Pac-Man

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited (Japon) – Midway Mfg. Co. (Amérique du Nord)
Titres alternatifs : Puck-Man (titre de travail), Jelly Monsters (VIC-20 – Europe), Dobişko (Turquie), Arcade Archives : Pac-Man (Switch), Arcade Game Series : Pac-Man (Steam)
Testé sur : ArcadeVIC-20Atari 8 bitsAtari 2600Atari 5200Apple IICommodore 64IntellivisionPC (Booter)PC-88Sharp X1TI-99/4AFM-7MSXNESPC-6001ZX SpectrumGame BoyFamicom Disk SystemGame GearPC-98Game Boy ColorNeo Geo Pocket Color
Versions non testées : PC-8000, Sharp MZ, Sharp Zaurus
Disponible sur : 3DS, Android, Antstream, Blackberry, Evercade, Game Boy Advance, iPhone, Palm OS, PlayStation 4, Switch, Wii, Wii U, Windows, Windows Phone, Xbox 360, Xbox One, Xbox Series – Présent au sein de la ludothèque pré-installée de la NES Mini
Présent au sein des compilations :

  • Arcade Classics (1987 – Commodore 64)
  • Namco Classic Collection Vol.2 (1996 – Arcade)
  • Pac-Man : Special Colour Edition (1999 – Game Boy Color)
  • Pac-Man Collection (2001 – Game Boy Advance, Wii U)
  • Namco Museum Essentials (2009 – PlayStation 3)
  • Namco Museum Archives Vol. 1 (2020 – PlayStation 4, Switch, Windows, Xbox One)
  • Namco Museum Collection 1 (2020 – Evercade)

En vente sur : PlayStation Store (PlayStation 4), Steam (Windows), Xbox.com (Xbox One, Xbox Series)

La série Pac-Man (jusqu’à 2000) :

  1. Pac-Man (1980)
  2. Ms. Pac-Man (1981)
  3. Pac-Man Plus (1982)
  4. Baby Pac-Man (1982)
  5. Super Pac-Man (1982)
  6. Jr. Pac-Man (1983)
  7. Professor Pac-Man (1983)
  8. Pac & Pal (1983)
  9. Pac-Land (1984)
  10. Pac-Mania (1987)
  11. Pac-Panic (1991)
  12. Pac-in-Time (1994)
  13. Pac-Man 2 : The New Adventures (1994)
  14. Pac-Man World (1999)
  15. Ms. Pac-Man Maze Madness (2000)
  16. Pac-Man : Adventures in Time (2000)

Version Arcade

Date de sortie : 22 Mai 1980 (Japon) – Octobre 1980 (Export)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleur : Un joystick (quatre directions)
Version testée : Version export (Midway)
Hardware : Processeur : Zilog Z80 3,072MHz
Son : Haut-parleur ; Namco 96kHz ; 1 canal
Vidéo : 288 x 224 (V) 60,606061Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À la fin des années 70, le paysage vidéoludique était encore quelque chose de relativement simple. En forçant à peine le trait, on pourrait résumer la production de l’époque en la divisant en deux tendances : les jeux consistant à tirer sur des trucs, catégorie dans laquelle on pourrait regrouper la plupart des premiers grands succès qu’auront été Space Invaders, Asteroids, Galaxian, Battlezone ou même Missile Command, et, pour revenir encore un peu plus en arrière, les jeux consistant à renvoyer une balle avec une raquette, que le concept prenne la forme des centaines de clones de Pong ou celui des premiers casse-briques à la Breakout.

Curieusement et comme on l’a vu, on aurait presque pu dessiner une troisième catégorie, beaucoup plus prolifique qu’on pourrait le penser, et constituée de titres proposant de poser un module lunaire à la Lunar Lander – mais dans l’ensemble, on va dire que les tendances commençaient déjà à s’affirmer, et on pourrait même aller jusqu’à dire que le jeu vidéo, en dépit de son jeune âge, commençait presque à s’encrouter un peu. On ne sera donc pas vraiment surpris de découvrir que le monde entier aura ouvert des yeux ronds comme des soucoupes en découvrant un titre proposant de contrôler une étrange boule jaune dans un labyrinthe rempli de fantômes jetés activement à la poursuite de la boule en question, ni que les experts d’alors, qui pensaient déjà avoir cerné les attentes du public (les fous), aient décrété que cet improbable Puck-Man venu du Japon offrait un principe bien trop déroutant et bien trop complexe pour espérer rencontrer le succès à l’international. On en rigole aujourd’hui, surtout lorsqu’on se souvient que les mêmes experts avaient également annoncé un bide pour une autre borne « trop complexe » qui n’était rien d’autre que l’immense Defender, mais le fait est que ce qui sera rapidement devenu Pac-Man (les américains, toujours pragmatiques, avaient plutôt bien cerné ce que risquait de devenir l’alias de Puck-Man dès l’instant où des petits malins commenceraient à aller gratter la courbe du « P »…) était quand même une étrange aberration, une de celles qui poussaient déjà à se demander : « Mais qui peut bien avoir une idée pareille ? »

Reprenons un instant pour considérer le pitch : Pac-Man, donc, est d’abord le nom d’une boule jaune dont la mission ou le sacerdoce (je vous laisse décider) est d’aller gober la totalité des petites boules lumineuses, rapidement surnommées « pac-gommes », qui couvrent le labyrinthe que représente son terrain de jeu. Étant donné que le labyrinthe en question est parfaitement visible en vue de dessus et qu’il offre de très nombreuses voies de circulation – y compris un raccourci latéral qui fait communiquer magiquement les deux extrémités opposées de la carte –, la démarche ne représenterait pas grande difficulté sans des invités impromptus qui se trouvent être rien de moins que des fantômes.

Et pas du genre à flotter en gémissant sans déranger personne d’autre que ceux qui essaient de dormir, non : visiblement, ces revenants-là ont un contentieux avec Pac-Man, à moins que leur régime alimentaire ne soit intégralement constitué par lui, mais toujours est-il que leur objectif à eux est limpide : se jeter sur l’innocente (?) boule jaune avec extrême préjudice. Sachant qu’ils sont quand même quatre, le héros dispose malgré tout d’un moyen inattendu pour rééquilibrer les débats : quatre super pac-gommes qui, une fois ingérées, inversent les rôles pendant quelques secondes, permettant à Pac-Man d’aller gober les fantômes – ce qui les renvoie immédiatement à leur base, au centre du labyrinthe… où ils pourront alors se re-matérialiser et revenir lui pourrir la vie. Autant dire que l’existence de la pauvre boule jaune sera vouée à être à la fois coute et intense – mais à l’échelle de l’arcade, le concept était si génial qu’il a immédiatement connu un triomphe et engendré une longue série de clones – Namco eux-mêmes n’étant pas les derniers à empiler les aventures de Pac-Man et de toute sa famille pour continuer à palper les brouzoufs et doter, d’une façon quasi-miraculeuse, le jeu vidéo de sa mascotte la plus ancienne et la plus reconnaissable de tous les temps.

Ceci dit, s’il en était qui pouvaient prétendre voler la vedette à Pac-Man dès ses débuts, c’étaient bien les quatre inénarrables fantômes qui représentaient, pour l’occasion, l’une des nouveautés les plus marquantes du titre. Jusqu’alors, les adversaires vidéoludiques avaient toujours pris la forme d’une menace anonyme et dénuée de personnalité, le plus souvent celle d’obscurs extraterrestres dont l’unique fonction était de se faire dégommer par dizaines – raison de plus pour ne pas s’attacher à eux. Mais cette fois, les fantômes débarquent chacun avec leur propre petit nom, leur couleur, et de façon plus impressionnante encore avec leur personnalité.

Il faut dire que, s’avisant qu’avoir quatre fantômes partant du même point avec le même objectif et le même comportement ne conduirait fatalement qu’à avoir un magma indissociable lancé à la poursuite du joueur, Toru Iwatani – le créateur du jeu – aura décidé de les doter chacun d’un comportement propre afin de pouvoir les dissocier : Blinky (le rouge) est le plus agressif et tend à se jeter sur Pac-Man ; tout le contraire d’Inky (le bleu), qui va parfois jusqu’à le fuir. Pinky (le rose) est plus fourbe encore, cherchant souvent à lui couper la route, tandis que Clyde (le orange), lui, fait un peu ce qu’il veut comme ça lui vient. Eurêka. Les premiers – vrais – personnages de jeu vidéo étaient nés. Tout à coup, on n’affrontait plus une raquette, une ligne de code, une machine indéfinie ou des extraterrestres sans âme mais des créatures que l’on pouvait nommer et qui avaient même le culot d’afficher de grands yeux pour les rendre plus humaines encore – davantage, pour tout dire, que Pac-Man lui-même, qui se limitait de son côté à une bouche géante. Et on devrait être surpris que tout le monde soit instantanément tombé amoureux ?

Au-delà de ces considérations anthropo-philosophiques (ça sonne mieux que « divagations »), le fait est que Pac-Man est aussi et surtout un très efficace jeu de scoring, précisément parce qu’il fait constamment pencher la balance entre la prise de risque et la sécurité. Par exemple, lors de la poignée de secondes d’invulnérabilité offerte par les super pac-gommes, vaut-il mieux profiter du court répit pour continuer à nettoyer le tableau et avancer jusqu’au prochain niveau, ou bien essayer de gober les fantômes, dont la valeur augmente exponentiellement lorsque vous les avalez à la suite ?

La question a son intérêt, car une brochette des fâcheux représentera un score cumulé de 3000 points, et sachant qu’une vie supplémentaire est accordée au bout de 10.000… Mais il y a aussi les fruits qui apparaissent périodiquement au centre du labyrinthe, et dont la valeur, là aussi, va en augmentant à chaque niveau – vaut-il mieux donc progresser le plus vite possible pour pouvoir accéder aux fruits ayant le plus de valeur, ou vaut-il mieux au contraire profiter au maximum des points faciles que représenteront les fantômes avant de se retrouver dans des niveaux où ils deviendront de plus en plus rapides et de plus en plus dangereux ? Toute la question est là, car le labyrinthe, lui, est toujours le même, et le joueur réellement désireux de jouer pour le score va donc devoir mettre en place de véritables stratégies pour optimiser à la fois son trajet et son scoring. Et voilà comment on se retrouve avec le type de programme auquel on joue systématiquement dix minutes de plus que ce qu’on avait prévu.

Certes, le concept en lui-même ne fait rien pour se renouveler : avec un seul plan, aucun power-up et des ennemis dont le comportement est toujours le même, on se doute que le moment où on estimera avoir fait le tour de ce que la borne a à offrir, surtout avec quarante-cinq ans de recul, risque de se dessiner un peu trop vite.

Cependant, Pac-Man a pour lui cette extraordinaire efficacité des concepts simples mais géniaux qui lui valent, aujourd’hui encore, de revenir constamment à la charge en altérant à peine le gameplay original – il faut avoir lancé au moins une partie de Pac-Man 99 pour comprendre à quel point une ou deux bonnes idées suffisent à ressusciter instantanément une licence pourtant plus tout à fait de la première jeunesse. Mais hé, demandez à Mario ou à la princesse Zelda si l’âge est forcément signe de décrépitude… Dans tous les cas, et même si le jeu a fatalement pris un petit coup de vieux en termes de possibilités et de contenu, le simple fait qu’il ne soit pas nécessaire de le présenter et que la mascotte de Namco semble toujours péter la forme à un âge où de très nombreux personnages de jeu vidéo adoreraient pouvoir en dire autant prouve la force et la longévité d’un jeu fondateur qui reste aujourd’hui, avec les plus grand représentants de sa génération, un candidat immortel à la fameuse « petite partie de cinq minutes » dont on ne se lasse étrangement jamais – même pas au bout de près d’un demi-siècle. Combien de jeux peuvent en dire autant ?

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 13/20

C'est devenu le personnage le plus iconique de toute l'histoire du jeu vidéo au point d'en supplanter en notoriété, quarante-cinq ans après sa naissance, des légendes vivantes comme Link ou Mario. Mais comment expliquer le succès planétaire de cette petite boule jaune qu'est Pac-Man ? Un principe simple, un unique tableau qui se répète en boucle avec pour unique objectif le scoring, des adversaires identifiables chacun doté de sa propre identité et de sa propre I.A., et voilà un concept ludique qui ne se renouvèle certes pas mais qui se suffit parfaitement à lui-même. Oui, difficile aujourd'hui de ne pas cerner les centaines de choses qui pourraient venir enrichir le concept – et qui ont d'ailleurs souvent eu l'occasion de le faire depuis : d'autres niveaux, des power-up, des capacités spéciales, des warp zones, etc. – mais à la racine, ça fonctionne et ça fonctionne même si bien que la première mascotte de Namco est toujours en activité et qu'elle n'est jamais autant en forme que quand elle se tient aux mécanismes de sa première aventure. Et ça, c'est quand même un signe.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un unique plan de niveau pour tout le jeu...
– ...avec des mécanismes qui n'ont aucune ambition de se renouveler
– Une difficulté « arcade de l'âge d'or »

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Pac-Man sur une borne d’arcade :

Version VIC-20
Jelly Monsters

Développeur : HAL Laboratory, Inc.
Éditeur : Commodore Japan Limited (Japon) – Commodore Business Machines (UK) Ltd. (Royaume-Uni) – Atarisoft (Amérique du Nord)
Date de sortie : 1981 (Japon, Royaume-Uni) – 1983 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche britannique
Configuration minimale :

Comme on peut s’en douter, Pac-Man n’aura pas tardé à continuer sa carrière sur les systèmes domestiques – je vous laisse compter le nombre de versions testées dans cet article, qui ne tient pas compte des dizaines de clones de toute sorte qui auront pullulé sur la même période. On constatera d’ailleurs que c’est sous le nom de Jelly Monsters que le jeu sera arrivé en Europe, ce qui est assez ironique lorsque l’on constate que cette version est finalement plus proche de la version arcade que celle publiée par Atari en Amérique du Nord ! Ici, le plan du labyrinthe est respecté, l’interface a été assez intelligemment disposée pour perdre le moins de place possible à l’écran, et les fantômes conservent globalement leur comportement – ce qui se réduit surtout à « le rouge est super agressif, les autres font un peu n’importe quoi ». Ce n’est peut-être pas totalement à la hauteur de la borne, mais cela reste assez convaincant – plus, en tous cas, que la version américaine éditée par Atarisoft (et parue, elle, sous le nom de Pac-Man), où le plan « simplifié » du labyrinthe sabote totalement les stratégies qui faisaient l’intérêt du jeu.

NOTE FINALE : 12/20 (version européenne) – 08,5/20 (version américaine)

Étrangement arrivé sous l’un des noms farfelus que les éditeurs britanniques semblaient adorer donner aux jeux à l’époque, Pac-Man s’en sort très correctement dans sa version Jelly Monsters européenne, et nettement moins bien dans sa version américaine. Ne vous trompez pas de portage au moment de lancer la cartouche.

Version Atari 8 bits

Développeur : Joe Hellesen
Éditeur : Atari, Inc. (version cartouche américaine) – Datasoft, Inc. (versions cassette et disquette américaines) – U.S. Gold Ltd. (Europe)
Date de sortie : Juin 1982 (cartouche, Amérique du Nord) – Décembre 1984 (cassette et disquette, Amérique du Nord) – 1985 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche américaine
Configuration minimale : Système : Atari 400/800, XL, XE – RAM : 16ko

Lorsque l’on parle de portages de l’arcade au début des années 80, on se doute qu’Atari va rapidement rentrer dans la danse. Sur son excellente gamme d’ordinateurs 8 bits, c’est Joe Hellesen qui se sera chargé de l’adaptation, et le moins qu’on puisse dire est qu’il s’en est bien tiré : c’est parfaitement lisible, les couleurs sont globalement respectées (même si cela peut changer d’un modèle à l’autre), la réalisation sonore est excellente (on retrouve les bruitages et le jingle de la borne pratiquement à l’identique) et la jouabilité est irréprochable. Le jeu est même mieux moins punitif dans cette version, avec des fantômes qui mettent plus de temps à devenir vraiment dangereux ! Bref, c’est exactement ce qu’on pouvait espérer trouver sur son Atari 800 à l’époque, et une version qui demeure toujours aussi efficace de nos jours. Du bon boulot.

NOTE FINALE : 12,5/20

Pac-Man sur Atari 8 bits parvient à offrir une expérience de jeu très bien préservée depuis la borne d’arcade, tout en se payant le luxe d’être un peu plus accessible et un peu moins brutalement difficile. Si les puristes resteront de toute façon sur la version d’origine, on passe clairement un très bon moment sur cette adaptation bien ficelée.

Version Atari 2600

Développeur : Tod Frye
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 16 mars 1982 (Amérique du Nord) – Juin 1982 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue :
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques :

On ne réalise plus forcément, avec près de quarante-cinq ans de recul, le défi technique que pouvait représenter le portage d’un jeu comme Pac-Man, avec notamment ses nombreux sprites, sur un hardware aussi primitif que celui de l’Atari 2600. Surtout quand l’intérêt était de sortir un jeu vite, sans trop se soucier de sa qualité ; un assez bon résumé de cette cartouche, ou l’exemple type du portage qui contentait tout le monde à l’époque et que l’on considèrera objectivement comme immonde aujourd’hui. Le plan du labyrinthe ne fait même plus mine de respecter celui de l’arcade, les fantômes font n’importe quoi, les fruits ont disparu, ça clignote de partout, les couleurs sont choisies au pif total et les pac-gommes ne sont même plus rondes ! C’est moche, ce n’est pas très jouable, et c’est surtout profondément inintéressant. Comme dirait un archéologue célèbre : « sa place est dans un musée ! » Celui des horreurs, peut-être. Mais certainement pas dans votre console, en tous cas.

NOTE FINALE : 05/20

L’unique mérite d’adaptations comme ce tristement célèbre Pac-Man sur Atari 2600, c’est de nous rappeler à quel point les joueurs du tout début des années 80 pouvaient être moins difficiles au moment de jouer à un portage de borne d’arcade à domicile : tant que ça portait le même nom… de nos jours, on verra cette cartouche comme la sordide parodie de l’expérience originale qu’elle est, et on s’assurera de la garder bien rangée à sa place, dans la poubelle.

Version Atari 5200

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : Novembre 1982 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb

Avec un peu d’expérience, on assimile rapidement ce qu’est fondamentalement une Atari 5200 : un Atari 400 sans clavier. Partant de ce constat, on cesse d’être surpris de constater que Pac-Man, comme 95% de la ludothèque de la console, n’est fondamentalement que la copie carbone de la version Atari 8 bits – mais c’est assurément une meilleure nouvelle que si on avait hérité d’une copie carbone de la version Atari 2600. Tout le jeu est toujours à sa place, y compris les petites saynètes retirées de toutes les autres adaptations jusqu’à la version NES, ce qui faisait au moins de cette cartouche une bonne raison de posséder une Atari 5200 – à condition de ne pas avoir déjà un Atari 400 ou 800 en sa possession.

NOTE FINALE : 12,5/20

Comme toujours, Pac-Man débarque sur Atari 5200 sans même s’embarrasser de changer une ligne de code depuis la version Atari 400. Mais c’est au final une très bonne nouvelle, cette adaptation étant de toute façon excellente.

Version Apple II

Développeur : Brian Fitzgerald
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1 à 5 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Système : Apple II – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : Haute résolution

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il n’allait certainement pas être question de tirer un trait sur un système aussi populaire que l’Apple II en 1983, et Pac-Man a l’excellente idée d’y débarquer dans une version qui s’efforce de coller au maximum à la borne, au point d’en reprendre l’écran-titre avec la présentation des fantômes. Le résultat n’est peut-être ni tout à fait aussi fin, ni aussi coloré que sur Atari 8 bits – ni même que sur VIC-20 – mais il n’en est pas moins très solide, d’autant que la jouabilité est excellente. Hardware oblige, il n’y a plus de bruitages pendant la partie, mais le petit jingle de début de niveau, lui, est bel et bien présent. Bref, difficile d’imaginer mieux sur Apple II, et l’expérience de jeu est parfaitement préservée ; du bon boulot.

NOTE FINALE : 12/20

Pac-Man livre sur Apple II la copie qu’on était en droit d’attendre : c’est parfaitement fidèle à la borne, c’est d’une jouabilité inattaquable et c’est lisible. Lancez-le plus de quarante ans plus tard, et c’est magique : vous n’avez pas envie d’arrêter avant le game over. Que demander de plus ?

Version Commodore 64

Développeur : Atarisoft
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche
Configuration minimale : RAM : 64ko

Autre grand incontournable de l’ère 8 bits : le Commodore 64, qui était alors encore à ses débuts, mais qui assurait déjà l’essentiel avec cette version de Pac-Man : c’est pratiquement une copie pixel perfect de l’itération Atari 8bits/5200. Il n’y a plus de jingle au lancement, mais les bruitages sont toujours là, les couleurs correspondent à peu près à celles de la borne (le fantôme orange vire ici plutôt au marron), la jouabilité est parfaite et la difficulté est réglée comme sur la version de la machine d’Atari. Bref, c’est exactement ce qu’on pouvait espérer en 1983.

NOTE FINALE : 12,5/20

Pas de sortie de route pour Pac-Man sur Commodore 64, qui reste sagement dans les clous plantés par la version Atari 8 bits. Rien de très neuf, mais qui s’en soucie : c’est exactement le jeu qu’on était venu chercher.

Version Intellivision

Développeur : Atarisoft
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : Décembre 1983 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version cartouche américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 192kb

Autre passage obligé pour les portages de l’arcade du tout début des années 80 : L’Intellivision de Mattel, qui fut la première console 16 bits du marché (à une époque où c’était encore loin de constituer un argument de vente majeur). C’est une nouvelle fois Atarisoft qu’on retrouve aux commandes de cette adaptation de Pac-Man… laquelle, sans être à aucun niveau aussi catastrophique que la version parue sur Atari 2600, doit néanmoins composer avec quelques sacrifices, le plus évident étant la modification du plan du labyrinthe, désormais devenu plus petit. C’est d’autant plus dommage que la réalisation tient à peu près la route, avec un schéma de couleur globalement respecté et aucun clignotement à l’écran, mais sachant que l’I.A. des fantômes est une nouvelle fois assez chaotique, on s’éloigne trop de l’expérience originale pour conserver son intérêt. Dommage.

NOTE FINALE : 09/20

Déception pour Pac-Man sur Intellivision, qui en s’éloignant du modèle de la borne propose hélas un simple ersatz de l’expérience originale, en moins jouable, en moins technique et en plus frustrant. C’est assez joli et ça faisait illusion en 1983, mais plus maintenant.

Version PC (Booter)

Développeur : Atarisoft
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : 1983
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : Aucun (Booter) – RAM : 128ko
Mode graphique supporté : CGA
Carte son supporté : Aucune (haut-parleur interne)

En 1983, le PC était déjà prêt à prendre son envol – mais pas encore tout à fait en tant que machine de jeu. Atarisoft étant une fois de plus aux commandes, on se doute que Pac-Man a de fortes chances de débarquer dans une version assez proche de celles déjà observées sur Atari 8 bits et Commodore 64, et on a raison : c’est pour ainsi dire le même jeu, cantonné aux quatre couleurs du CGA et aux maigres capacités sonores du haut-parleur interne – ce qui n’empêche pas de profiter à la fois du jingle de début de partie et des bruitages. L’essentiel est donc toujours à sa place, et même la réalisation ne devrait réellement impacter que les joueurs déçus à l’idée de composer avec des murs verts et des fantômes bicolores. Oh, et n’oubliez pas de régler le nombre de cycles sous DOSBox sur 240 pour approcher de la vitesse d’un modèle XT à 4,77MHz, sinon vous risquez de ne pas avoir le temps de comprendre ce qui se passe.

NOTE FINALE : 12/20

Il faudra certes composer avec la palette de couleurs ultra-limitée du CGA, mais le fait est que Pac-Man sur PC n’a finalement qu’assez peu de raisons de rougir face aux portages parus à la même période sur Atari 8 bits ou sur Commodore 64. On n’est pas à des kilomètres de l’expérience de l’arcade, et le plaisir est toujours au rendez-vous. Tant mieux.

Version PC-88

Développeur : Dempa Shimbunsha
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : Décembre 1983 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Si on connait tout l’aspect aléatoires des portages occidentaux de bornes d’arcade japonaises, généralement réalisés sans la moindre forme d’accès au code original, du côté nippon, en revanche, c’est souvent du solide. Sur PC-88, Pac-Man arrive paré de ses plus beaux atours : à part pour le format de l’image, graphiquement parlant on se croirait presque sur la borne… du coup, l’image a été pivotée pour respecter au maximum les proportions du plan original ; ce n’est pas encore parfait, mais ça s’en rapproche. Le son, pour sa part, est moins convaincant, mais il n’a de toute façon jamais été très présent ; en revanche, on pourra noter quelques difficultés pour faire marcher le jeu à la bonne vitesse : même sur un modèle de base à 4MHz, le programme tourne environ deux fois trop vite. Même en tournant dans des conditions correctes, la jouabilité au clavier laisse également à désirer : notre boule jaune ne répond pas au quart de tour, rate souvent des tournants qu’on lui avait pourtant indiqués dans les temps, et les masques de collision souffrent de quelques imprécisions. Bref, si les choses font parfaitement illusion tant qu’on regarde, les choses sont un peu moins convaincantes une fois qu’on commence à jouer. C’est dommage, car on avait les éléments pour tenir le portage ultime dès 1983, mais on se retrouve au final avec une version frustrante.

NOTE FINALE : 11,5/20

Si Pac-Man sur PC-88 avait bénéficié d’une jouabilité à la hauteur de sa réalisation, il se serait clairement hissé très près du niveau de la borne. Malheureusement, une jouabilité imprécise et peu réactive vient pénaliser une version qui ne passe vraiment pas loin de côtoyer l’excellence. Tant pis.

Version Sharp X1

Développeur : Dempa Shimbunsha
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : 1983 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette japonaise
Configuration minimale : HuBASIC CZ-8CB01 requis

On poursuit la tournée des ordinateurs japonais, avec à présent le X1 de Sharp. Avec la même équipe à la baguette que sur PC-88, on se doute que les deux versions vont être proches ; graphiquement, elles seraient très proches si l’interface ne prenait pas ici beaucoup plus de place à droite de l’écran – ce n’est pas trop gênant, cela aide même le format de l’image à s’approcher de celui de la borne – et si le plan du labyrinthe ne restait pas au format choisi par toutes les autres versions plutôt que de le faire pivoter comme sur PC-88. La réalisation sonore est plutôt meilleure – pratiquement équivalente à celle de la borne – mais le framerate, lui, est plus bas. Curieusement, la jouabilité en ressort plutôt plus précise ici que sur la machine de NEC, en dépit d’une perte évidente en termes de réactivité. Bref, il y a à boire et à manger, mais on n’est au final vraiment pas loin d’un portage parfait – dommage que l’action en elle-même ne soit pas plus fluide, et surtout que le comportement des fantômes ne soit pas un peu plus cohérent ; ils font vraiment n’importe quoi ici.

NOTE FINALE : 12/20

Loin du simple clone de la version PC-88 qu’on était en droit d’attendre, Pac-Man sur Sharp X1 arrive avec ses propres forces et ses propres faiblesses et ne serait vraiment pas loin de donner le change à la borne d’arcade si le framerate était meilleur et surtout si l’I.A. des fantômes était un peu plus consistante. En l’état, c’est joli mais pas très réactif ni très bien équilibré. Dommage, il ne manquait vraiment pas grand chose.

Version TI-99/4A

Développeur : Atarisoft
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : Novembre 1983
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette
Configuration minimale :

Parmi les grands vétérans de l’informatique familiale, on tend encore trop souvent à oublier le TI-99 pourtant commercialisé dès 1979. Et à en juger par ce portage extrêmement solide de Pac-Man, on a tort : on tient peut-être là la meilleure version domestique du jeu au moment de sa sortie – d’une très courte tête, certes, mais on appréciera le résultat. En terme de réalisation, pas de problème : les couleurs sont bien choisies, le plan du labyrinthe est respecté, c’est raisonnablement fin et ça bouge très bien. Niveau sonore, rien ne manque, et on se croirait pratiquement sur la borne, et pour ne rien gâcher, la jouabilité est également à la hauteur, tout comme le comportement des fantômes. Seules les petites saynètes de transition ont disparu, mais on s’en remettra. Bref, c’est exactement le type de jeu qu’on espérait trouver sur la cassette en achetant un portage de l’arcade, et ça fait plaisir.

NOTE FINALE : 12,5/20

Prestation réussie pour Pac-Man, qui ne fait pratiquement aucune faute au moment de débarquer sur Ti-99/4A. La réalisation est solide, la jouabilité est à la hauteur, l’expérience est convaincante. Que demande le peuple ?

Version FM-7

Développeur : Lashnu Soft
Éditeur : Dempa Shimbunsha
Date de sortie : 1984 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version cassette japonaise
Configuration minimale :

D’un ordinateur japonais à un autre, on se doute que l’on est condamné à voir passer des portages très proches les uns des autres, et que les nuances observées entre la version PC-88 et la version Sharp X1 de Pac-Man vont constituer l’exception plutôt que la norme. Très bon exemple avec cette itération FM-7 du jeu qui, bien qu’assurée par une équipe différente, reste une conversion pratiquement pixel perfect de celle observée sur PC-88. S’il y a toujours de nombreux clignotements, et même si la jouabilité reste un peu raide, le résultat reste globalement plus réactif et nettement plus jouable que sur la machine de NEC, ce qui fait une grosse différence. On n’aurait pas craché sur quelques couleurs de plus, mais la musique et les bruitages sont là, il ne manque pour ainsi dire que les transitions. C’est à peu près ce qu’on voulait, et on l’obtient. Dont acte.

NOTE FINALE : 12,5/20

Techniquement très proche de la version PC-88, Pac-Man sur FM-7 n’en est pas moins un peu plus précis, un peu plus fidèle à la borne et globalement un peu plus jouable que son alter ego. Pour les puristes – ou simplement pour les joueurs qui aime bien que leur héros tourne quand on le lui demande – cette itération sera donc clairement à privilégier.

Version MSX

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited (Japon) – Bug-Byte Software, Ltd. (Royaume-Uni) – Microbyte, Philips Export B.V. (Espagne)
Date de sortie : 1984
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Système : MSX 1

À partir de 1984, changement de braquet : pour les conversions les plus attendues au Japon (à savoir celles sur Famicom et sur MSX), c’est directement Namco qui prend les choses en main. Et pour le coup, ça se sent : à quelques couleurs près, cette version MSX fait pratiquement jeu égal avec la version arcade. Le format de l’image est respecté en basculant l’interface à droite, le plan est fidèle à celui de la borne (à quelques infime nuances près dans la taille des « murs »), la réalisation sonore est inattaquable, tout comme la jouabilité, et même les saynètes sont de retour. Bilan : c’est la borne – en un peu moins beau, mais la borne quand même. Si jamais vous souhaitez découvrir le jeu aujourd’hui, vous ne devriez pas être traumatisé de le faire avec cet excellent portage.

NOTE FINALE : 13/20

Namco reprend les commandes, et ça se sent : en termes d’expérience de jeu, Pac-Man sur MSX délivre une expérience équivalente à celle de la borne, et la réalisation étant elle aussi solide, difficile de trouver un reproche à adresser à cette version. Du portage comme on les aime.

Version NES

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namcot (Japon) – Tengen Inc. (Amérique du Nord) – Nintendo of Europe GmbH (Europe)
Date de sortie : 2 Novembre 1984 (Japon) – Octobre 1988 (Amérique du Nord) – 23 décembre 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 192kb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À une époque où la NES n’avait même pas encore débuté sa carrière internationale, elle bénéficiait déjà de sa version de Pac-Man… laquelle, traduisant assez bien les politiques de distribution de l’époque, aura mis presque quatre ans à arriver aux États-Unis, et pratiquement une décennie pour arriver en Europe – à une époque où sa successeuse, la Super Nintendo, était déjà en vente depuis un an et demi ! Loin de ces considérations qui n’impacteront de toute façon pas la vision qu’on aura du jeu aujourd’hui, on se retrouve en tous cas avec l’équivalent de la version parue sur MSX : là encore, à quelques menus fioritures près, c’est l’arcade dans une cartouche. L’expérience de jeu est toujours aussi bonne, le jeu est un peu moins punitif que sur la borne, et pour le reste, tout est à sa place. Bref, la NES avait déjà les arguments pour frapper fort, pour le plus grand plaisir des joueurs.

NOTE FINALE : 13/20

Comme sur MSX, Pac-Man aura débarqué sur NES avec tout le contenu de la version arcade, une jouabilité irréprochable, un équilibrage un peu plus accessible et une réalisation qui fait le café. Les petits japonais ont du se régaler en 1984, les petits européens un tout petit peu moins en 1993, mais quoi qu’ en dise, le plaisir de jeu, lui, n’a jamais changé.

Les avis de l’époque :

« Cette cartouche est la copie fidèle de la borne d’arcade d’origine… Seulement la borne en question date de près de quinze ans ! En tant que vétéran de ces temps reculés, j’ai éprouvé une certaine nostalgie, mais je me vois mal vous conseiller cette « vraie fausse nouveauté ». »

Iggy, Player One n°44, juillet 1994, 50%

Version PC-6001

Développeur : H. Yomoda
Éditeur : Micomsoft
Date de sortie : 1984 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette japonaise
Configuration minimale :

Jamais sorti du Japon, où il était extrêmement populaire, le « Papicom » comme on le surnommait faisait également parti des machines qu’on pouvait s’attendre à voir héberger le portage d’un titre aussi populaire que Pac-Man. Pour l’occasion, on sent que cette version va s’aventurer sur les terres d’un des concurrents directs de la machine, à savoir le Sharp X1 : bien que la résolution soit plus basse, le gameplay comme la réalisation des deux portages sont pratiquement jumeaux. Le framerate est cependant un peu plus élevé ici, même si les clignotements restent assez présents, ce qui permet à cette version d’être très légèrement plus agréable à jouer que celle hébergée par son rival. Inutile de remuer ciel et terre pour la retrouver, cependant : elle s’inscrit dans la droite continuité des portages japonais du jeu assurés par Dempa Shimbunsha, pour les points forts comme pour les points faibles.

NOTE FINALE : 12/20

Pac-Man s’offre sur Papicom une virée faisant énormément penser à celle livrée quelques mois plus tôt sur Sharp X1. Ce n’est pas très fin et ça clignote beaucoup, mais c’est fidèle à la borne et c’est jouable. La base.

Version ZX Spectrum

Développeur : DJL Software Ltd.
Éditeur : Atarisoft
Date de sortie : Mai 1984 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

En 1984, le ZX Spectrum était un peu le rêve devenu réalité de tous ceux qui souhaitaient posséder un ordinateur familial pour un prix (relativement) abordable. Avec Pac-Man, la machine nous rappelle à quel point elle était compétitive à ses débuts, car ce portage inscrit droit dans la lignée des autres versions publiées par Atarisoft n’a clairement pas à rougir de la comparaison avec les portages sortis sur Commodore 64 ou sur Atari 8 bits, auxquels il ressemble d’ailleurs beaucoup. le labyrinthe est lisible, les couleurs sont bien choisies, on bénéficie toujours de la réalisation sonore, et si le framerate est peut-être un peu plus bas que chez ses concurrents, cela n’a objectivement aucun impact sur la jouabilité. Bref, c’est le jeu comme on pouvait espérer l’avoir, et c’est tant mieux.

NOTE FINALE : 12,5/20

Pac-Man n’aura pratiquement rien eu à sacrifier pour débarquer sur ZX Spectrum, et c’est tant mieux. Ce n’est peut-être pas encore tout à fait l’exact clone de la borne, mais en termes d’expérience de jeu, la différence est infime. Que du bonheur.

Version Game Boy

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namcot (Japon) – Namco Limited (Amérique du Nord, Europe)
Date de sortie : 16 novembre 1990 (Japon) – Avril 1991 (Amérique du Nord) – Décembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées avec un câble Game Link)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 512kb

Pour un titre techniquement aussi basique que Pac-Man, la très populaire Game Boy représentait un passage obligé. Pour le coup, on sent bien que Namco n’avait a priori pas besoin de se retrousser les manches : il suffisait de reprendre la version NES… avec, néanmoins, une grosse adaptation en vue : comment résoudre le problème de la taille de l’écran ? À cette question, les développeurs de Namco auront proposé deux réponse : par défaut, le jeu reprend la réalisation de la version NES mais en noir et blanc et avec une interface qui bouffe un tiers de la fenêtre de jeu, ayant recours à un défilement pour afficher tout le labyrinthe. À ceux qui hurleraient que cela revient à saboter toute la jouabilité du jeu, qui repose précisément sur le fait de pouvoir embrasser tout le plateau d’un seul regard, un mode « Demi » est également accessible avec les flèches gauche ou droite à l’écran-titre, et propose alors des graphismes simplifiés qui ont, eux, le mérite de tenir sur un seul écran. Le seul inconvénient reste ici qu’il est impossible de distinguer les fantômes, puisqu’il n’y a pas de couleurs, mais on se retrouve cependant avec le compromis le plus intelligent qui soit.

NOTE FINALE : 12,5/20

Face à la plus grande limite de la Game Boy, à savoir la taille de son écran, le Pac-Man de Namco aura crânement choisi d’apporter deux réponses, et les joueurs pourtant facilement opter pour celle qui leur parait la plus intelligente. Dommage qu’il soit impossible de distinguer les fantômes quelle que soit l’option choisie, néanmoins.

Version Famicom Disk System

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited
Date de sortie : 18 mai 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Périphérique très populaire au Japon, d’où il ne sera d’ailleurs jamais sorti, le Famicom Disk System aura également eu droit à sa version de Pac-Man… même si parler de « sa » version est sans doute une vue de l’esprit, tant celle-ci n’est finalement qu’un simple copier/coller de la version cartouche japonaise. Elle ne semble même pas sauvegarder les high scores (peut-être est-ce cependant une facétie de l’émulation) ! Quoi qu’il en soit, c’est toujours un excellent portage, mais sauf à vouloir collectionner toutes les versions exotiques du jeu, il ne sera sans doute pas nécessaire de vous donner le mal de mettre la main dessus.

NOTE FINALE : 13/20

Difficile de voir dans Pac-Man sur Super Famicom autre chose que la transcription fidèle de la version cartouche sur un support disquette. Le jeu est toujours aussi bon, mais si c’était là tout ce que le périphérique pouvait apporter à la console, on comprend mieux qu’il ait rapidement périclité.

Version Game Gear

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited
Date de sortie : 29 janvier 1991 (Japon) – Octobre 1991 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Gear-to-Gear)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Sans même faire preuve d’un cynisme outrancier, on pouvait se douter de ce qu’allai donner Pac-Man sur Game Gear : à peu près la même chose que sur Game Boy, mais en couleurs. On retrouve d’ailleurs le fameux mode « Demi » permettant d’embrasser tout le labyrinthe sur un seul écran, mais on notera néanmoins deux détails intéressants. Le premier, c’est que dans son mode de jeu par défaut, le jeu n’est plus encombré d’une inutile interface pour bouffer un tiers de l’écran, ce qui signifie que le défilement est exclusivement vertical – la lisibilité est donc meilleure que sur Game Boy. Le deuxième, c’est que le retour de la couleur signifie également que les fantômes retrouvent leur identité et qu’on peut à nouveau anticiper leur comportement en fonction de leur couleur. Deux détails qui font quand même une grosse différence.

NOTE FINALE : 13/20

La Game Gear peut pour une fois utiliser sa couleur pour réellement supplanter la Game Boy, et le fait que le mode de jeu par défaut soit également mieux pensé n’est pas du luxe non plus. Cette fois, pas de problème : on peut jouer à Pac-Man n’importe où et dans les meilleures conditions.

Version PC-98

Développeur : WiZ
Éditeur : WiZ
Date de sortie : 13 novembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Curiosité : Pac-Man aura mis neuf ans à faire le trajet, pourtant d’ordinaire assez court, séparant le PC-88 du PC-98. Il aura pour l’occasion changé de mains pour passer entre celles de l’équipe de WiZ, et comme on pouvait s’y attendre en 1992, les différences avec la borne d’arcade commencent à sérieusement verser du côté de l’anecdotique. On aurait peut-être été en droit d’attendre quelque chose d’un peu plus ambitieux douze ans après la borne, mais pour ce qui est de jouer aux aventures de la mascotte de Namco chez soi, au moins, on n’aura aucune raison d’être déçu.

NOTE FINALE : 13/20

Pac-Man sur PC-98 a beau ne rien présenter qui ait valu douze ans d’attente, il n’en produit pas moins une conversion limpide et difficilement attaquable de la borne originelle. Rien de bouleversant, mais en termes de plaisir de jeu, c’est exactement ce qu’on était venu chercher.

Version Game Boy Color
Pac-Man : Special Colour Edition

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited
Date de sortie : 16 novembre 1990 (Japon) – Avril 1991 (Amérique du Nord) – Décembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées avec un câble Game Link)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Pac-Man aura également pu signer son retour sur Game Boy Color à la fin du siècle, cette fois au sein d’une compilation avec Pac-Attack, histoire de mieux justifier la facture. A priori, on hérite juste d’une version colorisée de la version Game Boy de 1990, qui ne se hisse donc même pas tout à fait à la hauteur de la version Game gear à cause de cette interface envahissante dans la vue par défaut (il est bien entendu toujours possible d’opter pour la version « Demi »). Seulement, voilà, une petite différence change tout : un mode deux joueurs… compétitif. Quel est le concept ? Très simple : imaginez qu’à chaque fois que Pac-Man gobe un fantôme, ce dernier débarque… dans le labyrinthe de son adversaire ? Une idée simple, mais géniale, pour donne enfin un sens aux parties entre amis ! Autant dire que si cette version n’a rien de neuf à offrir en solo, à deux, elle a tout de suite nettement plus d’intérêt.

NOTE FINALE : 13,5/20

Alors qu’on s’attendait à voir Pac-Man débarquer avec la couleur pour tout bonus dans cette compilation tardive sur Game Boy Color, l’ajout d’un mode deux joueurs compétitif fait quand même une grosse différence, et même si le jeu est par essence toujours ausi répétitif, mettre en place des stratégies poue envoyer des crasses à son adversaire constitue indéniablement un renouveau bienvenu. Une bonne idée comme on les aime.


Version Neo Geo Pocket Color

Développeur : Namco Limited
Éditeur : SNK Corporation (Japon, Europe) – SNK Corporation of America (Amérique du Nord)
Date de sortie : 1999
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Compatible avec la Neo Geo Pocket

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Lorsque Namco annonça son arrivée sur la jeune et (encore) prometteuse Neo Geo Pocket, les joueurs se mirent à saliver en imaginant des conversions audacieuses ou des exclusivités bien senties provenant de séries comme Tekken ou Ridge Racer. Au final, ils n’auront hérité que de Pac-Man, et de rien d’autre ! Et pour ajouter l’affront à la déception, ce portage hyper-paresseux de la borne qui allait fêter ses vingt ans n’est pas grand chose de plus que la conversion de la cartouche parue au même moment sur Game Boy Color… mais sans Pac Attack en bonus, et surtout sans le mode deux joueurs qui faisait toute la différence. Résultat des courses : ah, ça, on a bien une conversion fidèle de l’expérience originale, mais alors pour ce qui était d’espérer vendre la console avec ça, c’était un peu court…

NOTE FINALE : 13/20

Pac-Man vient poser ses valises sur Neo Geo Pocket Color, et on sent qu’il revient directement de la Game Boy Color : c’est pour ainsi dire le même jeu… avec l’apport de l’excellent mode deux joueurs compétitif en moins. On se retrouve donc avec une conversion fidèle de la borne, et rien d’autre. À vous de voir si c’est ce que vous attendez sur l’éphémère console portable.

Alpha Waves

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Titre alternatif : Continuum (Amérique du Nord)
Testé sur : Atari STPC (DOS)Amiga

La collection « Cristal » d’Infogrames :

  1. Welltris (1989)
  2. The Light Corridor (1990)
  3. Alpha Waves (1990)

Version Atari ST

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquettes 3,5″ double face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le jeu vidéo est un peu comme la grande salle d’un gigantesque palais : où que vous alliez, il y a forcément de l’écho.

On a déjà souvent eu l’occasion de se passionner à l’idée de trouver l’origine d’un genre, le père fondateur qui précède le père fondateur qui précède le père fondateur, et ainsi de suite. Le mieux, c’est qu’avec le temps, on semble toujours en trouver un nouveau ; un Alone in the Dark avant Resident Evil, un Project Firestart avant Alone in the Dark – et souvent, un obscur programme que tout le monde semble avoir oublié quelque part dans les années 80, voire dans les années 70, et qui avait eu la bonne idée avant tout le monde sans que personne ne semble s’en être aperçu sur le moment.

Dans le domaine de la plateforme, le jalon est en général simple à trouver : il suffit de chercher un épisode de Super Mario Bros. Ce n’est jamais le premier, le pionnier, mais c’est celui qui articule tout le reste et redéfinit le genre. Par exemple, pour ce qui est du passage à la 3D, l’emplacement chronologique de l’An I ne fait tout simplement aucun doute : juin 1996, Super Mario 64, un titre si extraordinairement fondateur qu’il aura balayé sans autre forme de procès les quelques tentatives – souvent objectivement ratées – qui l’avaient précédé. Dans l’inconscient collectif, c’est là que tout commence, et le reste est si anecdotique qu’il ne vaut même pas la peine d’être mentionné. Et pourtant, il est intéressant de se rendre compte que le concept de « jeu de plateforme en 3D temps réel » avait déjà trouvé une matérialisation dès 1990, et que la première pierre du monument aura été posée par Christophe de Dinechin et son équipe. C’est en effet au tout début de la décennie que la (trop) éphémère collection « Cristal » d’Infogrames, destinée à accueillir des logiciels ayant l’audace de sortir des clous, aura hébergé un titre qui aura marqué les (trop) rares joueurs à avoir eu l’occasion de poser les mains dessus : l’étrangement nommé Alpha Waves.

Le concept du jeu est pour ainsi dire celui du genre dans son ensemble : sauter de plateforme en plateforme pour atteindre la sortie. Pour l’occasion, le joueur est placé aux commandes d’un « module » dont il peut d’ailleurs choisir l’apparence – celle-ci étant vouée à ne pas dépasser une forme abstraite d’une poignée de polygones qui correspondait de toute façon à ce que la 3D de l’époque pouvait représenter de plus concret. Le terrain de jeu est un complexe de 256 salles, toutes composées d’un cube des mêmes dimensions, présentant parfois plusieurs sorties sur ses différentes faces.

Dans le mode « Arcade » du jeu, l’idée est de collecter les cristaux de lumières disséminés au sein du complexe tout en faisant face à une limite de temps ; chaque nouvelle pièce découverte ajoute une minute au compteur, et il est possible de trouver des bonus venant encore allonger le temps disponible – un score viendra également ajouter un objectif histoire de matérialiser les progrès du joueur d’une partie à l’autre. En mode « Emotion », le score et la limite de temps disparaissent : le joueur est alors libre de choisir sa zone de départ parmi les douze disponibles en fonction de leur nom et de son état d’esprit (chacune d’entre elles portant un nom onirique ou pseudo-mystique de type « rêve », « stimulation » ou « développement spirituel »), et l’idée est alors de visiter la zone concernée sans réel objectif autre que celui que s’imposera le joueur. Un moyen comme un autre de découvrir ce que le manuel du jeu présente comme une « réalité virtuelle » (mais n’est-ce pas là une définition s’appliquant à tous les jeux vidéo quels qu’ils soient ?)

À la grande question « comment jouer dans un espace en 3D ? », Alpha Waves aura en tous cas eu le mérite d’aboutir à une réponse très intelligente. Le jeu est intégralement jouable au joystick : l’axe horizontal contrôle à la fois votre module et la caméra placée par défaut immédiatement derrière lui, selon ce que l’on qualifierait aujourd’hui de « vue à la troisième personne » (il est également possible de passer à une vue subjective via les options, accessibles à tout moment grâce à la touche Echap), tandis que l’axe vertical, lui, ne contrôle que la caméra – votre fameux « module », pour sa part, étant voué à avancer ou à sauter droit devant lui grâce au bouton du joystick.

De fait, le terrain est en quelque sorte « balisé » : placé directement sur le sol, le module ne fait rien d’autre qu’y glisser ; il faut l’amener sur une des plateformes faisant office de trampoline pour qu’il puisse commencer à rebondir sur place et à acquérir l’inertie pour démarrer une succession de sauts apte à le guider de plateforme en plateforme. Parfois, certains accès seront verrouillés et demanderont d’aller dénicher un cube qui fera en quelque sorte office de clef. Tout le reste prendra la forme d’une exploration, méthodique ou non, qui demandera de parvenir à vaincre chaque salle présentant, à sa façon, un petit casse-tête d’adresse. Et c’est tout.

On pourrait arguer que le concept est basique, pour ne pas dire primitif, mais c’est en fait précisément ce qui fait sa force : en déguisant ses quelques maigres polygones en expérience mystique au cadre et aux mécanismes dépouillés, Alpha Waves a le mérite de proposer une expérience à la jouabilité intuitive – ce qui était encore loin d’être une évidence pour un genre que le logiciel venait pour ainsi dire de créer – sans même imposer son rythme au joueur grâce à la pertinence du mode « Emotion », bon prétexte pour lâcher la pression du chronomètre et explorer le contenu du jeu à sa manière.

Il n’y a pas d’objets idiots à collectionner, pas d’étoiles à débusquer, pas de passages secrets à trouver, et cette « pureté » dans l’approche est certainement l’aspect du jeu qui a le mieux vieilli : seules demeurent la jouabilité et la latitude laissée au joueur, et c’est tant mieux. Ici, on n’a pas besoin de ré-explorer la même galerie pour la trentième fois à la recherche du machin vicieusement planqué qui va permettre de débloquer l’accès au niveau suivant où la sorcière Bidule va nous donner pour quête de collecter cent bitoniaux pour faire sa potion, et parfois, ça fait plaisir. Cette approche directe est d’ailleurs si efficace qu’on en vient à regretter que les développeurs aient eu la mauvaise idée d’ajouter des ennemis volants aux patterns impossibles à anticiper qui viennent compliquer la tâche du joueur en se mettant dans ses pattes au pire moment, ce qui aboutit très souvent à un retour à la case départ et à une bonne trentaine de secondes de manœuvres pour espérer revenir là où on en était – ça, sincèrement, on aurait pu s’en passer. Une petite maladresse qui rappelle à quel point tout restait à défricher en la matière – et à quel point l’équipe de développement s’en sera magnifiquement tirée.

Évidemment, il faudra également composer avec quelques petites contraintes techniques qui nous rappellent à quel point le matériel de l’époque n’était absolument pas pensé pour la 3D polygonale, avec des baisses de framerate dès qu’il y a trop de choses à l’écran (c’est à dire souvent), quelques imprécisions dans les masques de collision des plateformes et une ambiance sonore qui se limite à quelques bruitages et à un petit jingle à chaque fois qu’on franchit une porte pour quitter une salle – pas de musique pour accompagner l’action, donc.

Des broutilles, tant le jeu fonctionne précisément dans son essence ; non, il n’y a aucune fioriture, pas de vie à ramasser, pas de bonus, pas de chaussures pour aller plus vite ou de canon pour dégommer les monstres, aucune réelle variété dans l’action, mais c’est dans cette obsession bornée à ne pas se disperser que le titre parvient à être l’expérience qu’il prétendait offrir – une expérience parfaitement inscrite dans son époque, mais n’est-ce pas très exactement ce qu’on tend à chercher via le retrogaming ? Il y a quelque chose d’addictif, de presque hypnotique dans cet Alpha Waves, et rien que pour cela il mérite d’être redécouvert ne fut-ce qu’une heure ou deux – pour se souvenir d’une époque plus simple où moins, c’était plus et où le véritable plaisir était souvent de s’égarer dans un concept qui se suffisait à lui-même pendant le temps qu’on était prêt à lui consacrer. Une approche qui nous manque un peu.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20


Six ans avant Super Mario 64, il y avait déjà un jeu de plateforme intégralement en 3D temps réel, il était l’œuvre de l'équipe de Christophe de Dinechin et il s'intitulait Alpha Waves. Au-delà de l'aspect profondément visionnaire du concept, ce qui fait mouche est précisément sa simplicité : sauter de plateforme en plateforme afin de rejoindre une des sorties, tout en explorant un environnement tentaculaire de 256 salles. Tout n'est pas parfait dans le meilleur des mondes, la faute a un framerate inconstant, à un certain manque de précision et à quelques idées qui n'étaient bonnes que sur le papier (les ennemis...), mais il faut reconnaître que le programme a quelque chose de stupidement addictif et que son esthétique dépouillée aurait plutôt tendance aujourd'hui à procurer un petit pincement : celui du souvenir de cette époque où l'informatique parvenait encore régulièrement à surprendre et à faire rêver. Clairement une expérience à (re) découvrir tant elle se révèle à la fois singulière et familière.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un framerate qui dégringole quand il y a un peu trop de choses à l'écran
– Pas de musique durant la partie
– Des ennemis volants qui viennent plomber une action qui aurait déjà été largement assez exigeante sans eux

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Alpha Waves sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Alpha Waves développe un jeu lent, onctueux comme un mal de mer sur le Titanic. L’animation est si souple et les visions 3D si chavirantes que l’on ne peut qu’accrocher à cette partie toute en finesse, à cette prise de tête infernale. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°89, avril 1991, 15/20

Version PC (DOS)

Développeur : Frédéric Raynal
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquettes 3,5″ et 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Tandy/Pcjr
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien que techniquement un portage de la version Atari ST, Alpha Waves sur PC sera paru simultanément et aura même été envoyé à la plupart des rédactions plusieurs semaines, voire plusieurs mois avant la version ST. Assuré par Frédéric Raynal (qui aura déclaré par la suite que c’est le travail sur ce jeu qui l’aura poussé à employer la 3D pour Alone in the Dark), ce portage est sans surprise très proche de la version ST (certaines éditions présentaient même les deux versions du jeu sur la même disquette), ce qui signifie également que même en VGA, les graphismes restent quoi qu’il arrive en seize couleurs.

On notera néanmoins trois différences avec la version originale : du côté de la réalisation, la plus évidente est que le framerate est plus stable et infiniment plus fluide sur un PC AT (laissez le cœur en « auto » sous DOSBox), ce qui a un impact direct sur la jouabilité, d’autant que – deuxième différence – l’inertie est également légèrement moins prononcée dans cette version. Si toutes les options sont présentes à l’identique, on bénéficie ici d’un petit bonus absent de la version ST, et qui constitue la troisième et dernière différence : la présence d’un thème musical en jeu, qui permet de bénéficier d’une atmosphère agréable et légèrement planante. Mises bout-à-bout, ces nuances permettent à cette version PC de se hisser au-dessus de sa consœur dans tous les domaines, ce qui fait d’elle la meilleure façon, aujourd’hui, de découvrir le jeu.

NOTE FINALE : 16/20

Plus fluide, plus jouable et n’étant plus condamnée à se pratiquer dans un silence de mort, cette édition PC d’Alpha Waves reste à coup sûr la meilleure façon de découvrir un jeu toujours aussi efficace en dépit de – ou grâce à – sa simplicité. Si vous souhaitez découvrir le jeu aujourd’hui, commencez clairement par cette version.

Les avis de l’époque :

« Alpha Waves développe un principe ludique très simple. C’est la souplesse de son jeu, de ses animations 3D, qui créent l’ambiance et l’intérêt de la partie. On se prend très vite à se pencher en avant ou à se cabrer sur sa chaise, comme si cela allait influencer la trajectoire du module ! Après quelques heures de jeu, les professionnels lanceront leur engin dans des vols rapider (sic) et dangereux. C’est le frisson assuré ! »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Fabrice Decroix
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Mode graphique : OCS/ECS
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Autre passage indispensable pour Alpha Waves : l’Amiga qui, pour l’occasion, aura été la dernière machine servie. Assuré par Fabrice Decroix, ce portage s’inscrit lui aussi droit dans les clous de la version ST sans qu’on y retrouve les nuances ajoutées par la version PC : il n’y a donc plus de musique une fois en jeu, et le framerate est plus irrégulier et moins élevé que sur PC – assez équivalent à celui de la version originale. Sur un Amiga 1200, cette version se hisse pratiquement à la hauteur de la version PC, mais il faudra toujours composer sans la musique. On notera d’ailleurs que le thème de l’écran-titre, pour sa part, choisit d’adopter des sonorités électroniques assez agressives qui le rendent nettement moins planant que dans les autres versions, mais cela reste assez anecdotique. Pour le reste, rien n’a changé, et les amateurs de plateforme en 3D devraient trouver assez facilement leur compte ici.

NOTE FINALE : 15,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 16/20 (Amiga 1200 ou ultérieur)

Techniquement très proche de la version ST, cette itération Amiga d’Alpha Waves en reprend exactement les forces et les faiblesses – sauf sur un Amiga 1200, où le framerate et la jouabilité se rapprochent alors énormément de ceux de la version PC. La seule vraie nuance sera alors à aller chercher du côté de la musique, qui ne se fera jamais entendre au-delà de l’écran-titre dans ce portage, mais cela n’impacte qu’assez peu l’expérience.

Mortal Kombat Trilogy

Développeur : Midway Games, Inc.
Éditeur : Midway Home Entertainment, Inc.
Testé sur : PlayStationNintendo 64PC (DOS/Windows 9x)Saturn
Disponible sur : Windows
En vente sur : GOG.com (Windows)

La série Mortal Kombat (jusqu’à 2000) :

  1. Mortal Kombat (1992)
  2. Mortal Kombat II (1993)
  3. Mortal Kombat 3 (1995)
  4. Ultimate Mortal Kombat 3 (1995)
  5. Mortal Kombat Trilogy (1996)
  6. Mortal Kombat Mythologies : Sub-Zero (1997)
  7. Mortal Kombat 4 (1997)
  8. Mortal Kombat Gold (1999)
  9. Mortal Kombat : Special Forces (2000)

Version PlayStation

Date de sortie : 10 octobre 1996 (Amérique du Nord) – 1er décembre 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément) – 2 à 8 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’affirmation est un tabou absolu, elle se murmure en cachette lorsque personne n’écoute, et le plus ignare des responsables marketing sait qu’elle ne doit jamais ô grand jamais être prononcée en public et à voix haute, en vertu du principe qui veut qu’on évite soigneusement de se fâcher avec son unique source de revenus. Il n’empêche que n’importe quel éditeur sur la planète doit souvent pousser un soupir en la formulant intérieurement : quoi qu’on en dise, les joueurs sont quand même chiants.

Non mais c’est vrai, quoi : on essaie de leur faire plaisir, et ça ne se passe quasiment jamais comme on le voudrait ; quand on leur offre la même chose, ils veulent quelque chose de différent, quand on leur offre quelque chose de différent, ils voulaient la même chose, et même quand on leur offre quelque chose de différent alors qu’ils voulaient effectivement quelque chose de différent, les changements ne sont pas ceux qu’ils attendaient. Quelles divas ! Cette leçon, Midway aura eu l’occasion de l’apprendre à la dure avec un Mortal Kombat 3 qui se sera rapidement attiré les foudres d’une bonne partie de sa base pour des modifications jugées un peu trop radicales dans son roster. Après avoir corrigé le tir avec un Ultimate Mortal Kombat 3 qui aura fait taire une partie de la grogne des joueurs – mais pas toute –, quelqu’un aura fatalement dû arriver à la conclusion imparable : le meilleur moyen de ne vexer personne, c’est encore de ne rien enlever. La série Mortal Kombat avait beau avoir accumulé une impressionnante collection de personnages en trois épisodes et demi, après tout, pourquoi se fatiguer à opérer un ménage que personne ne semblait solliciter ? Eurêka. Ainsi naquit le concept de Mortal Kombat Trilogy : le contenu de trois jeux en un, avec (pratiquement) aucun sacrifice ; la matérialisation d’une totale absence de prise de risque. Mais hé, puisque apparemment les joueurs ne voulaient de toute façon pas qu’on en prenne…

Quoi que son titre puisse laisser penser, Mortal Kombat Trilogy n’est donc pas une compilation ; on pourrait davantage parler d’ « anthologie », c’est un opus reprenant des éléments des trois précédents, et sur le plan technique, c’est même une simple mise à jour de Mortal Kombat 3. En termes de contenu, le roster du jeu est d’ailleurs est pratiquement un manifeste des intentions de cet épisode, puisqu’il intègre littéralement tous les combattants, y compris les boss et les personnages cachés, de la saga, en les rendant tous jouables au passage.

Pour la première fois, les fans pourront donc prendre le contrôle de Rain ou de Noob Saibot qui disposent désormais de leur propres mouvements, combos et fatalités, et non seulement les grands oubliés d’Ultimate Mortal Kombat 3 comme Rayden ou Johnny Cage signent leur grand retour, mais il même possible d’incarner plusieurs personnages dans une version « classique » où ils reprennent alors les sprites et les coup de Mortal Kombat ou Mortal Kombat II. Histoire de compléter le tableau en beauté, un nouveau personnage secret nommé « Chameleon » fait son apparition – et, fidèle à la tradition de la série, celui-ci est grosso modo un color swap de Reptile dans sa version Mortal Kombat premier du nom ; il est d’ailleurs remplacé par une femme ninja (cette fois orthographiée « Kameleon ») dans la version Nintendo 64 du jeu. Les modes de jeu, pour leur part, sont repris directement d’Ultimate Mortal Kombat 3, avec notamment le très populaire 2 vs. 2, et le tournoi qui fait figure de mode solo est cette fois divisé en quatre niveaux de difficulté, qui viennent s’additionner aux cinq modes de difficulté accessibles dans le menu des options. Et oui, le titre est toujours ridiculement difficile dès le mode le plus simple au bout d’une poignée de combats.

Sur le plan technique, Mortal Kombat Trilogy est le premier épisode à ne pas avoir été développé en premier lieu pour les salles d’arcade, ce qui lui vaut d’avoir été développé avec la très populaire PlayStation en tête… laquelle n’était pas forcément la machine la mieux armée de sa génération pour la 2D. 32 bits oblige, je vous rassure tout de suite : le résultat est très solide, et même si la résolution est plus basse que sur les bornes des opus précédents, la réalisation graphique comme sonore fait largement le travail sans qu’on se sente roulé dans la farine.

Le vrai problème, comme souvent avec le genre, vient plutôt du support CD-ROM et de ses chargements intempestifs qui viennent casser le rythme d’une expérience spécifiquement pensée pour enchaîner des combats très courts. De façon assez intelligente, le menu des options du jeu vous autorise donc à supprimer un maximum d’écrans de transition, comme celui présentant les personnages avant un combat, histoire de réduire l’attente au maximum – mais il ne sera alors plus possible d’entrer les fameux « Mortal Kombat Kodes » en prélude d’un affrontement. Un compromis qui en vaut bien un autre : l’esthétique du jeu à base d’acteurs filmés ne décrochera plus la mâchoire de quiconque aujourd’hui, mais le jeu est parfaitement dans les clous de la saga – une constatation qui se confirme d’ailleurs à tous les autres niveaux.

En effet, le principal reproche que l’on pourra adresser à ce Mortal Kombat Trilogy constitue paradoxalement son principal argument de vente : c’est littéralement l’addition de tout ce que les joueurs ont aimé dans la saga… et de rien d’autre. Certes, on notera l’apparition d’une jauge « Agressor » en bas de l’écran, et qui rend un personnage temporairement plus puissant et plus rapide lorsqu’elle est remplie, ce qui se produit en multipliant les assauts sur l’adversaire – une prime à l’attaque qui risque une nouvelle fois de pénaliser les joueurs débutants qui n’auront pour ainsi dire droit à aucun traitement de faveur : il n’y a rien qui ressemble à un mode d’entraînement, pas de liste des coups spéciaux ni même une ligne pour détailler le principe de combos ; et non, aucune de ces informations n’est disponible dans le manuel, il fallait tout découvrir par soi-même ou via les magazines de l’époque.

Autant dire qu’à ce tarif, mieux valait avoir du temps devant soi pour maîtriser les trente-sept personnages jouables, déclinaisons comprises, du jeu ! Les combattants ont beau avoir été retravaillés et rééquilibrés, on se doute que certains s’en tirent mieux que d’autres et que la profusion de combattants interdit tout espoir d’un titre réellement équilibré. Comme un symbole, toutes les arènes du jeu sont directement recyclées des épisodes précédents, elles aussi, avec parfois quelques changements cosmétiques, et la plupart d’entre elles proviennent de Mortal Kombat II et Mortal Kombat 3 – trois des décors du premier épisode sont manquants. Mais autant dire les choses, en-dehors des très timides ajouts susmentionnés, le jeu ne comporte pour ainsi dire strictement rien de neuf ; c’est, d’un bout à l’autre, du pur recyclage… et c’est finalement exactement ce que les joueurs demandaient depuis un an.

Il en résulte un statut un peu particulier : Mortal Kombat Trilogy est à bien des niveaux le titre « ultime » de la saga… pour les fans dévoués des trois premiers opus, et personne d’autre. Les néophytes seront littéralement ensevelis sous les personnages en se voyant très rapidement punis par le manque d’accessibilité du titre – pour toutes les raisons évoquées plus haut, de la difficulté qui monte rapidement en flèche à l’absence d’informations sur les coups spéciaux et le système de jeu – ce qui est quand même un peu dommage pour une série dont l’un des principaux points forts était originellement de ne pas être excessivement technique, et qui semblait se réserver quatre ans plus tard à des convertis de longue date prêts à composer sans broncher avec un bouton pour la parade et un autre pour la course et des adversaires qui peuvent littéralement vous pilonner à coups de combos d’un bout à l’autre du match sans même vous laisser le temps de toucher le sol (je n’exagère pas : le jeu est connu pour ses bugs qui permettent aux joueurs sachant les exploiter de produire des combos infinis) !

Bref, l’épisode de la réconciliation n’est pas exactement celui de l’ouverture, et il ressemble davantage à un fan disc destiné à contenter une communauté cimentée par la trilogie originelle. C’était son but, c’est sa philosophie, et cela explique sans doute sa popularité auprès de joueurs qui étaient déjà acquis à la série depuis longtemps. Les autres risquent sans doute de se retrouver perdus devant tous ces colors swaps de ninja ; autant se le dire : pour qui n’aurait pas envie de consacrer beaucoup de temps au jeu, Mortal Kombat Trilogy est un club privé réservé à une certaine élite. Si vous n’en faites pas partie… eh bien, vous risquez de ne pas vous sentir à votre place, et de déserter les lieux plus vite que vous ne le pensiez. Si le jeu n’en vaut pas la chandelle à vos yeux, le plus simple est probablement de découvrir la série via ses épisodes les plus récents – Mortal Kombat 11 ou le mal nommé Mortal Kombat 1 en tête. Sincèrement, personne ne vous en voudra.

Vidéo – Combat : Rayden vs. Reptile :

NOTE FINALE : 16,5/20

Pour se réconcilier avec des fans qui n'avaient pas forcément goûté aux divers choix opérés pour Mortal Kombat 3 et Ultimate Mortal Kombat 3, Midway Games aura choisi la solution de facilité : plus de coupes, plus de dissensions, on réintègre (pratiquement) tout le contenu des trois premiers opus et on emballe ! Le résultat a certes l'avantage de présenter un des rosters les plus impressionnants de la période, avec plus d'une trentaine de personnages jouables, mais il a aussi la faiblesse de recycler plus qu'il ne créé, et de sentir au moins autant le réchauffé que l'édition définitive. Si les fans de la licence auront de quoi se frotter les mains, heureux de pouvoir retrouver absolument tous les combattants qu'ils ont aimés, les néophytes se sentiront sans doute un peu perdus face à une difficulté toujours aussi immonde et une accessibilité qui n'a pas progressé d'un pouce. Un titre de connaisseurs, mais pas forcément la meilleure porte d'entrée dans l'univers de la saga.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une difficulté toujours aussi mal réglée
– Des temps de chargement à profusion
– Un mode entraînement ? Quelqu'un ?
– Très peu de nouveautés

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Mortal Kombat Trilogy sur un écran cathodique :

Version Nintendo 64

Développeur : Midway Games, Inc.
Éditeur : Williams Entertainment, Inc. (Amérique du Nord) – GT Interactive Software Corp. (Europe)
Date de sortie : 14 novembre 1996 (Amérique du Nord) – 14 mars 1997 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément) – 2 à 8 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 100Mb
Controller Pak supporté

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À l’approche de la fin du millénaire, on pouvait commencer à s’attendre à trouver des versions relativement proches d’un jeu d’une machine à l’autre – pour ne pas dire à des portages pixel perfect, surtout en ce qui concernait des jeux en 2D. Mais les nuances existaient encore bel et bien, comme le prouve cette version Nintendo 64 de Mortal Kombat Trilogy. La première surprise n’est d’ailleurs pas la meilleure : le roster a rétréci en passant sur Cartouche. Sub-Zero, Goro et Kintaro ne sont plus jouables, les versions « MKI » et « MKII » de Raiden, Kano, Jax et Kung Lao ne sont plus accessibles, même via un cheat code, et Shaoh Khan et Motaro sont désormais à débloquer au lieu d’être disponibles d’office. Un choix un peu étrange, quand on sait que le nombre de personnages jouable constituait le principal point fort du jeu, mais c’est à prendre ou à laisser. On constate également de nombreuses erreurs dans l’attribution des voix des personnages lors des coups, et la disparition des décors Kahn’s Arena de Mortal Kombat II et The Bank de Mortal Kombat 3 – un décor exclusif fait néanmoins son apparition.

Cela commence mine de rien à faire beaucoup, alors cette version introduit également une petite nouveauté : un mode trois contre trois, à la King of Fighters, qui permettra de prolonger un peu le plaisir pour les joueurs maîtrisant plusieurs personnages. Au rang des meilleures nouvelles, la réalisation est solide : on ne compose plus avec l’effet de dithering du traitement de la couleur de la PlayStation, par exemple. Surtout, plus question ici de chercher à couper tous les écrans de transition, et pour cause : qui dit support cartouche dit qu’on ne doit plus composer avec des temps de chargement à rallonge, ce qui est un gain de confort indéniable. En revanche, on ne peut pas dire que le pad de la Nintendo 64 soit le mieux adapté pour les deux de ce type, et dans l’ensemble on peut comprendre qu’une partie de la presse de l’époque se soit étranglée devant le fait que cette version 64 bits soit au final plus faible que celles parues sur des machines théoriquement deux fois moins puissantes (ce qu’elles n’étaient pas). La concurrence n’étant pas féroce en la matière sur la console de Nintendo, les fans pourront rapidement arrêter leur choix, mais ceux qui voudraient la version ultime du jeu risque de ne pas goûter les nombreuses coupes de cette itération.

Ça bouge bien, mais on sent que la console pouvait encore faire bien mieux

NOTE FINALE : 16/20

Que l’on en attribue la responsabilité au support cartouche ou simplement à la fainéantise de Midway Games, le fait est que Mortal Kombat Trilogy sur Nintendo 64 doit composer avec des coupes qui ne s’imposaient pas et qui ne sont que très partiellement compensées par la présence d’un mode inédit et par l’absence de temps de chargement. Un bon rival à Killer Instinct Gold sur la même console, mais sans doute pas la version du jeu à privilégier de nos jours.

Version PC (DOS/Windows 9x)

Développeur : Point of View, Inc.
Éditeur : GT Interactive Software Corp.
Date de sortie : Décembre 1997
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément)* – 2 à 8 (à tour de rôle)
*Jeu par réseau local supporté (version Windows 9x uniquement)
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé
Contrôleurs : Clavier, Gravis Gamepad, joypad*, joystick
*Version Windows 9x uniquement
Version testée : Version CD-ROM testée sous Windows
Configuration minimale : Version DOS :
Processeur : Intel Pentium – OS : PC/MS-DOS 4.0 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Mode graphique supporté : VGA
Carte son supportée : Sound Blaster

Version Windows 9X :
Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 16Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Fin 1997, on ne peut pas dire que les jeux de combat constituaient le centre des préoccupations de la plupart des joueurs PC – surtout quand tout ce qui était en 2D semblait déjà furieusement has been par rapport à ce que pouvaient afficher leurs cartes accélératrices 3D dernier cri. Ce qui explique pourquoi Mortal Kombat Trilogy sera arrivé sur l’ordinateur en trainant les pieds… et sous la forme d’un simple portage de la version PlayStation, ce qui était quand même un peu frustrant quand on se souvient que les machines de l’époque étaient déjà tout à fait capables d’afficher une résolution bien plus élevée que le 320×240 du titre, et surtout en plus de 256 couleurs – ce qui n’est pas le cas ici.

Passé cette déception, la bonne nouvelle est que le titre tourne comme un charme, qu’il n’y a plus trace du moindre temps de chargement sur un système puissant, et que le titre reconnait nativement les joypads dans sa version Windows 9x… qui est justement celle qui est en vente à l’heure actuelle plutôt que la version DOS, grâce à un petit programme appelé dxcfg apparemment créée par l’équipe de GOG et qui permet au jeu de tourner comme un charme sous Windows 10 sans sacrifier la moindre fonction ni avoir à se battre avec une machine virtuelle. Conséquence : vous pouvez brancher votre manette de Xbox series, ça ne posera aucun problème, et cela permet au programme d’offrir une expérience optimale – dommage que la réalisation ne se hisse pas à la hauteur de celle de la borne d’arcade d’Ultimate Mortal Kombat 3 et que les quelques nouveautés de la version Nintendo 64 n’aient pas fait le trajet jusqu’à cette itération, car pour le reste, c’est un sans faute.

NOTE FINALE : 16,5/20

Un peu paresseuse sur le plan de la réalisation – où elle ne parvient même pas à faire tout à fait aussi bien que la version PlayStation dont elle est pourtant directement tirée – la version PC de Mortal Kombat Trilogy est heureusement totalement irréprochable sur le plan de la jouabilité, et la disparition des temps de chargement constitue un bonus suffisamment bienvenue pour faire de cette version la meilleure de toutes d’une (très) courte tête. Un portage plus ambitieux aurait cependant pu faire encore mieux, dommage.

Version Saturn

Développeur : Point of View, Inc.
Éditeur : GT Interactive Software Corp. (Europe) – Midway Home Entertainment, Inc. (Amérique du Nord)
Date de sortie : 11 avril 1997 (Europe) – 8 août 1997 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément) – 2 à 8 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour la version Saturn, on retrouve à la barre l’équipe qui allait se charger la même année de la conversion sur PC ; on ne sera donc pas surpris de se retrouver, une fois de plus, face à un portage de la version PlayStation avec un contenu exactement identique.

Les rares nuances seront donc plutôt à aller chercher, une nouvelle fois, du côté de la technique : comme souvent avec la console de SEGA, les quelques effets de transparence (les ombre et les barres de vie, principalement) ont laissé la place à un dithering pas très esthétique, mais pour le reste les graphismes sont les mêmes que ceux de la version PC, ce qui signifie que les couleurs ne font pas apparaître le même effet de trame que sur PlayStation. Les chargements sont également légèrement plus rapides, ce qui compte dans un jeu où on va en rencontrer souvent. Pour le reste, la fluidité est irréprochable et la jouabilité inattaquable – autant dire que ceux qui voudraient du Mortal Kombat sur leur Saturn seraient bien inspirés de commencer directement par ici.

NOTE FINALE : 16,5/20

À quelques minuscules fioritures près, Mortal Kombat Trilogy sur Saturn fait globalement jeu égal avec une version PlayStation qui ne le devance que du côté des effets de transparence. Pour ce qui est du contenu comme de celui de la jouabilité, aucun reproche à faire, et les fans de la licence peuvent découvrir cette version sans aucun regret.

Das Boot : German U-Boat Simulation

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Testé sur : PC (DOS)Amiga
Disponible sur : Windows
Présent dans la compilation : Megafortress / Das Boot / Aces of the Great War (1992 – PC (DOS))
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on aura eu l’occasion de le mentionner par ailleurs (au hasard ici), la toute fin des années 80 aura correspondu à une timide tentative de démocratisation de la part d’un genre extrêmement exigeant par nature : la simulation. Accolade avait contribué à montrer la voie, mais celle-ci était finalement tracée d’avance, selon le bon vieux précepte qui veut que « toucher un public plus large » = « augmenter les chances de vendre le jeu » = « brouzoufs » – les simulateurs « allégés » à la Ace of Aces ne constituaient après tout pas une nouveauté en soi, disons simplement que l’on pouvait attribuer leur simplicité davantage à des contraintes techniques qu’à un réel choix de game design.

Mais tiens, puisque l’on évoque Ace of Aces, figurez-vous que le jeu avait justement déjà été distribué par Accolade, et que son équipe de développement se nommait alors Artech. Quatre ans plus tard, celle-ci n’avait visiblement pas gonflé que son nom pour devenir Artech Digital Entertainments, mais aussi ses effectifs puisqu’en parallèle de Blue Max, elle travaillait également sur un autre type de simulateur, lui aussi très en vogue à l’époque : le jeu de sous-marins. Terrain plus miné qu’on pourrait le penser, puisque déjà largement occupé par des références comme Silent Service II ou Wolf Pack – d’ailleurs sortis eux aussi en 1990 –, élevant de fait le seuil d’exigence de joueurs pas forcément décidés à acheter trois simulateurs d’U-Boot en un an. Alors histoire d’augmenter les chances, autant en profiter pour avoir recours à un licence célèbre ; de toute évidence, celle d’À la poursuite d’Octobre Rouge était déjà prise, alors il aura fallu aller chercher un peu plus loin avec le long-métrage Le Bateau (titre original : Das Boot) de Wolfgang Petersen, lui-même tiré du livre de Lothar-Günther Buchheim romançant des missions que l’auteur avait vécu pendant la seconde guerre mondiale. Et voilà comment on se retrouve avec Das Boot, un jeu… qui entretient en fait pour seul lien avec le film et le roman de se dérouler dans un sous-marin.

En vertu de la philosophie visant à offrir aux joueurs impatients un peu plus d’action effrénée et un peu moins de réglages techniques pointus proprement incompréhensibles aux malheureux n’ayant pas encore compulsé les 350 pages de manuel écrit petit, le titre d’Artech commence par proposer de courtes missions d’entraînement qui ont l’avantage de faire également office de mini-jeux pour les capitaines pressés n’ayant pas envie d’écumer les océans pendant un quart d’heure à la recherche d’un convoi allié (nous aurons l’occasion d’y revenir).

On pourra donc apprécier ici la variété des séquences : tir sur avions de chasse et bombardiers depuis le canon anti-aérien placé sur le pont, tir sur cibles marines avec un canon lourd, tir de torpille depuis la surface ou sous l’eau, en visant alors avec le périscope plutôt qu’avec les jumelles, combat sous-marin entre submersibles, champ de mines, phase d’évitement de charges explosives, etc. De quoi constater que la jouabilité de ces scènes est très simple – on vise avec les flèches, on tire avec Espace –, que la 3D est particulièrement efficace pour un titre de 1990 (les effets volumétriques visibles sous l’eau, particulièrement novateurs pour la période, avaient décroché la mâchoire de la presse de l’époque), et que certaines d’entre elles privilégient d’ailleurs la poudre aux yeux au détriment de la profondeur (sans mauvais jeu de mot) au point de s’avérer très limitées, en particulier du côté des phases sous-marines. Mais au moins, le ton est donné : les joueurs qui voudraient de l’action pourront en avoir, et ils pourront même en avoir tout de suite.

Cependant, comme on peut s’en douter, le principe même de la simulation de sous-marin ne repose pas exactement, d’ordinaire, sur le fait d’aller canarder des avions ou des destroyers depuis le pont de son submersible. Das Boot propose donc fort logiquement cinq missions plus conventionnelles et surtout beaucoup plus consistantes, aux objectifs relativement variés mais qui tourneront principalement autour du fait de patrouiller, de repérer des convois et leur escorte et de s’efforcer de couler le tout avant de repartir en un seul morceau. L’occasion de configurer de nombreux réglages pour s’approcher (ou non) d’une vraie simulation historique, et de goûter enfin à tous les postes du sous-marin, dans un mode qui devient alors immédiatement plus complexe.

Un exemple valant mieux qu’un long discours, imaginons un début de mission typique vous plaçant au milieu de l’océan. Même si vous avez déjà reçu des objectifs en prélude du démarrage, il pourrait être intéressant de commencer par passer par la station radio, d’où vous pourrez recevoir les messages du commandement – à condition de les passer par un des trois systèmes de décryptage avant de les comprendre, ce qui ne nécessite jamais que d’appuyer sur la touche correspondante. Vous serez d’ailleurs régulièrement invité à faire des rapports ou à solliciter des ordres additionnels, ce qui nécessitera donc d’émettre à votre tour – en n’oubliant pas, naturellement, d’opter vous aussi pour une transmission cryptée, sans quoi vous risqueriez rapidement de recevoir un message goguenard de la flotte ennemie vous remerciant de communiquer votre position en clair avant d’envoyer son aviation se débarrasser de vous ! Ceci dit, il pourra également arriver que vous interceptiez une communication qui ne vous était pas destinée, et que vous parveniez à votre tour à la décrypter pour obtenir des informations cruciales sur les navires adverses – bref, un système original assez intelligemment intégré sans se révéler inutilement opaque.

On pourra d’ailleurs regretter que l’interface, dans son ensemble, échoue à maintenir ce seuil d’accessibilité : en effet, si tous les postes et les raccourcis permettant d’y accéder sont clairement affichés en permanence au bas de l’écran, une large partie des fonctions indispensables, elle, n’est accessible que via des raccourcis qui ne sont indiqués nulle part ailleurs que dans le manuel.

Imaginons par exemple que vous ayez envie de repérer un convoi ennemi, ce qui est quand même la base : on se doute que se contenter de rester à la surface en utilisant les jumelles n’est pas exactement la méthode optimale, mais c’est la seule accessible par le menu. Pour toutes les autres, il va falloir faire chauffer le clavier, qu’il s’agisse d’utiliser l’hydrophone (Alt + H), le détecteur radio (Alt + R), le radar de détection (Alt + B) ou le radar aérien (Alt + O). On notera également des fonctions permettant de gagner un temps considérable dans le feu de l’action, comme celle vous permettant de plonger directement à la profondeur idéale pour utiliser le périscope (Alt + P), celle permettant de remonter à la surface (Alt + S), ou encore celle permettant de pivoter le sous-marin dans la direction que vous êtes en train d’observer (Alt + F). Sans oublier celle qui pourra vous éviter de dégommer bêtement un navire de votre propre camp en prenant le temps de demander à vos collègues d’identifier une cible (Alt +I).

Ce recours systématique à des raccourcis à noter ou à apprendre par cœur est d’autant plus incohérent que, en dépit de ses meilleurs efforts, Das Boot n’est pas vraiment un titre réaliste. Déjà parce qu’il est difficile de penser que la marine allemande ait suffisamment confiance en ses U-Boots pour envoyer un seul d’entre eux dégommer non seulement un convoi, mais aussi son escorte de destroyers, un porte-avions au milieu, et même toute une division aérienne simplement avec deux canons et une vingtaine de torpilles !

On pourra d’ailleurs regretter que tout l’aspect de chasse « en meute » introduit par Wolf Pack n’ait pas fait le trajet jusqu’ici : votre sous-marin devra toujours tout faire tout seul, même quand il y a des alliés dans les parages, ce qui est aussi grotesque qu’irritant. Ensuite, si on comprend que l’idée est précisément de nous faire incarner tous les membres d’équipage, la valse permanente d’un poste à l’autre pour accéder à des fonctions qui ne sont accessibles que via un menu en particulier est aussi contraignante qu’elle est contre-intuitive : pourquoi ne peut-on désigner le cap et la vitesse du submersible que lorsqu’on est sur le pont et en surface, par exemple ? Quel est l’intérêt de nous doter de cartes si celles-ci ne montrent, quatre fois sur cinq, qu’une immense zone bleue ? Pourquoi doter tout le jeu d’un pendant arcade assumé avec des scènes d’action irréalistes et des armes qui ne s’enraillent jamais… mais en limitant les munitions, obligeant le joueur à passer dix bonnes minutes à se désengager et à parcourir la moitié de la carte afin d’aller rejoindre un navire de ravitaillement avant de repasser dix minutes à retourner sur place pour finir le travail ? Bref, est-on face à une simulation, à une « simulaction », à un jeu d’action maladroitement délayé pour se faire passer pour une simulation ? La question reste ouverte.

Elle est d’autant plus pertinente que Das Boot offre réellement de bons moments : il peut en effet être particulièrement satisfaisant de traquer les communications radio adverses pour essayer de localiser un convoi, d’en identifier les premiers éléments après une observation aux jumelles, et de passer en plongée pour faire pleuvoir la mort avec des torpilles d’autant plus faciles à tirer qu’il n’est même pas nécessaire de pivoter le sous-marin dans la direction visée au périscope – et même si c’était le cas, la commande Alt + F fait tourner instantanément votre submersible, comme s’il se téléportait. Mais c’est comme si, à trop hésiter entre la simulation et l’arcade, le jeu ne savait jamais réellement où placer ses curseurs et proposait au final un jeu d’action avec le rythme d’un simulateur – alors qu’il aurait mieux valu faire exactement l’inverse.

Après de longues minutes de traque, les affrontements se limitent à des combats brouillons et totalement irréalistes, et si on est souvent très heureux de couler une dizaine de navires et d’abattre autant d’avions, l’idée de passer dix minutes à glander pour ravitailler risque de pousser bien des joueurs à écourter une mission sitôt le premier assaut fini. Les scènes de tir sur avion faisant davantage penser, pour leur part, à une sorte de brouillon primitif de titres à la Incoming, on se retrouve au final avec une expérience déséquilibrée qui se montre agréable à jouer par séquences mais qui échoue à l’être sur la durée faute de cohésion dans le rythme – le type même de logiciel qu’on prend plaisir à lancer dix minutes de temps à autres, mais dont on ne finit jamais la moindre mission en dépit d’un contenu objectivement rachitique. Les amateurs de simulation lui préfèreront les références évoquées plus tôt, et les amateurs d’action risquent d’en faire le tour en quelques minutes ; ce qu’on appelle un entre-deux maladroit, qui explique peut-être que le titre soit si peu cité de nos jours. Comme quoi, ce n’est pas si facile que cela, en fin de compte, de viser un large public…

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


Tout comme Blue Max : Aces of the Great War, développé par le même studio à la même période, Das Boot : German U-Boat Simulation entend entraîner l'austère simulation de sous-marin vers des eaux un peu plus accessibles au commun des mortels. Il n'y parvient certes qu'en partie, tanguant trop souvent entre des séquences de tir trop « arcade » et des séquences de navigation trop longues inutilement alourdies de changements de poste inutiles sans jamais s'approcher de la profondeur d'un Wolf Pack ou d'un Silent Service II, mais cela ne veut pas dire que l'expérience est désagréable – disons juste que l'aspect « simulaction » irréaliste se prête finalement assez mal à une chasse reposant sur la patience et sur l'observation silencieuse, et que c'est précisément l'aspect simplifié du jeu qui finit rapidement par composer sa principale limite. Il y a malgré tout largement matière à passer quelques heures à tenter de vaincre les cinq missions du programme, et même à être heureux d'y revenir de temps à autres, mais au final, il manque encore un petit quelque chose au titre pour réellement s'approcher de la cour des grands.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Énormément de raccourcis à mémoriser pour espérer accéder à des fonctions essentielles
– Des séquences d'action très limitées quel que soit le niveau de réalisme...
– ...et dans l'ensemble, un aspect « simulation » qui peine souvent à être crédible
– Seulement cinq missions
– Une gestion très fastidieuse du ravitaillement

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Das Boot sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« La simulation s’avère […] assez simple, peu d’options étant accessibles aux différents postes de votre U-Boot, ce qui risque de décevoir ceux qui sont passionnés par le réalisme ou la complexité des simulateurs. Ceux qui préfèrent l’action vont par contre se régaler ! »

Didier Latil, Génération 4 n°27, novembre 1990, 85%

« Les effets de couleur de ces vues sous-marines sont extraordinaires. On distingue à peine la silhouette du submersible ennemi qui s’approche de vous, prêt à larguer quelques salves. Toute la rédaction est restée muette d’admiration devant ce plan graphique… C’est dire ! […] Das Boot est un programme que vous devez posséder, ne serait-ce que pour ses graphismes et son animation, pour l’ambiance qu’il développe, une grande première sur PC. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc. (Amérique du Nord) – Mindscape (UK) Limited (Europe)
Date de sortie : Mai 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme Blue Max, Das Boot aura été porté sur Amiga quelques mois après la sortie de la version PC, et comme Blue Max, il aura hélas laissé quelques plumes au passage. Pas du côté du contenu, bien sûr – ce qui est une bonne chose, car celui-ci n’était déjà pas énorme à la base – mais encore une fois, les graphismes et surtout le framerate souffrent beaucoup du passage d’un hardware à l’autre.

La palette de couleurs a bien évidemment rétréci au lavage ; ce n’est pas hideux, mais disons simplement que les dégradés du ciel ne font pas vraiment illusion, et que les effets de profondeur qui avaient tant décroché la mâchoire des journalistes de Tilt ne sont plus vraiment au programme ici. Ce ne serait pas une grosse perte si le tout n’affichait pas une nouvelle fois un framerate dépassant péniblement les cinq images par seconde pendant l’essentiel de la partie sur une configuration d’époque : bon courage pour parvenir à toucher un avion dans cette version. C’est fort heureusement moins pénalisant au moment de viser un navire ou un sous-marin avec une torpille, ces séquences se jouant rarement au dixième de seconde près, mais on dira simplement que cela ne rend pas service à un jeu qui étalait déjà quelques problèmes de rythme sur PC. Sans être idéales, les choses sont une nouvelle fois meilleures sur un Amiga 1200, où on peut alors espérer approcher les quinze images par seconde dans le feu de l’action. Rien de dramatique, mais le jeu reste indéniablement plus agréable à découvrir sur PC.

NOTE FINALE : 12/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

Comme son alter ego Aces of the Great War, Das Boot souffre sur Amiga d’un moteur un peu trop puissant pour le hardware de l’époque, qui rend les parties « arcade » plus fastidieuses qu’amusantes. Si les choses s’améliorent sur un Amiga 1200, la réalisation graphique n’en reste pas moins inférieure, et dans l’ensemble on n’a tout simplement aucune raison de lancer ce portage dès l’instant où on a accès à la version PC.

New York Warriors

Développeur : Synergistic Software, Inc.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Titre original : NY Warriors (États-Unis)
Testé sur : AmigaAmstrad CPCZX SpectrumPC (DOS)

Version Amiga

Date de sortie : Mai 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
*Existe en version optimisée pour 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’un des (nombreux) charmes du retrogaming et de l’indissociable nostalgie qui l’accompagne, c’est cette évocation récurrente et en partie idéalisée d’une époque « plus simple ». Tout est toujours plus simple, dans les souvenirs : les problèmes de l’enfance sont amortis par un cadre établi où les adultes avaient toujours toutes les réponses et où toutes les crises existentielles avaient généralement le temps d’être résolues pour l’heure du goûter. Le monde était chargé d’espoir, l’avenir vu par Retour vers le futur II avait l’air cool avec ses voitures volantes, nos parents étaient jeunes et fringants, notre premier amour n’avait pas encore eu trois enfants avec ce commercial rencontré à son bureau, et puis surtout : les jeux se jouaient avec deux boutons au maximum – époque bénie.

Pour les développeurs aussi, les temps étaient plus simples, particulièrement en Europe : des termes comme « lore », « narrative design » ou « game design » ne voulaient rien dire, et à la façon des chansonniers du début du siècle qui écrivaient régulièrement de nouvelles chansons sur l’air d’une ancienne, créer un jeu revenait souvent par commencer par décider lequel on allait plagier – ne rigolez pas, c’est comme ça que naissaient, et naissent encore, les différents genres. Un de ceux qui étaient encore particulièrement en vogue à la fin des années 80 était celui du Commando-like : le titre de Capcom, en dépit de – ou grâce à – son apparente simplicité, n’avait pas tardé à engendrer une longue série de clones, d’Ikari Warriors à Guerrilla War en passant par Heavy Barrel, Secret Command ou MERCS, pour n’en citer qu’une infime poignée, et même si le concept avait fini par parvenir à s’éloigner de la référence obligée à Rambo lâché dans la jungle avec des Smash T.V. ou des Alien Syndrome, l’originalité n’était que rarement de mise tant on n’en avait cure, au fond. On voulait des soldats en train de tout péter dans des niveaux en vue de dessus consistant très largement en un défilement vertical imposé, ça marchait très bien, et c’était là l’intégralité du cahier des charges de titres comme New York Warriors – et personne ne s’en plaignait. Des temps plus simples, vous dis-je.

Par exemple, pour le scénario, autant aller puiser directement dans la production cinématographique des années 80, voire des années 70. Rambo et sa jungle commençaient à être un peu surexploités ? Pourquoi ne pas aller chercher du côté de l’une des grandes peurs réactionnaires de la période, en mettant en scène une ville de New York livrée à la criminalité, passée entre les mains de gangs meurtriers – au point que l’un d’entre eux a carrément mis la main on-ne-sait-comment sur une ogive nucléaire ?

Allez hop, une louche des Guerriers de la nuit, une pincée de New York 1997, et voilà un prétexte comme un autre pour aller sauver la civilisation du futur du passé (tous ces jeux situaient toujours leur action « futuriste » à la fin des années 90 ou au début des années 2000, soit il y a déjà 25 ans… « temps plus simples », tout ça…) en tirant sur tout ce qui bouge. Une ville, un soldat (ou deux, si vous avez un ami), des centaines de méchants à occire : pourquoi se fatiguer à concevoir quelque chose de plus complexe que ça ? Une idée originale ? Mais pourquoi faire ? Les gens voulaient du Commando, on leur vendait du Commando – on n’allait quand même pas prendre le risque d’y ajouter un truc dont ils ne voudraient pas, non ? On tient donc là toute la substantifique moelle du titre de Synergistic Software : c’est juste un autre Commando-like, et ça ne fait jamais semblant de chercher à être autre chose. Et quelque part, rien que pour cette rafraichissante honnêteté, on aurait presque envie de le remercier – et tant pis si une partie de la presse de l’époque l’avait brutalement congédié sans même lui laisser une chance précisément parce qu’il n’était qu’un titre de plus au sommet d’une très, très longue pile.

À défaut d’être original, la vérité est qu’on attend surtout de New York Warriors qu’il soit efficace – tant qu’on s’amuse, le reste est secondaire, et puis les surprises ça ne fonctionne jamais qu’une seule fois. Sur le papier, on est en terrain plus-que-connu : avancer vers le haut de l’écran, tirer sur tout ce qui bouge, collecter les quelques armes offrant des tirs plus puissants et plus couvrants pendant un certain temps – autant dire la base.

Seule minime variation : quitte à également proposer un défilement horizontal, le titre offre aussi une (petite) composante exploration en laissant le joueur s’enfoncer dans des ruelles ou des couloirs qui peuvent se terminer en impasse et l’obliger à faire demi-tour pour trouver un autre chemin. Juste de quoi récompenser un peu la connaissance du niveau sans pour autant le transformer en fastidieux labyrinthe : un compromis sensé, sur le plan ludique. On remarque d’ailleurs rapidement que le logiciel américain fait visiblement le choix de s’intéresser à des notions totalement désertées par la plupart de ses collègues européens. Au hasard, l’équilibrage : non seulement il est possible de choisir son niveau de difficulté parmi quatre – chose encore extrêmement rare au sein des jeux d’action sur ordinateur à l’époque – mais on observe même une forme de progression d’un niveau à l’autre : lors des premières zones, les ennemis ne tirent jamais en diagonale, leurs projectiles sont plus lents, etc. On s’approcherait presque d’une notion de – j’ose à peine le dire – game design. Et ça, mine de rien, ça fait une grosse différence au milieu de la ludothèque de l’Amiga.

De fait, New York Warriors est un très bon exemple de jeu qui n’invente rien et ne cherche même pas à faire semblant d’avoir inventé quelque chose mais qui se débrouille relativement bien dans ce qu’il a choisi de faire. Certes, on ne peut pas dire que les environnements urbains du jeu transpirent la personnalité, mais les ennemis représentés d’une façon « cartoon » ont une certaine personnalité, le défilement est fluide, l’action est nerveuse et ne connait pratiquement aucun ralentissement alors que ça pète dans tous les sens, et la difficulté a même le culot d’être surmontable lorsqu’on joue dans les modes inférieurs.

Non seulement on s’amuse, mais on s’amuse même davantage que sur beaucoup de bornes d’arcade incroyablement frustrantes de la période, et le fait que le jeu s’efforce de proposer une jouabilité cohérente la majeure partie du temps plutôt que de se contenter d’empiler les ennemis par dizaines (même si cela lui arrive aussi, on ne va pas se mentir) fait quand même une grosse différence. Un peu à la manière de Gain Ground, on réalise fréquemment que prendre le temps de choisir son angle d’attaque plutôt que de foncer tout droit permet d’obtenir de très bons résultats, et qu’on n’est pas face à une de ces centaines de logiciels qui pullulaient alors et qui se contentait de placer la difficulté à fond pour que jamais personne ne parvienne à atteindre ne fut-ce que le niveau deux sous prétexte que ça faisait « arcade ». New York Warriors est un jeu qui respecte ses joueurs. Et étant donné à quel point c’est rare sur Amiga, cela mériterait presque une statue. Vous voulez vous éclater, seul ou à deux, avec un joystick à un bouton, un peu d’adrénaline et vingt minutes à tuer ? Alors laissez-lui une chance. Qui sait, vous découvrirez peut-être que vous étiez passé à côté d’un bon jeu que vous ne connaissiez pas.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14/20

Il n'aura peut-être pas inscrit son nom dans la légende, mais New York Warriors n'en est pas moins un des meilleurs Commando-like de la ludothèque de l'Amiga. En choisissant de ne jamais perdre de vue des éléments trop souvent totalement délaissés par la production de l'époque – notamment le fun, le paramétrage de la difficulté et l'équilibrage –, le titre de Synergistic Software parvient à offrir exactement ce qu'on venait chercher : de l'action nerveuse, suffisamment de variété pour avoir envie de voir la suite, un défilement fluide et la possibilité de s'éclater à deux. Alors certes, on aurait pu rêver que les curseurs soient placés encore un peu plus haut : un peu plus d'idées, un peu plus d'ennemis, un peu plus de surprises, un peu plus de folie – mais pour ce qui est de se défouler vingt minutes, ça fait parfaitement le café. Et parfois, c'est tout ce qu'on demande. À découvrir.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une action souvent confuse, surtout dans les niveaux de difficulté supérieurs
– Pas l'ombre d'une idée neuve
– Un certain manque de variété dans les environnements

Bonus – Ce à quoi peut ressembler New York Warriors sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« New York Warriors n’apporte rien de vraiment neuf. Mais au sein de la ludothèque micro, il se place en bonne position. Un jeu riche, graphiquement très soigné et difficile à vaincre. À voir ! »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 15/20

Version Amstrad CPC

Développeur : The Big Red Software Company Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko*
*Existe en version optimisée pour 128ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1990, un utilisateur de CPC devait souvent se contenter de petites joies simples, comme par exemple ne pas se retrouver avec un portage sur son ordinateur qui ne soit qu’une conversion pixel perfect de la version ZX Spectrum. À ce niveau, l’équipe de Big Red Software Company a accompli l’essentiel : même s’il est évident que les deux adaptations ont été réalisées dans le même moule, au moins le jeu tire-t-il un minimum parti des capacités graphiques de la machine d’Amstrad. Alors certes, la fenêtre de jeu est minuscule, ce qui a un impact sur l’action : on a rarement plus de trois adversaires à l’écran, ce qui est normal vu qu’on ne pourrait pas en faire tenir plus.

Cela tend à rendre le jeu beaucoup plus simple au début, où les premiers écrans traversés sont pour ainsi dire vides, mais les choses se compliquent dès l’instant où ça canarde dans tous les coins, car alors difficile d’anticiper quoi que ce soit avec notre personnage énorme coincé au milieu d’un timbre-poste… éventuellement avec un ami, car il est toujours possible de jouer à deux. La musique, un brin répétitive, est réservée aux 6128, faute de quoi il faudra se contenter des bruitages. Comme on peut s’en douter, toutes ces contraintes font qu’on a perdu pas mal de choses depuis la version Amiga, mais l’expérience n’en est pas déplaisante pour autant, disons juste encore un peu moins lisible et reposant davantage sur la mémoire. On remarquera d’ailleurs qu’on ne commence plus la partie qu’avec trois vie, désormais, et qu’il n’y a plus de choix de la difficulté. On est plus proche, en termes de rythme, d’un Secret Command, mais cela reste un titre solide à l’échelle du CPC. Sans doute pas de quoi y consacrer plus de dix minutes de temps à autres, surtout à l’heure actuelle, mais pour se défouler le temps de la pause café, ça fait parfaitement le travail.

NOTE FINALE : 11/20

Bien évidemment, New York Warriors sur CPC aura dû composer avec de nombreux sacrifices, notamment au niveau de la taille de la fenêtre de jeu qui donne un peu l’impression de vivre dans un 6M² à Paris. Néanmoins, le cœur de l’expérience a été plutôt bien préservé, avec une action qui reste nerveuse et surtout la possibilité de jouer à deux. À l’échelle de la machine, un programme qu’on n’aura pas de raison de bouder.

Version ZX Spectrum

Développeur : The Big Red Software Company Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Fuller, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Avec la même équipe aux commandes, on se doute que New York Warriors sur ZX Spectrum va suivre une philosophie très similaire à celle de la version CPC. De fait, même si la résolution est ici un peu plus élevée, c’est surtout pour pouvoir faire tenir une interface qui vampirise pas loin d’un tiers de l’écran, et la fenêtre de jeu en elle-même est strictement monochrome. Pour ce qui est du son, les choses vont aller vite : il n’y en a pas, et aucune version ne semble avoir été développée pour les modèles à 128ko de RAM. Du côté des bonnes nouvelles, il est en revanche toujours possible de jouer à deux, le défilement est fluide et la jouabilité est bonne ; l’essentiel est donc parfaitement préservé. En fait, le jeu est même plutôt plus lisible dans cette version que sur la machine d’Amstrad ! Encore une fois, on se doute que le tout a pris un petit coup de vieux, particulièrement sur le plan de la réalisation, mais cela reste un run-and-gun parfaitement jouable à deux sur la machine de Sinclair, ce qui était exactement ce qu’on venait chercher. Du travail sérieux.

NOTE FINALE : 10,5/20

D’autres sacrifices en vue pour une version ZX Spectrum de New York Warriors qui renonce pour ainsi dire à la fois aux couleurs et au son, mais on n’en obtient pas moins le run-and-gun qu’on était venu chercher, jouable dans de bonnes conditions à deux. Pas de quoi en prendre plein les mirettes, mais pour ce qui est de s’amuser, le programme fait encore illusion.

Version PC (DOS)

Développeur : Arcadia Software, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : EGA, Tandy/PCjr
Cartes sons supportés : AdLib, Game Blaster (CMS), haut-parleur interne, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au début des années 1990, on le sait, si le PC représentait déjà un marché majeur aux États-Unis, les choses étaient un peu différentes en Europe où la machine d’IBM passait encore loin derrière les ordinateurs plus populaires – c’est à dire virtuellement tous les autres – au moment de réaliser des portages.

Cette version de New York Warriors vient nous rappeler que les choses n’avaient pas encore vraiment changé à ce niveau en 1991 (la date de sortie du logiciel, paru de façon assez confidentielle, reste à prendre avec des pincettes), avec un titre qui ne reconnait même pas le VGA, et qui ne semble pas davantage au courant de l’existence de la Sound Blaster (mais au moins, l’AdLib est reconnue, ce qui n’était pas encore gagné). Encore pensé pour les modèles XT, le jeu s’affiche dans une fenêtre rabotée en 248×200, et si la musique est toujours là, pas question de profiter des bruitages en même temps. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas très beau, et jouer dans de bonnes conditions va demander d’expérimenter un peu sous DOSBox puisque le jeu n’est sans surprise pas ralenti… mais dans des circonstances « idéales », force est de reconnaître que l’action peut s’avérer aussi nerveuse et aussi fluide que sur Amiga, ce qui n’était pas gagné d’avance. Alors un peu comme pour les autres portages, difficile d’y engloutir des heures alors que la concurrence en la matière est particulièrement vive sur une machine qui, elle, est toujours en vie trente-cinq ans plus tard, mais disons simplement que si on parvient à faire abstraction de la réalisation, on trouve ce qu’il faut pour s’amuser.

NOTE FINALE : 12/20

Comme trop souvent, New York Warriors sur PC n’était pas exactement pensé pour les machines de sa génération au moment de sa sortie, ce qui cantonne le jeu à un ersatz en seize couleurs et en plus basse résolution de la version Amiga – sans même parler des pertes sur le plan sonore. Au moins le jeu est-il toujours jouable à deux et même parfaitement fluide dans les conditions idéales, mais on dira que lancer cette version n’a vraiment de sens qu’à partir du moment où on ne veut pas découvrir le jeu sur Amiga.

Blue Max : Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Titre alternatif : Aces of the Great War (Amiga, Atari ST)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari ST
Disponible sur : Windows
En vente sur : GOG.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Tout le monde aimerait savoir voler, mais tout le monde n’a pas nécessairement l’envie – sans même parler du temps ou des moyens – de consacrer des semaines, voire des mois ou des années, à apprendre à piloter un avion. De la même façon, ce n’est pas parce qu’on s’amuse sur un jeu de course qu’on a nécessairement envie de le complexifier au maximum en jouant avec une boîte manuelle et toutes les options de réalisme activées. Parfois, moins, c’est mieux.

Cela peut sembler évident aujourd’hui ou des notions comme l’accessibilité et le paramétrage de l’expérience sont au centre de l’expérience vidéoludique – on parle même de « casual gaming » – mais mine de rien, il aura pratiquement fallu attendre la fin des années 80 pour qu’un genre alors déjà « de niche », en l’occurrence celui de la simulation, commence à réaliser quelque chose qui avait jusqu’alors été à l’exact opposé de sa philosophie : « réaliste » ne signifie pas automatiquement « amusant ».

La société Accolade, notamment, aura commencé à se faire un nom via des Steel Thunder ou des Gunboat en commençant à étrenner un concept qu’on aura rapidement qualifié de « simulaction » : des titres où l’on veut bien piloter des jets, des hélicoptères, des tanks ou des bateaux, mais en se concentrant sur la partie fun (comprendre : celle où on tire sur tout ce qui bouge) sans avoir au préalable à consulter deux-cents pages de manuel pour avoir une chance de réussir péniblement un décollage au bout de quinze tentatives pour autant d’accidents mortels. L’idée n’aura pas tardé à faire du chemin : programmer un jeu moins complexe tout en visant un public plus large, cela ressemble fort à du gagnant-gagnant. Et les bonnes idées volant généralement par escadrilles, c’est sans doute totalement par hasard que MicroProse et Three-Sixty auront tous les deux publié le même mois deux programmes au pitch exactement similaire, à savoir une simulaction de combats aériens de la première guerre mondiale. Nous avons déjà eu l’occasion de voir ici Knights of the Sky, donc autant se pencher à présent sur Blue Max : Aces of the Great War.

Le jeu qui nous intéresse aujourd’hui va donc graviter autour de ce que l’on a tendance à retenir de l’aviation militaire en 1917, à savoir les dogfights endiablés menés par des biplans, des triplans et autres avions en bois, à une ère plus simple où il fallait compter sur de bons yeux plutôt que sur un radar et où le génie humain était déjà parvenu à concevoir une mitrailleuse synchronisée sur la vitesse de rotation des pales d’une hélice pour pouvoir tirer à travers sans casse.

Du côté du menu, Blue Max semble en tous cas ne commettre aucune faute : possibilité d’incarner les deux camps (même si parler d’«Alliés » et d’«Axe » pendant la première guerre mondiale comme le fait le jeu est pour le coup totalement anachronique), huit appareils pilotables au total (quatre pour la Triple-Alliance, quatre pour la Triple-Entente) avec leurs caractéristiques propres, plusieurs modes d’entraînement allant du simple vol libre au combat simulé pour se familiariser avec les commandes – lesquelles sont de toute façon très simples, et quasi-intégralement résumées sur un écran accessible en vol via la touche F9 – sans oublier les trois indispensables campagnes qui seront à accomplir sans faute, puisqu’en cas de décès votre pilote est automatiquement effacé (sauf si vous avez eu la bonne idée de faire une copie de sauvegarde du fichier au préalable, évidemment).

Plus surprenant : la présence d’un mode « stratégique » qui consiste… en un combat aérien au tour par tour, où les deux joueurs déplace leur avion d’hexagone en hexagone tout en paramétrant sa direction et son altitude. Un mode un peu gadget et manquant de profondeur, surtout parce qu’il reste limité à du un-contre-un (pourquoi ne pas diriger directement toute une escadre ?), mais on appréciera l’idée. Oh, et tant qu’à faire, n’oublions pas ce petit « plus » qui fait toujours plaisir : un mode deux joueurs en écran splitté, jouable aussi bien en compétitif qu’en coopératif. Oui, si le cœur vous en dit, vous pourrez tout à fait mener toute une campagne avec un ami à vos côtés, sans même avoir à dégainer un modem ou un câble série, et mine de rien cela restait assez exceptionnel en 1990.

Une fois en vol – littéralement, puisque chaque mission du jeu débute directement dans les airs, le décollage n’étant jamais géré – on se retrouve face à un modèle simple mais efficace : le clavier, le joystick ou la souris pour déplacer l’appareil et faire feu, une gestion (facultative) du vent et des nuages, des munitions limitées mais au nombre suffisamment généreux pour qu’il faille vraiment le faire exprès pour se retrouver à court, des informations essentielles (altitude, vitesse, dégâts encaissés) clairement affichées sans avoir à déchiffrer des jauges ou des cadrans, et vous voilà prêt à faire face aux forces adverses.

Seules les différentes vues et les actions de bombarder et de prendre une photo seront obligatoirement à aller chercher sur le clavier, et il ne sera pas question de compter ici sur des dégâts réalistes impactant le modèle de vol ni même sur des mitrailleuses qui s’enraillent : on est face à un titre très arcade, et qui fonctionne à ce niveau plutôt mieux que Knights of the Sky : Pas besoin ici de composer avec la vitesse des balles ni de devoir lutter pendant dix minutes pour parvenir à atteindre miraculeusement un avion de deux pixels qui virevolte comme un fou : les adversaires ont tendance à voler tout droit jusqu’à vous et les combats à être assez expéditifs dès l’instant où un ennemi est au milieu de votre viseur. Ce n’est peut-être pas très réaliste, mais bon sang, on a aussi le droit de trouver cela plus amusant sans se sentir coupable. En revanche, jouabilité simplifiée ou pas, une mission ne pourra se terminer qu’en étant prêt à poser son avion en rase-campagne – et du bon côté des lignes, lesquelles ne sont pas toujours faciles à identifier. La manœuvre demande un peu de maîtrise et de temps, ce qui est toujours moins amusant au bout de la quinzième fois (et personne n’aime planter sa campagne et perdre son pilote pour s’être posé un peu trop vite au terme d’une mission réussie), mais c’est bien là la seule concession au réalisme d’un titre qui offre ce qu’on était venu chercher : le plaisir de faire « tacatacatac » sur des vieux coucous en pirouettant follement dans les airs.

Histoire d’introduire un peu de variété, le programme est organisé autour de cinq types de missions : les patrouilles (abattre au moins un appareil ennemi), les missions de défense (empêcher un objectif allié d’être détruit), les bombardements (raser un bâtiment adverse à l’aide d’une bombe à lâcher minutieusement à la main), les reconnaissances (prendre un bâtiment en photo) et enfin les missions demandant de détruire un ballon adverse.

Le jeu ne comporte qu’une seule carte par mode de jeu (ce qui signifie que chaque campagne se déroule sur une seule et unique carte) ; celles-ci ne sont ni très variées ni très différenciables, mais le moteur de jeu a l’avantage de tourner comme un charme et de proposer une action fluide et des affrontements nerveux dès l’instant où l’ordinateur est équipé d’un processeur correct – ce qui, dans un XXIe siècle déjà bien entamé, ne devrait pas exactement être un problème à trouver. En résulte une expérience qui fournit exactement ce qu’on pouvait espérer… avec ses limites, malgré tout. Avec une jouabilité aussi basique, on se doute qu’il ne faut pas des semaines pour faire le tour de ce que le jeu a à offrir, et même si on peut se fixer l’objectif de boucler les trois campagnes avec les deux camps, il ne s’agit jamais que de reproduire les cinq mêmes types de missions sur les trois mêmes cartes. La possibilité de jouer à deux sur un même écran est fort heureusement très appréciable – aucun as de la grande guerre n’étant aussi jouissif à abattre que le petit frère ou le copain à grande gueule – et aide à donner une bonne raison de ressortir le titre de temps à autres histoire de décider qui va se coltiner la vaisselle ce soir. Rien de très marquant ni de révolutionnaire, mais quand on n’a pas envie de lutter pendant des semaines pour parvenir à dompter une simulation ultra-pointue, c’est vrai que ça fait toujours plaisir de pouvoir compter sur des titres à la Blue Max.

Vidéo – La première mission du jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


En choisissant de s'éloigner de la simulation pure pour assumer un tournant plus arcade, exactement comme un certain Knights of the Sky d'ailleurs paru au même moment, Blue Max : Aces of the Great War aura su préserver l'essentiel de ce qui fait l'intérêt des dogfights de la première guerre sans les réserver aux joueurs les plus patients et les plus adroits. Le résultat, s'il manque fatalement de profondeur et de variété, est néanmoins plutôt plus convaincant que ce qu'offre son concurrent direct, surtout grâce à la possibilité bienvenue de jouer à deux en écran splitté pour affronter un ami, pour mener une campagne en coopératif, voire même pour s'essayer à un surprenant mode stratégique qui risque cependant de ne pas dépasser le stade de la curiosité. Certes, on fait assez rapidement le tour du programme en dépit des trois campagnes et des deux camps jouables, mais on tient clairement le type de jeu auquel on peut revenir régulièrement pour une partie de cinq minutes sans avoir à déterrer le manuel pour se souvenir comment démarrer le moteur. Une approche qui n'a finalement pas si mal vieilli.


CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des atterrissages qui demanderont un peu de pratique pour éviter de saboter bêtement une mission gagnée...
– ...d'autant plus qu'en cas de crash, le personnage est automatiquement effacé !
– Très peu de moyens d'identifier la position de ses lignes...
– ...surtout quand les seules cartes du jeu sont à aller chercher dans le manuel, lequel n'est même pas fourni avec la version vendue en ligne !
– Un mode stratégique assez gadget

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Blue Max sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Si The Blue Max (sic) ressemble à un simulateur de vol, ce n’est qu’une apparence, car il s’agit en fait d’un shoot-them-up réaliste. Le pilotage est réduit à sa plus simple expression et vous ne contrôlez que la direction, l’altitude et la vitesse de votre appareil. Les différentes missions commencent en vol. Vous n’avez pas le moindre décollage à effectuer, ni aucun atterrissage (NdRA : dans les faits, toutes les missions demandent d’atterrir). Cela fera sans doute grimacer les fans de simulateurs de vol, mais l’action est suffisamment prenante pour compenser cela. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeurs : Three Sixty Pacific, Inc. – Mindscape International Ltd.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Blue Max aura dû attendre quelques mois pour débarquer sur Amiga – perdant au passage une partie de son titre sur la boîte pour mieux la récupérer à l’écran-titre, les grands mystères du marketing. Il hérite pour l’occasion d’une petite animation au lancement absente de la version PC, mais pour le reste, le contenu reste strictement identique (à un détail près : il est ici impossible de définir le niveau de réalisme du pilotage). Graphiquement, on ne peut pas dire que la déperdition soit spectaculaire comparé aux 256 couleurs du VGA – les dégradés sont clairement moins fins et les détails moins nombreux, mais rien de vraiment dramatique. En revanche, vous risquez d’avoir tout loisir d’admirer la différence, car autant vous prévenir : sur un modèle « de base » de type Amiga 500/600/1000, le jeu se traîne au point d’en être à peine jouable. Même avec les détails au minimum, le framerate ne dépasse jamais les huit images par seconde, et en mettant tout à fond, là il ne dépasse carrément plus les quatre ! Heureusement, les choses vont tout de suite mieux sur un Amiga 1200, où on retrouve une action à peu près fluide sans pour autant pouvoir rivaliser avec ce qu’offraient les PC les plus puissants, naturellement. Mais étant donné que l’Amiga 1200 n’existait pas encore à la sortie du jeu, on comprend qu’une partie de la presse n’ait pas été franchement emballé par cette séance diapo qui ne pouvait même pas s’enorgueillir de son réalisme. Si vous n’avez pas un Amiga 1200 ou supérieur, fuyez !

NOTE FINALE : 08,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

L’expérience délivrée par Aces of the Great War sur Amiga dépendra grandement du modèle sur lequel le jeu est lancé : en-dessous d’un Amiga 1200, le framerate risque d’être si bas que le jeu en sera pratiquement injouable. Dans de meilleures conditions, le titre peut se hisser assez près de la version DOS, mais sans le matériel approprié, ce ne sera clairement pas un jeu vers lequel vous diriger. Vous êtes prévenu.

Version Atari ST
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1024ko
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Après avoir vu le résultat d’Aces of the Great War sur Amiga, on avait de quoi se montrer inquiet pour l’Atari ST. Malheureusement, et comme on pouvait le craindre, le miracle n’aura pas eu lieu : en dépit du fait que le moteur de jeu n’emploie plus que seize couleurs, le framerate ne côtoie l’acceptable qu’en mettant tous les détails au minimum, et même sous cette forme on est encore très, très loin de l’expérience offerte par la version PC. Pour ne rien arranger, le jeu est donc devenu sensiblement plus moche (équivalent graphiquement parlant à la version EGA), le rendu sonore est inférieur, et l’expérience est empoisonnée de temps de chargement interminables. Bref, même si le programme pouvait encore faire illusion à une époque où on avait l’habitude de jouer à sept images par seconde, le constat est implacable : pour découvrir le jeu, ne commencez clairement pas par là.

NOTE FINALE : 08/20

On peut prendre le problème sous n’importe quel angle, mais la fluidité, ça compte, surtout quand elle impacte aussi dramatiquement la jouabilité. Condamné à se traîner lamentablement dans des décors qui ont perdu beaucoup de leur charme en seize couleurs, Aces of the Great War sur Atari ST se réservera aux joueurs les plus nostalgiques, les plus patients ou les plus masochistes.

Sliders

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royaume-Uni) – Titus (Amérique du Nord)
Testé sur : AmigaAmstrad CPCAtari STPC (DOS)

Version Amiga

Date de sortie : Décembre 1990 (France) – Septembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Une période où l’univers vidéoludique ne se divisait pas uniquement entre d’un côté les AAA en monde ouvert réalisés par des équipes de 800 personnes et de l’autre les rogue-lite, les deckbuilders et les Metroidvania en pixel art de la production indépendante.

Une ère qui avait encore cette magie de l’incertitude et de l’expérimental, et où il suffisait généralement d’un codeur et d’un graphiste, avec parfois un copain qui venait dépanner pour la musique, pour programmer un jeu en six mois, sur un coup de tête, sur une vision, ou encore mieux : sur une idée. Un siècle où Microïds, plutôt que de nous embarrasser avec des adaptations de Goldorak ou de Tintin qui nous fassent détourner les yeux avec pudeur, tentait des choses sans trop réfléchir, sans rester suspendu à des études de marché pour tenter de découvrir quelle licence grand public aller déterrer pour espérer enfin vendre quelque chose. Bref, des temps plus simples, plus purs, où en tout cas aimerait-on le croire au nom de cette nostalgie qui nous habite et qui veut nous convaincre que l’herbe était toujours un peu plus verte avant. Des temps où on voyait apparaître régulièrement des Sliders dans les magazines et dans les bacs, avec de belles boîtes en carton ou en plastique, plutôt que d’aller les dénicher au fin-fond des listes de jeux à moins de 4,99€ dans les offres promotionnelles de Steam. *Soupir*.

Mes excuses pour ce bref instant de mélancolie nostalgique que l’on pourrait qualifier de « moment vieux con » ; il y a des logiciels, de temps à autres, qui agissent comme de véritables voyages temporels. Si vous avez appartenu à l’ancienne génération, à celle qui traînait dans les salles d’arcades enfumées des années 80 au lieu d’être au collège ou au lycée, je peux déjà deviner la première chose que vous avez pensée en voyant les images de Sliders : « Ça ressemble à Marble Madness ».

Sans doute est-ce dû à cette vue isométrique présentant des reliefs couverts d’un quadrillage les mettant très bien en valeur, ou simplement à la présence de deux billes à l’écran, mais à la vérité cette similitude esthétique est une fausse piste : Sliders, quels que soient les airs qu’il se donne, est plus proche d’un jeu de football. Ou de hockey. En fait, le principe est limpide : chaque joueur commence sur une petite zone colorée représentant son « but » et a pour objectif d’aller chercher la balle et de la propulser quelque part au-dessus du but adverse. C’est tout. C’est un peu Kick Off en un contre un sans les ligne de touche, les fautes, les hors-jeu et toutes ces bêtises. Ou, pour prendre un exemple encore plus pertinent, cela ressemble énormément à Ballblazer en changeant la vue. En résumé, c’est exactement le type de programme dont on a compris tous les tenants et les aboutissants en une demi-seconde, mais qui va nécessiter davantage de temps avant d’être dompté.

Par essence, Sliders est un match ou une succession de matchs ; inutile de chercher un championnat, ou un tournoi, ou un mode « carrière » ou que sais-je encore : La sélection se limite au mode de contrôle (au clavier, à la souris ou au joystick), au mode de jeu (contre l’ordinateur ou contre un humain) et à la sélection d’une, de plusieurs ou de la totalité des douze arènes disponibles pour y affronter votre adversaire.

On notera néanmoins la présence d’un bouton « Data Disk » qui nous annonce que le jeu comptait accueillir des extensions – lesquelles n’auront au final jamais vu le jour – et surtout celui d’un menu de configuration extrêmement complet laissant au(x) joueur(s) la possibilité de paramétrer à peu près tous les aspects de la partie : durée, inertie, puissance des tirs… et d’autres notions plus obscures liées à la façon dont vos billes, en l’absence de mains ou de pieds, se saisissent de la balle : par aimantation. Une fois la balle « capturée », votre bille ne peut plus bouger, et sa seule action disponible est de viser et de projeter le ballon… laissant ainsi le temps à la bille adverse de venir le lui disputer en lui rentrant dedans ou, à défaut, en venant se placer sur la trajectoire du projectile afin de l’intercepter. Le reste du temps, la balle peut donc être attirée à distance par l’aimant… ce qui complique énormément les choses dès l’instant où les deux billes sont en train de chercher à le faire simultanément, les mécanismes d’attraction/répulsion rendant très difficile le fait de parvenir à immobiliser la balle et à s’en emparer.

En fait, le cœur du jeu est là : une espèce de match de hockey sur glace (à cause de l’inertie) en un contre un, où les duels deviennent rapidement confus tant il est difficile de deviner où va finir une balle tiraillée entre deux aimants. Les arènes fournissent juste de quoi pimenter les choses : des reliefs, pour commencer, mais aussi des tremplins, des plaques de glaces, des zones fléchées vous poussant dans une direction… Dommage que les environnement soient graphiquement toujours identiques, mais on appréciera le fait que la vue soit affichée dans une résolution assez élevée, en 320×270, qui offre une lisibilité parfaite et quelques moments de chaos ludique à deux.

Seul contre l’ordinateur, en revanche, le tableau est déjà moins rose : la prise en main demandera un vrai temps d’adaptation qui n’est certes pas très pénalisant entre deux joueurs de même niveau, qui seront très heureux d’apprendre ensemble, mais qui risque en revanche de se révéler particulièrement frustrant face à une intelligence artificielle qui, pour sa part, vous fera des misères dès le mode facile en vous humiliant sans effort pendant que vous cherchez encore à réussir à comprendre où est la balle. Autant vous prévenir : si vous n’avez pas les nerfs solides, il est possible que la première heure de jeu vous amène à prononcer à un volume beaucoup trop élevé des termes que vous préfèreriez normalement éviter d’employer devant vos enfants, votre famille, ou même devant vos voisins. Sliders est un jeu qui ne vous prend pas par la main, et c’est sa première grave erreur : servir de punchingball à une machine qui a tout compris dès le début pendant que vous êtes en train de chercher à tenir debout n’est pas l’expérience de jeu la plus ludique qu’on puisse concevoir – sauf à être masochiste.

Le vrai problème, cependant, celui-là même qui aura valu au titre un accueil critique assez tiède à peu près partout sauf dans les magazines français (sans doute pas du tout influencés par le fait que Microïds leur achetait des pages de publicité), c’est surtout qu’il n’y a simplement pas assez de profondeur dans le jeu pour justifier de passer une heure ou plus à lutter pour parvenir à avoir enfin une chance de livrer un match vaguement équilibré contre l’ordinateur.

Le contenu comme la jouabilité n’offrent aucun renouvellement, les arènes sont trop semblables et les modes de jeu pas assez nombreux, et même si le gameplay fait illusion un temps avec un ami, ce qui passait encore assez bien à l’époque de Kick Off commençait à apparaître comme un peu court face à des concurrents qui se nommaient désormais Kick Off 2 ou Speedball 2, et qui étaient simplement plus fun, plus accessibles et avec beaucoup plus de contenu. Une constatation qui ne s’est pas améliorée depuis : qui a encore envie de passer une heure à dompter un jeu pour s’amuser avec dix minutes ? Loin du petit jeu efficace face auquel on aurait pu se trouver, on compose donc avec une curiosité maladroite qui demande un investissement trop important pour ce qu’elle a à offrir au final. Parfait pour s’amuser dix minutes avec votre petit cousin le temps de lui faire découvrir l’Amiga, quoi.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 11/20 (seul) - 13/20 (à deux)

Sous ses faux airs de Marble Madness jouable à deux, Sliders dissimule en fait une expérience de jeu qui fait plutôt penser à une sorte de Kick Off sur glace avec des aimants. L'idée a le mérite d'être originale, on ne peut pas lui enlever ça, malheureusement entre une prise en main qui suivra une courbe d'apprentissage encore plus exigeante que celle du jeu de football de Dino Dini, un contenu solo qui se limite à affronter l'ordinateur et une difficulté globalement bien trop frustrante alliée à des situations trop vite confuses en cas de duels rapprochés, il faut bien reconnaître que c'est surtout entre deux joueurs de niveau équivalent que le programme dévoile un peu d'intérêt sur la durée, surtout avec les options de configuration pour pimenter les choses. Cela reste beaucoup d'investissement pour un maigre résultat, on pourra donc comprendre que le commun des mortels puisse décider de passer à autre chose au bout de cinq minutes – au hasard, pour retourner jouer à Speedball 2. Bien essayé, mais pas assez bien pensé.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un contenu solo qui se limite à jouer contre l'ordinateur
– Une prise en main qui risque de nécessiter beaucoup de temps...
– ...face à un ordinateur qui, pour sa part, se balade quel que soit le mode de difficulté
– Des situations rapidement confuses ou verrouillées lorsque les deux concurrents sont trop proches

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Sliders sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Sliders est un programme très soigné, qui présente une réalisation irréprochable. Le jeu est en plein écran lorsque vous êtes seul. À deux, chaque joueur dispose d’un écran centré sur sa boule. Dans ce cas, chaque écran dispose d’un scrolling multidirectionnel des plus fluides, ce qui est assez impressionnant. C’est vraiment du beau travail, d’autant que la jouabilité est tout aussi réussie. […] Sliders est aussi simple que passionnant, et c’est un plaisir d’y jouer avec un ami, entre deux parties de Kick Off. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 16/20

« Compétent, mais répétitif, peu inspiré et, pour beaucoup, susceptible de se révéler rigoureusement incontrôlable. Seulement amusant à deux, ou chacun a de fortes chances d’être aussi mauvais que l’autre. »

Amiga Power n°5, septembre 1991, 56/100 (Traduit de l’anglais par mes soins)

Version Amstrad CPC

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds
Date de sortie : Janvier 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au début des années 90, l’Amstrad CPC restait un ordinateur extrêmement populaire en France – même si on se doute que la plupart des joueurs en ayant les moyens avaient entamé depuis longtemps leur migration vers des systèmes plus puissants, Amiga ou Atari ST en tête. Sliders n’aura donc pas fait l’impasse sur le vaillant ordinateur 8 bits – contrairement à toutes les autres machines de la même génération – et aura bénéficié d’un portage très sérieux s’efforçant de coller au maximum à l’expérience originale. Le contenu, par exemple, est pour ainsi dire le même : des terrains de jeu aux options, rien n’a changé en-dehors de l’impossibilité de jouer à la souris ; sincèrement, on s’en remettra.

La résolution est bien évidemment infiniment plus basse que sur Amiga, mais cela n’a heureusement pas trop d’incidence sur la lisibilité ni sur la capacité du joueur à anticiper, et pour cause : le jeu tourne beaucoup plus lentement, ce qui laisse infiniment plus de temps pour préparer ses mouvements et compenser l’inertie. Ironiquement, c’est précisément cette limitation technique qui rend le jeu beaucoup plus facile à aborder que sur Amiga : même s’il faut se méfier des très, très longues secondes que peut prendre le fait de parvenir à accomplir un demi-tour après être parti un peu trop vite un peu trop loin, on a nettement moins l’impression de subir les événements que dans la version originale, et on trouve ses marques infiniment plus vite. Du coup, le mode solo se montre moins frustrant ici que dans la version originale, et le mode deux joueurs un peu plus équilibré. Évidemment, dès qu’on commence à modifier les options pour tenter d’accélérer le jeu, les choses peuvent se compliquer, mais plus besoin cette fois de passer dix minutes à tâtonner face aux réglages pour espérer configurer une expérience de jeu à peu près gérable pour le joueur lambda, et c’est quand même une très bonne chose. Du coup, on recommandera beaucoup plus volontiers le titre aux nostalgiques du CPC qu’à ceux de la machine de Commodore.

NOTE FINALE : 12/20 (seul) – 12,5/20 (à deux)

Parfois, moins, c’est mieux, et en offrant par contrainte une expérience plus lente, Sliders se révèle plus simple à prendre en main et à apprécier sur CPC. Cela signifie également que l’inertie pourra se révéler plus traitresse que jamais en mode deux joueurs et que l’action, moins chaotique, pourra également être un peu moins amusante contre un ami, mais à tout prendre le jeu est indéniablement plus agréable à découvrir sur la machine d’Amstrad, particulièrement en solo. Comme quoi…

Version Atari ST

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royauem-Uni)
Date de sortie : Août 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Optimisé pour la gamme STe
Protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Petite incongruité : l’Atari ST, ordinateur 16 bits chouchou des développeurs français (et de leur public : la France est l’un des pays où l’ordinateur d’Atari aura connu le plus grand succès), aura pour une fois dû se contenter d’un simple portage d’un jeu programmé pour Amiga. Si cela ne change bien évidemment rien au contenu (on remarque néanmoins que le jeu à la souris a disparu, tout comme sur CPC, dont cette version reprend d’ailleurs l’écran-titre), on se doute également qu’il ne sera pas question ici de disposer d’une fenêtre de jeu en 320×270 comme sur Amiga.

La fenêtre de jeu est donc naturellement plus petite et la visibilité un peu plus restreinte, ce qui est d’autant plus dommage que le jeu va toujours aussi vite. Remarque, il serait malvenu de reprocher à Microïds d’avoir accompli pour l’occasion ce que pratiquement aucun autre développeur n’aura fait (hélas), à savoir tirer spécifiquement profit du blitter des modèles STe pour offrir un des défilements les plus fluides qu’on ait jamais vu sur la machine d’Atari ! Malheureusement, cette louable prouesse technique signifie également que le titre est toujours aussi ridiculement frustrant en solo où on passe plus de temps à courir derrière la balle (et l’ordinateur) qu’à réellement participer au match. Encore une fois, c’est surtout à deux que le jeu dévoilera sa pleine mesure – et qu’il finira par se montrer rapidement répétitif, faute de variété dans les environnements et les règles. Bel effort, cependant.

NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 13/20 (à deux)

On sera heureux de profiter avec Sliders d’un des (trop) rares titres à tirer pleinement profit des capacités du STe pour offrir un des jeux les plus techniquement aboutis dont on ait pu bénéficier sur la machine. Malheureusement, cette fluidité et cette rapidité éblouissantes ne sont pas forcément à verser au crédit de l’expérience de jeu, tout aussi frustrante que sur Amiga – et même davantage, réduction de la résolution oblige. Encore une fois, c’est surtout à deux que le titre dévoilera son intérêt – mais pour combien de temps ?

Version PC (DOS)

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royauem-Uni)
Date de sortie : Mars 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Disquette 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Sound Blaster
Protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les joueurs PC auront donc dû attendre près d’un an et demi avant de pouvoir s’essayer à Sliders. La raison, on s’en doute, trouve probablement une partie de son explication dans le hardware en lui-même : si les PC étaient déjà intouchables en termes de puissance processeur en 1992, aucun d’entre eux n’a jamais possédé de blitter, et parvenir à afficher un défilement fluide sur ce type de machine aura souvent représenté une colle pour une bonne partie des années 90. Sur le plan technique, le titre de Microïds représente donc une nouvelle fois un petit exploit : c’est parfaitement fluide… au prix de quelques sacrifices.

Le plus dommageable étant la disparition totale de la moindre forme d’interface une fois un match lancé : non seulement on n’a plus le droit à la barre pour signifier l’écoulement du temps, ni même à la flèche pour donner la direction de la balle, mais on n’a même plus le droit à l’affichage du score non plus ! En écran splitté, on peut également être amené à composer avec un tremblement de l’écran sur la partie inférieure (celle du deuxième joueur) très désagréable, ce qui aura carrément poussé les développeurs à ajouter un mode radar où le deuxième joueur évolue sous la forme d’un point se déplaçant sur une vue aérienne de la carte ! Regrettable, dans un jeu où l’intérêt provenait précisément du multijoueur… On remarquera également que le jeu ne se joue désormais plus qu’au clavier (?!) et que, si la résolution est toujours bloquée en 320×200 (un peu agaçant sur une machine qui pouvait afficher le double, mais encore une fois, on se doute que la fluidité du défilement avait ce prix), la vue a cette fois été franchement éloignée, ce qui permet enfin d’anticiper… à condition d’avoir de bons yeux. Malheureusement, le mode solo est toujours aussi pénible, et les nombreux sacrifices pour fluidifier le jeu à deux font que l’expérience n’est pas bien meilleure à deux. Comme quoi, la technique ne résout pas tout, surtout quand elle n’est pas totalement maîtrisée…

NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 11,5/20 (à deux)

À force de rogner les angles pour préserver la fluidité de son défilement, Sliders sur PC finit par sacrifier trop de choses au bénéfice d’une vitesse qui ne lui rend de toute façon pas service et par offrir une expérience aussi désagréable en solo qu’en multijoueur. Certes, on appréciera que les développeurs aient ENFIN eu l’idée de reculer la vue, mais ralentir le jeu et diminuer l’inertie aurait été une bien meilleure idée.

Prince of Persia 3D

Développeur : Red Orb Entertainment
Éditeur : The Learning Company, Inc. (Amérique du Nord, France) – Mindscape International Ltd. (Allemagne, Royaume-Uni)
Titre alternatif : Prince of Persia : Arabian Nights (Dreamcast)
Testé sur : PC (Windows 9x)Dreamcast

La saga Prince of Persia (jusqu’à 2000) :

  1. Prince of Persia (1989)
  2. Prince of Persia 2 : The Shadow & The Flame (1993)
  3. Prince of Persia 3D (1999)

Version PC (Windows 9x)

Date de sortie : 17 septembre 1999 (Amérique du Nord) – 28 septembre 1999 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : CD-ROM (x2)
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium MMX – OS : Windows 95 – RAM : 64Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique : API : Direct3D* – RAM vidéo : 8Mo – DirectX : 6.0
Son : EAX
*Accélération 3D requise

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

À peine Tomb Raider avait-il atterri dans les étals et dans les rédactions journalistiques, conquérant les cœurs et les portefeuilles, que virtuellement la totalité de la planète avait immédiatement fait deux constatations évidentes.

La première, c’est que Lara Croft, au-delà de ses attributs féminins qui faisaient marcher l’imagination des adolescents au point de leur laisser deviner des courbes voluptueuses au-dessus de la pyramide anguleuse qui lui servait de poitrine, faisait quand même vachement penser à l’archéologue le plus célèbre du Septième Art dans une version combi/short plus plantureuse mais tout aussi efficace. La deuxième, c’est qu’en termes de gameplay, il suffisait de vingt secondes aux commandes de l’intrépide aventurière pour mettre tout le monde d’accord : fondamentalement, c’était Prince of Persia, mais en 3D. Conclusion évidente : Tomb Raider avait réussi le tour de force de tout redéfinir en n’inventant rien, et le jeu d’aventure, plus que moribond en 2D, semblait avoir ressuscité sous une forme qui invitait à s’en inspirer le plus vite possible pour éviter de finir sur le bas-côté de l’histoire – et surtout, pour nourrir l’espoir de s’en mettre plein les poches.

Or, justement, par une délicieuse ironie, les deux sources d’inspirations susmentionnées seront visiblement arrivées à la même conclusion à peu près au même moment : quitte à avoir involontairement nourri le succès de LA nouvelle grosse licence vidéoludique de la fin des années 90, il n’était que justice d’aller s’en inspirer à leur tour histoire de remettre l’église au milieu du village – et puis comme ça on pouvait dire que ça n’était pas du plagiat, juste un légitime retour à l’envoyeur.

Cela leur aura quand même pris trois ans, mais le fait est qu’en 1999, à à peine un mois d’écart l’un de l’autre, débarquaient d’un côté Indiana Jones et la Machine Infernale, clone assumé de Tomb Raider, et de l’autre Prince of Persia 3D, qui optait pour une approche totalement différente – non, je rigole, c’était évidemment un autre clone de Tomb Raider. Deux sagas venant réclamer leur dû – et les brouzoufs – et accueillis avec une fortune diverse, tant le genre commençait alors déjà à être légèrement saturé – notamment parce que Lara elle-même, pas exactement inactive sur la période, était déjà en train de vivre sa quatrième aventure au même moment. Du coup, les deux titres auront globalement suscités, au milieu de quelques réactions enthousiastes, des levers de sourcils désabusés en mode « déjà vu, déjà fait » et auront été rapidement congédiés sans plus d’égard pour leur héritage pour accompagner le lent déclin de LucasArts pour l’un et attendre de ressusciter dans la peau d’un crack avec Les Sables du Temps pour l’autre. Mais bon, l’ère de la surabondance de clones de Tomb Raider étant révolue depuis bien longtemps, la question mérite d’être posée : se pourrait-il qu’une presse et un public lassés se soient montrés un peu sévères vis-à-vis de deux logiciels qui méritaient mieux ?

Pour ce qui est de notre prince, désormais officiellement devenu le gendre de son grand absent de sultan, les choses semblaient en tous cas s’être tassées depuis la mort – définitive jusqu’au reboot – de Jaffar. C’était son compter sans l’invitation d’Assan, frère dudit Sultan, un homme taciturne réputé pour son tempérament légèrement agressif, qui décide un jour de transformer une réunion de famille en prise d’otage et en annexion en bonne et due forme histoire de faire respecter une ancienne promesse : le mariage du fils d’Assan avec la fille du Sultan que celui-ci, visiblement tête-en-l’air, à entretemps laissé épouser son gendre idéal. Conséquence : c’est une fois de plus dans une cellule que le prince commence son aventure, laquelle va consister à s’enfuir, à aller s’expliquer avec Assan et son fils, et à mettre la main sur sa dulcinée dans une variante à peine mise à jour du scénario du premier opus (et aussi un peu du deuxième).

Dans une intéressante mise en abîme, le prince peut donc faire à peu près tout ce dont Lara était capable – après le lui avoir piqué. Sauter, pousser des blocs, s’accrocher aux rebords, mais aussi ramper, nager ou grimper à la corde – toute la panoplie est là, y compris certaines aptitudes que la belle avait mis plusieurs épisodes à maîtriser, et le mélange exploration/action/réflexion est toujours de mise, pratiquement à l’identique.

Dans le domaine, si on pourra regretter une jouabilité « tank » qui fait son âge, comme celle de tous les représentants du genre sur la période, les joueurs à la recherche d’un « Tomb Raider en orient » prendront immédiatement leurs marques : avec un minimum de pratique, notre héros fait exactement ce qu’on lui demande, et si son maniement connait parfois quelques ratés lorsqu’on exécute un saut un peu trop millimétré sous un angle un peu trop aventureux, la formule est toujours aussi efficace – et même plutôt davantage, avec vingt-cinq ans de recul qui lui ont permis de retrouver une certaine fraîcheur. On peste parfois, il arrive qu’on tourne en rond pour comprendre où on est censé aller, mais dans l’ensemble on se montre d’autant plus patient qu’il n’y a cette fois aucune limite de temps et qu’il est possible de sauvegarder n’importe quand – tant que le prince est immobile et placé sur une surface qui l’est aussi, pour éviter les accidents bêtes de type « ah tiens, j’ai sauvegardé sur une plateforme qui était en train de s’effondrer ». Par contre, préparez-vous à jouer au clavier, le programme ne permettant pas d’attribuer aux boutons du joystick des fonctions pourtant fondamentales, comme le fait de ramper – une maladresse quelque peu stupide.

Dans sa dimension « Lara Croft de Perse », le titre de Red Orb Entertainment se débrouille en tous cas plutôt bien. La réalisation tire parti d’éclairages colorés et propose des environnements assez variés et objectivement réussis, depuis les cachots du palais jusqu’à des temples anciens en passant par les toits de la ville ou même un morceau de bravoure particulièrement original, s’étendant sur plusieurs niveaux, et qui demande de partir à l’assaut d’un improbable dirigeable à la conception très verticale et qui se résume donc à une longue ascension remplie de sauts risqués, de pièges et de combats.

Ceux-ci – des affrontements à l’arme blanche, comme on peut s’en douter – prennent une forme qui se veut technique avec différents angles d’attaque, une parade et la possibilité de bouger autour de son adversaire, mais entre les nombreux obstacles qui viennent gêner la caméra, la stupidité de l’intelligence artificielle et la quasi-impossibilité d’anticiper les assauts adverses, on s’en tire souvent bien mieux en faisant n’importe quoi au pif – voire en se contentant d’éviter l’affrontement, les ennemis étant incapables de vous suivre au-delà d’une porte ou d’un escalier. Au moins sera-t-on heureux de pouvoir compter sur toute une sélection d’armes au maniement différent ainsi que sur un très pratique arc qui constituera, en plus de la réponse à certaines énigmes, un très bon moyen de disposer à distance d’un ennemi qui aurait pu nous causer des soucis de près. Oh, et on pourra toujours compter sur les inévitables potions pour offrir quelques mécanismes alternatifs et une bonne raison d’explorer en quête de points de vie supplémentaires. Bref, ça n’est pas toujours idéal, mais ça fait finalement assez bien le café.

Comme on le sait, la véritable force d’un jeu de ce type repose principalement sur un critère vital : la qualité du level design, et à ce niveau Prince of Persia 3D fait mieux que se défendre. Certes, il s’aventure parfois dans des zones assez dangereuses, comme ce premier niveau qui vous demande de joueur précisément avec les colossales limites de l’intelligence artificielle des gardes le temps de mettre la main sur votre épée, mais dans l’ensemble la conception très verticale des niveaux fait mouche, que l’on grimpe au sommet d’une improbable bibliothèque haute d’une centaine de mètres ou qu’on se lance à l’assaut du dirigeable évoqué plus haut.

Les énigmes ne sont jamais très complexes, le jeu sait dispenser quelques indices via sa mise en scène, et dans l’ensemble il faut vraiment atteindre les derniers niveaux pour commencer à se demander comment progresser dans des situations bien précises. L’aventure, longue de sept ou huit heures, ne se montre jamais ennuyeuse, et on est toujours heureux de découvrir un nouveau cadre pour nos acrobaties. Bref, si le jeu ne retrouve pas la formidable ambiance de son modèle – laquelle reposait précisément sur cette sensation d’être loin de tout et de tout le monde, dans des ruines oubliées du reste de l’humanité – et n’invente pour ainsi dire rien, cela n’en fait aucunement un programme médiocre et sans inspiration. Disons que c’est « classique », dans le bon sens du terme, mais terriblement efficace. Oui, c’est du Tomb Raider – mais bon sang, ce n’est pas une insulte, et à une époque où les aventures de Lara commençaient à tourner sévèrement en rond, il est un peu dommage que ce clone très réussi se soit attiré des foudres qu’il ne méritait pas.

En revanche, ce qui pourra compter pour un joueur actuel désireux de découvrir le titre, c’est la difficulté à faire tourner le jeu. MS-DOS est désormais très bien émulé, mais Windows 95 et DirectX 6, c’est une autre paire de manches – et pas question au moment où j’écris ces lignes de pouvoir profiter d’une édition dématérialisée se chargeant de faire fonctionner le programme sur les systèmes modernes à votre place.

Il va falloir composer avec le travail des fans et avec des programmes comme dgVoodoo, mais attendez-vous dans tous les cas à des difficultés : avec dgVoodoo, par exemple, des problèmes d’affichage faisaient qu’il était impossible de voir sous l’eau pendant le deuxième niveau (et uniquement celui-là). J’ai également été confronté à des blocages systématiques pour le lancement de deux des niveaux du jeu, ce qui m’aura obligé à aller chercher des sauvegardes en ligne pour avoir une chance de progresser – pas exactement les conditions idéales pour découvrir le logiciel, ce qui lui fait certainement perdre un demi-point. C’est d’autant plus dommage que le jeu vaut largement la peine d’être redécouvert, mais si vous ne vous sentez pas exactement l’âme d’un programmeur en herbe désireux de mettre les mains dans le cambouis pour faire fonctionner un jeu d’un autre temps, le plus simple est sans doute de découvrir le jeu via sa version Dreamcast.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20

De la même façon qu'un Indiana Jones qui se sera lui aussi engouffré sur les traces de Lara Croft à peu près au même moment, Prince of Persia 3D se sera mis en tête d'aller disputer à Tomb Raider un héritage qui lui revenait de droit. À ce titre, il n'invente strictement rien, et on peut comprendre que la critique quelque peu lassée par une surabondance de logiciels du même genre sur la période l'ait congédié d'un revers de main comme un clone de plus – et un clone de trop. Une sentence sévère, car en dépit de quelques maladresses et d'une jouabilité qui fait son âge, les aventures du prince remplissent parfaitement la mission qu'on pouvait attendre d'elles, avec un level design bien conçu, quelques morceaux de bravoures et une réalisation colorée qui font que les six à sept heures nécessaires pour compléter le logiciel filent comme le vent. Parvenir à faire tourner le programme correctement aujourd'hui risque cependant de représenter la plus grosse contrainte d'une expérience plus ambitieuse et plus dépaysante qu'on aurait pu le craindre. À redécouvrir, clairement.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des combats qui cherchent à être techniques, et qui ne le sont pas
– Une jouabilité qui aurait pu être un peu plus précise
– Un mixage sonore raté avec des voix souvent inaudibles...
– ...qui ne laissent entendre, au mieux, que les performances ratées d'acteurs (?) en sous-jeu
– De nombreuses difficultés à attendre pour espérer faire tourner le jeu sur un système moderne

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Prince of Persia sur un écran cathodique :

Version Dreamcast
Prince of Persia : Arabian Nights

Développeur : Avalanche Software LLC
Éditeur : Mattel Interactive
Date de sortie : 5 décembre 2000 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : GD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Visual Memory Unit supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Prince of Persia 3D avait toutes les caractéristiques d’un jeu pensé pour s’adapter à merveille aux consoles de la nouvelle génération. Il aura néanmoins dû attendre un an pour arriver sur Dreamcast, où l’accueil assez tiède réservé à la version PC l’aura d’ailleurs limité au marché américain – où le jeu aura reçu sensiblement les mêmes critiques, pris en sandwich entre deux épisodes de Tomb Raider face auxquels il n’avait guère que son univers oriental à opposer. C’est d’autant plus dommage que ce portage réalisé par Avalanche Software est objectivement bien réalisé, faisant pratiquement jeu égal avec l’original en termes de réalisation (sauf pour la réalisation bloquée en 640×480) et profitant des diverses corrections apportées par les patchs entretemps. La jouabilité au pad est assez naturelle et moins raide qu’au clavier, et le gameplay apparait plus fluide que sur ordinateur. En revanche, plus question ici de sauvegarder n’importe quand : il faudra utiliser des points de sauvegarde disséminé au fil des niveaux, et cela risque d’être le point qui fera grincer le plus de dents, particulièrement quand la difficulté commencera à grimper. On remarquera également que les petits effets de caméra visant à nous montrer l’action d’une dalle ou d’un mécanisme ne sont plus de la partie, eux non plus, ce qui est un peu dommage. En revanche, pour ceux qui n’auraient pas envie de se bagarrer avec les nombreuses difficultés pour parvenir à faire tourner la version PC sur un système moderne, au moins, ici, les choses sont simples : on insère le GD-ROM et ça fonctionne comme un charme. Un bon moyen de laisser une deuxième chance à un jeu congédié un peu trop vite.

NOTE FINALE : 16/20

Portage solide, stable et bien réalisé pour Prince of Persia : Arabian Nights sur Dreamcast. Seule l’impossibilité de sauvegarder n’importe quand risque de ne pas plaire à tout le monde, mais quand on sait ce qu’on vient chercher – à savoir un clone de Tomb Raider avec ses morceaux de bravoure – on l’obtient et on passe un très bon moment. Et ça sera toujours plus simple à faire fonctionner que sur PC !

Battle Chess 4000

Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : Interplay Productions, Inc.
Testé sur : PC (DOS)
Disponible sur : Linux, Mac OS, Windows
En vente sur : GOG.com (Linux, Mac OS, Windows), Steam.com (Linux, Mac OS, Windows)

La série Battle Chess (jusqu’à 2000) :

  1. Battle Chess (1988)
  2. Battle Chess II : Chinese Chess (1990)
  3. Battle Chess 4000 (1993)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Janvier 1993
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, en local ou via modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 3,5″ (x7)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel i386 SX – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 2Mo
Modes graphiques supportés : SVGA, VESA, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le propre de la prise de risques, c’est qu’elle est par définition, eh bien, risquée. On a tous connu cet étrange instant qui semble échapper au temps, figé quelque part dans les airs avec le sol si désespérément lointain, où le cœur s’emballe pendant que l’on se dit que l’on aurait peut-être mieux fait de réfléchir avant de sauter – et où le formidable gadin qui aura suivi nous aura invité, désormais, à préférer la sureté du plancher des vaches. C’est peut-être un peu la réflexion qu’auront conduit les studios Interplay après un Battle Chess II qui avait certes fait le pari osé de ne pas opter pour la solution de facilité, mais dont le succès n’avait vraisemblablement rien eu de comparable avec celui de son prédécesseur – et pour cause, tout le monde n’ayant pas forcément envie d’apprendre les échecs chinois juste pour regarder des personnages se battre entre eux.

Dès lors, on peut comprendre la tentation du retour en arrière et de la sécurité en livrant tout simplement ce que tout le monde attendait plus ou moins depuis le début: la même chose, mais en mieux. Justement, la technique avait énormément progressé en cinq ans, et les ordinateurs avaient désormais les moyens d’afficher des graphismes et des animations beaucoup plus ambitieux que ce que permettait un Amiga 500 – mais cela signifiait également que ce nouvel opus serait désormais réservé aux PC, voire aux PC bien équipés. Qu’importe : Battle Chess 4000 allait enfin permettre de revenir à un concept qui avait tant plu… sauf que les machines n’étaient pas les seules à avoir changé ; le public, lui aussi, commençait à se poser des questions plus pertinentes. Et la plus évidente d’entre elles se dessina déjà, à l’époque : mais au fond, quand on joue aux échecs, est-ce qu’on a vraiment envie de voir les pièces bouger ?

Pour une raison quelconque, celui qui aurait pu s’appeler Battle Chess III aura donc plutôt choisi Battle Chess 4000 – peut-être une façon d’acter la rupture avec le deuxième épisode. Cela lui aura visiblement donné l’idée de modifier un peu le thème médiéval du premier jeu, le plus convenu, pour opter pour quelque chose d’un peu plus dépaysant : un univers futuriste à la Flash Gordon. Ici, les pions sont des sortes d’extraterrestres évoquant un croisement contre-nature entre un fourmilier et sa pitance, les tours sont des robots géants à la Transformers, les cavaliers sont équipés d’un pistolet laser et les fous font appel à un bâton futuriste qui les dote de pouvoirs quasi-magiques.

Le tout est présenté dans un cadre de base militaire façon Étoile Noire, sur un échiquier parsemé d’étoiles, et le moins qu’on puisse dire est que le tout a de la personnalité – d’autant plus que le titre n’aura pas hésité à se présenter dans une version SVGA en 640×480 encore plutôt avant-gardiste en 1993, et qui tenait sur la bagatelle de sept disquettes haute densité (une version VGA, ne tenant elle que sur trois disquettes, aura également été mise en vente simultanément). Les unités, de toute évidence modélisées en 3D pré-calculée, ont l’avantage d’être détaillées, bien typées et immédiatement reconnaissables que ce soit de face ou de dos, et la lisibilité est globalement très bonne quand on joue sur le plateau 3D (mais une vue 2D est bien entendu disponible), soit autant de leçons qu’aurait mérité de tirer un machin comme Terminator 2 : Judgment Day – Chess Wars. Bref : c’est relativement beau, ça a du cachet, ça ne gène en rien la partie et ça a plutôt bien vieilli ; autant dire un bon départ.

À ce stade, je sens qu’une question est d’ores et déjà sur toutes les lèvres : le concept du jeu reposant sur le fait de voir nos divers pions se mettre joyeusement sur la gueule, l’effet de surprise joue-t-il toujours ? À ce niveau, on sera reconnaissant aux artistes de chez Interplay d’avoir réalisé que voir deux unités s’échanger des coups n’était pas (ou plus ?) intrinsèquement passionnant, et que chaque saynète mettant en scène un échange de pièces demandait de déployer un minimum d’imagination pour permettre au joueur d’être surpris ou amusé – en un mot : intéressé.

Dans le domaine, Battle Chess 4000 ne s’en sort vraiment pas mal, et si on se bidonne rarement comme on le ferait devant les meilleur Tex Avery, on a désormais droit à de véritables scénarios avec retournements de situation, tension dramatique et effets cartoon – sans oublier les références obligées comme le monolithe de 2001 L’odyssée de l’espace invoqué lorsque la reine prend un cavalier, et qui sort le grand jeu avec le thème d’Ainsi parlait Zarathoustra en fond, avant une conclusion… surprenante. Si on pourra regretter au passage que la réalisation sonore ait tiré un trait sur la Roland MT-32 et n’offre aucune gestion du standard General MIDI, le titre offre assurément ce qu’on était venu chercher grâce à ses graphismes et animations de qualité. Sauf qu’après trois épisodes aboutissant tous plus ou moins à la même conclusion, il était peut-être temps de poser enfin la question qui fâche : est-ce que les joueurs avaient encore réellement envie de regarder des pièces se battre sur un échiquier ?

Le truc, et on le constate rapidement aujourd’hui, c’est que quand on a envie de jouer aux échecs, c’est rarement pour être distrait toutes les vingt secondes – surtout quand on ambitionne de jouer à bon niveau ; c’est un peu comme un lâcher de vachettes au milieu d’un match de football professionnel. Se lancer dans une partie juste pour regarder des animations rigolotes, c’est par définition une approche de néophyte ou de joueur du dimanche – ce qui n’a rien de honteux (je suis moi-même un joueur d’échecs plutôt médiocre), mais qui fait aussi qu’on peut comprendre que le public visé par le jeu soit également le moins disposé à aller l’acheter au prix fort. Car fatalement, chaque type de prise de pièce aboutissant systématiquement à la même animation, on se lasse rapidement des échanges de pions qu’on aura déjà vu trente fois au bout de cinq parties et on finit par se débarrasser de la raison d’être du programme pour revenir aux fondamentaux : les échecs en eux-mêmes, en 2D, sans le strass et les paillettes qui se seront évaporés au bout d’une heure –tout simplement parce qu’ils gênaient.

Dans ce domaine, le titre s’appuierait (à en croire le magazine Tilt de l’époque) sur le moteur de Chess Player 2150 – une information que je ne peux ni confirmer ni infirmer mais qui me parait surprenante, ce jeu n’ayant été ni développé ni édité par Interplay – mais le fait est qu’il offre toute la panoplie d’options et d’évaluations d’un « véritable » jeu d’échecs tout en jouant vite et en se montrant nettement plus « prenable » à bas niveau que l’I.A. du Battle Chess originel. Peut-être même trop, en fait : dans les dix déclinaisons de difficulté du mode « faible », l’ordinateur déploie un comportement pas très cohérent qui ressemble un peu à ce que pourrait offrir une partie contre votre petit cousin de six ans qui était occupé à se curer le nez en fixant le mur pendant que vous lui expliquiez les règles et qui n’a pas encore bien saisi toutes les subtilités du jeu – ni la nécessité de réfléchir avant de déplacer une pièce. À haut niveau, il se débrouille heureusement bien mieux… sauf qu’il y a tellement de jeux d’échecs, à l’heure actuelle, qui sont capable de faire bien mieux que lui, que c’est finalement dans sa dimension la plus limitée – le coup de peinture – que le logiciel présente le plus d’intérêt aujourd’hui.

Battle Chess 4000 est donc typiquement le jeu qu’on sort aujourd’hui pour jouer aux échecs sans réellement jouer aux échecs, une sorte de mode fun inclus dans un jeu plus sérieux et qui est très bien pour réenchanter très ponctuellement une activité que l’on connait déjà par cœur juste le temps de quelques parties avant de devoir à nouveau renoncer parce qu’on a toujours autre chose de plus important à faire.

Du popcorn pour le cerveau qui passe d’autant mieux que le titre est aujourd’hui disponible à des prix nettement plus accessibles qu’à sa sortie et peut donc constituer un moyen comme un autre d’initier des enfants aux échecs de façon ludique sans se laisser intimider par l’austérité d’un échiquier ordinaire. Un bon moment, assurément, mais qui est voué à se révéler dramatiquement court, un apéritif avant un festin qui s’avèrera autrement plus mémorable – et auquel on ira s’adonner sur d’autres jeux. Bref, une approche qui faisait illusion en 1988, mais qui avait acquis la signification un peu trop littérale du terme « divertissement » cinq ans plus tard, et qui aura finalement scellé la mort irrémédiable et logique d’un concept qui ne tenait que par une forme de naïveté assez pure. Juste de quoi retrouver son âme d’enfant le temps d’une heure – avant de réaliser, dans un soupir fatigué, qu’on est décidément devenu un peu trop vieux pour ça.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15/20

Retour à la bonne vieille formule et aux échecs « traditionnels » pour un Battle Chess 4000 qui ne prend certes aucun risque, cette fois, mais qui s'efforce d'assumer son concept jusqu'au bout grâce à une réalisation inattaquable, à un univers visuel plus original et à des saynètes beaucoup plus imaginatives. En dépit de la relative solidité du moteur de jeu (qui fait malgré tout n'importe quoi à bas niveau), la question de la simple pertinence du concept reste posée : à partir du moment où on a l'intention de jouer aux échecs, pendant combien de temps a-t-on envie d'être distrait par des animations comiques, même bien pensées ? Au-delà d'une certaine curiosité qui pourra survivre pendant quelques parties, on en revient vite au plateau en 2D pour jouer à un jeu d'échecs comme on peut en trouver gratuitement des centaines – souvent plus performants – aujourd'hui, mais on pourra au moins apprécier le plaisir de s'être amusé pendant une heure ou deux à découvrir des gags qu'on ne connaissait pas. On s'en contentera.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une approche dont l'intérêt diminue en flèche au fil du temps
– Une intelligence artificielle qui fait n'importe quoi à bas niveau

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Chess 4000 sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« On joue pour découvrir et admirer les animations. Une fois l’aspect découverte épuisé, il demeure un excellent jeu d’échecs capable de faire « toucher les épaules » à la plupart des joueurs. »

Jacques Harbonn, Tilt n°112, Mars 1993, 17/20

« Bien que Battle Chess 4000 paraisse posséder les qualités d’un vrai jeu d’échecs, je m’interroge quand même sur un point : quel public vise-t-il ? Est-ce un jeu d’échecs ou un jeu drôle ? Difficile de concilier les deux, non ? Dans un cas, l’animation déconcentre, dans l’autre on doit réfléchir pour assister aux combats délirants entre les pièces ! »

Morgan Feroyd, ibid.

Dark Sun : Shattered Lands

Développeur : Strategic Simulations, Inc.
Éditeur : Strategic Simulations, Inc.
Testé sur : PC (DOS)
Disponible sur : Linux, Mac OS, Windows
Présent au sein des compilations :

  • Dungeons & Dragons : Ultimate Fantasy (1995 – PC (DOS))
  • Three Worlds of Official Dungeons & Dragons 2nd Edition Computer Games (1995 – PC (DOS))
  • Advanced Dungeons & Dragons Masterpiece Collection (1996 – PC (DOS))
  • Dungeons & Dragons : Dark Sun Series (2015 – Linux, Mac OS, Windows)

En vente sur : GOG.com (Linux, Mac OS, Windows), Steam.com (Linux, Mac OS, Windows)

La licence Dark Sun (jusqu’à 2000) :

  1. Dark Sun : Shattered Lands (1993)
  2. Dark Sun : Wake of the Ravager (1994)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel i386 – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 2Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 1X (150ko/s)
Mode graphique supporté : VGA
Cartes sons supportées : AdLib/Gold, ARIA Chipset, General MIDI, General MPU-401 MIDI Devices, Gravis Ultrasound/ACE, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-I, Roland Sound Canvas, Sound Blaster/Pro/16, Thunderboard
Système de protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En 1992, l’union autrefois idyllique entre Strategic Simulations, Inc. et la licence Donjons & Dragons commençait à sérieusement battre de l’aile.

Du côté de SSI, tout d’abord, l’enthousiasme initial qui avait entouré le triomphe critique et commercial de Pool of Radiance se sera fatalement essoufflé, la faute autant à un marché saturé de « Gold Boxes » (neuf jeux en cinq ans, sans même parler des « Silver Boxes » qui les accompagnaient) qu’à une baisse notable de la qualité de ces dernières, le poids des années se faisant de plus en plus sentir sur un moteur de jeu resté prisonnier des contraintes des ordinateurs 8 bits pour lesquels il avait été conçu – et qui commençait à faire sourire face à des productions de pointe à la Ultima VII. Conséquence : les ventes auront logiquement suivi la pente déclinante de l’intérêt des joueurs, et là où Pool of Radiance s’était écoulé à plus de 260.000 exemplaires à son lancement, The Dark Queen of Krynn, la dernière des « Gold Boxes », aura à peine dépassé les 40.000 copies vendues. L’embellie passagère provoquée par le succès d’Eye of the Beholder, dernier titre de la licence à avoir franchi le cap des 100.000 ventes, n’aura pas survécu au rachat de Westwood Studios par Virgin Games, et dans l’ensemble les résultats financiers n’avaient pas de quoi faire sourire les responsables du studio américain.

Pour être honnête, du côté de TSR – détenteurs de la licence Donjons & Dragons –, l’ambiance n’était pas meilleure, et pas seulement parce que les ventes des « Gold Boxes » étaient en chute libre ou que SSI avait échoué à porter la plupart de ses jeux sur consoles. La concurrence commençait également à se faire féroce sur le marché des jeux de rôles papier, et l’émergence de concurrents plus accessibles comme Vampire : La Mascarade et bientôt celle d’un certain Magic : L’Assemblée semblait prendre de court une firme dont la seule réponse était de sortir systématiquement des tombereaux de nouveaux modules et univers exclusifs, achevant de rendre la licence encore plus opaque et encore plus impénétrable aux yeux des néophytes.

L’accord qui unissait les deux compagnies devait prendre fin au 1er janvier 1993, et le moins qu’on puisse dire, c’est que SSI jouait beaucoup plus gros que TSR au moment de chercher à obtenir la prolongation dudit accord. Au terme de tractations intenses, celui-ci se trouva finalement étendu de 18 mois, mais à une condition : plus question pour SSI de se reposer sur le moteur agonisant des « Gold Boxes » ; il allait être temps d’embrasser la modernité, et surtout de développer un jeu dont les chiffres de vente retrouve les sommets atteints par Pool of Radiance, rien de moins. Le studio américain, parfaitement conscient d’être en train de jouer sa survie, investit donc plus d’un millions de dollars dans la conception d’un nouveau moteur de jeu, lequel accoucha de ce qui aurait dû être la tête de lance de la nouvelle fournée de jeux estampillés Donjons & Dragons : Dark Sun : Shattered Lands.

Le titre du jeu trahit d’ailleurs déjà la première exigence de TSR, qui aura imposé l’usage d’un de ses nouveaux univers flambants neufs histoire de le promouvoir plutôt que de se reposer sur la licence désormais sur-employée des Royaumes Oubliés. Entre donc l’univers vaguement post-apocalyptique de Dark Sun, monde vidé de sa force vitale par des magiciens surpuissants, et qui présente une esthétique qui a le mérite d’être relativement originale, tendance « Mad Max chez les elfes et les nains ».

Comme souvent avec Donjons & Dragons, cet univers s’accompagne également d’une surcouche de règles, de races et de spécificités qui pourront décontenancer jusqu’aux habitués de la licence principale – sans même parler des néophytes, qui risquent d’être perdus pour de bon. Ainsi, la création des quatre personnages qui formeront votre équipe demande désormais de composer avec des races aussi exotiques que des demi-géants, des Muls (croisements de nains et d’humains) ou des Thri-Keens, espèce insectoïde à six pattes ne pouvant s’équiper d’aucune forme d’armure. Les classes sont également chamboulées, d’abord parce que le rôle de soigneur échoie désormais aux druides tandis que les clercs doivent choisir un élément dans lequel se spécialiser, mais aussi et surtout parce que toutes les races et les classes disposent désormais de pouvoirs psioniques en plus de leur éventuelle magie – et pour ne rien arranger, bien qu’il n’en soit fait mention nulle part, le jeu est clairement pensé d’un bout à l’autre pour des combattants multi-classés, n’hésitez donc pas à donner à tous vos personnages une classe de guerrier ou de gladiateur à côté de leur classe principale, vous ne le regretterez pas. À peine formé, votre groupe sera catapulté dans le feu de l’action, ou plutôt dans l’arène, puisque la partie s’ouvrira dans la peau d’un groupe de gladiateurs retenus esclaves, avec un premier objectif clair : parvenir à se faire la malle pour aller découvrir le vaste monde.

Une très bonne occasion de découvrir ce fameux nouveau moteur de jeu qui respire, à bien des niveaux, l’inspiration évidente qu’était celui d’Ultima VII. Non seulement les graphismes sont des kilomètres au-dessus de ce que permettait le moteur des « Gold Boxes », avec des détails dans tous les sens et des personnages fidèlement campés à l’échelle, mais en plus les développeurs de SSI ont visiblement bien travaillé puisque le jeu est nettement moins gourmand que son modèle et qu’il offre aussi et surtout un système de combat en tour-par-tour nettement plus satisfaisant que les affrontements largement automatiques du concurrent de chez ORIGIN Systems, et qui permet de mettre à contribution la large panoplie de possibilités additionnelles dont nous avons à peine égratigné l’étendue au paragraphe précédent.

Un changement qui se ressent autant dans l’ergonomie désormais intégralement à la souris, puisqu’il est possible d’interagir avec pratiquement tous les objets et les êtres vivants présents à l’écran, que dans la philosophie générale où les conversations jouent désormais un rôle nettement plus important que dans les « Gold Boxes » qui tendaient à se limiter à une longue suite de combats. Le joueur peut désormais choisir comment répondre, se montrer agressif ou conciliant, tuer tout ce qui bouge ou bluffer, et la bonne nouvelle est que la plupart des quêtes sont dorénavant pensées pour pouvoir être résolues de plusieurs manières, depuis la plus directe – et généralement la plus brutale – jusqu’à la plus intelligente. Un gros changement d’approche – où l’influence des Ultima se fait une nouvelle fois sentir – qui permet enfin au joueur de faire du roleplay au-delà du choix de sa classe et de ses caractéristiques, ouvrant ainsi la voie aux jeux de rôles « modernes » à la Fallout.

Jusqu’ici, le menu est très alléchant, d’autant plus que la présentation est nettement plus soignée, et on pourrait penser que Dark Sun : Shattered Lands a absolument tous les arguments pour pouvoir prétendre au titre de « nouveau Pool of Radiance » qu’il cherchait si désespérément à atteindre. Dans les faits, il n’en est pas si loin, grâce notamment à ce nouveau moteur qui laisse enfin une place prépondérante à l’aventure et à l’expérimentation, mais comme souvent avec SSI les problèmes commencent plutôt à se manifester du coté de l’écriture et de celui de la finition.

Tout d’abord, on pourra par exemple regretter que le joueur soit en quelque sorte pris à froid en se faisant bombarder au milieu des combats dès les premières secondes de jeu sans même se voir offrir le temps de découvrir l’univers, les enjeux et l’interface, avec une pression constante sur les épaules puisque chaque repos l’approche du prochain combat d’arène, lequel s’avèrera chaque fois un peu plus difficile que le précédent – et sans même un marchand pour pouvoir s’équiper. Un peu raide, comme courbe d’apprentissage ! Dans le même ordre d’idées, le monde du jeu est assez mal introduit, on n’a aucune notion précise de sa géographie, de sa géopolitique ou des rapports de force en présence, et le scénario se limite finalement à unir une poignée de villages contre une grande armée dont on n’est même pas certain de bien comprendre qui la mène ni pourquoi elle veut massacrer tout le monde. Difficile de se sentir impliqué dans un univers où tout le monde ne semble se soucier que de son petit nombril et nous envoyer faire des quêtes se résumant à récupérer un truc ou à tuer un machin, et dans l’ensemble le charme qu’aurait dû représenter la découverte de ce monde original se limite un peu trop à parcourir de grands déserts vides où on ne trouve que trop rarement quelqu’un à qui parler en tuant les monstres qui se présentent en route. Une philosophie pas si nouvelle que ça, en fin de compte…

De la même façon, on sent encore une interface pas bien dégrossie, notamment parce que les possibilités sont loin d’être évidentes. Par exemple, il est parfois possible d’escalader un mur ou d’ouvrir un passage, sauf que rien ne distingue ces éléments interactifs des autres, et qu’on se retrouve trop souvent dans des situations où on « peut » faire des choses » mais où rien n’indique qu’on puisse le faire, et il faut un long moment pour découvrir la réelle étendue des possibilités d’action du jeu – et à quels endroits celles-ci se manifestent.

Par exemple, dès la première zone du jeu, on peut choisir de donner à boire à un prisonnier dans l’arène, encore faut-il avoir ramassé un pot, s’être trouvé en présence d’une réserve d’eau, et avoir sélectionné l’objet dans son inventaire avant d’en sortir et d’enchaîner les clics droits jusqu’à ce que l’objet sélectionné réapparaisse pour enfin l’utiliser sur l’abreuvoir afin de le remplir. On est très loin de l’interface hyper-intuitive d’Ultima VII… De fait, le jeu se montre souvent bavard et verbeux alors qu’il n’a pas grand chose à dire, la zone de jeu se limite à une quinzaine de régions dont on fait très vite le tour, et la durée de vie du programme atteint au final péniblement les dix heures (je ne sais pas où Tilt était allé chercher le chiffre d’une « petite centaine d’heures », mais on en est très loin !). En y ajoutant de nombreux bugs et autres soucis de pathfinding, les promesses entrevues lors des premières minutes de jeu peinent trop souvent à se matérialiser, et sans passer un mauvais moment on a un peu trop souvent l’impression que ce Dark Sun n’est que l’ébauche du jeu qu’il aurait pu être avec un peu plus de soin – et surtout, avec un peu plus de temps.

Le succès public n’aura d’ailleurs clairement pas été au rendez-vous : en dépit d’un très bon accueil critique, le jeu se sera péniblement vendu à 45.000 exemplaires – à peine plus que les ultimes opus des « Gold Boxes » à bout de souffle, et surtout péniblement un sixième des ventes atteintes par Pool of Radiance en son temps. Pas exactement l’objectif recherché pour un titre ayant nécessité des investissements massifs et dix-huit mois de développement…

Après de nouvelles âpres négociations entre TSR et SSI, l’accord d’exclusivité les liant aura finalement été prolongé jusqu’au 1er janvier 1995, après quoi la licence serait accessible à d’autres développeurs – et SSI, qui n’avait pour ainsi dire vécu que de l’exploitation de Donjons & Dragons depuis 1988, se sera efforcé d’essorer son précieux sésame avec ses dernières forces (Al Qadim, Dark Sun : Wake of the Ravager, deux épisodes de Ravenloft, Menzoberranzan, Deathkeep…) avant d’être contraint de retourner à ses premières amours et de retrouver, ironiquement, le succès avec un jeu de stratégie à l’ancienne, un certain Panzer General. Mais ceci est une autre histoire… Pour l’heure, les joueurs souhaitant découvrir une expérience un peu moins balisée et un peu plus organique que celle des « Gold Boxes » seraient bien inspirés de laisser une chance à ce premier Dark Sun certes imparfait, mais plus accessible et plus dépaysant que ses glorieux prédécesseurs tout en conservant les possibilités d’un système de combat largement célébré. Il ne fait peut-être pas mouche à tous les niveaux – et les « Gold Boxes » avaient l’avantage de présenter des possibilités mieux encadrées et mieux définies, en dépit de leurs lourdeurs – mais il demeure un des rares représentants de cette première vague de jeux de rôles « de transition » avant l’ère du CD-ROM et du multimédia, et il conserve le charme de la relative originalité de son univers. Ça vaut peut-être bien une deuxième chance, non ?

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20

Lancé comme le programme qui devait apporter un second souffle à la licence Donjons & Dragons et renouer avec le succès de Pool of Radiance grâce à un moteur de jeu revu de fond en comble, Dark Sun : Shattered Lands aura hélas échoué à atteindre son objectif dans les grandes largeurs et annoncé le terme de la tumultueuse relation entre SSI et TSR. C'est d'autant plus dommage que c'était clairement un pas dans la bonne direction, quelque part vers Ultima VII, avec une interface nettement plus accessible, une aventure ne se résumant plus à une longue suite de combats et une véritable ouverture dans les possibilités de mener à bien les diverses quêtes du jeu. Malheureusement, l'univers imposé de Dark Sun est assez mal mis à contribution, et dans l'ensemble le jeu laisse trop souvent l'impression d'évoluer dans le brouillard : un monde mal présenté, des environnements trop vides, des possibilités pas assez claires faute d'être convenablement encadrées, des règles trop complexes, des combats pas assez profonds, des enjeux trop nébuleux, sans oublier de nombreux bugs. Il en résulte une expérience un peu frustrante où le joueur catapulté dans le feu de l'action met beaucoup de temps à trouver ses aises, et où la liberté offerte agit souvent comme un obstacle plus que comme comme un apport à une aventure qui n'acquiert jamais tout-à-fait l'épaisseur dont elle voudrait se doter. Un bon jeu de rôles, mais sans doute pas celui qu'on attendait à ce moment-là.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des enjeux mal introduits et qui peinent à se montrer intéressants...
– ...tout comme l'univers, qui échoue à exister autrement que comme une suite de grands déserts
– Des combats qui se résolvent trop souvent au corps-à-corps après s'être lancé un sort de hâte
– Un système de jeu fidèle au support papier mais incluant beaucoup de nuances complexes et souvent inutiles
– De nombreux bugs et soucis de pathfinding

Note : Une bonne partie des informations et des chiffres de ce test proviennent de l’excellente série d’articles du site américain The Digital Antiquarian traitant de SSI et de l’histoire des « Gold Boxes » que j’invite les anglophones à aller découvrir d’urgence.

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dark Sun : Shattered Lands sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Superbe. Shattered lands est tout simplement superbe. De fait, je le place directement au côté de Serpent Isle, parmi les meilleurs jeux de rôle en 3D isométrique. SSI a vraiment réussi à se renouveler ! Les graphismes sont beaux et très variés, la musique proche de la perfection et l’ergonomie originale bien conçue. Seule la durée de vie ne soutient pas la comparaison avec Serpent Isle : une petite centaine d’heures (c’est déjà pas mal)… »

Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°119, novembre 1993, 90%