristique récurrente du défilement sur MSX 1). Rien de dramatique, mais cela donne le sentiment d’une progression hachée. La deuxième – plus pénalisante – est que les tirs adverses sont déchainés dans cette version : dès les premiers écrans, on est littéralement noyé sous les tirs. En résulte une version encore plus difficile – et franchement, ça n’est pas une bonne idée.

NOTE FINALE : 12,5/20

Fonctionnelle sans être éblouissante, frustrante sans être pour autant injouable, la version MSX de R-Type reste une bonne pioche – à condition d’apprécier une difficulté proprement infâme.



Version PC Engine

Développeur : Irem Corp.
Éditeur : NEC Home Electronics (U.S.A.) Inc.
Date de sortie : 1988 (Japon) – Novembre 1989 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb (initialement divisé en deux jeux, chacun sur une HuCard de 2Mb)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au grand jeu de la conversion ultime, la PC Engine pouvait se vanter d’être une candidate particulièrement crédible dès 1988. On savait que la machine de chez NEC en avait sous le capot, au point parfois de rivaliser avec les 16 bits qui allaient lui succéder. Mais de là à rivaliser avec une borne d’arcade… Eh bien tenez-vous bien : la PC Engine y parvient. Oh, bien sur, le jeu est un peu moins beau, la musique est légèrement inférieure, il y a quelques effacements de sprites… mais bon sang, on est quand même si proche du niveau de la version d’origine qu’on en vient parfois à oublier qu’on n’est pas en train de jouer sur la borne.

Ceci est une version 8bits. Oui, ça calme.

L’ingéniosité avec laquelle les programmeurs ont tiré le maximum de la console est remarquable : la résolution de la PC Engine ne permet pas de rivaliser graphiquement avec l’original ? Pas grave : on rajoute un défilement vertical, et voilà comment on récupère les pixels qui manquent (on remarquera d’ailleurs que l’image s’affiche ici dans un format rarement utilisé sur la console, et plus proche de la résolution affichée d’ordinaire par une Mega Drive). Incroyable mais vrai : il n’aura pas fallu attendre la sortie de la Neo Geo pour avoir un jeu qualité arcade à domicile. La modeste 8 bits de NEC en était déjà capable ! Seul petit bémol – mais celui-ci ne concerne que la version japonaise – faute d’Hu-Card assez grandes pour stocker le jeu à sa sortie, R-Type fut tout simplement vendu en deux morceaux de quatre niveaux chacun, avec un beau « R-Type II » pour la deuxième ! Ceci dit, vu la qualité du jeu, on comprend aisément que certains joueurs aient été prêts à passer à la caisse deux fois.

NOTE FINALE : 17,5/20

Cela paraissait impossible, mais cela s’est pourtant produit : une modeste console 8 bits fait pratiquement aussi bien qu’une des bornes d’arcade les plus impressionnantes de la période. C’est magnifique, c’est d’une fluidité à toute épreuve, c’est d’une fidélité absolue, bref : c’est le Saint Graal des portages de l’arcade. Une version à avoir absolument pour tous les possesseurs de la PC Engine.

Version ZX Spectrum

Développeur : Software Studios
Éditeur : Electric Dreams Software
Date de sortie : 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Cursor, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko
Possibilité de redéfinir les touches du clavier
Pas de problème, on le reconnait bien

Étant donné les capacités techniques extrêmement limitées du ZX Spectrum, on était en droit de craindre le pire au moment de lancer l’adaptation d’une borne d’arcade aussi exigeante que celle de R-Type. Mais Electric Dreams, responsable de la quasi-totalité des portages du jeu sur ordinateurs, a fait du très bon boulot, et force est de reconnaître qu’on tient là l’un des meilleurs shoot-them-up de la machine. On peut configurer les touches par simple pression de la touche « ESC » sur le menu du jeu, et les sensations de la version d’origine sont bien là, mais s’il faudra naturellement composer – en plus des limitations graphiques – avec une musique réduite à un court jingle en début de niveau et à des bruitages très limités. Signalons également une erreur à la sortie du jeu, qui faisait que le niveau 7 était présent deux fois en lieu et place du niveau 8, il était donc impossible de voir le dernier niveau. Cela aura été corrigé dans les ressorties en version « budget ». Malgré tout, le jeu est jouable, relativement fluide, et toujours aussi exigeant. Que demander de plus ?

NOTE FINALE : 12/20

Force est de reconnaitre que le ZX Spectrum tient là une très belle conversion – qui n’intéressera malgré tout aujourd’hui que les nostalgiques ou les curieux. Difficile de la recommander en raison des limites du support, mais les joueurs ayant investi dans cette version de R-Type à sa sortie ne l’ont certainement pas regretté.


Version Amiga

Développeur : Factor 5 GmbH
Éditeur : Electric Dreams Software
Date de sortie : Avril 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sans doute l’ordinateur le mieux équipé pour prétendre à une conversion honnête au moment de la sortie du jeu, l’Amiga livre un portage tout à fait correct – et pour cause, celui-ci a été assuré par les allemands de Factor 5, eux-même programmeurs de la version Amiga de Katakis, un jeu de 1988 qui était… un clone de R-Type. C’est d’ailleurs pour éviter un procès que le studio allemand aura accepté de s’occuper du portage vers l’Amiga ! Certes, graphiquement, on ne sera pas surpris de constater que le jeu ne rivalise pas avec la borne d’arcade, et que si les thèmes musicaux sont toujours reconnaissables, la puce sonore Paula ne se sort pas vraiment les tripes (le thème de l’écran-titre est cependant vraiment chouette).

OK, on a dû pousser un ou deux meubles, mais on a enfin de la place pour les jambes !

Bien sûr, il faut se rappeler que nous sommes en 1989, et que des jeux comme Project-X n’ont pas encore vu le jour histoire de montrer ce que l’Amiga 500 avait dans le ventre. En l’état, ne boudons pas notre plaisir : à un ou deux décors de fond près, le jeu ne sacrifie strictement rien du contenu de la version originale, les sprites sont toujours d’une très belle taille, le vaisseau géant du niveau 3 n’a pas rapetissé d’un pixel (enfin si, mais comme tout le reste de la surface de jeu a rapetissé avec lui, ça ne se voit pas trop), et le titre reste jouable en toute circonstance – à défaut de rester impeccablement fluide. On appréciera surtout que cette version ne reproduise pas l’erreur capitale de la version ST qui offrait une surface de jeu tronquée. Et sinon, oui, c’est toujours aussi dur – mais on n’aura pas cette fois à composer avec un vaisseau qui prend 1/5e de l’écran ni avec les tirs aux trajectoires foireuses comme sur ST, on reste donc dans les clous de la version arcade – et le jeu a le bon goût de vous offrir des crédits illimités.

NOTE FINALE : 15,5/20

Certes, on est toujours loin de la borne d’arcade, mais cette version de R-Type demeure très certainement le meilleur des portages sur ordinateur. On regrettera malgré tout qu’une partie des décors de fond du jeu ait été sacrifiée sans raison valable.

Les avis de l’époque :

« R-Type est magnifique sur Amiga, c’est de loin la meilleure version sur micro. […] Ils sont vraiment très forts les programmeurs allemands car cette version surclasse, sur tous les plans, celle du ST : animation, scrolling, bande sonore, etc. Et surtout, elle est beaucoup plus jouable. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°67, Juin 1989, 18/20


Version Amstrad CPC

Développeur : Software Studios
Éditeur : Electric Dreams Software
Date de sortie : Février 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464
Le copier/coller, l’outil des programmeurs pressés

Vous connaissez le principe du « Speccy port » ? C’est très simple : vous prenez un portage développé pour un système très populaire outre-Manche (en l’occurrence, le ZX SPectrum), et vous l’utilisez comme base pour développer le portage à destination d’un système nettement moins populaire outre-Manche – à savoir l’Amstrad CPC. Cette formule, hélas trop souvent utilisée, est même encore un peu plus gonflée ici puisque cette adaptation ne se hisse même pas au niveau de celle du ZX Spectrum ! Il y a moins de couleurs, et on n’a même plus le droit à l’ébauche de thème musical qu’on pouvait entendre au début des niveaux. C’est fort heureusement toujours jouable, mais les utilisateurs de la machines d’Amstrad ont dû se sentir quelque peu pris pour des pigeons, et pour le coup il est assez difficile de leur donner tort.

NOTE FINALE : 09,5/20

Flagrant délit de grosse flemme pour cette version CPC qui ne fait pas honneur au support. Certes, c’est toujours jouable, mais la machine d’Amstrad était capable de faire beaucoup, beaucoup mieux que ça.

Du côté des fans :

C’est quand même plus convaincant !

Proposer un portage de R-Type plus abouti que celui livré par Software Studios ne semblait pas représenter un rêve inaccessible, alors une équipe nommée Easter Egg s’en sera chargée – avec le 6128 en tête. Le résultat est assez bluffant : graphiquement on a presque l’impression d’avoir changé de génération, et on a cette fois le droit à la musique en jeu. Je vous laisse observer les captures d’écran ; je pense qu’elles se passent de commentaires. Pour ne rien gâcher, le jeu intègre également une toute nouvelle introduction, ainsi qu’un menu des options qui vous permettra de choisir votre nombre de vies et de continues, ainsi qu’un éventuel mode « Casual » qui se justifie d’autant plus que, dans sa difficulté normale, le jeu est plus difficile que sur la borne, la faute a des adversaires très rapides et assez difficiles à toucher. Bon, à l’heure où on peut jouer à la borne d’arcade sur un téléphone portable, on se doute que cela reste une version à destination d’un public de niche – mais si vous voulez voir de quoi les meilleurs modèles de CPC étaient réellement capables, c’est une bonne option. Les joueurs intéressés pourront le trouver assez aisément sur le net, mais voici toujours une adresse pour le faire.

Quelques couleurs de plus font vraiment une grosse différence

NOTE FINALE : 13/20

Ce remake de R-Type assuré par l’équipe d’Easter Egg a le mérite de rappeler à quel point le CPC – et particulièrement le 6128 – aura été dramatiquement sous-exploité durant sa commercialisation. Si vous voulez découvrir le jeu d’Irem sur l’ordinateur d’Amstrad, aucune hésitation à avoir, c’est par là qu’il faut débuter.

Version Sharp X68000

Développeur : Irem Corp.
Éditeur : Irem Corp.
Date de sortie : 9 juin 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Ceux qui connaissent le Sharp X68000 – ou qui auront appris à le connaître dans ces pages – le sauront déjà : l’ordinateur japonais était un monstre à côté duquel l’Amiga passait pour un jouet et le PC pour une machine à écrire. Avec R-Type, il dévoile une nouvelle fois sa puissance : dès 1989, on se retrouve avec une version graphiquement pratiquement identique à la borne d’arcade – c’est encore plus impressionnant que sur PC Engine ! Bon, curieusement, le vaisseau est plus petit (le format en 1/1 de l’image est très différent de celui de la borne), mais pour le reste il faut vraiment placer les deux versions côte-à-côte pour voir la différence. Au niveau sonore, c’est également presque le sans-faute ; je dis « presque » car la qualité musicale est très légèrement inférieure, mais il faut vraiment jouer les deux versions à la suite pour percevoir une différence. La jouabilité est irréprochable, et l’aspect le plus clivant apparaît certainement là où ne l’attendait pas : si le titre dispose de deux modes de difficulté (« normal » et « difficile »), il est déjà plus difficile que la borne dans le mode « normal » ! Dès les premières minutes, vous êtes littéralement noyé sous les tirs adverses ; il y en a facilement deux à trois fois plus que sur la version originale ! Sachant qu’on parle d’un jeu qui n’était déjà pas exactement une promenade de santé, le fait de monter le curseur un peu plus haut n’était vraiment pas nécessaire… Autant dire qu’en dépit de ses qualités techniques presque parfaites, le titre sera quand même à réserver aux harcore gamers les plus exigeants.

Ce n’est pas tout à fait identique à la borne d’arcade, mais ça s’en rapproche sacrément !

NOTE FINALE : 17,5/20

Avec R-Type sur Sharp X68000, on se retrouve avec le portage presque parfait. « Presque » car, en dépit d’une réalisation très proche de la borne, le fait d’avoir gonflé arbitrairement une difficulté déjà hyper-exigeante n’était pas franchement nécessaire. On se retrouve en tous cas avec un très bon jeu, mais probablement à réserver aux experts ou aux joueurs aux nerfs solides.


Version Game Boy

Développeur : B.I.T.S., Ltd.
Éditeur : Irem Corp.
Date de sortie : 17 novembre 1990 (Europe) – 19 mars 1991 (Japon) – 25 mars 1991 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Nouvelle colle en 1990 pour les studios B.I.T.S., chargés de l’adaptation de R-Type sur la console portable de Nintendo : peut-on faire tenir tout le contenu, toute l’action, toute la frénésie d’une borne d’arcade sur un boîtier à piles avec un écran de moins de sept centimètres de diagonale ? La réponse est : presque. Tout d’abord, confronté au même problème qu’Electric Dreams sur la version ST, à savoir une résolution (très) limitée ne permettant pas de tout faire tenir à l’écran, les programmeurs de B.I.T.S. ont fait un choix autrement plus intelligent : adapter les graphismes, la taille des sprites et le déroulement des niveaux. La Game Boy ne peut pas afficher les dizaines de sprites présents à l’écran sur la version arcade ? Eh bien on répartira les vagues. Les adversaires sont moins nombreux ? Oui mais, écran exigu oblige, ils sont également beaucoup plus gros. Bref, cette version de 1991 s’adapte au support, et elle le fait plutôt bien. Comme on peut s’en douter, cela oblige malgré tout à quelques sacrifices. Par exemple, faute d’opposition, le vaisseau du niveau 3 peut désormais être considéré comme le niveau le plus facile du jeu. On remarquera également que les thèmes musicaux des deux premiers niveaux se répètent en alternance à partir du niveau 3 – il faut croire qu’il n’y avait pas assez de place pour en faire tenir plus. De la même façon, les niveaux 4 et 5 ont purement et simplement disparu du jeu – ce qui n’est pas forcément un scandale, la portable de Nintendo se prêtant assez mal aux longues sessions de jeu. Bref, on a dû pratiquer quelques coupes, mais l’essentiel du jeu est là, et reste très agréable à jouer.

R-Type peut aussi tenir dans votre poche

NOTE FINALE : 14/20

Certes, ce R-Type sur Game Boy se présente dans une version sensiblement expurgée à cause des contraintes liées au support. Mais le travail a été bien fait, et le mordu du jeu original ne sera pas dépaysé en s’explosant les yeux sur son écran monochrome, ce qui reste un bel exploit.

Version PC Engine CD
R-Type Complete

Développeur : Irem Corp.
Éditeur : Irem Corp.
Date de sortie : 20 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (menus), japonais (narration)
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Super System Card requise

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1991, Irem, bien décidé à profiter des capacités du lecteur CD-ROM qu’on pouvait ajouter à la PC Engine depuis 1988, se décide à lancer une version intitulée R-Type Complete (comprendre par là que, contrairement à la version de base, elle ne sera pas vendue en deux morceaux). Et la question qui se pose est alors la suivante : comment améliorer ce qui et déjà le meilleur portage existant de R-Type ? En gavant le CD de cinématiques, pardi !

Le jeu va vous faire bouffer de la cinématique

Autant le dire, ces (longues) cinématiques chargées de développer en long, en large et en travers un scénario originellement écrit sur un timbre poste ont bien plus mal vieilli que le jeu en lui-même. On pourra même leur reprocher de venir casser inutilement le rythme d’un jeu auquel on a objectivement peu de chances de jouer pour la qualité de son histoire. Au cas où vous vous laisseriez malgré tout dévorer par la curiosité, il vous faudra de toute façon parler japonais, car le jeu n’est jamais sorti de l’archipel du Soleil Levant.

Oui, mais qui dit « CD-ROM » dit également « musiques qualités CD », pas vrai ? Soyez heureux, c’est bien le cas ! Malgré tout, même si c’est encore une fois une question de goût, je dois dire que les remix pseudo-technoïdes des thèmes originaux ne m’ont pas franchement transcendé. Reste le jeu en lui-même, qui n’a pas bougé d’un iota depuis sa version de 1988.

Le reste du jeu est toujours fidèle au poste

NOTE FINALE : 18/20

Certes, les petits plus apportés par cette version CD tiennent aujourd’hui davantage du gadget que de l’expérience ultime. On pourra même arguer que les réorchestrations CD ont finalement moins de charme que les thèmes originaux. Reste que le jeu, lui, est toujours aussi bon, alors pourquoi faire le difficile ?

Version PlayStation
R-Type
s

Développeurs : Racdym – Irem Software Engineering, Inc.
Éditeur : Irem Software Engineering, Inc.
Date de sortie : 5 février 1998 (Japon) – Octobre 1998 (Europe) – 28 février 1999 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad*
*Joypads analogiques non supportés
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (1 bloc)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On pourrait émettre l’hypothèse que jouer à une borne d’arcade de onze ans d’âge n’était sans doute pas la priorité numéro un des possesseurs de PlayStation en 1998 – Irem aura visiblement pensé le contraire, et après tout, il est vrai que le jeu original n’avait toujours pas connu un portage pixel perfect à l’approche de la fin du siècle. On pourra grincer des dents quant à l’approche un peu pingre visant à ne proposer que les deux premiers épisode de la saga sur un CD-ROM qui aurait aisément pu contenir la série en intégralité, mais là n’est plus trop la question de nos jours, alors que vaut ce fameux portage ? Eh bien, comme convenu, c’est la copie conforme de la borne en termes de réalisation – aucun problème à ce niveau-là, même la version Sharp X68000 est enfoncée dans les grandes largeurs. Les options sont très, très maigres puisqu’on trouve juste un mode difficile (!) et un choix du nombre de vies, mais on remarquera également que les continues sont désormais illimités (encore heureux !) et surtout qu’il est possible d’activer une sauvegarde automatique qui vous permettra de reprendre votre épopée à partir du dernier niveau traversé plutôt que de reprendre systématiquement du début. Tant qu’à faire, les nombreux boutons de la manette sont mis à contribution, puisqu’il est possible d’en utiliser un pour le tir automatique et un autre pour le tir chargé. Bref, rien de bien révolutionnaire, mais exactement ce que pouvaient espérer trouver ceux qui venaient chercher la borne à laquelle ils rêvaient de rejouer depuis onze ans.

Le format de l’image n’est pas à 100% équivalent à celui de la borne, mais c’est vraiment la seule nuance qui existe

NOTE : 18,5/20

Cette version PlayStation de R-Type offre à peu près ce qu’on était en droit d’attendre, à savoir la borne à l’identique, avec en plus la possibilité de tempérer un peu la difficulté en activant une sauvegarde au début de chaque niveau. Autant dire un excellent compromis à une époque où il était un peu plus délicat qu’aujourd’hui de tenter à émuler la borne d’arcade.

Thunder Force III

Développeur : Technosoft Co., Ltd.
Éditeur : Technosoft Co., Ltd.
Titre original : サンダーフォースIII
Testé sur : Mega Drive
Disponible sur : Switch – Figure au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini
Également testé : Thunder Force AC sur : ArcadeSuper Nintendo

La saga Thunder Force (jusqu’à 2000) :

  1. Thunder Force (1983)
  2. Thunder Force II (1988)
  3. Thunder Force III (1990)
  4. Thunder Force IV (1992)
  5. Thunder Force V (1997)

Version Mega Drive

Date de sortie : 8 juin 1990 (Japon) – 7 novembre 1990 (Amérique du Nord, France)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Lorsque la Mega Drive débarqua enfin sur le sol européen à la fin de l’année 1990 (soit plus de deux ans après sa sortie au Japon, excusez du peu), elle pouvait se vanter d’être une des machines les plus puissantes disponible à la vente – et pour un prix très inférieur à ce que coutait un Amiga, un Atari ST, sans même parler d’un PC haut-de-gamme.

Des décors qui faisaient mouche en 1990

Alors que tout le vieux continent était encore plongé dans une frénésie 8 bits remportée haut-la-main par Nintendo, SEGA avait décidé de frapper un grand coup en s’appuyant sur un argument massue : la Mega Drive, c’était une salle d’arcade à la maison. Un argument que la ludothèque balbutiante de la console aura d’ailleurs eu grand peine à concrétiser avant l’année 1989 et l’apparition de portages – enfin ! – à la hauteur comme ceux de Ghouls’n Ghosts ou de Golden Axe.

Je peux vous dire que des sprites de cette taille-là, à l’époque, on n’en voyait pas souvent

Bref, autant dire que si cette affirmation s’était avérée un tantinet présomptueuse (et ce alors que s’avançait la Neo Geo qui était, elle, une vraie borne d’arcade), les choses avaient déjà changé – en bien – au tournant de l’année 1990, et qu’aux yeux des joueurs qui venaient à peine de quitter leur partie de Super Mario Bros. 3, l’illusion entretenue par des titres comme The Revenge of Shinobi ou M.U.S.H.A. était presque parfaite.

Le tir arrière vous sauvera la mise à de nombreuses reprises

Grâce à des sprites imposants, à une palette de couleurs infiniment plus riche et à des capacités sonores qui flattaient les oreilles (Oh ! Des voix digitalisées !), les premiers acquéreurs occidentaux de la machine de Sega pouvaient se décrocher la mâchoire tant Altered Beast, le jeu vendu en bundle avec la console, semblait effectivement proche de sa version arcade. À une époque où le VGA commençait à peine à faire son apparition sur PC, il faut comprendre que même les possesseurs de machines coutant parfois jusqu’à dix fois plus cher que la Mega Drive en prenaient plein les mirettes. Au milieu des très nombreux portages de jeux d’arcade qui allaient participer à la réputation de la console 16 bits de Sega, d’autres petites bombes venues faire étalage des capacités de la machine participèrent également à sa légende. Thunder Force III fit partie de la première fournée de jeux à venir nourrir le fantasme selon lequel la Mega Drive en avait suffisamment sous le capot pour rivaliser avec ce qui sortait dans les salles d’arcade de l’époque.

Graphiquement, le jeu en a dans le ventre

Nous avons donc affaire ici à un shoot-them-up à scrolling horizontal nous envoyant affronter un bio-ordinateur appelé ORM pour les habituelles raisons de sauvegarde de la galaxie.

Les boss sont très vite expédiés si vous êtes bien équipé

Dès l’écran-titre, la qualité sonore du jeu nous en envoie plein les oreilles, et c’est avec un certain enthousiasme que l’on s’apprête à lancer la partie en appuyant sur Start – l’écran des options nécessite une manipulation si complexe qu’il fait presque office de cheat code, et il n’y a malheureusement pas de mode 2 joueurs, on ne perd donc pas de temps. Le titre de Technosoft nous propose alors de choisir notre première destination parmi cinq planètes – qu’il faudra impérativement finir, dans n’importe quel ordre, avant de pouvoir accéder aux deux derniers niveaux puis au double-boss final. Un petit écran nous présente brièvement le nom de notre destination, son boss ainsi que le point faible de celui-ci, puis on entame la partie sans plus de préambule.

Le décor risque de vous coûter de nombreuses fois la vie

J’insiste ici brièvement sur l’année de sortie du jeu : 1990. Parce que je peux vous dire qu’à l’époque, la réalisation du jeu était très impressionnante. Tellement impressionnante, d’ailleurs, qu’elle le restait plusieurs années plus tard, et qu’il aura pratiquement fallu attendre la sortie de Thunder Force IV fin 1992 pour démontrer, une bonne fois pour toute, qu’il était possible de faire encore mieux sur la console de Sega. Visuellement, le jeu semble tirer parti d’à peu près tout ce que la Mega Drive a à offrir : les graphismes sont sublimes, rehaussés d’effets rarement employés à l’époque – comme la magnifique distorsion qui anime l’arrière-plan de Gorgon, la planète volcanique.

L’écran de choix de niveau vous permettra également d’anticiper l’opposition

Le jeu bouge très bien, n’hésite pas à vous faire subir des accélérations subites ou à changer le sens du scrolling, ni à noyer l’écran sous les tirs, les adversaires et les dangers venus du décor lui-même. Le plus impressionnant étant que le jeu reste, en toute circonstance, d’une fluidité à toute épreuve, et que vous n’aurez jamais à déplorer le plus infime effacement de sprite – visiblement, dès 1990, Technosoft avait déjà parfaitement apprivoisé la 16 bits de Sega. Ajoutez à cela une bande-son très pêchue, d’une efficacité redoutable et d’une grande variété (un thème différent par niveau et un thème différent par boss, on ne se fout pas de nous), avec des voix digitalisées claires – une rareté sur Mega Drive – et vous comprendrez rapidement que la concurrence de l’époque, qu’elle fut sur ordinateurs ou sur machines de salon, n’avait tout simplement pas les armes pour rivaliser. Pour ne rien gâcher, les environnements sont variés, explorant à peu près tous les isotopes récurrents – jungle, glace, lave, etc – sans oublier les grands classiques comme le niveau constitué d’un vaisseau géant à détruire, à la R-Type.

Admirez la vue !

Le gameplay en lui-même est d’une simplicité à toute épreuve – ce qui ne le rend pas moins bon, très loin de là. Les trois boutons du pad de la Mega Drive sont mis à contribution : A vous permettra de choisir la vitesse de votre vaisseau (car aller trop vite peut avoir des effets désastreux dans les espaces exigus, alors qu’au contraire, d’autres moments vous interdiront de lambiner), B correspondra au tir et C vous permettra d’alterner entre une des sept armes du titre, votre vaisseau commençant uniquement avec un tir avant et un tir arrière qui risquent de vite montrer leur limites avant que vous ne mettiez la main sur le reste de l’arsenal du jeu ou sur un des précieux bonus.

Un instant d’inattention peut vous coûter très cher

Ceux-ci versent également dans le classicisme : un module de deux satellites gravitant autour de votre vaisseau, un bouclier capable d’encaisser trois coups, et une vie, généralement placée dans des endroits particulièrement difficiles à atteindre. Mieux vaudra tirer parti de tout cela sans faire de faux pas, car votre vaisseau meurt au premier contact, et si la perte d’une vie ne vous fera pas recommencer le niveau, elle vous fera en revanche perdre vos satellites et l’arme que vous étiez en train d’utiliser.

On appréciera la variété des niveaux visités

La mémorisation du déroulement des niveaux sera, à ce titre, votre meilleure arme pour espérer survivre jusqu’au terme du jeu. Si Thunder Force III n’est ni particulièrement difficile, ni particulièrement long (le jeu peut se terminer en moins d’une demi-heure, mais je vous promets que celle-ci sera intense), attendez-vous à y laisser des plumes le temps d’assimiler les (très nombreuses) mauvaises surprises qui se dresseront sur votre route. L’un de vos pires ennemis sera d’ailleurs le décor : le jeu n’hésite pas à mettre en scène des pans entiers se rapprochant de vous, des scrollings changeant de sens sans prévenir, des projections de roche, de lave ou de glace, des goulets d’étranglements et autres obstacles contre lesquels vous serez pratiquement obligé d’aller vous emplafonner lors de leur première apparition.

Le Wave est un tir très pratique pour faire rapidement le ménage à l’écran

La vieille méthode du « rester aussi proche que possible du bord gauche de l’écran » est ici à proscrire, les ennemis arrivant régulièrement par derrière, ou par dessus, ou par en-dessous, ce qui fait que votre mobilité, encore bien d’avantage que vos tirs, sera la clé de votre survie à long terme. C’est bien simple : un trop grand manque de réactivité, et le titre de Technosoft aura vite fait de se transformer en die-and-retry, histoire de vous faire retenir à la dure qu’il faudra penser à éviter, lors de la prochaine partie, cette grande barre rocheuse contre laquelle vous vous êtes misérablement écrasé. On appréciera grandement, en revanche, le fait que toutes les armes du jeu soient en autofire : vous n’aurez besoin ni de matraquer votre innocent bouton B, ni d’investir dans une nouvelle manette afin d’éviter une lésion du pouce.

Les boss s’expédient hélas parfois un peu vite

Au final, on tient sans doute là l’un des tout meilleurs shoot-them-up de la Mega Drive – et peut-être même de toute la production vidéoludique au moment de sa sortie. Un jeu plaisant, nerveux, ni trop frustrant ni trop simple, apte à vous faire comprendre en quelques instants à quoi ressemblaient les rares titres capables de faire rêver tous les joueurs de l’époque.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1990 (Tilt n°85, décembre 1990) – Meilleur shoot-them-up (ex-aequo avec Battle Squadron)

NOTE FINALE : 17/20 Véritable démonstration technique au moment de sa sortie, Thunder Force III est également un shoot-them-up percutant et efficace qui aura immédiatement propulsé la Mega Drive au beau milieu de la cour des grands. Si sa réalisation impressionne naturellement nettement moins de nos jours, le jeu de Technosoft demeure un titre majeur de la machine de SEGA, un titre d'arcade jouissif aux mélodies mémorables et à la jouabilité nerveuse qui saura vous retenir pendant de nombreuses heures, le temps de parvenir à le dompter. CE QUI A MAL VIEILLI : – Les boss, et en particulier le dernier, sont trop simples quand on est bien équipé

Les avis de l’époque :

« La réalisation de Thunder Force est vraiment impressionnante, à tel point que l’on a parfois du mal à en croire ses yeux. Les graphismes sont tout simplement superbes, tant en ce qui concerne les sprites que les décors. (…) Un spectacle à couper le souffle ! S’il n’y avait que cela, on se lasserait assez vite de ce programme, mais ce n’est pas le cas, car la jouabilité est excellente et on se prend tout de suite au jeu. »

Alain Huygues-Lacour, Tilt n°81, Septembre 1990, 17/20

« Bien que son principe ne soit pas très original […], ce soft m’a enthousiasmé par son et sa superbe réalisation (Rhâââ, les monstres de fin de niveau !). Encore un jeu comme ça et je file m’acheter une Megadrive. »

Olivier Scamps, ibid.

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Thunder Force III sur un écran cathodique :


Version Arcade 
Thunder Force AC

Développeur : Technosoft Co., Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et trois boutons
Version testée : Version internationale
Hardware : SEGA System C-2
Processeur : Motorola MC68000 8,948862MHz
Son : SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; haut-parleur ; YM3438 OPN2C 7,670453MHz ; NEC uPD7759 640kHz ; 1 canal
Vidéo : 256 x 224 (H) 59,922743Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En dépit de son nom ronflant annonçant une version exclusive à l’arcade, Thunder Force AC se révèle bel et bien être une adaptation du Thunder Force III sorti sur Mega Drive et testé ci-dessus. Très bonne occasion, a priori, de réellement comparer les capacités de l’arcade avec celle de la console de Sega… sauf que le jeu a été porté sur le Sega System C2, à peu près équivalent en terme de hardware de celui de la Mega Drive. Ceux qui espéraient une orgie graphique et sonore encore plus impressionnante que celle livrée sur la console de salon en seront donc pour leurs frais : cette version arcade est graphiquement extrêmement proche de la version Mega Drive – au détail près que, pour une raison mystérieuse, l’interface a été déplacée au bas de l’écran. Niveau son, Thunder Force AC souffle le chaud et le froid : si les bruitages sont de meilleure qualité, et les digitalisations plus nombreuses (on appréciera ou non le « Oh, damn it ! » qui résonne à chaque fois que vous perdez une vie), la musique perd en revanche en dynamisme, et est globalement inférieure à celle de la version console. Un comble pour une borne d’arcade !

Graphiquement, on est loin d’être à des kilomètres de la version Mega Drive…

En terme de déroulement du jeu, on dira que ce Thunder Force là n’a pas changé de nom uniquement pour l’esbroufe. Si les différences entre les versions salon et arcade ne saute pas aux yeux dès le premier stage, cela n’empêchera pas de constater immédiatement que le choix des niveaux et l’écran chargé de les présenter sont désormais aux abonnés absents. De fait, même si on remarque quelques modifications mineures, quelques passages amputés – et un sentiment général qui laisse la désagréable impression que le jeu est devenu bizarrement beaucoup plus mou-du-genou – le véritable bouleversement n’intervient qu’à partir du niveau 4. Les planètes Haides et Ellis ont en effet subi une refonte totale : plus de niveau des glaces, plus de niveau des grottes, on se retrouve dorénavant avec un champ d’astéroïdes assez plan-plan avec un boss pas très inspiré, et un énième niveau mécanique au plan particulièrement retors et dont le décor risque de vous coûter cher – au sens propre, puisque l’on parle d’une borne d’arcade. Le jeu ne m’a pas paru plus difficile que la version console – les nouveaux niveaux peuvent être piégeux, mais je doute que cette version ait fait cracher beaucoup de pièces aux joueurs aguerris.

…mais on aura au moins l’occasion de s’essayer à d’autres niveaux

NOTE FINALE : 15/20

Grosse déception que ce Thunder Force AC, qui peine à retrouver le rythme et l’adrénaline de Thunder Force III sur Mega Drive. En fermant les yeux sur des coupes pas toujours très heureuses, on pourra néanmoins apprécier de découvrir des niveaux alternatifs qui font de cette version une curiosité à essayer pour les fans ayant retourné Thunder Force III, à défaut de mieux.

Version Super Nintendo
Thunder Spirits

Développeur : Technosoft Co., Ltd.
Éditeurs : Toshiba-EMI Ltd. (Japon) – Seika Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : 27 décembre 1991 (Japon) – Mars 1992 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Surprise : Thunder Force AC a également été porté – sans la participation de SEGA, cela va de soi – sur la machine concurrente de Nintendo, dès 1991. Si cette version n’est pas restée dans les mémoires, c’est tout simplement parce qu’elle reprend absolument toute la liste des faiblesses de la version arcade, en en ajoutant de nouvelles.

Le manque de place à l’écran va vous compliquer la vie. Sérieusement, observez ce pauvre boss qui arrive à peine à rentrer dans le cadre !

Tout d’abord, le jeu est graphiquement moins abouti que sur Mega Drive et sur arcade, malgré une palette plus étendue qui aurait dû autoriser la Super Nintendo à faire mieux que rivaliser. Plus que des couleurs, le plus gros problème vient de la résolution inférieure de la machine de Nintendo : les graphismes perdent énormément en finesse, et la surface de jeu s’en retrouve réduite de manière d’autant plus grotesque que personne n’a eu l’idée de diminuer la taille de l’interface. Remarque, trente secondes de jeu peuvent également aider à fournir une explication à cette surface de jeu réduite : visiblement programmé avec les pieds (et sévèrement bridé par un processeur anémique), ce Thunder Spirits accuse de nombreux ralentissements, et des effacements de sprites qui rappellent les pires heures de la NES. C’est bien simple : par endroits, pour peu qu’il y ait un peu trop de monde à l’écran, c’est tout bonnement injouable, et il n’est pas rare de se faire détruire par un tir qu’on n’avait même pas vu. Ultime faute de goût : plus d’autofire sur les tirs, attendez-vous donc à matraquer votre manette – cela l’abimera de toute façon moins que le nombre de fois où vous allez l’expédier contre le mur.

Incroyable mais vrai : dans cette version, on s’ennuie

Niveau sonore, ce n’est pas mieux : musicalement, ça ne rivalise pas avec la version Mega Drive, et les bruitages font pitié comparés à ceux de la version arcade. Dans l’ensemble, le gameplay est miraculeusement devenu d’une mollesse léthargique, et on passe plus de temps à pester contre le titre qu’à s’amuser.

NOTE FINALE : 13/20

Véritable pierre philosophale inversée apte à transformer l’or en plomb, cette version Super Nintendo est certainement le plus beau cadeau jamais fait à SEGA pour prouver que sa Mega Drive avait largement les moyens de lutter techniquement avec sa concurrente. Moins lisible, moins rapide, d’une mollesse dérangeante et au trois-quarts injouable, ce Thunder Spirits aura au moins eu le bon goût de changer de nom afin de ne pas salir la glorieuse saga dont il est issu. Ce qui fonctionne encore sonne le toc, et le framerate inconstant laisse plus que jamais le sentiment de jouer à un jeu qui n’a simplement jamais été pensé pour ce hardware.