Populous

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Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts Ltd.
Testé sur : AmigaAtari STPC (DOS)Mega DrivePC-98Sharp X68000Super NintendoMaster SystemPC EngineAcorn 32 bitsGame BoyMacintosh
Les extensions du jeu : The Promised Lands, The Final Frontier
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com (Windows)

La saga Populous (jusqu’à 2000) :

  1. Populous (1989)
  2. Populous II : Trials of the Olympian Gods (1991)
  3. Populous : The Beginning (1998)

Version Amiga

Date de sortie : Avril 1989 (Europe) – Juillet 1989 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dans le monde vidéoludique, les jeux d’exception ne sont pas les seuls à connaître la célébrité. Ils entraînent parfois dans leur sillage des studios de développement entiers, des éditeurs… voire même des programmeurs, propulsés sous le feu des projecteurs par le succès de leur créature. Parmi les pionniers, les premiers à avoir mis un visage sur la production informatique, on pourra par exemple penser à Richard Garriott, immortel créateur de la saga Ultima,  à Chris Roberts, génial concepteur des Wing Commander, ou encore Geoff Crammond, auteur de The Sentinel et de Formula One Grand Prix… et surtout, Peter Molyneux. Un nom qui, contrairement aux autres, aura des chances de parler encore aux moins de trente-cinq ans.

Un début de partie typique vous verra débuter avec quelques hommes éparpillés sur une terre inhospitalière

Il faut bien comprendre qu’avant de devenir le symbole vivant des promesses extravagantes non-tenues, de l’ambition démesurée, des projets Kickstarter frôlant l’escroquerie et des vaporwares, Peter Molyneux s’était avant tout fait un nom grâce à une série de succès critiques et commerciaux : Fable, pour les plus jeunes, mais avant cela Theme Hospital, Theme Park, Dungeon Keeper… et à la racine de tout, le fondateur du God game, le jeu qui nous intéresse aujourd’hui : Populous.

La lutte entre les deux « papes » pourra rapidement devenir un enjeu majeur de la partie

Revenons en 1989. S’il est alors un genre de niche, sur toutes les machines du marché, c’est bien celui du jeu de stratégie – plus encore que le jeu de rôle, porté par des monuments comme Bard’s Tale ou Dungeon Master qui se sont chargés de le populariser. L’austérité du genre, qui cumule des tares comme des interfaces aussi opaques qu’incompréhensibles et une réalisation rarement plus emballante qu’un tableau Excel, en fait le repoussoir idéal pour le grand public, plutôt à la recherche de titres à la prise en main immédiate comme ceux qui pullulent alors dans les salles d’arcade. Certes, des jeux comme Defender of the Crown sont venus dépoussiérer un peu le genre, notamment en rehaussant considérablement les attentes en terme de réalisation, mais ils sont restés l’exception plutôt que la règle. Et puis Populous est arrivé.

Le nom de votre prochaine destination fera également office de mot de passe

Oubliez les soldats, les généraux, les rois : le titre de Bullfrog vous place directement dans la peau d’un dieu, rien de moins. L’objectif est simple : vous faire une place au sommet de la hiérarchie divine en mettant au pas les autres divinités qui se mettront sur votre route. Mais être un dieu n’est pas nécessairement aussi simple qu’on le croit, et votre quasi-omnipotence dépend d’un facteur critique : la foi que vos fidèles placent en vous. Et comme les dieux ne s’affrontent apparemment ni au catch ni au bras de fer, ce sont bel et bien vos ouailles qui vont devoir mener le combat, en votre nom, histoire de vous permettre d’accéder enfin à la toute-puissance. À vous, donc, le plaisir de parcourir les 500 niveaux du jeu pour devenir enfin l’unique big boss du panthéon.

Le chevalier est un pouvoir qui peut faire beaucoup de dégâts

Le jeu vous place devant une interface qui pourra demander quelques explications aux yeux du profane. En haut à gauche se trouve la carte du niveau que vous êtes en train de jouer, qui vous offrira une vue aérienne de votre royaume. Au centre de l’écran se situe la fenêtre principale, celle sur laquelle vous allez intervenir la très grande majorité du temps. C’est là que vous allez aider vos quelques fidèles – habillés en bleu – à se renforcer, à se multiplier et à s’étendre, jusqu’à l’inévitable instant où ils croiseront la route des ouailles de votre adversaire – habillés en rouge – et à se mettre joyeusement sur la gueule au lieu de fraterniser. Et comment les aider, justement ? De la façon la plus simple qui soit – pour un dieu, s’entend – : en aplanissant au maximum le terrain, afin de laisser à vos fidèles la place de construire des bâtiments de plus en plus monumentaux, depuis la simple tente jusqu’au colossal château fort.

Aplanir un volcan est une tâche qui prend beaucoup de temps, tâchez d’utiliser celui-ci à votre avantage

Un clic gauche augmente l’altitude d’une parcelle de terrain, un clic droit la rabaisse ; difficile de faire plus accessible. Plus l’habitation d’un de vos fidèles sera vaste, et plus il y gagnera en force avec le temps. Revers de la médaille : vos ouailles ne sortant de chez elles pour fonder une autre « ville » que lorsqu’elles ont atteint leur puissance maximale, une civilisation composée de puissants châteaux mettra également bien plus de temps à s’étendre qu’une communauté composée de maisons de plus petite taille. Il faudra donc trouver le bon équilibre entre la croissance et la puissance pour avoir une chance de ne pas se faire déborder par l’adversaire.

Plus l’environnement est hostile, et plus vos hommes mettront de temps à se multiplier

En haut à droite se situent deux indicateurs importants. Le premier est une barre de mana, qui vous indique à la fois l’étendue de votre pouvoir sacré et les pouvoirs divins que cela vous permet d’activer. Plus vous aurez de fidèles, plus ceux-ci seront puissants, et plus vite cette barre grimpera. Si, au début d’une partie, le simple fait de niveler le territoire peut venir à bout de vos réserves assez vite, vous deviendrez rapidement libre d’invoquer des tremblements de terre, des marécages mortels, des volcans ou des raz-de-marée faisant disparaitre des continents entiers sous les flots, voire un Armageddon qui fera disparaître tous les bâtiments à l’écran pour clore la partie par une mêlée générale au centre de la carte. Le bouclier visible au-dessus de cette barre vous communiquera parfois des informations sur un de vos fidèles – de façon très aléatoire, hélas – et les deux jauges qui l’entourent représentent la force respective des deux camps, très importantes à consulter avant de lancer un Armageddon ou un assaut en bonne et due forme, donc.

Les marécages peuvent faire des ravages, mais n’oubliez pas qu’ils tuent indifféremment des deux côtés

Enfin, en bas à gauche se trouve la liste de tous les pouvoirs que vous êtes susceptible d’employer – et qui varieront selon les niveaux, tout comme ceux de votre adversaire. Si, lors des premières parties, vous serez généralement doté d’un arsenal conséquent pendant que votre opposant sera privé de tout, vous vous doutez bien que cela ira en se compliquant au fur et à mesure, et que les restrictions que vous imposera progressivement le jeu auront un impact déterminant sur votre façon de jouer – tout comme les pouvoirs dont dispose votre ennemi. Le simple fait qu’il ait la possibilité de convoquer un raz-de-marée, par exemple, pourra vous obliger à bâtir tout votre empire sur les hauteurs pour éviter de le voir disparaître d’un seul coup au pire moment.

Prêtez bien attention aux pouvoirs utilisables dans un camp comme dans l’autre : votre stratégie en dépendra

Notez également la présence d’icônes pour dicter à votre peuple son comportement général, de manière plus ou moins efficace : il pourra ainsi chercher à s’étendre, chercher à « fusionner » pour gagner en puissance, chercher à aller se frotter à l’ennemi ou bien converger vers votre « pape », un fidèle particulier que vous pourrez guider en positionnant un « aimant papal » (!) et qui sera votre seul moyen d’avoir une prise directe sur l’endroit où se rendront vos ouailles. N’hésitez pas à le placer au milieu du camp adverse au moment où vous voudrez pimenter un peu les choses : résultat garanti. N’oubliez pas, cependant, que votre adversaire a tout à fait le droit de faire exactement la même chose.

Le jeu dispose d’un didacticiel qui n’est finalement qu’un niveau comme les autres avec beaucoup plus de mana

Je vous rassure tout de suite : même si le titre comporte 500 niveaux, vous n’aurez pas à les finir tous pour arriver à la fin du jeu. Populous reprend en fait un système hérité de The Sentinel : selon vos performances et votre score, vous vous verrez propulsé jusqu’à sept ou huit niveaux plus loin. Il vous restera cependant largement assez de matière pour vous garder occupé une bonne vingtaine d’heures, et pour apprendre à réadapter vos stratégies selon les situations. Pas trop quand même : si le jeu était très innovant pour l’époque, les joueurs actuels, un peu plus habitués à gérer des dizaines de critères en temps réel, devraient vite trouver leurs marques – et pester contre le manque de contrôle que l’on exerce sur nos ouailles, qui font parfois, avouons-le, un peu n’importe quoi. Il faudra également se doter d’un certain don d’ubiquité : l’ordinateur n’a pas le bon goût de vous prévenir de ce qui se passe, et il faut souvent attendre, par exemple, d’entendre le bruit caractéristique d’un fidèle en train de patauger dans des marécages pour apprendre que votre adversaire vient d’utiliser ce pouvoir contre vous. Reste que le principe, lui, a plutôt bien vieilli, et qu’on se prend rapidement à s’amuser à jouer à dieu en allant donner une bonne leçon à ces impudents en rouge.

Les choses se compliquent lorsque vos deux empires se retrouvent au contact

À ce niveau, la réalisation était irréprochable pour un titre de 1989, et a toujours un charme certain. L’action est lisible, le monde est vivant, les environnements variés (ce qui a d’ailleurs un effet sur la difficulté du jeu). Bon, certes, au bout d’un moment, on se lasse un peu de voir sempiternellement les mêmes personnages et les mêmes bâtiments, mais les extensions viendront corriger ce détail. Le tout a encore un charme certain, y compris la musique mi-oppressante mi-planante qui apporte une certaine tension. Et puis, cerise sur le gâteau, il était possible à l’époque d’y jouer à deux par modem ou câble, et on sait à quel point ce type de jeu ne prend réellement toute sa valeur que face à un autre être humain. Et en cross-platform, s’il vous plaît, un jouer PC pouvant tout à fait affronter un jouer Amiga ! C’est évidemment un peu plus compliqué de nos jours, les Amiga fonctionnels courant moins les rues, mais cela fait partie de la somme des excellentes idées qui avaient contribué, à l’époque, à rendre le titre incontournable.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1989 (Tilt n°72, décembre 1989) – Meilleur jeu de réflexion/stratégie – Versions Amiga et Atari ST
  • Tilt d’or 1989 (ibid.) – Nommé au titre de jeu le plus original (remporté par SimCity) – Versions Amiga et Atari ST
  • Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Meilleur jeu de stratégie sur console – Version Super Famicom

NOTE FINALE : 14/20 Populous était un titre aussi novateur qu'ambitieux à l'époque de sa parution, et l'efficacité quasi-intacte du système de jeu imaginé par les studios Bullfrog près de trente ans après sa sortie montre à quel point celui-ci avait été bien pensé. Évidemment, le joueur actuel, moins impressionné par un genre qui aura eu tout loisir de se développer à sa manière depuis lors, regrettera sans doute un certain manque de variété et de renouvellement dans les pouvoirs à employer et dans les décors traversés. Reste que sur le plan du plaisir de jeu, l'alchimie fonctionne toujours, et on se démène rapidement, dans les niveaux les plus avancés, pour trouver la faille face à un adversaire de plus en plus puissant et de plus en plus surnuméraire. Un monument fondateur. CE QUI A MAL VIEILLI : – Interface demandant un peu de pratique – Assez répétitif sur la durée – Manque de variété dans les stratégies et les univers rencontrés – Un seul thème musical au-delà de l'écran-titre

Les avis de l’époque :

« Entièrement animé et bénéficiant d’un scénario captivant et d’une excellente réalisation, Populous est un remarquable logiciel. Le fond sonore est… divin, la convivialité parfaite ! Original, prenant, Populous est une bouffée d’air frais dans le monde de la micro-ludique. J’ose le dire, il est beau et fabuleux ! »

Dany Boolauck, Tilt n°65, Avril 1989, 18/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Populous sur un écran cathodique :

Populous : The Promised Lands

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Date de sortie : Septembre 1989
Testé sur : Amiga, Atari ST, PC (DOS), PC-98, Sharp X68000, PC Engine Duo

Populous ayant connu un succès commercial aussi immédiat que fulgurant, on pouvait s’attendre à ce qu’une suite soit rapidement mise en chantier. Mais celle-ci n’étant pas appelée à paraître avant 1991, on pouvait également imaginer qu’Electronic Arts chercherait des façons plus immédiates d’engranger encore un peu plus d’argent. Gagné ! Quelques mois à peine après la sortie du jeu paraissait sa première extension (on parlait alors de Data Disk) : Promised Lands, qui se verra décliner d’ailleurs sur plusieurs machines au fil des années. En quoi peut donc consister cette extension ? 500 nouveaux niveaux ? Eh bien… pas vraiment.

Dites bonjour aux nouveaux univers graphiques ! Ici, la révolution française.

En fait, l’extension reprend les 500 niveaux du jeu original pratiquement à l’identique. La difficulté a juste été augmentée drastiquement, et les choses devraient se compliquer beaucoup plus vite que lors de votre premier passage : très rapidement, l’adversaire est largement avantagé par rapport à vous, et vous ne pourrez plus compter sur un rapport de force largement à votre avantage dans la première moitié du jeu comme c’était le cas dans le jeu de base. Un bon moyen de re-signer pour une deuxième partie ? Sur le papier, c’est quand même un peu léger, alors la vraie innovation va prendre une autre forme : la réalisation.

Ici, les cowboys face aux indiens. Bon, d’accord, les bâtiments changent, mais pas trop les décors…

Promised Lands propose en effet de nouveaux univers graphiques, particulièrement dépaysants, qui auront pour objectif de vous faire oublier vos sempiternels fidèles en peaux de bête bleues ou rouge. Oubliez les plaines glacées et les terres volcaniques : cette fois, vous pourrez vous balader dans la révolution française (!), sur une planète extraterrestre, sur un monde composé de legos, dans un western opposant les cowboys aux indiens (et où les gentils sont les indiens, ça change !), et même, symbole ultime de l’époque, dans un univers informatique opposant… Atari à Commodore (et où on remarquera, d’ailleurs, que le méchant est Atari) !

…Alors voilà quelque chose de plus original : Silly World ! Le monde Lego et la guerre Atari/Commodore sont également très dépaysants

Si tout cela pourrait sembler totalement gadget à première vue, il faut reconnaître que cette extension a le grand mérite d’offrir au jeu une partie de la variété qui lui manquait – faire le tour des différents univers graphiques proposés vous demandera de boucler au minimum une dizaine de niveaux, ce qui, vu la difficulté du titre, devrait déjà vous occuper un petit moment. Le challenge rehaussé du titre sera d’ailleurs une bonne occasion, pour les mordus de la première heure, de remettre le bleu de chauffe pour venir à bout d’un jeu devenu bien plus coriace. On regrettera, en revanche, que le système de jeu n’ait, pour sa part, pas changé d’un iota : on retrouve exactement les mêmes pouvoirs et les mêmes possibilités que dans le jeu de base, et le thème musical n’a pas changé non plus. À noter que la version Super Nintendo de Populous intègre par défaut les environnements de Promised Lands en ajoutant même un inédit : le monde pâtissier.

NOTE FINALE : 13,5/20

Sans transcender en rien le principe du jeu de base, Promised Lands a au moins le mérite de réenchanter un peu un titre dont on avait parfois un peu trop rapidement fait le tour, en offrant des univers imaginatifs et une difficulté augmentée qui offrent un très bon prétexte pour se replonger, une deuxième fois, dans les 500 niveaux du jeu. On aurait aimé un peu plus de prise de risques – des nouveaux niveaux, des nouveaux pouvoirs – mais il faut bien reconnaître qu’on s’amuse toujours autant, à condition d’aimer le challenge. À essayer.

Populous : The Final Frontier

Date de sortie : Novembre 1989
Testé sur : Amiga, Atari ST

D’accord, ça change, mais on s’en lasse quand même assez vite

Ce deuxième Data Disk pour Populous est un peu particulier. Vous auriez eu bien du mal à le trouver en magasins, et pour cause : il s’agissait d’un disque promotionnel vendu avec le magazine britannique « The One ». Mine de rien, celui-ci vous offre quand même 500 nouveaux niveaux, avec un seul et unique nouveau cadre, de type « planète extraterrestre », pour changer un peu. On ne se moquait pas du monde, niveau promo, à l’époque !

En terme de système de jeu, le titre de Bullfrog n’a toujours pas changé d’un iota, mais il faut reconnaître que les fidèles des deux camps se reproduisent très vite, dans cette version, ce qui rend le gameplay beaucoup plus nerveux et complique un peu les choses. À moins d’être un mordu total du jeu original, je doute que vous trouviez la patience pour finir cette extension qui devient vite redondante, mais on appréciera l’idée.

Au moins, on ne pourra pas accuser les graphistes de chez Bullfrog de s’être tournés les pouces

NOTE FINALE : 11/20

Sur le plan purement ludique, Final Frontier est une extension gadget qui devrait divertir les joueurs les plus patients pendant une heure ou deux avant qu’ils ne soient tentés de passer à autre chose. Les joueurs les plus fanatiques bénéficieront malgré tout de 500 nouveaux niveaux, mine de rien, ce qui montre à quel point les opérations de promo des années 90 pouvaient se montrer ambitieuses. Une curiosité.

Version Atari ST

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Mai 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme à peu près tous les jeux de l’époque, Populous aura bien évidemment connu son adaptation sur Atari ST. Aucune surprise au niveau du contenu : le jeu est très exactement identique, et les graphismes sont les mêmes au pixel près – ce qui nous montre, au passage, que Bullfrog n’avait pas utilisé l’Amiga à son plein potentiel. Seule différence de taille : la musique. Si celle-ci est toujours présente lors des crédits qui suivent l’écran-titre, quoique dans une version étrangement rabotée se débarrassant de l’ouverture planante de la version Amiga et mélangeant un peu anarchiquement le reste, le jeu, lui, se fera nécessairement dans un silence de mort à peine entrecoupé des quelques rares bruitages du titre, ce qui est quand même un peu dommage.

Le jeu est visuellement identique à la version Amiga

NOTE FINALE : 13,5/20

L’Atari ST livre la version de Populous à laquelle on pouvait s’attendre : un parfait clone du jeu paru sur Amiga. Dommage, malgré tout, que la musique soit passée à la trappe dans la manœuvre : on ne me fera jamais croire que la machine d’Atari n’était pas capable de jouer un thème sonore pendant la partie.

Version PC (DOS)

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0 – RAM : 384ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Chose encore assez rare pour être signalée en 1989 : la version PC de Populous n’aura, pour une fois, pas à rougir de la comparaison avec les versions Amiga et Atari ST. Graphiquement, dès l’EGA, c’est parfaitement identique, tout comme le contenu et la jouabilité. Deux nuances, malgré tout : l’écran-titre a été remplacé par une version mettant un peu plus en avant le combat de divinités, ce qui aura ses détracteurs comme ses défenseurs, et n’est de toute façon que très anecdotique. Deuxièmement, le jeu a la bonne idée de reconnaître l’AdLib (et donc par extension la Sound Blaster) et la Roland MT-32 ce qui, au moment de sa sortie, était encore très loin d’être la norme. Et si le thème a encore une fois perdu son ouverture planante, sa partie pêchue, elle, est très bien rendue quelle que soit la carte son, et reste très honnête avec le haut-parleur PC. C’est d’ailleurs elle qui vous accompagnera pendant la partie, puisque le deuxième thème de la version Amiga n’a pas fait la route jusque sur PC. Le résultat est très bon, même si le côté cyclique du morceau risque de fatalement vous pousser à couper la musique au bout de quelques heures de jeu. Oh, et le personnage qui vous délivre les mot de passe entre les niveaux n’est plus animé et n’a plus sa courte digitalisation, mais je pense que tout le monde s’en remettra.

Vous allez commencer à bien connaître cet écran

NOTE FINALE : 14/20

Les portages de cette qualité étaient encore rares, sur PC, en 1989, et Bullfrog ne s’est pas moqué du monde en livrant une version identique graphiquement à la version Amiga, et capable de rivaliser avec son illustre modèle dès l’instant où vous aviez une carte sonore – la version MT-32 du thème peut largement faire oublier l’original sur Amiga. Tout est toujours à sa place et le jeu est toujours aussi jouable, alors pourquoi se priver ?

Version Mega Drive

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Juillet 1990 (États-Unis) – Décembre 1990 (Europe) – 9 août 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Fort de son succès, Populous devait fatalement partir un jour à l’assaut des consoles de salon. La Mega Drive aura fait partie des premières machines servies, et s’en sort honorablement. Comme un symbole, le jeu utilise l’écran-titre des version ST et Amiga avec une musique assez proche de la version PC – en un peu moins bon qu’avec une Roland MT-32, mais pas de quoi rougir. Il rajoute même une petite introduction textuelle. Une fois en jeu, on se retrouve en revanche avec un simple battement de cœur en guise de fond sonore, un peu comme sur Amiga, mais sans les nappes planantes par-dessus. Un peu dommage.

Le curseur est un peu lent, mais la jouabilité se dompte très bien avec un peu de pratique

Graphiquement, le jeu est un peu moins coloré que sur les ordinateurs 16 bits – une tare étrangement répandue sur les jeux Mega Drive de la période, qui avaient une fâcheuse tendance à afficher des couleurs très sombres. La jouabilité au pad, d’ailleurs, pourra demander un petit temps d’adaptation, mais s’en sort relativement bien : A sert à monter le terrain, C à le rabaisser, et maintenir B vous aide à scroller sur la carte du jeu. Utiliser les pouvoirs vous demandera toujours d’aller déplacer un curseur sur l’une des icônes correspondantes, ce qui est un peu plus lent que sur ordinateur, mais rarement pénalisant. En revanche, et comme on pouvait le craindre, le mode deux joueurs a définitivement disparu – adapter l’interface à un écran splitté n’aurait de toute façon pas été une mince affaire. On notera aussi que cette cartouche ne fonctionne que sur les premiers modèles de Mega Drive, soyez donc prévenu.

Le jeu aurait pu être un tout petit peu plus coloré. C’est sombre

NOTE FINALE : 13,5/20

Sans pousser la Mega Drive dans ses derniers retranchements, Populous sera au moins parvenu à préserver l’essentiel de l’expérience de jeu sans que la jouabilité au pad ne soit pénalisante. Si la réalisation est honnête, elle pouvait largement prétendre à mieux, et la disparition du mode deux joueurs, aussi compréhensible soit-elle, reste dommageable. Une version sympathique, mais globalement inférieure à celles parues sur ordinateurs.

Version PC-98

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 16 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langues : Anglais (menus)/ japonais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme beaucoup de jeux occidentaux ayant connu un succès international, Populous aura été porté jusque sur les systèmes japonais où il avait l’avantage de ne pas avoir à affronter la barrière de la langue, le jeu ne reposant pas exactement sur le texte. Sur PC-98, on sent bien que la philosophie n’était pas de chercher à réinventer la roue mais bien d’offrir un portage le plus fidèle possible à la version Amiga, ce qui est d’ailleurs assez bien fait. La haute résolution native de la machine n’est mise à contribution que pour adoucir certains dégradés, et la musique s’applique à correspondre au maximum à ce qu’on avait pu entendre sur la machine de Commodore – oh, et tant qu’à faire, le jeu par modem est toujours de la partie. Bref, une transcription très fidèle et qui n’a rien de particulier à offrir pour le joueur occidental ayant déjà découvert le titre sur une autre plateforme, mais qui demeure une alternative irréprochable pour ceux qui n’auraient qu’un PC-98 sous la main.

Quelques détails sont légèrement plus fins, mais il faut vraiment bien regarder

NOTE FINALE : 14/20

Populous sur PC-98 s’inscrit fidèlement dans la philosophie des portages extrêmement respectueux : à quelques infimes nuances près, cela reste la version Amiga dans une itération qui s’attèle à lui être fidèle au pixel près – et qui y parvient très bien.

Version Sharp X68000

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 23 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langues : Anglais (menus)/ japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Inutile de faire durer le suspense : porté par la même équipe, publié par le même éditeur et sorti à une semaine d’écart à peine de la version PC-98, Populous version Sharp X68000 n’en est rien de plus que la transposition quasi-parfaite. Même s’il y a quelque chose de frustrant à voir le monstre de puissance qu’était l’ordinateur de Sharp ne rien offrir de plus qu’un Amiga 500 (le jeu peut même se montrer sensiblement plus lent sur un modèle de base, pourtant cadencé à 10MHz), le portage accomplit sa mission avec une fidélité à toute épreuve, seules les sonorités musicales pouvant connaître de légères nuances d’une machine à l’autre. Inutile de faire la fine bouche : on était venu chercher un portage et c’est exactement ce qu’on obtient. Tant pis pour une éventuelle prise de risques que personne n’a visiblement jamais exigée d’Infinity.

Une différence ? Où ça ? Pourquoi faire ?

NOTE FINALE : 14/20

Comme sur PC-98, la version Sharp X68000 de Populous s’attèle à offrir une reproduction aussi fidèle que possible de la version Amiga sans chercher à la développer ou à la modifier en rien – et y parvient parfaitement. Pas de bonus exotiques à se mettre sous la dent pour les curieux, donc, mais ceux qui auraient tout simplement envie de jouer au hit de Bullfrog sur la machine de Sharp pourront le faire sans regrets.

Version Super Nintendo

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 16 décembre 1990 (Japon) – Septembre 1991 (Amérique du Nord) – 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dans la grande valse des portages, la 16 bits de Nintendo n’aura pas été oubliée. Paru sur une Super Nintendo en début de vie, Populous n’aura pas eu la chance de bénéficier de la gestion de la souris vendue parallèlement à la console – et pour cause, le périphérique n’avait pas encore été créé au moment de la sortie du jeu. La maniabilité au pad nécessitera d’ailleurs un temps d’adaptation encore plus long que sur Mega Drive, la faute à un curseur qui se déplace de zone à zone plutôt que de manière fluide, ce qui risque de décontenancer tous ceux qui y auront joué sur ordinateur. Utiliser les pouvoirs nécessite désormais une pression sur la touche Select pour faire basculer le curseur dans la zone concernée. En revanche, le défilement est haché et le titre, dans son ensemble, est assez lent.

Le jeu intègre les graphismes de Promised Lands, avec quelques petites réadaptations

Graphiquement, le jeu est plus coloré que sur Mega Drive, et pourrait sans doute prétendre enfoncer les versions sur ordinateurs si la Super Nintendo bénéficiait d’une résolution un peu moins limitée. Fort heureusement, plutôt que de sacrifier la fenêtre principale, les développeurs ont eu la bonne idée de répartir l’interface des deux côtés de la fenêtre de jeu. Reste que le jeu a toujours ce côté « sombre » qui n’était pas nécessaire. En revanche, on récupère les environnements graphiques de Promised Lands avec même un petit inédit en bonus ! Pour ce qui est de la musique, si le thème principal ne restera pas dans les mémoires, la musique en jeu reprend le morceau entendu sur Amiga en y ajoutant des souffles de vent, ce qui fait son petit effet. La courte introduction entrevue sur Mega Drive a disparu, tout comme le mode deux joueurs.

L’interface aura été un peu bousculée au passage

NOTE FINALE : 14/20

Si la version Super Nintendo de Populous s’avère graphiquement légèrement supérieure à celle parue sur Mega Drive l’année précédente, elle souffre en revanche d’une prise en main encore moins naturelle qui risque de faire regretter la souris à bien des joueurs, et d’une lenteur générale qui nuit au plaisir de jeu. La disparition du mode deux joueurs est toujours aussi regrettable mais on appréciera l’intégration des environnements de Promised Lands, et même de l’ajout d’un environnement inédit.

Version Master System

Développeur : Code to Go
Éditeur : TecMagik
Date de sortie : Octobre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

La Mega Drive n’aura pas été la seule console SEGA à bénéficier de son portage de Populous : la Master Sytem aura également été sur les rangs. Arrivé en 1991, à un moment où la 8 bits commençait à arriver en fin de vie, le titre de Bullfrog décide de placer le curseur assez haut. C’est bien simple, graphiquement parlant, c’est presque aussi beau que sur Mega Drive ! Bien sûr, c’est un peu moins fin, c’est moins coloré, la fenêtre de jeu est bien plus petite, mais les teintes sont plus vives, et ça reste très agréable à l’œil – et pour ne rien gâcher, on hérite également des environnements de Promised Lands.  Il faudra en revanche faire sans la musique, qui ne franchira pas l’écran-titre.

Comme sur Super Nintendo, cette version intègre les environnements de Promised Lands

Le vrai problème, à vrai dire, était d’adapter la maniabilité du jeu à une manette à deux boutons. Ne nous mentons pas : le résultat est catastrophique. Un bouton sert à passer de la fenêtre principale à l’interface, et vice-versa. L’autre sert à modifier le terrain, selon qu’on l’emploie simultanément avec la flèche haut ou la flèche bas. C’est déjà assez lourd. Mais le pire, c’est ce maudit curseur qui se déplace de zone à zone, selon des diagonales qui n’ont rien à voir avec l’orientation de votre croix directionnelle ! Pousser la croix vers le haut vous fait aller en haut à gauche, et la croix vers le bas en bas à droite. Si vous jugez plus naturel que le « nord » se trouve en haut à droite (ce qui était d’ailleurs la direction indiquée sur la carte dans toutes les autres versions), dommage pour vous, parce qu’alors c’est absolument injouable ! C’est bien simple, en cinq minutes d’efforts, je ne suis même pas parvenu à aplanir suffisamment de terrain pour créer un château. Un seul château ! Autant dire que la dimension stratégique du jeu passe directement au second plan, et qu’on passe plus de temps à s’énerver tout seul qu’à réellement affronter notre adversaire.

« Gnnnn… tu vas aller là où je te le demande, espèce de sale truc à moitié incontrôlable ??? »

NOTE FINALE : 11/20

À première vue, la version Master System de Populous partait sur de très bonnes bases, avec une réalisation solide qui promettait beaucoup. Hélas, la prise en main absolument calamiteuse fait qu’on passe plus de temps à lutter contre sa manette pour essayer de faire aller ce maudit curseur là où l’on voudrait qu’il aille plutôt qu’à affronter un adversaire, qu’on risque fort de ne jamais voir tant le jeu donne envie d’éteindre sa console au bout de cinq minutes. Ceux qui parviendront à dompter un maniement anti-naturel bénéficieront d’une conversion fidèle, mais le reste risque de souffrir le martyr.

Les avis de l’époque :

« Le plus étonnant dans cette cartouche est moins le côté génial de ce jeu, qui a été décliné sur presque tous les micros et consoles (avec notamment une version splendide pour la PC Engine), que le travail  fantastique des programmeurs de Tecmagik. La version Sega est fabuleuse pour une console 8 bits de ce type. (…) Un travail de grande qualité pour un éditeur qui débute sur le marché des consoles. »

F. Orlans, Consoles + n°0, Juillet-Août 1991, 95%

Version PC Engine

Développeur : AlfaSystem Co., Ltd.
Éditeur : Hudson Soft Company, Ltd.
Date de sortie : 5 avril 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Last but not least, la vaillante 8 bits de chez NEC aura également bénéficié de son portage. En terme de réalisation, et comme souvent avec la PC Engine, la petite console de salon peut largement donner une leçon aux versions 16 bits, puisqu’elle enterre les versions Super Nintendo et Mega Drive. On est graphiquement extrêmement proche de la version Amiga – il faudra hélas composer avec un grand cadre noir autour de la fenêtre de jeu. La musique reprend plutôt bien les thèmes de la version originale. Comme souvent, l’inquiétude va plutôt se situer du côté des contrôles. À ce niveau-là, la PC Engine fait un choix équivalent à celui de la version Mega Drive : on déplace librement le curseur à l’écran, un bouton sert à élever le terrain et l’autre à le rabaisser. Du coup, c’est le bouton qui permettait d’accélérer le défilement qui a été sacrifié, ce qui fait plus de dégâts qu’on pourrait le penser tant le scrolling se traine. C’est loin d’être injouable, mais c’est fou comme un jeu comme Populous permet de réaliser à quel point certains gameplay sont pensés pour être joué à la souris et rien d’autre. À condition de prendre le pli, le jeu reste très proche des versions sur ordinateur, mais dommage qu’il ne soit pas un peu plus nerveux.

On est quand même moins à l’aise qu’avec une souris entre les mains

NOTE FINALE : 13,5/20

Populous version PC Engine est un clone bien réalisé de l’épisode original sur Amiga. Si graphiquement il sera très difficile de reprocher quoi que ce soit à la 8 bits de NEC (à part ce cadre noir), la lenteur du scrolling additionnée à une jouabilité rendue pénible par le fait de n’avoir que deux boutons rendent la prise en main plus délicate qu’il ne le faudrait, et font regretter que les souris ne se soient jamais démocratisées sur console. Reste un portage satisfaisant, largement apte à rivaliser avec les versions 16 bits.

Version Acorn 32 bits

Développeur : Richard Walker
Éditeurs : Electronic Arts, Inc. – Krisalis Software Ltd.
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur A3000
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On ne le sait pas forcément, mais une famille d’ordinateurs 32 bits était en vente dès 1987, sous la forme de la gamme Archimedes d’Acorn – laquelle, en dépit de réelles qualités, n’aura connu qu’un succès assez restreint hors du marché britannique, et même en son sein. Pas franchement pensée pour le jeu (comme le montre le fait qu’elle aura dû attendre trois ans pour accueillir un succès planétaire comme Populous), la machine nous prouve néanmoins qu’elle pouvait facilement proposer l’équivalent de l’Amiga, au pixel près. Naturellement, ni la jouabilité ni le contenu n’ont évolué d’un pouce, mais en-dehors de la conservation du mode deux joueurs, la meilleure surprise provient sans doute de la réalisation musicale (dont vous pourrez profiter dans la vidéo de l’écran-titre), qui tient sans difficulté la dragée haute à ce que pouvait proposer la Roland MT-32, tout en conservant l’atmosphère et les thèmes planants de l’Amiga une fois en jeu. Bref, une version techniquement irréprochable, qui ne pousse clairement pas l’Archimedes dans ses derniers retranchements, mais qui nous rappelle qu’on aurait pu avoir une très solide machine de jeu sur le marché si telle avait été la volonté d’Acorn.

Bien évidemment, pas un pixel de manque sur la très bonne gamme d’ordinateurs d’Acorn

NOTE FINALE : 14/20

Aucune mauvaise surprise pour la gamme 32 bits d’Acorn, qui propose non seulement une réalisation graphique totalement équivalente à celle de l’Amiga, mais également une réalisation sonore qui peut se vanter de figurer parmi les meilleures, toutes machines confondues. Que du bonheur.

Version Game Boy

Développeur : Enigma Variations Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 22 février 1993 (Europe) – 28 mai 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Jusqu’ici, on n’aura rencontré que des machines sur lesquelles porter Populous n’était que rarement un réel défi technique (à l’exception peut-être de la version Master System), et pour lesquelles la transcription nécessitait rarement qu’on effectue des modifications au niveau de l’interface. Comme on peut s’en douter, les choses vont être sensiblement différentes sur Game Boy, où proposer toutes les informations en permanence à l’écran est bien entendu impossible. Le choix opéré a été le plus rationnel : basculer la carte sur Select, les pouvoirs sur Start… et le reste nulle part, ce qui fait qu’il est très difficile de juger de l’avancée de votre adversaire sans aller y jeter un œil vous-même. Le vrai problème, cependant, est que les cartes ont sérieusement rétréci au lavage – ce qui, en un sens, est cohérent, mais modifie grandement la façon d’aborder des parties où on est systématiquement au contact de l’adversaire au bout de trente secondes. Sachant que la maniabilité au curseur à la fois lente et imprécise et souffre de latences assez pénibles, on ne peut pas dire qu’on passe un grand moment sur cette version monochrome, surtout à une époque où le plus dépassé des smartphones devrait pouvoir faire tourner la version originale sans se fouler. Bref, à moins de souhaiter jouer spécifiquement sur Game Boy, le mieux est sans doute d’éviter ce portage.

Sincèrement, c’est à peu près aussi emballant que ça en a l’air

NOTE FINALE : 08/20

Porter Populous sur Game Boy était un défi, et il paraissait de toute évidence insurmontable. L’interface, désormais répartie sur trois écrans, perd énormément en convivialité et en précision, avec beaucoup d’informations passées à la trappe, et des cartes rendues minuscules n’empêchent pas un déroulement poussif. C’est certes jouable avec un peu de pratique et beaucoup de patience, mais ce n’est vraiment pas grand chose de plus qu’une curiosité à l’heure actuelle.

Version Macintosh

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : 1993
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Quadra 900 avec Mac OS 8.1
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe
C’est plus fin, mais quel est l’intérêt de proposer une résolution en 640×480 si c’est pour afficher deux grandes bandes noires ?

Parmi les dernières machines à hériter d’un portage de Populous, voici à présent le Macintosh, qui aura dû attendre plus de quatre ans. Histoire de bénéficier un peu de cette longue attente, le titre affiche pour l’occasion des graphismes pouvant monter jusqu’en 640×480, avec des sprites lissés. Le résultat est propre et très lisible, sans transcender en rien ce qu’offraient les autres versions (quitte à bénéficier d’une résolution doublée, il eut peut-être mieux valu augmenter la taille de la fenêtre de jeu, mais je chipote). En revanche, je ne serais tout simplement jamais parvenu à faire fonctionner la musique du jeu quelle que soit la configuration testée, et ce portage ayant visiblement bénéficié d’un succès assez confidentiel, je ne serais même pas parvenu à dénicher une vidéo de gameplay pour voir si mon cas relevait de la règle ou de l’exception. Dans tous les cas, le déroulement du jeu en lui-même n’a pas changé d’un iota, vous savez donc ce que vous venez chercher.

NOTE FINALE : 13,5/20

Populous clôture sa route sur Macintosh, avec une version sans surprise qui pourrait tirer son épingle du jeu grâce à ses graphismes plus fins si la musique n’avait pas totalement disparu.

Fables & Fiends : The Legend of Kyrandia – Book One

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Titres alternatifs : Kyrandia (titre usuel), Legend of Kyrandia (titre usuel alternatif), The Legend of Kyrandia (Book One) (Gog.com)
Testé sur : PC (DOS/Windows 3.1)AmigaMacintoshPC-98
Version non testée : FM Towns
Disponible sur : Mac OS X (10.7.0), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10) – Version PC CD-ROM émulée sous ScummVM
En vente sur : Gog.com (Mac, Windows)

La saga Kyrandia (jusqu’à 2000) :

  1. Fables & Fiends : The Legend of Kyrandia – Book One (1992)
  2. Fables & Fiends : Hand of Fate (1993)
  3. The Legend of Kyrandia : Book 3 – Malcolm’s Revenge (1994)

Version PC (DOS/Windows 3.1)

Date de sortie : Mai 1992 (version disquette) – Juillet 1993 (version CD-ROM)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français (voix en anglais, textes en français)
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ (x4) et 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous ScummVM
Configuration minimale : Version disquette :
Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster/Pro, Tandy/PCjr

Version CD-ROM :
Processeur : Intel 80386 – OS : PC/MS-DOS 5.0, Windows 3.1 – RAM : 2Mo – MSCDEX : 2.2
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (version CD-ROM) :

Il y a bien longtemps, dans le paisible monde de Kyrandia, l’équilibre régnait grâce à la Kyragemme et au pacte passé avec l’Autre Royaume. Hélas, Malcolm, le bouffon royal, assassina le roi Guillaume et la reine Catherine avant de s’emparer du pouvoir de la Kyragemme et d’en tirer de terrifiants pouvoirs magiques.

Les Mystiques du royaume, à la tête desquels se trouvait le puissant Kallak, unirent alors leurs pouvoirs pour emprisonner Malcolm. Malheureusement, la Kyragemme resta sous le contrôle du bouffon maléfique, et le temps passant, les Mystiques commencèrent à voir leurs pouvoirs magiques se réduire comme peau de chagrin… jusqu’au jour fatal où Malcolm devint à nouveau libre de ses mouvements. Celui-ci commença alors à répandre anarchiquement la destruction sur Kyrandia, bien décidé à aller se venger de Kallak. Mais il ignorait que le petit-fils du chef des Mystiques, un jeune homme a priori banal nommé Brandon, était destiné à devenir son plus puissant adversaire…

Nous voici en 1992, et la guerre fait rage. Ou plutôt, LES guerreS FONT rage, mais s’il en est une qui parle alors aux joueurs sur ordinateur, c’est bien celle qui oppose les deux ténors du jeu d’aventure que sont Sierra Online et LucasArts Games.

Les deux firmes auront effectivement passé les années précédentes à se rendre coup pour coup dans une bataille ludico-commerciale tournant autour du genre roi (à l’époque) qu’est le point-and-click. Rien qu’entre 1990 et 1992, les joueurs auront eu le plaisir de voir sortir des titres comme Loom, The Secret of Monkey Island 1 et 2 ou encore King’s Quest V – tous de très bons titres parfaitement aptes à entretenir la flamme de la rivalité d’alors. Mais surprise : voilà que Westwood Studios, jusqu’ici principalement connu pour la saga des Eye of the Beholder, décide de s’inviter à la fête en lâchant ce The Legend of Kyrandia que personne n’avait vu venir.

Comme l’introduction (visible ci-dessus) vous l’aura d’ores et déjà fait comprendre, le titre vous place aux commandes de Brandon, petit fils de Kallak et adolescent pas spécialement dégourdi ni particulièrement charismatique, qui se retrouve propulsé futur sauveur du royaume après avoir découvert son grand-père transformé en pierre. Ce sera donc à vous que reviendra la lourde tâche de le guider à travers le royaume de Kyrandia en zigzagant entre les embuches pour parvenir à vaincre Malcolm et à restaurer la paix, le calme et les petits oiseaux.

Pour cela, le jeu met à votre disposition une interface limpide ne faisant usage que d’un seul bouton de la souris. Oubliez les verbes, les lignes de commandes ou les icônes : ici, le curseur fera tout le travail pour vous, et vous déplacer, ramasser un objet ou vous adresser à un personnage se fera dans tous les cas avec un simple clic gauche. Seules petites nuances : votre inventaire – constamment visible en bas de l’écran – est limité à dix emplacements, et vous vous verrez alloué, au fil de l’aventure, une amulette magique à laquelle il vous appartiendra de restaurer ses différents pouvoirs, visibles sous la forme de quatre pierres précieuses auxquelles vous devrez rendre leur éclat.

Sauver un royaume enchanté en détresse n’avait, même à l’époque, absolument rien de nouveau : King’s Quest avait déjà engendré une saga très prolifique depuis le milieu des années 80 en déclinant le concept à répétition. Dès lors, quels arguments le titre de Westwood Studios pouvait-il bien avoir à avancer afin de prétendre se faire un nom au milieu des deux mastodontes au sommet de leur forme ?

Le premier saute aux yeux dès les premiers écrans : pour tous les fans du pixel art, le jeu était et reste une référence absolue. Là où King’s Quest V ou Monkey Island 2 avaient fait le choix d’aquarelles scannées en 256 couleurs, The Legend of Kyrandia parvient à leur damer le pion sans complexe grâce à la bonne vieille méthode des graphismes réalisés à la main, pixel par pixel. Ce qui frappe d’entrée de jeu est l’ambiance véritablement enchanteresse véhiculée par le titre : chaque écran est magnifique, se promener dans ce royaume boisé est un vrai plaisir, et on ne peut qu’admirer le soin du détail accompagnant le moindre arbre, le plus petit rocher ou la plus délicate des fleurs que le jeu choisit de nous montrer sur chacun de ses écrans. Le charme opère littéralement dès l’introduction du titre (l’effet de changement de focale réalisé sur Kallak était absolument bluffant pour l’époque), et rarement on aura eu le sentiment, dès les premières secondes de jeu, d’être propulsé sur un autre monde. L’effet est d’ailleurs renforcé par les très agréables thèmes musicaux qui participent grandement à l’ambiance à la fois magique et bucolique du titre, et qui tirent admirablement parti de tout une gamme de cartes-son allant de la Sound Blaster à la Roland MT-32. N’hésitez pas à visionner les quinze premières minutes de jeu, en conclusion de l’article : le dépaysement est là.

Le second tient au ton relativement léger adopté par le titre, assez loin des prétentions ronflantes de King’s Quest qui cherchait à faire du Disney sans nécessairement en avoir le talent, et s’obstinait à décliner au premier degré de fastidieuses variantes de princesses/pères/familles à sauver sans nécessairement s’appliquer à employer les éléments aptes à captiver le joueur.

En dépit du côté enchanteur de l’univers traversé, les quelques dialogues du jeu sont souvent placés sous le signe de l’humour, et donnent même parfois lieu à des situations qui font mouche pour peu que le contexte s’y prête (Ah, Darm et son dragon Brandywine…). De la même manière, Brandon n’a rien du chevalier en armure, et saura constamment vous rappeler son incapacité à faire le bon choix dès l’instant où vous n’êtes pas là pour le tenir en laisse. Et, histoire de vous rappeler son agaçante immaturité, il passera littéralement la moitié du jeu à se plaindre – sans jamais se montrer pour autant insupportable, ce qui est un excellent point.

Les points communs avec la saga de Sierra Online ne s’arrêtent d’ailleurs pas là, car contrairement à la philosophie adoptée chez LucasArts à l’époque, The Legend of Kyrandia est un jeu où l’on peut mourir. Si cela tombe rarement du ciel, mieux vaut malgré tout prendre l’habitude de sauvegarder souvent – car en cas d’accident, ne comptez pas sur le programme pour vous faire réapparaitre deux minutes plus tôt : ce sera chargement d’une précédente partie ou game over. Si cela peut parfois s’avérer frustrant, le jeu n’est pas très difficile – ni très long, hélas – et les passages les plus complexes, comme cette fameuse grotte qui vous demandera de faire usage de baies de feu pour éclairer votre chemin sous peine de décès immédiat, sont finalement assez simples à franchir dès l’instant où l’on se donne la peine de dessiner un plan.

En revanche, si la logique des énigmes n’est jamais très complexe, on regrettera la vraie mauvaise idée du jeu : la façon aléatoire dont apparaissent certains objets. Pour être clair, le jeu vous demande à plusieurs reprises d’aller collecter des éléments un peu partout pour résoudre des énigmes ne reposant parfois sur rien d’autre que sur l’essai/erreur, et non seulement cela va vous imposer de traverser et retraverser ad nauseam les très nombreux écrans du jeu à la recherche des fameux ingrédients, mais en plus certains sont placés de façon totalement arbitraire et aléatoire quelque part dans le jeu, en vous laissant le soin de découvrir où. Trouver un objet pourra parfois vous demander de traverser une trentaine d’écrans ! Sachant qu’il faudra souvent expérimenter pour découvrir quoi faire – et qu’un objet est bien souvent détruit ou perdu lorsque vous l’employez à mauvais escient – autant dire qu’il vaut mieux sauvegarder avant la moindre tentative pour s’éviter de fastidieux allez-et-retours.

Plus grave : il est possible, en de rares occasions, de détruire définitivement des objets vitaux que vous ne pourrez plus jamais ré-obtenir par la suite – méfiez-vous particulièrement du puits que vous trouverez après une vingtaine de minutes de jeu. Ces quelques tracas pourront réellement vous gâcher une partie, ce qui explique sans doute pourquoi le titre n’a, malgré son succès critique et commercial, pas hérité de la même reconnaissance que des titres comme The Secret of Monkey Island.

C’est d’autant plus dommage qu’une fois ces quelques passages fastidieux mis de côté, on peut passer un très bon moment en visitant Kyrandia, particulièrement si les graphismes en VGA parviennent encore à vous tirer une petite larme de nostalgie.

En dépit du peu de rencontres que l’on est amené à faire, et d’un scénario qui ne gagne jamais en épaisseur, on se plait à découvrir l’univers du jeu à hauteur d’homme, écran par écran, pour goûter à la magie si particulière que le titre parvient si bien à délivrer. On ne sera donc pas surpris de découvrir que The Legend of Kyrandia aura été le premier épisode d’une trilogie ayant laissé de nombreux souvenirs émus aux joueurs s’y étant essayés à l’époque, et qui maudissent encore le déclin rédhibitoire ayant frappé le domaine du point-and-click depuis la fin des années 90.

Quelques mots, comme c’est la coutume, pour évoquer la qualité de la version française : celle-ci, hélas, est assez médiocre. Oh, certes, pas de coquille, pas de faute d’orthographe – mais la traduction, en revanche, semble parfois avoir été faite au logiciel tant les maladresses côtoient les contresens. Dès l’introduction, vous pourrez ainsi lire Kallak écrivant « Brandon, aide-moi » alors qu’il est en fait en train d’écrire une lettre à Brynn pour lui demander d’aider Brandon…

La plupart des phrases sont ainsi de simples calques mot-à-mot des phrases en anglais, reproduisant leur structure grammaticale, ce qui fait que beaucoup des dialogues amusants du jeu tombent à l’eau faute d’une adaptation de qualité. On décèlera aussi des problèmes plus gênants, comme cette énigme en fin de jeu vous demandant de sélectionner des livres dont les initiales forment le mot « OPEN », et qui risquera de poser beaucoup de problèmes aux non-anglophones qui ne verront pas nécessairement la logique à former un mot ne signifiant rien dans la langue de Molière… bref, du mauvais travail. Quant à la version CD-ROM, elle offre sans surprise exactement le même jeu avec des dialogues entièrement doublés – en anglais. Le travail des acteurs est de qualité sans être à sauter au plafond, et en-dehors de Brandon, les personnages récurrents de la saga comme Zanthia ou Malcolm changeront d’ailleurs de doubleurs dans les prochains épisodes. Les anglophones auront au moins l’avantage de pouvoir profiter des dialogues sans être obligés de souffrir des approximations de la VF.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :

Récompenses :

  • Tilt d’argent (Tilt n°109, décembre 1992) – Meilleure bande-son micro

NOTE FINALE : 16/20 Sans être profondément original ni particulièrement bien écrit, The Legend of Kyrandia a pourtant toutes les qualités d'un joyau parfaitement poli, avec une réalisation qui doit représenter le sommet de ce qu'a pu produire le pixel art, et une jouabilité d'une simplicité ébouriffante. Proposant une promenade qui est un enchantement, permettant d'apprécier le moindre écran de ce royaume qu'on apprend à aimer à chaque pas, on regrettera que le titre de Westwood Studios fasse paradoxalement preuve d'un certain manque d'ambition, en offrant une aventure trop courte et entachée de lourdeurs qui auraient facilement pu être évitées en se penchant un peu plus longtemps sur le game design. Reste une très bonne initiation à cet univers magique et emprunt d'un charme et d'une identité qui n'appartiennent qu'à la première moitié des années 90. CE QUI A MAL VIEILLI : – L'inventaire limité et les énigmes du jeu imposent un certain nombre d'allers-et-retours dont on se serait bien passés. – Les dialogues sont rares, et le jeu est assez court - on aurait vraiment aimé passer un peu plus de temps dans cet univers – Les énigmes sont globalement assez mal conçues - sans être illogiques, elles ne sont tout simplement pas très intéressantes – On peut se retrouver bloqué pour avoir détruit un objet indispensable

Les avis de l’époque :

« On en prend plein la vue et plein les oreilles. Les graphismes sont superbes. Avec les nuances de couleur, les programmeurs ont réussi à faire oublier la résolution. Côté musical, Kyrandia est tout simplement un sérieux prétendant au Tilt d’or dans ce domaine. À cela s’ajoute quelques animations du plus bel effet, finalement Kyrandia est un jeu auquel on prend beaucoup de plaisir à jouer, bien qu’il soit un peu facile de progresser dans l’aventure.« 

Marc Menier, Tilt n°106, Octobre 1992, 17/20

Version Amiga

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : Décembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x9)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette française testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2* – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Incompatible avec Kickstart 3.0

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Comme le temps passe vite… Alors qu’en 1990, l’Amiga était encore le roi du monde (bon, enfin plutôt de l’Europe), les gains de puissance constatés sur IBM PC au début des années 90 ont commencé à faire payer le manque d’évolutivité de la machine de Commodore. De fait, début 1992, L’Amiga 1200 n’était pas encore sorti, et le chipset AGA capable de rivaliser avec le VGA n’était par conséquent pas encore disponible… bon, il l’était fin 1992, au moment de la sortie de cette version Amiga, mais on va dire que Westwood Studios n’était pas au courant, ou bien que le studio américain jugeait que le marché du 1200 n’était pas encore assez porteur pour s’y intéresser. Quoi qu’il en soit, le fait est qu’un Amiga 500 ou 600 peine logiquement à rivaliser, en termes de réalisation, avec une version qui faisait cracher leurs tripes aux cartes graphiques des PCs de l’époque. La palette du jeu a été appauvrie, et même si la réalisation de ce portage est très loin d’avoir été galvaudée, on ne peut pas demander à une palette de 64 couleurs de faire aussi bien qu’une palette de 256. Si certains décors s’en sortent très honorablement, les dégradés sont nettement moins fins, et la plupart des personnages – dont Brandon – se voient dorénavant dotés d’une couleur de peau orange/marron qui trahit les limites des capacités graphiques de l’Amiga. La musique ne relève hélas pas le niveau, la puce Paula ne rivalisant ni avec une Roland MT-32, ni – ce qui est plus surprenant – avec une modeste Sound Blaster.

Le vrai manque de l’Amiga, néanmoins, ne vient pas tant de ses capacités graphiques que de son processeur. Autant être clair : sans un Amiga 600 et un disque dur, le jeu se traine à en être injouable. Et même avec une configuration relativement solide, il faudra composer avec plusieurs secondes de chargement à chaque transition d’écran – ce qui, dans un jeu où on voyage beaucoup, devient vitre très pénalisant. On sent d’ailleurs que Westwood Studios a fait son possible pour soulager le processeur de la machine, la fenêtre de jeu étant désormais encadrée de lignes noires, mais las ! Rien n’y fait, et le confort de jeu en souffre atrocement. Pour achever d’enfoncer le clou, le jeu n’est même pas compatible par défaut avec un Amiga 1200 puisqu’il ne tourne pas sous Kickstart 3 – il faudra utiliser un dispositif de type Relokick 1.3 pour avoir une chance de le faire fonctionner ! Et il est même spécifié sur la boîte que les utilisateurs de Kickstart 2 (ceux d’un A500+, au hasard) ne pourront utiliser qu’un seul lecteur de disquette. Légèrement handicapant, pour un jeu qui tient sur neuf disquettes… Bref, à tout prendre, le plus simple reste sans doute de découvrir le jeu sur PC.

NOTE FINALE : 14/20

Mis à genou par un jeu développé pour une machine bien plus puissante que les Amiga 500 ou 600, The Legend of Kyrandia voit son portage sur ces machines se transformer en un laborieux chemin de croix. Si la réalisation s’en sort très honnêtement – en dépit d’une qualité musicale assez décevante – la lenteur générale du titre le réservera soit à des joueurs patients, soit à des nostalgiques, et bon courage pour le faire tourner dans des conditions décentes sur des systèmes au-delà de l’Amiga 500.

Version Macintosh

Développeur : The Dreamers Guild
Éditeur : MacPlay
Date de sortie : 1993
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM française testée sur Quadra 650
Configuration minimale : OS : System 6.0.7 – RAM : 1,5Mo
Mode graphique supporté : 256 couleurs

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (CD-ROM) :

En 1993, le Macintosh commençait à devenir, à l’instar de son concurrent direct le PC, une machine de jeu. The Legend of Kyrandia y aura donc atterri – dans une transcription très fidèle de ce que proposait la version PC. Pas de mode « haute résolution » à espérer ici – ce qui aura au moins le mérite de nous éviter de voir le magnifique pixel art du jeu mutilé par un filtre dégueulasse – mais en revanche, le gamma est curieusement élevé. Niveau sonore, le jeu est un peu moins emballant que sur PC – impossible ici de brancher une Roland MT-32, et le processeur sonore de base du Mac fait un peu moins bien que ce qu’offraient l’AdLib et la Sound Blaster, plus proche de ce qu’on pouvait entendre sur Amiga. Le seul point dommageable est l’impossibilité de jouer en réel plein-écran ; quoi qu’il arrive, vous aurez le droit à la barre de menu en haut de l’image à permanence, ce qui signifie d’ailleurs que la gemme en bas à gauche de l’interface, qui servait originellement à accéder aux options, n’a plus aucun usage. À ce détail près, le jeu n’a pas changé d’un pouce, et la version CD-ROM bénéficie bien sûr toujours des voix anglaises. Aucune mauvaise surprise, donc.

NOTE FINALE : 15,5/20

Copie quasi-carbone de la version PC, The Legend of Kyrandia sur Mac ne pêche qu’au rang de la réalisation sonore – et encore, d’assez peu – et de cette satanée interface intégrée à l’OS qui empêche de jouer en vrai plein-écran. Cela ne pénalise fort heureusement que très marginalement l’expérience de jeu.

Version PC-98
Fables & Fiends : The Legend of Kyrandia

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : StarCraft, Inc.
Date de sortie : 15 février 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : Système : PC-9821Ap – RAM : 1,6Mo
Carte son supportée : PC-9801-86

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (CD-ROM) :

Une nouvelle fois éditée par StarCraft, cette version PC-98 arrive avec son lot de surprises ; pas du côté du contenu, qui n’a naturellement pas bougé, mais bien de celui de la réalisation. La plus visible – immanquable, pourrait-on même dire – est à chercher du côté des graphismes : aussi incongru que cela puisse paraître, le jeu choisit de s’afficher en 640×400 et en 16 couleurs. Le résultat est… assez peu emballant, reconnaissons-le, et même en plissant les yeux, difficile de ne pas sentir une tragique déperdition depuis la version VGA – c’est même très loin des versions EGA basse résolution qui fleurissaient encore au tout début des années 90, et il suffit de retourner voir des images de Loom ou de The Secret of Monkey Island pour s’en rendre compte. La bonne nouvelle, en revanche, c’est que le jeu tourne beaucoup mieux que sur n’importe quelle configuration Amiga, et qu’il s’en sort également mieux que la machine de Commodore sur le plan sonore – même si, pour une raison mystérieuse, toutes les voix ont disparu en dépit du support CD. Oh, et naturellement, détail qui a son importance : tous les textes sont désormais intégralement en japonais. Bref, une curiosité à réserver à ceux ayant envie de posséder toutes les versions du jeu.

NOTE FINALE : 13/20

On en va pas se mentir : The Legend of Kyrandia en seize couleurs, même avec la résolution doublée, ça n’est plus tout-à-fait la même chose. Amputé de sa sublime réalisation, et désormais inaccessible aux joueurs ne parlant pas japonais, le titre a le mérite de tourner comme un charme, mais on ne saura objectivement pas trop à qui le recommander alors que la version DOS, très supérieure, est aujourd’hui à la portée de n’importe qui.

J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I

Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : Interplay Productions, Inc. (Amérique du Nord) – Electronic Arts, Inc. (Europe)
Titres alternatifs : J.R.R. Tolkien’s Lord of the Rings : Volume One (Super Nintendo), El Señor de los Anillos, Volumen Uno (Espagne), 指輪物語 第一巻 旅の仲間 (Yubiwa Monogatari Daiikkan : Tabi no Nakama – Japon)
Testé sur : PC (DOS)AmigaPC-98FM Towns
Présent dans les compilations :

  • J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings & The Two Towers : Collector’s Edition (1993 – PC (DOS))
  • Anthologie de 10 ans d’Interplay (1993 – PC (DOS))
  • World of Sword & Steel (1997 – PC (DOS))

La saga Lord of the Rings par Interplay (jusqu’à 2000) :

  1. J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I (1991)
  2. J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. II : The Two Towers (1992)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Février 1991 (version disquette) – Octobre 1993 (version CD-ROM)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Versions testées : Versions CD-ROM et disquette émulées sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Covox Sound Master, Game Blaster, haut-parleur interne, Innovation Sound Standard, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr
*640ko requis pour le mode VGA

Vidéo – L’introduction du jeu (version disquette) :

Depuis les premières heures de son succès public, dans les années 60, Le Seigneur des Anneaux de J.R.R. Tolkien aura initié deux fantasmes qui auront vécu pendant de nombreuses années. Le premier était de le voir un jour adapté en film – demande récurrente seulement à moitié comblée en 1978, lorsque le dessin animé réalisé par Ralph Bakshi trouvera une fin en queue de poisson au milieu du deuxième livre de la saga, faute de producteurs acceptant de lui donner une suite. Il aura fallu attendre 2003 et le dernier film de la trilogie de Peter Jackson – soit près de cinquante ans – pour que la trilogie de Tolkien, réputée trop longue et inadaptable, trouve enfin son dénouement sur le grand écran – avec le succès que l’on sait.

Le deuxième fantasme, lui, a dû voir le jour  en même temps que la micro-informatique elle-même : adapter Le Seigneur des Anneaux en jeu vidéo – en jeu de rôles, bien entendu, la saga de Tolkien étant la racine et la principale source d’inspiration du genre, immortalisé par Donjons & Dragons. L’ambition de porter un jour l’univers de la Terre du Milieu sur un support vidéoludique est presque aussi vieille que les premiers programmes développés par les universitaires dans les années 70. L’un des pionniers du jeux de rôles informatique, l’antique Moria paru en 1975, ne tirait-il pas déjà son nom d’un des passages les plus marquants de la saga ?

J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I entendait, comme son nom l’indique, donner enfin une réalité à ce vieux rêve en s’affirmant comme la première pierre d’une trilogie ambitieuse chargée de porter, pour la toute première fois, toute l’épopée de Tolkien dans une série de jeux de rôles. Ambition, hélas, une nouvelle fois avortée : le troisième volume ne verra jamais le jour. Et le joueur attend encore, au XXIe siècle, cet improbable et colossal jeu de rôles qui lui permettra enfin d’aller jeter l’Anneau Unique au cœur des flammes de la Montagne du Destin – chose que même l’insubmersible MMORPG portant le nom de la saga ne permet pas encore.

Mais revenons plutôt au jeu qui nous intéresse. Publié par Interplay – alors au sommet de sa forme – en 1990, J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I s’affirme dès le début comme un jeu de rôles classique tirant sans vergogne une partie de son inspiration de la saga qu’est Ultima – comme pratiquement tous les jeux de rôles de l’époque, pour être honnête – mais également d’autres titres publiés par Interplay, comme le célèbre Wasteland, mais nous y reviendrons.

Le jeu va vous placer aux commandes de Frodon Sacquet (ou Bessac dans la nouvelle traduction, je vous laisse faire les équivalences à partir d’ici) depuis son départ de Cul-de-Sac, au premier tiers de la Communauté de l’Anneau, jusqu’à… Dol Guldur, ce qui pourra surprendre les connaisseurs de l’œuvre de Tolkien, le fameux donjon de la Forêt Noire n’étant jamais visité par la communauté dans toute la trilogie, et seulement brièvement évoqué dans Bilbo le Hobbit. Mais on se doute qu’avec un matériau aussi dense que la Terre du Milieu, les développeurs du jeu n’aient pas pu résister à l’envie d’offrir aux joueurs la possibilités de sortir un peu des sentiers battus – d’autant que tout le contenu du livre, de la Comté à la Moria en passant par Tom Bombadil ou les Galgals, est bien présent dans le titre – un petit exploit lorsque l’on considère que celui-ci tient sur trois disquettes 3,5 pouces. Un exploit qui aura néanmoins nécessité quelques petits tours de passe-passe – mais là encore, nous y reviendrons.

Vous démarrez donc l’aventure à la Comté, le jour de votre départ de Cul-de-Sac, entouré par Merry et Pippin – que vous pourrez recruter immédiatement en leur parlant. Si le jeu est en plein écran, l’interface n’apparaitra que lorsque vous cliquerez sur le bouton droit de la souris – ou du moins presque toute l’interface, puisque le menu vous permettant de charger ou de sauvegarder une partie, lui, n’est curieusement accessible qu’en pressant la touche O, une incongruité qui sera corrigée dans la version CD. Cette interface a d’ailleurs l’inconvénient d’alourdir considérablement le maniement du jeu, puisque contrairement a Ultima VI, par exemple, dont Lord of the Rings est graphiquement très proche et où chaque icône était accessible en permanence, il faudra impérativement passer par ce menu pour faire quoi que ce soit, y compris pour activer les raccourcis clavier. Si vous souhaitez parler à quelqu’un par exemple, vous devrez commencer par vous approcher de lui, ouvrir le menu, cliquer sur l’icône pour parler et enfin choisir le nom du personnage dans la liste – avant de l’interroger par le biais de mots-clefs, nouveau point commun avec Ultima. C’est pour le moins un peu lourd, même si l’avantage est que vous n’aurez pas nécessairement besoin de passer deux heures dans le manuel pour comprendre comment jouer.

Dans le même ordre d’idée, chacun de vos personnages dispose d’une liste de compétences qui lui sont propres, et qui feront un peu penser à celles que l’on pouvait rencontrer dans Wasteland – ou, plus tard, dans Fallout. La grande force de ces compétences est qu’elles sont toutes utiles : vos capacités à sauter, à escalader, à vous faufiler discrètement, à crocheter des serrures ou à observer les alentours trouveront leur usage à de très nombreuses reprises, ce qu’on appréciera mieux que de les voir cantonnées à un rôle purement esthétique.

En revanche, savoir à quel moment les employer demandera un peu de pratique, l’idée d’utiliser l’aptitude de charisme de Sam pour faire venir un chien égaré ne venant pas forcément naturellement, par exemple. Certaines de ces aptitudes demanderont également un positionnement assez précis, et on ne pourra que regretter à ce titre que le jeu ne nous montre jamais les objets au sol – grave erreur – et qu’il faille passer par un menu à part pour savoir ce qui se trouve à nos pieds – un coup à laisser passer de nombreux objets utiles. De la même manière, utiliser la compétence « perception » pour fouiller les alentours devra vite devenir une seconde nature, faute de quoi vous n’irez sans doute pas très loin dans le jeu. Le seul inconvénient étant que, vu la lourdeur de l’interface, éplucher méthodiquement chaque écran du jeu peut rapidement se révéler incroyablement rébarbatif. Pour ne rien arranger, chaque personnage ayant ses aptitudes propres, vous devrez commencer par le sélectionner avant d’avoir accès à ses capacités, ce qui alourdit encore le procédé.

Même s’il est possible de parcourir une très large portion du jeu sans avoir à combattre, les confrontations peuvent arriver très vite dans le jeu, et vous aurez alors l’occasion de mesurer à quel point la survie de votre personnage principal est capitale – sa mort signant le game over instantané et le retour à l’invite DOS sans même vous proposer de charger votre partie, ce qui n’est pas très malin. Les combats se font au tour par tour, chaque personnage agissant en fonction de son agilité. On regrettera d’ailleurs plusieurs choses. La première est que rien ne permette de connaitre avec précision la portée de votre personnage, ni le terrain qu’il pourra parcourir en un seul tour. La seule méthode pour faire face à un adversaire reste donc de s’approcher pixel par pixel en tentant d’attaquer à chaque pas jusqu’à ce que le programme accepte enfin de nous en proposer l’option : encore une fois, c’est assez lourd. La seconde – et la plus grave pour un jeu de rôles – est que la puissance de votre équipe dépend avant tout de son nombre et de votre équipement, puisque vos personnage ne gagnent pas d’expérience et ne progressent pas ! On trouve là, sans doute, une volonté de coller au matériau d’origine et d’empêcher vos modestes hobbits de devenir des machines à tuer, mais peut-on encore réellement parler de jeu de rôles à partir du moment où vous ne créez pas votre personnage, où vous ne décidez pas de ses aptitudes et où il ne progressera jamais de toute la partie ?

C’est d’autant plus regrettable que, malgré cette fidélité assumée au roman, le titre n’hésite pas à prendre quelques libertés en mettant à votre disposition un système rudimentaire de magie, qui ne pourra bien évidemment être utilisé que par des magiciens, ce qui oblige le jeu à en inventer, « envoyés par le Conseil Blanc » pour vous prêter main forte (pour rappel, seul trois magiciens jouent un rôle dans le livre, l’un étant un ennemi, l’un faisant une apparition de deux lignes et le dernier disparaissant aux deux tiers du roman). Vos hobbits et autres mortels, eux, auront à leur disposition un système de « mots de pouvoirs » qu’ils apprendront au fur et à mesure de leurs rencontres, et qui pourront les tirer de plusieurs mauvais pas – par exemple, en appelant Tom Bombadil à la rescousse une fois séquestrés dans les Galgals.

Pour tous ceux qui lèveraient un sourcil circonspect en lisant toutes ces références au(x) livre(s) dont le jeu est tiré, la question mérite d’ailleurs d’être posée : peut-on jouer à J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I sans avoir lu la trilogie originale, ou au moins vu son adaptation au cinéma ? Eh bien, pour être honnête… probablement pas. En dépit de son introduction qui s’efforce d’être didactique, et de nombreuses précisions sur l’univers et les personnages dans le manuel du jeu, le titre suit si ouvertement le fil du livre que le néophyte risque d’être rapidement perdu, n’ayant aucun moyen de deviner, par exemple, qu’il aura de bien meilleures chances d’échapper aux Nazguls en s’enfuyant par la Vieille Forêt plutôt que par la grand route. Les dialogues du jeu étant assez chiches, les informations délivrées par le programme se révèlent assez maigres – même s’il est possible de se familiariser avec l’univers du jeu en effectuant les très nombreuses quêtes secondaires qu’il propose, mais encore une fois, dans un jeu de rôles sans expérience… Bref, le jeu demande de fournir un investissement que les fans de la première heures seront bien plus à même de délivrer de bonne grâce… à condition de bien se souvenir qu’il s’agit d’un titre de 1990.

La réalisation de J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I, à ce titre, est d’une qualité plus qu’honorable si on la compare à la production de l’époque. Graphismes en 256 couleurs, portraits inspirés du style du long métrage de Ralph Bakshi, gestion de la Sound Blaster et de la Roland MT-32, le jeu se place plutôt dans le haut du panier. La vue en fausse 3D isométrique fera immédiatement penser à Ultima VI, même si on appréciera que la fenêtre de jeu occupe tout l’écran – en revanche, le fait que le titre ne soit pas construit par « cases », comme les Ultima, rend sa cartographie très problématique, particulièrement dans des zones infâmes comme la Vieille Forêt où on peut facilement tourner en rond pendant vingt minutes même en sachant pertinemment où on est censé aller. En revanche, il faut bien reconnaître que les environnements ne sont pas très variés, et que la différence entre une rue de Fondcombe et une rue de la Comté ne saute pas nécessairement aux yeux.

Les animations assurent le service minimum – on sera heureux de voir nos personnages manier leurs armes pendant les combats – et les musiques, si elle sont de très bonne qualité, sont trop rares et pas assez variées (peut-être trois thèmes en tout et pour tout). À noter également que, afin d’économiser de la place sur les trois disquettes du jeu, une partie des dialogues et des descriptions du titre sont en fait consignées dans un livret à part, le jeu vous renvoyant à un numéro de chapitre afin que vous alliez chercher les informations correspondantes (une méthode courante dans les jeux de rôles de l’époque, on s’en souviendra par exemple dans Wasteland ou dans Pool of Radiance). Dommage, vu les très nombreux recours aux textes, que le jeu n’ait jamais bénéficié d’une version française – mais les très nombreux passages consignés dans le manuel, en revanche, ont eux été traduits.

La version CD-ROM du jeu :

La version PC de J.R.R. Tolkien’s Lord of the Rings, Vol. I aura également connu son itération CD-ROM et, bonne nouvelle, Interplay ne s’est pas contenté de recopier la version disquette sur une galette pour ensuite la vendre comme une version à part entière – ce qui n’avait rien de rare à l’époque. Dès le lancement de l’aventure, on remarquera que le titre propose désormais un tutoriel vous présentant l’interface du jeu – et introduit de vive voix par Gandalf en personne, excusez du peu ! Évidemment, mieux vaut parler la langue de Shakespeare, puisque la séquence ne propose aucun sous-titrage, mais on appréciera l’effort.

L’emploi du CD-ROM se confirme une fois une nouvelle partie lancée, puisque l’introduction dessinée de la version disquette a cette fois directement laissé la place à divers extraits du long-métrage animé de Ralph Bakshi ( et que vous ne pourrez hélas pas admirer sur ce site, les droits desdits extraits étant détenus par Warner Bros. qui n’aime pas les voir sur YouTube) – avec une qualité de compression très honorable pour 1990. Une nouvelle fois, en revanche, oubliez les sous-titres.

Et une fois en jeu, bien sûr, gain le plus évident : la musique qualité CD qui enterre sans difficulté ce que proposait la Roland MT-32 dans la version originale. Autant dire que, même si la musique tend à être toujours aussi répétitive après plusieurs heures, le gain qualitatif est extrêmement appréciable. Mais ce n’est pas tout ! L’interface du jeu a été sensiblement retravaillée : le menu de sauvegarde apparait désormais intégré dans l’interface principale affichée avec le bouton droit plutôt que d’avoir à aller le chercher avec la touche O. Et bien sûr, espace offert par le support oblige, plus question d’aller chercher des descriptions dans un livret à part : elles sont désormais affichées en jeu sous la forme des pages d’un grand livre. Et pour ne rien gâcher, le jeu intègre dorénavant une carte automatique qui va singulièrement vous simplifier la tâche. Bref, voilà ce qu’on appelle un CD intelligemment rempli.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :

NOTE FINALE : 13/20 (version disquette) - 13,5/20 (version CD-ROM) J.R.R. Tolkien's The Lord of the Rings, Vol. I est un jeu fait par des fans, pour des fans, à une époque où réaliser un des plus vieux rêves de l'histoire du jeu de rôle, qu'il soit sur papier ou informatique, semblait enfin envisageable. En dépit des nombreuses limitations techniques de l'époque, le titre délivre une expérience étonnamment riche collant jusqu'à l'excès au fil du roman original pour permettre aux lecteurs de la première heure de visiter enfin la Comté, Bree, Fondcombe – et certains endroits à peine évoqués comme Dol Guldur dans lesquels de nombreux joueurs avaient toujours rêvé de mettre les pieds. Si tous les fanatiques connaissant l’œuvre de Tolkien sur le bout des ongles pardonneront, à ce titre, plus facilement au jeu une certaine lourdeur et une dimension « jeu de rôle » finalement cantonnée à l'univers et à l'emploi des compétences, les joueurs ne connaissant Le Seigneur des Anneaux que dans ses grandes lignes feront sans doute mieux de passer leur chemin, perdus qu'ils seront au cœur d'un titre qui n'a clairement pas été pensé pour eux. CE QUI A MAL VIEILLI : – L'interface nécessitera un temps d'adaptation, particulièrement pour faire bon usage des très nombreuses compétences de vos personnages – Certains passages, comme la traversée de la Grande Forêt, sont absolument infects et d'un intérêt ludique à peu près nul – Un jeu de rôles sans points d'expérience ? Encore ? – Ceux qui n'ont jamais lu le livre vont probablement passer la moitié du temps à se demander ce qu'ils doivent faire – C'est un peu frustrant que le jeu nous abandonne au tiers du récit, surtout lorsque l'on sait que le troisième volume n'aura jamais vu le jour

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Lord of the Rings sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Une quête complexe mais accessible à tous, c’est le troisième atout de ce premier volume de Lord of the Ring (sic). D’un côté, j’ai vraiment apprécié la complexité du scénario, le fait qu’il traduise aussi bien l’atmosphère du roman. On y retrouve toute sa richesse, tant au niveau des personnages que de la magie, de l’interaction entre les multiples quêtes qui se mêlent ici. (…) Impossible de passer outre ce logiciel, si l’on est un amateur de Tolkien et d’aventure animée. »


Olivier Hautefeuille, Tilt n°88, Mars 1991, 17/20

Version Amiga

Développeur : Sillicon & Synapse, Inc.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Octobre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquettes 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Sortie quelques mois après la version originale, la version Amiga doit composer, comme on peut s’en douter, avec davantage de limitations techniques que sur PC – la plus évidente étant le palette de couleurs inférieure à ce que pouvait offrir le VGA. Si le titre est indéniablement moins coloré sur Amiga, on ne peut pas dire qu’on perde énormément au change, surtout au niveau des écrans fixes qui sont parfaitement restitués en dépit des 32 couleurs. Les limitations sont en revanche un peu plus visibles une fois en jeu, où les verts de la Comté paraissent fades comparés à ce que pouvait offrir la version PC. Du côté de la musique, le programme tire parfaitement avantage de la puce Paula, et on ne peut pas dire que celle-ci ait à rougir de la comparaison avec ce qu’offre la Roland MT-32. Les bruitages, en revanche, sont un peu en retrait. Bien évidemment, matériel oblige, le titre est également sensiblement plus lent que ce qu’on pouvait espérer obtenir en le faisant tourner sur un 386 SX, même en profitant d’un disque dur. Jouer sur disquettes vous exposera à de fréquents temps de chargement.

En terme de contenu, J.R.R. Tolkien’s Lord of the Rings, Vol. I est extrêmement proche de ce qu’offrait la version PC, à deux ou trois petites finitions près. Ainsi, le menu des options a désormais été intégré à l’interface, comme dans la version CD – on regrettera, hélas, que ni la carte automatique ni les textes directement intégrés au jeu n’aient fait le voyage jusqu’à cette version Amiga. Petit ajout pas très utile : une icône au sommet de l’écran vous indique dorénavant s’il fait jour ou nuit, au cas où le changement de palette de nous aurait pas déjà fait passer l’information. Pour le reste, on est en terrain connu.

NOTE FINALE : 13/20

Malgré quelques petites retouches, la version Amiga de J.R.R. Tolkien’s Lord of the Rings, Vol. I reste globalement moins bonne que ce que pouvait offrir le jeu sur PC, la faute à un matériel inférieur qui rend le jeu un peu moins beau et un peu plus lent. On ne peut que regretter qu’Interplay n’ait toujours pas été décidé à sacrifier une ou deux disquettes de plus pour offrir la carte automatique, qui aurait fait un bien fou. Le jeu reste autrement identique à l’original, qualités et défauts compris.

Version PC-98
Yubiwa Monogatari Daiikkan : Tabi no Nakama

Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : StarCraft, Inc.
Date de sortie : 30 Octobre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquettes 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Cartes sonores supportées : Roland MT-32/LAPC-I

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme beaucoup de jeux de rôle occidentaux, The Lord of the Rings aura également tenté sa chance sur les ordinateurs japonais – après tout, le genre était extrêmement populaire au Japon, et les systèmes nippons tendaient à être assez proches du PC en termes de hardware et de système d’exploitation. Néanmoins, sur PC-98, en 1991, la résolution « standard » restait le 640×400 en seize couleurs : le jeu aura donc été entièrement réadapté pour l’occasion.

En jeu, cela peut offrir quelques choix étranges, avec des personnages pixelisés en basse résolution pendant que le décor, lui, est en haute résolution, mais la lisibilité est parfaite et le résultat n’a clairement pas à rougir de ce que pouvait offrir une palette de 256 couleurs. C’est encore plus notable pendant la cinématique d’introduction, puisqu’au lieu d’appliquer un filtre dégueulasse aux illustrations de base, comme c’était souvent le cas (notamment sur Macintosh), tout à été redessiné en plus fin ! Le résultat est enthousiasmant, suffisamment pour qu’on ne puisse que regretter que ce portage, paru à peu près en même temps que celui sur Amiga, n’intègre par conséquent pas les nouveautés de la version CD-ROM dont la très pratique carte automatique. Oh, et que tant qu’à faire, il ne soit pas resté en anglais, car naturellement tous les textes du jeu sont dorénavant en japonais. Autant dire que si vous ne parlez pas la langue, le programme sera largement inaccessible, mais si jamais les curieux souhaitent découvrir le logiciel en haute résolution, ils pourront le faire.

NOTE FINALE : 13/20

Portage un peu surprenant que ce Yubiwa Monogatari Daiikkan : Tabi no Nakama sur PC-98 – pas tellement du côté du contenu, qui n’a pas changé depuis la version disquette sur PC, mais bien du côté de la réalisation en haute résolution et en seize couleurs. Dommage qu’il faille savoir lire le japonais pour en profiter.

Version FM Towns
Yubiwa Monogatari Daiikkan : Tabi no Nakama

Développeur : Interplay Production, Inc.
Éditeur : StarCraft, Inc.
Date de sortie : Mars 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo –  L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Après le PC-98, le FM Towns. Et cette fois, inutile de chercher une facétie : comme on pouvait s’y attendre, on se retrouve face à la retranscription de la version DOS traduite en japonais. Le CD-ROM n’est d’ailleurs absolument pas mis à contribution : la version « améliorée » sur PC n’étant appelée à sortir qu’un an et demi plus tard, c’est bel et bien le contenu de la version disquette qui est présent ici, via une réalisation exactement identique au VGA. Bref, pour le coup, à moins de chercher spécifiquement une version traduite en japonais, autant lancer directement la version DOS.

NOTE FINALE : 13/20

Inutile de tourner autour du pot : Yubiwa Monogatari Daiikkan : Tabi no Nakama sur FM Towns n’est rien de plus que la version DOS de J.R.R. Tolkien’s The Lord of the Rings, Vol. I traduite en japonais sans profiter d’aucun des apports de la version CD-Rom améliorée, développée un an plus tard.

Sorcellerie : Le donjon du suzerain hérétique

Développeur : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : Ediciel Matra et Hachette
Titre original : Wizardry : Proving Grounds of the Mad Overlord (États-Unis)
Titres alternatifs : ウィザードリィ 狂王の試練場 (graphie japonaise), Dungeons of Despair (titre de travail), Wizardry : Proving Grounds of the Mad Overlord! (écran-titre – Japon)
Testé sur : Apple IIPC (Booter)MacintoshPC-88PC-98Sharp X1Commodore 64MSXNESPC Engine CDPlayStationSaturnSuper Famicom
Versions non testées : FM-7, PC (Windows 9x)
Disponible sur : Switch, PlayStation 4, PlayStation 5, Windows, WonderSwan Color, Xbox Ones, Xbox Series
Présent au sein des compilations :

  • The Wizardry Trilogy : Scenarios I, II & III (1987 – Apple II, Commodore 64, PC (Booter))
  • Wizardry I・II (1993 – PC Engine CD)
  • The Ultimate Wizardry Archives (1998 – PC (DOS, Windows 9x))
  • Wizardry : Llylgamyn Saga (1998 – PC (Windows 9x), PlayStation, Saturn)
  • Wizardry I•II•III : Story of Llylgamyn (1999 – Super Famicom)

La saga Sorcellerie (Jusqu’à 2000) :

  1. Sorcellerie : Le donjon du suzerain hérétique (1981)
  2. Sorcellerie : Le chevalier de diamant (1982)
  3. Sorcellerie : L’héritage de Llylgamyn (1983)
  4. Wizardry : The Return of Werdna – The Fourth Scenario (1987)
  5. Wizardry V : Heart of the Maelstrom (1988)
  6. Wizardry : Bane of the Cosmic Forge (1990)
  7. Wizardry : The First Episode – Suffering of the Queen (1991)
  8. Wizardry : Crusaders of the Dark Savant (1992)
  9. Wizardry : The Second Episode – Curse of the Ancient Emperor (1992)
  10. Nemesis : The Wizardry Adventure (1996)

Version Apple II

Date de sortie : Septembre 1981 (États-Unis) – 1983 (France)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, français
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II – OS : Apple DOS 3.3 – RAM : 48ko
Mode graphique supporté : Haute résolution

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dans le monde des jeux de rôles vidéoludiques, il y a les grands succès, il y a les univers marquants, il y a les monuments. Au-dessus encore, il y a les légendes. Et tout au sommet de la pyramide, il y a les pères fondateurs, ceux qui ont non seulement été des succès critiques et commerciaux, mais qui ont en plus directement influencé toute la production qui les a suivis, à tel point qu’il est difficile, même plus de 35 ans après leur sortie, de trouver un RPG qui ne leur emprunte pas une grande part de leurs mécanismes de jeu.

À ce grand jeu des pionniers ayant à jamais impacté l’existence de tout ce qui était appelé à les suivre, s’il ne fallait retenir que deux noms, l’un serait Ultima et l’autre serait Wizardry.

Imaginez deux étudiants américains nommés Andrew Greenberg et Robert Woodhead. À la fin des années 70, ceux-ci partagent un rêve qui est alors celui de beaucoup d’apprentis-programmeurs ayant découvert l’informatique en même temps que le jeu de rôles papier : parvenir à retranscrire une partie de Donjons & Dragons à l’intérieur d’un programme informatique. Cette quête, ils seront parmi les premiers à la mener à bien, avec la parution en 1981 du premier épisode d’une série appelée à être colossale et dont les trois premiers épisode auront même bénéficié (chose exceptionnelle à l’époque) d’une traduction intégrale : Sorcellerie : Le donjon du suzerain hérétique.

Pour imaginer à quoi pouvait bien ressembler un jeu de rôles en 1981, repartons de la base : un donjon profond de dix niveaux, au fin-fond duquel se terre le terrible magicien Werdna, lui-même ennemi du terrible guerrier Trebor (si ces deux noms vous paraissent étranges, vous remarquerez rapidement qu’il s’agit des prénoms des deux créateurs du titre écrits à l’envers). Votre quête, si vous l’acceptez, sera d’aller récupérer la puissante amulette que Werdna vola à Trebor avant de revenir à la surface en un seul morceau – ce qui risque de s’avérer beaucoup plus compliqué que prévu, mais nous y reviendrons.

Parcourir un donjon en vue subjective pour aller y vaincre un grand méchant n’avait rien de révolutionnaire, même en 1981 : un titre comme Akalabeth proposait déjà la même chose deux ans auparavant. Non, la véritable innovation de Sorcellerie, celle-la même qui lui vaut encore aujourd’hui d’être considéré comme le vénérable ancêtre de n’importe quelle forme de dungeon crawler – et en particulier celui d’une autre saga majeure qu’est Might and Magic – c’est bien le fait d’être le tout premier titre à vous placer à la tête d’un groupe plutôt que d’un aventurier solitaire. Comme vous pouvez vous en douter, composer votre groupe et savoir en tirer le maximum constituera la première clé d’un titre encore reconnu aujourd’hui comme l’un des plus exigeants jamais programmés.

Abordons donc l’aventure par son commencement : la création de vos personnages. Votre glorieuse équipe peut – et on serait même tenté de dire « doit » – être composée de six membres, eux-mêmes répartis en deux lignes. La première ligne sera celle qui pourra se battre au corps-à-corps – et sera donc la plus exposée à recevoir des coups en contrepartie – tandis que la deuxième, plus en sécurité, ne pourra compter que sur des sortilèges pour atteindre l’adversaire (le jeu ne comporte pas d’armes à distance). Votre composition est donc toute trouvée : des unités qui tapent fort en première ligne et vos soigneurs et autres magiciens au fond – avec éventuellement un voleur au milieu histoire de désamorcer les inévitables pièges que vous pourrez rencontrer sur les non moins inévitables coffres aux trésors. On retrouvera à ce titre les classes traditionnelles tout droit échappées de Donjons & Dragons : guerrier, voleur, mage, clerc – mais aussi des classes « avancées » aux noms plus exotiques (ninja, samouraï, seigneur, évêque) qui pourront vous demander un peu plus d’efforts.

En effet, chaque personnage dispose à sa création d’un nombre de points bonus à attribuer à ses caractéristiques, et qui vous permettront de remplir les prérequis pour pouvoir rejoindre telle ou telle classe (un guerrier demande par exemple d’avoir au moins 11 en force, quand un mage réclamera 11 en intelligence, etc.) – sachant que chacune des cinq races du jeu, des humains aux hobbits en passant par les nains, dispose d’attributs de départs qui lui sont propres (les nains sont plus forts, les elfes plus intelligents, vous connaissez l’idée). Le truc, c’est que le total de ces points bonus sera tiré aléatoirement, et pourra aller de 7 à plus de 20 – ce qui fait une énorme différence, et vous encouragera à passer énormément de temps à recommencer les tirages pour essayer de bâtir le personnage « ultime ». Mais même avec le meilleur tirage du monde, vous ne pourrez jamais obtenir dès le début de la partie, par exemple, un personnage avec un score de 17 dans toutes les caractéristiques – prérequis indispensable pour accéder à la classe de ninja. Il va donc vous falloir attendre de monter de niveau et de gagner des points de caractéristiques – ou d’en perdre, les deux étant possibles à chaque montée de niveau, et le processus étant une nouvelle fois aléatoire.

Créer le groupe de vos rêves va donc vous demander une forme de planification sur le long terme – et la gestion de contraintes qui pourront se transformer en casse-tête pour joueurs débutants. Imaginons par exemple que vous vouliez composer une équipe comprenant un seigneur et un ninja, les deux meilleures unités au corps-à-corps. Il vous faudra donc commencer par créer deux guerriers, et prier pour que leurs statistiques augmentent rapidement, à chaque montée de niveaux, pour leur permettre d’aborder le changement de classe. Mais un autre problème va émerger rapidement : l’alignement de vos personnages. En effet, un ninja est par essence un personnage maléfique, tandis qu’un seigneur est vertueux, et si les personnages d’alignement neutre s’entendront sans difficulté avec tout le monde, impossible de faire cohabiter un alignement bon avec un alignement mauvais au sein du même groupe.

Plusieurs tours de passe-passe ont naturellement été découverts, au fil des années, pour contourner le problème – l’un des plus intéressants étant de faire changer l’alignement de vos personnages en cours de partie… par le biais de leurs actes. Croisez par exemple un groupe pacifique au sein du donjon – il y en a, après tout il y a d’autres aventuriers et tous les monstres n’ont pas nécessairement envie de se frotter à tout le monde -, choisissez de l’attaquer, et votre alignement pourrait commencer à changer pour retranscrire votre brutalité. À l’opposé, comportez-vous continuellement comme un bon samaritain et même le dernier des voleurs pourrait commencer à être considéré comme quelqu’un de vertueux – oui, le jeu gère cela, dès 1981, et on ne peut qu’applaudir des deux mains tant cela introduit d’ores et déjà une dose de subtilité qui aidera à comprendre pourquoi la saga est restée aussi populaire de nos jours – particulièrement au Japon, où des dizaines de titres – et même des OAVs ! – ont vu le jour au cours des dernières décennies.

Bon, avoir un groupe, c’est bien, l’équiper avant de partir à l’action, c’est mieux – surtout vu avec quelle facilité vos personnages peuvent trouver la mort à bas niveau. La ville où vous débutez la partie (et qui sera l’occasion de refaire le plein entre deux descentes dans le donjon) comporte justement un marchand, qui va vous laisser l’occasion de peaufiner votre barda. Très bonne nouvelle : le jeu ne s’embarrasse pas de gérer des ressources comme la nourriture, qui pouvait rapidement représenter l’une des plaies majeures des jeux de rôles des années 80. Autre bonne nouvelle : le jeu vous indique clairement, lorsque vous achetez une arme, si celle-ci peut ou non être utilisée par son acquéreur. En revanche, votre groupe ne met pas son argent en commun (ce qui est logique, après tout, puisque vous pouvez en changer la composition à chaque passage en ville), ce qui veut dire qu’il vous faudra passer par de laborieuses manipulations pour mettre tout l’argent dans les mains de l’acheteur. Puis, une fois vos armes achetées, vous pourrez aller les équiper à la taverne, ou bien à l’entrée du donjon où vous pourrez faire un dernier check-up sur votre formation avant de descendre les marches.

Vous voici dans le donjon. Vous apercevez la minuscule fenêtre en haut à gauche ? C’est votre fenêtre de jeu : c’est là que vous verrez l’intérieur du donjon et tout ce qui s’y passe. Le reste de l’interface se répartit entre la composition de votre groupe et de ses statistiques – points de vie, classe d’armure, état de santé – sur toute la moitié inférieure de l’écran, et un résumé des actions possibles affiché en haut à droite. Certes, on pourra regretter que le cœur du jeu – la partie graphique – soit cantonné à une minuscule fenêtre. En revanche, la bonne nouvelle, c’est que vous n’aurez pas besoin de passer les trois premières heures de jeu le nez dans le manuel à découvrir quelle touche fait quoi puisque toute l’interface est visible en permanence. Ne jetez pas la notice pour autant : tous les sortilèges sont consignés dedans, et vu qu’il faudra taper leur nom au clavier à chaque fois que vous voudrez en lancer un, mieux vaudra la garder à proximité en permanence…

Le manuel comporte d’ailleurs également les informations essentielles à l’une des activités privilégiées des joueurs de dungeon crawler : la cartographie. Chaque étage du donjon représente une surface carrée de 20×20 cases dont vous aurez tout intérêt à tracer le plan sur papier pour avoir la moindre chance de vous y retrouver – surtout sachant que chaque côté peut tout à fait communiquer avec l’autre, et que le jeu n’a aucun remord à utiliser des pièges comme des téléporteurs impromptus, des zones plongées dans des ténèbres impossibles à dissiper ou des plaques tournantes apte à vous désorienter pour de bon – vous obligeant à recourir à l’un des sorts de votre mage pour connaître vos coordonnées ainsi que la direction à laquelle vous faites face. Il sera également possible de vous téléporter par magie, mais prenez bien garde à ne pas vous rater, car si votre groupe finit encastré dans la roche, c’est fini pour lui et n’espérez même pas aller le récupérer un jour. Oui, tous ses membres seront morts, définitivement – mais nous allons bientôt y revenir.

Vous vous déplacez donc dans le donjon, vous efforçant de faire usage des sorts de lumière pour y voir un peu plus loin que le bout de votre nez, lorsque arrive ce qui devait arriver : un affrontement. Comme vous pouvez vous en douter, ceux-ci ont lieu en tour-par-tour : vous donnez vos instructions à vos personnage au début, puis vous regardez le tour de jeu se dérouler. Le jeu vous autorise à cibler des groupes de monstres, mais jamais un monstre seul au sein d’un groupe – si tout ceci commence à vous rappeler quelque chose, c’est parfaitement normal : un certain Dragon Quest reprendra ce système à l’identique quelques années plus tard… et là, le moment semble bien choisi pour aborder une caractéristique majeure du titre : sa difficulté. Oui, je sais, c’est quelque chose qu’on peut souvent lire sur ce site – mais souvenez-vous bien qu’on parle d’un jeu paru en 1981. Vous pensiez avoir connu des jeux difficiles ? Alors vous n’avez jamais touché à Sorcellerie.

Vous vous souvenez, ce groupe prometteur, que vous avez passé plus d’une heure à créer à coups de re-re-re-re-rerolls histoire de vous faire l’équipe ultime ? Eh bien, si vous voulez éviter une cruelle désillusion, comprenez dès maintenant qu’il pourra tout à fait se faire exterminer dès la première rencontre. Oui, c’est vexant, mais après tout, il suffit de recharger la partie, non ? Non. Le jeu sauvegarde automatiquement tout ce qui se produit. Tout. Vos morts, aussi. Donc, si la moitié de votre équipe vient de se faire tuer par un groupe de brigands au terme d’une aventure longue de vingt-cinq secondes, il faudra vivre avec –  si vous me permettez la boutade. Votre premier réflexe, si quelqu’un a survécu, sera de regagner la surface pour vous rendre au temple local, histoire de ressusciter tout le monde. Problème : les prêtres locaux vénèrent tous le capitalisme, et ressusciter quelqu’un coûte très cher – bien plus que ce que vous aurez en réserve à ce stade du jeu. Il ne vous restera donc plus qu’à retourner passer une autre heure à créer de nouveaux personnages pour fonder une nouvelle équipe avec les survivants de la première expédition. Bienvenue dans Sorcellerie.

« Et si tout mon groupe surpuissant, monté pendant des dizaines d’heures, trouve la mort au fond du donjon ? » me demanderez-vous avec un certaine angoisse. Eh bien rassurez-vous : il sera possible de le sauver… à condition d’envoyer une autre expédition récupérer les corps là où ils sont tombés. Ce qui signifie : avoir un groupe à peu près aussi puissant que celui que vous venez de perdre pour aller le rechercher… Oui, c’est dur, c’est vraiment, vraiment dur. Pour ne rien arranger, même un prêtre de haut niveau se mordra les doigts au moment de lancer un sort de résurrection – vous n’avez quand même pas cru que ça allait devenir facile ? Imaginons que votre sort rate – car oui, c’est très possible – votre joyeux décédé pourra alors voir son corps réduit en cendres. Et là, pour le relever, cela va coûter très, très cher… Oui, mais il y également un sort de résurrection supérieure, au niveau 7 ! Là, vous pourrez relever même un personnage réduit en cendres ! Mauvaise nouvelle : cette fois, si vous vous ratez, le personnage est perdu à jamais. Oui, votre superbe ninja niveau 13 avec les statistiques à fond : perdu. Pouf. Croyez-moi, il y a des séances de jeu qui pourront vous réclamer d’effectuer un deuil de plusieurs semaines.

Heureusement, comme on peut l’imaginer, beaucoup de joueurs auront trouvé, au fil des années, de nombreuses façons de tordre le coup à ce système de jeu pour le moins impitoyable – l’une des plus basiques étant tout simplement de faire une copie de sauvegarde de votre disquette « scénario » avant chaque descente au fond du donjon. Le jeu met également à votre disposition un utilitaire de récupération des personnages, pensé pour vous permettre de sauver des héros perdus à la suite d’une malencontreuse coupure de courant. N’allez pas croire que cela transforme le jeu en promenade de santé pour autant : même pour un très bon joueur, comptez au grand minimum plusieurs semaines intensives pour espérer venir à bout du donjon, ce qui vous vaudra un message de félicitations… et le droit d’exporter vos personnage dans le deuxième épisode, Le chevalier de diamant. Mais ceci est une autre histoire.

Mais après toutes ces explications – qui sont encore loin de couvrir toutes les possibilités du jeu – une question se devine sur vos lèvres : Sorcellerie : Le donjon du suzerain hérétique mérite-t-il d’être encore joué aujourd’hui ? Oui, mille fois oui. Certes, la réalisation est extrêmement austère – on parle d’un jeu sur Apple II de 1981 – mais voyez plutôt le bon côté : cela laissera d’autant plus de place à l’imagination. Certes, l’interface a vieilli, mais le jeu est encore étonnamment simple à prendre en main pour un titre aussi complexe n’ayant même pas recours à la souris. Toutes les bases du dungeon crawler sont déjà là (et la plupart n’ont pas pris une ride), mais surtout, la difficulté de la quête l’a élevée au rang de légende. Parvenez à vaincre le jeu et je peux vous promettre que vous aurez réellement le sentiment d’avoir accompli un acte de légende, de pouvoir rivaliser avec les vieux briscards s’étant escrimés plusieurs années avec le titre et de leur dire « moi aussi, je l’ai fait. » Autant dire que les joueurs occasionnels biberonnés aux courtes séances sur des jeux simples feraient mieux de prendre immédiatement leurs jambes à leur cou. Les passionnés de jeu de rôles, eux, devraient tenter leur chance. Peu d’entre eux le regretteront.

Juste un petit mot sur la version française : une localisation complète, du titre au programme en passant par le manuel, en 1983, ce n’était pas banal. La bonne nouvelle, c’est que celle-ci a été effectuée de façon très professionnelle et qu’on pourrait presque se croire devant un jeu français tant on se sent immédiatement comme un poisson dans l’eau face à ce Sorcellerie qui aurait mérité de faire davantage d’émules.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 17/20 Légende à part entière, titre visionnaire ayant laissé sa trace dans pratiquement tous les jeux de rôles paru à sa suite, Sorcellerie : Le donjon du suzerain hérétique a également la grande force de profiter d'un système de jeu ayant étonnamment bien vieilli, et au sein duquel tous les passionnés de Donjons & Dragons auront vite fait de retrouver leurs marques. Bien sûr, il faudra composer avec une interface du siècle dernier et avec une réalisation particulièrement austère, mais paradoxalement, ce côté minimaliste est très efficace pour vous retranscrire toute la pression d'un groupe égaré dans un donjon obscur avec l'angoisse de la mort à chaque tournant. La difficulté assumée du titre peut constituer autant un repoussoir qu'une qualité majeure, mais dans tous les cas, il faudra être bon, très bon pour espérer venir à bout de ce jeu de légende. CE QUI A MAL VIEILLI : – La sauvegarde automatique, équivalent des actuels mode « hardcore », vous fera pleurer des larmes de sang – particulièrement lorsque vous perdrez un groupe dans lequel vous aviez investi des dizaines d'heures – Graphiquement, c'est presque une aventure textuelle – quelques malheureux sprites pour figurer les monstres ou les trésors dans une minuscule fenêtre – L'interface a ses lourdeurs, particulièrement en ville, où équiper vos personnages risque de vous demander pas mal de temps. – Héritier des bons vieux lancers de dés, l'aspect aléatoire est ici poussé très loin, quitte à vous faire perdre des points de caractéristique lors des montées de niveaux

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Sorcellerie sur un écran cathodique :

Version PC (Booter)

Développeurs : Andrew Greenberg, Inc. – Robert Woodhead, Inc.
Éditeur : Sir-Tech Software, Inc.
Date de sortie : Avril 1984 (première édition) – 1987 (deuxième édition améliorée)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : CGA
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne

Il existe en fait deux versions PC du premier épisode de Wizardry (seule la version Apple II ayant, à ma connaissance, été traduite en français, autant vous habituer à ce qu’on parle exclusivement d’un titre appelé Wizardry à partir de maintenant) tournant sous DOS. La première, parue en 1984, étant aussi rare que délicate à faire tourner sur les ordinateurs modernes, nous nous intéresserons plutôt à la deuxième édition de 1987. En termes de réalisation tout d’abord, si on ne sera pas ébloui par ce que proposent les quatre couleurs du CGA, il faut reconnaître que les graphismes restent plus soignés que sur Apple II. Première différence flagrante : la vue du donjon occupe désormais plus de la moitié de l’écran – avec des résultats étranges puisque ni le sol ni le plafond ne sont affichés, ce qui est un peu déstabilisant. En cas de combat, le jeu vous affiche dorénavant un sprite par groupe de monstres, et ceux-ci sont plus détaillés que dans la version originale. Côté son, c’est toujours le silence absolu. Du côté de l’interface en revanche, on appréciera la quantité de petits dépoussiérages qui ont été effectués. Par exemple, il y a enfin une touche pour mettre tout l’argent du groupe en commun au moment de faire ses emplettes en ville, chaque combattant dispose d’une action par défaut lors des escarmouches qui permet d’accélérer sensiblement les combats, on peut enfin se déplacer dans le donjon avec les flèches du clavier, on n’a plus besoin de défoncer une porte à coups de pied pour l’ouvrir, etc. Certes, il faudra toujours composer sans la souris, et la création de personnage est toujours aussi lourde, mais le déroulement de la partie n’en reste pas moins sensiblement plus agréable. Quelques autres différences sont également notables au niveau du système de jeu : chaque personnage commence désormais avec huit points de vie, quel que soit son score de vitalité. Si c’est une bonne chose pour les lanceurs de sorts, cela risque de vous compliquer encore un peu plus la vie avec vos guerriers, mais c’est pour en baver qu’on joue à ce jeu, pas vrai ?

NOTE FINALE : 17,5/20

Plus belle, plus jouable, plus rapide : pour une fois, une version PC des années 80 dépasse l’originale ! Le déroulement est plus fluide, et la représentation tire enfin parti d’une fenêtre de jeu de taille respectable – sans que cela bouleverse l’expérience de jeu dans ce dernier cas. Le jeu est peut-être aussi devenu encore un peu plus difficile, mais dans tous les cas, rien ne vous interdit de vous frotter à cette version encore disponible à la vente.

Version Macintosh

Développeurs : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : Sir-Tech Software, Inc.
Date de sortie : Décembre 1985
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh Plus
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – RAM : 512ko

Parmi les portages les plus surprenants de ce premier épisode de Wizardry se trouve la version Macintosh. Surprenant, non par son contenu – qui est peu ou prou identique à ce que proposait la version PC un an plus tôt, attendez-vous donc à débuter avec une équipe où tout le monde aura huit points de vie – mais bien par son interface et par sa réalisation.

Du côté de l’interface, d’abord, Wizardry a été pensé pour tirer profit de l’interface graphique de la nouvelle machine d’Apple, et en particulier de sa souris. S’il peut être un peu déstabilisant de contrôler le jeu à travers une série de fenêtres qui évoqueront instantanément Windows au joueur moderne, force est de reconnaître que le temps d’adaptation est minime, et que le gain d’ergonomie apporté par la souris est notable. L’avantage est également que vous êtes libre de tout déplacer à votre goût pour vous faire une interface sur mesure, et que faire ses emplettes en ville est dorénavant beaucoup moins laborieux qu’à l’époque où il fallait faire défiler les pages au clavier. Un simple double-clic sur n’importe lequel de vos personnages, et vous aurez accès à la fois à son inventaire et à sa feuille de statistique ; plus besoin de passer par la taverne, et la touche pour mettre en commun l’argent du groupe est toujours là, bref, c’est beaucoup plus convivial.

Une fois en donjon, vous pouvez afficher la vue dans une petite fenêtre, comme sur Apple II, ou bien l’agrandir et profiter cette fois d’un donjon aux murs dessinés à la main ! Certes, la réalisation monochrome ne vous donnera pas le sentiment de jouer à Dungeon Master avant l’heure, mais la résolution élevée, elle, autorise des graphismes détaillés et lisibles. Seul le système de combat déçoit légèrement : alors qu’on aurait pu choisir ses sorts dans un menu déroulant, il faudra impérativement aller les taper dans la barre prévue à cet effet – sans doute une forme de protection de copie. Bref, un portage osé et parfaitement pensé, et sans doute encore l’un des plus ergonomiques à l’heure actuelle.

NOTE FINALE : 18/20

Pour ses débuts, la toute nouvelle machine d’Apple aura pu se vanter d’avoir bénéficié d’un des meilleurs portages du premier Wizardry. Plus que ses graphismes – très propres et en haute résolution, mais qui auront du mal aujourd’hui à déplacer les foules – on retiendra surtout cette version pour son interface (presque) intégralement à la souris, qui dépoussière efficacement un système de jeu un tantinet contraignant au clavier. Une très bonne initiation à la saga.

Version PC-88

Développeurs : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : ASCII Corporation
Date de sortie : Décembre 1985 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Inutile de faire durer le suspense : Wizardry sur PC-88 a été conçu dans le même moule qu’à peu près tous les portages vers les ordinateurs japonais de la période – ce qui signifie que sur le plan du système de jeu, il intègre, comme la quasi-totalité des versions à venir, toutes les modifications entrevues sur la version PC de 1984. Pour le reste, la réalisation est une nouvelle fois un peu plus plaisante (comprendre que les sprites sont plus colorés et plus fins que sur Apple II, ou même que sur PC), mais que pour le reste, elle demeure toujours aussi spartiate. Il est une nouvelle fois possible de jouer en anglais via une option au lancement du jeu, et tout le reste est toujours exactement aussi agréable que ce qu’on espérait. Bref, si vous avez un PC-88 sous la main, inutile de vous priver, si vous n’en avez pas, vous n’êtes peut-être pas face au logiciel qui pourra justifier à lui seul l’investissement.

NOTE FINALE : 17,5/20

Pas de mauvaise surprise pour Wizardry sur PC-88, qui livre sensiblement la même performance que sur la grande majorité des systèmes japonais : le jeu intègre toutes les optimisations de la version PC, les sprites sont encore un peu mieux dessinés, et le tout est intégralement jouable en anglais. Le pied.

Version PC-98

Développeurs : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : ASCII Corporation
Date de sortie : 15 novembre 1985 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Parfois, je me surprends à penser que si RetroArchives.fr avait été un site centré principalement autour des jeux japonais, l’idée d’y tester séparément chaque version d’un même jeu n’y aurait jamais vu le jour : j’aurais simplement écrit un gros pavé qui aurait été valable pour tous les portages. Eh oui, vous l’aurez deviné, Wizardry sur PC-98 est à peu près identique à toutes les autres versions testées jusqu’ici sur les ordinateurs japonais ; la seule infime nuance résidant dans un troisième choix sur le menu vous invitant à choisir la langue, mais je serais bien incapable de dire à quoi il correspond. Pour le reste, le titre est exactement équivalent à ce qu’on avait pu voir jusqu’ici : basé sur la version PC, mais en plus fin et en plus coloré. Bref, ce qu’on était venu chercher.

NOTE FINALE : 17,5/20

Comme sur les autres ordinateurs japonais, Wizardry sur PC-98 consiste principalement en un portage de la version PC en plus fin et en plus coloré. Comme c’est toujours jouable en anglais, après tout, pourquoi se priver ?

Version Sharp X1

Développeurs : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : ASCII Corporation
Date de sortie : Janvier 1986 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Si vous avez fait l’effort de lire les test des différents portages japonais de Wizardry jusqu’ici, je pense que vous avez dû parvenir à en dégager comme une tendance. Du coup, vous devriez pouvoir deviner ce en quoi va consister cette version Sharp X1 du jeu. Tous ceux qui ont hasardé « exactement la même chose que les autres portages japonais » ont gagné : même contenu, même résolution, même palette de couleur, même interface, toujours pas de musique mais on peut jouer en anglais : le forfait standard sans la moindre modification. La bonne nouvelle étant que c’est déjà largement suffisant pour tenir un bon jeu. On prend.

NOTE FINALE : 17,5/20

Même constat que pour la plupart des autres portages nippons : Wizardry sur Sharp X1 est une version en haute résolution et en seize couleurs du portage réalise sur PC en 1984. C’est toujours aussi agréable à jouer, et c’est en anglais. Vous pouvez foncer.

Version Commodore 64

Développeurs : Sir-Tech Software, Inc.
Éditeur : Sir-Tech Software, Inc.
Date de sortie : Décembre 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Pour son passage chez Commodore, Wizardry n’a pas décidé d’innover de manière aussi dramatique que chez Apple. En fait, le jeu est un calque parfait de la version PC en terme de contenu et d’interface. Graphiquement, le jeu est plus coloré que les versions précédentes, mais il est aussi moins fin que sur Macintosh. Surtout, comme souvent sur C64, il est littéralement parasité par des chargements à rallonge qui vont mettre votre patience à rude épreuve.

NOTE FINALE : 17/20

Bon portage dénué de réelle surprise, Wizardry sur Commodore 64 aurait sans doute pu prétendre surpasser la version PC sans ces temps de chargement qui deviennent assez vite insupportables. Reste donc un jeu à la réalisation propre, le plus coloré des versions sorties jusque là.

Version MSX

Développeurs : Foretune Co., Ltd.
Éditeur : ASCII Corporation
Date de sortie : 1987 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Supports : Cartouche, disquette 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2

Comme tous les portages commercialisés au Japon, la version MSX de Wizardry a le mérite d’être intégralement jouable en anglais, d’un simple choix au lancement du jeu. On se retrouve une nouvelle fois avec une version profitant de toutes les améliorations et retouches de la version PC, avec plus de couleurs, tant qu’à faire. Une très bonne alternative, donc, pour ceux qui seraient définitivement fâchés avec les déclinaisons de cyan et de magenta et qui n’auraient pas sous la main un des autres modèles d’ordinateurs japonais.

NOTE FINALE : 17,5/20

Pas de révolution pour un portage très sage, mais qui accomplit sa mission à la perfection. C’est un peu plus beau et un peu plus jouable que la version Apple II, et ça n’est surpassé en ergonomie que par la version Macintosh. Une version qu’on n’aura aucune raison de bouder, donc.

Version NES

Développeurs : Game Studio Inc.
Éditeur : NEXOFT Corporation
Date de sortie : 22 décembre 1987 (Japon) – Juillet 1990 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les portages sur console de salon réservent parfois d’excellentes surprises, et la version NES de Wizardry fait assurément partie de celles-là. Faire tenir toute l’interface du jeu sur deux boutons ? Non seulement c’est possible, mais cela simplifie même grandement la jouabilité ! Plus question ici de taper le nom du sort à chaque combat : il suffira de le choisir dans une liste, ce qui permet de gagner un temps certain. Si le jeu s’appuie visiblement davantage sur le système de jeu de la version Apple II que sur celui des versions suivantes (vos personnages pourront commencer ici avec plus de huit points de vie), on retrouve également certaines des fonctions salutaires ajoutées plus tard, comme ces fameuses options pour mettre l’argent du groupe en commun ou pour le répartir entre les personnages.

Mais la plus grande surprise vient sans doute de la réalisation : la version NES du jeu profite non seulement de murs texturés, mais également de musiques d’ambiance très réussies ! Cela rend le donjon encore un peu plus agréable à parcourir et, cerise sur le gâteau, les puristes absolus ne goûtant pas cet habillage pourront repasser à un affichage en 3D vectorielle et couper le son d’un simple choix dans le menu des options. Deux bémols toutefois pour cette version, autrement très emballante : une partie des énigmes de la version originale – à commencer par celles nécessitant d’entrer des mots au clavier – sont purement et simplement passées à la trappe, ce qui est dommage. Plus triste encore : le titre souffre de son lot de bugs, et la classe d’armure, par exemple, ne semble avoir aucun effet – ce qui le rend le jeu encore plus atrocement difficile dans cette version, même si la cartouche inclut une option pour redémarrer une équipe ayant passé l’arme à gauche. C’est vraiment dommage, car on tenait là sinon, à n’en pas douter, une des toutes meilleures versions du jeu.

NOTE FINALE : 16,5/20

Facile à prendre en main et bien réalisée, la version NES de Wizardry avait les arguments pour être la version 8 bits ultime – titre dont la prive hélas ses coupes et surtout ses bugs. Reste un jeu abordable, pour bien vous familiariser avec l’univers – et souffrir immédiatement à cause d’une difficulté encore plus redoutable que sur les autres versions, pour de mauvaises raisons, malheureusement.

Version PC Engine CD
Wizardry I・II

Développeurs : Access Co., Ltd.
Éditeur : Naxat Co., Ltd.
Date de sortie : 23 juillet 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Super System Card requis

Dans les années 90, et en dépit de son grand âge, Wizardry aura continué à connaître des adaptations – mais uniquement sur les systèmes japonais, et exclusivement sous la forme de compilations offrant, au passage, quelques optimisations de l’interface et une refonte graphique et sonore. Contrairement à ce qui se passerait plus tard sur les consoles 32 bits, ce CD-ROM regroupant les deux premiers scénarios de la saga ne permet pas de choisir son aventure de départ : il faudra obligatoirement enchaîner les deux labyrinthes dans l’ordre ; quant aux options de configuration, elles sont dissimulées dans le menu « Utilities » du jeu. La refonte graphique fait le travail et permet de profiter de donjons un peu moins abstraits, et on pourra surtout bénéficier de musiques de qualité CD, mais le jeu en lui-même comme son déroulement n’ont pas changé d’un iota depuis la version originale. On se retrouve donc face à une sorte de « version NES Plus » avec deux épisodes sur la même support, mais il faudra cette fois composer d’un bout à l’autre avec un mélange d’anglais et de japonais qui risque de s’avérer pénalisant pour les quelques énigmes du jeu. Une valeur sûre, mais les joueurs n’étant pas à l’aise avec le japonais seront sans doute plus à l’aise sur la rilogie parue sur les systèmes 32 bits et sur Super Nintendo.

NOTE FINALE : 18/20

Subtilement dépoussiéré comme il l’avait été sur NES mais sans trahir en rien l’expérience de jeu originale, ce premier scénario de Wizardry accompagné de sa suite sur le même CD-ROM fait parfaitement le travail pour permettre aux possesseurs de la console de NEC et de son extension de découvrir le titre dans d’excellentes conditions – à conditions de parler quelques mots de japonais quand même.

Version PlayStation
Wizardry : Llylgamyn Saga

Développeurs : Soliton Soft
Éditeur : Locus Company Ltd.
Date de sortie : 26 février 1998 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (3 blocs)

La saga Wizardry sera quelque peu passée de mode en Europe au fil des décennies, mais elle aura ironiquement connu une sorte de deuxième jeunesse sur un marché japonais qui n’aura jamais renié son amour pour elle – au point que des épisodes continuent de paraître aujourd’hui encore sur les systèmes de l’Archipel. À la fin du XXe siècle, alors que les joueurs occidentaux étaient pour la plupart en train de découvrir le J-RPG via Final Fantasy VII, le Japon, lui, héritait du remake de la première trilogie d’une série alors sur le point de fêter sa majorité.

Petit inconvénient : n’étant jamais sorti du Japon, le titre vous demandera d’aller tâtonner dans les options (conseil : modifiez les cinq premières lignes) pour pouvoir être joué en anglais à 95%. Mais alors au moins, dans cette configuration, pas de débat possible : on tient là la meilleure version du jeu, point barre. Les donjons sont désormais présentés dans une 3D temps réel texturée, avec des effets d’éclairage bienvenus et très bien rendus, et les monstres sont présentés via des illustrations très bien réalisées. L’interface au pad reprend très exactement ce qui avait été fait pour la version NES onze ans plus tôt, ce qui signifie que jeter un sort se limite à le sélectionner dans une liste. Mais le mieux, c’est surtout que le contenu du jeu, lui, n’a pas changé d’un iota, et qu’il est même possible de revenir aux murs en fil de fer et aux sprites de la version MSX ! On notera néanmoins quelques petites modifications : vous pouvez par exemple faire vos emplettes en ville directement en groupe sans vous soucier de répartir l’or entre les personnages, et une carte automatique a fait son apparition via le menu du jeu. Pour le reste, c’est très exactement le jeu qu’on a connu sur Apple II, avec en plus un transfert de personnage extrêmement facile à accomplir puisque les trois premiers épisodes sont présent sur le CD-ROM. Bref, ne cherchez pas plus loin : si vous voulez une version légèrement dépoussiérée sur le plan technique mais d’une fidélité à toute épreuve pour l’essentiel, voilà votre Graal.

NOTE FINALE : 18,5/20

Il est difficile d’imaginer un jeu de 1981 débarquant fièrement sur la génération 32 bits avec un contenu identique à 99% à ce qu’il était au départ, et des options graphiques certes réjouissantes mais totalement facultatives. Si vous voulez découvrir Wizardry avec tout le confort moderne, alors cette version PlayStation est à n’en pas douter une des meilleures qui soit – à condition de réussir à mettre la main dessus et d’être prêt à expérimenter un peu avec le menu des options pour parvenir à jouer en anglais.

Version Saturn
Wizardry : Llylgamyn Saga

Développeurs : Soliton Soft
Éditeur : Locus Company Ltd.
Date de sortie : 26 novembre 1998 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou carte mémoire

Sous la houlette de Soliton Soft, la première trilogie Wizardry aura donc continué son chemin jusque sur les machines de la génération 32 bits, plus de dix-sept ans après la sortie du titre original. Neuf mois jour pour jour après la version PlayStation, c’était au tour de la Saturn de profiter de la sienne… qui, dans les grandes lignes, reprend exactement tout ce qu’on avait déjà pu voir sur la machine de Sony. Oh, allez, techniquement, les effets de lumière sont un peu moins bien rendus, c’est peut-être légèrement moins fluide, quelques minuscules animations sont passées à la trappe… Mais bon sang, on parle d’un jeu développé à l’origine sur Apple II, alors on devrait s’en remettre ! Une nouvelle fois, le seul point noir sera de devoir composer avec un jeu japonais qui nécessitera de naviguer dans les options pour être jouable à 95% en anglais, mais c’est une nouvelle fois une très bonne occasion de profiter du jeu avec un habillage plus moderne.

NOTE FINALE : 18,5/20

Mêmes constatations que sur PlayStation : Wizardry sur Saturn s’adapte très intelligemment au hardware de la console 32 bits sans chercher à noyer le joueur sous la poudre aux yeux, et propose une expérience jouable et fidèle au jeu de base sans transiger en rien avec la difficulté de l’expérience originale.

Version Super Famicom
Wizardry I·II·III : Story of Llylgamyn

Développeurs : Game Studio Inc.
Éditeur : Media Factory, Inc.
Date de sortie : 1er juin 1999 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais, traduction anglais par Hengki Kusuma Adi
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 32Mb
Système de sauvegarde par pile

Non, Wizardry ne se sera pas contenté de débarquer sur les consoles 32 bits japonaises. Tant qu’à faire, il aura également continué sa route jusque sur la Super Nintendo… à un moment où la console 16 bits n’était sans doute pas au sommet de sa forme, mais cela n’aura visiblement pas freiné les velléités de portage du jeu. Et tant qu’à faire, même si on perd la 3D temps réel des autres versions développées à la même période, on se retrouve avec des graphismes en bitmap qui font très largement le travail ! Tout comme les autres, ce titre est intégralement jouable en anglais pour peu qu’on fasse les changements adéquats sur l’écran des options. Un patch de traduction réalisé par des fans est même disponible pour traduire également les reliefs de japonais qui pourraient subsister. Bref, il commence à être difficile de trouver une bonne raison de ne pas découvrir Wizardry !

NOTE FINALE : 18/20

Même lors de la génération 16 bits, il était possible de jouer à Wizardry dans des conditions qui auraient faites rêver les joueurs de l’opus original. Tout est à sa place de la meilleure des façons, l’enrobage est parfait, et il est même possible de s’en passer pour s’approcher au maximum de l’expérience originale. Le pied.

7 Colors

Développeur : Gamos Ltd.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Titre alternatif : The 7 Colors (PC-98)
Testé sur : PC (DOS)AmigaPC-98

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (en local ou via IPX)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien, russe
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : EGA (640×350), VGA (640×480)
Carte sonore supportée : AdLib

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Si vous évoquez un jour en public un jeu de réflexion conçu par un programmeur russe, il y a de fortes chances pour que tous les joueurs vaguement expérimentés dans un rayon de vingt mètres se mettent à hurler « Tetris ! » avant même la fin de votre phrase, et commencent même, pour certains, à se lancer dans un panégyrique à la gloire du titre d’Alekseï Pajitnov. Comme si l’ingénieur ayant conçu l’un des programmes les plus célèbres de l’histoire du jeu vidéo à une époque où la Russie s’appelait encore l’Union Soviétique était le seul russe à s’être frotté au monde vidéoludique. Le nom de Dmitry Pashkov est certes infiniment moins connu à l’échelle mondiale, pourtant c’est bien à un programme issu de son imagination que nous allons nous intéresser aujourd’hui.

7 Colors est un jeu de réflexion pour deux joueurs – comme pour les échecs, il nécessite d’avoir un adversaire en face de vous, vous serez donc heureux d’apprendre que l’ordinateur acceptera de tenir cette place. Le but du jeu ? Conquérir plus de la moitié du plateau. Et de quelle manière ? Eh bien, c’est là toute l’originalité et la simplicité du titre de Gamos : en choisissant une des sept couleurs auxquelles fait référence le titre, pardi.

Le déroulement d’une partie est simple : une grille comporte un nombre prédéfini de losanges colorés, pouvant s’élever à plusieurs centaines. Les deux joueurs commencent aux extrémités opposées ; ils devront, chacun leur tour, sélectionner une couleur, ce qui constituera un tour de jeu. Chaque losange de cette couleur en contact avec le territoire de celui qui vient de jouer se verra ainsi « annexé ». De cette façon, si on commence obligatoirement avec un seul et unique losange, la capture de différents blocs de couleurs permettra la croissance exponentielle des deux empires. Histoire de rendre la chose un peu plus stratégique, deux règles ont été ajoutées :

  • Vous ne pouvez pas sélectionner la couleur que vient de choisir votre adversaire (une fois le principe assimilé, c’est au fond parfaitement logique : sans cette règle, vous pourriez capturer tout l’empire de votre adversaire une fois à son contact, ce qui réduirait la mécanique du jeu à néant).
  • Si vous formez une ligne joignant deux bords opposés du plateau, vous annexez tous les losanges situés de votre côté de cette ligne.

Oui, 7 Colors est un des rares programmes dont le principe soit plus difficile à expliquer qu’à comprendre en jeu. Une fois confronté au plateau, je doute qu’il vous faille plus d’une poignée de secondes pour assimiler le principe à la perfection. Et de fait, le principe est aussi simple que génial, et peut rapidement se montrer addictif… Pour un temps.

Le vrai problème est que, comme on l’a vu, 7 Colors est un jeu pensé pour deux joueurs. Si vous avez la chance d’avoir un autre mordu de jeux rétros sous la main, vous pourrez lui donner le joystick ou le clavier histoire de voir qui de vous deux s’en sort le mieux. Notons également – chose encore rare en 1991 – qu’il est aussi possible de jouer à deux en réseau local. En revanche, le contenu solo du titre pose un réel problème, jugez plutôt :

Tout d’abord, il n’y a que deux modes de jeu : un mode « singlefield », qui consiste en un affrontement de base dont vous pouvez choisir les caractéristiques (taille du plateau, présence ou non d’obstacles, et même un éditeur de niveaux), et un mode « challenge », qui consiste en sensiblement la même chose sauf que la configuration du plateau vous est imposée à chaque niveau. Comme il n’est pas possible de sauvegarder, vous pouvez tout simplement choisir de partir de n’importe quel niveau – ce qui vous permettra de constater qu’il n’y en a que sept (De toute façon, je vous mets au défi de comprendre quoi que ce soit à la logique de ce mode « challenge » qui reconstitue quoi qu’il arrive un plateau aléatoire avec des obstacles placés différemment que vous perdiez ou que vous gagniez, il est donc impossible de dire si une victoire vous fait « avancer » jusqu’au niveau suivant où si le jeu se contente de refaire une grille au pif à chaque fois). Et c’est tout.

Certes, vous allez me dire que Tetris non plus ne croulait pas, à l’origine, sous les modes de jeu. Mais Tetris était un jeu imbattable : la seule fin était le game over, et tenir le plus longtemps possible était déjà un but en soi. Ici, sachant qu’une partie vous prendra au grand maximum trois minutes (en jouant lentement), on fait extrêmement vite le tour des possibilités du jeu qui, reconnaissons-le, sont assez réduites. Vous affronterez systématiquement le même ordinateur quoi qu’il arrive – pas d’adversaire aux caractéristiques particulières, pas de mode de difficulté, rien : un seul concurrent ad vitam eternam, point barre. N’espérez pas trouver des niveaux casse-tête à réaliser en un certain nombre de coups – ça n’a pas été prévu, et en l’état le contenu du jeu est absolument famélique : 7 niveaux, 7 couleurs, 2 modes de jeu, et une stratégie qui montre vite ses limites puisque vos choix se bornent aux couleurs en contact avec votre domaine.

Pire, à force de laisser toute la place à la génération aléatoire, le jeu n’est absolument pas équilibré et créé souvent des situations injustes dans la répartition des couleurs. On en arrive d’ailleurs parfois à des situations grotesques : en début de partie, votre premier choix n’en est pas un, puisque votre losange initial n’est en contact qu’avec un seul autre. Vous en êtes donc réduit à choisir la couleur de ce losange quoi qu’il arrive. Sauf que si cette couleur a le malheur d’être celle avec laquelle commence votre adversaire (une chance sur sept, donc), eh bien vous ne pourrez pas la sélectionner, ce qui revient à perdre un tour. Dans un jeu ou chaque clic représente une croissance exponentielle, c’est un handicap considérable – mais les programmeurs n’y ont visiblement pas pensé, ce qui en dit long sur le temps qu’ils ont passé à jouer à leur propre jeu. Bref, tout cela respire le brouillon pas bien fini – et c’est réellement dommage, car avec un peu de travail en plus, le concept du jeu aurait certainement pu s’enrichir de façon conséquente.

Niveau réalisation, le jeu peut se jouer en 640×480 – ce qui, vu la taille des losanges sur les grandes grilles, est un luxe qui ne se refuse pas. L’interface est limpide, la jouabilité simplissime, on regrette juste que l’emballage, à base de tableaux gris façon Windows 3.1, ne soit pas un peu plus visuel. Niveau musical, 7 Colors vous fera regretter d’avoir une carte son, en vous assénant une sélection de morceaux de musique classique joués en MIDI pourri qui évoquera les pires best of de musique d’ascenseur. Oui, comme Tetris, là encore, mais ce n’était sans doute pas la meilleure idée à reprendre du logiciel de M. Pajitnov – mais bon, l’avantage, c’est que ça évite de payer un compositeur, et que tous ces charmants morceaux sont ce qu’on appelle « libres de droits » chez les capitalistes, camarade.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 10/20 S'il est une chose qui manque au logiciel de Gamos, c'est bien l'ambition. Partant d'un concept simple et génial, la société russe s'est contenté de l'emballer tel quel en dépit d'un contenu rachitique, avant de laisser à Infogrames le soin de le vendre au prix fort. En résulte un jeu accessible et amusant – le temps d'une dizaine de parties, avant de regagner son carton d'où on ne le sortira que pour lui faire jouer le même rôle qu'au démineur. CE QUI A MAL VIEILLI : – Aucun choix de difficulté – On comprend le principe du jeu en quatre secondes, mais c'est également le temps nécessaire pour faire le tour du contenu – Pourquoi ne pas avoir étendu le champ des possibilités à trois ou quatre joueurs ? Pourquoi ne pas avoir proposé des casse-têtes ? Pourquoi ne pas avoir développé le contenu solo ? Ça vous a réellement pris plus d'une heure pour programmer ce jeu ?

Bonus – Ce à quoi peut ressembler 7 Colors sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeur : Gamos Ltd.
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Novembre 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Comme on pouvait s’y attendre, 7 Colors souffre, sur la machine de Commodore, d’une résolution plus limitée (640×400 au lieu de 640×480 ; ça n’a peut-être l’air de rien comme ça, mais visuellement ça fait une très grosse différence). Conséquence immédiate : si les petites grilles n’en pâtissent pas trop, les grandes virent dangereusement à la bouillie de pixels, et le confort de jeu y laisse des plumes – on notera d’ailleurs que les grilles sont moins grandes que sur PC. Pour compenser, la musique, de bien meilleure qualité que sur PC, aura au moins le bon goût de vous scier les nerfs un peu moins rapidement – comptez trente à quarante secondes. Pour le reste, le jeu est strictement identique en terme de contenu à la version PC – mais on appréciera l’interface un peu moins triste.

NOTE FINALE : 09,5/20

La version Amiga de 7 Colors perd en lisibilité, ce qui est un peu dommage dans un jeu basé sur l’observation de losange de quatre pixels. La musique, elle, passe un peu mieux sans pour autant vous ôter définitivement l’envie de couper le son. Bref, une version encore un peu plus faible que sur PC, avec des grilles plus petites.

Version PC-98
The 7 Colors

Développeur : Gamos Ltd.
Éditeur : Hot-B Co., Ltd.
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

En dépit de ses défauts, 7 Colors (devenu pour l’occasion The 7 Colors) était un titre qui se prêtait excellemment à une excursion sur les systèmes japonais : non seulement il ne nécessitait pas de traduire un seul mot de vocabulaire, mais en plus la grande majorité des ordinateurs nippons employaient des résolutions natives qui correspondaient exactement à celle dont le titre avait besoin. On ne sera donc pas surpris d’aboutir à un équivalent de la version PC occidentale – avec une interface un peu moins austère, néanmoins, et avec des thèmes musicaux un peu plus inspirés. On n’aurait vraiment pas craché sur un ou deux modes de jeux en plus, histoire d’étoffer le contenu, mais ce n’était visiblement pas ce qui était au programme – en l’état, on a affaire à un portage qui remplit parfaitement son objectif. On s’en contentera.

NOTE FINALE : 10/20

Aucune innovation majeure (ou mineure) à attendre de The 7 Colors sur PC-98 – c’est pour l’essentiel exactement le même titre que sur PC, avec une interface un peu moins grisâtre dans les menus et avec des thèmes musicaux qui respirent un tout petit peu moins la musique d’ascenseur. Strictement rien qui vienne allonger la durée de vie du jeu au-delà des dix minutes, hélas.

Sid Meier’s Civilization

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Titre alternatif : Civilization (titre usuel)
Testé sur : PC (DOS)AmigaPC-98Atari STMacintoshPC (Windows 3.1)Super Nintendo
Versions non testées : PlayStation, Saturn

La saga Civilization (jusqu’à 2000) :

  1. Sid Meier’s Civilization (1991)
  2. Sid Meier’s CivNet (1995)
  3. Sid Meier’s Civilization II (1996)
  4. Sid Meier’s Alpha Centauri (1999)
  5. Civilization : Call to Power (1999)
  6. Call to Power II (2000)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25 (x2) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette française 474.05 émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 3.0 – RAM : 640ko – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr
Liens utiles : Patch ajoutant la gestion des cartes sonores de type OPL3 et du standard General MIDI

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À l’orée des années 90, le jeu de stratégie sur ordinateur représentait, à l’instar du jeu de rôles quelques années avant lui, un genre de niche éminemment codifié où il était rare que le joueur soit surpris par ce qu’on lui offre.

Sorti des éternels wargames proposant de revivre – via des cartes le plus souvent couvertes d’hexagones – les plus grandes batailles historiques depuis les guerres napoléoniennes jusqu’à la seconde guerre mondiale, le genre connaissait quelques représentants plus originaux mettant en scène des conflits imaginaires, dont certains avaient connu un certain succès critique, comme le célèbre Battle Isle ou encore l’adaptation du jeu de plateau de Ludodélire Full Metal Planète. Mais tous ces jeux composaient, comme c’était alors la norme, avec une limitation évidente : celle d’être cantonné à une période et à un lieu donnés, avec des unités et un environnement définis dès le départ et qui ne seraient jamais appelés à changer. La rare composante logistique, lorsqu’elle existait, se bornait généralement à la gestion de l’approvisionnement. Civilization allait venir changer tout cela, et initier à lui seul un nouveau genre qu’on baptiserait, un peu plus tard, le 4X (pour eXploration, eXpansion, eXploitation et eXtermination).

Pour bien comprendre toute l’originalité du titre imaginé par Sid Meier et Bruce Sheley en 1991, il faut d’abord commencer par énoncer son objectif : « Bâtir une civilisation qui résistera à l’épreuve du temps ». Comment ? Eh bien tout d’abord, en choisissant d’incarner le chef d’une des quatorze civilisations du jeu. Des Anglais aux Russes en passant par les Américains, les Indiens ou même les Zoulous, on appréciera le relatif éclectisme du titre à ce niveau.

Après quoi, on sélectionne son niveau de difficulté, le nombre de civilisations présentes en jeu et le nom de son glorieux chef, et la partie commence. Et là, une unique unité de colons (parfois deux) apparaitra sur une carte entièrement masquée qu’il vous appartiendra de découvrir. Nous sommes en 4000 avant J.C., et votre but sera de mener votre peuple depuis la préhistoire jusqu’à l’ère spatiale, pour remplir l’un des deux objectifs de victoire du jeu : être la dernière civilisation encore en vie, ou bien être la première à fonder une colonie hors du système solaire. Oui oui, rien que ça. Si, au terme de la partie (plusieurs centaines de tours), aucune civilisation n’a rempli un de ces deux objectifs, le vainqueur sera désigné selon un système de points.

D’emblée, l’ambition du titre apparait comme énorme : loin de vous mettre à la tête d’une armée pour une période dépassant rarement la décennie, comme c’était le cas pour la quasi-totalité des wargames de l’époque, celui vous place au contrôle total d’une civilisation entière pour une période pouvant dépasser six mille ans !

Et comme vous pouvez vous en douter, ce contrôle va s’étendre beaucoup plus loin que celui de vos troupes : puisque vous allez partir d’une simple ville perdue au milieu d’une carte inconnue (générée aléatoirement, même s’il est également possible de commencer sur une carte reproduisant la géographie terrestre), il va falloir explorer, vous étendre, traiter avec les autres civilisations, leur faire face militairement le cas échéant, et bien évidemment mener vos recherches scientifiques pour changer une société maitrisant à peine les outils en une puissance spatiale. Pour cela, il vous faudra composer avec des concepts un peu plus complexes que de déplacer des unités sur une carte, et les possibilités qui vont s’offrir à vous vont rapidement devenir réellement vertigineuses.

Commençons par le commencement : votre première ville. Un écran spécial, affiché dès que vous cliquez sur elle, vous dévoilera la clé de son développement – et de celui de tout votre empire lorsque vous aurez plus d’une cité. Tout d’abord, le terrain sur lequel votre capitale est bâtie, ainsi que les terres environnantes, ont une importance vitale : chaque type de terrain (plaines, prairies, montagnes, forêts, marécages, etc.) produit différentes quantités de trois types de ressources. La nourriture définira la vitesse à laquelle la population de votre ville va s’accroitre : en cas de manque, la croissance s’interrompra, et pourra même laisser place à une famine qui vous fera alors perdre de la population.

La production, elle, influera sur la vitesse à laquelle vous produirez unités et bâtiments, et le commerce se répartira entre trois axes dont vous pourrez définir l’équilibre à tout moment : les impôts qui financeront les dépenses courantes de votre empire, la recherche qui lui permettra de progresser scientifiquement, et les marchandises de luxe qui auront un impact sur le taux de satisfaction de votre population. Comme vous pouvez vous en douter, l’équilibre entre ces différents paramètres sera une des clés pour décider de la victoire à long terme : négligez la recherche, et vous risquez de faire grise mine en voyant un adversaire venir aligner des catapultes et des légions en armure face à vos milices armées de sagaies ; levez des impôts trop bas et vos bâtiments s’effondreront faute d’entretien, laissez la grogne monter et vos villes se révolteront une à une, paralysant la production et la croissance, et aboutissant même parfois à une révolution.

Car oui, le jeu gère également votre système politique. Si celui-ci se limite au despotisme au début de la partie, vos recherches vous amèneront à pouvoir adopter, au terme d’une courte période d’anarchie, un régime monarchique, démocratique, communiste ou républicain qui aura des effets spectaculaires sur la production de chaque case de terrain, mais aussi sur les couts d’entretien et sur l’impact des garnisons au sein de vos villes.

Chacun apportera également son lot de contraintes, la démocratie étant le plus exigeant de tous : le sénat vous interdira le plus souvent de déclarer la guerre, le prix de l’entretien des troupes sera prohibitif, et une mécontentement trop élevé aura vite fait d’aboutir à une révolution et à un retour express à la case « Anarchie ». Bien évidemment, ces contraintes s’appliquent également à vos adversaires, et vous craindrez moins une attaque surprise venant d’un démocrate plutôt que d’un régime autocratique mené par Staline ou Napoléon. Autre petit détail : chaque civilisation du jeu sera naturellement, selon le tempérament de son leader, plus ou moins agressive, le pacifique Gandhi ayant le plus de chance de représenter un voisin agréable. Notons malgré tout un bug célèbre, qui rend ce dernier monstrueusement agressif lorsque l’Inde opte pour la démocratie : croyez-moi, voir le Mahatma vous menacer de frappes nucléaires au milieu de négociations tendues peut faire un drôle d’effet. Reste l’opportunité d’échanger des recherches scientifiques au cours des négociations, voire de prononcer des exigences histoire de mettre la pression aux civilisations sur lesquelles vous pensez avoir l’ascendant.

Le jeu propose également d’avoir un impact direct sur votre environnement, à plusieurs niveaux. Tout d’abord, vos colons font également office d’ouvriers sur la carte du jeu, et pourront optimiser la production des différents terrains en construisant des routes, des irrigations ou des mines, par exemple. À des stades plus avancés du jeu, il leur sera également possible de construire des ponts, de tracer des lignes de chemin de fer, de planter des forêts et même de nettoyer la pollution que vos cités industrielles ne manqueront pas de générer, voire les retombées radioactives consécutives à l’emploi de l’arme atomique (thématique très actuelle : le réchauffement climatique est géré, et peut aboutir à une montée des eaux).

Ces améliorations ont non seulement un effet direct sur la croissance de vos villes – des terres irriguées produiront davantage de nourriture, et les routes génèreront plus de commerce – mais également un intérêt stratégique majeur : en cas de guerre, acheminer des troupes vers la ligne de front se fera infiniment plus vite via des voies ferrées que si vous laissez vos unités avancer en rase-campagne – ou pire, à travers forêts et marécages. Les terrains ont également une valeur défensive qui leur est propre, et il sera beaucoup plus difficile de venir à bout d’une unité retranchée dans les collines ou au milieu d’une forêt que livrée à elle-même au beau milieu d’une plaine.

Profitons-en pour parler du système de combat, qui risque de prendre une importance capitale dans la plupart des parties, tant vos adversaires n’entrevoient le plus souvent la coexistence pacifique comme une option que dès l’instant où vous êtes plus puissant qu’eux – et encore. Chaque unité dispose de trois caractéristiques : une valeur d’attaque, une valeur de défense, et une valeur de déplacement correspondant au nombre de cases qu’elle pourra parcourir à chaque tour. Comme on l’a vu, le type de terrain sur lequel elle se trouve aura un impact direct sur les deux dernières caractéristiques.

Lorsque une unité en attaque une autre, sa valeur d’attaque est confrontée à la valeur de défense de l’ennemi, à laquelle sont appliqués les différents modificateurs (comme la présence de fortifications) pour décider du sort du combat. L’ennui étant que ce système repose sur le « tout ou rien » : les unités n’ont pas de points de vie, elles ne peuvent pas être blessées, il n’y aura donc obligatoirement qu’une seule des deux unités pour ressortir en vie de l’affrontement. Problème : cela laisse une place très importante au hasard, le fait de voir une de vos unités d’élite à 18 en attaque perdre misérablement face à une unité doté d’un unique point de défense n’ayant rien d’exceptionnel, et cela ne va pas en s’arrangeant tandis que la difficulté augmente. Voir une situation serrée basculer en votre défaveur parce qu’une dizaine de vos unités de tanks se seront écrasées contre un unique régiment de mousquetaires adverses peut se révéler particulièrement difficile à digérer – et voir une de vos villes tomber parce qu’un groupe de barbares isolé a soudain décider de remporter tous ses combats n’est pas des plus appréciable non plus.

Dans le même ordre d’idées, on aurait préféré qu’une augmentation de la difficulté corresponde à une maitrise accrue de la part de l’I.A., au lieu de quoi, celle-ci se contente de tricher et de recevoir des bonus de plus en plus conséquents tandis que vous accumulerez les pénalités, un reproche qui restera hélas valable pour l’intégralité de la saga. L’I.A. est d’ailleurs d’une agressivité assez décourageante, et profite outrageusement de certaines des faiblesses de l’interface – comme l’absence de frontières – pour venir entasser ses unités autour de vos villes et vous empêcher d’exploiter les ressources des terres environnantes sans que vous puissiez lui demander de retirer ses troupes. C’est d’autant plus énervant qu’il vous sera impossible de faire de même, le jeu vous interdisant le plus souvent de pénétrer à proximité des cités adverses sans leur déclarer la guerre.

En dépit de ces quelques errements, que la suite de la saga s’appliquera le plus souvent à corriger, le côté extrêmement addictif du jeu ne se dément pas, même plus de 25 ans après sa sortie. Et si les occasions de pester sont nombreuses, la faute à un facteur « chance » un peu trop présent dans les affrontements et dans la viabilité de votre position de départ, le syndrome « allez, encore un tour » qui peut vous amener à continuer à jouer jusqu’à des heures déraisonnables est toujours vivace, preuve de la très grande qualité du jeu.

Un mot, en clôture de ce copieux test, sur la version française du jeu : catastrophique. Elle a le mérite d’exister, ce qui sera toujours mieux que de se frotter à la version originale pour les non-anglophones. En revanche, si les descriptions scientifiques ont l’avantage d’être compréhensibles sans briller par leur style, l’essentiel du jeu multiplie les coquilles, les fautes d’accord, les crachats au visage de la grammaire et les structures de phrases tellement approximatives qu’une traduction Google ressemble à du Ronsard en comparaison. On se demandera également pourquoi le jeu multiplie les abréviations dans des situations où il y avait largement la place pour mettre le mot en entier, ce qui donne parfois le sentiment que les dirigeants adverses s’adressent à vous en langage SMS – ce qui est peut-être exagérément visionnaire pour un jeu de 1991. Heureusement, le manuel, lui, a déjà été mieux traduit, mais je serais curieux de savoir à quel endroit les sociétés américaines s’acharnaient à embaucher leurs traducteurs au début des années 90 pour trouver aussi systématiquement les plus incompétents d’entre eux.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Meilleur jeu de stratégie sur micro

NOTE FINALE : 17/20 Le constat est sans appel : plus de 25 ans après sa sortie, la seule chose qui fasse de l'ombre à Sid Meier's Civilization et à l'ambition sans borne de son concept, ce sont les peaufinages apportés par ses différents héritiers jusqu'à aujourd'hui. Initiateur du 4X, savant mélange de stratégie et de gestion, le titre de MicroProse a excellemment vieilli en dépit d'une prise en main un peu délicate et fait partie de ces titres auxquels on peut se surprendre à jouer pendant des heures encore aujourd'hui – ce qui n'est pas un mince exploit. Profitant d'un système de jeu indémodable malgré une réalisation sans panache et une V.F. qui est une insulte à la langue de Rabelais, Civilization est indéniablement un titre majeur qui demeure une référence absolue – même si les néophytes préfèreront sans doute débuter directement par l'excellent deuxième épisode ou par des itérations encore plus tardives. CE QUI A MAL VIEILLI : – Le système de combat qui tient plus du quitte ou double que de la stratégie – Une microgestion qui peut s'avérer assez fastidieuse lorsque votre empire commence à s'étendre – Une diplomatie encore assez primitive – La concurrence des autres épisodes de la saga venus corriger patiemment la plupart de ces erreurs et enrichir le concept avec des ajouts comme la religion, la culture ou la gestion des frontières

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Civilization sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeur : MPS Labs
Éditeurs : MicroProse Software, Inc (version OCS/ECS) – Software Daemon (version AGA)
Date de sortie : Août 1992 (version OCS/ECS) – Juin 1993 (version AGA)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Versions testées : Version OCS/ECS testée sur Amiga 500, version AGA testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Version OCS/ECS :
Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo
Installation sur disque dur supportée

Version AGA :
Système : Amiga 1200 – OS : AmigaOS 3.0 – RAM : 2Mo
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu (version AGA) :

L’Amiga aura connu pas moins de trois versions de Sid Meier’s Civilization : une version OCS/ECS en 1992, une version optimisée pour le chipset graphique AGA l’année suivante, et même une version CD-ROM en 1997 (sur laquelle je ne suis hélas pas parvenu à mettre la main). Sans surprise, la version de 1992 est moins colorée que son équivalent en VGA sur PC (cela se sent particulièrement lors des écrans fixes comme les résultats de vos chercheurs), et tend à tourner de façon assez poussive sur un Amiga 500 – le jeu est clairement pensé pour être installé sur un disque dur, et on se doute que bénéficier d’un processeur plus puissant et d’un surplus de RAM comme sur Amiga 1200 fait énormément de bien à une expérience de jeu qui tend à tirer très lourdement sur le processeur. En AGA, fort logiquement, le jeu est identique à la version VGA (sauf le curseur, curieusement). Quant à l’aspect sonore, la puce Paula se débrouille bien, mais le résultat reste globalement inférieur à ce que permettent une Roland MT-32 ou la plupart des cartes General MIDI. Rien de franchement dramatique, on s’en doute – le jeu ne repose de toute façon pas exactement sur la qualité de ses quelques thèmes musicaux (qui se limitent, passé la création de la partie, aux hymnes des différentes nations).

Globalement, le résultat, parfaitement satisfaisant sur un Amiga 1200, souffre en revanche sur une configuration inférieure, tant du côté de la réalisation que de celui du confort de jeu. Sur un Amiga 500 « de base » (avec une extension de mémoire tout de même, le jeu ne fonctionnant pas sans elle), il faut vraiment être patient pour supporter les temps de réflexions de l’I.A. et la valse des disquettes. Mais dans des conditions décentes (c’est à dire a minima avec un disque dur), les choses tendent à grandement s’améliorer. Gardez bien ces détails en tête au moment de vous lancer dans le jeu, en fonction de votre configuration.

NOTE FINALE : 16,5/20 (version OCS/ECS) – 17/20 (version AGA)

Plus que les quelques couleurs abandonnées par la version OCS du jeu, c’est principalement la puissance de votre processeur et la présence ou non d’un disque dur qui impactera la qualité de vos parties de Sid Meier’s Civilization sur Amiga. Sur une configuration optimale, le titre n’a strictement rien à envier à la version PC, mais sur un Amiga 500, les choses risquent d’être un peu moins emballantes.

Version PC-98

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Japan K. K.
Date de sortie : 25 septembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe de l’engouement certain qu’il aura provoqué à sa sortie, Sid Meier’s Civilization aura également eu le privilège d’être commercialisé au Japon – avec la branche japonaise de MicroProse à la distribution, laquelle aura commercialisé une vingtaine de titres au total entre 1989 et 1995.

Sans surprise, le contenu du jeu n’offre que très peu de différences avec celui de la version MS-DOS – tout juste remarquera-t-on qu’il est désormais impossible de choisir le style architectural de son palais, qui est désormais imposé en fonction de la civilisation incarnée, mais cela reste tout-à-fait anecdotique. Ce qui l’est un peu moins, c’est le fait que le programme soit désormais en haute résolution, en 640×400. Bon, ça ne fait toujours pas du jeu un premier prix de beauté, mais en ce qui concerne la lisibilité, c’est inattaquable. Comme souvent, le véritable problème de cette version pour le joueur lambda résidera dans le fait qu’elle soit exclusivement disponible en japonais – ce qui ne sera pas très pénalisant dans le cœur de l’action pour les habitués, mais le deviendra au moment de choisir le prochain bâtiment à construire ou la prochaine recherche scientifique. Bref, une version qu’on réservera surtout au curieux – ou aux joueurs capables de lire le japonais.

NOTE FINALE : 17/20

Quitte à débarquer sur PC-98, Sid Meier’s Civilization aura choisi de le faire en haute résolution, en 640×400. Une curiosité qui rend la réalisation plus lisible, mais pas franchement plus marquante, et le fait que le programme soit intégralement en japonais risque de représenter une barrière de taille pour la grande majorité des joueurs occidentaux. Quoi qu’il en soit, le jeu en lui-même est naturellement toujours aussi bon.

Version Atari ST

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Ltd.
Date de sortie : Mai 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1Mo
Écran couleur requis
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1993, l’Atari ST n’était pas (officiellement) mort, mais il n’était pas non plus dans une forme olympique. A l’ère du CD-ROM, du VGA et de la course aux mégahertz, on pouvait même être surpris de voir Microprose s’embarrasser à porter Civilization sur la machine d’Atari. Mais après tout, le titre de Sid Meier n’était pas exactement un monstre technique, non ?

Autant dire que la première chose qui frappe, en lançant le jeu sur Atari ST, ce sont les graphismes. N’y allons pas par quatre chemins : c’est moche. Certes, la version Amiga 500 montrait déjà de nombreuses limitations dans le même domaine, mais le nombre de couleurs a encore été divisé par deux pour arriver à seize, et ça se sent immédiatement. Paradoxalement, la carte du monde est plutôt moins triste et plus colorée que la version Amiga 500, mais il faut également admettre que certains terrains ressemblent tellement à une atroce bouillie de pixels qu’on serait bien en peine de dire ce qu’ils sont censés représenter. Les routes sont dorénavant de simples traits noirs, et certains écrans fixes ont purement et simplement disparu. Si vous venez de poser les yeux sur les versions en 256 couleurs, le choc visuel risque d’être rude, mais l’honnêteté m’oblige à avouer qu’on s’y habitue relativement vite, et que le jeu n’en souffre pas tant que ça.

Musicalement, là encore, les dégâts sont sensibles. Les deux thèmes qui accompagnaient le titre et le lancement d’une nouvelle carte ont été remplacés, pourquoi pas – les hymnes de chaque nation sont bien évidemment toujours là. Comme trop souvent, la qualité audio de la machine n’est pas franchement mise à contribution – quand on pense à ce qu’un titre comme Epic pouvait nous envoyer dans les oreilles… – et fait à peine mieux que le haut-parleur interne du PC. En revanche, les temps de chargement sont bien meilleurs que sur Amiga 500. Le jeu a donc le mérite d’être très jouable, à bonne vitesse, ce qui est exactement ce qu’on lui demande.

NOTE FINALE : 16/20

D’accord, Civilization version ST souffre de graphismes aux ras des pâquerettes – mais pour sa défense, le hardware de la machine d’Atari commençait réellement à arriver en bout de course en 1993. On appréciera que le jeu tourne bien, reste lisible, et soit toujours aussi agréable à jouer mais il faudra composer avec une réalisation assez spartiate.

Version Macintosh

Développeur : MicroProse Chapel Hill
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Mars 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – OS : System 6.0.7 – RAM : 4Mo

Le Macintosh ayant fini par s’inviter au rang des ordinateurs commercialement viables au début des années 90, de nombreux titres auront commencé à y être portés. Pour Civilization, il aura fallu attendre 1993, et le portage aura directement été assuré pour l’occasion par une équipe de MicroProse. Commençons par les bonnes surprises : il est désormais possible de créer sa civilisation (ce qui se borne à choisir son nom, mais on appréciera quand même), le jeu est désormais totalement intégré à l’interface de MacOS, avec des infobulles partout, et surtout il est affiché en 640×480, avec un résultat plus convaincant que sur PC-98 (sauf pour les écrans fixes, généralement restés en basse résolution avec un filtre dégueulasse). Détail qui tue : la police utilisée pendant les dialogues s’adapte à votre interlocuteur. Pour le reste, l’écran-titre est ici si vite expédié que vous remarquerez que je ne vous en propose pas la vidéo, et comme d’habitude si la résolution de votre bureau est supérieure à celle du jeu, celui-ci s’affichera dans une fenêtre plutôt qu’en plein-écran. Dans l’ensemble, une version solide et très accessible, donc.

NOTE FINALE : 17,5/20

Intelligemment intégré dans l’affichage de MacOS, et en haute résolution, Civilization sur Macintosh y gagne en confort et en ergonomie. La réalisation graphique et sonore a beau être toujours aussi datée, le plaisir de jeu, lui, est toujours là, et c’est bien l’essentiel.

Version PC (Windows 3.1)

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Décembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 SX – OS : Windows 3.1 – RAM : 4Mo
Modes graphiques supportés : SVGA, VGA

Quitte à développer un portage pour Macintosh, MicroProse se sera probablement avisé que le PC disposait lui aussi d’une interface graphique qui gagnait en popularité depuis sa version 3.0 : Windows. Décision fut donc prise d’en profiter pour ressortir une nouvelle version du jeu proposant… eh bien exactement la même chose que la version Macintosh, pour être honnête, les forces comme les (rares) faiblesses. On se retrouve donc une nouvelle fois avec le jeu affiché dans la résolution du bureau de Windows (sauf pour les écrans fixes, automatiquement fenêtrés en 507×314), avec les petites fioritures déjà mentionnées (la possibilité de créer votre propre nation, au hasard), et l’écran-titre à nouveau réduit à l’essentiel. La bonne nouvelle, c’est que ça marche toujours aussi bien, et que quitte à découvrir le jeu aujourd’hui, c’est au moins aussi confortable à faire dans cette version (Windows 3.1 a en plus l’avantage d’être assez simple à installer et à faire fonctionner sous DOSBox).

NOTE FINALE : 17,5/20

Clone assumé de la version parue sur Mac OS, Civilization pour Windows 3.1 apporte les mêmes options de confort, ainsi qu’une résolution plus adaptée à l’interface graphique de Microsoft. Quitte à découvrir une version un peu plus lisible et un peu plus ergonomique, ne vous privez pas.

Version Super Nintendo

Développeur : Asmic Software Inc.
Éditeur : KOEI Corporation
Date de sortie : 7 octobre 1994 (Japon) – Octobre 1995 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Manette, souris
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 12Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Ce n’est pas nécessairement un fait très connu, mais Civilization premier du nom aura également connu une adaptation sur console – en l’occurrence, sur la 16 bits de Nintendo, et aucune autre. Le relatif anonymat dans lequel cette version est parue vient sans doute de l’année de sa sortie, sur une console en fin de vie.

Comment s’en sort ce portage, alors ? Niveau contenu, tout a l’air d’être à sa place, de l’introduction à la modélisation de la planète, en passant par les quatorze civilisations et les cinq niveaux de difficulté. On assiste même à une petite scénarisation très japonaise, avec une déesse qui vous apparait en début de partie pour vous décrire les pouvoirs qu’elle vous laisse avant de vous laisser vous débrouiller (la générosité divine ayant apparemment ses limites). Graphiquement, le jeu est assez agréable, peut-être pas aussi fin que sur PC mais vous n’aurez aucun problème pour différencier les types de terrain. On pourra en revanche regretter que l’écran de jeu voit un bon quart de sa surface bouffé par des frises dont la seule fonction est purement décorative, parce qu’on aurait sans doute largement profité du gain de surface de jeu offert par le plein-écran. On notera également que le jeu profite dorénavant d’un thème musical en fond sonore en toute circonstance, sympathique quoique rapidement répétitif ce qui n’est pas une bonne chose pour un jeu sur lequel on est appelé à passer des heures.

Côté interface, on pouvait craindre le pire de l’absence de clavier, mais ce portage parvient à faire tenir toute l’interface sur trois boutons de la manette sans rien sacrifier au passage. Presser le bouton A avec le curseur sur une unité ou une ville vous permettra de faire apparaître la liste des actions possibles ; sur un espace vide, vous pourrez accéder à un menu plus général vous autorisant à régler vos impôts, à voir la carte du monde ou à sauvegarder (une seule partie à la fois, malheureusement, mais on remerciera le jeu de se passer d’un indigeste système de mot de passe). Le bouton B fera apparaitre un menu didactique avec les ressources dispensées par chaque type de terrain selon le gouvernement en place, et le bouton Y vous permettra de déplacer une unité sans avoir à sélectionner l’option « Move » dans le menu du bouton A. Les informations qui auraient pu prendre de la place à l’écran (date, argent, répartition des impôts) ne sont affichées que sur l’écran de fin du tour.

Ce serait donc aussi simple ? Eh bien, oui, c’est plus fastidieux que de pouvoir tout faire à la souris et au clavier – même si la souris de la Super Nintendo est gérée, pour l’occasion – mais force est de reconnaître que le tout a été bien pensé. L’écran de ville, par exemple, a désormais été divisé en plusieurs menus afin de vous concentrer sur l’aspect que vous cherchez à modifier. Bien sûr, sachant que le moindre déplacement vous demandera au minimum deux pressions de bouton, l’interface tend à s’alourdir en milieu de partie – n’espérez pas jouer aussi vite que sur les versions sur ordinateurs. Mais on aurait également bien du mal à imaginer une solution plus efficace pour porter un jeu aussi complexe que Civilization sur une manette à six boutons.

NOTE FINALE : 16/20

Très bonne surprise que ce portage fait avec sérieux : naturellement, la maniabilité est un peu plus lourde que sur ordinateur, mais une fois le pli pris le joueur reprend très vite ses marques. On pourra simplement regretter que le jeu ait choisi de sacrifier son aspect didactique en supprimant tous les textes de descriptions des différentes recherches.

Ultima I

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titre original : Ultima (version originale de 1981)
Titres alternatifs : Ultima I : The First Age of Darkness (PC-88, PC-98), Ultimatum (titre de travail), Ultima I : The Original (Atari 8 bits)
Testé sur : Apple IICommodore 64PC (DOS)PC-88PC-98MSXFM TownsAtari 8 bits
Versions non testées : Apple IIgs, Sharp X1
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (7, 8, 10)
Présent au sein des compilations :

  • Lord British Starter Kit (1981 – Apple II)
  • Ultima Trilogy : I ♦ II ♦ III (1989 – Apple II, Commodore 64, FM Towns, Mac OS X, PC (DOS), Windows)
  • Ultima I-VI Series (1992 – PC (DOS))
  • Ultima Collection (1997 – PC (DOS))
  • Ultima Complete (2002 – Windows)

En vente sur : Gog.com (Mac OS X, Windows)

La saga Ultima (Jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

–PRÉCISION IMPORTANTE–

En temps normal, la première version testée pour chacun des jeux présentés sur Retroarchives.fr est sa version originale – celle publiée sur la machine sur laquelle le jeu a été programmé – avant de tester les autres versions dans leur ordre chronologique de parution. Dans le cas d’Ultima I, j’ai dû faire une entorse à cette règle. En effet, la première version du titre, alors simplement nommée Ultima sans numéro ni sous-titre et publiée en 1981 par California Pacific Computer, est aujourd’hui extrêmement difficile à trouver, sans même parler de la faire fonctionner. Elle souffrait qui plus est de nombreux bugs, et étant désormais pratiquement impossible à acquérir ailleurs que chez un antiquaire (même en émulation, où je ne serai parvenu à faire fonctionner une de ses très rares versions que bien des années après la rédaction de ce test – remerciements au passage au site The Digital Antiquarian d’avoir partagé une copie des disquettes originales), j’ai préféré m’intéresser à la version retravaillée publiée en 1986 – toujours sur Apple II, ainsi que sur tout un panel d’autres machines de l’époque – qui est, elle, toujours trouvable dans le commerce pour certaines de ses itérations (PC, notamment). La version Atari 800, une deuxième édition publiée par Sierra en 1983 (cette fois sous le titre Ultima I : The Original), sera donc exceptionnellement traitée comme une version secondaire – l’épisode « canonique » et encore commercialisé étant désormais celui publié par Origin Systems.

Version Apple II

Date de sortie : 1981 (première édition) – 1986 (remake)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette (1986) testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Édition de 1981 :
Système : Apple II – OS : Apple DOS 3.2 – RAM : 48ko
Mode graphique supporté : Haute résolution
Applesoft BASIC requis

Remake de 1986 :
Système : Apple II – OS : Aucun – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : Haute résolution

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il y a un peu plus de 35 ans, à une époque où la machine qui dominait le monde était déjà un produit Apple, le jeu vidéo était encore quelque chose de dramatiquement simple vous proposant le plus souvent de vous renvoyer une balle, de conduire une voiture ou de tirer sur des vaisseaux spatiaux, le tout avec des graphismes – et des sons, quand il y en avait – qui laissaient une très large place à l’imagination. Mais dès le milieu des années 70, quelques universitaires dopés aux jeux de rôles papiers et aux nuits à mener campagne autour d’une table avec toute une boîte de dés à beaucoup plus de six faces s’étaient déjà faits une réflexion : ces fastidieux lancers de dés pourraient facilement être simulés par une machine. Et qui sait, un ordinateur étant capable d’afficher du texte, on pourrait sans doute également lui demander de remplacer le maitre de jeu, et peut-être même y coder quelques symboles simples pour y dessiner des cartes…

Voici comment les premiers jeux de rôles informatiques ont vu le jour, et il n’aura pas fallu attendre longtemps – en l’occurrence, le tout début des années 80 – pour que deux grands succès introduisent deux sagas désormais légendaires qui ont mis en place les fondamentaux qui sont en grande partie encore utilisés aujourd’hui. Le premier s’intitulait Wizardry : Proving Grounds of the Mad Overlord et vous proposait un concept inusable : mener un groupe d’aventuriers au fin fond d’un donjon pour y vaincre un puissant ennemi.

Le deuxième, créée par un jeune étudiant du nom de Richard Garriott – mieux connu de nos jours sous son pseudonyme de « Lord British » – se nommait Ultima et proposait un concept plus ambitieux encore : un monde ouvert, avec des voyages à pied ou en véhicules, des donjons par dizaines, des quêtes à mener et même – tenez-vous bien – des combats spatiaux ! Comme vous l’aurez déjà deviné, c’est à ce deuxième titre que nous allons nous intéresser ici. Comme cela a été précisé, la version présentée sur cette page n’est pas l’originale – désormais à peu près introuvable – mais le remake publié en 1986 pour rebondir sur le succès du quatrième épisode, qui avait fini d’installer la saga au rang des séries majeures de l’histoire du jeu vidéo. En-dehors de corrections de bugs et d’un léger lifting graphique, cette version propose strictement le même contenu que la version parue en 1981, nous ne devrions donc pas être trop dépaysés au moment d’aborder le déroulement du jeu.

Comme tous les jeux de rôles de l’époque, Ultima vous propose d’abord de créer votre personnage selon une sélection de classes très basiques (guerrier, voleur, clerc, mage) et de races puisées dans les poncifs de l’Heroic Fantasy (humain, elfe, nain… et le « bobbit », dont le nom vous rappellera surement quelque chose). Ces choix auront un impact sur les caractéristiques de votre personnage (force, agilité, endurance, sagesse, intelligence), dans lesquelles vous pourrez attribuer un certain nombre de points après avoir choisi un nom à votre héros, puis vous pouvez partir à l’aventure.

Dans les faits, les classes n’ont aucune restriction de caractéristiques, et vous pourrez tout à fait, après avoir progressé dans le jeu, finir avec le score maximal à chacune d’entre elles quelle que soit votre classe de départ. Il en va de même avec l’équipement, et toutes les classes peuvent lancer des sorts – dont le nombre tient d’ailleurs sur les doigts de la main. Il n’y a pas de points de mana, ni de limites de sorts à lancer : vous pouvez très bien spammer les missiles magiques avec votre guerrier niveau 1 sans que cela ne pose problème à personne ; bref, comme vous le voyez, recommencer une partie en changeant de classe ne va pas franchement bouleverser votre expérience de jeu.

Dans le même ordre d’idées, les combats se déroulent de la manière la plus simple qui soit : vous vous placez à côté d’un monstre, vous pressez la touche d’attaque suivie d’une direction… et c’est tout. Que vous touchiez ou que vous ratiez, c’est ensuite le tour du monstre et ainsi de suite jusqu’à la mort d’un des deux protagonistes. Si vous êtes équipés d’une arme à distance comme un arc, une baguette magique ou un pistolet laser (!), vous n’êtes naturellement pas obligé d’être au contact du monstre. Lancer un sortilège se fait exactement de la même façon : on équipe un sort, on appuie sur la touche correspondante, puis sur une flèche pour donner une direction. Autant dire que les capacités tactiques sont assez réduites – mais souvenez-vous qu’on parle d’un programme de 1981. En l’état, vous vous en doutez, la richesse de l’expérience de jeu se situe ailleurs.

De fait, dès les premiers instants passés sur la carte du jeu, vous vous retrouverez en terrain connu, et pour cause : la représentation choisie correspond à celle qui fut ensuite utilisée dans tous les CRPGs japonais pendant les quinze années qui allaient suivre. Vous déplacez un personnage sur une carte en vue de dessus et composée de tuiles chargées de représenter le terrain sans avoir à le dessiner pixel par pixel (Ultima fut le tout premier jeu à penser à cette approche), et chaque fois que vous entrez dans une ville, un donjon ou un château, un changement d’échelle se produit et vous fait apparaître sur une autre carte.

Dans le cas des villes et châteaux, la taille de cette carte ne sera jamais supérieure à un écran : vous pourrez déplacer votre avatar, haut d’à peine quelques pixels, au sein des différents commerces de la ville, où il vous sera possible de chercher à voler la marchandise (conseil : ne vous ratez pas car les gardes, comme cela se confirmera tout au long de la série, sont très puissants). Vos interactions avec la populace seront d’ailleurs uniquement commerciales, car en-dehors des rois et des marchands, il n’est possible d’adresser la parole à personne (il est en revanche tout à fait possible de prendre une cuite à la taverne locale). Les rois, justement, vous proposeront deux types de services : augmenter vos points de vie en échange d’espèces sonnantes et trébuchantes, ou bien partir dans une quête précise (tuer un certain type de monstre ou atteindre un endroit précis) qui vous vaudra, en cas de succès, d’être récompensé en points de caractéristiques (en force, exclusivement, mais nous y reviendrons) ou bien en recevant une des gemmes qui vous seront indispensables pour finir le jeu. Vous réaliserez aussi bien vite que chaque château contient une princesse retenue prisonnière, et pour laquelle il vous appartiendra de trouver la façon de la libérer – plutôt vers la fin du jeu, de toute façon, puisque vous devrez encore vous frotter aux gardes pour se faire.

Dans le cas d’un donjon, en revanche, surprise : la vue passe à la première personne, et vous pourrez vous balader en case par case dans des couloirs en 3D fil-de-fer où vous pourrez cette fois admirer les ennemis de près – en graphismes vectoriels, eux aussi (si cela vous rappelle quelque chose, c’est normal : le moteur des donjons est directement repris d’Akalabeth, le précédent jeu de Richard Garriott). Tous les donjons comprennent dix niveaux, et la difficulté des ennemis rencontrés sera fonction de l’étage où vous vous trouvez. Évitez donc d’aller vous frotter aux monstres des profondeurs avec un personnage mal équipé, vous risqueriez de le payer d’une mort violente – qui vous vaudrait de reprendre le jeu dépouillé de votre équipement, de votre argent et de votre nourriture. Les donjons ne contiennent rien d’autre que des couloirs, des portes, des coffres (parfois piégés), des cercueils (qui contiennent des monstres en plus des trésors) et des monstres. Ceux-ci savent parfois se montrer originaux, comme ceux qui prennent l’apparence de coffres aux trésors, ou ceux qui se font passer pour… des murs. Ces derniers sont d’ailleurs particulièrement pénibles, puisqu’ils peuvent détruire votre armure – mais moins que ces cochonneries de Gremlins qui, eux, vous dérobent votre nourriture. Car oui, il faudra garder votre personnage constamment approvisionné : chaque déplacement coûte de la nourriture, et si vos réserves arrivent à zéro, c’est la mort. Très bonne idée, en revanche, à la sortie des donjons : le jeu vous attribue automatiquement un certain nombre de points de vie en fonction du nombre de monstres tués et de leur puissance. On peut donc ressortir d’un donjon en meilleure forme qu’on y est entré – et considérablement plus riche.

On gagnera également pas mal de points d’expérience, mais je vais casser tout de suite l’ambiance : les niveaux, dans le jeu, ne servent à rien. Ou disons, à presque rien : ils influeront sur le nombre de monstres rencontrés sur la carte du jeu, et sur la puissance des objets vendus par les magasins. Et sur rien d’autre. Oui, c’est passablement décevant, mais alors cela signifierait-il que les caractéristiques de notre personnage ne peuvent pas augmenter ? Au contraire, mais celles-ci progressent en fait d’une façon un peu spéciale : comme on l’a vu, les rois peuvent vous attribuer des points de force à la conclusion d’un certain type de quêtes. Et pour les autres caractéristiques ? Eh bien, les rois vous envoient également visiter des points spécifiques. Lorsque vous pénètrerez  dans ces lieux-dits, vous constaterez rapidement que chacun d’entre eux vous fait gagner des points dans une caractéristique donnée. Voilà le truc : rien ne vous empêche de retourner les visiter pour gagner davantage de points, la seule contrainte étant que vous ne pourrez pas visiter le même endroit deux fois de suite.

Rien ne vous interdit donc de faire des allez-et-retours pendant vingt minutes entre deux points jusqu’à avoir le score maximal dans les caractéristiques concernées. Et on touche là à l’une des grosses faiblesses du jeu : une fois compris le « truc », il est tout à fait possible de se faire un personnage « ultime » avec toutes les caractéristiques à fond en à peine une heure. Sachant que l’équipement ne coute pas très cher – surtout comparé à ce que vous allez dépenser en nourriture – quelques phases de farming dans les donjons devraient rapidement vous permettre d’accumuler assez d’or pour acheter des points de vie à ne plus savoir qu’en faire, et le jeu ne devrait plus représenter qu’une difficulté symbolique au bout de deux heures. À un détail près, cependant. Comme on l’a déjà vu, Ultima met à votre disposition un nombre impressionnant de véhicules – chevaux, charriots, aéroglisseurs (!), frégates… – qui vous seront rapidement nécessaires pour explorer de fond en comble les quatre continents du jeu ainsi que les dizaines de villes et de donjons. Sauf que viendra un moment où on vous proposera carrément d’investir dans une navette spatiale (!!!) pour aller poursuivre le combat dans l’espace.

Soyons clairs : ce passage, qui vous demandera d’abattre en vue subjective une vingtaine d’astronefs ressemblant plus qu’énormément à des chasseurs TIE (!!!!!) est, de très loin, le plus pénible du jeu. Les délais sont courts, la maniabilité est très limitée, et comme si cela n’était pas déjà assez stressant, vous verrez vos réserves de carburant dégringoler au fur et à mesure que le combat s’éternisera à force de vous voir rater vos tirs. C’est assez ironique si l’on pense que Richard Garriott sera le fondateur d’Origin Systems, qui publiera une décennie plus tard le célèbre Wing Commander, mais le fait est que le mélange des genres n’était pas franchement indispensable ici… Même si bien sûr, je parle là avec le recul d’un joueur de 2017.

Car en l’état, relisez un peu la liste de tout ce qu’il était possible de faire dans le jeu : voyager à pied, à cheval et en bateau (et en navette !) à travers quatre continents, visiter des dizaines de villes, écumer des dizaines de donjons, accomplir des quêtes pour les différents rois, affronter des chasseurs TIE dans l’espace ( !) et finalement remonter le temps ( !) pour affronter Mondain, le grand méchant du jeu, plus de mille ans dans le passé. Et tout ça dans un jeu programmé en BASIC et tenant sur une seule disquette 5 pouces ¼, en 1981 ! Le simple fait que l’on puisse, encore aujourd’hui, parcourir le jeu avec un certain plaisir est déjà la preuve de tout ce que ce premier Ultima avait à la fois de révolutionnaire et de visionnaire, puisqu’il a très largement contribué à façonner les bases de tous les jeux de rôles à l’avoir suivi pendant près de trente ans… ça force quand même un peu le respect, non ?

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 11,5/20

Qu’il est difficile de noter un jeu aussi légendaire que ce premier Ultima… Certes, le jeu, programmé en BASIC sur Apple II à une époque où la grande majorité des joueurs actuels n’étaient même pas encore nés (et, dans certains cas, même pas leurs parents !) a fatalement pris un coup de vieux, que ce soit dans sa réalisation ou dans sa conception. Et pourtant, tellement de fondations indispensables sont déjà là ! Quoi qu’il en soit, ce jeu a bouleversé à jamais l’histoire du jeu de rôle informatique – les créateurs de sagas aussi célèbres que Dragon Quest ou Final Fantasy ont reconnu s’en être largement inspiré, et de fait, c’est également ce qui rend Ultima I encore jouable de nos jours : en tant que source d’une grande partie de ce que nous avons connu en termes de RPGs, il a quelque chose en lui qui nous est immédiatement familier – même aujourd’hui, plus de 36 ans après.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Mieux vaut avoir la carte de référence du jeu sous la main, car l’interface vous fera utiliser pratiquement toutes les touches du clavier
– Même pour un nostalgique, les capacités graphiques extrêmement limitées de l’Apple II piquent un peu les yeux – d’ailleurs, n’espérez pas de musique non plus
– Franchement, la séquence de bataille spatiale a dû faire rêver pas mal de joueurs à l’époque, mais aujourd’hui on s’en passerait très volontiers
– Un jeu de rôle où l’expérience ne sert à rien ?
– Finalement, le jeu est très court

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima I sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Avril 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En termes de contenu, la version C64 est très exactement équivalente à son homologue sur Apple II. Il faudra donc plutôt chercher les différences du côté de la réalisation. Côté sonore, c’est le calme plat, puisque le jeu n’a toujours pas de musique et qu’il faudra se contenter de quelques rares bruitages lors des déplacements et des combats. Côté graphique, en revanche, le jeu profite du hardware de meilleur qualité pour proposer une image plus nette et plus colorée – c’est particulièrement visible en ville. Pour le reste, tout le test de la version Apple II s’applique également à celle-ci.

NOTE FINALE : 12/20

Un demi-point bonus pour récompenser une version techniquement légèrement supérieure à l’originale (ou plutôt à son remake), mais parfaitement fidèle en terme de jeu et d’interface.

Version PC (DOS)

Développeur : John Fachini
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Octobre 1987
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Carte son supportée : Aucune (haut-parleur interne)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Seule version 16 bits d’Ultima I développée par Origin, la version PC, qui reprend une partie des tuiles dessinées pour Ultima IV, s’impose d’emblée comme la plus belle – et cela se voit dès l’écran-titre. Les graphismes sont bien plus colorés, et le PC dispose d’une résolution supérieure à celle des machines 8 bits, bref, c’est bien plus agréable. Côté son, en revanche, toujours rien à se mettre sous la dent en-dehors des quelques bruitages crachés par le haut-parleur interne, et côté interface, le jeu ne tient toujours aucun compte de la présence d’une souris. Cela n’empêcherait pas la version PC de s’imposer comme la meilleure si elle ne souffrait pas de bugs qu’on ne trouve pas dans les autres versions – et jamais corrigés, hélas. Par exemple, le jeu ne tient aucun compte de votre valeur d’armure lorsque vous êtes dans un donjon – ce qui complique drastiquement les choses, surtout que c’est l’endroit où vous en aurez le plus besoin. Bref, une version qu’on sent vendue trop vite, ce qui est quand même dommage si l’on considère que six ans la séparent de l’originale.

NOTE FINALE : 12/20

Techniquement la version la plus aboutie à sa sortie, la version PC est hélas pénalisée par des bugs qui la rendent bien plus difficile – pour de mauvaises raisons – que les version 8 bits.

Version PC-88
Ultima I : The First Age of Darkness

Développeurs : Super Station Inc. – Desktop Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : Décembre 1988 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″ (x4)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe de son incontestable influence sur la scène du jeu de rôle japonais, la saga Ultima aura fatalement terminé sur les ordinateurs nippons les plus en vogue de la période, à savoir les machines de NEC, Sharp et Fujitsu. Parmi la première fournée, le PC-88 sera venu rappeler que les ordinateurs japonais était globalement des machines techniquement très supérieures à leurs homologues occidentaux, comme le prouve ici une réalisation qui n’a plus grand chose à voir avec les versions testées plus haut.

Graphiquement tout d’abord, la résolution est plus haute, c’est beaucoup plus coloré, et ce sentiment tenace que le noir restait – et de très loin – la couleur la plus présente à l’écran appartient désormais au passé. Ce n’est peut-être pas encore du Caravage, mais les extérieurs sont déjà nettement moins abstraits. La lisibilité est également bien meilleure sur les écrans de ville, et les monstres en vectoriels sont désormais remplacés par des sprites en bonne et due forme dans les donjons – les murs demeurant, pour leur part, en mode fil-de-fer. Tant qu’à faire, on gagne également des thèmes musicaux qui n’ont pas grand chose à voir avec les mélodies canoniques de la saga, mais qui correspondent globalement bien à l’ambiance. Bref, l’enrobage est indéniablement meilleur. Il faudra malheureusement composer avec deux défauts : le premier, mineur, étant que l’interface n’a pas bougé d’un iota et qu’elle ne tire toujours aucun parti de la souris, ce qui est un peu dommage. Le deuxième, plus pénalisant, est que le titre n’est bien évidemment disponible qu’en japonais, eu égard à son marché cible, ce qui risque de lui aliéner l’écrasante majorité des joueurs. Une version qui demeure néanmoins clairement dans le haut du panier, mais on lui préfèrera celle sur FM Towns.

NOTE FINALE : 12/20

Premier servi au rang des ordinateurs japonais, le PC-88 délivre une version d’Ultima I qui fait indéniablement partie des plus plaisantes en termes de réalisation, mais qui sera hélas réservée aux joueurs à l’aise avec la langue nippone.

Version PC-98
Ultima I : The First Age of Darkness

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 Décembre 1988 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À peu près au même moment que la version PC-88, Ultima I voyait également le jour sur le successeur de la machine de NEC, à savoir le PC-98. Inutile ici de s’attarder en long en large et en travers sur une version identique à 95% à celle que l’on vient d’aborder, mais on peut néanmoins choisir de s’attarder sur la seule différence notable, à savoir la résolution.

Les graphismes sont ici plus fins que jamais, et le gain qualitatif est particulièrement évident comparé à la version PC-88 (on sent bien que ce sont les graphismes de la version PC-98 qui auront servi de base pour la version PC-88 et non l’inverse). Le reste profitant des mêmes améliorations que sur PC-88 – thèmes musicaux, monstres présentés sous forme de sprites dans les donjons – on tiendrait presque ici la version « ultime » du jeu si elle n’était pas, une nouvelle fois, disponible uniquement en japonais – et surtout si la version FM Towns n’était pas venue offrir la même chose en mieux et en anglais. Une curiosité très sympathique pour les joueurs ayant la chance de parler japonais, néanmoins.

NOTE FINALE : 12/20

Sorte de version de référence d’Ultima I jusqu’à la parution d’Ultima Trilogy sur FM Towns, cette itération PC-98 est à n’en pas douter une des plus plaisantes sur le plan de la réalisation – le contenu, lui, n’ayant pas bougé d’un micron depuis la version Apple II. Dommage qu’elle se réserve une nouvelle fois aux joueurs parlant japonais.

Version MSX
Ultima I : The First Age of Darkness

Développeurs : Super Station Inc. – Desktop Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Débarquée un an après les premières versions publiées au Japon, l’itération MSX d’Ultima I est largement basée sur le portage réalisé pour le PC-88 (et pas sur celui du PC-98, sensiblement supérieur sur le plan de la réalisation). le contenu n’a bien évidemment pas bougé, et la réalisation à peine.

Le jeu s’affiche dans une résolution toujours aussi étrange, mais le gain en couleurs reste appréciable. On constatera que les donjons, une nouvelle fois, sont présentés en 3D vectorielle avec des sprites en guise de monstres, et qu’on peut profiter d’un thème musical pour nous accompagner durant l’aventure. Tout cela est bienvenu, même s’il faudra bien évidemment composer avec un jeu presque intégralement en japonais. Autant dire que l’existence de la version FM Towns – jouable en anglais, elle – prive de fait celle-ci d’une grande partie de son intérêt. À réserver aux curieux.

NOTE FINALE : 12/20

Ultima I sur MSX accomplit l’essentiel, avec un contenu préservé, une jouabilité identique et une réalisation plutôt supérieure à ce qu’on avait pu voir sur les systèmes occidentaux. Malheureusement, le fait qu’elle n’existe qu’en japonais la réservera à un public de niche – autant lui privilégier directement l’itération FM Towns.

Version FM Towns
Ultima Trilogy : I · II · III

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Octobre 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1990, les utilisateurs de FM Towns auront pu découvrir toute la trilogie originale d’Ultima en une seule fois, les trois premiers épisodes n’y ayant jamais été vendus indépendamment comme cela avait été le cas un peu plus tôt pour les autres ordinateurs japonais. L’occasion de profiter des capacités de la machine pour offrir une version sensiblement dépoussiérée sur le plan technique, comme vous pourrez le constater sur l’introduction ci-dessus ainsi que sur les captures d’écran : musique CD, graphismes en haute résolution, on sent tout de suite comme un bond technologique !

La bonne nouvelle, c’est que bien que l’introduction soit en japonais, le jeu, lui, est resté en anglais, et demeure donc parfaitement jouable pour un simple anglophone. La jouabilité n’a d’ailleurs pas changé, en dépit de la reconnaissance de la souris, même s’il y a désormais beaucoup plus d’informations à l’écran, la fenêtre de jeu reprenant l’interface « canonique » ayant été employée du troisième au sixième épisode. On remarquera d’ailleurs que les villes ne sont plus proposées sur un seul écran, mais qu’on peut dorénavant les visiter avec la même vue que le reste du monde. Mine de rien, cette petite refonte technique (très largement empruntée à la version PC-98 pour ce qui est des graphismes) fait un bien fou à un titre qui accusait bien son âge sur le plan visuel et sonore, et rend l’exploration de Sosaria sensiblement plus agréable, en particulier dans les donjons où les murs dessinés et les adversaires désormais clairement représentés sous forme de sprites ont bien plus de personnalité que les couloirs vectoriels directement repris d’Akalabeth ! Seul regret, la présence d’une barre rouge dont la seule fonction semble être de prendre de la place à l’écran, ainsi que d’une barre de titre, soit autant d’espace qui aurait pu être attribué à la fenêtre de jeu. Autant dire que si vous avez un FM Towns à portée de main, il serait dommage de vous priver de cette excellente version.

NOTE FINALE : 12,5/20

Le contenu n’a peut-être pas changé d’un pouce, mais il faut reconnaître que cet Ultima I façon FM Towns bénéficie d’une réalisation technique et de quelques adaptations d’interface qui en font à coup sûr une des versions les plus agréables à parcourir aujourd’hui. Sachant qu’elle est également jouable en anglais, ne faites surtout pas l’impasse dessus si vous avez l’occasion de vous y essayer.

QUELQUES DÉTAILS SUR LA VERSION ORIGINALE

N’ayant pas pu me frotter moi-même à la version Apple II de 1981, elle ne sera pas testée ici. Cependant, j’ai décidé de partager avec vous les quelques informations que j’ai pu trouver sur elle, et qui sont majoritairement issues de la page Ultima Codex – d’où sont également tirés les images de cette version – et que je vous invite à consulter au passage si vous voulez en savoir plus sur la saga – à condition de savoir lire l’anglais. La réalisation graphique de la version de 1981 était encore plus sommaire que celle de 1986 – on comprendra facilement que le remake se soit efforcé d’améliorer les choses dans ce domaine. Le plus frappant étant que strictement rien dans le jeu n’était animé : il faudrait attendre Ultima II pour voir bouger la mer, et Ultima III pour voir bouger les personnages. Le jeu souffre également de quantités de bugs absents du remake de 1986, le plus original étant celui qui modifie la disposition des donjons à chaque fois que vous entrez à l’intérieur. Non, ce n’était pas de la génération procédurale, juste une erreur de code… Notons également que la programmation en BASIC Applesoft du jeu a considérablement compliqué sa conversion vers d’autres systèmes : la version originale n’est compatible ni avec l’Apple IIe, ni avec l’Apple IIc, pas davantage qu’avec l’Apple IIc+ ou avec l’Apple IIgs – des problèmes de code rendent la partie spatiale impossible à gagner.

Version Atari 8 bits
Ultima

Développeur : Sigma Micro Systems
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : Novembre 1983
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 48ko

Pour les joueurs qui aimeraient s’approcher au maximum de l’expérience originale sans avoir à dénicher la très rare version Apple II d’Ultima, ce portage sur Atari 8 bits édité par Sierra On-Line en 1983 représente une alternative pertinente. Si le contenu est virtuellement identique à celui du remake de 1986 (à quelques détails près dont le plus marquant est l’absence de monstres errants : l’expérience ne peut passer ici que par la visite des donjons), on pourra ici apprécier une esthétique pour le moins minimaliste : comme on l’a vu, il n’y a ici plus trace de la moindre animation, et on ne peut pas dire qu’on ait l’occasion d’être ébloui par une symphonie de couleurs : si c’est déjà plutôt maussade sur la carte du monde, les donjons et les villes, eux, sont carrément en noir et blanc. La jouabilité, pour sa part, permet de se déplacer avec le joystick en attaquant avec le bouton, tandis que toutes les autres fonctions demeurent sur le clavier. Tout est toujours à sa place, et cette version demeure de toute façon l’unique façon d’expérimenter le jeu sur un Atari 400 ou 800, mais on comprendra aisément qu’elle se réserve aujourd’hui à des nostalgiques ou à des amateurs de pièces de musée.

NOTE FINALE : 11/20

Quitte à aimer le rétro, les vrais amateurs d’antiquités seront heureux de découvrir avec cette version Atari 8 bits d’Ultima une version très proche de l’originale de 1981 sur Apple – jusque dans le choix des (rares) couleurs à l’écran. Ce n’est pas très beau, ça ne bouge pour ainsi dire pas, mais on sent presque la poussière sur la boîte en carton et la texture de la carte en tissu en le lançant. Le pied.

Dragon Lore : La légende commence

Développeur : Cryo Interactive Entertainment
Éditeur : Mindscape, Inc.
Titres alternatifs : Dragon Lore : The Legend Begins (États-Unis, Royaume-Uni), Dragon Lore : Se inicia la Leyenda (Espagne), Dragon Lore : Die Legende beginnt (Allemagne), Dragon Lore : A Lenda se inicia (Brésil), Dragon Lore (3DO)
Testé sur : PC (DOS)3DO
Disponible sur : Macintosh, Windows (7, 8, 10)
Version non testée : PC-98
En vente sur : GOG.com

La saga Dragon Lore (jusqu’à 2000) :

  1. Dragon Lore : La Légende Commence (1994)
  2. Dragon Lore II : Le Coeur de l’Homme-Dragon (1996)

Version PC (DOS)

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au début des années 90, Cryo Interactive a commencé à capitaliser sur le succès, tant critique que commercial, de son excellente adaptation de Dune pour se forger une réputation de studio à la patte inimitable, que ce soit graphiquement ou musicalement.

La « French Touch » semblait alors avoir le vent en poupe, tandis qu’Eric Chahi provoquait un tremblement de terre à sa façon avec Another World, ou que des titres tels que Captain Blood, sorti quelques années plus tôt, avaient durablement marqués les esprits à l’échelle internationale. Les années passant, cependant, jusqu’au début des années 2000, une autre réputation – un peu moins flatteuse – commença à coller à la peau des productions françaises : celle de programmer des jeux magnifiques, à la réalisation de haute volée… mais avec un intérêt ludique flirtant dangereusement avec le néant. Or, nous voici justement en 1994, année de la sortie de Dragon Lore : La légende commence, et une question pourrait rapidement se dessiner : cette réputation était-elle déjà justifiée ?

Commençons déjà par placer le cadre : Dragon Lore est un jeu d’aventure – la plus grande partie du temps à la première personne – vous mettant aux commandes de Werner, jeune fermier qui se découvrira (au terme de dix minutes de jeu impliquant des activités aussi trépidantes que de faire regagner son pâturage à une vache) l’héritier des von Wallenrod, famille appartenant au clan des Chevaliers Dragons. Après quoi, votre rôle sera de l’aider à réclamer sa place légitime, sachant que votre approche des énigmes – et particulièrement de votre goût ou non pour la violence – influencera le dénouement du jeu.

Violence ? Oui, Dragon Lore propose un système de combat, et même toute une variété d’armes dont vous pourrez équiper votre personnage. Ces combats se dérouleront de la façon la plus limitée imaginable : en cliquant sur l’adversaire, et en répétant l’opération jusqu’à ce que lui ou Werner ait trouvé la mort.

Sachant que le jeu n’affiche strictement aucune forme d’information, ni impacts à l’écran, ni gémissement, ni absolument rien qui vous permette de connaître votre état de santé ou celui de votre opposant – et que les barres vitales sont cachées au fin fond de votre inventaire, à un endroit où je vous mets au défi de les trouver si vous n’avez pas lu le manuel – autant dire que l’implication du joueur se limite à prier pour la divinité de son choix en espérant que les choses se passent pour le mieux – ce qui est généralement le cas, du moins au début du jeu. Mieux vaut prendre l’habitude de sauvegarder souvent, ceci dit : sachant que chercher à adresser la parole à quelqu’un en tenant une arme revient à lui cogner dessus, autant dire qu’un accident est vite arrivé, et qu’on peut vite se retrouver à se battre contre notre pauvre vieux père adoptif au bout de vingt secondes de jeu faute d’avoir saisi les subtilités de l’interface.

L’interface, d’ailleurs, parlons-en : elle constituera, à bien des niveaux, le premier des multiples griefs que l’on pourra nourrir à l’encontre du jeu. Tout d’abord, Dragon Lore permet de voyager, un peu à l’instar de Myst, en déplaçant un curseur dans des environnements fixe en 3D pré-calculée. Parfois, lors d’un changement de « zone », le programme affichera une petite animation qui sera l’occasion de vous en mettre plein les yeux en vous montrant votre personnage en situation. C’est l’occasion de faire deux remarques :

  1. Si la 3D du jeu représentait, à l’époque, la crème de la crème de ce que pouvait proposer un programme pour nous décrocher la mâchoire, il est particulièrement cruel de constater à quel point celle-ci a infiniment plus mal vieilli, vingt ans après sa réalisation, que ce que pouvaient proposer les illustrations en pixel art à la même période. Plus que la modélisation des personnages et des décors, ce sont surtout les animations qui prêtent désormais à sourire tant la moindre action mise en scène par le jeu laisse transpirer par tous les pores une raideur anti-naturelle sur laquelle il est très difficile de fermer les yeux en tant que joueur du XXIe siècle.
  2. Le curseur utilisé pour les actions, en forme de dragon, est infiniment moins lisible qu’une simple flèche – un reproche que l’on risque de reformuler souvent en parlant de l’interface. De fait, il est extrêmement fréquent de rater une possibilité d’action ou une direction qui s’offrait à nous simplement pour avoir échoué à décrypter ce qu’était censé nous montrer ce maudit curseur.

Dans le même ordre d’idées, le jeu entreprend souvent de vous faire faire le tour de volumes assez basiques situés au milieu de votre route, et il est impressionnant de constater à quel point le simple fait de vouloir aller en ligne droite vers un point situé immédiatement en face de vous puisse parfois représenter une lutte de plusieurs dizaines de seconde entre l’homme et la machine. J’hésite d’ailleurs à parler de l’inventaire, et surtout du fait que les attributions des clics gauche et droit de la souris parviennent à être suffisamment obtuses et bordéliques pour qu’il arrive encore fréquemment, même après plusieurs heures de jeu, qu’on lâche un objet en cherchant à l’utiliser, ou que l’on s’arrache les cheveux pour réaliser une action a priori très simple.

Imaginons par exemple que vous vouliez jeter un sort, grâce au livre de magie dissimulé dans un endroit hautement improbable et que vous pourrez espérer trouver au terme d’une dizaine de minutes de jeu. Il vous faudra déjà un sortilège, ce qui peut paraître logique, mais il vous faudra également commencer par aller dans l’inventaire pour l’associer avec votre livre de sorts. Bon, mais ce sortilège, vous ne savez toujours pas à quoi il correspond, ni comment le lancer : il faut donc prendre le livre de sorts et cliquer avec sur les yeux de votre personnage, afin de voir son contenu et de mémoriser les trois runes qui vous permettront de lancer le sortilège. Notez-les bien, car à présent, il va être temps de le lancer, ce sort : il faudra donc retirer tout ce que vous aviez dans les mains pour y placer le livre, et ensuite quitter l’inventaire pour être enfin autorisé à faire un clic droit pour sélectionner vos runes – et finalement jeter le sortilège. Imaginez-vous en train de refaire le même cirque à chaque fois que vous voudrez essayer d’utiliser la magie sur quelque chose, et vous devinerez aisément la lourdeur du système.

Mais bon, des lourdeurs, il y en avait dans tous les jeux des années 90, pas vrai ? Les premiers Alone in the Dark n’étaient pas très jouables, par exemple. L’important, dans un jeu d’aventure comme celui-là, c’est le scénario, les dialogues, l’atmosphère ; en un mot : l’univers. Vu le travail superbe qui avait été effectué sur Dune, on devrait s’attendre au meilleur, pas vrai ?

Pas vrai ?

Nous en arrivons au stade où je vais réellement me montrer sévère avec Dragon Lore. L’écriture du jeu est mauvaise, c’est un fait. Mauvaise dans sa structure, tout d’abord : le jeu vous promène, de manière finalement extrêmement linéaire, dans des environnements incohérents alignés totalement sans queue ni tête, avec l’espoir que la magie va opérer. On est donc censé ne pas se poser de question en trouvant une structure ancienne composée de crânes géants, avec des squelettes qui se baladent et un petit dragon qui vous parle avec un cheveu sur la langue (un dégât imputable à la VF, mais j’y reviendrai) à à peine cent mètres de la ferme familiale où nous avons apparemment passé les dix-huit premières années de notre vie. On peut d’ailleurs passer, en deux clics, d’une grotte à une auberge dirigée par un lutin juché sur les épaules d’un troll, ou bien à un marécage de champignons géants – ne cherchez pas une logique, il n’y en a pas.

Dans le même ordre d’idées, après nous avoir demandé d’aller lui chercher un bol et de ramener la vache dans son pré, voilà que notre père adoptif nous sort tout à coup en deux phrases que nous ne sommes pas son fils et que nous ferions mieux de partir parce que nous sommes un Chevalier Dragon. C’est pour le moins… succinct, totalement anti-dramatique, et ça aurait peut-être mérité un petit effort de mise en scène, non ? D’ailleurs, en règle générale, on peine énormément à se sentir impliqué tant absolument rien ne semble participer à rendre le monde dans lequel on évolue vivant, crédible, ou simplement cohérent.

Pratiquement tous les personnages que l’on croise sont les autres Chevaliers Dragons : sachant qu’il n’y en a que quatorze dans le monde en vous comptant, c’est quand même du bol. Ils semblent d’ailleurs n’avoir rien de mieux à faire que de glander en attendant de vous donner ou non leur vote pour le grand final – sauf le grand méchant, qui s’appliquera à vous mettre des bâtons dans les roues. Dans l’ensemble, on se contente d’aller au prochain endroit pour essayer de résoudre la prochaine énigme – et manque de chance, c’est soit d’une facilité délirante soit au contraire une gageure sans nom, mais il n’y a pas de juste milieu. Et le fait que le jeu ne semble jamais se sentir gêné de repousser sans explication des solutions évidentes n’aide pas non plus à percer la logique de l’ensemble. Nouvel exemple, parce que je vous sens décrocher : vous vous retrouvez face à une plante carnivore géante qui vous bloque le passage. Ça tombe bien : vous avez dans votre livre de sorts un sortilège de boule de feu qu’on peut imaginer diablement efficace contre un végétal. Sauf que non : dans la logique du jeu, votre boule de feu devait servir à nettoyer une toile d’araignée (!) quelques écrans auparavant, et rien d’autre. Non, la vraie solution est limpide : il faut ramasser un os près de la plante, l’associer à une corde et en faire un grappin qui vous permettra de franchir l’obstacle en jouant à Tarzan à deux mètres de la plante carnivore – qui pourrait d’ailleurs tout à fait vous gober au passage, mais c’est pas grave, on la garde, Coco, c’est dans la boîte.

Tout le jeu étant de cet acabit, on est rapidement tenté d’utiliser n’importe quoi n’importe où n’importe comment, et de résoudre le reste à grands coups d’épées dans la tronche parce que ça a au moins le mérite d’être une solution claire.

C’est d’autant plus vrai que les dialogues du jeu (enfin… les monologues de ceux qui s’adressent à vous, puisque vous ne prononcez pas un mot de toute la partie) sont rarement plus longs que celui que vous adresse votre père adoptif avant de vous foutre dehors, et que si les doublages vont de l’honnête au passable dans la version originale, ils vont du médiocre au consternant dans la version française.

J’ai déjà évoqué le dragon avec un cheveu sur la langue, parlons un peu du lutin qui parle du nez, de l’asiatique avec un accent abominablement cliché et raciste digne d’un Michel Leeb sous Tranxène (répondant ainsi assez bien au personnage affligé, lui, d’un accident africain comme on oserait plus en faire depuis vingt-cinq ans), l’orque doté pour sa part d’un accent marseillais (!) ou encore ce type bleu (?!) totalement en roue libre en partant dans les aigus et dans le n’importe quoi visiblement improvisé qui achève de vous convaincre qu’il n’y a eu aucune forme de direction d’acteur pendant toute la localisation du jeu.

C’est bien simple, il n’y a pas un personnage de tout le jeu qui bénéficie d’un doublage ne fut-ce qu’honnête, et on en aurait presque honte d’être vu en train de jouer au jeu en public quand s’enclenche une conversation. En revanche, il y a certainement moyen de s’offrir quelques crises de fous-rires nerveux en imaginant où et comment ont été recrutés les acteurs responsables de ce carnage. Oh, et évidemment, la synchronisation labiale est complètement passée à la trappe lors de la VF, mais en sera-t-on réellement surpris ?

Pour ne rien arranger, le jeu n’est pas extrêmement long – à condition de ne pas rester bloqué (comptez peut-être cinq ou six heures si c’est votre première partie), et il est également abondamment bugué (Ah ! Ces monstres qui se coincent dans les murs ! Ces plantages en accédant à l’inventaire !).

Et alors qu’on trouvait rien de moins que Stéphane Picq, auteur de la superbe B.O. de Dune,  aux commandes de la musique, celle-ci ne se fait que très rarement entendre (un détail qui sera corrigé, avec plusieurs autres, dans une version « gold » hélas uniquement sortie aux États-Unis). Certes, l’univers sera prolongé dans Dragon Lore II, mais ça, c’est une autre histoire. Ce premier épisode, dans tous les cas, laissera peu de souvenirs impérissables de par son écriture, ou de par son gameplay, et de moins en moins de par sa réalisation. On erre davantage qu’on n’explore, on tâtonne au hasard davantage qu’on ne réfléchit, et au final on se sent entièrement spectateur d’un monde en carton-pâte où l’on recherche désespérément une épaisseur ou une logique, un peu à la façon de titres comme Hand of Fate qui avaient déjà plus misé sur la réalisation que sur l’écriture. En résumé : on a bien du mal à se sentir impliqué à un quelconque niveau, en dépit de l’ambition palpable de l’univers abordé. Elle n’était peut-être pas entièrement volée, finalement, cette réputation qui collait aux jeux français…

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 11/20 À sa sortie, Dragon Lore : La légende commence était une vitrine technologique incroyable, un émerveillement permanent, un jeu enfin apte à utiliser pleinement les capacités que n'avait jusqu'ici laissé qu'entrevoir le support CD. Plus de vingt ans après, hélas, force est de reconnaître qu'il ne reste qu'un jeu maladroit à l'écriture simpliste porté par une narration confuse et un gameplay largement déficient. Certes, on a connu largement pire en la matière, en particulier dans les années 80, mais difficile de se sentir concerné par une aventure aussi incohérente, surtout quand ni les énigmes, ni les dialogues ne sont à la hauteur. On peut à la rigueur se laisser guider par une certaine curiosité face à l'univers du jeu, voire même lui trouver un certain charme – à condition de se montrer conciliant devant la 3D datée – mais l'expérience a objectivement mal vieilli. À réserver aux joueurs patients. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une réalisation qui sent fort les balbutiements de la 3D – Une interface d'une rare maladresse – Des doublages français qui vont du médiocre au franchement gênant – Des énigmes à la logique déficiente – Un scénario aux enjeux très limités, avec un grand méchant de Prisunic aux motivations floues

Version 3DO
Dragon Lore

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

De toutes les consoles 32 bits qui auraient pu accueillir Dragon Lore en 1995, c’est sur la 3DO que Cryo – ou Mindscape, ou les deux, très honnêtement je serais bien en peine de vous dire d’où venait la décision – aura choisi de jeter son dévolu. La bonne nouvelle, c’est que la puissante – et coûteuse – machine avait a priori les arguments pour faire tourner comme un charme ce qui était encore considéré comme un titre (relativement) à la pointe de la technologie.

Petite facétie : les 3 CD-ROM du jeu comportant toutes les localisations européennes, il faudra commencer par faire un détour par le menu du jeu (en anglais) pour espérer lancer le jeu en français. Une fois cette gageure effectuée, on se retrouve avec une version techniquement équivalente à celle parue sur PC, et même à sa version Gold à en juger par la présence de thèmes musicaux que je n’avais pas entendus lors de mon test sur l’itération DOS. L’interface au pad a même le mérite de s’en sortir plutôt mieux que celle à la souris, chaque bouton ayant une fonction précise, on peut toujours sauvegarder n’importe quand, et les temps de chargement sont aussi rapides que sur PC. Bien évidemment, les choses sont un peu moins emballantes du côté purement ludique, le jeu étant toujours aussi mauvais, mais quitte à vous aventurer à le découvrir, autant le faire sur ce très bon portage.

NOTE FINALE : 11,5/20

Si Dragon Lore n’est pas miraculeusement devenu un jeu d’aventure merveilleusement écrit et doté d’un univers cohérent et de dialogues finement ciselés en passant sur 3DO, il n’empêche qu’il est ici techniquement inattaquable comparé à la version PC, visiblement tiré de la version « Gold », et qu’il se révèle même au moins aussi jouable au pad qu’à la souris. À tout prendre, une très bonne alternative pour un jeu médiocre.