Panzer Dragoon

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Développeurs : SEGA CS1 – Team Andromeda
Éditeurs : SEGA Enterprises Ltd. (Europe, Japon) – SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Titre alternatif : Andromeda (nom de code)
Testé sur : SaturnPC (Windows 9x)

La série Panzer Dragoon (jusqu’à 2000) :

  1. Panzer Dragoon (1995)
  2. Panzer Dragoon II : Zwei (1996)
  3. Panzer Dragoon Mini (1996)
  4. Panzer Dragoon Saga (1998)

Version Saturn

Date de sortie : 10 mars 1995 (Japon) – 11 mai 1995 (Amérique du Nord) – 30 août 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad, Mission Stick, Virtua Stick
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’une des caractéristiques fondamentales d’une tragédie, c’est que tout le monde en connait déjà la fin – et sait qu’elle est vouée à mal se finir, par définition. Il existe quelque chose d’universellement fascinant à assister au déroulé implacable de la fatalité en méditant sur l’hybris et sur la vanité humaine : on a beau savoir que le Titanic va couler, on ne peut s’empêcher d’observer le déroulement de l’inévitable désastre en se demandant à quoi ressemblerait le monde si le drame avait été évité.

Cela marche d’ailleurs également très bien avec l’histoire de la Saturn.

La clef est souvent de choisir la bonne cible au bon moment

On tend à l’oublier tant il est désormais établi, à juste titre, à quel point la guerre de la première génération de consoles post-16-bits aura été remportée haut-la-main par la PlayStation, mais la 32 bits de SEGA avait connu des débuts extrêmement prometteurs, en particulier au Japon – au point de connaître des ruptures de stocks, ce qui invitait alors Tom Kalinske, le directeur de SEGA of America, à déclarer qu’ils étaient en train de « tuer Sony ». Comme on le sait, la tendance se sera rapidement inversée, mais pour bien comprendre le caractère magique que pouvait encore revêtir la Saturn à ses débuts, il importe sans doute de se pencher sur ce qui sera resté une des « exclusivités » (je mets le terme entre guillemets, le jeu ayant été porté sur PC) les plus marquantes de la console, une de celles qui décrochaient les mâchoires, faisaient briller les yeux, et amenaient à penser que la nouvelle génération n’allait être qu’un long voyage ininterrompu vers le merveilleux. Autant le dire : en dépit de la présence de succès comme Virtua Fighter dès le lancement de la machine, s’il était un jeu qui invitait à acheter immédiatement une Saturn en 1995, c’était bien Panzer Dragoon.

Vous, un dragon, et l’infini à perte de vue : le pied !

L’histoire du jeu, plaçant l’humanité dans un monde où l’ancienne société s’est effondrée, est à la fois très simple et particulièrement confuse : je vous laisserai juger, après avoir visionné l’introduction, si vous comprenez quelque chose aux forces en présence et à leur rôle dans un monde où une technologie avancée a été redécouverte sans qu’on sache trop au bénéfice de qui.

Mieux vaudra être très réactif dans les tunnels du quatrième niveau

Ce n’est de toute façon pas vraiment important : notre histoire à nous commence dans la peau d’un chasseur qui, au terme d’une traque infructueuse, se retrouve miraculeusement propulsé chevaucheur de dragon par un cavalier agonisant avant d’hériter d’une mission précise : empêcher un autre dragon de rejoindre une tour ancienne dont vous avez reçu la vision. Vous voilà donc sur votre fière monture, comme une version futuriste des chevaliers de LanceDragon, prêt à parcourir les sept niveaux qui vous amèneront à sauver le monde, ou juste votre pays, ou on-ne-sait-trop-quoi parce qu’en fait, comme on va le voir plus bas, l’important n’est pas vraiment là.

Dès le premier niveau, le jeu fait honneur aux capacités de la console

Le jeu en lui-même est un rail shooter en 3D. le principe est aussi simple qu’il l’a toujours été : promenez un viseur à l’écran, détruisez les cibles avant qu’elles ne soient en position de vous toucher. Histoire d’épaissir un peu le concept, le titre de l’Andromeda Team ajoute néanmoins quelques subtilités à ce qui aurait pu autrement n’être qu’un jeu de tir comme on les pratiquait avec un pistolet optique : premièrement, le fait de voir votre monture et son cavalier signifie que vous pouvez les déplacer à l’écran et ainsi éviter les projectiles, les pièges ou même les éléments de décor qui viendront à votre rencontre.

L’opposition grimpe en puissance au fil des niveaux

Plus original encore : rien ne vous oblige à regarder droit devant vous : les boutons de tranche du joypad feront pivoter la vue par incréments de 90°, vous laissant faire face à ce qui pourrait venir de n’importe quel côté – et histoire de ne pas passer votre temps à regarder partout à la recherche d’ennemis, un radar en haut à droite a l’excellente idée de vous tenir informé de la position des adversaires ET de leurs projectiles en temps réel. Dernier raffinement : en maintenant le bouton de tir appuyé, il est possible de « verrouiller » les adversaires et de lâcher une salve de tirs à tête chercheuse qui pourront facilement vous débarrasser de l’opposition – à condition, donc, d’avoir sacrifié quelques précieux dixième de secondes à arrêter de tirer le temps d’acquérir vos cibles. En résumé : juste ce qu’il faut pour rendre le gameplay plus intéressant et moins limité sans pour autant en faire une usine à gaz avec trop de critères à prendre en compte. Un bon début.

Ces quelques ajouts ne pourraient cependant justifier en rien l’aura exceptionnelle dont le titre bénéficie encore de nos jours auprès des joueurs ayant posé les yeux sur lui à sa sortie.

Le jeu n’hésite pas à alterner intérieurs et extérieurs au sein d’un même niveau

C’est certainement le bon moment pour aborder la réalisation du jeu, avec une 3D qui avait de quoi faire son petit effet à l’époque : les reflets des bâtiments dans l’eau des lagunes du premier niveau étaient quelque chose qu’on n’avait encore jamais eu l’occasion de voir à l’époque, et la présence d’une musique symphonique au souffle épique transmettait à la perfection un sentiment de liberté d’autant plus grisant qu’il parvenait à faire oublier à la perfection le fait que toute l’aventure se déroulait, précisément, sur des rails. Dès le départ, Panzer Dragoon se sera affirmé comme le titre le plus impressionnant techniquement de toute la ludothèque de la jeune console, laissant entrevoir des promesses enthousiasmantes quant aux futures productions de la machine – lesquelles n’auront, pour la plupart, que beaucoup trop rarement été tenues. Les textures étaient peut-être granuleuses, les environnements un peu vides, mais à l’époque c’était la première fois – et également l’une des dernières – que les utilisateurs de PlayStation baissaient les yeux face aux capacités de la Saturn. la 3D a d’ailleurs relativement bien vieilli : c’est dynamique, c’est varié, et c’est surtout d’une fluidité totale et sans la moindre variation de framerate ; une barre placée très haut d’entrée de jeu… et qui n’aura hélas pas souvent été à nouveau atteinte.

Attention : lorsque la caméra pivote, vous ne contrôlez plus directement votre dragon, ce qui signifie que vous ne pouvez plus éviter les tirs

La véritable erreur serait malgré tout de limiter Panzer Dragoon à une sorte de prouesse technique précoce n’ayant servi qu’à vendre le hardware de la console. Certes, la très longue cinématique d’introduction aura fait rêver bien des joueurs à l’époque – imaginez-vous découvrir une pareille séquence en 3D pré-calculée en sortant d’une partie sur Mega Drive ou Super Nintendo – mais il convient ici avant tout d’invoquer la formidable ambiance de l’univers.

L’action est parfaitement rythmée

Quand on parle de « post-apocalyptique », on tend à imaginer des déserts à la Mad Max ; avec ses lagunes et ses forêts tropicales côtoyant les ruines anciennes, le titre de la Team Andromeda évoque davantage une rencontre entre Miyazaki et Moebius, une sorte d’Arzach chevauchant un dragon en lieu et place de son inimitable volatile et évoluant au milieu des machines volantes de Nausicaä de la Vallée du Vent. Le design des personnages de Manabu Kusunoki est d’ailleurs si proche du style du célèbre illustrateur français qu’on ne peut que se montrer surpris que celui-ci ne soit crédité que pour l’illustration de la jaquette de la version japonaise du jeu ! Toujours est-il qu’il y a, dans l’atmosphère du jeu, un dépaysement particulier qui donne le sentiment d’évoluer dans un monde infini dont on ne perçoit que quelques bribes, et qui donne parfois envie de s’évader pour partir en exploration comme on pouvait parfois le ressentir aux plus belles heures de titres à la Another World.

Les quelques cinématiques in-game ne vous apprendront pas grand chose, mais ce n’est pas grave

En d’autres termes, il y a une forme de poésie visuelle et auditive dans ces ruines vénitiennes reflétées dans l’eau ou dans ces plaines balayées par le vent qui font de Panzer Dragoon une épopée beaucoup plus marquante qu’un simple jeu de tir en 3D. C’est un bon jeu, mais c’est surtout une expérience, un voyage qu’on peut ré-entreprendre régulièrement avec plaisir parce qu’il a conservé, par séquences, son caractère dépaysant et parfois même onirique. Si tous les jeux de la Saturn avaient été capable de véhiculer de telles sensations, le destin de la console de SEGA et l’issue de sa « guerre » contre Sony auraient sans doute été bien différents, mais ceci est une autre histoire…

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20 La plus grande prouesse de Panzer Dragoon n'est pas d'être un rail shooter en 3D n'introduisant finalement que très peu d'idées neuves, c'est plutôt sa capacité à le faire oublier au joueur. Porté par une ambiance à part évoquant fréquemment les plus belles planches d'Arzach, le titre de la Team Andromeda est un voyage avant d'être un jeu d'action, un simple aperçu de ce monde post-apocalyptique où les plaines minérales côtoient les ruines perdues au milieu des lagunes. Les combats épiques laissent souvent la place à de courtes respirations où on se surprend à penser, comme dans Loom ou Another World, qu'on aimerait vraiment s'échapper pour explorer le monde qui s'étend autour de notre dragon et de son cavalier, et c'est un titre auquel on aime revenir comme on aime reprendre contact, de temps à autre, avec un vieil ami. Rien d'étonnant à ce que ce premier contact avec la Saturn ait fait naître des attentes qui, dans leur grande majorité, n'auront jamais pu être comblées : la barre avait peut-être simplement été placée trop haut et trop vite. À (re)découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – Un gameplay finalement très basique – Pas toujours facile de déterminer si notre monture est bien placée pour éviter une attaque – Aucun checkpoint

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Panzer Dragoon sur un écran cathodique :

Version PC (Windows 9x)

Développeur : SEGA PC
Éditeurs : SEGA Enterprises Ltd. (Japon) – Expert Software, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Europe Ltd. (Europe)
Date de sortie : 1996 (Amérique du Nord) – 5 décembre 1996 (Europe) – 14 mars 1997 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique : DirectX : 3 – API : NV1 – Résolution : 320×240, 640×480 / 8 bits, 16 bits

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Avant d’aborder le test de cette version Windows à proprement parler, il convient sans doute de préciser que Panzer Dragoon aura existé en deux versions sur PC. La première, optimisée spécifiquement pour le chipset NV1 (très proche de celui qui équipait la Saturn), n’aura apparemment été commercialisé qu’en bundle avec la carte accélératrice EDGE 3D, et exclusivement en Amérique du Nord. Elle aura été suivie quelque mois plus tard par une version software internationale nécessitant, elle, au moins un Pentium pour fonctionner – et qui sera le centre de notre attention, la version « NV1 » étant aussi délicate à trouver qu’impossible à émuler au moment où j’écris ces lignes, la réservant de fait à une catégorie très précise de joueurs ayant à la fois la chance de la posséder et une configuration d’époque sous la main. Sans surprise, on retrouve le contenu du jeu à peu près à l’identique, même s’il semblerait que certaines cinématiques de fin du jeu aient disparu. Du côté de la réalisation, et même s’il fallait avoir un processeur très puissant pour espérer en profiter à l’époque, le jeu est jouable en 640×480 (en fait, en 640×400 avec deux grandes bandes noires) et en 16 millions de couleurs. En revanche, l’effet de brouillard qui camouflait l’apparition des polygones a été retiré, ce qui signifie que le clipping sera plutôt brutal. Évidemment, on aurait préféré que le jeu tire parti des APIs Direct3D ou Glide, mais en l’état le résultat est assez convaincant dès l’instant où l’on joue sur une configuration de type Pentium II à 200MHz. Niveau jouabilité, mieux vaudra privilégier le joystick au clavier, mais les sensations demeurent globalement identiques à celles de la version Saturn. Bref, une alternative convaincante pour ceux qui parviendront à la faire tourner.

La même chose, mais en plus fin : à vous de voir si cela vous convainc

NOTE FINALE : 16/20

Panzer Dragoon livre sous Windows à peu près la prestation à laquelle on pouvait s’attendre – c’est à dire la même chose que sur Saturn, en plus fin et en légèrement moins jouable. Dommage que le jeu ne reconnaisse aucune autre carte accélératrice que celles équipées du chipset NV1.

F-1 Challenge

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Développeur : Bell Corporation
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titre original : F-1 Live Information (Japon)
Titres alternatifs : F-1ライブインフォメーション (graphie japonaise), F1 Challenge (Amérique du Nord)
Testé sur : Saturn

Version Saturn

Date de sortie : 2 novembre 1995 (Japon) – Février 1996 (Europe) – 9 septembre 1996 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Arcade Racer, manette
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou carte mémoire

Vidéo – L’introduction du jeu :

Parmi les genres vidéoludiques à s’être adaptés en un temps record au passage à la 3D, le jeu de course a fait figure de pionnier. Il faut dire que même à l’ère de la 2D, l’obsession était déjà à la simili-3D via des titres comme OutRun ou Chase H.Q., et qu’on sentait bien que la révolution déjà annoncée par Hard Drivin’ en 1989 avait un caractère naturel, pour ne pas dire quasi-inéluctable.

Choisir votre pilote n’a pas d’autre incidence que la couleur de votre voiture

Et de fait, comme un symbole, la génération 32 bits aura systématiquement été inaugurée par un jeu de course en 3D : Ridge Racer pour la PlayStation, Crash’n Burn pour la 3DO, Daytona USA pour la Saturn. Les jeux de course, justement, la Saturn n’en aura pas nécessairement manqué au long de son histoire chaotique, SEGA Rally Championship étant sans doute resté comme le plus célèbre ; mais comme un symbole du rapide essoufflement de ses ventes ayant suivi son départ canon au Japon, la console de SEGA n’aura hébergé dans toute sa ludothèque qu’un seul et unique titre mettant en scène des courses de formule un. Pour les amateurs des bolides les plus célèbres désirant se consacrer à leur passion sur Saturn, il n’y a donc qu’une seule réponse : F-1 Challenge.

Si vous cherchez le jeu le plus marquant de la ludothèque de la Saturn, ce n’est pas ici

D’entrée de jeu, le titre de Bell Corporation s’avance avec ses gros sabots et surtout avec sa licence de la FOCA affichée en grand sur la boîte. La garantie de retrouver tout le championnat de F1 de la saison 1995-1996, avec ses trente pilotes, ses quinze écuries et ses dix-sept circuits ?

Seuls trois circuits « authentiques » sont disponibles. Ça ne valait peut-être pas la peine de déranger la FOCA pour ça…

Changez tout de suite d’idée : le fait que le titre n’ait pas obtenu la licence de la FIA et, au moins aussi vraisemblablement, une ambition placée beaucoup plus bas que ne l’aurait exigé la modélisation de l’intégralité des grands-prix amènent à un contenu nettement plus modeste qu’on aurait pu l’imaginer : cinq pilotes sélectionnables, parmi les écuries les plus célèbres (plus Tyrell, sans doute choisie parce qu’elle avait un pilote et un moteur japonais) et six circuits, dont seulement trois correspondent à des course existantes : Hockenheim, Suzuka et Monte Carlo. Et les trois derniers ? Eh bien il s’agit tout simplement de trois déclinaisons du même circuit imaginaire baptisé « Neo City » et désignés par leur niveau de difficulté. Je sens que ceux qui se frottaient les mains à l’idée de se lancer sur un équivalent de MicroProse Formula One Grand Prix avec une technologie plus avancée commencent déjà à déchanter – autant se faire une raison : F-1 Challenge est un jeu d’arcade beaucoup plus proche, dans sa jouabilité, sa philosophie et son contenu de titres comme Virtua Racing ou Ridge Racer que d’une simulation de pointe.

Comme dans beaucoup de jeu de course de la période, la vue extérieure est trop rapprochée pour être autre chose qu’un gadget

Cela se ressent d’ailleurs dès la sélection du mode de jeu : et pour cause, il n’y en a que deux. Le mode appelé « arcade » vous propose de participer à n’importe laquelle des six courses, systématiquement en huit tours et avec 24 concurrents en vous incluant, et le mode « time trial » vous proposera la même chose, mais seul, pour pouvoir peaufiner vos temps.

J’espère que ce tour d’honneur vous plaira, parce que vous ne pourrez pas le passer

Ne cherchez même pas un mode « championnat » ou équivalent vous permettant d’enchaîner les courses, il n’y en a pas : sitôt une course finie, le programme vous renverra directement devant le logo SEGA au lancement du jeu, sauf si vous avez gagné la course, auquel cas vous devrez d’abord assister à l’intégralité du tout d’honneur de votre pilote sans aucun moyen de le passer. N’espérez pas non plus apercevoir un podium, ni même une modélisation des pilotes ; vous ne verrez pas un seul être humain de toute la partie en-dehors de la photo qui accompagnera votre sélection de véhicule, et les options de configuration se limitent à l’attribution des boutons et au choix de la difficulté, soit même pas l’équivalent de ce qu’offrait Daytona USA à son lancement six mois plus tôt.

Conseil : ne vous arrêtez jamais aux stands, le temps perdu n’en vaut simplement pas la peine

Bref, ce n’est pas du côté du contenu qu’on attendra le salut, mais que vaut l’essentiel, à savoir les courses en elles-mêmes ? On a sans doute déjà dit l’essentiel en parlant de course typée arcade en 3D, il convient néanmoins de préciser les deux faiblesses les plus notables du jeu. Tout d’abord, F-1 Challenge cherche à se doter d’une sous-couche de simulation qui permet de modifier les réglages de sa voiture avant la course.

Les réglages ont un impact à peu près inexistant sur votre conduite

Très sincèrement, ces réglages consistant à choisir l’angle d’inclinaison des vos ailerons avant et arrière, votre quantité de carburant ou votre type de pneus n’ont à peu près aucune incidence notable sur la conduite, laquelle se limitera à écraser l’accélérateur 95% du temps en profitant de la totale invulnérabilité de votre véhicule pour ne pas trop vous préoccuper des collisions quasi-inévitables avec le décor sur des pistes très étroites. Cependant, un conseil : ne choisissez JAMAIS les pneus censés être les plus adhésifs, à la durée de vie plus courte : non seulement vous ne sentirez probablement aucune différence en termes de sensations de pilotage, mais en plus, le titre intègre une très naïve gestion de la dégradation de la gamme qui se traduit par un véhicule partant en dérapages incontrôlables au bout de trois tours de pistes, vous obligeant ainsi à un à deux arrêts au stand par course… alors que vous pourrez facilement boucler les huit tours sans interruption avec des pneus normaux, vous laissant ainsi l’occasion de doubler sans effort la moitié des concurrents qui, eux, passeront aux stands !

J’espère que vous aimez les gros pâtés gris, parce que c’est à cela que ressemblent les décors

Le deuxième problème vient de la réalisation, qui est loin d’être ébouriffante. Oh, rien de scandaleux, le problème étant que non seulement on est très loin du niveau de ce qu’offrait la concurrence sur PlayStation, au hasard un Ridge Racer déjà supérieur en tous points un an plus tôt, mais que les textures grossières et la vue placée très bas (la vue extérieure étant, elle, placée trop près) font qu’on n’y voit souvent pas grand chose et qu’on a très peu de temps pour anticiper quoi que ce soit sur les courses les plus complexes.

Le time trial, ou la même chose sans les concurrents

Ce n’est ni hideux (même si ce n’est pas beau non plus), ni injouable, c’est juste globalement assez médiocre et on comprend que le titre ait été pressé de sortir à toute vitesse avec un SEGA Rally Championship nettement plus convaincant dans tous les domaines qui s’apprêtait à débarquer moins de deux mois plus tard ! C’est d’ailleurs le sentiment que laisse ce F-1 Challenge : celui d’un jeu pensé pour combler un vide… sans y parvenir. Ce qui aurait dû être la seule véritable simulation de F1 de la console n’en est même pas une, et les joueurs cherchant absolument à piloter une formule un avec une conduite arcade seront sans doute mieux inspirés de le faire sur le Virtua Racing de la console, en dépit de ses défauts. Quant aux amateurs de simulation, peut-être auront-ils plus de chance avec NASCAR 98, mais on sent bien que ce n’était de toute façon pas le genre le plus représenté sur Saturn – ce qui ne rend que plus dommage le fait que le titre de Bell Corporation ait cherché à s’insérer dans un genre arcade surreprésenté plutôt que de réellement combler le manque. Au final, un petit jeu très oubliable et vraiment pas assez bien réalisé ni assez technique pour se faire un nom – vraiment pas ce dont la console avait besoin.

Vidéo – Course : Neo City Novice :

NOTE FINALE : 13/20 F-1 Challenge est un jeu d'arcade qui cherche péniblement à se doter d'un aspect « simulation », ce qu'il échoue à faire – sauf à considérer le fait de transformer votre véhicule invulnérable en savonnette incontrôlable tous les trois tours si vous faites l'erreur de choisir des pneus adhésifs et de vous contraindre à des courses interminables sur des circuits vides où la 3D médiocre du programme pénalise la visibilité comme un gage de réalisme. Entre un contenu très limité (six circuits dont trois variations du même, deux modes de jeu), une réalisation dépassée et des sensations de course qui ne sont décentes que tant que vous avez les bons pneus, il y a certes un jeu correct à domestiquer longuement avant d'espérer gagner une course, mais sincèrement rien qui puisse donner une bonne raison à un joueur de lâcher sa partie de SEGA Rally pour plus d'une heure. Pas catastrophique, mais clairement à réserver aux mordus.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une réalisation graphique vraiment pas impressionnante... – ...et des sensations de course ratées – Seulement deux angles de caméra, dont aucun avec un réel recul – Pas de championnat ni aucun mode de jeu qui permette d'enchaîner les courses – Une licence exploitée n'importe comment, avec seulement trois vrais circuits – Des réglages dont les effets sont totalement indécelables – Options de configuration minimales

Bonus – Ce à quoi peut ressembler F-1 Challenge sur un écran cathodique :

Motherbase

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Développeurs : CSK Research Institute Corp.
Éditeur : SEGA Enterprises Mtd.
Titre original : Parasquad (Japon)
Titres alternatifs : パラスコード (graphie japonaise), Zaxxon’s Motherbase 2000 (États-Unis)
Testé sur : 32X

La série Zaxxon (jusqu’à 2000) :

  1. Zaxxon (1982)
  2. Super Zaxxon (1982)
  3. Zaxxon 3-D (1987)
  4. Motherbase (1995)

Version 32X

Date de sortie : Juin 1995 (États-Unis, Europe) – 14 juillet 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette (3 ou 6 boutons)
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En termes de lancements de consoles ratés, SEGA n’avait déjà plus beaucoup de leçons à recevoir en 1995. Après le grand classique « vendre une console avec un line-up famélique de titres absolument pas adaptés au hardware et avec une durée de vie de quinze minutes face à Super Mario Bros. 3« , on se demandait quelle idée de génie allait bien pouvoir germer dans l’esprit de la compagnie japonaise pour éclipser la précédente.

Attention, il y a du monde à l’écran et pas autant de place pour bouger qu’on pourrait le croire

Finalement, après des semaines de réflexion, ce fut l’audacieuse approche « concurrencer sa propre console 32 bits en commercialisant simultanément une extension 32 bits pour la console précédente » qui fut choisie. Un mouvement osé, il faut bien le reconnaître. Mais qui dépassa toutes les attentes : quelques mois à peine après son lancement, la 32X était un bide plus retentissant encore que la précédente extension, le Mega-CD, et la Saturn était déjà en difficulté avant même d’être commercialisée en Europe. Pour l’occasion, on s’avisa qu’histoire de laisser une chance à la concurrence, il allait peut-être être temps de s’imposer un handicap en essayant de vendre des jeux pour la 32X. CSK Research Institute ayant développé un shoot-them-up isométrique, quelqu’un au sein du service marketing américain décida qu’on pourrait aussi bien le rattacher à la saga Zaxxon – parce que rien ne vaut une référence de treize ans d’âge pour vendre une machine de pointe. Mais dans les faits, Motherbase (son titre de travail, qui sera resté tel quel en Europe) est un titre qui n’entretient avec la célèbre série de SEGA un lien qui ne s’étend pas beaucoup au-delà du genre et de la vue adoptée.

Bienvenue dans le futur de 1995 !

Inutile de s’attarder sur le scénario : le jeu ne s’embarrasse même pas à le présenter. Oh, il y a bien quelques lignes dans le manuel, mais n’attendez pas une cinématique, une mise en contexte, un vague enjeu : vous êtes là pour tout détruire et vous le savez – et puisque le jeu s’intitule Motherbase, eh bien c’est probablement la nature de votre objectif.

Au milieu du désert, face à une araignée géante

Au menu : neuf niveaux de shoot-them-up en vue isométrique à la Zaxxon, donc, pour ceux qui suivent, même si dans les faits, l’altitude n’étant pas gérée, on pourrait tout autant rapprocher le jeu d’un certain Viewpoint qui intégrait, lui aussi, la 3D dans certains de ses modèles d’ennemis. Dans un univers fatalement futuriste – aucune originalité esthétique à prévoir au-delà de l’aspect vaguement insectoïde de votre vaisseau – le déroulement est couru d’avance : suivre le défilement imposé, arriver au bout du niveau, vaincre le boss et recommencer jusqu’à destruction totale de la menace extraterrestre. Du classique. Avec de la 3D partout pour mettre en valeur la 32X, ce que le titre fait plutôt bien : c’est rarement impressionnant pour des joueurs qui ont largement eu l’occasion d’en voir d’autres dans le domaine, mais ça change agréablement de ce qu’on avait l’habitude de voir sur les consoles 16 bits de l’époque, ou la 2D régnait logiquement en maître.

Malgré une surabondance d’environnements mécaniques, vous pourrez profiter d’un peu de nature

La bonne nouvelle, c’est que Motherbase n’aurait pu n’être que cela – une démonstration technique chargé de montrer tous les polygones que la coûteuse extension pouvait afficher simultanément (avec quelques ralentissements, néanmoins) – mais qu’il aura quand même décidé de prendre quelques risques. Le plus intéressant reste à n’en pas douter son système de power-up : ne vous attendez pas à collecter des sphères pour augmenter la puissance de votre tir, ce n’est pas comme ça que ça marche.

La réalisation fait le travail : on ne se croirait pas sur Mega Drive

En fait, la fonction de saut attribuée par défaut au bouton B de la manette ne sert pas juste à éviter des obstacles ou des tirs : elle peut également vous permettre de sauter sur un adversaire… pour en prendre le contrôle. Vous commencerez d’ailleurs le premier niveau à bord d’une structure alliée, que vous pourrez quitter, comme toutes les autres, en sautant de la même manière que pour l’investir. Apprendre à passer d’un véhicule à l’autre sera d’ailleurs un réflexe vital : non seulement pour quitter un véhicule endommagé avant qu’il n’explose (vous mourez en un coup lorsque vous n’êtes pas à l’intérieur d’un autre vaisseau), mais aussi et surtout parce qu’après quelques secondes (vous entendre un « ready » pour vous signalez que le moment est venu), votre astronef « absorbera » alors le pouvoir de l’appareil emprunté, qui deviendra ainsi son pouvoir secondaire activable avec C. Certains de ces pouvoirs pouvant être cumulés (vous pouvez par exemple acquérir un ou plusieurs satellites et même une smart bomb), apprendre à vous adapter à l’opposition pour en tirer votre force, un peu à la façon du système de capture de Gaiares, sera la clef du jeu.

Le jeu n’hésite pas à utiliser la 3D pour déployer des boss de grande taille

Une très bonne idée qui aurait à coup sûr pu faire basculer Motherbase dans le camp des excellents jeux si le gameplay n’avait pas à souffrir de quelques approximations qui viennent un peu gâcher son potentiel. La première résultant d’ailleurs du fameux système de capture : vous ne pouvez pas prendre le contrôle de tous les appareils adverses. Mais alors, comment reconnaître un vaisseau dont vous pouvez prendre le contrôle ? Eh bien justement : vous ne pouvez pas. Et comme un saut sur une unité adverse non-contrôlable se traduira stupidement par une mort immédiate (et donc par un retour au dernier point de passage, à l’ancienne), autant dire qu’on n’est pas trop tenté de prendre des risques pour expérimenter dans un jeu où c’est pourtant absolument fondamental !

Il n’est pas toujours facile d’évaluer la position des adversaires dans l’espace

Une erreur de game design assez grossière, qui se cumule avec une limite plus technique, celle-là : des masques de collision imprécis qui font qu’on ne sait pas toujours pourquoi on meurt alors qu’on pensait avoir évité un obstacle ou un projectile. C’est d’ailleurs particulièrement problématique avec ces boss gigantesques qui mettent en jeu tout l’espace à l’écran sans nous laisser des repères visuels pour savoir s’ils sont ou non à notre hauteur ; un de ces moments où la poudre-aux-yeux joue clairement en défaveur de la jouabilité. C’est d’autant plus dommage que le jeu serait largement assez exigeant sans cet artifice, à tel point qu’on aurait vraiment apprécié un mode deux joueurs en coopératif plutôt que de le limiter à des duels compétitifs assez inintéressants sur la durée. Mais quitte à dénicher un titre qui vaille la peine d’être joué au sein de la famélique ludothèque de l’éphémère 32X, vous pouvez sans aucun doute laisser une chance à ce Motherbase, qui aura le mérite d’être suffisamment dépaysant, tant sur le plan du gameplay que sur celui du graphisme, pour casser un peu la routine du genre.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20 Bien qu'il ait hérité du nom de Zaxxon dans sa version américaine, Motherbase est davantage un shoot-them-up situé quelque part entre Viewpoint et Gaiares. Au-delà de sa réalisation en 3D chargée de dévoiler ce que la 32X a dans le ventre – ce qu'il fait d'ailleurs plutôt bien, imposant pour l'occasion une patte graphique à la StarWing – le titre a surtout pour lui un système d'upgrade original en dépit de quelques maladresses. Le résultat est une cartouche exigeante avec ses moments de bravoure et même un mode deux joueurs (hélas uniquement compétitif), mais qui pèche par un certain manque de renouvellement et surtout par une imprécision assez dommageable de ses masques de collision. De quoi s'extraire suffisamment de la masse pour soulever l'intérêt des amateurs du genre, mais clairement pas de quoi vendre la coûteuse extension de la Mega Drive par palettes entières. À découvrir.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un système d'upgrade original, mais pas totalement bien pensé... – ...qui vient participer involontairement à une difficulté parfois frustrante... – ...la faute au système de points de passage et surtout à l'imprécision des masques de collision

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Motherbase sur un écran cathodique :

Battle Arena Toshinden

Cette image provient du site https://www.jeuxvideo.com/

Développeur : Tamsoft Corporation
Éditeur : TAKARA Co., Ltd.
Titre original : 闘神伝 (Toh Shin Den, Japon)
Testé sur : PlayStationGame BoyPC (DOS)

La série Battle Arena Toshinden (jusqu’à 2000) :

  1. Battle Arena Toshinden (1995)
  2. Battle Arena Toshinden 2 (1995)
  3. Battle Arena Toshinden Remix (1995)
  4. Battle Toshinden URA : Ultimate Revenge Attack (1996)
  5. Battle Arena Toshinden 2 Plus (1996)
  6. Battle Arena NiToshinden (1996)
  7. Battle Arena Toshinden 3 (1996)
  8. Toshinden 4 (1999)

Version PlayStation

Date de sortie : 1er janvier 1995 (Japon) – Août 1995 (États-Unis) – Septembre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Manette
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

La PlayStation est désormais entrée avec une telle évidence – et une telle rapidité – dans l’histoire du jeu vidéo qu’on tend à oublier – ou à ignorer – que son succès planétaire n’a pas été aussi immédiat ni aussi incontestable qu’on le pense. Certes, à l’échelle occidentale, les bourdes répétées de SEGA et l’absence de Nintendo, empêtré dans le développement de son « Ultra 64 », auront assez rapidement ouvert une voie royale à la machine que personne n’avait vu venir.

Le roster malingre, typique d’un jeu de début de génération

Mais à l’échelle du Japon – qui ne fait décidément rien comme tout le monde – les choses étaient différentes : la Saturn, suivant une trajectoire exactement inverse à celle de sa grande sœur la Mega Drive, y aura connu un excellent lancement. En dépit d’un line-up assez famélique, SEGA avait en effet su avancer une killer app avec Virtua Fighter, grand succès de l’arcade devenu le fer de lance de sa nouvelle console – au point de supplanter la machine de Sony, qui ne pouvait évidemment pas compter sur ses propres licences venues de l’arcade comme son concurrent (mais qui pouvait compter sur celles de Namco, grand rival de SEGA). Mais coup de théâtre : à une époque où la 3D devenait la nouvelle fureur et où les joueurs ne semblaient plus concevoir le monde qu’à travers le nombre de ses polygones, la PlayStation accueillait, deux mois après sa rivale, un titre qui ressemblait énormément à Virtua Fighter… mais en mieux. Et voilà comment un certain Battle Arena Toshinden vint affronter directement la console rivale sur son terrain, de la même façon que Ridge Racer était parti lutter contre Daytona USA.

Sortez les polygones !

Le jeu de Tamsoft est, comme vous l’aurez compris, un jeu de combat en 3D. Le concept était (encore) suffisamment novateur en 1995 pour se suffire à lui-même ; comprenez par là que passé les trente secondes de texte vous évoquant un tournoi ancien opposant huit concurrents, vous n’aurez tout simplement plus accès à aucune bribe de scénario ou de background concernant vos personnages. Ils sont là pour se battre, pas pour s’échanger des punchlines en ouverture et à la conclusion des combats comme dans Street Fighter II !

On peut affronter son clone

Huit combattants, donc, dont deux femmes – tous assez bien typés, bien que ne débordant pas de charisme, ils correspondent assez bien aux archétypes qu’on leur demande de représenter ; dois-je par exemple préciser que les femmes sont bien évidemment hypersexualisées, avec Sonia équipée de toute la panoplie de la dominatrice jusqu’au fouet ? La vraie nouveauté, comparée à Virtua Fighter (qui était un jeu d’arts martiaux), c’est surtout que les personnages sont ici tous armés : dagues, griffes, épées, fouet, tout est bon, mais on est donc ici plus proche d’un Samurai Shodown en 3D que d’une réponse directe à l’univers de la licence phare de SEGA. Niveau contenu, autant dire qu’on a vraiment l’essentiel : un mode principal qui vous demandera d’affronter tout le roster avant le boss final, un mode vous opposant à l’I.A. pour faire à peu près la même chose, et un mode deux joueurs. Bref, on est là pour taper, et le reste attendra la suite de la série.

Les personnages sont archétypaux, mais cela les rend facilement reconnaissables

Dès le lancement d’un combat, la comparaison avec Virtua Fighter est aussi évidente qu’elle est volontaire. Le vrai personnage principal du jeu, c’est bien évidemment la 3D, et on se doute bien qu’au moment de la sortie du jeu, celle-ci en envoyait plein les mirettes. À tel point, en fait, qu’elle semblait même donner une leçon au jeu de SEGA, notamment grâce à l’ajout d’une petite gourmandise qui faisait alors toute la différence : les textures.

La caméra se place parfois un peu n’importe comment par rapport à l’action

Face aux polygones unis de la concurrence, Battle Arena Toshinden donnait le sentiment d’appartenir à la génération suivante, et c’était encore plus vrai en constatant que les décors au-delà de l’arène étaient eux aussi en 3D, là où le concurrent n’affichait que de simples bitmaps en guise de fond. Évidemment, aujourd’hui, on sera nettement moins impressionné par ces textures constellées de gros pixels, et on pourra trouver au moins autant de charme à la 3D plus épurée de Virtua Fighter, mais à l’époque, le coup porté à SEGA avait été violent. Surtout que, du côté du gameplay, le jeu de Tamsoft faisait à la fois le choix d’une jouabilité plus « accessible » – comprenez par là que le titre peut se jouer comme (l’encore) référence du genre, Street Fighter II, avec des attaques à distance, des coups spéciaux et une garde en reculant que ne propose pas le jeu de SEGA – mais qu’il se permet même d’introduire l’apport le plus évident, et pourtant délaissé par son rival : l’apport de la troisième dimension, justement.

Rungo ne brille pas par sa vitesse, mais quand il tape, il tape !

En effet, là où Virtua Fighter ne permettait pas au joueur de se déplacer directement dans l’axe de la profondeur – le gameplay restait, à quelques roulades près, très majoritairement pensé en 2D – Battle Arena Toshinden, lui, permet à tout moment de pivoter autour de son adversaire à l’aide des boutons de tranche, ce qui est non seulement un excellent moyen pour éviter une attaque adverse, mais peut également offrir des retournements réjouissants, d’abord parce que les sorties de ring sont toujours possibles mais aussi parce que les attaques portées dans le dos font ici des dégâts monstrueux.

Face à Gaia, le boss final, privilégiez la vitesse !

Conséquence : en dépit d’une relative simplicité assumée, le titre de Tamsoft ajoute – littéralement – une dimension à sa jouabilité, et se permet donc de ne pas avoir à rougir de la comparaison avec son inspirateur direct. Aujourd’hui, on pourra arguer que les combats de Virtua Fighter, plus lents et reposant davantage sur l’observation, sont plutôt plus tactiques, mais à l’époque, une nouvelle fois, le coup était dur à encaisser. À tel point que SEGA se hâtera de proposer un Virtua Fighter 2 pour sa Saturn, mais aussi de faire venir un certain Battle Arena Toshinden Remix… qui ne fera qu’entériner l’infériorité de son hardware face à celui de la PlayStation, mais ceci est une autre histoire.

L’épée de Duke porte assez loin, ce qui devrait vous encourager à tenter l’attaque en biais

Pour le joueur moderne, que reste-t-il de Battle Arena Toshinden ? Un titre dont la réalisation n’impressionnera plus personne, naturellement, et dont le contenu risque de ne pas faire long feu, d’autant que le jeu n’est pas particulièrement difficile.

Sofia en train d’administrer à Ellis une bonne paire de baffes

Néanmoins, le fait de ne pas crouler sous les personnages ni sous les attaques spéciales lui confère aussi une certaine valeur en temps que titre d’initiation – un très bon moyen pour les joueurs ressortant tout juste de leur partie de Street Fighter II de s’initier facilement au gameplay 3D sans se sentir violemment dépaysés. On a évidemment fait beaucoup mieux depuis dans à peu près tous les domaines – et la saga elle-même n’aura pas fait long feu, rapidement éclipsée par des Tekken ou des Dead or Alive – mais pour ceux qui voudraient retrouver ce charme typique des premiers jeux de combat en 3D, le logiciel de Tamsoft a plutôt mieux vieilli que ce qu’on pourrait craindre. Clairement pas le type de jeu auquel on consacrera des mois, mais pour une partie sur le pouce afin de se souvenir de ce qu’était la PlayStation à ses débuts – et de ce à quoi ressemblait ce jeu que tout le monde voulait avoir en 1995 – c’est une madeleine de Proust qui en vaut bien une autre.

Vidéo – Combat : Ellis vs. Fo :

NOTE FINALE : 14,5/20 Initialement présenté comme un titre pensé pour supplanter Virtua Fighter et prendre la Saturn à son propre jeu, Battle Arena Toshinden restera avant tout comme un des premiers jeux de combat à avoir réellement mis à contribution la 3D avec l'inclusion du pas de côté, et comme un annonciateur des prouesses techniques à venir avec ses textures et ses décors. S'il laisse aujourd'hui l'impression, à l'instar de son inspirateur, d'un programme un peu primitif avec assez peu de contenu, sa relative simplicité a au moins le mérite de le rendre accessible aux joueurs ayant envie de pouvoir tenter leur chance sans prendre le temps de maîtriser cent cinquante attaques spéciales à la perfection. Rapidement supplanté par ses successeurs – et par la saga Tekken – le titre de Tamsoft n'en demeure pas moins une porte d'entrée valable dans l'univers des jeux de combat en 3D. Un fragment de l'histoire de la PlayStation.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Absence totale de scénarisation ou de mise en contexte une fois en jeu – Un roster et un moveset assez limités – Une 3D qui fait son âge – Une caméra capricieuse qui vous empêche parfois de voir ce qui se passe

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Arena Toshinden sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« C’est tout simplement le meilleur jeu de combat qu’ait jamais accueilli la salle de jeu de CVG. De toute évidence, les graphismes jouent un rôle majeur, mais la jouabilité est également exceptionnelle. Cela est majoritairement dû à la 3D qui, contrairement à ce qu’on avait pu voir dans Virtua Fighter, ajoute réellement une dimension au gameplay. »

Computer and Video Games (CVG), mars 1995, 96% (traduit de l’anglais par mes soins)

« Battle Arena Toshinden est beau (bien que les animations des combattants ne soient pas à la hauteur des autres jeux du genre) et s’avère divertissant – néanmoins, le Tekken de Namco (sortie officielle en novembre) est plus nerveux, plus fluide, a plus de mouvements et bien plus de personnages à apprendre à maîtriser. Notre conseil serait de laisser ce jeu dans les bacs et d’attendre le titre de Namco – il a une génération d’avance sur celui-ci. »

MAXIMUM Magazine, octobre 1995, 60% (traduit de l’anglais par mes soins)

Version Game Boy

Développeur : Betop
Éditeur : Laguna GmbH
Date de sortie : 22 mars 1996 (Japon) – Mai 1996 (Europe) – Novembre 1996 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Game Link)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb – Compatible avec le Super Game Boy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Proposer ce qui était considéré comme la crème des jeux de combat en 3D sur une console dotée d’un processeur de 4,2MHz et de quatre nuances de gris en guise de graphismes ? Le pari avait de quoi paraître osé – mais la Game Boy avait déjà pu prouver, avec des titres comme Samurai Shodown, qu’elle pouvait tout-à-fait offrir quelque chose d’amusant en la matière pourvu que le travail soit fait intelligemment.

Niveau contenu, rien ne manque – on a même un peu plus de matière que sur PlayStation

Justement, on comprend d’entrée de jeu avec ce Battle Arena Toshinden que l’idée n’aura bien évidemment pas été de chercher à reproduire à l’identique l’opus PlayStation (et encore heureux !) : si on retrouve bel et bien tout le casting original avec ses huit personnages jouables, le tout est désormais présenté dans une 2D tout ce qu’il y a de plus traditionnel, avec des graphismes de type « Super Deformed » (des grosses têtes sur un petit corps). Le résultat, qui pourrait passer pour un peu cheap sur une console de salon 16 bits, est en revanche parfaitement adapté au petit écran de la console, en offrant des personnages reconnaissables tout en ne faisant que quelques pixels de haut. Tant qu’à faire, le titre intègre également quelques nouveautés importées depuis Battle Arena Toshinden 2, à commencer par une scénarisation du mode principal ou encore la forme empruntée par le boss final.

Visuellement, l’essentiel est là, et la jouabilité fait le travail

La jouabilité est désormais réduite à deux boutons : un pour les poings (ou l’arme tenue en mains) et un pour les pieds, et il n’est évidemment plus question de faire un pas de côté pour se déplacer dans la profondeur. En revanche, la sortie de ring est gérée assez intelligemment, avec un certain nombre de coups à encaisser en bord d’arène avant de chuter (lequel est d’ailleurs réglable dans un écran des options assez complet qui vous permettra également de décider du nombre de rounds, de la durée des manches ou encore de la taille de la jauge de vie).

On ne va pas se mentir : le scénario a assez peu de chances de vous bouleverserr

Comme on peut s’en douter, le résultat est assez direct et les coups spéciaux sortent vite, et même si l’action pourrait être plus fluide et plus lisible, le fait est qu’on peut rapidement s’amuser, particulièrement à deux. En fait, à l’instar de son modèle, cette version portable bénéficie plutôt de ne pas chercher à être inutilement complexe : le jeu demeure tactique et accessible, ce qui était certainement ce qu’il pouvait faire de mieux. Bien sûr, le contenu demeure relativement limité et il n’y aura sans doute pas matière à y engloutir des mois, même avec les trois niveaux de difficulté, mais l’expérience est loin d’être grotesque comparée à la version de salon. À tout prendre, si vous souhaitez découvrir un jeu de combat sur Game Boy, vous ne serez sans doute pas malheureux avec celui-ci.

NOTE FINALE : 14/20

Transposé intelligemment sur Game Boy, Battle Arena Toshinden y perd peut-être les subtilités apportées originellement par la 3D, mais parvient à conserver l’accessibilité et l’efficacité du système de jeu sans sacrifier le mode deux joueurs. Pour une partie sur le pouce qui ne nécessite pas trente heures d’entrainement avant d’accomplir quoi que ce soit, c’est certainement un candidat parfaitement valable.

Version PC (DOS)

Développeur : Digital Dialect
Éditeur : Funsoft GmbH
Date de sortie : Juin 1996
Nombre de joueurs : 1 à 2 (multijoueur possible via IPX, modem, NetBIOS et câble null-modem)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version CD-ROM 2.5 émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80486 DX2 – OS : PC/MS-DOS 4.0 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300 ko/s)
Modes graphiques supportés : SuperVGA, Vesa, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib Gold, Ensoniq Soundscape, ESS Audiodrive, General MIDI, Gravis UltraSound/ACE/Max, I/O Magic Tempo, Microsoft Sound System, Pro Audio Spectrum, puce ARIA, Reveal FX/32, Roland RAP-10/Sound Canvas, Sound Blaster/Pro/16/AWE32, Sound Galaxy NX Pro 16, Thunderboard, Toptek Golden 16, WaveJammer (PCMCIA)
Cartes accélératrices 3D supportées : 3D Blaster VLB (CGL), Diamond Edge (NV1/STG2000)
Avec des patchs : Matrox Mystique (MSI), 3D Blaster PCI, 3Dfx Voodoo (Glide).

Vidéo – L’introduction du jeu :

S’il existait une machine sur terre qui n’avait aucun complexe à nourrir face aux capacités 3D de la PlayStation, c’était bien le PC. Sur le papier, la machine qui n’avait plus grand chose à voir avec IBM offrait d’ailleurs largement de quoi rendre la monnaie de sa pièce à la version originale : possibilité de monter la résolution jusqu’en 640×400, diverses options graphiques dont la gestion des ombrages Gouraud, reconnaissance des joysticks et des pads à quatre boutons – et surtout, reconnaissance des premières cartes accélératrices 3D, soit largement de quoi enterrer la version originale. Avec, en bonus, la possibilité d’incarner Earthworm Jim avec un code ! Au rang des curiosités, on remarquera également que cette version conserve les voix japonaises sans procéder à aucune des adaptations observées sur la version PlayStation occidentale.

Remarquez comme le décor en 3D a été remplacé par un bitmap…

Dans une configuration idéale, le jeu a donc tout ce qu’il faut… sauf que dans les faits, les choses risquent d’être un peu plus compliquées. La reconnaissance des cartes accélératrices 3D sous DOSBox est une gageure, et aucun Glide Wrapper ne semble fonctionner avec le jeu. Reste donc le mode software, qui devrait tourner comme un charme… au détail près que le jeu n’est pas ralenti. Au lieu de profiter d’une action fluide à 144 images par seconde, vous aurez donc le droit à une action qui va dix fois trop vite si vous ne bridez pas la vitesse de votre processeur ! Et même en le bridant, le jeu peut rencontrer de grosses difficultés pour tourner à une vitesse décente, attendez-vous donc à bidouiller tous azimuts. Sachant que la reconnaissance du joystick fonctionne avec une bonne vieille calibration manuelle (qui donne des résultats absolument catastrophiques), et que DOS ne reconnait pas assez de boutons pour pouvoir utiliser les pas latéraux, on a au final de très grande chance de se retrouver avec une expérience nettement moins idyllique que ce qu’on espérait, et qui ne sera pleinement jouable qu’au clavier. Et de toute façon, même avec la configuration idéale, on remarquera que les décors en 3D ont été remplacés par de simples bitmaps… C’est dommage, car tous les éléments étaient objectivement réunis pour tenir la version définitive, mais on aboutit au final à une version pratiquement injouable qui ne justifie tout simplement pas les efforts colossaux qu’elle demande pour ouvrir une expérience correcte. Si vous voulez vraiment Battle Arena Toshinden en haute résolution, lancez-le sous DuckStation avec la résolution et le filtrage au maximum, vous arriverez à mieux avec infiniment moins d’efforts.

Ça pourrait marcher, si c’était jouable et si ça tournait à la bonne vitesse…

NOTE FINALE : 09/20

Plombé par une gestion technique assez chaotique, la version DOS de Battle Arena Toshinden a bien quelques arguments à présenter, sauf que la plus grande partie d’entre eux sont pratiquement inaccessibles sur une configuration moderne. Sachant qu’une jouabilité à six boutons n’était pas pensée pour DOS, elle non plus, on réservera cette version aux joueurs les plus mordus et les plus passionnés du PC – du genre à avoir conservé une configuration d’époque.

Ai : Chō Aniki

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Développeur : Bits Laboratory
Éditeur : Masaya
Titre original : 愛・超兄貴 (graphie originale, Japon)
Testé sur : PC Engine CD
Disponible sur : Wii, Wii U

La série Chō Aniki (jusqu’à 2000) :

  1. Chō Aniki (1992)
  2. Ai : Chō Aniki (1995)
  3. Chō Aniki : Bakuretsu Rantōden (1995)
  4. Chō Aniki : Kyūkyoku Muteki Ginga Saikyō Otoko (1995)
  5. Chō Aniki : Otoko no Tamafuda (2000)

Version PC Engine CD

Date de sortie : 24 février 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Super System Card requise

Vidéo – L’introduction du jeu :

Il y a deux façons de composer avec les plaisirs coupables. La première est de rapidement les cacher sous le tapis après avoir cédé à la tentation, histoire de se rappeler que le propre des folies passagères, c’est qu’elles le restent.

Et puis la deuxième, c’est de les assumer jusqu’au bout. Quitte à embrasser un nouveau mode de vie.

Maîtriser les bonnes attaques vous permettra de faire le ménage très vite

On aurait pu penser que le très déstabilisant Chō Aniki allait rester un titre unique, à tous les sens du terme, tant il correspondait à un approche esthétique extrêmement ciblée – une sorte de Parodius fondé sur une curieuse obsession homo-érotique autour des bodybuildeurs. Mais Masaya n’en avait visiblement pas fini avec les tribulations des divinités Idaten et Benten au pays des messieurs très musclés en string… ou plutôt si. En fait, quitte à remettre le couvert trois ans après le premier opus, on aura cette fois fait kidnapper le dieu et relégué la déesse à un simple rôle de distributeur de power-up pour donner directement les commandes aux frères Samson et Adon, qui deviennent cette fois les héros à part entière d’un titre qui sonne parfois comme une simple relecture du premier épisode et qui s’intitule cette fois Ai : Chō Aniki.

Retour dans un univers avec une personnalité certaine

Le shoot-them-up partage au moins une caractéristique avec le cinéma pornographique : ce n’est pas le scénario qui compte. Ici, mon incapacité à lire le japonais va de toute façon m’encourager à cibler l’essentiel : Bo-Tei Kill, le méchant du premier épisode vaincu, c’est cette fois sa sœur qui prend le relai, l’occasion de remettre le couvert pour (re)découvrir un univers complètement barré où les métisses mécanico-organiques à la Gynoug s’effacent derrière les obsessions de corps masculins musculeux, quitte à réinterpréter La naissance d’Aphrodite en version « Monsieur Muscle ».

Face aux ennemis massifs, apprenez à utiliser l’esquive

Vous l’aurez deviné : la véritable star du titre, c’est une nouvelle fois cette tension érotique assumée quoique vaguement camouflée derrière l’ambiguïté de l’angle humoristique, qui commencera par vous faire diriger un Mister Univers dont on se sait toujours pas pourquoi il vole, ni pourquoi il a un trou dans la tête, dans lequel son frère se plait visiblement à cultiver des fleurs, à en juger par la cinématique d’introduction. Oui, c’est très spécial, mais on ne va pas se mentir : si vous êtes venu vous renseigner sur ce jeu, c’est peut-être que quelque part, ça vous plait, non ? Ne répondez pas à cette question. On a tous un jardin secret.

Si votre mère vous voit jouer à Ai : Chō Aniki, vous risquez d’avoir une conversation avec elle

On pourrait croire avoir déjà dit l’essentiel en présentant Ai : Chō Aniki comme le prolongement direct de son prédécesseur. Mais le fait que la prise de risque de Masaya ne s’est pas limitée à donner une deuxième chance à un univers qui avait commercialement peu d’espoirs – sinon aucun – de quitter un jour le Japon. En fait, c’est bien du côté du gameplay que le titre (confié cette fois à Bits Laboratory) va cette fois se révéler le plus déstabilisant : vous avez déjà joué à un shoot-them-up en vous demandant comment tirer, vous ?

La réalisation est techniquement très solide, en dépit de la résolution limitée

Certes, vous avez bien un tir – à tête chercheuse, rien de moins – accessible en appuyant sur le bouton II. Mais celui-ci est à la fois lent et faible, ce qui le rend particulièrement inapproprié pour composer avec les dizaines d’ennemis que le programme ne manquera pas l’occasion de vous jeter au visage dès les premières secondes de jeu. Aucun power-up ne venant jamais gonfler votre puissance de feu, diversifier vos attaques va donc vous demander… de réaliser des combinaisons, comme dans les jeux de combat de la période. Par exemple, un tir couvrant à distance vous demandera d’enchaîner arrière-avant puis tir. Une approche vraiment inattendue et pas exactement naturelle qui risque de vous demander un sérieux temps d’adaptation, surtout le temps d’en découvrir les possibilités, et qui va s’additionner à un mécanisme d’esquive placé, lui, sur le bouton I.

Benten n’apparaîtra que pour vous lâcher des bonus avant de repartir

Intérêt de cette fonction ? Faire tournoyer votre personnage, qui évite les tirs adverses pendant tout le temps de la manœuvre, le rendant virtuellement invincible. D’où une question évidente que je vous entends poser d’ici : « Mais qu’est-ce qui m’empêche de passer tout le jeu à tournoyer plutôt que de chercher à détruire les ennemis ? ».

Oui, c’est bien un boss qui vous attaque avec des plongeurs

Et c’est là que la barre de temps figurée par des sabliers et située en haut de l’écran prend tout son sens : pour terminer un niveau, vous devrez vaincre un certain nombre d’adversaires, ans quoi le boss n’apparaîtra pas. Tardez trop, et vous perdrez un sablier – lesquels font également office de vies puisque vous en perdrez également un à chaque fois que votre jauge de santé de trois cœurs arrivera à son terme. Arrivez au bout de la jauge de temps, et ce sera le game over instantané, sans continue, ce qui est finalement assez logique car le jeu est très court (comptez 25 minutes pour en voir le terme). Progressez, et la déesse Benten fera régulièrement son apparition pour vous distribuer de la santé et du temps supplémentaire. Et si jamais vous avez besoin d’aide, il est possible de convoquer un ami afin de vous aider à faire le ménage encore un peu plus vite.

Vous ne verrez plus jamais un bonhomme de neige de la même façon

On ne va pas se mentir : que ce soit par son univers ou sa jouabilité, Ai : Chō Aniki est un jeu qui risque d’être clivant. Diriger un personnage au masque de collision énorme dans un jeu où il est difficile de tirer est au moins aussi déstabilisant que les obsessions homo-érotiques des développeurs, et en dépit d’une réalisation difficile à prendre en défaut – et d’un style qui peut se vanter de rester assez unique en son genre – on comprendra que tout le monde ne soit pas disposé à s’accrocher pour comprendre comment vaincre un jeu qui est de toute façon trop court et trop simple.

Le boss finale doit représenter, avec Benten, la seule femme de tout le jeu

« Pour oser, il ose ! », voilà ce qu’on pourrait retenir d’un titre qui est avant tout pensé d’un bout à l’autre comme une curiosité. Certains joueurs semblent être tombés amoureux de son système de jeu, ce n’est clairement pas mon cas – d’autant plus qu’on peut tout-à-fait vaincre le logiciel en n’en maîtrisant qu’une seule et unique attaque – mais si vous cherchez un programme qui ne ressemble à strictement rien d’autre qu’à la saga dont il est issu, vous ne serez clairement pas déçu. Les fans de shoot-them-up, pour leur part, auront intérêt à se montrer patients ou authentiquement décidés à revenir jusqu’à maîtriser les subtilités du gameplay, mais dans tous les cas, Ai : Chō Aniki reste un petit jeu popcorn dont on fait le tour beaucoup trop vite.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 14/20 Quitte à flirter avec le bizarre, Ai : Chō Aniki n'aura certainement pas changé le cap emprunté par son illustre prédécesseur : si vous avez développé un fétichisme pour les bodybuildeurs en string et les ambiances décalées, vous serez toujours comme un poisson dans l'eau. L'aspect le plus déconcertant du jeu demeure néanmoins son gameplay reposant sur des combinaisons rappelant les jeux de combat de la période : on avait rarement croisé un shoot-them-up où le simple fait de tirer puisse représenter un tel travail ! Cette approche inattendue reste à la fois la grande force et le gros talon d'Achille d'un jeu déjà pas très long ; ceux qui espéraient juste se défouler avec le pouce calé sur le tir automatique risquent de ne pas apprécier le voyage, et les autres auront probablement vaincu le titre avant même d'avoir compris comment sortir la moitié des attaques. Néanmoins, on ne pourra pas reproche au titre de Bits Laboratory de ne pas avoir essayé quelque chose de différent, et si vous vous demandez si vous pouvez encore être surpris par ce qui tourne sur votre PC Engine CD, c'est peut-être ici que vous trouverez la réponse.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une jouabilité presque aussi déstabilisante que l'univers du jeu... – ...et qui risque de représenter la principale difficulté du titre – Seulement quatre niveaux

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ai : Chō Aniki sur un écran cathodique :

Earthworm Jim 2

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Shiny Entertainment, Inc.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Titre alternatif : アースワームジム2 (graphie japonaise)
Testé sur : Mega DriveSuper NintendoPC (DOS)PlayStationSaturn
Disponible sur : Browser, Game Boy Advance, Linux, Macintosh, Switch, Wii, Windows
En vente sur : GOG.com (Linux, Macintosh, Windows)

La série Earthworm Jim (jusqu’à 2000) :

  1. Earthworm Jim (1994)
  2. Earthworm Jim : Special Edition (1995)
  3. Earthworm Jim 2 (1995)
  4. Earthworm Jim 3D (1999)
  5. Earthworm Jim : Menace 2 the Galaxy (1999)

Version Mega Drive

Date de sortie : 15 novembre 1995 (Amérique du Nord) – 22 décembre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 24Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Si on avait annoncé aux joueurs, quelque part vers le milieu de l’année 1994, qu’ils allaient bientôt attendre fiévreusement le retour des aventures d’un ver de terre, ils auraient probablement pensé qu’on était en train de se payer leur fiole. Et pourtant, les faits sont là : cette année-là, Shiny Entertainment aura pris tout le monde par surprise avec Earthworm Jim, ses graphismes léchés, son animation qui n’avait rien à envier à celle d’Aladdin, son univers complètement déjanté, son humour transgressif, sa difficulté redoutable, et sa vache.

Votre nouveau pouvoir vous permet de faire exactement la même chose que l’ancien

Oui, sa vache. Vu le succès instantané de ce qui s’annonçait déjà comme le début d’une des dernières licences marquantes de l’ère 16 bits, tout le monde s’attendait à une suite, tout le monde voulait une suite, et tout le monde espérait qu’elle parviendrait à reproduire la surprise du premier opus tout en parvenant à placer les curseurs encore un peu plus haut que l’altitude stratosphérique où ils étaient déjà placés. Bref, tout le monde attendait à la fois la suite logique et une forme de miracle. Un an pratiquement jour-pour-jour plus tard, le vœu était exaucé. Restait juste à savoir s’il pouvait réellement répondre aux espoirs colossaux qui avaient été placés en lui.

Earthworm Jim 2 : jeu gonflé ou jeu gonflant ?

En tous cas, une chose est sure : l’équipe de développement n’aura visiblement pas souhaité gaspiller trop d’énergie dans le scénario. Pour tout dire, la fameuse princesse Machin-Chose a été enlevée par Psy-Crow, et comme vous aviez besoin d’un prétexte pour recommencer à traverser des environnements déjantés n’entretenant aucune forme de lien vaguement logique les uns envers les autres, vous allez être très heureux de ré-enfiler votre super-costume et sa capacité ô combien pratique à vous offrir des bras et des jambes et à refaire à peu près la même chose qu’avant, ça tombe bien, c’est ce que tout le monde espérait.

Le programme aime étirer ses bonnes idées jusqu’à ce qu’elles cessent de l’être (bonnes)

Pour l’occasion, presque tout le casting du premier épisode a été une nouvelle fois mobilisé pour refaire son apparition à un moment ou à un à un autre (oui, même la vache, qui est venue avec un paquet de copines), et vous pourrez retrouver toutes vos capacités, du fouet à votre pistolet qui disposera pour l’occasion de nombreux nouveaux types de tirs. Petit ajout à votre panoplie : un tas de morve qui pourra vous servir de parachute, ou à vous accrocher à des plaques de mucus pour jouer à Tarzan… soit deux pouvoirs qui était auparavant parfaitement assumés par votre corps de lombric, et qui n’apportent au fond pratiquement rien. Et se dessine alors la première crainte : serait-il possible que l’équipe de Shiny soit arrivée à court d’idées ?

Ne jouez pas à ce jeu si vous n’avez pas mangé depuis deux jours

À première vue, on est immédiatement rassuré : tandis qu’on se retrouve sur un fauteuil d’escalier à éviter des mémés qui tombent du ciel, ou à participer à un quizz télévisé sous la forme d’une salamandre avant d’enchainer avec un jeu de rythme ou une phase de shoot-them-up, on retrouve à la fois l’univers déjanté du titre, son côté gentiment irrévérencieux et son aspect pipi-caca assumé avec cette passion secrète pour la morve, sans oublier le retour de l’enfer administratif, de Pete le chien et d’à peu près tout ce qui avait fait la force du premier opus.

Ici, il faudra se frayer un chemin – littéralement – à coups de blaster

Sachant que la réalisation est une nouvelle fois absolument irréprochable – figurant sans peine dans le sommet du panier de ce qu’a pu produire la Mega Drive – avec une animation toujours aussi parfaite et pas l’ombre d’un clignotement ou d’un ralentissement, et que la jouabilité est restée largement aussi efficace, tous les voyants sont au vert. En fait, on ne voit tout simplement pas comment on pourrait passer un mauvais moment – sauf à regretter que la très frustrante difficulté du premier épisode ait aussi fait le voyage, mais la présence d’un système de mot de passe et d’un choix du mode de difficulté simplifiera les choses dans ce domaine. Bref, sur le papier, c’est le bonheur.

Le jeu cherche à varier les plaisirs, comme dans cette séquence où on escorte une bombe…

Pourtant, une fois la manette en mains, on ne peut jamais tout à fait congédier le sentiment que quelque chose s’est un peu cassé en un an. La surprise, pour commencer : à force de ré-invoquer absolument tout ce qui avait fait la force du premier opus, Earthworm Jim 2 ronronne parfois dangereusement, n’introduisant pratiquement rien de neuf en dépit de sa prétention à nous faire penser le contraire.

…celle-ci, où on participe à un quizz…

Par exemple, le niveau Inflated Head, qui nous demande de grimper avec la tête gonflée à l’hélium, fait un peu penser à une relecture de Buttville, niveau du premier opus qui nous demandait, lui, de nous laisser descendre. Les phases de course avec Psy-Crow ont disparu… pour être remplacées par des phases de trois rounds tout aussi répétitives nommées Puppy Love qui vous demanderont de sauver les chiots de Pete en les faisant rebondir jusqu’à lui à l’aide d’un pouf. Un concept amusant une ou deux fois… le problème étant que le jeu y consacre pas moins de trois niveaux entiers, de trois rounds chacun, soit neuf séances d’une activité certes originale mais pas follement ludique. Et c’est là que la machine commence d’ailleurs à se gripper : c’est comme si Earthworm Jim 2 était si fier de ses quelques rares nouvelles idées qu’il avait envie de nous les imposer jusqu’à nous en écœurer complètement.

…ou encore, ce niveau passé à porter des vaches

Par exemple, au premier niveau, vous serez amené à transporter des porcs jusqu’à des mécanismes dédiés afin de débloquer des passages. De quoi vous faire cogiter deux secondes et vous occuper à peine plus longtemps : c’est frais, c’est inattendu, pourquoi pas. Imaginer maintenant un niveau où vous devrez cette fois transporter des vaches jusqu’à leur étable pour le même résultat. C’est marrant une fois, peut-être deux, nettement moins à la neuvième. Un peu comme Puppy Love.

La principale difficulté de ce boss sera de comprendre ce que vous êtes censé faire

Et parfois, ce n’est tout simplement jamais amusant, comme ce niveau éminemment pénible vous demandant de guider une bombe volante jusqu’au boss dans une phase de shoot-them-up où absolument tout est pensé pour vous compliquer la tâche et empêcher le maudit engin d’aller là où vous aimeriez qu’il aille, et où s’invite un sentiment qui revient un peu trop souvent dans un titre qu’on avait plus attendu pour s’amuser : pourquoi nous imposer ça ? C’est comme si, à force de recycler ses veaux, vaches, cochons et poulets, le titre en venait à oublier purement et simplement sa nature de run-and-gun mâtiné de plateforme et à expurger tous les passages efficaces pour les remplacer par des passages qui se veulent originaux (et bien souvent ne le sont pas) mais qui oublient parfois d’être ludiques.

Cette fois, la course avec Psy-Crow se fera à pied !

Conséquence : Earthworm Jim 2 est un titre qui s’avère, à bien des niveaux, encore plus clivant que son prédécesseur – lequel était parvenu, pour l’essentiel, à faire l’unanimité sur à peu près tous les points à l’exception de sa difficulté. Ici, non seulement on a un peu trop souvent l’impression de jouer à un Earthworm Jim 1.1 représentant une suite de niveaux bonus de la première aventure plutôt qu’une nouveau jeu à proprement parler, mais on a surtout l’impression qu’on a hérité d’une de ces compilations de niveaux qui avaient été retirés du jeu pour une bonne raison.

Le jeu entretient une fascination suspecte pour les les vaches

En dépit de ses indéniables qualités, le titre échoue à la fois à surprendre et surtout à réellement nous offrir ce qui avait été efficace la première fois. C’est toujours beau, c’est toujours jouable, et c’est (parfois) toujours amusant, mais ça sent aussi la licence relancée un peu trop vite pour son propre bien, au point de nous laisser la sensation d’arriver essoufflée dès le début de la course. Il y a indéniablement des bons moments à passer, mais au final l’héritage du premier opus apparait davantage comme un boulet qui donne le sentiment permanent de refaire la même chose en légèrement moins bien plutôt que de monter les curseurs, pour reprendre l’image utilisée plus haut. Il était peut-être temps que les consoles 32 bits et la 3D arrivent, en fin de compte, car Earthworm Jim 2 a des aspects de tournée d’adieux : le talent est toujours bien là, mais on sent qu’il faut parfois accepter de raccrocher les gants avant qu’il ne soit trop tard.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20 Le retour du plus célèbre lombric de tout l'univers vidéoludique ne faisait guère de doute, et il aura bel et bien eu lieu à peine un an après le tabac du premier opus. La grande question était de savoir si Earthworm Jim 2 allait encore réussir à nous surprendre, et la réponse est : oui et non... L'improbable héros imaginé par Shiny Entertainment aura fait le choix de venir avec toutes ses idées, le problème étant qu'il n'aura pas nécessairement pris le temps de trier les bonnes des mauvaises. À force d'aligner les concepts « originaux » mais pas nécessairement ludiques et de recycler des vieilles idées en espérant qu'on n'y verrait que du feu, le titre perd de vue son statut initial de run-and-gun efficace pour évoquer par moments une sorte de jeu de livraison de bétail où on passe la moitié de son temps à transporter des porcs, des vaches ou des souris. La réalisation irréprochable et l'éternelle folie douce de l'ensemble délivrent à l'expérience un cachet indéniable, mais l'aventure étant restée aussi frustrante que la précédente, tout le monde ne trouvera pas nécessairement son compte ici. Imaginatif, assurément, mais pas toujours aussi amusant qu'on l'aurait souhaité.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Certains niveaux plus pénibles qu'autre chose (le shoot-them-up)... – ...d'autres qui tendent à le devenir sur la durée (les transports d'animaux)... – ...et d'autres qu'on se serait volontiers contenté de ne faire qu'une seule fois (les chiots) – Difficulté toujours aussi frustrante

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Earthworm Jim 2 sur un écran cathodique (PAL) :

Version Super Nintendo

Développeur : Shiny Entertainment, Inc.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Novembre 1995 (Amérique du Nord) – Décembre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 24Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme son prédécesseur, Earthworm Jim 2 aura été développé sur Mega Drive, l’équipe de développement entretenant une relation privilégiée avec la console au moins depuis Aladdin. Cette fois, pas de niveau exclusif monnayé par SEGA en dernière minute, la Super Nintendo pouvait donc espérer arriver avec ses propres arguments – ce qu’elle fait d’ailleurs en proposant une réalisation graphique plus colorée que celle de sa rivale.

Le fond rouge est désormais plus nuancé, mais c’est au moins aussi joli qu’avant, si ce n’est plus

Certains diront que les ambiances étaient plus tranchées sur la console de SEGA, mais toujours est-il que le résultat est globalement superbe et inclut même quelques gourmandises absentes de la version originale, comme un effet de lumière par transparence au niveau deux. Bref, c’est globalement plus beau, même si comme toujours sur Super Nintendo il faudra également composer avec une résolution inférieure qui réduit la taille de la fenêtre de jeu. Niveau sonore, les choses sont moins tranchées et demeureront avant tout une question de goût – la jouabilité, pour sa part, est toujours aussi réactive, et je n’aurais croisé ni ralentissement ni effacement de sprites. Le contenu étant pour sa part identique, on se retrouve donc avec une alternative très sérieuse à la version Mega Drive.

L’ambiance est encore meilleure ici, dommage qu’on se sente un peu à l’étroit

NOTE FINALE : 15,5/20

Earthworm Jim 2 ne débarque pas en touriste sur Super Nintendo, et parvient même à placer la barre encore un peu plus haut sur le plan purement graphique – au prix d’une fenêtre de jeu réduite, la faute à la fameuse résolution en 8/7e de la console. Le reste étant toujours aussi bon (et aussi frustrant), je laisserai les fans quadragénaires se déchirer pour savoir si une version est vraiment supérieure à l’autre, mais une chose est sure : vous n’aurez aucune raison de bouder ce portage.

Version PC (DOS)

Développeurs : Rainbow Arts – Funsoft
Éditeur : Interplay Productions, Inc.
Date de sortie : 1996
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : CD-ROM, dématérialisé
Contrôleurs : Clavier, joystick, manette
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Version DOS :
Processeur : Intel 80486 – OS : PC/MS-DOS 4.0 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Modes graphiques supportés : SVGA, VESA
Cartes sonores supportées : Ensoniq Soundscape, Gravis UltraSound/ACE, Microsoft Sound System, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-I/RAP-10, Sound Blaster/Pro/16/AWE 32, WaveJammer
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1996, il commençait à devenir difficile de faire l’impasse sur le PC. Cette version étant encore commercialisée à l’heure actuelle, autant prendre le temps de se pencher dessus. Commençons par les bonnes nouvelles : si ce portage repart des ambiances de la version Mega Drive, celles-ci bénéficient néanmoins ici d’une palette de couleurs étendue et de dégradés bien plus fins (la résolution en 320×240 est même plus élevée que celle du VGA standard).

Les teintes on beau reprendre celles de la version Mega Drive, on sent immédiatement qu’il y a de la couleur en plus

Le jeu a le bon goût de reconnaître les pads à quatre boutons (soit précisément ce qu’utilise le gameplay), il n’y aura donc aucun tracas avec la jouabilité ici. Et, cerise sur le gâteau, le jeu tirant à l’origine parti du support CD-ROM, on bénéficie d’une musique numérique de toute bôôôté qui enterre sans débat tout ce qu’on avait pu entendre sur les consoles 16 bits. Alors du coup, Earthworm Jim 2 sur PC, version ultime ? Oh, il y aurait sans doute eu débat face aux itérations 32 bits, à un minuscule détail près : la disparition de Lorenzen’s Soil, le deuxième niveau du jeu. Une perte de contenu qui a de quoi faire grincer des dents, d’autant que pour compenser, les développeurs ont décidé… de rajouter un quatrième round à chaque niveau de Puppy Love ! Comme si ces séquences ne vampirisaient déjà pas assez de temps comme ça ! Bref, une version qui aura indéniablement ses défenseurs – et qui le mérite – mais pour le néophyte, le mieux est peut-être tout simplement de commencer par les versions 32 bits.

Heureusement qu’il ne manque qu’un seul niveau

NOTE FINALE : 16/20

Earthworm Jim 2 sur PC a le bon goût d’être ce qu’on était venu chercher, à savoir une version aussi jouable mais mieux réalisée que les itérations sur consoles 16 bits – avec notamment une musique CD qui fait beaucoup de bien. Dommage, en revanche, qu’un niveau ait été sacrifié et que les séquences de sauvetage de chiots aient été prolongées – ça, on aurait pu s’en passer.

Version PlayStation

Développeur : Screaming Pink, Inc.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Novembre 1996
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Passage de relai pour la version 32 bits d’Earthworm Jim 2 : c’est Screaming Pink qui hérite du bébé, avec la mission de faire sentir au joueur qu’il a eu une bonne raison de changer de hardware. De fait, on sent immédiatement qu’il y a eu du travail, et si on pourra parfois juger l’esthétique un peu chargée, les décors affichent des détails qu’on n’aurait pas pu afficher sur une console 16 bits – et le tout tourne à soixante images par seconde. On remarquera en revanche quelques ratés – pas d’effets de transparence, par exemple.

La réalisation en fait des caisses, mais est-ce vraiment plus beau ?

Tant qu’à faire, la musique CD a fait le chemin depuis la version PC – et cette fois, pas un niveau ne manque. Du coup, là, cette fois, c’est bel et bien la version ultime, on est d’accord ? Eh bien… mouais, mais je ne suis pas sûr. La première raison, c’est que la jouabilité est devenue un peu moins précise avec Screaming Pink aux commandes, ce qui se ressent particulièrement lorsqu’on fait des sauts « de liane ». C’est parfois un peu agaçant, mais ça n’impacterait probablement pas les joueurs ne s’étant jamais essayés aux autres versions, si quelqu’un n’avait pas eu en plus la mauvaise idée de revoir la difficulté à la hausse. Il y a davantage d’ennemis, ils sont plus difficiles à toucher, ils vous laissent très peu de temps pour réagir – c’est bien simple, je ne serai même pas parvenu à vaincre le boss du deuxième niveau dans cette version ! Sachant que l’expérience originale était déjà largement assez frustrante en tant que telle, je ne suis pas persuadé que cette version fasse le consensus, même avec une réalisation plus soignée. Bref, à tout prendre, si vous avez les nerfs fragiles, jouez en mode « facile », et si ça ne suffit pas, allez plutôt voir du côté des versions 16 bits ou de l’itération PC.

En revanche, ce qui est sûr, c’est que c’est dur ! (remarquez au passage l’absence d’effet de transparence)

NOTE FINALE : 16/20

Earthworm Jim 2 sur PlayStation parvient à placer la barre encore un peu plus haut sur le plan de la réalisation – ce n’est pas encore Rayman, mais en termes de pixel art, ça reste néanmoins clairement dans le haut du panier. Dommage, en revanche, que la jouabilité ait perdu en précision, et surtout que la difficulté ait encore été gonflée, ce dont elle n’avait clairement pas besoin.

Version Saturn

Développeur : Screaming Pink, Inc.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : 16 mai 1996 (États-Unis) – Octobre 1996 (Europe) – 11 novembre 1996 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour la version Saturn du jeu, on retrouve Screaming Pink aux commandes, ce qui signifie qu’on sait exactement à quoi s’attendre. Vous vous attendez à un clone parfait de l’itération PlayStation ? Vous avez raison ! Les deux versions sont (quasi) jumelles (on notera par exemple que la résolution native n’est pas tout-à-fait la même), ce qui signifie que ce qui pouvait habituellement apparaître comme des faiblesses spécifiques à la machine de SEGA (au hasard, l’absence de gestion des effets de transparence) sera cette fois commun aux deux machines. Encore une fois, si la réalisation est globalement à la hauteur, la jouabilité et la difficulté feront moins l’unanimité, et on peut vraiment regretter que cette édition 32 bits n’ait pas hérité, pour l’occasion, d’un ou deux niveaux inédits. Tant pis, on s’en contentera.

Les graphistes ont bien bossé, mais les autres auraient pu faire encore un peu mieux

NOTE FINALE : 16/20

Comme sur PlayStation, Earthworm Jim 2 sur Saturn s’applique à soigner l’emballage, mais en oubliant au passage les finitions sur la jouabilité et sur le contenu. Si les amateurs du lombric de Shiny Entertainment devraient être aux anges, les autres apprécieront diversement l’escapade, et certains pourraient même rester un peu sur leur faim.

Gex

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Crystal Dynamics, Inc.
Éditeur : Crystal Dynamics, Inc.
Titres alternatifs : ゲックス (graphie japonaise), Gecko X (titre de travail)
Testé sur : 3DOPlayStationSaturnPC (Windows 9x)
Disponible sur : PlayStation 3, PSP, PS Vita (version PlayStation), Windows
En vente sur : Gog.com (Windows)

La série Gex (jusqu’à 2000) :

  1. Gex (1995)
  2. Gex 3D : Return of the Gecko (1998)
  3. Gex : Enter the Gecko (1998)
  4. Gex : Deep Cover Gecko (1999)
  5. Gex 3 : Deep Pocket Gecko (1999)

Version 3DO

Date de sortie : Avril 1995 (Europe) – Juin 1995 (États-Unis) – 14 juillet 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Une large partie de la (courte) existence de la 3DO aura consisté à tenter de se mêler à une course qui se déroulait sans elle, et dont les deux participants se nommaient SEGA et Nintendo. Un échec, comme tout le monde le sait – d’autant plus cruel que la machine avait au moment de sa sortie de réels arguments qui auront tous plié sous le poids d’un modèle commercial inadapté, lequel se sera chargé de rappeler aux industriels occidentaux qu’il allait leur falloir (ré)apprendre à vendre des consoles de jeu.

Certains pouvoirs vous permettront de faire le ménage plus efficacement

Mais quoi qu’il en soit, la machine était prise entre deux pulsions contraires : hurler sa différence (pour sortir du lot), tout en cherchant à être exactement comme tout le monde (pour rassurer les acheteurs). Justement, pour vendre une machine et commencer à mettre un visage reconnaissable sur la marque (les anglo-saxons parlent de « brand awareness »), la grande tendance de l’époque tournait autour d’une seule et unique obsession (laquelle n’allait d’ailleurs pas tarder à retomber comme un soufflé, la faute à une rapide overdose) : les mascottes. Toute la planète connaissait Sonic le hérisson et Mario le plombier ? Alors il fallait également une figure de proue pour la 3DO, un personnage apte à évoquer immédiatement la console. Aux yeux des joueurs, cette position aura été assurée par un certain Gex… lequel aura connu un destin à la PC Genjin, puisqu’il aura finalement fait des infidélités à son système d’origine, au point de lui survivre et d’aller continuer sa route bien après la mort de la 3DO. Tout un symbole…

Gex, héros à sang froid

Gex, pour ceux qui auraient eu la flemme de regarder la couverture, est un lézard – un gecko, pour être plus précis, d’où son nom – du genre bavard et à débiter des one-liners censément hilarants récités par son doubleur Dana Gould. Pour une raison obscure qui n’est jamais développée, son ennemi juré se trouve être une sorte d’insecte cybernétique nommé Rez qui, d’une façon tout aussi obscure liée à une mouche piégée, entreprend un jour d’entrainer Gex dans l’écran de sa propre télévision.

Le monde « toonesque » est sans doute le plus attachant

Désormais prisonnier d’un univers cinématographique qui n’est pas sans rappeler celui de Daffy Duck in Hollywood (d’ailleurs paru la même année), le lézard va devoir parcourir cinq environnement volontairement clichés, allant du film d’horreur à l’univers oriental, pour y trouver de précieux sésames qui prendront la forme de télécommandes. Une aventure pas aussi linéaire qu’on pourrait le croire et qui l’emmènera bien évidemment régler son compte à Rez pour recouvrer sa liberté (et retourner passer ses journées à buller devant un écran, cela va de soi).

La possibilité de marcher aux murs ou au plafond est une originalité bienvenue

Le titre prend la forme d’un jeu de plateforme en 2D assez classique, dans des successions de niveaux où l’objectif, comme on l’a vu, sera le plus souvent de trouver une ou deux télécommandes (le compte exact vous sera donné en ouverture). Ces télécommandes, une fois utilisées sur la carte du monde, vous ouvriront soit l’accès à un autre stage, soit carrément celui à un autre univers – ce qui signifie qu’il se produira certaines situations où vous serez libre de visiter plusieurs niveaux dans l’ordre de votre choix, voire de faire carrément l’impasse sur certains d’entre eux. Les boss, eux (un par monde), feront systématiquement l’objet d’un niveau dédié.

Chaque monde est présenté via une carte à la Super Mario World

L’idée sera donc de diriger votre lézard dans des environnements relativement ouverts, sans se révéler pour autant inutilement labyrinthiques (vous devrez rarement écumer un même niveau de long en large pour espérer trouver une télécommande vicieusement dissimulée à un endroit absurde ; à ce niveau-là, le level design se montre assez intelligent). Gex peut frapper les ennemis avec sa queue et attraper des bonus avec sa langue – tout comme il peut courir grâce aux boutons de tranche – mais sa capacité la plus originale reste sa capacité à se déplacer très naturellement sur les murs, ce qui peut souvent changer beaucoup de choses face à une séquence de plateforme qui s’annonçait ardue. À quoi bon sauter par-dessus un trou quand vous pouvez simplement vous balader sur le plafond au-dessus ? Une idée intéressante qui renouvèle quelque peu l’approche, mais pas suffisamment pour qu’on soit réellement dérouté… ni vraiment surpris.

La difficulté monte d’un sérieux cran dans les derniers niveaux

On tient d’ailleurs là à ce qui compose autant la force et l’intelligence du jeu que sa limite la plus évidente : celle d’avoir préféré tempérer un peu son ambition pour verser dans un gameplay qui offre l’avantage d’être naturel, tout en laissant souvent l’impression d’être cruellement sous-exploité. Concrètement, le titre a beau s’atteler à offrir un minimum de renouvellement, avec quelques niveaux labyrinthiques bien conçus ou des séquences à défilement imposé brisant un peu la monotonie, il ne parvient jamais tout à fait à atteindre ce Nirvana vidéoludique où se côtoient les idées de génie et les séquences de bravoure, ce degré de fun ou de surprise qui puisse l’installer définitivement dans notre mémoire pour ne plus jamais l’en déloger. On passe indéniablement un bon moment, sur Gex, l’avantage d’une réalisation qui aura préféré verser dans le pinacle de la 2D plutôt que de basculer trop tôt dans une 3D qui allait faire beaucoup de mal au genre du jeu de plateforme avant qu’un certain plombier ne vienne expliquer à tout le monde comment s’y prendre.

Tous les passages obligés du jeu de plateforme répondent présent

Visuellement, ce n’est peut-être pas au niveau de Rayman (qui constitue de toute façon un des pinacles du domaine), mais cela reste largement au-dessus de ce que pouvait offrir n’importe quel système 16 bits de la période. Le support CD-ROM permet également de profiter d’un contenu généreux d’une vingtaine de stages avec une forte dose de zones bonus et de niveaux secrets – peut-être pas de quoi vous occuper « des semaines » comme le prétendaient certains tests de l’époque, mais facilement de quoi vous mobiliser quatre ou cinq heures au minimum. La difficulté proviendra d’ailleurs plus souvent des quelques petits errements de la jouabilité, comme une caméra qui peine à rester centrée sur votre lézard, que d’un défi qui connait certes ses pics mais qui se montre aussi largement tempéré par le nombre hallucinant de vies que vous pourrez gagner en collectant les lucioles qui peuplent les niveaux – et par un système de sauvegarde certes assez limité, puisqu’il vous demandera de collecter des cassettes dont vous trouverez rarement plus de deux exemplaires par monde, mais qui vous permettra au moins de ne pas repartir du début à chaque fois.

Les boss manquent de personnalité, surtout dans des univers qui devraient être hyper-référencés

Au bout du compte, on ne peut s’empêcher de ressentir une certaine frustration, après avoir fini ce Gex. Non qu’on regrette le temps qu’on a pu lui consacrer, loin de là, mais il est difficile de mettre précisément le doigt sur ce petit quelque chose qui lui empêche de réellement côtoyer les sommets.

Un affrontement final avec sa logique propre

Un tout petit plus de variété au sein d’un même environnement ? Des boss un peu plus marquants ? Un level design un léger poil plus imaginatif ? Un Dana Gould un peu moins insupportable avec ses blagues pourries ? Une ou deux séquences sortant davantage des clous ? Des détails qui auraient permis au titre de ronronner un peu moins, assurément, et d’être autre chose que juste « sympathique » (ou « très sympathique », selon votre degré d’affinité). En l’état, je doute que n’importe quel amateur du genre puisse regretter de s’essayer au jeu. De la part de ceux qui commenceraient un peu à saturer – et c’était assurément le cas d’une large partie des joueurs de l’époque, à en juger par le sort de toutes les fameuses mascottes et des titres qui les hébergeaient – il est en revanche possible que ce lézard à grande bouche les laisse quelque peu de marbre. Le mieux est sans doute de lui laisser une chance ; il n’en a peut-être pas l’air, avec ses problèmes d’attitude, mais il le mérite.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16,5/20 Il devait être la mascotte de la première console 32 bits, c'est un lézard, et il a le nom d'un tampon à récurer : il ne peut s'agir que de Gex. Le reptile imaginé par Crystal Dynamics sera parvenu à exister lors d'une délicate période de transition avec un certain brio, offrant une réalisation solide et variée et un gameplay à la fois malin, accessible et nettement moins punitif que celui d'un titre à la Rayman, en laissant le joueur un univers télévisuel qui n'est pas sans rappeler celui de Daffy Duck in Hollywood – mais en nettement plus réussi. Quelques petits errements dans la jouabilité, un léger manque de renouvellement dans les mécanismes de jeu et un chouïa de paresse dans le level design l'empêchent peut-être de pouvoir revendiquer une place au panthéon des maîtres incontestés du genre, mais il faut reconnaître qu'il n'en est vraiment pas loin. Une très bonne surprise, et assurément l'un des titres à posséder sur 3DO.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une vue qui n'est jamais centrée sur notre lézard... – ...d'où une certaine dose de sauts de la foi – Quelques niveaux qui s'étirent vraiment au-delà du raisonnable... – ...et en plus, il faudra les refaire jusqu'à trouver la ou les télécommande(s) à l'intérieur

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Gex sur un écran cathodique :

Version PlayStation

Développeur : Beam Software Pty, Ltd.
Éditeur : Crystal Dynamics, Inc.
Date de sortie : 1er décembre 1995 (Amérique du Nord) – 8 mars 1996 (Japon) – Avril 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Manette
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On le sait, la PlayStation est une console qui avait été conçue pour la 3D bien plus que pour la 2D. Ça ne l’empêchait pourtant pas de s’en sortir plus qu’honorablement dans le domaine – où on se doutait qu’elle devrait pouvoir faire au moins aussi bien que la 3DO. Aucune mauvaise surprise de ce côté-là : la réalisation est toujours aussi bonne, le jeu n’a pas perdu un pixel ni un quelconque effet, et le tout est sensiblement plus fluide que sur la version originale – les quelques rares ralentissements qui y figuraient ont d’ailleurs disparu. Le programme tourne à soixante images par seconde et Gex répond au doigt et à l’œil ; bref : tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Seule étrangeté (mais celle-ci, comme on va le voir, ne se limitera pas à cette itération sur la console de Sony) : le système de sauvegarde a ici été remplacé par un système de mot de passe (les développeurs auront parfois mis un peu de temps à adopter les cartes-mémoire). Pour le reste, le titre est peut-être encore un peu plus agréable à pratiquer que sur 3DO. Rien à redire.

C’est aussi beau que sur 3DO, et c’est encore plus fluide

NOTE FINALE : 17/20

Aucune mauvaise surprise pour Gex sur PlayStation, qui offre une version graphiquement identique à celle parue sur 3DO, mais tournant désormais à soixante images par seconde. Le confort n’en est que plus grand, et la console de Sony devrait composer un excellent choix pour découvrir le jeu.

Version Saturn

Développeur : Beam Software Pty, Ltd.
Éditeur : Crystal Dynamics, Inc.
Date de sortie : 1er décembre 1995 (Amérique du Nord) – 29 mars 1996 (Japon) – 5 avril 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Quitte à développer un jeu à destination des systèmes 32 bits, il aurait été dommage de faire l’impasse sur la Saturn – surtout pour un jeu en 2D. Gex, une nouvelle fois porté par Beam Software, aura donc débarqué à peu près à la même date que sur PlayStation, dans une version d’ailleurs très semblable – comprendre que le système de mot de passe a une nouvelle fois été privilégié sur une sauvegarde employant la mémoire interne, choix étrange mais passons. La bonne nouvelle, c’est que le titre tourne aussi bien que sur la machine de Sony. La mauvaise, c’est qu’il remplace les quelques (rares) effets de transparence par un effet de mosaïque, comme c’était le cas dans 95% des portages réalisés sur la machine. Fort heureusement, cela reste un détail assez anecdotique, et je pense que la plupart des joueurs préfèreront abandonner ce type de fioritures pour profiter d’une fluidité et d’une réactivité accrue plutôt que de jouer sur 3DO. Pour le reste, je vous renvoie au test de la version originale, car pratiquement rien d’autre n’a changé.

Une nouvelle fois, c’est surtout en mouvement qu’on voit la différence

NOTE FINALE : 17/20

Prenez la version PlayStation de Gex, remplacez ses effets de transparence par des effets de mosaïque, et ta-da ! Voilà votre version Saturn. L’essentiel – la fluidité et la réactivité – a heureusement été préservé, vous ne devriez donc pas vous sentir trop malheureux de ne pas être en train de jouer sur la console de Sony.

Version PC (Windows 9x)

Développeur : Kinesoft Software
Éditeur : Crystal Dynamics, Inc.
Date de sortie : 7 novembre 1996
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé
Contrôleur : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version dématérialisée testée sous Windows 10
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1996, le PC était toujours une plateforme de développement un peu à part, mais Windows 95 était censé le rendre plus accessible à des portages depuis l’univers des consoles 32 bits – dont les joueurs n’étaient d’ailleurs que rarement fans, un PC bien équipé s’avérant généralement largement supérieur à ses équivalentes de salon… ce que des adaptations paresseuses peinaient un peu trop souvent à matérialiser. Pour ce qui est de Gex, pas de mauvaise surprise : c’est peu ou prou l’exact équivalent de l’itération PlayStation qui est présent ici, et les quelques lourdeurs introduites par Windows 95 n’ont heureusement pas fait le trajet jusque dans la version dématérialisée qui est aujourd’hui en vente, ce qui fait que vous ne devriez avoir aucun problème à jouer en plein écran avec votre manette Xbox branchée. Évidemment, pas de super-haute-résolution ni de friandise particulière, mais si vous n’avez pas les connaissances (ou la patience) pour faire usage d’un émulateur, ce portage devrait vous offrir exactement tout ce que vous pouviez espérer.

Rien à craindre, tout est là. Bon, sauf le système de sauvegarde, mais il reste les mots de passe.

NOTE FINALE : 17/20

C’est Gex, c’est fluide et c’est jouable – ce qui n’était pas nécessairement une évidence sur Windows 95 à l’époque, mais en est désormais une aujourd’hui. Si vous souhaitez découvrir le jeu, vous pouvez commencer par là sans regret.

Vectorman

Développeur : BlueSky Software, Inc.
Éditeur : SEGA Enterprises, Ltd.
Titre alternatif : ベクターマン (graphie japonaise)
Testé sur : Mega Drive
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, Linux, Macintosh, Wii, Windows
En vente sur : Steam.com (Windows)

La série Vectorman (jusqu’à 2000) :

  1. Vectorman (1995)
  2. Vectorman 2 (1996)

Version Mega Drive

Date de sortie : 24 octobre 1995 (États-Unis) – 30 novembre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, dématérialisé
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On aura eu beau parler de « guerre » entre Nintendo et SEGA pour qualifier leur opposition commerciale au cours de l’âge d’or des systèmes 16 bits, le fait que celle-ci ait laissé de si bon souvenirs aux joueurs tend à nous indiquer qu’il ne s’agissait pas d’une guerre comme les autres. De fait, dans un conflit où les munitions sont des jeux vidéo et où la qualité de ceux-ci a un impact au moins aussi décisif que leur nombre, les populations civiles avaient pour une fois de très bonnes raisons de se frotter les mains en assistant avec gourmandise à l’opposition entre les deux géants.

Pas de front de la Somme ou de Stalingrad ici : les batailles étaient des succès vidéoludiques, et chacune d’entre elles en appelait une autre. Aladdin sur Mega Drive s’était écoulé à plusieurs millions d’exemplaires, balayant sans débat le pourtant très sympathique titre homonyme de chez Capcom ? Cela appelait une réponse, et la légende veut que celle de Nintendo se soit intitulée Donkey Kong Country, au grand régal des joueurs. SEGA allaient-ils rester sans réaction ? Si les joueurs voulaient de la 3D pré-calculée avec des effets graphiques jamais vu, on allait leur en offrir ! Faute d’avoir une équipe comme celle de Rare sous la main, c’est BlueSky Software qui s’y sera collé, et si le résultat sera arrivé un peu tard pour mobiliser l’attention des joueurs face à la déferlante 32 bits, cela n’aura pas empêché le titre d’être un succès critique et commercial du nom de Vectorman.

Au point de départ de l’aventure, un scénario à mi-chemin entre Wall-e (qui ne verrait pourtant le jour que treize ans plus tard) et l’anticipation involontairement visionnaire : en 2049, la terre n’est pas grand chose de plus qu’une décharge à ciel ouvert couverte de déchets toxiques, et l’humanité à fui dans les étoiles.

À la surface du globe œuvrent pourtant encore des « orbots » – qui sont exactement comme des robots en inversant deux lettres, mais dont le nom indique également qu’ils sont composés de sphères, ou « orbes » – mobilisés pour nettoyer l’endroit afin de permettre le retour des humains (Wall-e n’a vraiment rien inventé, en fait !). Arrive le drame : un jour, par accident, les orbots greffent sur l’unité centrale responsable des opérations une ogive nucléaire qui, au lieu de lui sauter joyeusement à la gueule, la transforme en Warhead, une intelligence maléfique bien décidé à transformer la terre en un lieu de mort pour les humains. Absent lors de la prise de pouvoir de Warhead, un orbot revient pour résoudre la situation, et son nom est Vectorman, parce que c’est cool. Et si vous n’avez toujours pas compris que cet orbot, ce sera vous, c’est que vous ne devez pas jouer aux jeux vidéo depuis très longtemps.

Vectorman vient donc sauver le monde, et il n’est pas décidé à faire dans la finesse. En fait, on a affaire à un run-and-gun pur et dur, du genre à n’employer que deux boutons : un pour tirer, et l’autre pour sauter. Des finasseries ? Pourquoi faire ?

On notera quand même que votre orbot peut faire un double-saut qui l’aidera à atteindre des endroits autrement inaccessibles dans des environnements qui peuvent se révéler assez étendus, qu’il sait tirer en diagonale (mais qu’il devra sauter pour faire feu en-dessous de lui), qu’il devra faire face à une limite de temps dans chacun des seize (!) niveaux du jeu, et qu’il pourra collecter des power-up qui prendront la forme de tirs plus puissants (limités dans le temps), de transformations temporaires lui permettant de creuser le sol ou de faire sauter des murs, et surtout de multiplicateurs qui doperont les effets des autres bonus. Bref, rien de trop complexe qui puisse venir entacher une action dont n’importe quel joueur devrait rapidement comprendre les tenants et les aboutissants : avancer, tirer, venir à bout des quelques boss qui se manifesteront, et passer à la suite. Autant dire un programme simple, mais efficace.

Évidemment, l’argument-massue de Vectorman, ce devait être sa réalisation en 3D pré-calculée avec notamment de saisissants effets de lumières (et de transparence) dont on n’avait pas encore franchement l’habitude en 1995. À ce niveau-là, le titre a indéniablement bien vieilli, surtout parce qu’il tourne à soixante images par seconde : l’univers traversé a de la personnalité, les décors sont très bien rendus, l’action est nerveuse à souhait, et on est indéniablement dans le haut du panier de ce que la Mega Drive a su produire, techniquement parlant, en la matière.

On remarquera néanmoins l’apparition d’une bande noire à gauche de l’écran lorsque le programme se sent visiblement obligé de raboter sa surface de jeu pour économiser quelques ressources. Si personne ne sera aujourd’hui à proprement parler soufflé par les graphismes ou la bande-son technoïde, le tout a l’avantage d’offrir une réelle variété (niveaux de glace, aquatiques, certains linéaires et d’autres plus ouverts) avec quelques vraies surprises, comme ce stage en vue de dessus vous plaçant sur des rails, une référence à Frogger où vous devrez composer avec un sol qui se déroule sous vos pieds (!!!) où encore cette séquence où vous vous battrez directement sur le dancefloor. Un vrai souci de dynamisme visant à surprendre le joueur et qui remplit assez bien son office, même si on pourra regretter que l’aspect « monde futuriste » vire un peu trop souvent aux environnements grisâtres et métalliques qui finissent par rendre l’univers un peu redondant en dépit de tous ses efforts.

Surtout, la difficulté du titre tend à le placer assez rapidement dans le camp du die-and-retry, et pas pour les bonnes raisons. Ce n’est pas tant que les ennemis soient redoutables ou exigent des trésors de dextérité (même si les boss pourront parfois demander pas mal d’efforts), c’est surtout que la grosseur du sprite de votre héros alliée à la rapidité de l’action font qu’il est très difficile d’anticiper quoi que ce soit dès l’instant où un ennemi apparait à l’écran.

Il y a même des adversaires qui sont rigoureusement impossibles à éviter dès l’instant où on ne connait pas leur position à l’avance, ce qui fait que ceux qui espéraient s’en sortir aux réflexes risquent d’en être pour leur frais : Vectorman est clairement un jeu qui devient plus ludique dès l’instant où on commence à connaître les niveaux par cœur. Ceci dit, pour ceux qui souhaiteraient un challenge un peu plus mesuré leur permettant de s’en sortir autrement que par la mémoire, il est possible de choisir sa difficulté, ce qui fait que tout le monde devrait y trouver son compte. Néanmoins, on sent bien que passé son univers et ses graphismes, le titre manque encore d’un petit quelque chose qui puisse l’envoyer réellement rivaliser avec des maîtres à la Probotector ou à la Gunstar Heroes – une trouvaille qui offre un véritable renouvellement passé le fait d’avancer en tirant. En l’état, cela reste une cartouche ludique, un défouloir auquel on peut revenir avec un certain plaisir, mais qui aurait vraiment bénéficié d’un mode deux joueurs et d’environnements un peu plus « chatoyants ». C’est vrai, quoi, on n’a pas toujours envie de passer une heure à se battre dans une décharge…

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20 Originellement pensé comme une réponse au Donkey Kong Country de la Super Nintendo, Vectorman est un titre qui aura néanmoins fait preuve de l'exquise politesse (ou de la prudence ?) de ne pas s'aventurer tout-à-fait sur les terres de son concurrent. Devenu un run-and-gun nerveux et bien réalisé quoique inutilement punitif (et surtout pour de mauvaises raisons), le titre de BlueSky Software rend assez bien hommage aux capacités d'une Mega Drive qui vivait alors le début de sa fin. En dépit d'un louable souci de variété et d'un contenu qui ne se moque pas de l'acquéreur (seize niveaux !), les problèmes d'équilibrage évoqués plus haut associé à un certain manque d'idées empêchent cette très sympathique cartouche de trouver le supplément d'âme qui lui fait défaut. Une curiosité avec de bons moments, mais pas encore le haut du panier du genre.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Pas d'autofire, dans un jeu où il n'aurait clairement pas fait de mal – Des fenêtres d'action de l'ordre du dixième de seconde qui font qu'il est parfois impossible de ne pas se faire toucher sans connaître à l'avance le placement des ennemis – Des environnements variés, mais dont la thématique mécanique ne se renouvèle pas beaucoup

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Vectorman sur un écran cathodique :

Baku Baku Animal

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com

Développeur : SEGA AM3 R&D Division
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titre original : ばくばくアニマル 世界飼育係選手権 (graphie japonaise)
Titres alternatifs : Baku Baku Animal : Sekai Shiikugakari Senshuken (écran-titre, arcade), Baku Baku (version occidentale), Baku Baku Animal : World Zookeeper Contest (écran-titre, version occidentale)
Testé sur : ArcadeSaturnGame GearPC (Windows 95)Master System

Version Arcade

Date de sortie : Avril 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (quatre directions) et deux boutons
Version testée : Version japonaise
Hardware : SEGA Titan Video Game System (ST-V)
Processeurs :Hitachi SH-2 28,636362MHz (x2) ; Motorola MC68000 11,2896MHz ; SEGA SCUDSP 14,318181MHz ; Zilog Z80 8MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; Yamaha YMF292-F SCSP 22,5792MHz ; 2 canaux
Vidéo : 352 x 224 (H) 59,764802Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Par une cruelle ironie qui définit souvent les tournants de l’histoire, la cinquième génération de consoles aura largement usé, pour assurer sa première phase de promotion, des salles d’arcade qu’elle allait largement contribuer à vider par la suite. Alors que Nintendo entendait présenter, via des titres comme Cruis’n USA ou Killer Instinct, sa future Nintendo 64… qui emploierait au final un hardware totalement différent, Sony avait trouvé un allié de poids sous la forme de Namco, qui avaient été si impressionnés par les capacité de la PlayStation qu’ils avaient décidé de développer l’essentiel de leurs futurs hit d’arcade sur l’architecture de la console.

Le seul choix en solo se limite au mode de difficulté (et c’est extrêmement dur dès le mode moyen, naturellement)

Et du côté de chez SEGA, figure ô combien marquante de l’arcade quasiment depuis ses débuts, ce seront également les salles de jeux qui auront servi à préparer le terrain pour la Saturn, via le pompeusement nommé SEGA Titan Video Game System (souvent raccourci en ST-V). En quoi consistait donc cette machine révolutionnaire ? Eh bien, tout simplement, en le hardware de la future console à l’identique – à l’exception notable du lecteur CD-ROM, remplacé par des roms plus adaptées aux bornes d’arcade. Et pour vanter la technologie de ce système de pointe, quoi de mieux que des monstres de puissance comme, heu… Baku Baku Animal ? Sérieusement ?

Baku Baku Animal : du puzzle game comme on l’aime ?

Vous l’aurez compris, SEGA ne misait pas que sur la 3D décomplexée pour vendre sa future machine (rétrospectivement une erreur face à un marché occidental qui n’aura juré que par elle). Pour la promouvoir, il n’y aura pas eu que des titres impressionnants destinés à en envoyer plein les yeux, il y aura également eu les inévitables puzzle games – parce que bon, toucher tous les types de public, c’est au moins aussi important.

L’histoire se dévoilera via des dialogues intégralement en japonais, hélas

Baku Baku Animal, d’ailleurs jamais sorti du Japon sous forme de borne d’arcade, s’inscrit à ce titre directement dans les traces d’une des licences majeures du genre : l’increvable Puyo Puyo (dont vous pourrez découvrir les mécanismes via le test de Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine). Le scénario, totalement sans intérêt, vous place dans la peau d’un(e) aspirant(e) au poste de gardien du zoo royal, chargé(e) de gérer la ménagerie d’une princesse capricieuse, sorte de Paris Hilton avant l’heure. Comme Puyo Puyo, le titre de SEGA repose, par essence, sur le duel : aucun mode de jeu ne vous laisse « seul » ; vous aurez toujours un adversaire face à vous, fut-il contrôlé par l’I.A. ou par un autre joueur. Le but, comme toujours, sera d’inonder l’écran adverse tout en vous assurant que la même mésaventure ne vous arrive pas, faute de quoi vous en serez quitte pour remettre une pièce dans la borne. L’unique mode de jeu solo vous demandera donc de venir à bout de neuf opposants avant d’hériter du titre tant convoité (un mode « débutant » vous laissant, pour sa part, vous faire les dents sur trois adversaires plus aisés).

Je t’ai eue !

Comme on peut l’imaginer, le système de jeu n’est pas, pour sa part, un simple calque de Puyo Puyo – la saga de Compile étant de toute façon appelée à avoir son propre représentant sur ST-V l’année suivante, SEGA n’allait pas s’amuser à cloner bêtement un titre à succès, quand bien même celui-ci tirait déjà largement son inspiration d’un certain Columns.

Le conseiller royal viendra vous donner vos statistiques après un niveau gagné

En fait, ici, vous pourrez bien empiler indéfiniment les quatre types de tuiles que comprend le jeu, et qui correspondent à des aliments, sans qu’il ne se produise jamais rien. La clé viendra en fait des animaux que vous pourrez placer à leur contact : qu’une tuile de lapin se retrouve à côté d’un ensemble de tuiles de carottes, et la bête affamée se réveillera aussitôt pour dévorer toute la pitance à sa portée – un peu ) la façon dont le Pac-Man de Pac-Panic se jetait sur les fantômes. La vraie nuance (de taille) étant qu’il est ici possible de réaliser des combos en profitant de la chute et du réajustement des tuiles consécutifs à la disparition de celles qui viennent de se faire dévorer, et qu’on a donc toutes les bases pour pouvoir balancer des masses de cochonneries au deuxième joueur, comme cela à toujours été la grande force du genre – enfin, au moins depuis Puyo Puyo, en tous cas.

Attendez-vous à en baver

Le principe est facilement assimilable, et il est à peu près aussi efficace que celui de son modèle. La seule différence notable à mes yeux restant que là où les « pierres » produites par les enchainements de Puyo Puyo imposaient de réaliser des combos à proximité pour s’en débarrasser, représentant de ce fait la nuisance qu’elles étaient censées incarner, Baku Baku Animal envoie pour sa part des tuiles « normales »… qui peuvent donc se transformer immédiatement en munitions à destination de l’envoyeur.

C’est le moment de donner le coup de grâce !

On peut donc dans certaines circonstances « aider » son ennemi en lui envoyant des tuiles, ce qui n’est pas trop censé être l’intérêt de la manœuvre, mais à cette nuance près, le système de jeu est difficilement attaquable et on ne met pas longtemps à s’amuser et à établir des stratégies spécifiques. La réalisation, qui abuse d’une 3D sans âme qui peinera aujourd’hui à impressionner quiconque, a au moins le mérite d’être très colorée, et bien évidemment il ne sera pas question ici d’assister au plus petit ralentissement. Signalons également que bien que le jeu soit intégralement en japonais, cela ne devrait pas pénaliser le joueur occidental outre mesure, les différents modes de jeu n’étant pas difficile à identifier, et la compréhension de « l’histoire » (notez les guillemets) étant tout sauf indispensable.

Certaines des vieilles techniques fonctionnent toujours, d’autres nécessiteront quelques adaptations

En fait et comme de plus en plus souvent à cette période, le principal défaut de Baku Baku Animal reste… son statut de borne d’arcade. Pensé pour des parties de cinq minutes destinées à faire cracher à un joueur sa monnaie durement arrachée à ses parents, le titre se limite à l’essentiel en termes de contenu : un mode solo, un mode deux joueurs et basta.

Tu vas y passer comme les autres, mon vieux

Et, tant qu’à faire, la difficulté est bien évidemment redoutable ici (la vitesse, en particulier, ne tarde pas à grimper), ce qui fait que même les joueurs rodés au genre pourront s’attendre à connaître des difficultés dès le deuxième stage. Autant dire qu’on touche là à l’un des jeux qu’on aura tout à gagner à découvrir dans une de ses versions domestiques – et plus particulièrement dans sa version Saturn, qui tourne sur le même hardware, mais en ayant le bon goût d’offrir plus d’options. L’ère de l’arcade toute-puissante était en train de tourner, en 1995 – obligeant les fabricants à imaginer des machines de plus en plus fantasques et de plus en plus coûteuses – mais ceci est une autre histoire. Pour les amateurs de puzzle games, Baku Baku Animal demeure un candidat très solide et plaisant à découvrir, mais pour les néophytes comme pour la grande majorité des joueurs occidentaux, le mieux restera sans doute de le découvrir sur Saturn. Ce qu’on appelle une opération de promotion bien menée.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16,5/20 À mi chemin entre Puyo Puyo et Pac-Panic, Baku Baku Animal n'était sans doute pas le meilleur titre pour étaler la puissance du ST-V et à travers lui de la Saturn, mais il reste un puzzle game efficace auquel on ne pourra reprocher que l'absence de la moindre prise de risque. Certes, le casting du jeu manque du plus élémentaire charisme, le scénario ne passionnera sans doute pas davantage ceux qui parlent japonais que les autres, et on aurait apprécié une sélection de modes de jeu un peu plus ambitieuse que les éternelles enfilades de duels en solo et limité à deux joueurs en multi, mais à tout prendre, le concept est aussi efficace que ceux dont il s'inspire. Sans doute pas le logiciel le plus marquant en la matière, mais si vous commencez à souper de vos parties de Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine et que vous cherchez une alternative solide, aucune raison de bouder celle-ci.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Mode solo vraiment difficile – Des modes de jeu qui se réduisent à l'essentiel – Un casting sans âme à la 3D faiblarde

Version Saturn
Baku Baku

Développeur : SEGA AM3 R&D Division
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 10 novembre 1995 (Japon) – Mai 1996 (Europe) – 19 juin 1996 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou cartouche de sauvegarde

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme cela a déjà été dit, le ST-C et la Saturn partageant pour ainsi dire le même hardware, on n’a a priori pas de grandes inquiétudes à nourrir au moment de lancer ce portage de Baku Baku (le nom pris par le jeu en occident, mais juste sur la boîte. Les mystères de la distribution…). La bonne nouvelle, c’est que le CD-Rom ayant fait le trajet hors du Japon (contrairement à la borne d’arcade), il sera désormais possible de profiter du sublime scénario du jeu en anglais.

C’est fou comme un seul écran peut faire une énorme différence !

Bon, soyons clair : je ne sais même pas si 5% des joueurs s’embarrasseront à profiter des échanges sans intérêt entre les personnages, mais bon, au moins, c’est désormais possible. Pour l’occasion, et histoire de mettre son support en valeur, le logiciel en aura profité pour développer un peu son introduction, la passer en plein-écran (et la traduire, bien sûr, en la sous-titrant pour l’occasion). Graphiquement et sans surprise, les deux versions sont presque identiques, même si on remarquera que le ratio de l’image a légèrement changé, comme le prouve l’apparition de deux bandes en haut et en bas de l’écran (mais après tout, le format natif de la borne n’était pas en 4/3). Très honnêtement, cela n’a aucune incidence sur le rendu, qui ne joue de toute façon qu’un rôle assez symbolique dans un puzzle game.

À deux bandes près, la réalisation est exactement identique à celle de la borne

La vraie question serait surtout de savoir si le contenu, lui, a changé, est la réponse est : oui ! Déjà, tout le contenu de la borne est là, en se voyant adjoindre un « ranking mode » qui demandera d’enchaîner le plus de niveaux possible sans perdre avant de se voir allouer un score en fonction de ses performances et du nombre de combos réalisés. Un peu gadget, mais pour les amateurs de scoring, un bon moyen de revenir à la charge une fois le mode « arcade » terminé. Le mode « arcade », justement, reprend sans surprise tout le contenu de la borne, mode versus inclus, mais avec une addition de taille : un menu des options.

Cette fois, le défi devrait convenir à tout le monde

Et celui-ci ne se moque vraiment pas du monde : cinq niveaux de difficulté (ce qui permettra au passage de constater que la difficulté de la borne correspond au mode « très difficile »…), choix du nombre de couleurs (avec la possibilité d’en ajouter une cinquième), du ratio animal/nourriture, du nombre de rounds… Bref, un vrai moyen de paramétrer son expérience et de contrer le niveau très exigeant de la borne en le remplaçant par une approche plus accessible – ou plus exigeante, pour les joueurs les plus rodés. Sachant que la maniabilité n’a bien évidemment pas souffert du passage au pad, on hérite donc d’une version qui peut se vanter d’être équivalente à la borne d’arcade en termes de réalisation (et même un peu au-dessus, grâce au support CD-ROM), et supérieure en termes de contenu et de confort de jeu ! Au moins, pour une fois, pas question de pinailler : si vous voulez découvrir le jeu, vous pouvez lancer directement votre console de jeu, et sans remords.

NOTE FINALE : 17/20

Adaptation très sérieuse pour Baku Baku sur Saturn, qui profite non seulement d’une réalisation au moins équivalente à celle de la borne mais surtout d’une expérience de jeu entièrement configurable et beaucoup plus accessible qui devrait convenir aux joueurs de tous les niveaux et non uniquement aux fanatiques hyper-rodés aux puzzle games. Conséquence : si jamais vous souhaitez découvrir le jeu dans des conditions optimales, autant commencer directement ici.

Version Game Gear
Baku Baku

Développeur : Minato Giken
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 26 janvier 1996 (Japon) – Juin 1996 (Europe) – 1996 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1996, La Saturn n’était pas la seule console de SEGA à profiter d’un développement actif : la Game Gear était toujours techniquement en vie, en dépit d’une bataille perdue depuis très longtemps contre sa rivale la Game Boy. Baku Baku aura donc eu le droit à son portage, ce qui aura nécessité, on s’en doute, quelques adaptations. Pour commencer, difficile de faire tenir deux grilles à l’écran ; les développeurs auront donc opté pou un compromis intelligent en cantonnant la grille adverse à une vue en bas à droite. Même ainsi, la grille est plus petite dans cette version (6×8 contre 6×10), mais les dégâts ont été correctement circonscrits, et le mode deux joueurs est toujours là. En revanche, oubliez le mode « ranking », et les options se limitent dorénavant à un sound test : plus d’options de difficulté ! Par contre, un système de mot de passe a été ajouté, ce qui fait parfaitement sens sur une machine dont l’autonomie ne dépasse pas trois heures. Oh, et la réalisation est essentiellement fonctionnelle. Bref, une version qui fait l’essentiel mais qui sera à réserver à ceux qui voudront jouer spécifiquement sur leur Game Gear.

Difficile de trouver meilleur compromis pour afficher le jeu sans le changer en bouillie de pixels

NOTE FINALE : 15/20

Baku Baku offre sur Game Gear l’essentiel de ce qu’on était en droit d’attendre, même si la disparition des options de difficulté ne se justifiait pas vraiment. Une version qui faisait sens en 1995 lorsque la Game Gear était la seule façon de transporter le jeu dans sa poche, mais à l’heure actuelle on la réservera à ceux qui veulent spécifiquement jouer à la console portable de SEGA.

Version PC (Windows 95)
Baku Baku

Développeur : SEGA AM3 R&D Division
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 2 août 1996 (Japon) – 5 septembre 1996 (États-Unis) – 1996 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Minimum graphique requis : Résolution : 640×480, 256 couleurs
Ça fait rêver, hein ?

Dans la deuxième partie des années 90, SEGA aura réellement commencé à s’intéresser au marché du PC, avec des résultats contrastés. Avec Baku Baku, on touche plutôt au rang des conversions ratées : certes, on retrouve dans l’absolu la totalité du contenu de la version Saturn (moins l’introduction, curieusement, en dépit du support CD-ROM), ce qui est a priori l’essentiel. En revanche, cantonner le jeu à une fenêtre en 320×240 sans aucune possibilité de l’agrandir ou de jouer en plein-écran, ça fait quand même un peu cheap, surtout sur un système d’exploitation dont la résolution minimale est le 640×480 ! Pour ne rien arranger, il est impossible de configurer les touches en dehors d’un choix entre les lettres et les touches fléchées, et naturellement parvenir à faire fonctionner un joystick dépendra avant toute chose de votre capacité à configurer une machine virtuelle, le titre ne tournant bien évidemment pas sous Windows 10. Autant dire qu’à l’heure où il est de toute façon au moins aussi simple de faire tourner n’importe quelle autre version, on ne pourra que vous encourager à vous diriger directement vers la version Saturn.

NOTE FINALE : 15,5/20

On ne va pas se mentir : cantonné à une fenêtre de jeu en 320×240 intégrée directement à l’interface de Windows avec des options de configuration des touches réduites au strict minimum, Baku Baku perd beaucoup de son charme – et encore, à condition de parvenir à le faire fonctionner sur un système moderne. Si le titre demeure aussi intéressant sous cette forme, le plus simple est encore d’opter directement pour la version Saturn.

Version Master System
Baku Baku

Développeur : Minato Giken
Éditeur : Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A.
Date de sortie : Octobre 1998 (Brésil)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version brésilienne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Un jeu sur Master System ? En 1998 ? Les connaisseurs auront déjà compris qu’il ne peut s’agir que d’une version brésilienne, la machine de SEGA ayant connu une seconde jeunesse au Brésil grâce à la distribution assurée par la compagnie Tec Toy. Par contre, on s’en doute, distribuer des jeux et les développer sont des activités très différentes, on ne sera donc pas surpris de découvrir sur Master System un portage de Baku Baku qui n’est rien d’autre qu’une transcription quasiment pixel perfect de la version Game Gear. La fenêtre de jeu n’a même pas été agrandie ! Et pour compléter le tableau, il n’y a même plus de mode deux joueurs non plus (évidemment, cela aurait demandé de redimensionner la fenêtre de jeu, trop de boulot…) ! Bref, autant dire que c’est vraiment la version sans intérêt à réserver à ceux qui veulent une version expurgée qui n’utilise que la moitié de leur écran. À oublier.

Le portage sur Master System pour les pires que nul

NOTE FINALE : 13/20

Baku Baku sur Master System n’est pas subitement devenu un mauvais jeu, mais on tient là un des portages les plus fainéants de toute l’histoire du genre, avec une transposition au pixel près de la version Game Gear amputé de son mode deux joueurs ! Autant dire que vous aurez tout à gagner à ignorer cette version dès l’instant où vous avez accès à n’importe quelle autre.

Astal

Cette image provient du site https://segaretro.org

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA of America, Inc.
Titre original : 輝水晶伝説アスタル (Ki Suishou Densetsu Astal, Japon)
Titre alternatif : Centaurus (titre de travail)
Testé sur : Saturn

Version Saturn

Date de sortie : 28 avril 1995 (Japon) – 15 août 1995 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Le propre de l’histoire, c’est qu’elle tend à se répéter, surtout quand on n’en tire aucune leçon. Nul ne sait si les dirigeants de SEGA auront eu l’occasion de méditer sur cette affirmation, mais le fait est qu’après une Mega Drive qui avait connu des débuts catastrophique avant de parvenir un peu miraculeusement à remonter la pente, le lancement américain de la Saturn sera resté comme un des plus gros échecs de SEGA.

Cet oiseau va devenir votre meilleur ami, mais il ne va pas vraiment vous laisser le choix

Annoncée en catastrophe le 11 mai 1995 aux États-Unis pour essayer de devancer la campagne de promotion de la PlayStation, vendue trop cher, boycottée par des revendeurs qui n’avaient même pas été prévenus de sa commercialisation, la console aura également dû composer avec un line-up limité de six jeux, avec seulement deux autres titres annoncés dans les quatre mois à suivre. Parmi ces deux titres se trouvait un jeu de plateforme en 2D – ce qui apparaissait presque comme une incongruité aux yeux d’un public occidental qui ne jurait déjà plus que par la 3D. Une aventure chargée de compléter la ludothèque famélique de la console autant que de mettre en lumière ses capacités comparée à la génération précédente : un logiciel ambitieux nommé Astal… et dont le succès aurait été suffisamment confidentiel, au final, pour qu’il ne soit même pas commercialisé en Europe.

Astal ou ce voyage qui aurait pu être dépaysant

Signe que le titre n’avait pas simplement été pensé comme un bouche-trou, celui si s’ouvre sur un scénario copieusement détaillé par pas moins de deux cinématiques. Celles-ci vous apprendront comment la déesse Antowas aura créé le monde de Quartalia à partir d’un simple joyau avant de le peupler de deux êtres : Leda, une jeune fille qui avait le pouvoir de créer la vie, et Astal, dont le rôle était de protéger Leda.

C’est joli, on ne peut clairement pas retirer ça au jeu

Épuisée par son acte de création, Antowas sombra dans le sommeil, laissant ainsi le champ libre au maléfique Jerado et sa création, un être vivant nommé Geist, qu’il envoya enlever Leda pour la retenir prisonnière au fond de l’océan. Parti pour la libérer, le très puissant Astal fracassa le fond des abîmes avec une telle force qu’il en endommagea Quartalia et alla même jusqu’à réveiller la déesse. Celle-ci, courroucée, le bannit sur la lune après avoir vaincu Jerado, avant de retourner à son sommeil. Le problème, c’est que Geist, lui, était toujours libre, et qu’il profita de l’absence d’Antowas pour enlever à nouveau Leda. Astal, voué à la protéger, entreprend donc de se libérer de sa prison pour aller sauver la jeune fille…

Comme on peut le voir, un certain effort a été entrepris pour mettre un peu de chair sur l’antique principe consistant à aller libérer la jeune fille en détresse. Astral nous dévoile un univers qui ne réinvente certes pas la poudre, mais qui a l’avantage de prendre le temps d’installer son histoire et de se révéler dans toute sa pleine gloire via ce qui reste aujourd’hui encore comme son indéniable point fort : sa réalisation.

La vue recule lorsque l’action le nécessite ; très bon point

Quartalia est un peu un déluge de couleurs profitant de la vaste palette de la Saturn dans le domaine – le seul où la console 32 bits pouvait réellement prétendre surpasser la PlayStation concurrente. Les sprites sont souvent massifs, en particulier pendant les combats de boss, on observe des effets de reflet ou même de transparence (pourtant si rares sur la machine) et le titre a la très bonne idée d’intégrer un système de zoom qui permet à la vue de reculer lorsque la situation le justifie, au hasard lors d’une séquence de plateforme nécessitant un peu d’anticipation – une très bonne approche, qui a en revanche l’inconvénient d’introduire une pixellisation constante qui contraste un peu avec la finesse des graphismes. Un argument de vente à part entière au moment de sa sortie, qui ne ferait hélas illusion que le temps que débarque un certain Rayman trois mois plus tard, et qui n’aura visiblement pas suffi à convaincre la presse ni les joueurs à fermer les yeux sur les errements de son gameplay.

Le jeu se veut impressionnant, et parvient à l’être

En effet, une fois la manette en mains, on ne met pas longtemps à réaliser que tout n’est pas rose dans le monde créé par la déesse Antowas. Pourtant, sur le papier, on sent un potentiel indéniable : Astal peut marcher, courir, sauter, soulever des objets gigantesques ou même projeter ses ennemis eux-mêmes, voire lâcher un souffle massif qui se montrera indispensable à plusieurs stades de l’aventure.

Un combat qui demandera des nerfs solides

Surtout, il reçoit dès le premier niveau du jeu l’aide d’un oiseau à qui échoira un rôle assez comparable à celui du faucon qu’on avait pu employer dans 8 Eyes : celui-ci pourra à la fois vous assister contre les différents adversaires, mais aussi aller vous chercher des bonus de soin ou mener certaines actions spéciales ; ses possibilités vous seront matérialisées par trois gemmes en bas de l’écran, et pourront être activées par les boutons X, Y et Z de la manette (ou sélectionnées via les boutons de tranche pour être employées avec A) et, pour faire bonne mesure, cet oiseau pourra même être contrôlé par un deuxième joueur (exactement comme le faucon d’8 Eyes, encore une fois). Bref, on sent un éventail massif de possibilités… dont le jeu ne tire, pour ainsi dire, presque jamais parti.

Une des rares séquences vaguement originales du jeu

Le level design, c’est une science qui nécessite du temps, et on sent bien qu’à ce niveau-là Astal aura souffert des mêmes contraintes que d’autres titres oubliables à la Clockwork Knight. La quinzaine de niveaux (en comptant les boss) qu’offre le titre se limite quasi-exclusivement à avancer vers la droite, à accomplir quelques sauts et à vaincre une poignée d’adversaires avant de rejoindre la sortie et d’aller faire face à un boss disposant très rarement de plus de deux patterns.

L’inévitable niveau de glace est bien évidemment de la partie

Le tout est généralement bouclé assez vite, en faisant assez peu appel à l’habileté ou à la réflexion pour d’autres raisons que de compenser une jouabilité qui manque globalement de précision, surtout au niveau des masques de collision, et la difficulté est généralement assez faible – sauf pour un dernier boss absolument atroce qui exige à la fois un timing délirant, l’utilisation de votre oiseau, et un brin de chance. En fait, on a parfois l’impression de jouer à une sorte de version alpha du jeu où toute la partie technique aurait été achevée, mais où les niveaux se seraient limités à de grands couloirs pas passionnants en attendant que les plans définitifs arrivent. 90% des capacités de votre héros, oiseau inclus, ne servent pratiquement jamais à rien, et on peut très facilement espérer arriver jusqu’au terme du jeu dès la première partie sans faire autre chose qu’avancer, sauter, cogner et mémoriser un ou deux passages un peu plus délicats. En dépit de l’inclusion de quelques scènes un tout petit peu plus originales, comme celle où l’on avance sur le dos d’une improbable créature flottante, on n’a jamais le temps d’être surpris ni d’être confronté à quoi que ce soit qui justifie d’aller puiser dans un très impressionnant arsenal de capacités vouées à ne jamais nous être utiles hors de quelques situations très précises.

Tellement de possibilités, et si peu d’idées…

La conséquence en est qu’Astal laisse constamment cette impression désagréable de ne faire qu’égratigner la surface d’un univers qui semblait avoir des milliards de choses à offrir et qui ne propose, au final, qu’un jeu de plateforme plan-plan et prévisible qui n’aurait déjà pas emballé grand monde à la fin des années 80 sans sa réalisation à couper le souffle.

Ce combat devra être mené par l’oiseau livré à lui-même

Ce n’est pas tant un mauvais jeu qu’un titre frustrant par les limites qu’il dévoile ; il n’est pas difficile de sentir qu’il y avait vraiment tous les éléments dans le code du jeu pour mettre en place une expérience grandiose, mais que personne ne s’est donné (ou n’a eu) le temps de les assembler en un tout cohérent qui puisse aller rivaliser avec des Symphony of the Night ou même avec des Revenge of Shinobi. En l’état, c’est juste la victoire de la forme sur le fond : une démonstration technique qui n’aura au final pas contribué à vendre la console par palettes, plaquée sur un level design avec sept ou huit ans de retard. Le type de jeu qu’on a réellement envie d’aimer tant il dégage une atmosphère particulière, mais qui ne nous donne au final vraiment pas grand chose pour nous permettre de le faire. Bref, une expérience qui laisse un goût un peu amer dans la bouche avant de l’oublier définitivement.

Vidéo – Le premier niveau du jeu  :

NOTE FINALE : 13,5/20 L'histoire retiendra d'Astal un double objectif : celui de venir combler un manque dans une ludothèque de la Saturn alors encore extrêmement embryonnaire, et celui de démontrer les capacités de la console 32 bits dans le domaine de la 2D. Si le titre développé par SEGA les aura tous deux parfaitement remplis, on pourra regretter qu'il n'accomplisse pas grand chose d'autre, offrant une expérience d'une rare platitude et trop vite bouclée qui se limite le plus souvent à avancer vers la droite et à rejoindre la fin deux minutes plus tard. Le plus frustrant avec le jeu, ceci dit, reste le potentiel extraordinaire et la personnalité indéniable qui transpirent de chacune de ses séquences de jeu, et qui laissent deviner une aventure cent plus fois plus technique, plus variée et plus grandiose sans que rien ne vienne hélas jamais confirmer cette impression. Dans le genre « plein les yeux », autant dire qu'un logiciel comme Rayman, lui, sera parvenu à laisser la même année un souvenir autrement plus marquant. Tant pis pour un petit bonhomme qu'on avait vraiment envie d'adorer, mais qui n'avait finalement pas grand chose à nous faire vivre.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Un level design qui se limite à avancer vers la droite – Un oiseau extrêmement sous-employé en solo... – ...et franchement gadget à deux – Un gameplay dont on n'a pas à employer un dixième des possibilités pour venir à bout du jeu – Une jouabilité qui manque de précision – Un combat final absolument infect

Les avis de l’époque :

« Que c’est joli, j’en ai l’œil droit de traviole tellement c’est beau ! Sega ne nous a pas fait l’affront de sortir un jeu de plates-formes bidon, histoire d’alimenter sa console 32 bits et son porte-monnaie. La jouabilité est au rendez-vous, malgré une prise en main bizarre. Les plus petits vont être émerveillés, et même les plus grands en auront pour leur argent. »

Marc, Consoles + n°55, juin 1995, 90%

« Une magnifique coquille vide qui ne vaut pas son prix en dépit de ses graphismes incroyables. »

Mean Machines, juillet 1995, 53% (traduit de l’anglais par mes soins)

« Le plus gros problème avec Astal, c’est la rigidité de sa jouabilité. L’action échoue à atteindre le plaisir immédiat que tous les grands jeux de plateforme ont atteints par le passé. À la place, il faut composer avec des contrôles poussifs qui provoquent une grande frustration au moment de réaliser des sauts précis ou d’affronter les ennemis les plus rapides. »

Game Players, août 1995, 65% (traduit de l’anglais par mes soins)

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Astal sur un écran cathodique :