Ninja Combat

Développeur : Alpha Denshi Kōgyō Co., Ltd.
Éditeur : SNK Corporation
Titres alternatifs : ニンジャコンバット (graphie japonaise), ACA NEOGEO NINJA COMBAT (collection Arcade Archives)
Testé sur : Neo Geo (MVS/AES)Neo Geo CD
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, PlayStation 4, Switch, Wii, Windows, Xbox One, Xbox Series X/S
En vente sur : Apple App Store (iPad, iPhone), Google Play (Android), Microsoft.com (Windows), Nintendo eShop (Switch), PlayStation Store (PlayStation 4), Xbox.com (Xbox One, Xbox Series)

Version Neo Geo (MVS/AES)

Date de sortie : 24 juillet 1990 (version MVS) – 1er juillet 1991 (version AES)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Un stick (huit directions) et quatre boutons (trois en usage)
Versions testées : Versions MVS et AES internationales
Hardware : Neo Geo MVS/AES
Processeurs : Motorola MC68000 12MHz, Zilog Z80 4MHz
Son : 2 hauts-parleurs – YM2610 OPNB 8MHz – 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 59,185606 Hz (résolution effective : 304×224)
Carte mémoire supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Si un improbable quizz demandait de trouver un point commun entre les jeux vidéo de la fin des années 80 et le cinéma Z hongkongais, quel serait-il ? Les bonnes réponses pourraient s’avérer plus nombreuses qu’on le pense au premier abord, en particulier du côté de l’action nanarde qui aura offert tant de beat-them-all sans idées, mais pour ma part le premier mot qui me viendrait à l’esprit serait « ninja ».

Ce groupe d’assassins et d’espions, largement emprunt de légendes, aura longtemps fourni un matériau inépuisable pour faire surgir un mélange de mystère, d’exotisme, d’organisation secrète et d’arts martiaux via des personnages d’autant plus badass qu’ils étaient souvent masqués et équipés de toute une quincaillerie qui aurait de quoi rendre jaloux Batman lui-même, du sabre aux kunai en passant par les inénarrables bombinettes à fumée pour disparaître de façon dramatique. Bref, le ninja, c’était du héros ou du méchant fourni clef-en-main, et la recrudescence des titres de type Shinobi, Shadow Warriors ou Hagane ne viendra pas démontrer le contraire – pas plus que les bisseries hilarantes façon Ninja Terminator ou l’Empire des ninja, pour clore le parallèle avec les films de Hong-Kong. Justement, peu après son lancement, la Neo Geo se cherchait des beat-them-all capables de démontrer ce qu’elle avait dans le ventre ; dès lors, ADK s’avança avec une idée de génie : Ninja Combat. Bon, peut-être que « de génie » était de trop – peut-être qu’« idée » aussi, d’ailleurs – mais quitte à aller castagner toute une ville, quels meilleurs candidats que les ninja ?

Il ne va d’ailleurs pratiquement être question que de cela ici, car les fameux assassins en pyjama (on ne me fera pas croire que ces types qui se baladent en plein jour dans des tenues couvrantes rouge vif ou bleu électrique sont des espions) sont aussi bien les ennemis que les héros, dans cette cartouche. Une mystérieuse tour apparue en ville vomit une armée maléfique sans but précis, il est donc temps pour les ninja Joe et Hayabusa d’aller enquêter à grands coups de pompe, allez hop, c’est bon on la garde.

L’enjeu n’a aucune importance, pas plus que l’identité du grand méchant ou ses motivations profondes : la seule chose qui compte, c’est qu’il y a sept niveaux à parcourir dans les habituels environnements urbains – avec quand même l’inclusion de cette fameuse tour féodale anachronique qui nous offrira quelques bribes d’une esthétique à la Sengoku avec sept mois d’avance. Des boss, des mini-boss, du menu fretin et suffisamment d’action pour meubler une demi-heure ; on sait ce qu’on vient chercher, la grande question est surtout de savoir si on l’obtient. Alors, Ninja Combat est-il amusant ? Assez oui, bien plus à mes yeux que des Burning Fight ou des Robo Army, et cela tient en grande partie à un détail incongru : le jeu d’ADK est un beat-them-all… qui n’en est pas complètement un.

En effet, si vos deux ninja (aux caractéristiques rigoureusement identiques, ils pourront être rejoint par d’autres alliés mais nous y reviendrons) peuvent ramasser les armes lâchées par les adversaires – lances, haches et autres nunchakus – pour faire le ménage au corps-à-corps, leur attaque de base est un lancer de shurikens suffisamment nerveux et frénétique pour rapprocher le gameplay du jeu de celui d’un run-and-gun. Ninja Combat est en effet un jeu où on a tout intérêt à chercher la distance, s’éloignant ainsi aux antipodes des canons du genre.

La bonne nouvelle, c’est qu’il est possible de faire de nombreuses combinaisons, notamment via les saltos accessibles sur le troisième bouton et qui, associés à une attaque au bon moment, vous permettront de vous livrer à un vol plané couvrant du terrain tout en faisant du dégâts à tout ce qui se trouve sur votre route. Signalons également la présence d’un attaque chargée qui fait le ménage à l’écran mais qui, comme dans Final Fight ou Streets of Rage II, vient puiser dans la jauge de vie de votre héros – un bon moyen de se sortir à peu de frais d’une situation qui vous aurait de toute façon demandé beaucoup plus d’énergie pour en ressortir vivant. Il y a également des power-up augmentant la vitesse et la puissance de vos attaques (et qui disparaitront à la première vie perdue, malheureusement, ce qui risque d’aller très vite), sans oublier une autre petite originalité : le fait que les mini-boss rencontrés, une fois vaincus, viennent rejoindre votre équipe à la fin du niveau. Non seulement cela vous offre un bon prétexte pour pouvoir changer de personnage en préambule de chaque stage, mais cela vous offre également d’autres façons de jouer, chaque équipier présentant ses forces et ses faiblesses.

De quoi compenser certains sacrifices dommageables, comme l’absence de chopes ou de projections, qui auraient aidé à rendre vos héros efficaces à toutes les distances. Comme souvent, Ninja Combat est un jeu pensé comme une borne d’arcade bien plus que comme une cartouche pour une console de toute façon largement inaccessible au commun des mortels – surtout à une époque où ses jeux n’étaient disponibles qu’à la location.

La difficulté est donc pensée d’un bout à l’autre pour vous faire cracher des pièces, et souvent de la façon la plus injuste qui soit, c’est à dire en faisant passer les attaques adverses au-dessus des vôtres ou bien en vous privant de frames d’invulnérabilité quand vous vous relevez. Pas de quoi rendre la difficulté intolérable, mais suffisamment frustrante pour qu’on ait le sentiment de ne jamais pouvoir profiter des bonus du jeu, condamné que l’on est de devoir mourir entre trois et cinq fois par minute face à des assauts contre lesquels on ne peut pas toujours grand chose. Les choses s’améliorent heureusement à deux, comme toujours, mais la bonne nouvelle est que l’action reste suffisamment prenante en solo pour qu’on ne se retrouve pas à regarder sa montre toutes les vingt secondes à cause d’un gameplay hyper-répétitif comme cela pouvait arriver dans les titres évoqués plus haut.

La réalisation graphique ne conviendra sans doute pas à tout le monde, la faute au look grotesque de vos personnages qui ressemblent à des caricatures ressortant de chez Wix plus qu’à des guerriers de la nuit, mais le jeu fait un véritable effort pour varier les environnements au sein d’un même niveau, et en dépit de la répétition des mêmes éléments, on n’a jamais l’impression d’être en train de reparcourir les mêmes rues jusqu’à la nausée.

On pourra d’ailleurs noter un (timide) effort de mise en scène encore inhabituel en 1990, avec des éléments arrivant en zoom depuis la profondeur ou vos personnages qui vont s’accrocher à des rames de métro avant de disparaître. Bref, si on ne tient certainement pas un chef d’œuvre, le titre a le bon goût de jouir d’une efficacité suffisante pour le rendre sympathique, et est donc un bien meilleur candidat à la petite-partie-pour-se-détendre-pendant-l’apéro que de nombreux autres représentants au sein de la ludothèque d’une machine qui n’aura jamais particulièrement brillé dans le domaine des beat-them-all. De quoi se défouler sans prise de tête pendant une vingtaine de minutes, en substance. Arrivé à un certain âge, c’est parfois exactement ce dont on a besoin.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 14/20 Entre le beat-them-all et le run-and-gun, Ninja Combat n'aura jamais réellement choisi son camp. C'est d'ailleurs surement sa meilleure idée, en fin de compte : le système de combat du jeu allie juste ce qu'il faut de technicité et de nervosité pour ne pas s'effondrer sous la répétitivité au bout de dix minutes comme c'était un peu trop souvent le cas avec les titres du genre. De fait, sans réelle trouvaille autre que le fait de recruter les mini-boss adverses après les avoir vaincus, le titre d'ADK n'en aurait pas moins été un jeu d'action extrêmement efficace s'il n'avait pas décidé d'être difficile pour de mauvaises raisons, préférant vous placer face à des boss conçus pour vous faire cracher votre argent durement gagné plutôt que de réellement mettre à contribution votre habileté ou votre mémoire. Avec un gameplay plus précis et mieux équilibré, ce Ninja Combat aurait vraiment pu côtoyer l'excellence, mais en l'état il demeure un titre sympathique pour une petite partie de temps en temps, de préférence avec un ami. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une difficulté pensée pour faire cracher des pièces... – ...et qui doit beaucoup à l'imprécision générale des combats – Recruter des mini-boss, c'est bien, mais ça aurait été encore mieux de pouvoir les jouer dès le début – Aucune chope ni projection

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Ninja Combat sur une borne d’arcade :

Version Neo Geo CD

Développeur : Alpha Denshi Kōgyō Co., Ltd.
Éditeur : Alpha Denshi Co., Ltd.
Date de sortie : 31 octobre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

On sait en règle générale à quoi s’attendre avec la Neo Geo CD, qui ne comptait de toute façon pas révolutionner la gamme de SNK sur le plan technique. Ninja Combat ayant l’avantage de ne pas être un monstre de technologie nécessitant des quantités astronomiques de mémoire – contrairement aux titres plus tardifs –, on le retrouve sous la forme à laquelle on pouvait s’attendre, à savoir : la version AES du jeu gravée sur un CD-ROM. Ce qui signifie qu’il n’y a pas l’ombre d’un écran des options – dommage, un choix de la difficulté n’aurait pas fait de mal ; mais bon, comme de toute façon les crédits sont illimités, ce sera au joueur de se fixer ses propres limites. Bref, si vous êtes capable de surmonter les quinze secondes de temps de chargement au lancement, vous devriez obtenir ici exactement ce que vous étiez venu chercher.

NOTE FINALE : 14/20

Simple clone, comme très souvent, de la version AES du jeu, Ninja Combat sur Neo Geo CD ne souffre d’aucune forme de coupe dans la transition, ce qui est sans doute ce qu’on pouvait espérer de mieux. Dommage qu’un menu des options n’ait pas fait son apparition.

Shadow Sorcerer

Développeur : U.S. Gold, Ltd.
Éditeurs : Strategic Simulations, Inc.
Titres alternatifs : Shadow Sorcerer : A DRAGONLANCE Role-Playing Adventure, Vol, 1 – Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product (titre complet – Europe), Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Shadow Sorcerer – An Animated Fantasy Adventure (titre complet – États-Unis), Advanced Dungeons & Dragons ® – The DragonLance Saga : Shadow Sorcerer (écran-titre)
Testé sur : AmigaAtari STPC (DOS)
Disponible sur : Windows – au sein de la compilation Silver Box Classics
En vente sur :
GOG.com (Windows) – Steam.com (Windows)

Les jeux tirés de la licence DragonLance de Donjons & Dragons (jusqu’à 2000) :

  1. Heroes of the Lance (1988)
  2. War of the Lance (1989)
  3. Dragons of Flame (1989)
  4. Champions of Krynn (1990)
  5. DragonLance : DragonStrike – Dragon Combat Simulator (1990)
  6. Death Knights of Krynn (1991)
  7. Shadow Sorcerer (1991)
  8. The Dark Queen of Krynn (1992)
  9. DragonStrike (1992)

Version Amiga

Date de sortie : Novembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français, italien
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.3 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
Système de protection de copie par roue codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’histoire retiendra que, des trois piliers sur lesquels SSI avait pensé bâtir son partenariat avec TSR au moment d’acquérir les droits de la licence Donjons & Dragons, deux seront tombés prématurément.

Celui qui devait être composé de logiciels d’assistance aux maîtres de donjons pour les parties papier n’aura même pas atteint les années 90, quant aux fameuses « silver boxes », qui devaient servir de pendant « action » aux célèbres boîtes dorées, elles n’auront finalement été qu’au nombre de trois : la trilogie située dans l’univers de LanceDragon publiée par U.S. Gold et qui, en dépit de bons chiffres de vente, n’aura finalement pas été amenée à se poursuivre, la cause en étant apparemment une dégradation des relations entre SSI et les studios anglais en charge du développement. En 1991, les choses avaient donc le mérite d’être claires : Donjons & Dragons ne donnerait plus naissance qu’à des jeux de rôles à court-terme, et la saga des Compagnons de la Lance trouverait sa conclusion avec Shadow Sorcerer, un titre qui, comme ses prédécesseurs, tendrait plutôt à démontrer que ce fameux « deuxième pilier » aurait probablement mérité de rester debout un peu plus longtemps.

Suivant une nouvelle fois le récit des romans imaginés par Tracy Hickman et Margaret Weis, Shadow Sorcerer entreprend de poursuivre l’aventure exactement là où Dragons of Flame l’avait laissée.

Le petit groupe de héros ressort donc de la forteresse de Pax Tharkas en triomphateur, avec le sentiment du devoir accompli… et un léger problème sur les bras : la présence des quelques 800 esclaves qu’il vient de libérer et qu’il peut d’autant plus difficilement abandonner à leur sort que les draconiens sont encore loin d’être vaincus –  l’armée qui poursuit les Compagnons de la Lance depuis la conclusion de Heroes of the Lance est toujours à ses trousses. Dès lors, pas question d’espérer disparaître dans la nature. Au terme d’une discussion nocturne, la solution se dessine : atteindre Thorbardin, le royaume où se sont retirés les Nains des Montagnes bien des années plus tôt. Rien ne dit que ceux-ci seront forcément disposés à accueillir 800 bouches à nourrir à bras ouverts, mais faute d’une meilleure alternative, c’est une nouvelle course contre la montre qui s’engage, avec la vie des nombreux (anciens) esclaves dans la balance. Encore faudra-t-il commencer par apprendre l’emplacement de Thorbardin et par gagner la confiance des Nains…

Shadow Sorcerer reprend donc, dans les grandes lignes, le principe de Dragons of Flame : une longue avancée vers le sud avec les draconiens sur vos talons. Si le concept n’a a priori que peu changé, on va rapidement réaliser que chacune de ses composantes a été revue et corrigée. La partie s’ouvre d’ailleurs sur une carte du monde en vue de dessus… laquelle est désormais divisée en hexagones, comme dans un jeu de stratégie, et présente surtout la nouveauté de vous être totalement inconnue au début de l’aventure : il faudra la révéler en avançant votre groupe, et donc l’explorer méthodiquement à la recherche de cachettes, de donjons, de butin… et surtout de nourriture.

Car, au cas où vous l’auriez oublié, la présence d’un deuxième groupe sur la carte en plus de celui que vous dirigez ne devrait pas tarder à vous rafraîchir la mémoire : vos héros ne sont plus seuls, ils ont 800 personnes sur les bras ! Ces fameux réfugiés s’efforceront globalement de vous suivre, à leur rythme (ce qui signifie qu’il s’arrêteront la nuit, une donnée à prendre en compte lors de vos explorations), mais comme vous allez rapidement le découvrir, ils sont menés par plusieurs personnes n’ayant pas toujours la même idée sur la marche à suivre, et il pourra arriver que leurs opinions divergent et que certains décident d’arrêter de vous accompagner – particulièrement si les vivres viennent à manquer. Il va donc non seulement falloir assurer leur protection, mais aussi savoir les convaincre, quitte à les menacer… ou sombrer dans les calculs les plus cyniques en décidant que, si la moitié d’entre eux décident d’aller se faire massacrer en tentant leur chance de leur côté, cela fera toujours plus de nourriture pour les survivants. Moins héroïque, hein ?

La carte est donc remplie d’emplacements cachés que vous devrez aller explorer en quête de nourritures, d’informations où d’éléments vitaux à la progression de l’intrigue, ce qui donnera lieu à un changement de vue. Surprise : le beat-them-all en vue de profil des deux précédents opus a disparu pour laisser la place à une vue isométrique où vous pourrez cette fois contrôler vos quatre personnages en même temps, lors d’affrontements en temps réel qui ne sont pas sans évoquer une sorte de brouillon rudimentaire des affrontements de Darklands ou surtout de Baldur’s Gate !

Il est donc possible de déterminer un comportement donné pour chacun de vos héros, lesquels se débrouilleront ensuite globalement tout seuls pendant les rencontres, même si vous pourrez toujours leur donner des ordres, naturellement. Le concept, appelé à un brillant avenir, doit en revanche ici composer avec deux limites : le fait qu’il soit impossible de donner des instructions lorsque le jeu est en pause, ce qui serait pourtant très utile dans des situations où on doit gérer quatre personnages, dont deux lanceurs de sorts, en même temps, et surtout le fait que le programme soit doté d’un pathfinding absolument catastrophique qui fait que demander à un aventurier de se déplacer sur une case située immédiatement à côté de lui exigera souvent plusieurs essais – sans même parler de l’envoyer à l’autre bout de l’écran. Dès lors, on se dit que les développeurs ont peut-être péché par orgueil en imaginant des salles remplies d’obstacles, de rochers et de pans de murs, car croyez-moi, vous allez passer beaucoup plus de temps que ce que vous auriez aimé à tenter de faire voyager votre groupe d’un point A à un point B !

On touche d’ailleurs là à ce qui rend le titre assez difficile d’accès lors des premières parties : son interface datée, et ses mécanismes qui accusent leur âge. Bien que le titre soit intégralement jouable à la souris, les conventions de 1991 n’étaient pas exactement celles d’aujourd’hui, et mieux vaudra s’attendre à tâtonner un long moment avant de parvenir à faire accomplir à notre coterie ce qu’on attend d’elle – ce qui se révèle souvent extrêmement fastidieux, d’une façon qui passait pour novatrice et originale à l’époque mais qui apparait aujourd’hui assez frustrante.

Le meilleur exemple en étant d’ailleurs fourni par les réfugiés, lesquels peuvent se mettre à faire absolument n’importe quoi lorsque la nourriture vient à manquer – ce qui arrivera extrêmement vite tant que vous ne connaîtrez pas l’emplacement des caches de nourriture de la carte. Le jeu est censé intégrer un mécanisme de négociations avec les esclaves, mais comme on ne sait jamais à qui on parle, on essaie souvent un peu au hasard, et la partie « exploration » du jeu devient nettement moins agréable quand on doit passer la moitié de son temps à aller courir derrière les réfugiés pour les remettre sur le droit chemin, et cela même alors que les draconiens rodent ! Autant dire que certaines parties peuvent virer au cauchemar à cause de ces réfugiés trop capricieux : on voudrait jouer à Donjons & Dragons, et on se retrouve dans un épisode de Benny Hill !

Il en résulte donc qu’à l’instar de ses prédécesseurs, Shadow Sorcerer est un titre difficile à noter : c’est incontestablement un jeu ambitieux au potentiel indéniable, mais beaucoup de choses qui passaient comme une lettre à la poste en 1991 risquent aujourd’hui de laisser bien des joueurs sur le carreau, tant on n’a plus nécessairement l’habitude de devoir consacrer son énergie à maîtriser l’interface et à comprendre comment contourner les limites de l’intelligence artificielle pour parvenir à accomplir la partie intéressante de l’aventure sans avoir à constamment composer avec le boulet à la cheville que représentent les réfugiés et leur comportement pas toujours très rationnel.

Avec le recul, il n’y a rien de surprenant à ce que des milliers de joueurs aient pu ressentir un coup de foudre immédiat en découvrant l’aventure à sa sortie : le mélange exploration/combat/visite de donjons/événements scriptés est assurément mieux pensé que dans Dragons of Flame, et on sent souvent qu’on n’est vraiment pas loin d’un véritable petit chef d’œuvre. Néanmoins, la lourdeur du maniement, les nombreuses limites du gameplay (surtout pendant les combats, où on passe beaucoup plus de temps à se battre contre le jeu que contre les ennemis) et l’intégration pour le moins problématique de la gestion des réfugiés (dont vous pouvez également choisir de ne pas vous préoccuper du tout, aussi surprenant que cela puisse paraître) risquent de réserver le logiciel, hors nostalgiques, à des joueurs prêts à sacrifier une bonne heure de leur vie à réussir à se sentir véritablement à l’aise. Beaucoup risquent de souffler et de passer à autre chose bien avant d’avoir mené l’aventure à son terme, mais ceux qui mordront au concept pourraient découvrir un jeu sur lequel ils passeront quelques très bons moments. Le mieux est donc de laisser une chance à ce Shadow Sorcerer en sachant dans quoi vous vous engagez, et qui sait, si jamais le concept fait « clic », vous pourriez bien en tomber amoureux, finalement, de cette ultime « silver box ».

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14/20 « Laborieux » est certainement le terme qui définirait le mieux Shadow Sorcerer aujourd'hui ; un titre profondément original et véritablement rempli de bonnes idées, le seul problème étant que la plupart d'entre elles subissent de plein fouet l'âge et par extension le manque d'ergonomie de l'interface. Mener un groupe de réfugiés à travers une carte gigantesque avec des donjons à visiter, de l'équipement à trouver, des combats à mener – et surtout des provisions à dénicher en nombre pour assurer la survie de vos protégés – est réellement un concept prenant qui hurle à chaque instant le logiciel fantastique qu'il aurait pu produire... et qui, malheureusement, donne trop souvent l'impression de jouer du violon avec des moufles. Ah, si seulement le maniement de votre groupe était plus naturel, si seulement les combats ne se limitaient pas les trois quarts du temps à regarder vos personnages se débrouiller tout seuls, et surtout si ces @#$%!!! de réfugiés ne se comportaient pas parfois comme des lemmings capricieux, on aurait peut-être un des mélanges d'exploration, de stratégie et de jeu de rôles parmi les plus ambitieux et les plus emballants de la période. Si certains joueurs parmi les plus patients pourront avoir un énorme coup de cœur, beaucoup d'autres décideront que le jeu n'en vaut pas la chandelle, et on ne pourra pas leur en vouloir. À essayer.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une prise en main qui risque de nécessiter un détour par le manuel... – ...notamment à cause d'une interface tout sauf naturelle à la souris ou au joystick... – ...et d'un pathfinding vraiment pas à la hauteur – La gestion du groupe de réfugiés le plus pénible de tous les temps... – ...avec des allers-et-retours constants pour lui dire où aller – Des combats qui se déroulent plutôt mieux quand on ne s'en mêle pas

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Shadow Sorcerer sur un écran cathodique :

Version Atari ST

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : Strategic Simulations Inc.
Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français, italien
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Installation sur disque dur supportée
Système de protection de copie par roue codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Je ne pense pas apprendre quelque chose à quiconque en énonçant le fait que les versions Amiga et Atari ST des jeux vidéo de la période étaient souvent développés en parallèle, d’où des portages très proches, quand ils n’étaient pas rigoureusement identiques.

Une assertion qui se vérifie avec Shadow Sorcerer, puisqu’on a affaire à une copie pixel perfect de ce qui a été vu sur Amiga ; strictement rien n’a bougé, pas même le thème musical de l’écran qui, comme vous pourrez l’entendre sur la vidéo, offre un rendu exactement équivalent à celui qu’on pouvait entendre via la puce Paula. Bref, voici au moins une version qui n’aura pas fait de jaloux au sein des amigaïstes et des ataristes : match nul strict et indiscutable.

NOTE FINALE : 14/20

Shadow Sorcerer n’aura pas laissé l’ombre de la plus petite plume en étant porté sur Atari ST : c’est rigoureusement le même jeu que sur Amiga, au pixel et à la note de musique près. Les fans de la machine qui souhaiteraient découvrir la dernières des « silver boxes » pourront donc le faire sans se sentir lésés.

Version PC (DOS)

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : Strategic Simulations Inc.
Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français, italien
Supports : Dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 420ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster
Système de protection de copie par roue codée*
*Version disquette uniquement

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les versions PC des deux précédentes « silver boxes » s’étaient avérés des portages très solides, ne péchant que par les teintes un peu plus criardes de la palette de l’EGA et par une réalisation sonore qui faisait avec ce qu’elle avait – mais qui n’avait de toute façon que peu de choses à faire passé l’écran-titre.

Le temps passant, ce troisième et dernier épisode de la trilogie aura vu le jour fin 1991, c’est à dire à une période où la machine d’IBM avait de moins en moins de raisons de nourrir des complexes face à l’Amiga et à l’Atari ST, et cela se voit : cette fois, le jeu gérant le VGA, rien à dire sur les teintes choisies qui sont exactement les mêmes que dans les autres versions (on pourra pinailler sur le fait que les 256 couleurs auraient permis de faire encore bien mieux, mais après tout, la version Amiga elle-même était alignée sur les seize couleurs de la version ST, donc on ne pourra pas arguer d’un traitement de faveur). Comme souvent, la musique MIDI fait légèrement moins bien que la musique digitalisée des deux autres versions, même avec une Roland MT-32 (le rendu est d’ailleurs plutôt meilleur avec une AdLib ou une Sound Blaster), mais encore une fois, cela demeure très anecdotique, et les bruitages ne souffrent pas de la comparaison. Bref, c’est quasi-intégralement le même jeu, même s’il profite du bonus d’une configuration plus puissante qui pourra rendre les commandes un peu plus réactives – et c’est de toute façon la seule version encore en vente à l’heure actuelle, mais vous ne devriez vraiment pas avoir à le regretter.

NOTE FINALE : 14/20

Pas de mauvaise surprise pour la version PC de Shadow Sorcerer, qui délivre une performance équivalente à celle des itérations ST et Amiga. Seule la réalisation sonore peut éventuellement apparaître comme légèrement inférieure, et encore, c’est une question de goût. Si jamais vous souhaitez découvrir le jeu aujourd’hui, inutile d’aller faire la tournée des brocantes : la version dématérialisée sur PC fera parfaitement l’affaire.

Shadow Dancer : The Secret of Shinobi (Mega Drive)

Cette image provient du site https://segaretro.org

Développeur : SEGA Research & Development Dept. #2
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titres alternatifs : シャドーダンサー ザ・シークレット・オブ・シノビ (graphie japonaise), Shadow Dancer : Le Secret du Shinobi (écran-titre – traduction française par Terminus Traduction)
Testé sur : Mega Drive
Disponible sur : Linux, Macintosh, Wii, Windows
Présent au sein de la compilation : SEGA Mega Drive Collection (PlayStation 2, PSP)
Disponible au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini 2
En vente sur :
Steam.com (Linux, Macintosh, Windows)

La saga Shinobi (jusqu’à 2000) :

  1. Shinobi (Arcade) (1987)
  2. The Revenge of Shinobi (1989)
  3. Shadow Dancer (1989)
  4. Shadow Dancer : The Secret of Shinobi (Mega Drive) (1990)
  5. The Cyber Shinobi (1990)
  6. Shinobi (Game Gear) (1991)
  7. Shinobi II : The Silent Fury (1992)
  8. Shinobi III : Return of the Ninja Master (1993)
  9. Shinobi X (1995)

Version Mega Drive

Date de sortie : 1er décembre 1990 (Japon) – Décembre 1990 (États-Unis) – Mai 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne patchée en français
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On aura souvent eu l’occasion de se gausser, en ces pages, du lancement japonais magistralement raté de la Mega Drive ; c’est pourquoi il importe peut-être également de rappeler que SEGA n’aura pas eu que des mauvaises idées lors de l’existence de sa célèbre console 16 bits.

Chercher à présenter la machine comme une alternative à l’arcade tout en commençant par y porter des titres qu’elles n’avaient absolument pas les capacités matérielles à faire tourner à l’identique en était une, certes, mais en dépit de quelques conversions objectivement réussies considéré leur date de sortie (Altered Beast ou Golden Axe, par exemple), la meilleure voie empruntée par la firme japonaise aura sans doute été celle des exclusivités. Ainsi, la Mega Drive n’avait peut-être pas eu droit à son portage de Shinobi, mais elle aura reçu The Revenge of Shinobi à la place – et le mieux, c’est qu’elle était très loin d’y perdre au change. On se souvient également qu’un titre comme ESWAT pouvait se vanter d’être arrivée sur la console dans une version revue et corrigée supérieure à celle de la borne, et que la machine aura finalement préféré, tout au long de sa vie, héberger des Golden Axe II et autres Super Fantasy Zone plutôt que de se mêler à la masse des portages de ses propres licences, avec un succès certain qui tendait à démontrer que c’était bien le joueur qui en ressortait gagnant. Parmi les incarnations de cette philosophie, il est temps de s’intéresser à Shadow Dancer, qui aura une nouvelle fois choisi le chemin de la singularité.

Dans l’absolu, le concept n’a pas changé : vous êtes toujours aux commandes du héros du premier opus,une nouvelle fois confronté à un syndicat du crime maléfique – lequel a pour symbole un lézard, parce que bon, le dragon était déjà pris. Cela ne change rien à l’objectif principal, à savoir aller le vaincre avec l’aide de votre chien de combat au terme des cinq niveaux du jeu, et la jouabilité n’a d’ailleurs pas évolué d’un micron depuis la borne.

En revanche, petite nuance : il y aura une nouvelle fois des otages à aller secourir avant d’espérer clore un stage, ce qui tend plus que jamais à faire de ce Shadow Dancer un Shinobi II qui ne dirait pas son nom – voire un Shinobi 1.5 tant le principe semble n’avoir pas évolué en-dehors de l’acquisition par Joe Musashi d’un nouveau costume et d’un compagnon canin. Un reproche qu’on aurait déjà pu faire à la borne, laquelle, en dépit de ses qualités, apparaissait parfois comme un peu trop à court d’idées pour parvenir à assumer le nom de la saga – sauf que, bonne nouvelle, ce qui peut définir cette version Mega Drive, c’est précisément le retour d’une forme d’ambition et d’efficacité qui manquaient à la version arcade.

Premier changement notable : Joe aura revu son parcours vers le maléfique chef du syndicat (qui a d’ailleurs changé d’identité en même temps d’objectif) et se sera chargé de le rendre un peu plus… disons, marquant.

Là où le parcours essentiellement urbain de la borne d’arcade avait parfois un côté furieusement générique, avec ses rues et son aéroport, on sent ici que le pseudo-futur dans lequel se déroule l’action (censée avoir lieu en 1997) aura pu servir de prétexte à lâcher un peu les chevaux : le jeu s’ouvre par exemple à l’intérieur d’une ville en flammes, avec des geysers ardents qui s’échappent des bouches d’égouts, et offre l’occasion de gravir rien de moins que la statue de la liberté elle-même lors d’un niveau dédié ! Tant qu’à faire, on retrouve le pont et les cavernes de la version arcade, mais on peut désormais y ajouter des séquences un peu plus originales, comme celle qui vous fait alterner entre zones éclairées et zones d’ombre où vous ne pourrez pas voir la position des adversaires. Rien de bien révolutionnaire, mais juste ce qu’il faut pour être régulièrement surpris et avoir véritablement envie de découvrir la suite du programme – soit précisément ce qui manquait à la borne, où les développeurs semblaient parfois être arrivés à court d’idées quelque part après avoir ajouté le chien.

Surtout, l’équilibrage et le level design retrouvent l’efficacité qui a toujours fait la force de la saga. Aucun ennemi n’est jamais placé au hasard, et chaque problème a sa solution – à tel point que le fameux chien se montre finalement rarement utile… du moins au début. On notera d’ailleurs que le défi, déjà assez exigeant, est réglé par défaut sur son niveau « facile » – qui devrait déjà avoir de quoi vous garder occupé.

Mais, comme une incitation à redécouvrir l’aventure aux niveaux supérieurs, les modes « normal » et « difficile » bénéficient chacun de leur écran-titre dédié, allant jusqu’à ajouter un numéro, le mode « normal » devenant Shadow Dancer II et le mode « difficile » Shadow Dancer III ! On remarquera également une option permettant de jouer sans les indispensables shurikens pour s’obliger à ne composer qu’avec le sabre ; bref, de quoi pousser les amateurs les plus dévoués à re-parcourir le jeu en boucle en le redécouvrant à chaque fois. La réalisation est également très réussie pour un titre de 1990 – peut-être pas tout-à-fait au niveau de The Revenge of Shinobi, qui était indiscutablement le plus beau titre de la console au moment de sa sortie, mais on appréciera l’abondance de défilements différentiels, sans oublier quelques thèmes musicaux particulièrement efficaces. En résumé, largement de quoi offrir une expérience mieux rythmée, plus variée et plus finement équilibrée que celle de la borne – et tout simplement un meilleur jeu. Si jamais vous souhaitez découvrir la « véritable » expérience Shadow Dancer, c’est sans doute ici qu’il vous faudra tenter votre chance.

Quelques mots sur la traduction française de Terminus Traduction : elle a le mérite d’exister, ce qui n’était pas une nécessité pour un jeu de ce type.

Même si on sent, comme trop souvent avec les traductions de fans de la période, un certain manque de maîtrise de la langue avec quelques maladresses évitables (la ville en « flamme », au singulier…), au moins a-t-elle le mérite d’offrir ce qu’on aurait bien aimé trouver de façon plus systématique à l’époque, à savoir un jeu dont l’interface et les cinq lignes de scénarios ont été traduites en français. Parfait pour aider votre enfant à découvrir ce à quoi vous jouiez lorsque vous aviez son âge – et pour en profiter pour chercher les fautes avec lui.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 17/20 En débarquant sur Mega Drive, Shadow Dancer, désormais sous-titré The Secret of Shinobi ne se sera pas contenté de devenir un (nouvelle) exclusivité pour la console de SEGA ; il aura surtout apporté avec lui la plupart des idées et de la variété qui manquaient à la borne d'arcade. C'est désormais un titre très efficace reproduisant quasiment à l'identique le gameplay du premier Shinobi, le chien représentant plus que jamais un bonus ne se révélant utile que dans des situations extrêmement précises, mais justement, tout est là : c'est une fois encore le très bon level design qui fait toute la différence. Chaque combat est comme une petite énigme récompensant autant la mémoire que la planification, et les fans de die-and-retry ne trouvant pas le jeu assez exigeant dans sa difficulté par défaut pourront choisir de l'augmenter, voire même de s'interdire l'emploi des shurikens. Bref, il y a quelque chose pour pratiquement tous les amateurs d'action/plateforme, et la précision impeccable de la jouabilité permet à la cartouche d'avoir excellemment vieilli. Un jeu clairement supérieur à la borne, et une autre très bonne aventure pour un ninja qui a si peu déçu.

CE QUI A MAL VIEILLI : – On n'aurait pas nécessairement craché sur un niveau supplémentaire, allez... – Un chien qui ne révèle vraiment son utilité que dans les difficultés supérieures

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Shadow Dancer sur un écran cathodique :

Death Knights of Krynn

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeurs : Strategic Simulations, Inc.
Titre alternatif : Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Death Knights of Krynn – A DRAGONLANCE Fantasy Role-Playing Epic, Vol. II (titre complet)
Testé sur : PC (DOS)AmigaCommodore 64PC-98
Disponible sur : Linux, Macintosh, Windows
Présent au sein des compilations :

  • Advanced Dungeons & Dragons : Collector’s Edition (1994 – DOS)
  • Advanced Dungeons & Dragons : Collector’s Edition Vol.2 (1994 – DOS, Linux, Macintosh, Windows)
  • Dungeon & Dragons : Krynn Series (2015 – Linux, Macintosh, Windows)


En vente sur : GOG.com (Linux, Macintosh, Windows) – Steam.com (Linux, Macintosh, Windows)

Les jeux tirés de la licence DragonLance de Donjons & Dragons (jusqu’à 2000) :

  1. Heroes of the Lance (1988)
  2. War of the Lance (1989)
  3. Dragons of Flame (1989)
  4. Champions of Krynn (1990)
  5. DragonLance : DragonStrike – Dragon Combat Simulator (1990)
  6. Death Knights of Krynn (1991)
  7. Shadow Sorcerer (1991)
  8. The Dark Queen of Krynn (1992)
  9. DragonStrike (1992)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris*
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko**
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Cartes sonores supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), haut-parleur interne, Tandy/PCjr
*Souris incompatible avec le mode Tandy
**640ko requis pour le mode Tandy

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Parfois, l’objectif d’un jeu vidéo est d’être l’exact contraire d’une surprise. Innover, explorer de nouvelles possibilités de gameplay, renverser la table pour tout repenser depuis le début, c’est toujours très aguichant sur le papier, mais il arrive aussi – et beaucoup plus régulièrement qu’on ne le pense – que ce ne soit absolument pas ce que les joueurs attendent.

La grande force des « gold boxes » de SSI, par exemple, était précisément d’être conçues comme des modules de Donjons & Dragons tirant partie des mêmes règles, des mêmes univers et de la même interface, à destination des mêmes machines. Dès lors, personne n’attendait – personne ne réclamait – un bouleversement et une nouvelle idée géniale à la façon de ceux qui pouvaient définir chaque nouvel épisode d’une série comme celle des Ultima : l’idée, c’était surtout de pouvoir reprendre ses personnages et de continuer leurs aventures à peu près au point où on les avait laissés. Cela tombe bien, c’était très exactement le projet de Death Knights of Krynn : reprendre les événements de Champions of Krynn juste après leur conclusion et continuer à faire la même chose, mais dans de nouveaux lieux, face à de nouveaux monstres, aux commandes de héros plus puissants.

Voici donc nos glorieux héros propulsés un an après la (courte) séquence de fin du premier opus – soit à peu près la durée séparant la sortie des deux jeux. Il est bien évidemment possible de créer une nouvelle équipe à partir de zéro, laquelle commencera alors à un niveau adapté à l’aventure, mais on ne va pas se mentir : le titre est avant tout pensé pour être parcouru avec l’équipe du précédent épisode que vous aurez importée via une option en jeu (et rassurez-vous : vous n’aurez pas besoin de sortir une vieille disquette pour la version dématérialisée, il suffira de copier les fichiers de vos personnages dans un répertoire dédié après les avoir sorti du groupe).

Alors que vous assistez à une cérémonie en hommage aux morts tombés lors du combat contre Myrtani, à l’extérieur de l’avant-poste de Gargath, surgit rien de moins que le cadavre ressuscité de Sir Karl, désormais un chevalier de la mort à la tête d’une armée de morts-vivants et vous dévoilant le nom de votre nouvel ennemi (lequel vous avez déjà été soufflé lors de la conclusion de la première aventure) : Lord Soth, avant de s’enfuir avec la LanceDragon que vous aviez confié aux chevaliers de son ordre. Stupeur : il va donc être temps de se pencher sur cette nouvelle menace un peu sortie de nulle part, et mieux vaudra préparer vos clercs : comme vous l’aurez sans doute deviné, l’opposition sera cette fois composée surtout de liches, de revenants, de squelettes et autres zombies et un peu moins de dragons et autres dérivés à écailles.

Au moment de lancer la partie, le moins qu’on puisse dire est que les joueurs ayant fait leur classe sur Champions of Krynn (ou sur à peu près n’importe quel épisode des « gold boxes », pour être honnête) ne seront pas dépaysés : l’interface n’a pour ainsi dire pas évolué d’un micron, à quelques très rares adaptations de confort près (par exemple, vos personnages se souviendront désormais du dernier adversaire visé lors des combats).

Ce qui signifie donc qu’elle est toujours aussi lourde et bénéficie toujours aussi peu de l’apport de la souris, mais les habitués n’y feront probablement même plus attention. Évidemment, inutile d’attendre une nouvelle classe ou des possibilités étendues – ce n’est clairement pas le programme. Une continuité qui se retrouve d’ailleurs, de façon un peu moins emballante, au niveau de la réalisation, qui continue de s’afficher dans un EGA de plus en plus anachronique en 1991 – à titre de comparaison, rappelons qu’un certain Eye of the Beholder, également publié par SSI, voyait le jour le même mois, en jouant dans une toute autre catégorie en termes d’ergonomie, de graphismes ou de son. D’ailleurs, non seulement la réalisation n’a pas progressé en un an, mais elle a même trouvé le moyen de régresser, le jeu ne reconnaissant même plus la Roland MT-32 ! Bref, à vous les joies des illustrations en seize couleurs et du haut-parleur interne pour seul accompagnement sonore pendant les combats, même s’il faut noter qu’il arrive à présent que la musique se fasse entendre de façon extrêmement ponctuelle au cours de la partie.

On touche d’ailleurs là du doigt ce qui représente à la fois la limite et l’intérêt de ce Death Knights of Krynn : c’est littéralement Champions of Krynn 1.5, exactement comme l’étaient les suites de Pool of Radiance vis-à-vis du premier opus. Le genre de titre qui serait aujourd’hui commercialisé sous la forme d’un DLC à dix euros, avec ses limites, mais qui offre finalement exactement ce qu’on était venu y chercher.

Il faut d’ailleurs reconnaître qu’en-dehors d’enjeux un peu confus au tout début de la partie et d’un scénario qui n’est jamais franchement passionnant, le jeu se défend au moins aussi bien que son prédécesseur, notamment parce que l’aventure est plus longue et que la carte croule littéralement sous les quêtes secondaires là où le premier opus n’en offrait qu’une poignée. Il y a même un donjon réservé aux joueurs ayant terminé le jeu accessible à l’extrémité nord-ouest de la carte ; une forme de contenu « post-endgame » comme on n’en voyait pas encore beaucoup en 1991 ! Néanmoins, on peut facilement comprendre que l’absence totale de nouveauté puisse décourager des joueurs attendant quelque chose d’un peu plus neuf qu’une nouvelle louche de la même chose, et même si les combats sont toujours aussi bons – imposant plus que jamais de prêter une attention particulière aux lanceurs de sorts adverses – ceux qui estimeraient avoir fait le tour de la question n’auront absolument aucun argument pour les retenir. Que cela soit dit : Death Knights of Krynn est un bon jeu de rôles, mais qui ne s’adresse qu’aux joueurs sachant exactement ce qu’ils viennent chercher. Pas de quoi effrayer un rétrogamer, mais certainement pas de quoi convertir un réfractaire aux « gold boxes » non plus.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20 Death Knights of Krynn est un titre qui ne cherche jamais à être davantage que ce qu'il est, à savoir la continuation directe de Champions of Krynn – en bien comme en mal. En dépit d'une aventure aux enjeux et à la navigation plus confus, et surtout dont l'interface et la réalisation technique commençaient à être furieusement dépassées en 1991, le titre assure l'essentiel avec un contenu plus conséquent que celui de son prédécesseur, une exploration encore un peu plus satisfaisante et un système de combat toujours aussi prenant. Les fans de Donjons & Dragons désireux de poursuivre les aventures de leurs personnages créés dans le premier opus pourront foncer sans se poser de question, en regrettant à peine l'absence de réelles nouveautés et la lourdeur de l'interface, tant la formule demeure efficace ; ceux qui estimeront avoir eu leur compte de « gold boxes » ou qui attendraient quelque chose d'un peu plus neuf qu'une nouvelle fournée de villes, de donjons et d'affrontements risquent en revanche de faire la moue et d'aller voir ailleurs.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un moteur qui n'a pas avancé d'un poil depuis l'épisode précédent – il a même reculé ! – Un scénario qui met beaucoup de temps à présenter un vague intérêt... – ...et des objectifs assez flous au début de la partie

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Deaths Knights of Krynn sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeur : Strategic Simulations Inc.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Septembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supporté : OCS/ECS

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’Amiga avait hébergé ce qui peut être considéré comme la meilleure version de Champions of Krynn ; ce nouvel épisode devrait aboutir exactement au même résultat – et pour les mêmes raisons.

Évacuons rapidement la question du contenu : comme on pouvait s’en douter, il n’a pas changé d’un iota, il est toujours possible d’importer ses personnages du précédent opus, et l’interface à la souris n’est plus vraiment une avancée puisqu’elle est également disponible sur PC. Une nouvelle fois, c’est surtout la réalisation qui fait la différence : les couleurs sont mieux choisies que celles de l’EGA, les teintes sont moins agressives, le tout est nettement plus convaincant, et on dispose une nouvelle fois des sprites de personnages qui n’avaient pas fait le trajet sur PC et qui permettront de reconnaître vos unités en un clin d’œil sans avoir à passer un quart d’heure à les concevoir morceau par morceau. Niveau sonore, si la musique n’a rien d’inoubliable (et se fait entendre aussi rarement que sur PC), on appréciera de profiter des mêmes bruitages digitalisés que pour le premier épisode. Bref, aucune révolution, mais quitte à découvrir le jeu, c’est toujours un peu plus agréable de le faire sur Amiga.

NOTE FINALE : 16/20

Comme pour le premier épisode, c’est une nouvelle fois de par sa réalisation que cette version Amiga de Death Knights of Krynn se distingue : quelques couleurs de plus, des teintes mieux choisies et une réalisation sonore plus convaincante, et c’est tout le jeu qui est (un peu) plus agréable à jouer. Si vous avez commencé votre épopée sur Amiga lors de l’opus précédent, vous n’aurez aucune raison de le regretter ici.

Version Commodore 64

Développeur : Strategic Simulations Inc.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Comme on peut l’imaginer, en 1991, le Commodore 64 n’était plus exactement la plateforme de développement prioritaire des « gold boxes » – Death Knights of Krynn serait d’ailleurs le dernier épisode de la trilogie à être porté sur la machine de Commodore. Cela se ressent lors des rares illustrations du jeu, qui commencent à sentir les transpositions fainéantes (et pas toujours réussies) depuis la version PC.

Pour le reste, on sait à quoi s’attendre, le moteur n’ayant pratiquement pas changé depuis le précédent opus – ni même depuis Pool of Radiance, pour être honnête. Il faudra donc composer avec l’inévitable lourdeur de l’interface – pas de souris ici, naturellement – avec des changements fréquents de disquette et avec des temps de chargement qui rendent une partie nettement plus chronophage que sur les ordinateurs 16 bits. Autant dire que cette version se destine aujourd’hui exclusivement à des nostalgiques du C64, qui devront en plus tirer un trait sur l’idée de prolonger l’aventure dans The Dark Queen of Krynn, mais cela n’en fait pas un mauvais jeu pour autant – juste un titre plus lent et plus contraignant, à l’image d’une époque où 64ko représentaient une bonne quantité de mémoire vive.

NOTE FINALE : 14,5/20

Peu de surprises à attendre pour un portage de Death Knights of Krynn qui commençait furieusement à ressembler à un chant du cygne pour les « gold boxes » sur Commodore 64. Techniquement, le jeu est un pur décalque de son prédécesseur, et si l’aventure est plaisante à parcourir, elle reste plus agréable à vivre sur les ordinateurs 16 bits.

Version PC-98

Développeur : Opera House Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 20 août 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Modes sonores supportés : FM, MIDI

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Comme son prédécesseur, Death Knights of Krynn aura eu le droit à sa version PC-98 – assuré une fois de plus par l’équipe d’Opera House. C’est une nouvelle fois du côté de la réalisation qu’il va falloir aller chercher les nuances, le contenu n’ayant bien sûr pas changé. À ce niveau, cette version souffle un peu le chaud et le froid ; commençons par ce qui fonctionne le mieux, à savoir la réalisation sonore.

Ce portage est le seul qui offre des thèmes musicaux pendant toute l’aventure, et la reconnaissance du standard MIDI peut donner des résultats assez réjouissants avec le matériel idoine – je vous laisse écouter le rendu de l’écran-titre, c’est quand même plus impressionnant que ce qu’on pouvait entendre avec une CMS ou sur Amiga ! Du côté graphique, les choses sont moins réjouissantes : si le titre utilise bel et bien une résolution supérieure et une palette plus étendue que sur PC, les illustrations sont… eh bien, moches, faute de talent, et le moteur de jeu fait cohabiter des sprites en haute définition avec des décors en basse résolution, d’où une intégration pas très harmonieuse. Ça n’est pas dramatique, mais disons que c’est moins cohérent que ce qu’on peut voir sur Amiga, par exemple. Dans l’ensemble, le jeu est de toute façon strictement le même, à vous donc d’arrêter votre choix en fonction de vos préférences esthétiques… à condition, bien sûr, de savoir lire le japonais.

NOTE FINALE : 16/20

Performance en demi-teintes pour Death Knights of Krynn sur PC-98, qui peine à tirer le meilleur de la résolution native de la machine. En revanche, la réalisation sonore est déjà plus enthousiasmante, et l’interface comme le contenu font jeu égal avec les autres versions 16 bits. Une alternative intéressante à réserver aux joueurs parlant japonais.

Pool of Radiance

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Titre alternatif : Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Pool of Radiance – A FORGOTTEN REALMS Fantasy Role-Playing Epic, Vol. I (titre complet)
Testé sur : Commodore 64PC (DOS)Apple IIMacintoshAmigaNES
Versions non testées : PC-88, PC-98, Sharp X1
Disponible sur : Linux, Mac OS X, Windows
Présent au sein des compilations :

  • The Forgotten Realms Archives (1997 – PC (DOS))
  • Forgotten Realms : The Archives – Collection Two (1999 – PC (DOS))
  • Dungeons & Dragons : Forgotten Realms – The Archives Collection 2 (2015 – Linux, Mac OS X, Windows)

En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

La série Pool of Radiance (jusqu’à 2000) :

  1. Pool of Radiance (1988)
  2. Curse of the Azure Bonds (1989)
  3. Secret of the Silver Blades (1990)
  4. Pools of Darkness (1991)

Version Commodore 64

Date de sortie : Août 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Système de protection de copie par roue codée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Joel Billings n’aimait pas les jeux de rôles.



Pour tout dire, il n’avait joué à Donjons & Dragons qu’une seule et unique fois dans sa vie – pas très longtemps, juste assez pour qu’un maître du donjon visiblement pressé n’extermine la totalité de son groupe d’aventuriers avant même qu’il n’ait le temps de saisir les tenants et les aboutissants du genre. Son verdict avait alors été lapidaire : « C’est le jeu le plus stupide que j’aie jamais vu ». Cela avait sonné la fin de l’expérience, et rien ne l’aura jamais encouragé à la ré-entreprendre depuis lors.

Son opinion quant aux jeux de rôles était donc fermement arrêtée au moment où il fonda Strategic Simulations, Inc. en 1979. En fait, il est même possible qu’elle se soit radicalisée par la suite, tant la décennie qui s’annonçait n’allait faire que traduire une tendance qui n’était pas faite pour enchanter le fan de stratégie qu’il était, à savoir le déclin progressif du wargame en tant que genre (alors surtout pratiqué au format papier) au profit… eh bien, du jeu de rôles, justement.

Par une tragique erreur de timing, il se trouva que la fondation de SSI avait correspondu précisément au début de la fin pour le jeu de stratégie – un constat plutôt ennuyeux pour une entreprise dont c’était le secteur d’activité assumé et revendiqué. Comme un symbole, TSR –  la compagnie fondée par Gary Gygax et Dave Arneson, les créateurs de Donjons & Dragons – aura racheté SPI, le numéro deux américain des jeux de stratégie, en 1982, avant de le conduire à la faillite en un temps record via une gestion catastrophique, tout en plombant au passage le magazine Strategy & Tactics. Décidément, c’était comme si les deux genres ne s’appréciaient pas, et s’étaient même déclaré une guerre que les jeux de rôles étaient en train de remporter haut-la-main. Autant dire que les perspectives n’étaient pas des plus riantes, pour SSI.

Ironiquement, ce qui allait se dessiner comme la réponse à tous les problèmes de Joel Billings se matérialisa sur son bureau, un beau jour de 1983. Il s’agissait – tenez-vous bien – d’un jeu de rôles, un titre programmé par Charles et John Dougherty appelé Questron, dont l’interface et le système de jeu étaient alors si lourdement inspirés d’Ultima que présenter leur programme à ORIGIN Systems dans l’espoir de le voir commercialisé n’avait valu aux deux frères que la menace d’un procès, brandie par Richard Garriott lui-même, si jamais ils osaient publier leur logiciel. Confronté à la popularité grandissante du genre, Joel prit néanmoins le risque de l’éditer après s’être arrangé avec Garriott. Le constat, à la sortie du jeu, en août 1984, s’avéra particulièrement frappant : avec ses 35.000 copies vendues, Questron se révéla comme le plus grand succès de la jeune histoire de SSI, et de très loin.

Les années suivantes ne firent que confirmer ce que le jeu des frères Dougherty avait annoncé : les jeux de rôles se vendaient beaucoup, beaucoup mieux que les jeux de stratégie. Si tous n’établissaient pas des ventes record, des titres comme Phantasie et ses deux suites, ou encore Wizard’s Crown ou Roadwar 2000, franchirent allègrement la barre des 40.000 exemplaires vendus, un chiffre que les wargames de la firme n’approchaient – à l’exception du tabac inattendu de Wargame Construction Kit en 1986 – pratiquement jamais.

Dès lors, on peut comprendre que l’annonce en 1986 selon laquelle TSR était enfin prêt à céder les droits de Donjons & Dragons – LA référence absolue en termes de jeu de rôles, celle que tout le monde voulait acquérir – après des années à s’être refusé à le faire, n’ayant prêté le nom qu’à deux obscures cartouches sur Intellivision pouvant difficilement être considérées comme des RPGs – ait résonné comme une occasion à ne rater à aucun prix pour SSI. En dépit de la concurrence de géants comme Electronic Arts ou ORIGIN Sytems – au minimum une dizaine de compagnies – la petite firme de cinq employés remporta finalement la timbale, grâce à une ambition que n’avait dévoilée aucun de ses concurrents : celle de développer toute une série de jeux, et même trois séries distinctes, autour de la licence. Le partenariat fut annoncé en juin 1987, et sa manifestation la plus fiévreusement attendue devait être la toute première boîte dorée, le premier jeu de rôles à s’appuyer sur les règles officielles de la licence : Pool of Radiance. Une entreprise démesurée, colossale… et qui aura mis dans le mille à pratiquement tous les niveaux.

La grande force du jeu, c’est précisément de se présenter exactement comme ce que les joueurs en attendaient, à savoir une campagne de Donjons & Dragons à part entière – et, histoire de bien sceller la coopération entre SSI et TSR, celle-ci aura même été accompagnée d’un roman et d’un module papier à sa sortie. L’aventure se déroule dans l’univers des Royaumes Oubliés, soit le plus « commun » (certains diront le plus générique) de tous, et demande à votre groupe pouvant compter jusqu’à six aventuriers de participer à la libération et à la reconstruction de la ville de Phlan, laquelle s’accomplira quartier par quartier, avec des objectifs spécifiques délivrés directement par le conseil de la ville, et vous enverra même visiter toute la région environnante – ce qui signifie d’autres villes, des forteresses, des grottes, une pyramide… un menu déjà très copieux pour un jeu développé sur Commodore 64.

La première friandise consistera d’ailleurs en la création de vos personnages : choix de la classe, de l’alignement, tirage des caractéristiques, customisation du portrait et de l’icône qui représenteront chaque membre de votre coterie en jeu… le tout se passe exactement comme lors d’une partie de jeu de rôles papier normale, ce qui signifie également qu’il est impossible de modifier un jet de dés sans recommencer tout le processus. Une option permettant d’éditer vos personnages avant de les lancer en jeu est bel et bien présente, mais n’allez pas croire que donner 18 à toutes vos statistiques soit sans conséquence : le programme adaptant la puissance de certaines rencontres à celle de votre groupe, réfléchissez bien avant de vous faire des surhommes – cela se paiera à un moment ou à un autre ! Puis la partie débute par une visite guidée de la ville pour vous présenter les principaux services – y compris des centres d’entrainement pour faire monter vos héros de niveau car, seule entorse aux règles, le procédé sera ici payant – et vous voilà lâché avec l’autorisation d’aller à peu près n’importe où, seul l’accès à la baie entourant la ville vous étant interdit tant que vous n’aurez pas « nettoyé » la forteresse de Sokal.

Pacifier les différents quartiers de la ville nécessitera souvent, comme vous pouvez l’imaginer, de remporter un certain nombre de combats scriptés (avec parfois un nombre donné de rencontres aléatoires) avant de pouvoir vous promener et vous reposer librement sans risquer de vous faire sauter dessus par une patrouille adverse. Une bonne occasion d’aborder ce qui sera sans doute resté comme la plus grande qualité du système de jeu des « gold boxes » : les combats en eux-mêmes. Pratiqués au tour par tour, avec une représentation fidèle des environs immédiats de la case où se situe l’affrontement et de chaque personnage ou adversaire présent, les confrontations parviennent à matérialiser avec une précision réjouissante la totalité des règles de la licence, en n’hésitant pas à vous opposer à des dizaines d’ennemis, sinon à des centaines !

Les amateurs de combats stratégiques seront ici aux anges : c’est clairement l’attraction principale du jeu, et l’aspect qui demeure le plus réjouissant à expérimenter au fur-et-à-mesure de votre montée en puissance. Croyez-moi, vous allez véritablement avoir l’impression de découvrir un autre logiciel à partir du moment où vos magiciens seront capables de lancer des boules de feu ! Et tous les joueurs rodés aux premières éditions des règles retrouveront vite leurs marques, en particulier en apprenant à sur-abuser du très pratique sortilège de sommeil, qui peut mettre hors jeu jusqu’à neuf créatures d’un coup tout en les plaçant dans un état de vulnérabilité signifiant qu’elle pourront être tuées en un coup. On se régale véritablement de ces rencontres, et même si certaines règles ont été intégrées de façon boiteuse (la régénération des trolls, par exemple), on touche là à la quintessence absolue du genre en 1988, et à des affrontements qui ont merveilleusement vieillis si on les compare à la concurrence de l’époque.

L’autre bonne nouvelle, c’est que même si le curseur a naturellement été placé du côté des combats, Pool of Radiance n’oublie pas d’être un jeu de rôle en vous laissant prendre des décisions, parlementer avec les monstres, fouiller des pièces à la recherche de trésors, et résoudre des quêtes de la façon qui vous conviendra – en faisant parfois preuve d’une ingéniosité assez réjouissante. Par exemple, envoyé secourir le fils d’un dignitaire de la ville retenu en otage dans un camp de pirates, allez-vous choisir l’épreuve de force en attaquant bille en tête des forces très supérieures en nombre ? Ou bien allez-vous acheter un passe, aller confronter le chef du camp, vous débarrasser discrètement de lui, aller ouvrir un enclos pour provoquer le chaos et profiter de la confusion pour aller chercher l’otage sans donner l’alerte ? Tout cela est prévu, et met merveilleusement à contribution les possibilités de l’interface, donnant réellement envie de progresser pour découvrir la suite.

Évidemment, l’âge du jeu introduit également un certain nombre de lourdeurs, en particulier du côté de l’interface intégralement au clavier ou au joystick où accomplir n’importe quoi demande beaucoup de temps – attendez-vous à passer dix bonnes minutes dans un magasin chaque fois que vous irez faire votre shopping. Énormément d’informations ne sont disponibles que dans les divers manuels et addenda du jeu, préparez-vous donc à devoir lire et assimiler toutes ces données si vous n’êtes pas familier avec les règles de Donjons & Dragons.

C’en est d’ailleurs à un stade où le titre intègre TROP d’aspects de la licence, au point d’en faire parfois un mécanisme de protection de copie à part entière. Il faudra par exemple composer avec pas moins de cinq types de monnaies différents, chacune avec sa valeur et son taux de change, et surtout… avec son poids. Oui, le jeu gérant l’encombrement, vous reconnaîtrez un groupe avancé au fait qu’il abandonne régulièrement de véritables trésors sur le terrain faute de pouvoir porter les dizaines de kilos de pièces d’or ou d’argent qui s’offrent à lui ! Plus grave : les races du jeu ne sont pas égales face à la progression. Traduit en clair : si les humains peuvent progresser sans restrictions, un nain ne pourra pas dépasser le niveau neuf, un elfe le niveau onze (pour un magicien) ou sept (pour un guerrier), et un semi-homme, quant à lui, ne pourra même pas dépasser le niveau six (la classe de voleur étant la seule à ne connaître aucune limite) ! Si cela n’est que modérément pénalisant à l’échelle du jeu (même si on peut imaginer la frustration de ne plus pouvoir monter en puissance dans un jeu de rôles), je vous laisse imaginer à quel point le problème ne fait que devenir de plus en plus ridicule tandis que vous importerez votre groupe dans les trois épisodes suivants de la saga, où les humains pourront progresser à des niveaux quasi-divins pendant que certains membres du groupes resteront bloqués au niveau cinq ! Et puis ne mentionnons pas le bonheur d’avoir à composer avec des monstres qui pourront absorber vos niveaux, ni le fait que les sorts de résurrection échouent parfois, vous laissant avec un personnage définitivement perdu et impossible à récupérer…

Bref, tout n’est pas nécessairement idyllique dans Pool of Radiance, mais il faut reconnaître qu’une fois les principaux chausse-trappes évités, on prend authentiquement plaisir à découvrir chacune des zones du jeu et à parvenir à vaincre d’un claquement de doigt des affrontements qui auraient proprement exterminé notre groupe lors des premières heures de jeu.

C’est clairement un jeu pour les fans de Donjons & Dragons – cela n’a jamais été un mystère pour personne au moment de la commercialisation du titre, mais mieux vaut insister sur cet aspect à une ère où les joueurs familiers avec les règles avancées de la moitié des années 80 sont sans doute devenus nettement moins nombreux. Mais une fois cette donnée assimilée, on a bel et bien affaire à une transcription d’une rare intelligence des règles et des mécanismes de la licence, avec des combats qui pourraient encore donner pas mal de leçons à certains représentants actuels du genre. Si vous cherchez un logiciel sur lequel engloutir des nuits, quitte à consacrer de longues et douloureuses heures à assimiler toutes les possibilités et à dompter l’interface, ce premier opus des « gold boxes » demeure à n’en pas douter l’un des tout meilleurs. Pas nécessairement ce qu’on ait connu de plus ergonomique ni de plus accessible, mais clairement un programme d’exception dès l’instant où l’on a pris ses marques… et où l’on n’a pas peur de passer beaucoup, beaucoup de temps à se battre. Clairement un passage obligé pour les rôlistes qui voudraient avoir goûté à toutes les références-clefs de la période.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE : une large partie des informations figurant dans cet article, en particulier celles tournant autour de l’histoire de SSI et de TSR, proviennent de l’excellente série d’articles que leur a consacré Jimmy Maher en 2016. Je ne peux qu’encourager les anglophones curieux d’en savoir plus sur Donjons & Dragons ou sur les « gold boxes » à aller les dévorer de ce pas.

NOTE FINALE : 16/20 Les joueurs attendaient comme le messie, depuis presque une décennie, ce fameux jeu de rôle adapté des règles officielles de Donjons & Dragons. Pool of Radiance sera parvenu à être le titre que tout le monde attendait, en retranscrivant avec une rigueur quasi-fanatique les règles du jeu et l'univers des Royaumes Oubliés, tout en transformant les contraintes imputables aux limitations techniques du Commodore 64 en éléments de gameplay d'une rare intelligence. Tout fonctionne à merveille, dans le logiciel de SSI, y compris un système de quête ouvert très bien conçu, et surtout des combats qui représentent à la fois le plat de résistance et le mécanisme le mieux intégré du jeu. Alors certes, l'interface intégralement au clavier ou au joystick fait son âge, et tout prend beaucoup de temps – surtout dans une adaptation qui se veut si réaliste qu'il faut prendre en compte jusqu'au poids de la monnaie. De quoi freiner sans doute le néophyte, enseveli sous les règles et probablement écrasé lors des premiers combats le temps de prendre ses marques ; mais pour les amateurs invétérés des premières éditions de Donjons & Dragons, on n'aura pour ainsi dire jamais fait mieux jusqu'à Baldur's Gate. Un vrai jeu de rôle à l'ancienne pour engloutir des dizaines d'heures.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une fidélité aux règles de Donjons & Dragons qui va parfois à l'encontre du jeu en lui-même – Une interface très lourde à l'usage – Une surabondance de combats particulièrement longs... – ...et où il est impossible d'accélérer le tour de l'adversaire – Une difficulté qui ne fera aucun cadeau aux néophytes – Une protection de copie envahissante – Une valse permanente entre les huit faces des quatre disquettes du jeu

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Pool of Radiance sur un écran cathodique :

Version PC (DOS)

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Octobre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version dématérialisée (1.3) émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 384ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Cartes sonores supportées : Tandy/PCjr
Système de protection de copie par roue codée
*512ko requis pour le mode EGA, 640ko requis pour le mode Tandy
Programme de configuration accessible au premier lancement du jeu – le réinitialiser demande la suppression du fichier « pool.cfg »

Le PC aura été la première machine à bénéficier d’un portage de Pool of Radiance – comme un symbole, elle d’ailleurs restera comme le seul système à avoir accueilli la totalité des « gold boxes ». En 1988, on ne s’attendait pas spécialement à des miracles du côté de la réalisation : du côté du son, c’est même le minimum vital, puisqu’il n’y a plus du tout de thème musical lors de l’écran-titre, et que le jeu ne reconnait aucune carte sonore. On notera néanmoins que les bruitages sont sensiblement mieux rendus sur Tandy, alors que les graphismes, eux, y seront moins détaillés qu’en EGA – les joueurs utilisant DOSBox n’auront heureusement aucun choix cornélien à opérer, l’émulateur autorisant tout à fait un haut-parleur Tandy à cohabiter avec une carte EGA.

Graphiquement, justement, si on sent immédiatement que la réalisation part sur la même base que la version originale sur Commodore 64, avec des teintes quasi-identiques, les illustrations sont plus fines, tous comme les sprites de vos personnages et des différents monstres, et les décors sont plus détaillés (du moins en EGA). L’interface, pour sa part, n’a pas changé, et il est impossible d’utiliser une souris – cela serait appelé à être corrigé dans les futurs épisodes, mais ici, ce sera le clavier ou rien. Fort heureusement, la reconnaissance du pavé numérique rend la navigation nettement moins contraignante que sur Commodore 64.

Évidemment, l’une des spécificités de cette version PC est la puissance des processeurs actuels : selon vos réglages, le jeu pourra aller très vite, ce qui rendra certes les combats difficilement lisibles lors du tour de l’adversaire, mais vous permettra d’écourter dramatiquement les temps d’attente – à vous, donc, de choisir comment régler DOSBox en fonction de vos attentes en la matière. Et tant qu’à faire, pas question ici de changer de disquette à chaque fois que vous voudrez aller dans un autre quartier ou sauvegarder la partie. Pour le reste, si vous cherchez la version la mieux réalisée et la plus accessible du jeu, vous serez sans doute plus à l’aise sur Macintosh ou sur Amiga, mais cette version PC reste très solide, et c’est la seule qui soit disponible à la vente à l’heure actuelle sans aller écumer les brocantes ou les ventes ruineuses sur eBay.

NOTE FINALE : 16,5/20

Sans surprise, Pool of Radiance se sent comme un poisson dans l’eau sur PC, où il peut profiter d’une résolution supérieure et d’un processeur plus puissant pour offrir une navigation plus confortable. En revanche, la date de développement du jeu signifie aussi qu’il n’y aura pas grand chose à attendre du côté sonore et qu’il ne faudra pas non plus espérer tirer parti de la souris. Rien d’insurmontable pour les fans de Donjons & Dragons.

Version Apple II

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Mars 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquettes 5,25″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette (1.1) testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple IIe – OS : Aucun – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : Haute résolution
Système de protection de copie par roue codée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Quitte à programmer sur Commodore 64, il aurait été malvenu de faire l’impasse sur un autre ordinateur 8 bits très populaire – particulièrement auprès des rôlistes – à savoir l’Apple II. Sans surprise, si on assiste à deux versions au contenu et à l’interface très proche, c’est principalement du côté des graphismes et de la réalisation sonore que ce portage laisse quelques plumes.

Comme sur PC, il n’y a pour ainsi dire plus de musique (on rappelle qu’elle était de toute façon cantonnée à l’écran-titre sur Commodore 64), mais cette fois, pas question de profiter d’une résolution plus élevée, et encore moins d’une palette de couleurs plus étendue. Même si le titre s’efforce de rester lisible, les combats deviennent plus confus à cause du manque de couleurs, et vous risquez déjà d’avoir toutes les peines du monde à créer huit sprites aisément identifiables les uns des autres pour incarner votre groupe. Heureusement et même s’il faut toujours compter avec une valse des disquettes (huit faces différentes à gérer, comme sur Commodore 64), le titre demeure largement jouable sans avoir à se sentir trop pénalisés par les limitations de la machine. Néanmoins, on ne va pas se mentir : dès l’instant où vous avez accès à virtuellement n’importe quelle autre version du jeu, ce portage perd immédiatement une large part de son intérêt.

NOTE FINALE : 15/20

Porté sur Apple II, Pool of Radiance y transpose à peu près toutes les lourdeurs de la version Commodore 64 tout en perdant également en lisibilité. Sans doute pas de quoi effrayer des rôlistes, surtout parmi les habitués de la machine, mais clairement pas la version la plus accessible ni la plus confortable pour qui souhaiterait découvrir le logiciel aujourd’hui.

Version Macintosh

Développeur : Level Systems, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Octobre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur iMac G3
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – RAM : 1Mo*
Système de protection de copie par roue codée
*2Mo requis pour la version couleur

S’il est un domaine où le Macintosh de la fin des années 80 décevait rarement, c’était bien celui du jeu de rôle. Avec ce portage de Pool of Radiance, on commence par hériter d’une partie des qualités traditionnelles des jeux sur la machine, à commencer par le multi-fenêtrage, l’intégration à l’OS et surtout l’interface tirant pleinement parti de la souris – de quoi rendre la prise en main un tout petit peu plus conviviale. En revanche, du côté de la réalisation, le titre souffle clairement le chaud et le froid : c’est certes plus fin, donc plus lisible, mais on sent immédiatement que les sprites lors des combats n’ont pas fait l’objet du même soin que les illustrations des feuilles de personnages. Quant à la vue 3D lors des déplacements, elle est là aussi assez décevante, avec les graphismes de la version PC simplement passés en noir et blanc. Le plus surprenant vient de la version couleur, qui demeure en très grande partie monochrome, avec juste la vue 3D et la carte du monde qui passe en couleurs – et encore, pour reprendre les teintes de la version EGA ! Bref, ceux qui espéraient être ébahis par la réalisation risquent d’être déçus, et la jouabilité en elle-même n’a rien de plus extraordinaire que ce qu’on pourra trouver sur Amiga, mais au moins le contenu n’a-t-il pas bougé.

NOTE FINALE : 16/20

« Légèrement décevante » sont sans doute les deux mots qui décrivent le mieux cette version Macintosh de Pool of Radiance, dont la jouabilité à la souris et l’interface modulable ne font pas totalement oublier la réalisation paresseuse, avec des combats et des illustration qui resteront en noir et blanc même dans la version couleur. L’essentiel, mais sans aucune fioriture.

Version Amiga

Développeur : Ubi Soft Entertainment Software
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
Système de protection de copie par roue codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il aura fallu attendre la fin de l’année 1990 pour voir Pool of Radiance daigner débarquer sur Amiga – un ordinateur, il est vrai, largement délaissé par les développeurs américains. Pour l’occasion, histoire de remettre un peu la réalisation à jour, c’est Ubi Soft qui aura hérité du portage et qui aura, reconnaissons-le, fait du très bon travail.

Bien évidemment, le contenu n’a pas changé d’un iota, en revanche, le jeu est désormais intégralement jouable à la souris, et la commande « move » a d’ailleurs disparu de l’interface puisqu’il suffit désormais de déplacer le curseur sur la fenêtre de jeu pour choisir dans quelle direction se déplacer. Deuxième bonne nouvelle : les graphismes ont également été revus à la hausse : les couleurs sont mieux choisies et moins agressives sur la vue 3D, et les illustrations sont bien plus belles lors des écrans fixes. Pour ne rien gâcher, le thème musical du jeu (d’ailleurs extrêmement sympathique) se fait enfin entendre au-delà de l’écran-titre, lors des phases de campement ou en prélude des combats. Bref, c’est encore un peu plus jouable, c’est encore un peu plus beau, et sachant que la totalité des quatre épisodes de la saga auront été portés sur Amiga, vous n’avez vraiment aucune raison de bouder cette excellente version si jamais vous avez la chance de mettre la main dessus.

NOTE FINALE : 17/20

D’accord, elle se sera faite un peu attendre, mais cette version Amiga de Pool of Radiance peut se revendiquer comme étant la meilleure sans trop de débat. La réalisation graphique est meilleur, le thème musical va vous rester en tête, et la jouabilité à la souris allège un peu l’interface. Que du bonheur.

Version NES

Développeur : Marionette Co., Ltd.
Éditeur : FCI
Date de sortie : 28 janvier 1991 (Japon) – Avril 1992 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 6Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La NES constituant pratiquement un passage obligé pour à peu près tout ce qui avait une chance de tourner dessus jusqu’à ce que la génération 16 bits s’impose définitivement, on ne sera pas surpris outre mesure d’apprendre qu’elle aura eu le droit à son portage de Pool of Radiance. Étant donné l’ambition du titre original, on pouvait s’attendre à quelques coupes, et celles-ci ont bel et bien lieu : par exemple, le groupe du joueur ne peut plus désormais contenir que cinq membres, certaines combinaisons de classes ne sont plus possibles (oubliez les guerriers/voleurs, sauf si vous voulez y adjoindre en plus la classe de magicien), on ne choisit plus les icônes ni les portraits de ses personnages, etc.

Néanmoins, ces sacrifices demeurent relativement mineurs, et la bonne nouvelle est que l’essentiel du jeu, lui, est toujours là, pratiquement à l’identique – avec une interface à deux boutons moins lourde que celle au clavier, sans amputer pour autant aucune des possibilités du jeu. Le titre vous affiche les informations pertinentes lorsqu’elles sont requises ; ainsi, vous verrez les dégâts de votre arme au moment de vous en équiper. La gestion de l’argent a été simplifiée (il n’y a plus qu’un seul type de monnaie, et désormais les fonds sont communs à tout le groupe), son poids n’est plus géré, etc. Objectivement, des choix qui fluidifient le jeu plus qu’ils ne le pénalisent. En revanche, les graphismes tendent à être moins variés que sur ordinateurs, et s’affichent constamment dans des nuances olivâtres pas très emballantes, mais il n’empêche qu’on a bel et bien un RPG occidental très solide sur une cartouche d’ailleurs assez imposante pour l’époque. Bref, sans doute pas la version la plus complète ni la plus agréable à l’œil, mais pour qui souhaiterait découvrir la saga sans composer avec toutes ses lourdeurs, il y a largement pire que ce très bon portage.

NOTE FINALE : 15/20

En dépit de quelques inévitables sacrifices, dont certains fluidifient finalement le gameplay plus qu’ils ne l’affaiblissent, Pool of Radiance sur NES est une conversion très solide qui ne se moque pas des joueurs. Même si les puristes fonceront immédiatement sur les versions sur ordinateurs, les amateurs de RPG souhaitant découvrir une expérience un peu plus accessible sans tirer un trait sur l’essentiel du système de jeu devraient trouver leur compte avec ce portage.

Combat (Atari)

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Titres alternatifs : 01 Combat (étiquette de l’édition originale), Combate (Brésil), Front Line (édition Zellers), Tank-Plus (édition Sears Tele-Games)
Testé sur : Atari 2600
Disponible sur : Plex Arcade, Windows, Xbox 360

Version Atari 2600

Date de sortie : 14 octobre 1977 (États-Unis) – 1978 (Royaume-Uni) – 1er septembre 1981 (France)
Nombre de joueurs : 2
Langue :
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 16kb

S’il prenait à quelqu’un la fantaisie de réunir dans une pièce des joueurs ayant découvert l’Atari 2600 à son lancement, au moins deux constatations évidentes ne tarderaient pas à se dessiner :

  1. La moyenne d’âge serait probablement largement au-dessus de cinquante ans, un chiffre qui ne fera qu’augmenter au fur et à mesure que cet article commencera, lui aussi, à vieillir
  2. De manière plus intéressante (et moins déprimante), les premiers titres à être évoqués seraient sans doute ceux des licences majeure attribuables à Atari, tels Missile Command, Centipede ou Battlezone ou, de façon plus ironique, des grands noms de la production japonaise portés sur la console, tels Space Invaders ou Pac-Man.

De façon très injuste, pourtant, un nom mettrait sans doute beaucoup de temps à sortir. Je dis « de façon très injuste », car on parle ici d’un titre qui figure parmi les plus joués de la machine, et que l’imaginaire collectif a souvent congédié pour une série de raisons qui vaudraient déjà la peine d’être discutées, mais au sein desquelles je retiendrai personnellement les deux suivantes : la première, c’est qu’il s’agit d’un jeu sans scénario ni contexte ou l’ennemi n’est ni une armée extraterrestre ni une horde de fantômes mais simplement le joueur tenant le deuxième joystick, le logiciel ne pouvant être pratiqué seul. Et la deuxième, c’est qu’il s’agit d’un acquis, d’une sorte d’élément congédié d’office car trop évident, et pour cause : il s’agissait de la cartouche vendue en bundle avec la console. Et il va être temps aujourd’hui de se pencher sur ce que propose ce fameux Combat.

Comme on l’a vu, l’une des premières spécificités du titre conçu par Ron Milner et Steve Mayer est d’être un jeu strictement multijoueur, ce qui n’a rien de très surprenant lorsqu’on se souvient qu’on parle d’un programme de 1977 – d’un logiciel si ancien, en fait, qu’il a même été développé en parallèle de la console, avec une conception débutée à la fin de l’année 1975.

Justement, l’Atari 2600 elle-même était pensée dans l’optique de pouvoir offrir à domicile les grands succès de l’arcade d’Atari – preuve que « l’arcade à domicile » est une lune pratiquement aussi vieille que le jeu vidéo lui-même. Et parmi les jeux qui devaient pouvoir fonctionner sur la toute nouvelle machine figurait notamment Tank, une borne de 1974 opposant deux joueurs pilotant – j’espère que vous l’aurez deviné – des tanks dans un labyrinthe. Combat sera parti de cette base mais, signe d’une certaine ambition, aura décidé d’étendre un peu le concept. De l’étendre suffisamment, en fait, pour que la boîte de la cartouche revendique fièrement « 27 jeux vidéo » qui se trouveraient à l’intérieur, ce qui, à une époque où il suffisait de rajouter un mur pour faire un nouveau logiciel, était finalement une affirmation qui avait plus de sens qu’on pourrait le croire.

Combat, par essence, est donc un deathmatch – même si, on s’en doute, le terme n’avait pas exactement cours en 1977. Le but est de détruire l’adversaire, ce qui rapporte un point – il n’y a ni limite de score (même si je n’ai pas poussé la curiosité jusqu’à tester ce qui se passe au-delà de 99), ni limite de temps imposées, on choisit simplement le niveau grâce aux interrupteurs de la console.

Chaque joueur ne peut tirer qu’un seul projectile à la fois, et on ne peut que pivoter et avancer ; il est donc impossible de faire un « pas de côté » ou de reculer. Voilà pour l’essentiel. La cartouche n’aurait pu être que cela : deux tanks lâchés dans une unique arène, et pour être honnête cela aurait probablement largement suffi à ravir tout le monde à la date de la sortie du jeu. Mais les développeurs auront assez d’idées pour développer 27 niveaux (ou « jeux » pour reprendre le terme de la boîte) qui sont en fait autant de variantes de l’idée originale. Mais jugez plutôt :

Les niveaux alternent différents types d’arènes, qui représentent autant de terrains pour jouer au chat et à la souris tout en offrant des couverts salutaires – ce qui est déjà un très bon moyen de renouveler un peu les parties. Les tanks laissent d’ailleurs carrément la place, dans les derniers niveaux, à des biplans ou à des jets évoluant dans des cieux où ils pourront se dissimuler derrière des nuages.

Mais on remarquera également que chaque série d’arènes introduit à sa façon une petite nouveauté au niveau du gameplay : si lors des niveaux 3 et 5, par exemple, les projectiles de vos tanks se contentent d’aller tout droit, lors des niveaux 1, 2 et 4, leur trajectoire peut être modifiée en poussant le stick après le tir ! Ce n’est pas tout : les niveaux 6 à 9 correspondent au « Tank-pong » : les tirs rebondissent alors sur les murs, avec l’obligation qu’ils le fassent au moins une fois avant de toucher leur cible dans les niveaux 8 et 9. Aux niveau 10 et 11, subtilité géniale : les tanks sont invisibles – pour l’ennemi comme pour ceux qui les contrôlent, donc – jusqu’au moment où ils tirent, où ils apparaissent brièvement. Après quoi, on mélange les règles : les niveaux 12 à 14 donnent lieu à un « Tank-pong » invisible. Puis arrivent les avions, avec leurs spécificités, comme la possibilités d’en piloter plusieurs à la fois, ou d’opposer trois petits jets face à un bombardier massif, etc. Autant d’idées simples qui ont une énorme vertu, en plus de la variété qu’elles apportent : celles d’être immédiatement assimilables par n’importe qui.

Car c’est là que réside la grande force de Combat, celle-là même qui lui permet aujourd’hui encore de se révéler beaucoup plus amusant que ne devrait l’être l’affrontement entre deux carrés multicolores dans un pâté vert ou bleu : l’extraordinaire accessibilité de son concept, auquel n’importe qui, même un joueur n’ayant jamais eu un joystick entre les mains, peut adhérer immédiatement. Ce n’est pas une partie de Fortnite ou de (introduire ici le nom d’un titre multijoueur populaire au moment où vous lirez ces lignes), mais justement : ce n’est pas l’apanage de joueurs surentrainés devant revendiquer des centaines d’heures de jeu pour avoir une petite chance de rivaliser avec les autres.

C’est un peu la matérialisation absolue de la cartouche qu’on lance en deux secondes pour des parties de cinq minutes, et sur laquelle on peut aussi bien laisser une chance au petit cousin de quatre ans qu’à mémé sans avoir à passer par une douloureuse phase d’explication des quatorze boutons du joypad qui est de toute façon à peu près vouée à l’échec – la vraie expérience familiale comme on pouvait la concevoir à la fin des années 70, et qui mériterait de revenir un peu à la mode pour offrir à nouveau une chance aux quelques malheureux ayant été laissés de côté par le train vidéoludique, et qui sont aujourd’hui aussi perdus en démarrant une console ou un ordinateur que le vieil oncle de la génération d’avant pouvait l’être en cherchant à programmer un magnétoscope. Si vous voulez comprendre comment les gens pouvaient s’amuser avec une Atari 2600, invitez un ami et essayez Combat. Alors, vous saurez.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 12/20 Combat est un jeu dont la grande force est d'être très simple tout en parvenant à introduire et à combiner suffisamment d'idées pour se renouveler au fil de ses 27 tableaux. Ce qui aurait pu n'être qu'une variation de Boot Hill avec des tanks aura eu le bon goût d'amener tout ce qui correspond à l'essence même d'un jeu compétitif : des obstacles pour jouer au chat et à la souris, des rebonds et des tirs contrôlables pour composer avec une touche de technicité, et un principe si lumineusement évident que tout le monde sait ce qu'il doit faire et a compris comment jouer dès l'instant où il a posé les yeux sur l'écran ; autant dire la plus parfaite introduction au jeu vidéo dont on ait pu rêver en 1977. En dépit de son âge vénérable et de sa réalisation antédiluvienne, Combat a encore pour lui cette extraordinaire accessibilité : on peut s'amuser tout de suite et de nombreuses façons différentes avant de reposer le joystick sans regret dix minutes plus tard en ne s'étant pas ennuyé une seule seconde. Une efficacité et une immédiateté qu'on aimerait retrouver un peu plus souvent à notre époque.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Pas de mode solo : amenez un ami – Une réalisation purement fonctionnelle

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Combat sur un écran cathodique :

Dragons of Flame

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeurs : U.S. Gold Ltd. – Strategic Simulations, Inc.
Titres alternatifs : Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : Dragons of Flame – A DRAGONLANCE Action Game (titre complet), DragonLance : Dragons of Flame (écran-titre – Famicom, Japon)
Testé sur : AmigaAtari STPC (DOS)Amstrad CPCCommodore 64ZX SpectrumFamicomFM TownsPC-98
Disponible sur : Windows – au sein de la compilation Silver Box Classics
En vente sur : GOG.com (Windows) – Steam.com (Windows)

Les jeux tirés de la licence DragonLance de Donjons & Dragons (jusqu’à 2000) :

  1. Heroes of the Lance (1988)
  2. War of the Lance (1989)
  3. Dragons of Flame (1989)
  4. Champions of Krynn (1990)
  5. DragonLance : DragonStrike – Dragon Combat Simulator (1990)
  6. Death Knights of Krynn (1991)
  7. Shadow Sorcerer (1991)
  8. The Dark Queen of Krynn (1992)
  9. DragonStrike (1992)

Version Amiga

Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette 1.0 testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supporté : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour saugrenue qu’elle ait pu apparaître – surtout aux yeux des purs rôlistes, qui tolèrent souvent assez mal le mélange des genres – l’idée pour SSI de créer une gamme de jeux d’action tirée des règles de Donjons & Dragons reconnaissable à ses boîtes argentées (en réponse à la série de jeux de rôle vendue, pour sa part, dans des boîtes dorées) avait rapidement eu toutes les caractéristiques d’un pari gagnant.

La meilleure preuve en est qu’Heroes of the Lance, le tout premier opus de la gamme sera immédiatement devenu, en s’écoulant à près de 89.000 exemplaires à sa sortie, le plus grand succès commercial de l’histoire de l’entreprise… avant d’être immédiatement battu à plate-couture par les 265.000 copies du premier épisode des « Gold boxes » paru le même mois, un certain Pool of Radiance. Qu’importe : l’avenir s’annonçait radieux pour SSI, et tous les signaux étaient au vert pour prolonger une tentative audacieuse qui s’était instantanément muée en triomphe. U.S. Gold hérita donc une nouvelle fois du bébé, avec l’objectif de faire de Dragons of Flame, la suite directe d’Heroes of the Lance, un titre qui parvienne à reproduire le succès de son prédécesseur.

L’histoire s’inscrit d’ailleurs dans la continuité directe de la première aventure : les fameux « Héros de la Lance » ayant enfin mis la main sur les disques de Mishakal, avec votre aide, leur victoire se révèle hélas de courte durée ; à peine sortis des ruines de la cité de Xak Tsaroth, les huit compagnons découvrent que l’armée draconienne vient de passer à l’attaque, et se font capturer. Profitant d’une attaque des elfes pour échapper à ses ravisseurs, le groupe se voit désormais en charge d’une nouvelle quête : parvenir à se faufiler à l’intérieur de la cité de Pax Tharkas pour y mettre la main sur une épée légendaire nommée Wyrmslayer, et en profiter pour rendre leur liberté aux esclaves détenus sur place. Une très bonne excuse à la fois pour coller au scénario de la trilogie romanesque écrite par Margaret Weiss et Tracy Hickman et surtout pour reprendre la formule initiée par Heroes of the Lance… mais en tâchant, cette fois, de revoir l’ambition à la hausse.

La première nouveauté du jeu se manifestera d’ailleurs dès le lancement de la partie : votre coterie démarre en effet sa nouvelle aventure en rase-campagne, sur une carte en vue de dessus qui couvre toute la région. Eh oui, cette fois, pas question de passer tout le jeu dans les couloirs de Pax Tharkas ; en fait, la forteresse ne représentera que le dernier tiers de votre aventure.

Avant de l’atteindre, il va d’abord falloir explorer la région et s’adresser – autre nouveauté – à des PNJs qui sauront vous communiquer des indices sur l’emplacement des cavernes de Sla-Mori, seul moyen d’espérer vous glisser dans le terrible bastion draconien (car non, vous ne pourrez pas entrer par la porte de devant, comme vous vous en apercevrez assez vite si vous penser écourter votre aventure en fonçant droit sur la forteresse), et qui pourront même se joindre à vous. Des groupes, amicaux mais surtout hostiles, se déplacent en permanence sur la carte, et si le vôtre entre en contact avec l’un d’entre eux, le jeu basculera alors dans sa traditionnelle vue de profil le temps de vaincre vos ennemis ou de discuter avec vos alliés… et même potentiellement au-delà.

Il convient de mentionner pour l’occasion une deuxième subtilité spécifique à cet épisode : une fois un combat terminé, il faudra aller appuyer sur le 0 du pavé numérique pour retourner à la carte du monde. Si vous ne le faites pas, vous serez libre de continuer à explorer toute la région en vue de profil, en poussant le stick vers le haut ou vers le bas pour changer l’orientation de la vue entre l’axe nord/sud et l’axe ouest/est !

En effet, là où Heroes of the Lance ne vous proposait de changer de direction que lors de croisements spécialement désignés sur la boussole en bas à gauche, vous serez ici libre de le faire à n’importe quel moment… ce qui peut d’ailleurs rendre la navigation extrêmement confuse, tant le fait de toujours être cantonné à une vue de profil est infiniment moins naturel que d’avoir une caméra derrière vous pour suivre vos déplacements en temps réel. Faute d’une unité de mesure fiable pour juger de la longueur des couloirs que vous serez amené à visiter, la cartographie des lieux risque de s’avérer particulièrement difficile, mieux vaudra donc vous attendre à passer beaucoup de temps à tourner en rond dans la deuxième partie du jeu, souvent sans y croiser grand monde.

Une maladresse qui s’en va en rejoindre d’autres, tant la première moitié du jeu ne prend pas exactement le temps de vous mettre à l’aise. Lâché dans la nature, vous aurez en effet beaucoup de mal à faire plus de vingt mètres sans rencontrer un groupe de monstres, et là où les affrontements du premier opus étaient une affaire largement méthodique demandant du sang-froid plus que des réflexes, le rythme est ici beaucoup plus élevé et il n’est pas rare de se retrouver au milieu de trois ou quatre adversaires dès les premières secondes d’un combat.

Plus grave : le jeu ne voit apparemment aucun inconvénient à vous faire commencer une escarmouche directement SUR un adversaire, ce qui vous obligera à prendre des dégâts le temps de vous reculer et de vous mettre en position de rendre les coups ! Les passes d’armes sont de toute façon généralement assez courtes, peu d’adversaires vous demandant de faire appel à une quelconque forme de subtilité – les ennemis attaquant à distance étant ici bien plus rares. Par contre, si vous rencontrez des cochonneries comme des trolls, un conseil : dégainez immédiatement les sortilèges offensifs, car même vos meilleurs guerriers risquent de ne pas faire le poids au corps-à-corps.

Ce côté « action frénétique » vient un peu trahir ce qui était l’un des mécanismes les plus satisfaisants du premier opus, et il faut reconnaître qu’on a nettement moins envie d’explorer la région quand les forces draconiennes venues du nord commencent à pulluler au point de nous empêcher de faire vingt centimètres. La bonne nouvelle, c’est que le logiciel s’est décidé à intégrer certaines des fonctions du jeu de rôle – toujours pas la montée de niveau, hélas, mais il est désormais enfin possible de dénicher de meilleures armes pour vos personnages, de recruter des héros supplémentaires, et le système de charges des bâtons est apparemment passé à la trappe (je dis « apparemment » en me basant sur mon expérience car le manuel du jeu ne dit pas un mot à ce sujet) pour être remplacé par le mécanisme traditionnel demandant de dormir pour récupérer les sortilèges employés… ce que vous pourrez faire à peu près n’importe où sans risquer d’être interrompu, et en regagnant en plus quelques points de vie dans la démarche.

Il en résulte donc une expérience qui fait un pas en avant pour un pas en arrière : plus varié, mieux réalisé et plus ambitieux que son prédécesseur, Dragons of Flame aurait pu être un meilleur jeu si les combats avaient été un peu plus intéressants et l’aventure mieux rythmée. En l’état, on passe la première moitié de la partie à se battre et la deuxième à tourner en rond, faute d’un équilibre travaillé entre les deux composantes que sont l’action et l’exploration – laquelle est vraiment devenue bordélique dans cet épisode. Résultat des courses : même les fans du premier opus auront besoin d’un peu de temps pour s’accoutumer au fonctionnement du jeu, et les néophytes risquent de s’arracher les cheveux en voyant leur groupe se faire décimer le temps qu’ils comprennent ce qui se passe. Néanmoins, il y a toujours un jeu d’exploration avec ses charmes et qui saura convaincre les joueurs les plus patients, surtout parmi les fans de Lancedragon. Du plaisir à l’ancienne, en somme.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14/20 Dragons of Flame représente un étrange paradoxe : c'est à la fois un meilleur et un plus mauvais jeu que son prédécesseur direct. Sur le plan du contenu et des possibilités, le titre offre une grande partie de ce qu'on aurait aimé trouver dans le premier opus : toute une région à explorer, des personnages à recruter, des règles de Donjons & Dragons mieux intégrées, une gestion de l'équipement – tout en profitant d'une réalisation plus convaincante. Malheureusement, en choisissant de rendre les combats plus nerveux et infiniment plus nombreux, le logiciel abandonne également deux des composantes qui avaient fait mouche un an auparavant : le rythme méthodique et la précision de son gameplay. Avec la pression constante d'une horde de draconiens aux trousses, l'aventure s'enlise parfois dans des combats trop courts ou trop longs pour présenter un véritable intérêt, alourdissant ainsi une exploration qui peut se montrer réellement prenante – particulièrement dans la première partie du jeu. Une fois la citadelle finale atteinte, le jeu retrouve des mécanismes plus proches de ceux d'Heroes of the Lance, mais avec une navigation devenue inutilement complexe, ce qui fait qu'on peut rapidement tourner en rond. Un jeu qui nécessite qu'on lui laisse un peu de temps pour révéler son vrai potentiel, et qui aurait vraiment pu côtoyer l'excellence avec un game design peaufiné.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Des combats qui tournent parfois au foutoir ingérable sans qu'on ait eu le temps de comprendre ce qui se passe... – ...et au rythme certes plus nerveux, mais aussi globalement nettement plus frustrant que dans Heroes of the Lance – Une exploration pénalisée par le fait qu'on ne puisse pas faire deux mètres sans croiser un groupe de monstres... – ...avec une course contre la montre qui peut facilement conduire à rater des informations essentielles – Une navigation qui devient particulièrement confuse dans la citadelle de Pax Tharkas

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dragons of Flame sur un écran cathodique :

Version Atari ST

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : Strategic Simulations Inc.
Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1989, il était encore difficile de séparer la trajectoire des deux machines qu’étaient l’Amiga et l’Atari ST, tant elle semblaient inextricablement liées aux yeux de tous les développeurs qui concevait difficilement de commercialiser un jeu sur l’une sans le porter immédiatement sur l’autre.

Sans surprise, Dragons of Flame est donc, sur l’ordinateur d’Atari, l’exact clone de ce qui avait pu être observé sur Amiga – la seule nuance étant à aller chercher dans le rendu du thème musical de l’écran-titre, très légèrement inférieur ici (mais bon, on parle d’une boucle de moins de dix secondes, le traumatisme devrait donc être assez restreint). Pour le reste, ni le contenu, ni la réalisation graphique, ni la jouabilité ne varient d’un micron, la guerre entre Commodore et Atari n’aura donc connu aucune victime lors de cette escarmouche.

NOTE FINALE : 14/20

Dragons of Flame ne sera pas une munition dans la guerre millénaire que se livrent à jamais les possesseurs d’Atari ST et ceux d’Amiga : les deux versions sont identiques à 99,9%. Les fans de l’univers de Lancedragon portés sur l’exploration plus que sur la montée de niveau devraient donc pouvoir trouver leur bonheur ici comme ils l’auraient fait sur la machine de Commodore

Les avis de l’époque :

« Un charme envoûtant se dégage de l’aventure entreprise par la petite troupe que vous dirigez. Les héros sont attachants, les ennemis sont féroces et l’affaire est enthousiasmante. En prime, des graphismes agréables et des animations réussies. »

Éric Caberia, Tilt n°75, février 1990, 16/20

Version PC (DOS)

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : Strategic Simulations Inc.
Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x2) et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Carte son supportée : Aucune (haut-parleur interne)
*640ko requis pour le mode Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Autre incontournable de la fin des années 80 (surtout aux États-Unis), on se doutait bien que le PC, plateforme de référence des rôlistes, n’allait pas être privé d’une nouvelle adaptation de Donjons & Dragons.

Comme avec Heroes of the Lance, le résultat n’a pas trop à rougir de la comparaison avec les autres ordinateurs 16/32 bits – sauf pour ce qui est de la musique, hélas, qui se cantonne une nouvelle fois au haut-parleur interne alors que l’AdLib était disponible depuis un an et demi (et la Sound Blaster depuis un mois). Graphiquement, les seize couleurs de l’EGA sont certes plus criardes, mais le rendu n’est pas moins coloré que sur ST ou Amiga, et le contenu comme la jouabilité sont toujours exactement identiques. Quant à la vitesse, elle sera définie par la puissance du processeur – ce qui signifie que vous pourrez rendre les combats un peu plus lents et l’exploration un peu plus paisible via les réglages de DOSBox si telle est votre envie. Bref, une version sans réelle fausse note (on pardonnera pour la musique), ce qui tombe bien puisque c’est la seule encore disponible à la vente.

NOTE FINALE : 14/20

À moins d’être totalement allergiques aux teintes de l’EGA – ou de vouer une culte à la boucle de dix secondes qui sert de thème musical au jeu – difficile de faire des reproches à cette version PC de Dragons of Flame qui livre pour l’occasion une performance qui n’a pas grand chose à envier à l’Amiga ou à l’Atari ST, avec un contenu et une jouabilité préservés.

Version Amstrad CPC

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Signe des temps : alors que le CPC avait été un des premiers systèmes à bénéficier d’un portage d’Heroes of the Lance, il aura dû attendre près d’un an après les possesseurs de machines 16/32 bits pour hériter de sa version de Dragons of Flame. La vraie surprise, cependant – qui annonce le sort de la version ZX Spectrum, mais pas celui de la version C64 – est qu’il s’agit d’une version sensiblement revue, pour ne pas dure expurgée : le jeu commence en effet directement dans la citadelle finale, et il n’y a tout simplement plus de phase en extérieur ! Toute la composante exploration est donc ici réduite à la partie congrue, transformant le jeu en une continuation du premier opus… en moins bien. Car bien que la réalisation soit correcte, la répétition ad nauseam des mêmes murs, additionné à la navigation confuse (bon courage pour se repérer sans carte) et à un manque flagrant de finition (tous les personnages, mêmes Goldmoon, ont le même sprite), sans même parler du rythme déséquilibré (on peut passer cinq minutes sans croiser un monstre, puis en affronter cinq à la fois) font que la magie qui mettait déjà du temps à opérer dans la version originale est globalement absente ici. Il y a certes un jeu d’exploration décent à condition d’être très patient, et les combats, pour limités, sont plus cohérents que dans le portage du premier épisode, mais ce n’est clairement pas la version qu’on recommandera pour découvrir le jeu. Oh, et cette fois, il n’y a plus du tout de musique, pas même pendant l’écran-titre.

NOTE FINALE : 09,5/20

Choix assez radical pour Dragons of Flame sur CPC, qui choisit purement et simplement de jeter à la poubelle la moitié du jeu pour se concentrer sur la forteresse finale. Si le résultat est plus jouable et mieux réalisé qu’Heroes of the Lance sur la même machine, mieux vaudra être très patient pour dompter la navigation particulièrement confuse faite de grands couloirs vides et tous semblables.

Version Commodore 64

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeurs : U.S. Gold Ltd. – Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Contrairement à ce qui se sera passé sur CPC et ZX Spectrum, Dragons of Flame ne sera pas arrivé sur Commodore 64 dans une version expurgée : pas question cette fois de démarrer la partie dans la forteresse de Pax Tharkas.

Ce qui n’empêche pas de constater de nombreux sacrifices : il n’y a plus de défilement, la carte a été simplifiée, les rencontres y sont nettement moins nombreuses (j’ai pu parcourir la moitié de la région sans faire un seul combat !), et chaque rencontre, changement de personnage ou modification d’inventaire s’accompagne d’un temps de chargement. Le rythme est clairement moins nerveux que sur les ordinateurs plus puissants, et on sent bien que la machine n’a pas exactement été poussée dans ses derniers retranchements : les décors sont très vides (plus encore que dans la version originale), les sprites ne sont pas très bien dessinés, le thème musical ne restera clairement pas comme une référence des capacités du processeur sonore. Bref, c’est un peu la même chose en moins bien, et si certains joueurs seront heureux, pour le coup, de pouvoir explorer sans avoir à affronter un draconien toutes les vingt secondes, le commun des mortels risque malgré tout de s’ennuyer un peu.

NOTE FINALE : 11,5/20

Dragons of Flame sur Commodore 64 laisse un peu le sentiment d’une version qui aura composé avec des ambitions mesurées : c’est plus lent, plus vide et clairement moins intéressant à explorer que ses alter ego sur ordinateurs 16/32 bits. L’expérience reste clairement un cran au-dessus de ce qu’offrent les itérations sur CPC et ZX Spectrum, mais cela reste une version à réserver aux fans de la machine.

Version ZX Spectrum

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Après le test de la version CPC, inutile de feindre la surprise : Dragons of Flame sur ZX Spectrum est une nouvelle fois une version expurgée qui fait plus office de prolongement à Heroes of the Lance que de réelle suite. La réalisation graphique n’est pas exceptionnelle, il n’y a pour ainsi dire pas de son, les combats sont très limités et la navigation est toujours aussi problématique – bien plus que dans le premier opus. C’est certes plus coloré que le portage du premier épisode, mais le contraire aurait été difficile (peut-on offrir moins de couleurs qu’une réalisation monochrome ?), et le plaisir de jeu n’est pas exactement ébouriffant non plus. Le concept reste relativement original, la composante « exploration » n’ayant jamais été en vogue dans les beat-them-all, mais quitte à le découvrir, autant le faire sur une autre machine.

NOTE FINALE : 09,5/20

Faute de pouvoir offrir toute l’expérience de Dragons of Flame, le ZX Spectrum se cantonne à une resucée – certes mieux réalisée – d’Heroes of the Lance. Les combats ne sont hélas pas captivants, mais l’exploration pourra retenir quelques joueurs.

Version Famicom

Développeur : Atelier Double Co. Ltd.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 février 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La NES aura été la seule console à recevoir son portage de Dragons of Flame – et le fait qu’il soit en fait resté cantonné exclusivement à la Famicom et au Japon tend à nous indiquer que l’on est plus proche ici de la version FM Towns que des itérations occidentales… mais sans la réalisation de haute volée.

Dans les faits, c’est assurément vrai dans les grandes lignes : l’exploration et beaucoup plus cadrée dans cette version, ou il s’agit globalement d’aller dénicher des personnages qui vous indiqueront où aller et comment passer à la prochaine phase – car oui, cette fois il y a plusieurs cartes du monde. Les combats sont aussi limités que sur Atari ST ou Amiga, et sans doute même encore plus car je ne serais tout simplement jamais parvenu à utiliser une arme à distance (sans doute faut-il l’équiper à la place de l’arme au corps-à-corps, ce qui rendrait la transition d’un mode de combat à l’autre extrêmement fastidieux), et bien évidemment mieux vaudra avoir une solide connaissance du japonais (ou un logiciel de traduction sous la main) pour avoir une chance de comprendre où aller et ce qu’on attend de vous.

Néanmoins, et même si la réalisation est à peine passable, on retrouve une large partie de ce qui faisait la force du jeu – moins la possibilité de pivoter à la volée, amputée comme sur FM Towns, ce qui n’est objectivement pas une grosse perte. Et il est toujours possible de sauvegarder. Quitte à découvrir le titre, il sera sans doute plus agréable de le faire sur une version jouable en anglais – au hasard, sur FM Towns – mais cette cartouche est loin d’être honteuse pour autant.

NOTE FINALE : 13/20

Sans être tout-à-fait une redite de la version FM Towns ni exactement un portage des itérations occidentales, Dragons of Flame sur Famicom trouve sa propre voie, avec ses errances, certes, mais en demeurant globalement une rencontre intéressante entre l’exploration, la gestion et le combat. Dommage que la réalisation soit aussi quelconque et qu’il faille absolument parler japonais pour en profiter.

Version FM Towns

Développeur : Opera House Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

La plupart des portages de jeux occidentaux sur les ordinateurs japonais tendent à être des adaptations très fidèles, pour ne pas dire paresseuses, des jeux dont elles sont tirées – avec, pour les plus ambitieuses, des graphismes en haute résolution (mais en seize couleurs) et parfois, sur FM Towns, de la musique CD.

Pour cette fois, surprise : Opera House aura visiblement eu les coudées franches pour procéder à un lot de changements, et pour une fois les capacités graphiques et sonores de la machine sont réellement mises à contribution ! Déjà, le jeu bénéficie à présent d’une introduction en écran fixe en haute résolution 256 couleurs, avec un dialogue entre les personnages du roman (et du jeu) et de la musique numérique en appui. Une fois la partie débutée, surprise : le groupe commence près d’une ville en ruines avec des instructions claires, et la carte est totalement différente de celles des versions occidentales, et on a cette fois droit à des thèmes musicaux pendant la partie. Mais la vraie surprise intervient lors des phases de combat – lesquelles interviennent désormais aléatoirement, les ennemis n’étant plus visibles sur la carte du monde : les décors comme les personnages ont été retravaillés, les combats sont beaucoup plus dynamiques, et désormais on est face à ce qui ressemble à un vrai beat-them-all !

D’ailleurs, ici, la vue de profil est réservée aux affrontements : plus question de changer d’orientation avec les flèche haut et bas ni de parcourir tout le jeu sans passer par la carte du monde – ce qui signifie que la navigation confuse du jeu appartient au passé. Le gameplay a également procédé à quelques rééquilibrages : le jeu reprend le système de charges d’Heroes of the Lance – clairement matérialisé par une jauge, cette fois – pour vous forcer à vous réguler un peu sur l’usage des sorts, chaque personnage combat différemment, les adversaires vous repoussent (ce qui rendra les personnages avec une faible allonge, comme le nain, nettement moins utiles), et il n’est plus possible de dormir ailleurs qu’en ville ! Bref, le jeu gagne incontestablement en cohérence, même si la surabondance de combat finit par taper un peu sur le système : il y en a véritablement un tous les cinq mètres, et cette fois plus question de les éviter. Néanmoins, le jeu étant jouable en anglais (à sélectionner lors du début de la partie), il constitue à n’en pas douter une alternative solide aux versions occidentales, particulièrement pour les joueurs qui aimeraient des combats un peu plus prenants (et qui en voudraient beaucoup !).

NOTE FINALE : 14,5/20

Changement de braquet pour Dragons of Flame sur FM Towns, qui revoit son game design pour pencher plus franchement du côté du beat-them-all et un peu moins du côté du jeu d’exploration. Le résultat n’est pas parfait, mais il a été assez intelligemment repensé pour évoquer une suite alternative à Heroes of the Lance, avec une réalisation à la hauteur. Clairement à essayer pour ceux que les combats des versions occidentales auraient déçus.

Version PC-98

Développeur : Opera House Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : Janvier 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour évoquer cette version PC-98 de Dragons of Flame, le plus simple est sans doute de partir de la version FM Towns, d’ailleurs développée par la même équipe. Vous l’avez ? Bon. À présent, remplacez la musique CD par de la musique FM, redessinez les illustrations haute résolution pour qu’elles n’emploient que seize couleurs (et qu’elles soient recadrées plus serrées, question de format d’image), et ne touchez à rien pour le reste. Ta-da, vous voilà avec votre portage sur PC-98, qui bénéficie donc grosso mode des mêmes forces et des mêmes faibles que sur la machine de Fujitsu. Une version solide, donc, à condition d’être près à passer 90% de son temps de jeu à se battre.

NOTE FINALE : 14/20

Sorte de version FM Towns sans le CD-ROM (et la haute résolution en 256 couleurs pour les écrans fixes), Dragon of Flames version PC-98 est une nouvelle fois un beat-them-all satisfaisant mâtiné d’un peu d’exploration. Défoulant et bien réalisé, mais répétitif.

War of the Lance

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Titre alternatif : Official Advanced Dungeons & Dragons Computer Product : War of the Lance – A DRAGONLANCE Strategic Fantasy Game (Boîte)
Testé sur : Apple ][Commodore 64PC (DOS)
Disponible sur : Windows – Au sein de la compilation Silver Box Classics
En vente sur : GOG.com (Windows) – Steam.com (Windows)

Les jeux tirés de la licence DragonLance de Donjons & Dragons (jusqu’à 2000) :

  1. Heroes of the Lance (1988)
  2. War of the Lance (1989)
  3. Dragons of Flame (1989)
  4. Champions of Krynn (1990)
  5. DragonLance : DragonStrike – Dragon Combat Simulator (1990)
  6. Death Knights of Krynn (1991)
  7. Shadow Sorcerer (1991)
  8. The Dark Queen of Krynn (1992)
  9. DragonStrike (1992)

Version Apple ][

Date de sortie : Novembre 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II+ – RAM : 64ko

Il n’est jamais facile de tirer un trait sur sa vocation première.


Celle de Strategic Simulations, Inc. était tellement claire et assumée qu’elle apparaissait jusque dans son nom. Fondée en 1979, à un moment où les jeux de stratégie – sur papier comme sur ordinateur – ne savaient pas encore qu’ils amorçaient leur déclin, la compagnie américaine comptait bien respecter son projet de vendre des wargames tout au long de son existence jusqu’à ce que l’émergence du jeu de rôle ne l’amène à réviser ses plans, au point de la pousser à passer un accord avec TSR pour obtenir les droits de la très convoitée licence Donjons & Dragons en 1987.

Si personne ne parvient à prendre la capitale adverse, l’issue se jouera au score

Le choix de la raison plus que celui du cœur, en somme. Qu’importe : en 1989, les projets de jeux de rôle et de jeux d’action autour de la fameuse licence étaient désormais le centre de la production de la compagnie, à tel point que les quelques employés qui travaillaient encore sur ce qui avait été le cœur de son savoir-faire, à savoir les fameux wargames, se retrouvèrent déplacés dans un bâtiment à l’écart, sans chauffage, que Charles Kroegel désigna d’ailleurs avec une certaine amertume sous le terme de « Sibérie ». C’est donc probablement là qu’aura vu le jour War of the Lance, l’unique programme tiré de la saga DragonLance à correspondre à ce que SSI savait théoriquement faire le mieux : un jeu de stratégie.

Les dragons se lancent à l’assaut du domaine elfe de Silvanesti !

Le titre prend donc pour cadre la fin d’une longue période de décadence et d’instabilité qui aura suivi le bannissement des dragons pour un millénaire après le Grand Cataclysme. Takhisis, la Reine des Ténèbres, a désormais fait revenir les fabuleuses créatures et est entrée dans une union contre-nature avec l’alliance de Neraka, bien décidée à s’emparer de tout le continent d’Ansalon.

La diplomatie sera la clef de voute de votre guerre

Face à cette terrible armée, un seul royaume semble avoir pris la mesure de la menace : celui qui représentera la première pierre de l’alliance de Whitestone – dont vous allez naturellement prendre les rênes. Mais pour espérer résister aux forces draconiques, les maigres troupes sous vos ordres ne suffiront jamais : vous aurez besoin d’alliés… et mieux vaudra parvenir à convaincre les autres nations avant qu’elles ne décident de se ranger dans le camp de l’envahisseur, ou de céder sous ses coups. Ce sera donc à vous qu’il appartiendra de monter une puissante coalition contre le Highlord de Neraka afin d’aller prendre la capitale ennemie avant qu’il ne parvienne à capturer la vôtre.

Les objets magiques viendront bousculer les rapports de force au fil de la partie

La première originalité de War of the Lance est donc de vous faire démarrer dans une situation où le conflit n’est encore qu’embryonnaire et où la quasi-totalité des vingt-cinq nations qui composent Ansalon sont neutres – et le resteront parfois jusqu’à un stade assez tardif de la partie, laquelle se déroule sur 30 tours de jeu, soit six ans, en mode « campagne » (un mode « scénario » est également disponible pour vous faire commencer la partie à un stade plus avancé de la guerre).

Vos héros ne donnent vraiment pas l’impression de faire grand chose de toute la partie

L’une des premières phases de jeu correspondra donc à la phase diplomatique, qui vous demandera d’envoyer vos émissaires convaincre les autres royaumes de se joindre à vous – ou, faute de mieux, de les empêcher de rejoindre l’ennemi. Cette séquence est assez originale et relativement bien pensée : les nations sont classées en fonction d’un chiffre désignant leur inclinaison (plus il est bas, plus elles sont proches de Whitestone, plus il est élevé, plus elles sont proches d’Highlord), et vous allez devoir distribuer vos diplomates pour chercher à faire pencher la balance. Plus ils seront nombreux dans un même pays, meilleures seront les chances de le convaincre – et chaque nation se joignant à vous vous permettra d’acquérir des diplomates supplémentaires, entraînant ainsi une sorte d’effet boule de neige où plus vous avez rallié de monde, plus vous pourrez en persuader lors des tours suivants. Mieux vaudra ne pas se rater, cependant : vous ne pourrez faire qu’une seule demande d’alliance par tour, et si celle-ci échoue, vous en serez quitte pour retenter votre chance au tour suivant sans avoir rien obtenu en contrepartie.

Il est possible d’assister aux combats à l’échelle tactique, mais vous serez purement spectateur

L’essentiel du jeu va donc consister à gagner un maximum de temps et à chercher à contenir l’invasion menée par Neraka tout en voyant de plus en plus de nations – et leurs troupes – se joindre à la guerre. Ce qui signifie également qu’il est totalement illusoire de penser prendre toutes vos forces pour foncer vers la capitale adverse dès le début du jeu : la plupart du temps, vous ne pourrez tout simplement pas l’atteindre, la route des royaumes de l’ouest étant barrée par les terres (neutres) de Throtyl.

Profitez qu’Highlord soient sur tous les fronts pour aller harceler leurs positions

Représentant le camp des gentils, vous ne pouvez pas déclarer une guerre surprise pour envahir un voisin encombrant (Highlord, eux, n’auront pas autant de scrupules), ce qui signifie qu’une importante partie de la campagne se déroulera avec des forces morcelées devant faire face seules aux armées draconiques. On touche d’ailleurs là à l’un des aspects clivants du jeu : celui d’être un wargame… où vous ne pourrez pas réellement espérer assister à un combat vaguement équilibré avant le dernier tiers, voire le dernier quart, de la partie. Car en plus de disposer de troupes plus nombreuses que les vôtres – et de pouvoir, lui aussi, rallier des nations jusqu’alors neutres sous son aile – le royaume de Neraka a également dans sa manche une arme qui va vous poser beaucoup de soucis : les dragons, justement.

Le contrôle des océans sera essentiel si vous voulez empêcher l’afflux de renforts ennemis

En plus d’être très puissantes et extraordinairement difficiles à tuer, ces fameuses unités volantes peuvent également très facilement contourner vos défenses et aller causer des ravages derrière vos lignes alors que vous pensiez avoir établi un front solidement fortifié capable de retenir les forces ennemies pour plusieurs mois.

Le Maelstrom pourra ralentir vos navires comme ceux de l’ennemi

Pour pouvoir espérer les affronter, il faudra non seulement attendre l’entrée en guerre des nations les plus puissantes – et les plus difficiles à convaincre – mais aussi espérer que vos nombreux héros, tous envoyés en mission dès le début du jeu, reviennent avec des armes magiques – à commencer par les fameuses DragonLances qui donnent leur nom à la série – pour augmenter vos chances de les vaincre. Problème : ces missions se font de façon totalement indépendante sans que vous ayez aucune prise dessus, et vous pouvez toute à fait passer la moitié du jeu à attendre que vos glorieux compagnons daignent découvrir un bonus capable de renverser le cours de la guerre – en vain. Seule (minime) prise : une phase de « subversion » à chaque tour de jeu, pendant laquelle vous pourrez dépêcher des unités, non pour aider vos héros, mais pour aller mettre des bâtons dans les roues de ceux de l’adversaire. On aurait bien aimé avoir un rôle un peu plus poussé vis-à-vis d’un mécanisme aussi capital, mais il faudra se contenter de cela.

Les différentes nations viendront grossir les forces d’une des deux alliances au fil de la partie

On a donc affaire à quelques choix radicaux qui demanderont au joueur de faire preuve d’une patience certaine avant de pouvoir espérer participer à une guerre engageant la majorité des forces en présence. Certaines seront d’ailleurs cantonnées à un rôle très secondaire précisément à cause de toute cette mise en place : le temps que les nains de Thorbadin se décident à vous rejoindre, par exemple, la guerre sera probablement terminée bien avant que leurs troupes n’aient eu le temps de s’avancer jusqu’au royaume ennemi. Autant dire que ceux qui voudraient simplement déplacer des unités sur une carte stratégique risquent d’être déçus : il faudra sans doute une bonne heure avant de pouvoir espérer mener une bataille qui soit autre chose qu’une fuite désespérée – souvent en profitant de l’étalement des armées adverses pour aller reprendre le terrain derrière leurs lignes.

Ce n’est pas le tout d’avoir des armes magiques, encore faut-il les faire arriver jusqu’aux troupes qui en feront usage

La réalisation quasi-monochrome de l’Apple II n’est pas extrêmement confortable ni très lisible, mais on appréciera que l’interface ne soit pas une usine à gaz ; le jeu se joue avec le pavé numérique et la barre d’espace et rien d’autre. La prise en main se fera assez rapidement après un détour par le manuel, lequel ne fait qu’une vingtaine de pages, vous devriez donc comprendre les tenant et les aboutissants du jeu en moins d’une demi-heure. On saluera l’aspect narratif visant à vous informer de l’évolution de la guerre au début de chaque tour, qui aide à rendre le titre un peu moins austère ; néanmoins, le titre fait clairement son âge, et même si les mordus de DragonLance devraient rapidement prendre leurs marques, beaucoup de joueurs risquent de trouver le jeu lent, délicat à manier, pas très accessible et surtout frustrant, l’essentiel de la partie visant à attendre d’avoir les moyens de retourner une guerre qui part largement à votre désavantage. Un rythme et une prise en main qui ne plairont clairement pas à tout le monde, surtout parmi ceux n’ayant jamais eu l’occasion de s’essayer à un jeu de stratégie au tour par tour des années 80 – le jeu n’aura d’ailleurs pas connu un grand succès à l’époque, s’écoulant à à peine plus de 15.000 copies, une paille comparé aux 265.000 exemplaires de Pool of Radiance écoulés rien qu’en Amérique du Nord. Mais pour ceux qui sauront surmonter ces quelques désagréments et s’accrocher pendant une heure ou deux, il y a un titre réellement intéressant à découvrir – quitte à le faire sur PC plutôt que sur cette version Apple II un peu poussiéreuse.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 10,5/20

War of the Lance est un jeu de stratégie ambitieux et avec beaucoup de bonnes idées dont la principale erreur est de chercher à suivre le cours d'un récit reposant sur les héros plus que sur les armées. En dépit d'une gestion diplomatique intéressante, le rapport de force fondamentalement déséquilibré du jeu et sa mise en place qui vampirise facilement la moitié de la durée de la partie, si ce n'est plus, font qu'on se sent fatalement spectateur pendant un très long moment d'une guerre qui se joue via des leviers sur lesquels on a assez peu de prise – à savoir les diplomates, les héros et les objets magiques. S'il y a quelque chose de réellement prenant à parvenir à inverser le rapport de force et à mener une expédition victorieuse jusqu'à Neraka, la réalisation datée et l'interface laborieuse réserveront clairement le titre à un public de niche suffisamment patient pour dompter les mécanismes du jeu. Intéressant, mais austère et un peu trop opaque.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une interface opaque qui demandera un large détour par le manuel
– Un rythme frustrant où il faudra attendre un long moment avant d'avoir une réelle prise sur les événements...
– ...avec un aspect stratégique totalement déséquilibré jusqu'à ce que les objets magiques apparaissent...
– ...et des nations entières qui, quoi qu'il arrive, n'auront aucun rôle à jouer faute de temps
– Un mécanisme d'initiative maladroit qui peut très bien conduire un camp à jouer deux fois de suite

Bonus – Ce à quoi peut ressembler War of the Lance sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Avril 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Quelques couleurs en plus ont le mérite de clarifier un peu les choses

Signe que la stratégie était en perte de vitesse dans les années 80, War of the Lance n’aura connu que deux portages – là où la plupart des titres estampillés Donjons & Dragons en avaient des dizaines. Quoi qu’il en soit, on se doute que ce n’est pas du côté du contenu qu’il faudra s’attendre à trouver des différences au moment de lancer cette itération Commodore 64 ; c’est, dans l’absolu, exactement le même jeu. Les nuances se situent ici à deux niveaux : le premier est la jouabilité, puisqu’il est possible de jouer au joystick – une solution plus confortable que de passer par le clavier, d’autant que l’absence de pavé numérique conduit ici à déplacer le curseur avec les caractères situés autour de la lettre K, soit pas exactement la méthode la plus ergonomique. Le deuxième, qui ajoute un réel confort, est simplement le fait de bénéficier d’une réalisation plus colorée ; oh, je doute que vous soyez ébloui par les quelques cases de la carte stratégique, mais en termes de lisibilité, c’est quand même nettement plus agréable que ce qu’on avait pu observer sur Apple II. Pour le reste, il n’y a toujours ni musique ni bruitages, et le jeu continuera d’être assez lent pendant les phases de réflexion de l’I.A.

C’est déjà un peu moins triste (et on reconnaîtra ici une interface graphique directement empruntée à Pool of Radiance)

NOTE FINALE : 10,5/20

Copie fidèle du contenu de la version Apple II, War of the Lance sur Commodore 64 a pour lui une réalisation plus colorée qui rend la partie un chouïa moins austère. En revanche, ceux qui voudraient bénéficier des mêmes avantages dans une version plus rapide gagneront sans doute à opter directement pour la version PC.

Version PC (DOS)

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25 (x2) et 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA
Bon, là, niveau lisibilité, c’est inattaquable

À l’heure où j’écris ces lignes, le seul moyen d’acquérir War of the Lance sans avoir à écumer les brocantes à la recherche d’un Apple II ou d’un Commodore 4 et d’une copie du jeu ou sans recourir à l’émulation est d’acheter sa version en ligne sur PC émulée sous DOSBox (les liens sont disponibles en ouverture du site). Bonne nouvelle : c’est justement la meilleure – d’une courte tête, mais la meilleure quand même. Passons rapidement sur le point qui fâche, à savoir l’absence de gestion de la souris : cela commençait à être un peu anachronique en 1990, mais cela ne pénalise de toute façon en rien le maniement d’un jeu qui s’accommode très bien de l’usage du pavé numérique. Et pour une fois, on ne sera pas trop triste que le titre ne reconnaisse aucune carte sonore, puisqu’il n’y a de toute façon pas de son, comme dans les autres versions (on aurait pu apprécier un thème musical à l’écran-titre, mais tant pis). En revanche, la réalisation graphique, sans être miraculeusement devenu sublime, est clairement la plus détaillée ici : la carte est nettement moins abstraite que sur Apple II, et on reconnait immédiatement les unités dans une ambiance qui a un petit côté Ultima V. Ce serait déjà suffisant pour privilégier ce portage – après tout, vu le temps qu’on passe sur la carte stratégique, on ne va pas cracher sur une version plus jolie, ni sur les couleurs introduites dans tous les menus par la version C64 – mais le réel gain se situe précisément dans la vitesse des processeurs actuels : selon les réglages de DOSBOX, le jeu pourra filer comme le vent en vous épargnant le moindre temps d’attente, ou au contraire reproduire fidèlement la vitesse d’un ordinateur de 1990 pour vous souvenir de cette époque où on jouait généralement à un jeu de stratégie avec un journal sur les genoux et une tasse à café sur le bureau. Bref, si vous souhaitez découvrir le jeu aujourd’hui, c’est assurément la meilleure option.

Le fait d’avoir un peu de couleur au milieu de tout ce texte n’est pas désagréable non plus

NOTE FINALE : 11/20

Quelques détails en plus et quelques (milliers de) mégahertz en soutien permettent à cette version PC de War of the Lance d’être à la fois la plus rapide, la plus confortable et la plus lisible de toutes. On n’aurait pas craché sur un peu de musique ni sur une gestion de la souris, mais on se contentera d’un jeu de stratégie avec ses forces et ses faiblesses.

Les avis de l’époque :

« En bref, ce wargame est très agréable, facile à utiliser, et surtout il s’intègre totalement dans le monde de Krynn, et offre une alternative intéressante et distrayante à Champions of Krynn, toujours de chez SSI. »

Didier Latil, Génération 4 n°26, octobre 1990, 79%

« Si les options sont assez riches et l’ordinateur un partenaire valable, la réalisation est vraiment très moyenne. Les cartes sont lisibles, mais néanmoins assez laides, même en EGA. D’ailleurs, il n’y a guère de différence entre cette version PC EGA et la version Apple II, c’est vous dire ! […] À réserver donc aux mordus de wargame, les amateurs de jeu de rôle risquant fort de se lasser rapidement. »

Jacques Harbonn, Tilt n°84, décembre 1990, 10/20

NAM-1975

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com/

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK Corporation
Titres alternatifs : ナム-1975 (graphie japonaise), ACA NEOGEO NAM-1975 (collection Arcade Archives)
Testé sur : Neo Geo (MVS/AES)Neo Geo CD
Disponible sur : Android, iPhone, iPad, PlayStation 4, Switch, Wii, Windows, Windows Apps, Xbox One, Xbox Series X/S
En vente sur : Nintendo eShop (Switch), PlayStation Store (PlayStation 4), Xbox.com (Xbox One, Xbox Series X/S, Windows)

Version Neo Geo (MVS/AES)

Date de sortie : 26 avril 1990 (version MVS) – 1er juillet 1991 (version AES)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et quatre boutons (trois en usage)
Version testée : Version internationale
Hardware : Neo Geo MVS/AES
Processeurs : Motorola MC68000 12MHz, Zilog Z80 4MHz
Son : 2 hauts-parleurs – YM2610 OPNB 8MHz – 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 59,185606 Hz (résolution effective : 304×224)
Cartouche de 46Mb
Carte mémoire supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour lancer une console, il faut des jeux – une constatation a priori évidente, mais qui peine visiblement à s’inscrire dans la logique des constructeurs, même les plus puissants, à en juger par la liste étrangement longue de lancements ratés avec des line-up faméliques. La quantité est importante, afin d’offrir une large sélection aux joueurs, et la qualité l’est tout autant, ne fut-ce que pour donner un avant-goût de ce que la machine a dans le ventre – le lancement japonais de la Mega Drive, avec une minuscule poignée de jeux ratés, restant un véritable cas d’école de tout ce qu’il ne faut surtout jamais faire.

Attendez-vous à recroiser les mêmes ennemis d’un bout à l’autre du jeu

Mais quand on lance une console qui est en même temps une borne d’arcade, et dont les titres sont si monstrueusement chers qu’ils mettront d’ailleurs plus d’un an avant d’être proposé à la vente plutôt qu’à la location, on se doute qu’on a tout intérêt de placer la barre assez haut d’entrée de jeu. Chez SNK, le tout premier jeu développé pour la très ambitieuse Neo Geo aura eu pour nom NAM-1975, et quelle est la meilleure façon d’initier une légende ? Eh bien, mais c’est d’aller repomper sans vergogne ni sans la moindre idée neuve une borne de Tad Corporation de deux ans d’âge, pardi !

C’est devenu votre guerre dès l’instant où vous avez glissé une pièce dans cette fente

NAM-1975, autant être clair, c’est Cabal avec un coup de peinture. Même vue, même concept, même gameplay – un bouton pour tirer, un bouton pour lancer des grenades et le dernier pour faire une roulade… à condition de pousser le stick dans une diagonale vers le bas et la direction visée, faute de quoi le personnage se contentera de courir, ce qui est certes plus rapide mais ne lui assurera en contrepartie aucune forme d’invincibilité temporaire contre les (très nombreux) projectiles tirés dans sa direction.

Les combats tirent franchement en longueur sur la fin

Même le contexte n’est pas franchement différent : la guerre moderne imaginaire a été remplacée par une guerre moderne réelle, en l’occurrence celle du Vietnam, laquelle servira surtout de prétexte pour multiplier les références visuelles (une nouvelle fois pompées sans vergogne ni autorisation) à Full Metal Jacket, du casque arborant le fameux « Born to kill » jusqu’à la jeune viet-cong avec son fusil mitrailleur. Quant au scénario qui vous envoie secourir un scientifique et sa fille, il ne cherche désespérément à multiplier les rebondissements que pour arriver à une conclusion débile digne de Shanghai Pizza contre le ninja volant en vous opposant à un savant fou qui cherche juste à détruire le monde. Même pas à le conquérir, hein, juste à le détruire. Comme ça, pour le fun.

OK, ce n’est pas très réaliste de se battre depuis le flanc d’un avion éventré, mais ça offre une des rares séquences originales du jeu

L’objectif – le vrai, le ludique – est donc on ne peut plus simple : abattre les milliers d’ennemis que le jeu va vous envoyer (en vous efforçant de ne pas connaître leur sort), au cours d’une expédition au Vietnam qui cherche à alterner les décors et les situations et n’y parvient pas vraiment.

Les robots géants, ce n’est peut-être pas très réaliste, mais ça en jette !

Au moins appréciera-t-on ce niveau se déroulant dans les airs et vous opposant rapidement à un avion géant qu’il faudra détruire poste par poste (ça change), et une réalisation qui, si elle n’impressionnera plus personne aujourd’hui, est indéniablement un cran au-dessus de celle de son modèle, et peut afficher dizaines d’ennemis et boss géants simultanément sans l’ombre d’un ralentissement. Surtout, le mode deux joueurs en coopératif est un excellent moyen d’introduire une dose de stratégie en cherchant à se répartir les cibles dans un titre qui ne repose autrement que sur la pure adresse, et qui doit également souffrir d’avoir été pensé pour vous faire cracher des pièces. Parce qu’autant vous prévenir : le jeu devient rapidement très, très exigeant.

Si on peut tempérer la difficulté à condition de mettre les mains dans les entrailles de la borne pour accéder aux réglages en modifiant les DIP Switches, le mode par défaut est suffisamment ardu pour arriver à en tuer toute dose de fun dès le troisième ou quatrième niveau.

Quand on libère des otages, ils viennent prendre leur revanche à nos côtés !

Quand on en arrive au stade où il y a tellement de tirs à éviter qu’on on est réduit à passer 95% de son temps à enchaîner les roulades pour survivre en trouvant péniblement des phases d’un dixième de seconde pour répliquer (en vain), le défouloir efficace qu’était le jeu se transforme en chemin de croix où on a trop souvent l’impression de ne même plus avoir le droit de jouer, ce qui est quand même censé être la base ! Les ultimes niveaux sont littéralement impassables sans mourir toutes les secondes (soit la durée de votre période d’invincibilité post-mortem), et même si on réapparait exactement à l’endroit où on a trouvé la mort, le jeu pousse le cynisme jusqu’à vous interdire d’employer un continue pendant le boss final ! Bref, mieux vaudra adapter le défi à votre tolérance nerveuse, sans quoi vous risquez de trouver le temps long bien avant d’arriver au terme de la demi-heure que réclamera une partie complète, particulièrement si vous jouez seul.

C’est quand même nettement plus sympathique à deux

Car même si NAM-1975 cherche à donner le change avec des power-up bien pensés (mais hélas trop rare), comme ces otages qui viennent vous aider une fois libérées plutôt que de rester cantonnées à leur partition de femme en détresse, des boss géants et des cibles dans tous les sens, le fait est qu’on passe toujours l’essentiel de la partie à recroiser exactement les mêmes cibles et notamment ces soldats qui composent 95% de l’armée adverse.

Le titre essaie de casser la routine, mais tous les adversaires s’affrontent de la même façon

C’est efficace, nerveux et rempli de grosses explosions, mais au bout de deux minutes on a assimilé à peu près tout ce que le gameplay et le jeu ont à offrir, et ça ne se renouvèle hélas pratiquement jamais par la suite. Avec un défi bien adapté, on peut au moins chercher à voir jusqu’où on est capable de progresser avec un nombre défini de crédits – dommage que la version AES, si elle vous cantonne à cinq continues, ne vous offre absolument aucune option pour régler la difficulté. En l’état, le jeu peut rapidement apparaître comme ce qu’il est : répétitif, frustrant et limité, mais lorsqu’on peut rééquilibrer les choses pour le rendre simplement exigeant plutôt qu’extraordinairement difficile, il peut remplir son office en se montrant divertissant pendant dix minutes, particulièrement avec un ami. Et puis bon, les clones de Cabal n’étant pas si nombreux, ce restera sans doute un bon moyen de changer de rythme entre deux parties de Wild Guns.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15/20 (MVS) – 14/20 (AES) L'ambition assumée de NAM-1975 est assez simple à résumer : prendre absolument tout le gameplay de Cabal et doper la réalisation aux stéroïdes. Dans les faits, la mission est au moins partiellement remplie : la quantité hallucinante d'opposition à l'écran dévoilait d'entrée de jeu les impressionnantes capacités de la Neo Geo. S'il y a vraiment matière à s'amuser avec un ami, mieux vaudra passer par les DIP switches pour diluer un peu la difficulté totalement démentielle du titre, faute de quoi on pourra littéralement mourir quarante fois par minute sur la fin de l'aventure. Devoir obligatoirement composer avec ce défi surhumain dans une version AES dépourvue d'écran des options finit par rendre le jeu étonnamment rébarbatif tant on a le sentiment, à force d'aligner les courses et les roulades (le plus souvent pour rien), de ne même plus avoir le temps d'accomplir l'unique objectif de la cartouche : tirer sur les ennemis. Amusant par courtes sessions, et vraiment divertissant à deux quand la difficulté est bien réglée, mais à réserver sinon aux jusqu'au-boutistes de l'action hyper-exigeante.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un mécanisme de roulade inutilement complexe – Une difficulté proprement surhumaine par défaut... – ...et qu'on ne peut baisser que dans le mode MVS – Des environnements et une action pas assez variés

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler NAM-1975 sur une borne d’arcade :

Version Neo Geo CD

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK of America
Date de sortie : 9 septembre 1994
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques :
Non, non, rien n’a changé ♪

On sait en quoi consiste une Neo Geo CD – sensiblement la même chose que la Neo Geo originale, mais en s’efforçant de coûter moins cher, d’où des problèmes de mémoire pour les jeux les plus exigeants du catalogue. Ce n’est évidemment pas le cas de NAM-1975, premier jeu développé pour le hardware original comme on l’a vu, on se doute donc que les différences, si elles existent, seront plutôt à aller chercher du côté des options. Les choses vont aller assez vite ici : il n’y en a pas. On est tout bêtement face à la version AES du jeu gravée sur un CD-ROM, à l’infime nuance près que les continues sont illimités là où ils étaient limités à cinq sur la version cartouche. Un bon défouloir à deux, donc, mais je pense que le joueur solo sera plus à l’aise sur la version MVS.

NOTE FINALE : 14/20

Simple copier/coller de la version AES du jeu – mais avec les continues illimités – NAM-1975 sur CD-ROM hérite donc de la difficulté particulièrement frustrante de cartouche originale sans aucune possibilité de tempérer un peu le défi. Si parvenir devant le dernier boss ne sera pas un problème, on risque d’avoir son compte bien avant d’en être arrivé là, assommé par une action aussi répétitive que punitive.

Space Invaders (1978)

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Bally France, S.A.
Titres alternatifs : スペースインベーダーズ (graphie japonaise), Space Monsters (titre de travail), Invasores do Espaço (Brésil), Invasion (Italie), 太空侵略者 (Chine)
Testé sur : ArcadeAtari 2600Atari 8 bitsAtari 5200MSXFamicomSG-1000Game BoyPC-98PC (Windows 3.1)
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, J2ME, Sharp Zaurus, Terminal, Wii – Playstation 2, Windows, Xbox (au sein de la compilation Taito Legends) – PSP (au sein de la compilation Taito Legends : Power-Up)
Également testés : Deluxe Space InvadersSpace Invaders IISpace Invaders DX

La série Space Invaders (jusqu’à 2000) :

  1. Space Invaders (1978)
  2. Deluxe Space Invaders (1979)
  3. Space Invaders II (1980)
  4. Return of the Invaders (1985)
  5. Space Invaders : Fukkatsu no Hi (1990)
  6. Super Space Invaders ’91 (1990)
  7. Space Invaders DX (1994)
  8. Space Invaders : Virtual Collection (1995)
  9. PD Ultraman Invaders (1995)
  10. Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies (1995)
  11. Space Invaders (1996)
  12. Space Invaders 2000 (1998)
  13. Space Invaders (Game Boy Color) (1999)
  14. Space Invaders (1999)

Version Arcade

Date de sortie : Juillet 1978 (Japon) – Octobre 1978 (International)
Nombre de joueurs : 1 – 1 à 2 (à tour de rôle, selon les versions)
Langue : Anglais
Supports : Borne, table à cocktail
Contrôleurs : Un joystick (deux directions) et deux boutons/trois boutons (selon les bornes)
Version testée : Version internationale
Hardware : Processeur : Intel 8080 1,9968MHz
Son : Haut-parleur – TI SN76477 CSG, Discrete Sound – 1 canal
Vidéo : 260 x 224 (V) 59,541985Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En abordant ici la question de l’origine du jeu vidéo, on l’aura souvent fait sous un angle purement occidental. L’apparition de The Oregon Trail dans les salles de classe américaines, la fondation d’Atari, Pong, l’Odyssey de Magnavox… Seulement, pendant ce temps-là, le Japon n’était pas exactement inactif et ne sera pas resté à développer des machines à pachinko en attendant de s’éveiller à la technologie : comme on peut s’en douter, dès la deuxième moitié des années 70, l’industrie nippone était déjà très intéressée par le jeu vidéo.

Les points attribués sont clairement affichés d’entrée de jeu

Le cas de Tomohiro Nishikado est à ce titre particulièrement parlant : employé de Taito Corporation depuis 1969, celui-ci avait eu l’occasion de travailler sur de nombreuses bornes inspirées de celles d’Atari, dont Soccer, qui n’était fondamentalement qu’une variation de Pong – comme une très large partie des jeux de l’époque. C’est néanmoins en voyant les américains reprendre une de ses bornes intitulée Western Gun pour en faire Gun Fight en remplaçant la technologie à base de diodes et de transistors par un microprocesseur qu’il décida de travailler sur un projet employant la même technologie. Alors passionné par Breakout, Nishikado se mit en tête de concevoir quelque chose d’encore meilleur, en remplaçant le concept trop abstrait des briques par des cibles plus intéressantes. Après que l’hypothèse de tirer sur des humains a été fermement rejetée par Taito, la récente popularité de La guerre des étoiles vint lui donner l’idée de l’invasion extraterrestre. Space Invaders était né.

Si vous ne connaissez pas ce jeu, c’est probablement que vous n’avez pas vécu sur Terre au cours des 45 dernières années

Le concept du jeu est si universellement connu, au point de l’ériger à un rang d’icone vidéoludique plus célèbre encore que Pac-Man ou Super Mario Bros., que je ne le consigne ici que pour la postérité : des rangées d’extraterrestres (inspirés de créatures aquatiques) qui descendent vers le sol, où se trouve votre vaisseau/canon chargé de les détruire avant qu’ils n’y parviennent, avec pour seule protection quatre « boucliers », ou bâtiments (à vous de voir ce que ces blocs verdâtres représentent) qui pourront encaisser un certain nombre de tirs adverses avant de se désagréger.

Pour gagner du temps, détruisez en priorité les ennemis en bout de rangée, afin que les allers-et-retours soient plus longs

La borne intègre une série d’idées géniales : celle de sauvegarder les scores, tout d’abord, engendrant aisni une compétition à distance entre les joueurs ; une musique tenant en quatre notes et se jouant de plus en plus vite au fur et à mesure que la menace grandira et que les extraterrestres iront en s’approchant du sol. Et une autre, dont la légende veut qu’elle soit accidentelle : au fur-et-à-mesure de la destruction de ses forces, l’invasion avance de plus en plus vite… une contingence en fait purement technique, due au fait que le processeur, progressivement soulagé de la charge des sprites à afficher, faisait fatalement tourner le programme de plus en plus vite. Soit une des meilleures trouvailles de game design qui soit pour que le titre devienne plus difficile alors que l’adversité va en s’affaiblissant.

L’objectif étant le score, détruire la soucoupe rouge est toujours particulièrement gratifiant

Qui saura, près d’un demi-siècle après sa sortie, mesurer l’impact réel de Space Invaders (et ce, ironiquement pour un titre auquel Taito ne croyait pas) ? Parler de succès planétaire serait encore en-dessous de la réalité : 6000 bornes avaient déjà été vendues rien qu’en 1979 pour le seul marché américain, un total qui dépassera les 350.000 unités vendues à l’échelle du globe, mais c’est surtout l’impact culturel de ce qui restera comme le tout premier jeu japonais à faire usage d’un microprocesseur qui demeure à peu près impossible à mesurer.

Si les ennemis arrivent jusqu’au sol, c’est le game over

Faut-il mentionner ici la légende selon laquelle la borne aurait carrément provoqué une pénurie de pièces de cent yens à l’échelle du Japon, au point de pousser à la frappe de pièces supplémentaires (spoiler alert : c’est faux) ? Qu’un enfant de douze ans aura pris d’assaut une banque, armé d’un fusil à pompe, simplement pour obtenir de quoi jouer quelques heures de plus ? Plus sordide encore : le cas d’un adolescent anglais de quatorze ans s’étant prostitué pour deux livres Sterling, ce qui correspondait à une dizaine de parties ? Ou celui d’une jeune fille américaine ayant dérobé 5000$ à ses parents juste pour pouvoir continuer à jouer ? Aux États-Unis, la ville de Mesquite, au Texas, aura d’ailleurs tenté de déclarer la borne – et par extension, les jeux vidéo – illégale, au point de pousser le sujet jusque devant la Cour Suprême ; énième rappel que la peur des jeux vidéo ne remonte ni à Doom ni à Grand Theft Auto mais à bien plus loin encore. Cela n’aura de toute façon rien changé : la déferlante était en route, et le premier âge d’or vidéoludique venait de commencer.

La vitesse croissante permet que le titre devienne de plus en plus difficile à mesure que les cibles se raréfient

Ironiquement, le succès de Space Invaders aura empêché Taito d’investir dans l’innovation, constamment réfréné par la demande de nouveaux titres qui soient compatibles avec le hardware existant – laissant ainsi les mains libres à la concurrence pour arriver avec des bornes bien plus impressionnantes. Promu chef de section par Taito, Nishikado aura ainsi été tenu éloigné du game design pour se retrouver en gestionnaire d’équipe – une promotion qu’il aura souvent regrettée.

Moins ils sont nombreux, pire c’est !

Mais à l’échelle du globe, toute une nouvelle génération de programmeurs sera née du simple fait d’avoir posé les mains sur cette borne et d’avoir ressenti le désir de pouvoir faire la même chose. Space Invaders est l’un des pères de l’industrie que nous connaissons aujourd’hui, laquelle aurait été profondément différente si le jeu n’avait pas vu le jour. Pour les joueurs du XXIe siècle, il n’en reste sans doute plus qu’un shoot-them-up primitif quoique étrangement addictif à faibles doses, mais à l’échelle du jeu vidéo, c’est une pierre de faîte. De quoi se souvenir, une fois de plus, d’où tout est parti et de comprendre à quel point quelques couleurs sur un écran correspondaient alors à ce qui s’approchait le plus de ce que recherchent les enfants et bien plus d’adultes qu’on ne veut le croire : la magie.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 10/20 Il est extrêmement difficile de réaliser aujourd'hui, plus de quarante-cinq ans après sa sortie, à quel point un jeu consistant à tirer sur des extraterrestres depuis le bas de l'écran aura bouleversé l'histoire vidéoludique. Succès planétaire que personne n'avait vu venir, premier shoot-them-up, annonciateur du premier âge d'or du jeu vidéo et de la prise de pouvoir de l'industrie japonaise dans les salles d'arcade, phénomène de société allant jusqu'à provoquer une pénurie de monnaie au Japon et à pousser les conservateurs américains à saisir la Cour Suprême (!), Space Invaders est tout cela... autant qu'un petit titre sur lequel on aura beaucoup de mal à s'amuser plus de cinq minutes au XXIe siècle. Borne plus iconique encore que Super Mario Bros. ou Pac-Man, le titre imaginé par Tomohiro Nishikado est à la fois une continuiation logique, une révolution, un symbole, un messie et une borne qui a pris un énorme coup de vieux. État-il même nécessaire de la présenter ? Quoi qu'il en soit, c'est désormais chose faite.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un gameplay dont on fait le tour dès la première partie... – ...et une difficulté qui ne pardonne pas ! – Contenu « 1978 » : un seul niveau à répéter en boucle avec pour seul objectif le score

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Space Invaders sur une borne d’arcade :

Version Atari 2600

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1980
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 32kb
C’est ce qu’on était venus chercher, non ?

Le succès de Space Invaders aura été tel qu’il sera également devenu le premier jeu d’arcade dont la licence aura été vendue pour être porté sur les systèmes domestiques. Naturellement, quoi de plus évident que l’Atari 2600 pour ouvrir le bal en 1980 ? Mine de rien, porter un tel jeu sur la machine d’Atari représentait déjà un colle, car afficher une soixantaine de sprites à l’écran (les 55 extraterrestres, le joueur, les quatre boucliers plus les tirs) n’était vraiment pas chose aisée sur une console qui ne comprenait encore aucun composant conçu dans cette optique. Le programmeur mobilisé pour l’occasion aura donc accompli un bel exploit en parvenant à afficher pas moins de 36 ennemis à l’écran – il aura d’ailleurs fait breveter le procédé. Néanmoins, avec autant de cible disparues, le jeu est devenu sensiblement plus facile, d’autant que les tirs adverses sont également plus lents – comme toujours avec la machine, il est de toute façon possible de régler la difficulté, et il faudra noter vous-même les scores puisque, contrairement à la borne, la cartouche ne les sauvegarde pas. Les graphismes ont beau être moins fins que sur la borne, on ne peut pas dire qu’un joueur du XXIe siècle verra nécessairement une grosse différence, et le fait que le jeu soit devenu plus facile peut même représenter un argument en faveur du portage, tant la borne était difficile. Bref, sans doute pas le shoot-them-up sur lequel on passera le plus de temps aujourd’hui, mais une retranscription globalement fidèle du jeu.

NOTE FINALE : 09,5/20

Pas de mauvaise surprise pour Space Invaders sur Atari 2600, qui aura même dû se retrousser les manches pour pouvoir afficher (une partie des) nombreux sprites de la borne. En termes de sensations de jeu, le résultat est sensiblement équivalent à celui du titre original, tout en se montrant également plus accessible car plus aisé. Pas étonnant que les joueurs aient été si nombreux à se jeter sur cette version à l’époque.

Version Atari 8 bits

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1980
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, cassette
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche testée sur Atari 800 PAL
Configuration minimale : Système : Atari 400/800 – OS : DOS 1.0 – RAM : 8ko
C’est un peu différent, mais l’idée reste la même

Quitte à acquérir une licence, il aurait quand même été dommage de cantonner Space Invaders à l’Atari 2600, pas vrai ? La gamme d’ordinateurs 8 bits d’Atari aura donc également été servie… même si, pour l’occasion, ce portage fait le choix de s’éloigner de la borne. Plus de boucliers ici : les extraterrestres (qui ont changé d’apparence pour l’occasion) sortent désormais d’un vaisseau placé sur la gauche de l’écran, ce qui signifie que vous aurez tout intérêt à profiter de leur arriver pour causer un maximum de dégâts avant qu’ils ne commencent à enchaîner les allers-et-retours et à descendre vers votre vaisseau. En cas de victoire, le vaisseau descendra d’un cran, ce qui signifie que la prochaine vague sera dangereuse plus rapidement, et ainsi de suite. On est donc davantage face à l’un des multiples clones du jeu qui pullulaient à l’époque que face à une transcription fidèle de la borne, ce qui ne signifie par pour autant que le jeu soit mauvais. Au moins aurez-vous une raison valable de l’essayer si jamais vous cherchez une variation sur le même gameplay – après tout, faire fonctionner l’équivalent de la borne n’est pas exactement un défi aujourd’hui…

NOTE FINALE : 10/20

Space Invaders sur Atari 8 bits s’inspire de la borne davantage qu’il ne la retranscrit, pour au final offrir une expérience qui ne s’en éloigne qu’assez marginalement. On perde certes les boucliers, mais il y a un peu plus d’ennemis que sur Atari 2600, et le principe reste fondamentalement le même. Une variante qui a son charme.

Version Atari 5200

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1982
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joystick, trackball
Version testée : Version cartouche internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb
On ne va pas cracher sur quelques sprites ni sur quelques couleurs en plus, non ?

L’Atari 5200 avait la réputation d’être un Atari 800 vendu sans le clavier – ce qui, du point de vue du hardware, était assez proche de la vérité. On tendait donc généralement à y croiser des portages repris au pixel près de la version développée pour la gamme 8 bits mais, pour une fois, ce n’est pas le cas avec Space Invaders qui oublie pour l’occasion les petites adaptations opérées pour la version sur micro-ordinateurs. On hérite donc d’une version qui se veut plus proche de la borne – au détail près que les ennemis ont encore changé de look, qu’ils débarquent une nouvelle fois depuis la gauche de l’écran quand bien même leur vaisseau n’est cette fois pas visible, et qu’il n’y a plus que trois boucliers. Concrètement, et à ces détails près, on se retrouve avec une version équivalente à celle parue sur Atari 2600, mais en plus colorée – et avec plus de cibles, puisqu’il y a désormais 48 extraterrestres à l’écran. Tant qu’à faire, c’est donc toujours un peu mieux.

NOTE FINALE : 10/20

Pour une fois, l’Atari 5200 n’aura pas opté pour une simple reprise des versions Atari 400/800 de Space Invaders et aura préféré offrir son propre portage. Le résultat s’approche de la borne – il est même plus coloré que la version américaine – et la jouabilité fait toujours mouche. L’essentiel, donc.

Version MSX

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 1985
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 1
La borne à domicile !

Sept ans après sa sortie, Space Invaders continuait son trajet, cette fois sur le plus populaire des ordinateurs en Asie : le MSX. Avec Taito à la barre, pas de facéties cette fois : on se retrouve face à une conversion on-ne-peut-plus fidèle de la borne d’arcade, avec les couleurs de la version japonaise et les 55 extraterrestres fidèlement présentés à l’écran. Bien sûr, la vue utilisée ici est plus horizontale que celle de la borne, affichée à la verticale, la ligne du sol a disparu et les boucliers sont détruits par « blocs », ce qui les rend un peu moins utiles, mais ce sont bien les seules concessions notables à reprocher à un portage qui, autrement, fait parfaitement le travail.

NOTE FINALE : 10/20

Sur MSX, Taito accomplit le travail qu’on attendait d’eux en fournissant une version de Space Invaders parfaitement fidèle à la borne, au nombre d’ennemis à l’écran près. On aurait volontiers pu apprécier quelques friandises en plus – au hasard, un décor – mais en l’état, on a ce qu’on était venu chercher.

Version Famicom

Développeur : Tose Co., Ltd.
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 1985 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 192kb
Rien de bien neuf, hein ?

En 1985, difficile de faire l’impasse sur la console qui allait faire comprendre à elle seule que le krach de 1983 n’était qu’un mauvais souvenir : la NES (enfin, en l’occurrence, la Famicom, le jeu n’ayant curieusement jamais quitté le Japon). Pour le coup, Taito n’aura réalisé qu’un investissement minimal, et pour cause : c’est tout bêtement la transcription pixel perfect de la version MSX parue au même moment. On retrouve donc les mêmes qualités (un portage identique à la borne à 95%) et les mêmes défauts (les 5% restants). Une nouvelle fois, on n’aurait rien eu contre un petit ravalement de façade ou quelques modes de jeu supplémentaire, mais il faudrait attendre Super Space Invaders ’91 pour cela.

NOTE FINALE : 10/20

Prise de risque minimale de la part de Taito qui aura tout simplement décidé de porter la version MSX de Space Invaders à l’identique sur Famicom. En tant que pur portage, cela fait une nouvelle fois de travail, mais un peu plus de contenu n’aurait fait de mal à personne.

Version SG-1000

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises, Inc.
Date de sortie : Juin 1985 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb
C’est encore un peu plus joli, et n’allez pas croire que ce soit plus simple parce que les cibles sont plus grosse !

Quitte à porter Space Invaders sur Famicom, pourquoi ne pas en profiter pour faire un détour par chez SEGA via l’ancêtre de la Master System, la SG-1000 ? Comme souvent sur la période, ce ne sera pas Taito qui se sera chargé du portage, mais bien SEGA eux-mêmes. Et pour le coup, leur version fait mieux que se défendre face aux portages sur NES et sur MSX : les extraterrestres sont plus détaillés, le sol fait son retour et les boucliers ne disparaissent plus par blocs (ce qui les rend à nouveau utiles en tant que postes de tir). Sachant que le titre est toujours aussi coloré, c’est sans doute le meilleur portage officiel dont on pouvait profiter à l’époque, mais à l’échelle d’une joueur du XXIe siècle, les nuances demeurent relativement anecdotiques.

NOTE FINALE : 10/20

L’histoire retiendra que le meilleur portage officiel de Space Invaders disponible en 1985 était l’œuvre de SEGA et à destination de sa SG-1000. Aujourd’hui, on aura aussi vite fait d’aller jouer directement à la borne, mais si vous voulez une version un peu plus colorée, il est possible que ce portage soit même supérieur à l’original.

Version Game Boy

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Date de sortie : 30 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, avec deux consoles reliées par un câble Game Link)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 256kb
On avait des clones mieux réalisés sur Minitel

Comme ils l’avaient fait avec la Famicom, les petits malins de chez Taito se sont dits que le lancement de la Game Boy correspondait sans doute au meilleur moment pour écouler au prix du neuf un jeu qui était sur le point de fêter ses douze ans. Et devinez quoi ? C’est toujours la borne, sans l’once d’une nouveauté ou d’un mode de jeu en plus, nada (et avec juste quarante ennemis, tant qu’à faire) ! Et histoire de pousser l’affront encore un peu plus loin, la cartouche ne se fatigue même pas à tirer parti des quatre nuances de gris que la console était capable d’afficher : le jeu est rigoureusement monochrome, comme si vous jouiez en ombres chinoises ! Et histoire de remettre une petite cerise au sommet du foutage de gueule, le jeu est jouable à deux… à tour de rôle, à condition d’avoir un câble Game Link ! Comme si on ne pouvait pas simplement se repasser la console ! Bref, une cartouche qui mériterait 20/20 en opportunisme, mais en tant que portage de la borne, c’est vraiment le minimum vital.

NOTE FINALE : 09/20

Attiré par l’odeur de l’argent facile, Taito aura livré avec Space Invaders sur Game Boy le jeu le plus extraordinairement fainéant de tout le catalogue de la machine, avec un seul mode de jeu, une partie en alternance qui nécessite deux consoles et un câble (!) et une réalisation strictement monochrome. Résultat : douze ans après, ça ne vaut même pas la borne, et c’est sans doute le plus mauvais portage du jeu. La grande classe.

Version PC-98

Développeur : Outback Pty. Ltd.
Éditeur : WiZ
Date de sortie : 31 janvier 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Ici, les graphismes « retouchés » ; ah oui, c’est impressionnant…

1992, et Space Invaders continuait d’être proposé à la vente – exclusivement au Japon, une nouvelle fois, le marché occidental semblant un peu moins réceptif aux vieilles gloires. Cette fois, histoire de faire bonne mesure, le portage propose deux modes de jeu : un mode original en noir et blanc correspondant à la borne (laquelle était en couleurs, elles, mais enfin passons), avec même une réalisation plutôt inférieure puisqu’ici le programme ne joue pas la musique et les bruitages en même temps, et un mode offrant des graphismes retravaillés, avec notamment un mode « parody » vous opposant à des canettes de soda ou des ordinateurs sur l’ouverte du Guillaume Tell de Rossini ou sur l’Hymne à la joie de Beethoven. Si un peu de nouveauté fait plaisir (surtout parce qu’on a enfin le droite à de la « vraie » musique), on ne pourra s’empêcher de penser que cela reste extrêmement maigre : le déroulement n’a toujours pas changé d’un iota, et le décor demeure intégralement noir, sans même un modeste bitmap pour agrémenter ! Bref, une nouvelle fois, un mauvais coup de peinture sans idée et paru au minimum sept à huit ans trop tard.

Dans l’ensemble, on sent que les graphistes ne se sont pas foulés…

NOTE FINALE : 10/20

Il fallait quand même un certain culot pour oser proposer un portage pareil de Space Invaders en 1992, avec juste un modeste coup de peinture même pas spécialement bien fait pour habiller un contenu qui n’avait pour ainsi dire pas subi le moindre changement depuis 1978. Quoi qu’il en soit, cela ne représente pas une amélioration suffisamment notable pour se donner la peine de dénicher cette version aujourd’hui.

Version PC (Windows 3.1)

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : WiZ
Date de sortie : 1997 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version CD-ROM émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80486 – OS : Windows 3.1
Modes graphiques supportés : 640×480 256 couleurs
Ça fait rêver, hein ?

À une époque où les vieux jeux d’arcade connaissaient un (bref) regain de popularité, Taito aura décidé de ne pas laisser passer le train en proposant plusieurs rééditions de sa licence phare. Cette version apparemment publiée en 1997, est la plus étrange de toutes : outre une date de sortie plus que tardive, alors que tout le monde était déjà passé à Windows 95 depuis un bon bout de temps (ce n’était peut-être pas le cas au Japon, d’où le jeu n’est apparemment jamais sorti ?), elle ne propose pour ainsi dire… rien d’autre que le jeu de base. Sérieusement. Histoire de faire bonne mesure, vous pourrez malgré tout choisir entre des graphismes en noir et blanc, des graphismes en couleurs, et une très vague refonte où les sprites sont intégralement en blanc, mais devant un paysage lunaire qui sera, lui, en couleurs. En-dehors de cela et du choix du nombre de vies (entre trois et cinq), de la présence ou non du son et du choix du score nécessaire à gagner une vie supplémentaire, il n’y a pour ainsi dire strictement rien de neuf. Pas étonnant, dès lors, que cette version soit aussi difficile à trouver de nos jours – je ne pense pas que les joueurs se bousculent pour tenter de la dénicher.

NOTE FINALE : 10/20

Difficile de dire pour quelle raison saugrenue Taito se sera senti obligé de publier une version aussi limitée de Space Invaders près de vingt ans après la sortie du jeu – surtout quand d’autres versions, un peu plus riches en contenu, étaient disponibles à la vente. Dans tous les cas, à moins de chercher spécifiquement une version du jeu pensée pour Windows 3.1, vous pouvez faire l’impasse sans trop de regrets.

Deluxe Space Invaders

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Midway Mfg. Co.
Titres alternatifs : Space Invaders : Part II (écran-titre), Moon Base (version japonaise par Nichibutsu), Moon Base Zeta (écran-titre, version japonaise par Nichibutsu)
Testé sur : Arcade
Disponible sur : PlayStation 2 (au sein de la compilation Taito Memories : Gekan), PSP (au sein de la compilation Space Invaders Pocket)

Version Arcade

Date de sortie : Septembre 1979 (Japon) – Novembre 1979 (États-Unis) – 1980 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Borne, table à cocktail
Contrôleurs : Un joystick (deux directions) et un bouton
Version testée : Version américaine
Hardware : Processeur : Intel 8080 1,9968MHz
Son : Haut-parleur – TI SN76477 CSG, Discrete Sound – 1 canal
Vidéo : 260 x 224 (V) 59,541985Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quand on tient l’un des plus grand succès de l’encore courte histoire vidéoludique, on se doute qu’il ne vaut mieux pas lui laisser prendre la poussière. Si l’obsession n’était alors pas encore de créer des séries à rallonge, Taito avait bien compris qu’il valait mieux battre le fer tant qu’il était chaud, d’où la conception de versions à peine modifiées du jeu présentées comme des suites histoire d’écouler quelques milliers de bornes en plus à moindres frais. Le cas de Deluxe Space Invaders (parfois commercialisé sous le nom de Moon Base au Japon et en Europe, preuve qu’on n’était pas encore certain que les joueurs se précipiteraient vers une borne simplement parce qu’elle s’appelait Space Invaders) est pratiquement un cas d’école : c’est à 99% la même borne que son prédécesseur, mais avec juste assez de nouveautés pour pouvoir surprendre le joueur le plus rodé. Déjà, le jeu est en couleurs même dans sa version américaine, ce qui est toujours bienvenu, et la réalisation sonore est un peu supérieure. Surtout, le titre introduit désormais une forme de variété entre les vagues : outre le numéro qui apparait dorénavant sur vos boucliers, il arrive désormais que certains niveaux laissent apparaître des ennemis encore plus redoutables que d’ordinaire, puisqu’ils se diviseront en cas de coup au but – augmentant de fait le nombre de cibles à abattre. Il y a désormais un « mystery ship » qui prend parfois la place de la soucoupe volante, et qui peut lui aussi lâcher des ennemis surnuméraires. On notera également quelques spécificités liées au score, comme le fait que vous aurez le droit à un feu d’artifice et à un bonus de 500 points si vous terminez la partie en abattant un extraterrestre d’une des deux rangées inférieures, etc. Bref, rien de franchement bouleversant pour le joueur occasionnel qui n’aurait approché la borne originale que quelques minutes, mais de quoi relancer un peu le défi pour les mordus qui étaient capables de finir plusieurs vagues avec une seule pièce.

Pas de révolution, juste de quoi pimenter un petit peu les choses

NOTE FINALE : 10,5/20

Simple évolution qui constituerait à peine un patch de nos jours, Deluxe Space Invaders introduit malgré tout quelques éléments qui viennent légèrement brisé la routine qui était de rigueur dans le premier Space Invaders. Vraiment pas de quoi renouveler l’expérience pour ceux qui estimeraient en avoir fait le tour – et on les comprend – mais quitte à découvrir le jeu aujourd’hui, autant commencer par cette version.

Space Invaders II

Développeur : Midway Mfg. Co.
Éditeur : Midway Mfg. Co.
Testé sur : Arcade
Disponible sur : PlayStation 2 (au sein de la compilation Taito Memories : Gekan), PSP (au sein de la compilation Space Invaders Pocket)

Version Arcade

Date de sortie : Mars 1980 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Table cocktail
Contrôleurs : Un joystick (deux directions) et un bouton
Version testée : Version américaine
Hardware : Processeur : Intel 8080A 1,9968MHz
Son : 2 hauts-parleurs – TI SN76477 CSG, Discrete Sound – 2 canaux
Vidéo : 260 x 224 (V) 59,541985Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le cas de Space Invaders II (à ne pas confondre avec Space Invaders : Part II qui correspondait à la version Deluxe que nous venons de voir) est encore un peu particulier : il s’agit d’une borne qui n’a rien à voir avec Taito, et qui a été conçue et commercialisée exclusivement aux États-Unis par un programmeur nommé Joel Kreger. Le terme de « borne » est d’ailleurs inapproprié ; le titre n’aura vu le jour que sous la fome d’une « table à cocktail », et pour cause : le grand apport de cette version est de permettre le jeu à deux en simultané, chacun des joueurs prenant place à l’une des extrémités de la table. Le concept est aussi simple qu’il est génial : on est à la fois face à un jeu coopératif (les deux joueurs s’efforçant de détruire les vagues d’ennemis situées entre eux) et compétitif, puisqu’il est tout-à-fait possible de détruire son « allié » et de concourir pour le score, en saine rivalité. En solo, seule la moitié occupée par le joueur compte des adversaires, mais un deuxième vaisseau est malgré tout présent à l’opposé pour apporter son aide ; c’est néanmoins à deux que le titre révèle tout son intérêt, comme on peut s’en douter. On notera également une autre nouveauté : le « Mystery Ship » vient déposer une nouvelle rangée d’adversaires, ce qui peut le rendre d’autant plus important à abattre si vous souhaiter éviter de vous faire déborder. Bref, un très bon moyen de transcender un concept à peu de frais, et une bonne façon de découvrir le jeu à deux aujourd’hui.

Simple, mais il fallait y penser

NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 11/20 (à deux)

Space Invaders II apporte une idée géniale : transformer l’expérience solo de Space Invaders en une expérience à la fois coopérative et compétitive. Pour simple qu’il soit, le résultat a l’intérêt de se renouveler nettement plus que celui de son prédécesseur et d’offrir quelques bons moments avec un ami. Une curiosité à découvrir, et un investissement original si jamais vous cherchez une table cocktail qui fasse fureur lors des apéritifs.

Space Invaders DX

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Testé sur : Arcade

Version Arcade

Date de sortie : Septembre 1994 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et trois boutons
Version testée : Version américaine
Hardware : Processeurs : Motorola MC68000 12MHz ; Zilog Z80 4MHz
Son : Haut-parleur ; YM2610 OPNB 8MHz ; 1 canal
Vidéo : 320 x 224 (H) 60Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le retrogaming n’est pas nécessairement une notion aussi récente qu’on pourrait le penser. À titre d’exemple, en 1994, la borne originale de Space Invaders fêtait déjà ses seize ans, et de nombreux vétérans de la première heure écrasaient déjà une larme nostalgique à l’idée de pouvoir relancer la borne qui avait initié leur passion subite pour le jeu vidéo.

C’est exactement le principe de Space Invaders DX, qui offre pour l’occasion une sorte de tour d’horizon des différentes versions du titre original : la borne en noir et blanc, en version couleur, avec un décor peint à la main et même la fameuse version avec une feuille de cellophane colorée. S’avisant que cela restait peut-être un peu maigre en 1994, où toute la nostalgie du monde ne pouvait pas faire ignorer la présence des bornes de Daytona USA ou de Killer Instinct à proximité, le jeu ajoute un mode versus où une ligne d’adversaires détruite en fait apparaître une autre chez le joueur adverse – pourquoi pas, mais cela reste plutôt moins amusant que le mode mi-coopératif mi-compétitif de Space Invaders II. Et pour soigner l’emballage, un mode « Parody » est également présent, qui consiste tout simplement à parcourir des niveaux reprenant les thèmes de jeux comme New Zealand Story, Bubble Bobble, Liquid Kids et bien d’autres licences de chez Taito. Là encore, cela entraîne au moins une certaine curiosité de découvrir quel sera le prochain univers visité, mais il faut garder à l’esprit que le gameplay est resté strictement identique à celui de 1978, sans y introduire une seule nuance. Autant dire une curiosité qui risque de s’essouffler un peu vite, mais qui reste un moyen comme un autre de découvrir le jeu aujourd’hui.

NOTE FINALE : 11/20

Nostalgie ou pas, il faut bien reconnaître que proposer un florilège des bornes originales de Space Invaders en 1994, en y ajoutant au passage un mode deux joueurs anecdotique et une mode « Parody » se limitant à un coup de peinture fraîche n’avait pas de quoi déplacer les foules, et que ce Space Invaders DX reste encore aujourd’hui une curiosité dans l’histoire du retrogaming davantage qu’une borne qui vous offrira une raison d’y consacrer plus de dix minutes.