Sub-Terrania

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Développeur : Zyrinx
Éditeurs : SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Enterprises Ltd. (Europe) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Testé sur : Mega Drive

Version Mega Drive

Date de sortie : Avril 1994 (Amérique du Nord) – Mai 1994 (Europe) – Septembre 1994 (Brésil)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Avec le temps, au début des années 90, la plupart des genres ayant vu le jour lors de la décennie précédente étaient parvenus à se conformer à une série de codes qui faisaient qu’un joueur savait très exactement à quoi s’attendre au moment d’acheter un jeu vidéo. L’expérimentation s’était peu à peu éloigné de la jouabilité pour s’aventurer du côté de la narration et du level design, et il était rare qu’on achète un beat-them-all ou un jeu de plateforme en espérant être surpris : le joueur d’alors commençait déjà, bien au contraire, à vouloir obtenir précisément ce qu’il était venu chercher sans avoir à gaspiller deux heures à tenter d’assimiler de nouveaux mécanismes. Ce qui n’empêchait pas de pouvoir passer un très bon moment sur d’excellents titres : après tout, le concept fondamental d’une saga comme celle des Super Mario Bros., par exemple, n’aura que peu évolué en plus de trente ans sans que cela ne semble déranger quiconque.

Vous pensiez avoir fait le tour des shoot-them-up sur Mega Drive ? Essayez Sub-Terrania !

Dans le domaine du shoot-them-up, les choses étaient même pratiquement gravées dans le marbre : les deux principales écoles opposaient le défilement vertical à la 1942 au défilement horizontal à la R-Type. Sortir de ces deux concepts revenait à s’extraire d’un moule dans lequel étaient formés 95% des shoot-them-up de l’époque. Alors autant dire que la surprise fut grande en voyant débarquer un extraterrestre comme Sub-Terrania, dont les mécanismes allaient puiser dans d’antiques références comme Asteroids ou Gravitar. Un choix osé, dans une période où la différence n’était plus forcément, comme on vient de le voir, un argument de vente. Mais les anciens demomakers sur Amiga de Zyrinx étaient bien décidés à faire les choses à leur manière, alors ils s’y seront attelés crânement, avec leur propre kit de développement, afin de montrer ce que la Mega Drive pouvait avoir dans le ventre.

Terminer un niveau vous demandera généralement de collecter un de ces modules

D’entrée, le jeu marque son territoire avec une introduction (visible ci-dessus) qui aura décroché bien des mâchoires à l’époque, à grands coups de 3D et de digitalisations. Celle-ci vous résume d’ailleurs très bien la situation : une colonie minière située sur un astéroïde a été prise d’assaut par des forces extraterrestres, et ce sera bien évidemment à vous d’aller sur place pour sauver les employés, et en profiter naturellement pour botter le fondement d’un ennemi surnuméraire à l’aide de votre seul petit vaisseau.

Votre pilote a peut-être l’air de s’éclater, mais il ne sait visiblement pas ce qui l’attend !

Première surprise : loin de vous lâcher dans le feu de l’action avec un modeste « Good Luck ! » en guise d’instructions, Sub-Terrania prend le temps d’introduire la grande majorité des neuf niveaux du jeu par un briefing en bonne et due forme – un peu à la manière d’un Desert Strike. Si les objectifs sont généralement basiques, correspondant le plus souvent à des cibles à détruire, à des employés à sauver et à des modules à récupérer, mieux vaut bien prendre le temps de potasser la carte présentée en prélude à la mission car il ne sera plus possible de la consulter une fois le niveau lancé. Non que les cartes soient tentaculaires – il faut atteindre un stade très avancé du jeu pour avoir une chance de se perdre – mais il faudra composer avec une donnée à laquelle les shoot-them-up de l’époque ne nous avaient pas habitués : la gestion de votre carburant.

Manœuvrer sous l’eau représentera une difficulté supplémentaire

En effet, votre astronef ne se maintient pas dans les airs par la simple volonté divine : l’essentiel du gameplay va consister à apprendre à faire usage de vos réacteurs, avec le bouton B, afin de lutter contre la gravité omniprésente au sein de l’astéroïde. Évidemment, cela risque de constituer votre principale cause de mortalité : chaque fois que vous percuterez un monstre ou une paroi – c’est à dire très souvent – le bouclier visible sur votre compteur de vies, en bas à gauche, va commencer à prendre des dégâts, jusqu’à votre explosion finale.

Prenez bien le temps de consulter les objectifs, cela pourra vous sauver la mise

Autant dire qu’on passe beaucoup de temps à prendre le coup de main pour optimiser nos déplacements, ce qui prend d’autant plus de temps que les derniers niveaux du jeu introduisent une variable supplémentaire avec la présence de sections sous-marines, rendues d’autant plus frustrantes que votre vaisseau a une tendance naturelle à flotter, ce qui revient à inverser la gravité à laquelle vous êtes confrontés hors de l’eau… Chaque poussée de réacteur venant puiser dans nos précieuses réserves de carburant, on apprend rapidement à profiter de l’inertie lorsque l’occasion se présente, et on se démène surtout pour bien retenir le plan de chaque niveau tant les caches de bonus sont rares et tant il est fréquent de s’écraser misérablement à deux mètres de la réserve d’énergie qui devait nous sauver la vie.

Les adversaires sont souvent coriaces – et de belle taille

Dire que le jeu est difficile est un euphémisme : on meurt vite, on meurt souvent, et certains passages demandant en plus d’expérimenter du placement d’éléments autour d’armes capables de vous détruire en un seul tir, comme le troisième niveau, représenteront rapidement de véritables aspirateurs de vies. L’opposition peut prendre la forme d’adversaires massifs et rapides d’autant plus difficiles à éviter qu’il faudra constamment manœuvrer autour d’eux pour éviter de leur foncer dedans, vos canons n’étant capables d’arroser que devant vous. Même si on trouve des power-up pour gonfler la puissance de nos armes, la dextérité sera bien souvent le seul salut pour espérer progresser dans le jeu – ce qui prendra du temps, car il n’y a ni sauvegarde, ni mot de passe, ni continue.

L’acide endommage votre vaisseau : si vous restez trop longtemps dedans, c’est la mort

Fort heureusement, Sub-Terrania fait passer la pilule de la meilleure des façons : avec une jouabilité difficile à prendre en défaut, et surtout, avec une réalisation de haute volée. Les images parlent d’elles-mêmes : la 3D pré-calculée a peut-être plus mal vieilli que le pixel art, et on sera moins impressionné que devant un Thunder Force IV, mais cela reste sans difficulté dans le haut du panier de la Mega Drive.

Être mobile sera un art, dans Sub-Terrania

Les boss sont parfois gigantesques, ça bouge à toute vitesse, il n’y a jamais l’ombre d’un ralentissement, et le jeu profite même d’effets assez impressionnants comme la surface de l’eau représentée en 3D. C’est superbe ! Certes, on finit par se lasser un peu de toutes ces déclinaisons de roches et de plantes en guise de décor, mais on appréciera le soin avec lequel Zyrinx a tenu à placer les ambiances de ses différents niveaux, notamment par le biais d’une bande-son électronique d’une rare qualité. Là, au moins, on ne peut même pas dire que les sonorités ont vieilli : Jesper Kyd, qui travaille aujourd’hui encore sur les compositions de séries comme Borderlands ou Assassin’s Creed, a vraiment réalisé un travail magnifique qui ravira vos oreilles.

Les erreurs ne pardonnent pas souvent…

Au final, on se retrouve donc avec un titre atypique qui risque de déstabiliser quelque peu les fanatiques de shoot-them-up « conventionnels ». La prise en main du jeu nécessitera beaucoup de temps pour être maîtrisée – mais c’est précisément l’intérêt du logiciel, qui reposera avant tout sur votre capacité d’adaptation, sur votre dextérité et sur votre mémoire. Mieux vaudra être patient – et doué – pour espérer mener l’aventure à son terme, et être prêt à serrer les dents lors de quelques passages qui ne pardonnent pas, mais quant on à affaire à un titre aussi original et aussi accompli, on n’a tout simplement aucune raison de ne pas se laisser embarquer.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 16/20 Véritable OVNI au milieu de la ludothèque de la Mega Drive, Sub-Terrania choisit de laisser de côté les R-Type et les Thunder Force pour aller puiser son inspiration dans Oids, Gravitar ou Solar Jetman. Le résultat est un shoot-them-up dépaysant et un peu déstabilisant, au gameplay original et à la difficulté redoutable. Grâce à une réalisation très réussie et à un concept qu'on ne rencontre pas tous les jours, les joueurs à la recherche de la perle rare qui aurait pu leur échapper ne devraient pas hésiter une seule seconde avant de tenter leur chance. On aurait peut-être apprécié encore un peu plus de variété dans les environnements et dans les mécanismes, mais en l'état, on a déjà largement matière à engloutir des heures en tenant de surmonter le challenge. À découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – Des mécanismes exigeants qui tolèrent peu l'erreur – Une difficulté qui ne pardonne pas – Certains passages de puzzle qui risquent de vous faire perdre bien des vies avant que vous compreniez le truc – Des environnements souterrains qui ne se renouvèlent pas beaucoup

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Sub-Terrania sur un écran cathodique :

Cannon Fodder

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Développeur : Sensible Software
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment Ltd.
Testé sur : Amiga3DOAcorn 32 bitsAmiga CD32Atari STMega DrivePC (DOS)Super NintendoJaguarGame Boy Color
Disponible sur : Antstream, J2ME, Linux (Ubuntu 14.04, Ubuntu 16.04, Ubuntu 18.04), Mac OS X (10.7.0+), Symbian, Windows (7, 8, 10)
Présent au sein des compilations :

  • Telstar Double Value Games : Cannon Fodder / Beneath a Steel Sky (1994 – PC (DOS))
  • Beau Jolly Compilation : Cannon Fodder / The Settlers / The Chaos Engine / Terminator 2 : The Arcade Game (1995 – Amiga)
  • Codemasters Collection 1 (2021 – Evercade)


En vente sur : Gog.com (Linux, Mac OS X, Windows)

La série Cannon Fodder (jusqu’à 2000) :

  1. Cannon Fodder (1993)
  2. Cannon Fodder 2 (1994)

Version Amiga

Date de sortie : Décembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Lecteurs de disquette additionnels supportés

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1993, Commodore International n’était peut-être pas au sommet de sa forme – la compagnie américaine était même au plus mal, bien aidée en cela par une longue suite de décisions catastrophiques – mais ce n’était, curieusement, pas le cas pour sa branche britannique. Commodore UK était même la seule filiale de la compagnie américaine à réaliser des profits au moment du dépôt de bilan de la branche principale, à tel point qu’elle faisait alors partie des repreneurs crédibles du nom et des brevets de la marque ! Cette vitalité anormale du marché européen de l’Amiga s’explique sans doute par le fait que la plupart des titres marquants de la ludothèque de la machine étaient précisément issus de studios situés en Angleterre : The Bitmap Brothers, Team 17, DMA Design ou encore Sensible Software… À quoi aurait bien pu ressembler l’histoire de Commodore sans une industrie vidéoludique britannique alors en pleine bourre ?

Sensible Software, justement, parlons-en. La compagnie fondée en 1986 avait dû attendre la parution de Mega lo Mania, en 1991, et surtout celle de Sensible Soccer, en 1992, pour commencer à se faire un nom. Et la sortie de Cannon Fodder, l’année suivante, correspond sans doute à ce qu’on pourrait considérer comme l’âge d’or de Sensible Software – attelons-nous à présent à découvrir pourquoi.

Quel est au juste le concept de Cannon Fodder ? Des soldats, des fusils, des morts. Oui, ça ne semble pas follement original – mais Sensible Soccer lui-même n’offrait à première vue pas grand chose de plus qu’un énième jeu de football empruntant énormément de son gameplay au sympathique Kick Off, gardons-nous donc des sentences hâtives. Imaginez un conflit armé contemporain situé dans un cadre imaginaire. Vous allez prendre la tête d’une escouade de soldats qui comprendra, selon les missions, entre trois et six membres. Votre mission ? Tuer tout le monde, raser tous les bâtiments, ou – parfois – sauver les civils ; imaginez toutes les combinaisons et dérivations possibles de ces trois objectifs (détruire une usine, capturer un chef rebelle, ramener des otages chez eux…) et vous aurez les bases. C’est simple, c’est limpide, et c’est très clairement affiché en prélude de chaque opération. Mais alors, quelle forme va prendre cette fameuse guerre qu’on vous demande de livrer ?

Tout commence à l’entrée du camp d’entrainement. Vous allez voir une queue de volontaires se former et s’agrandir ou se réduire au fil des missions en fonction de vos succès et de vos échecs. Vos soldats, la « chair à canon » du titre, ce seront eux. La grande et belle colline devant laquelle ils s’alignent, elle, se remplira progressivement de tombes au gré de vos pertes, se chargeant de vous rappeler le coût humain de la moindre de vos erreurs. Ces considérations philosophiques écartées (« Ben quoi ? ils sont volontaires, après tout ! »), vous lancez votre première mission et signez le début d’un conflit qui va s’avérer sanglant.

Vous débarquez alors sur une carte en vue de dessus. Les quelques pixels ressemblant furieusement à des joueurs de Sensible Soccer peints en kaki, ce sont vos hommes. Les mêmes peints en bleu (ou en vert, ou en brun, selon le climat) seront vos adversaires. Le jeu est pensé pour se pratiquer à la souris : on déplace le curseur à l’écran, un clic gauche amènera vos troupes à se déplacer (vous dirigez le chef de l’escouade, les autres soldats le suivront automatiquement), un clic droit les amènera à faire feu. Les deux boutons à la fois feront tirer, selon l’icône sélectionnée à gauche de l’écran, une grenade ou une roquette – seuls moyens de détruire les bâtiments qui génèrent indéfiniment de nouveaux ennemis. Leur nombre étant limité – contrairement aux balles de vos mitrailleuses – veillez donc à vous montrer économe, car si vous n’avez pas la chance de trouver une caisse de munitions sur la carte, accomplir les objectifs sans ces précieux explosifs pourra se révéler impossible.

La première chose qui frappe avec ce concept, c’est sa simplicité. Deux boutons, un pointeur : c’est à peine plus compliqué que de déplacer une icône sur le bureau de Windows. Il faut difficilement plus de dix secondes pour assimiler les fondamentaux, les subtilités – comme la possibilité de diviser votre escouade en plusieurs groupes – ne se révélant pertinentes qu’au moment où la difficulté va commencer à augmenter.

Car si les premiers niveaux devraient ressembler à de simples promenades de santé, les choses ne tardent pas à se compliquer drastiquement, et on réalise bien vite que « simple » et « simpliste » sont deux notions très différentes. Ainsi, après avoir perdu tout son groupe à la suite d’un tir de bazooka bien placé, on apprend à acquérir des réflexes de survie élémentaires : être toujours en mouvement, avancer à couvert, envoyer une unité en éclaireur pour repérer la disposition des troupes adverses, bien réfléchir au meilleur endroit pour traverser une rivière à la nage sous peine de faire une cible facile… Et tandis que le cimetière se remplit à vitesse grand V et que les recrues commencent à se faire rares, on peste, on râle, on s’arrache les cheveux, et on y revient histoire de monter un peu qui commande ici.

La grande force de Cannon Fodder, c’est que chaque fois qu’on pense ne plus pouvoir être surpris, le jeu rajoute un petit ingrédient pour changer sensiblement la donne : conduire un véhicule allant du tank à l’hélicoptère, composer avec de nouveaux types d’adversaires (cochonneries d’artilleurs !), découvrir des zones secrètes… Alors oui, les tirs se jouent parfois à un cheveu, on meurt souvent sans avoir eu une réelle chance de se défendre, et les derniers niveaux virent parfois au die-and-retry pur et simple – mais il n’empêche qu’on s’amuse, tout simplement parce qu’on fait difficilement plus ergonomique, plus accessible et plus simple à jouer.

Surtout, on est heureux de voir que la jugeote peut jouer un rôle largement aussi important que l’adresse, et que la méthode du « foncer tout droit en tirant partout » se traduit par un aller simple au cimetière dès la troisième ou quatrième mission du jeu. Comme notre groupe, on prend du galon, on apprend à ne pas reproduire les mêmes erreurs, et on devient un véritable vétéran. Un assez bon indicateur du côté extrêmement ludique du titre : simplissime à jouer, long et délicat à maîtriser, c’est fou comme un concept aussi épuré sera parvenu à mettre dans le mille à pratiquement tous les niveaux. Si vous cherchez un logiciel procurant un plaisir pratiquement intact depuis l’époque de sa sortie, voici un excellent candidat.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16,5/20 Sensible Soccer avait démontré qu'un principe de jeu simple enrobé dans des graphismes minimalistes n'était en rien incompatible avec un gameplay extrêmement efficace, Cannon Fodder se sera chargé d'achever de le prouver. Promener un groupe de quelques soldats de dix pixels de haut en file indienne sans scénario ni contexte dans des environnements bateaux pour tuer tout ce qui bouge pouvait sembler gonflé : ça l'est, et pourtant, ça marche ! Grâce à une accessibilité immédiate et à une vraie dimension tactique, le titre de Sensible Software est un très bon représentant de ces programmes qu'on lance pour se divertir cinq minutes avec le cerveau réglé sur "off", et qui finissent par vous pousser à y engloutir des heures. Évidemment, cette même simplicité finit également par se retourner contre le jeu et par rendre l'expérience redondante, mais parfois, il n'y a tout simplement pas besoin de proposer quoi que ce soit de plus pour offrir un logiciel efficace. À découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – Parfois fastidieux de trouver les derniers adversaires sur une carte – Il arrive qu'on meure sans avoir pu y faire grand chose – Maniement des véhicules pas toujours irréprochable – Concept vite redondant

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Cannon Fodder sur un écran cathodique :

Version 3DO

Développeur : Audio Visual Magic Ltd.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Mars 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On ne va pas se mentir : parmi les joueurs ayant investi dans une 3DO à sa sortie, peu le faisaient spécifiquement pour jouer à des jeux disponibles sur Amiga 500. Néanmoins, vu le succès rencontré par Cannon Fodder, Virgin Interactive aura visiblement senti qu’il eut été dommage de ne pas tenter sa change sur la fameuse machine 32 bits – et tant pis pour ceux qui espéraient en mettre plein les yeux à leurs voisins avec de la 3D de pointe. Confié à la même équipe que pour la version MS-DOS, ce portage offre pour l’occasion des graphismes qui veulent présenter des dégradés plus fins, mais qui aplanissent au final le contraste en donnant le sentiment qu’il y a moins de couleurs au lieu de l’inverse. Je vous rassure tout de suite : cela reste extraordinairement anecdotique, surtout dans un jeu qu’on ne devait pas acquérir pour être ébloui par la réalisation. En revanche, du côté sonore, le CD est cette fois mis à contribution, avec l’excellent thème musical de la version Amiga rendu de façon impeccable, et quelques cris digitalisés très propres en bonus pendant les missions. Pour le reste, la maniabilité est bonne, le défilement est fluide – pas autant que sur un PC de pointe, mais rien qui puisse pénaliser la maniabilité à un quelconque niveau pour autant. Bref, c’est leu jeu qu’on était venu chercher, sans réelle surprise au menu, et même si on aurait pu aimer avoir des thèmes musicaux pendant la partie, ce n’était visiblement pas l’objectif. Allez, on prend.

NOTE FINALE : 16,5/20

Cannon Fodder n’était peut-être pas le genre de titre qu’on attendait en priorité sur 3DO, mais avec le recul, c’était certainement une erreur car il reste l’un des meilleurs titres du catalogue de la console. On aurait pu apprécier des couleurs plus vibrantes, où un support CD-ROM qui soit mis à contribution au-delà de l’écran-titre, mais sur le plan ludique, c’est toujours aussi bon.

Version Acorn 32 bits

Développeur : Krisalis Software Ltd.
Éditeur : Krisalis Software Ltd.
Date de sortie : 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur A5000
Configuration minimale : RAM : 2Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe du succès rencontré par Cannon Fodder : son portage sur l’impressionnante – mais hélas assez confidentielle – gamme 32 bits de chez Acorn, qui n’aura jamais vraiment cherché à se vendre comme une machine de jeu. L’équipe de Krisalis Software aux commandes n’aura en tous cas pas cherché à réinventer la poudre : le portage est une conversion identique à 99% à la version Amiga (le 1% restant correspondant à l’icône de la carte, en bas à gauche, remplacée par un simple bouton qui est certes moins esthétique mais qui a l’avantage d’être plus clair). Tant qu’à faire, il le fait bien : la réalisation sonore est exactement à la hauteur de ce qui avait été entendu sur Amiga, contrairement à la version PC, et le titre tourne comme un charme sur les configurations les plus robustes. Dommage qu’il n’y ait pas une couleur de plus à l’écran, mais dans les meilleurs conditions, on se retrouve tout simplement avec la version Amiga en plus fluide. À tout prendre, a-t-on vraiment besoin d’autre chose ?

NOTE FINALE : 16,5/20

La gamme 32 bits d’Acorn n’était peut-être pas conçu comme une offre de machines de jeu, mais elle aurait pu, et cette très bonne conversion de Cannon Fodder nous le rappelle : c’est exactement le même jeu que sur Amiga, mais en plus fluide. Je doute que beaucoup de lecteurs du site aient un Archimedes et un exemplaire du jeu sous la main, mais si c’est le cas, vous pouvez foncer sans crainte.

Version Amiga CD32

Développeur : Arch Rivals Ltd.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Juin 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Module FMV supporté
Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1994, Commodore nourrissait peut-être encore l’espoir d’un avenir pour son éphémère console de jeu, mais le fait est que la ludothèque de la machine, composée à 95% de titres portés à l’identique depuis l’Amiga 500, avait bien du mal à justifier l’investissement. Bon exemple avec ce portage de Cannon Fodder qui propose une expérience quasi-identique à celle de la version originale. Seul ajout : une petite vidéo de trois minutes (dont sont extraites les photos de la version A500) montrant les développeurs, déguisés en soldats, en train de marcher dans la nature, de danser ou de lancer des fléchettes sur un poster de Christian Slater grimé en Hitler. Malheureusement, visionner cette vidéo nécessite l’ajout d’un module à part (FMV expansion module) que cette version de Cannon Fodder restera le seul jeu à avoir utilisé, le dépôt de bilan de Commodore ayant interdit que d’autres titres en tirent profit. Ce détail mis à part, le jeu est strictement identique à la version Amiga 500 – il ne profite même pas du mode AGA pour se hisser au niveau de la version PC. Autant dire que retourner terre et ciel pour trouver cette version ne présente aujourd’hui aucun intérêt sur le plan ludique, à part pour les collectionneurs.

NOTE FINALE : 16,5/20

À l’exception de trois minutes de vidéo nécessitant d’ailleurs l’achat d’un module dédié, strictement rien ne différencie cette version de celle parue sur Amiga – ce qui est d’autant plus dommage que ce portage aura largement pu prétendre faire jeu égal avec celui paru sur PC. Une nouvelle fois, un jeu de quelques mégas rapidement copié sur un CD ne tirant pratiquement aucun avantage du hardware de la console de Commodore. Une sale habitude.

Version Atari ST

Développeur : Sensible Software
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Mai 1994
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double face (x3)
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Si l’Amiga n’était déjà pas au sommet de sa forme en 1993, que dire alors de l’Atari ST en 1994 ? Cette fois, c’était acté : l’ordinateur le plus populaire de chez Atari était mort, et on attendait beaucoup de son successeur, le Falcon (qui connaîtrait malheureusement un destin à peu près aussi tragique que la Jaguar). Les derniers utilisateurs de la machine devaient donc être heureux de voir débarquer Cannon Fodder, dans une version qui peine à se hisser à hauteur de celle parue sur Amiga. Si, graphiquement, les deux versions sont à peu près identiques (à l’exception des digitalisations de l’introduction, moins détaillées), du côté du son, le thème reggae a été sauvegardé en qualité numérique, mais la qualité plonge un peu une fois en jeu. La résolution est encore un peu plus basse que d’habitude (320×191), mais c’est surtout du côté du défilement que l’Atari ST montre, comme souvent, ses limites : si le défilement vertical est fluide, il n’y a tout simplement plus de défilement horizontal, remplacé par des « sauts » d’écrans tellement abrupts qu’on croit d’abord à un bug. Inutile de dire que la jouabilité en souffre, ce qui est dommage, car pour le reste le jeu reste à la hauteur de la version originale.

NOTE FINALE : 15/20

Sorte de baroud d’honneur de l’Atari ST, Cannon Fodder préserve l’essentiel de ce qu’offrait la version Amiga, même si le défilement erratique fait beaucoup de mal à la jouabilité du titre. Si les derniers fans de la machine d’Atari ont certainement été heureux de pouvoir s’y essayer à l’époque, on lui préfèrera aujourd’hui la plupart des autres versions.

Version Mega Drive

Développeurs : PanelComp, Ltd. – Silicon Sketches
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Décembre 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad, SEGA Mouse
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 12Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au rang des machines s’apprêtant à pousser leur chant du cygne, la Mega Drive suivait en 1994 sensiblement la même pente que tous les autres systèmes 16 bits, survivant pour sa part encore assez bien jusqu’à ce que la sorti de la PlayStation ne vienne mettre tout le monde d’accord. La machine de SEGA offrant une architecture processeur assez proche de l’Amiga, on pouvait espérer une conversion de Cannon Fodder relativement fidèle… et c’est d’ailleurs ce qu’on obtient. Bien sûr, le thème reggae numérique a laissé la place au processeur sonore de la console, et la palette graphique a un peu changé (mieux vaut avoir une grande télé pour apercevoir quelque chose), mais le contenu est toujours fidèle à 100%, le système de sauvegarde ayant juste été remplacé par un système de mots de passe. Évidemment, le gros changement vient de la jouabilité au pad, bien moins naturelle – mais bien que le titre n’apparaisse sur aucune des rares listes de titres compatibles avec la souris SEGA, il reconnait bel et bien le périphérique (même s’il est possible, que cela puisse connaître quelques ratés d’une version à l’autre). Bref, on se retrouve avec la version qu’on était en droit d’attendre, ni plus, ni moins.

NOTE FINALE : 16/20

Cannon Fodder sur Mega Drive ne transcende rien, mais il ne déçoit pas non plus. La réalisation accomplit ce qu’on attend d’elle et la jouabilité souffre à la fois de l’utilisation du pad (sauf si vous avez la chance d’avoir une souris) et de la petitesse des sprites, mais on peut s’y faire relativement vite. Un portage qui fait le travail avec sérieux.

Version PC (DOS)

Développeur : Audio Visual Magic Ltd.
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Avril 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 SX 20MHz – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 4Mo – MSCDEX : 2.2 – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Mode graphique supporté : VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Développer un jeu sur ordinateur en 1994 sans penser à le porter sur PC n’était pas seulement absurde, c’était également suicidaire. La machine d’IBM avait alors déjà commencé son règne, et même les moins objectifs des aficionados de chez Commodore ou Atari pressentaient que celui-ci était parti pour durer. Voir débarquer Cannon Fodder sur PC n’aura donc été une surprise pour personne, et on était en droit d’exiger une version au moins équivalente à celle parue sur un Amiga 500 désormais largement inférieur à tous les niveaux.

La version disponible aujourd’hui à la vente étant celle parue sur CD, intéressons-nous à celle-ci. Histoire de vaguement justifier l’apport de la galette (le jeu entier, cinématiques incluses, pèse à peine 20 mégas), on aura commencé par ajouté une cinématique d’introduction, visible ci-dessus, réalisée sous 3DS Max. Pas de quoi se relever la nuit, mais c’est toujours ça de pris.

Au niveau des regrets, signalons immédiatement la musique, qui trouve le moyen de ne pas se hisser à hauteur de celle de la version Amiga, même avec une Roland MT-32, ce qui, en 1993, était totalement injustifiable – encore plus sur une version CD. Je vous rassure, cela n’est que très modérément pénalisant (surtout dans un titre ou la musique ne se fait pour ainsi dire pas entendre pendant les missions), mais cela reste énervant. On remarquera également que la résolution est légèrement plus basse que sur Amiga (320×200 contre 320×224), ce qui fait que la vue est un tout petit peu plus rapprochée. Au niveau des satisfactions, en revanche, le jeu décide de tirer parti des 256 couleurs du VGA et offre une réalisation plus colorée et plus détaillée (de peu, mais quand même), et surtout plus fluide et encore plus nerveuse que sur Amiga ! Du coup, le plaisir de jeu augmente (en même temps que la difficulté), et on a encore plus de mal à se décider à lâcher la souris que sur la version originale. Bref, à une minuscule déception musicale près, c’est meilleur à tous les niveaux. On prend.

NOTE FINALE : 17/20

Cannon Fodder sur PC fait presque tout mieux que la version originale sur Amiga ; seule la musique reste légèrement en retrait, ce qui est d’autant plus dommage que c’est techniquement injustifiable. Reste qu’en terme de plaisir de jeu, ça va vite, c’est nerveux, c’est d’une fluidité à toute épreuve et c’est plus beau. Coup de chance : c’est justement la version disponible à la vente, alors n’hésitez pas à vous jeter dessus.

Version Super Nintendo

Développeurs : PanelComp, Ltd. – Silicon Sketches
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Décembre 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par Lestat
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad, souris Super Nintendo
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 12Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quitte à porter un jeu sur Mega Drive, il aurait été étrange de ne pas en profiter pour faire également le trajet chez la concurrence. La Super Nintendo aura donc hérité à son tour de sa conversion de Cannon Fodder. Sans surprise, on retrouve un portage très proche de ce qu’offrait la machine de SEGA, mais profitant des forces et des faiblesses de la console de Nintendo. Du côté des forces, même si le reggae qualité numérique a une nouvelle fois disparu, le son est plutôt meilleur – en particulier les bruitages, percutants à souhait. Le plus grand nombre de boutons sur le pad permet également d’accéder plus vite aux fonctions de la barre de gauche et, pour une fois, le jeu n’a pas été censuré. Surtout, le titre reconnait la souris Super Nintendo, ce qui fait plaisir. Du côté des faiblesses, la résolution limitée de la Super Nintendo vient encore rogner sur une vue qui perd déjà beaucoup à être observée sur une télé. Bref, chaque version a son intérêt, à vous de faire votre choix.

NOTE FINALE : 16/20

Il vaut mieux avoir une grande télé pour y jouer, mais Cannon Fodder sur Super Nintendo fait le boulot – d’autant mieux qu’il a le bon goût de reconnaître la souris. On se retrouve du coup avec une version relativement proche de celle parue sur Amiga, avec une résolution légèrement réduite. Ça ira.

Version Jaguar

Développeur : The Dome Software Developments
Éditeur : Virgin Interactive Entertainment (Europe) Ltd.
Date de sortie : Avril 1995 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Ah, la Jaguar… À une époque où le monde des consoles, tout occupé à sa transition vers la nouvelle génération, ne semblait plus obsédé que par son nombre de bits, Atari pensait avoir frappé un grand coup en sortant la toute première console 64 bits. Malheureusement, une programmation problématique additionnée à un manque cruel de bons jeux (et surtout, pratiquement aucune exclusivité valable) auront rapidement scellé le sort de l’éphémère machine, rapidement balayée par la PlayStation. Au rang des rares jeux valables de la ludothèque de la machine, Cannon Fodder vient candidater avec aplomb. On ne sent certes les 64 bits nulle part (c’est à peine plus détaillé que la version Amiga), mais à ce stade, on espère surtout récupérer un titre décent plutôt qu’une démonstration technique. Au moins, pas à se plaindre à ce niveau-là : c’est joli, le son est au moins à la hauteur de ce qu’on a entendu sur Amiga (le reggae digitalisé est bien là), on peut sauvegarder, et ça tourne très bien (encore heureux !). Seul regret, l’imposante manette de la Jaguar est toujours aussi pénible, mais on voulait un Cannon Fodder et c’est ce qu’on a.

NOTE FINALE : 16,5/20

Cannon Fodder sur Jaguar peut au moins prétendre à être l’un des très rares bons titres parus sur la machine d’Atari. Inattaquable sur le plan de la réalisation, il ne souffre que de l’archaïque et grotesque pad de la console – mais reste largement jouable. Bref, c’est une conversion réussie, et c’est déjà beaucoup.

Version Game Boy Color

Développeur : Sensible Software
Éditeur : The Codemasters Software Company Limited
Date de sortie : Décembre 2000 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Système de sauvegarde par pile

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Autant le reconnaître : il arrive parfois qu’on aborde un test avec une certaine appréhension. Cannon Fodder ? Sur l’écran minuscule d’une Game Boy Color ? Il y a tellement de bonnes raisons qui pourraient faire de ce titre une catastrophe industrielle qu’on pousse le bouton « On » en s’attendant au pire… Et puis tiens, première surprise, on récupère le thème reggae en version numérique « crachou », mais on appréciera l’effort. On procède ensuite avec le choix de sa langue, du niveau du difficulté, de notre pseudo et même de l’identité de l’adversaire ! Les briefings sont désormais sensiblement plus détaillés, et on retrouve le jeu tel qu’on le connait, à quelques petits détails près : le level design a parfois été légèrement modifié, il y a désormais des voix digitalisées, il n’y a plus de carte, il n’est plus possible de créer plusieurs groupes et vous ne verrez plus non plus les hommes s’aligner devant votre caserne (il est en revanche toujours possible de visiter le cimetière). Le gameplay ne souffre pas autant de la taille de l’écran qu’on pouvait le penser : certes, mieux vaut être très réactif et éviter d’aller trop vite, mais le jeu a été intelligemment adapté à la taille de l’écran, et la possibilité de sélectionner le niveau de difficulté fait qu’on ne s’arrache pas trop les cheveux. On continuera certes de préférer l’expérience offerte sur Amiga ou sur PC, mais si jamais vous avez envie de jouer à Cannon Fodder dans la salle d’attente du dentiste, vous pourriez avoir trouvé votre bonheur.

NOTE FINALE : 15,5/20

Cannon Fodder sur Game Boy Color aurait pu être une catastrophe, c’est heureusement une adaptation bien pensée qui compose intelligemment avec les limites de la machine. On bénéficie ainsi d’une expérience nomade qui n’est certes pas tout à fait à la hauteur de celle des versions de salon, mais vraiment de très peu. Une conversion réussie.

The Legacy

Développeurs : Magnetic Scrolls – MicroProse Ltd.
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Titre original : The Legacy : Realm of Terror (États-Unis)
Testé sur : PC (DOS)
Disponible sur : Linux, Mac OS X, Windows
En vente sur : Gog.com (Linux, Mac, Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1992 (Amérique du Nord) – Avril 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25 et 3,5″ (x7)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 SX – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 2Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Mode graphique supporté : VGA (360×240)
Cartes sons supportées : AdLib, Covox Sound Master, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum/Plus/16, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster/Pro

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Étant donné la réputation flatteuse dont jouissaient la plupart des titres de MicroProse dans les domaines de prédilection de la compagnie américaine – à savoir la simulation et la stratégie, principalement – le désir de celle-ci de commencer à se diversifier au début des années 90 fut accueilli avec une curiosité plutôt enthousiaste. Si, du côté du jeu d’aventure, la plupart des titres publiés par la société de Sid Meier connurent un certain succès d’estime, la grande majorité échoua à laisser une trace marquante dans l’histoire vidéoludique.

Du côté du jeu de rôle, difficile de faire trembler les mastodontes de l’époque, qu’ils se nomment Ultima VII ou Lands of Lore, mais un titre comme Darklands avait malgré tout réussi, à sa manière, à marquer les esprits – en bien, en dépit de la quantité de bugs qui polluaient le jeu à sa sortie. Alors quand on vit surgir un dungeon crawler issu des studios Magnetic Scrolls, on s’attendit naturellement à voir surgir un clone de la saga majeure du genre sur PC : Eye of the Beholder, ou au moins à une énième aventure plaçant un groupe d’aventuriers dans un donjon médiéval peuplé de monstres. Sauf que, surprise : ce qui débarqua fut un jeu situé dans un monde contemporain et évoluant dans une ambiance horrifique nommé The Legacy.

Le pitch du jeu est très simple, et déjà grandement annoncé dans le titre, pour ceux ayant la chance de comprendre la langue de Shakespeare : vous incarnez l’héritier du manoir des Winthorp, une maison ancienne et naturellement hantée liée à des rumeurs de possessions démoniaques et de magie noire depuis plusieurs siècles. À peine entré, la porte se referme derrière vous et vous ne pouvez plus sortir. Il vous appartiendra donc d’enquêter sur l’histoire du lieu et de ses occupants pour pouvoir parvenir à vous échapper, à condition, bien sûr, de survivre aux occupants des lieux…

Certes, même en 1993, ce pitch n’avait rien de nouveau, et pour cause : prenez le manoir des Winthorp, rebaptisez-le « Derceto », et vous obtenez l’histoire d’Alone in the Dark, paru quelques mois auparavant. Mais le grand intérêt de The Legacy, c’est précisément de reprendre tous les ingrédients associés au genre qu’on a depuis pris l’habitude de désigner sous le nom de « survival horror », et d’en faire un dungeon crawler contemporain. Vous allez donc commencer par sélectionner un personnage, ou par en modifier un pour l’adapter à votre goût.

Le choix est large : hommes et femmes de tous âges, aux compétences variées, avec leur lot de références (on peut même incarner un professeur Henry Jones !), ce qui permettra surtout de découvrir une feuille de caractéristiques assez dense. Oubliez Donjons & Dragons : le jeu ne compte pas que sur la force brute, et ici, avoir des habiletés en soins, en électronique, ou même être capable de forcer une porte aura une utilité. On appréciera d’ailleurs que sur les 17 compétences du jeu, aucune ne soit inutile au cours de la partie : même s’il conviendra naturellement de privilégier au moins une des compétences de combat au début de l’aventure (et le choix des armes est dense à ce niveau : poings, batte de baseball, tisonnier, pistolet automatique, fusil à pompe, sabre ou même tronçonneuse), vous ne regretterez jamais d’avoir dépensé quelques points dans une capacité a priori moins importante.

Même si développer un personnage qui n’excelle en rien n’est jamais une bonne idée, avoir des compétences en mécanique pourra ainsi vous aider à crocheter une porte, et il est même possible de jeter des sortilèges – et d’investir des points d’expérience pour les améliorer. Là encore, bonne nouvelle : les sorts trouvent également tous leur utilité en jeu, et ceux accordant des bonus à votre défense ou à vos capacités offensives ont le bon goût de durer très longtemps – ce qui, dans un jeu où le moindre combat peut s’avérer redoutable, saura souvent faire la différence.

Le titre de Magnetic Scrolls est en effet réputé pour sa difficulté : dans les faits, une fois qu’on a assimilé le fonctionnement du jeu et qu’on a quelques heures de pratique au compteur, les choses se passent beaucoup mieux. On est au départ un peu décontenancé par le fait que la dizaine d’étages qui composent le manoir ne suivent pas un cheminement linéaire : doit on chercher à s’enfoncer dans les soubassements, ou au contraire chercher à monter d’étage en étage ?

Les allers-et-retours seront nombreux, lors des premières parties, en grande partie à cause des très nombreuses portes verrouillées qui vous demanderont les clés appropriées, mais aussi et surtout à cause de la capacité extrêmement réduite de votre inventaire, qui risque de vous donner de nombreux maux de tête. Même s’il est possible de l’augmenter en trouvant un attaché-case (qui vous mobilisera d’ailleurs une main), les situations où vous serez soumis à des choix cornéliens pour savoir quoi prendre seront d’autant plus nombreuses que pratiquement tous les objets rencontrés sont appelés à être utiles à un moment ou à un autre. Conseil : choisissez une salle par étage où vous reviendrez déposer vos possessions pour faire de la place ; les monstres ne réapparaissent pas, et perdre la trace d’un artefact qui se révèle capital pour la suite de l’aventure est une sensation très, très désagréable. Les monstres, pour leur part, peuvent représenter une opposition de taille, mais chacun d’entre eux a un point faible ou un moyen de le rendre inoffensif. Bref, c’est souvent en expérimentant qu’on découvre le salut.

On appréciera d’ailleurs que l’enquête proposée par le jeu, pour convenue qu’elle soit, s’avère suffisamment prenante pour vous pousser à passer à l’intérieur du manoir Winthorp la quinzaine d’heures qui devrait vous être nécessaire pour mener l’aventure à son terme. À force de lettres abandonnées, d’articles égarés et de cassettes vidéos dissimulées dans des coffre-forts, on prend plaisir à résoudre les très nombreuses énigmes et à revenir inspecter toutes les portes chaque fois qu’une clé vient s’ajouter à notre collection.

On regrettera à ce titre que l’interface du jeu soit loin d’être aussi ergonomique qu’elle pense l’être : le système de combat n’est pas naturel, la faute à la présence de deux boutons au lieu d’un (en fait, un pour les attaques au corps-à-corps et l’autre pour les armes à distance), et le système qui vous propose de déplacer ou de redimensionner les différentes fenêtres de jeu – inauguré par Wonderland deux ans plus tôt, et dont The Legacy aura au final été le deuxième et dernier représentant – n’apporte rien. On peut ainsi faire le choix d’agrandir la vue principale… pour se retrouver alors avec une bouillie de pixels – ce qui est dommage, étant donné que la réalisation du jeu est assez réussie. Son plus grave défaut est finalement d’avoir eu recours à des modèles 3D modélisés sous 3DS Max, qui ont beaucoup moins bien vieilli que le pixel art des jeux parus à la même époque (pas vrai, Lands of Lore ?), mais l’ambiance générale fonctionne à merveille, les différents environnements (bureaux, sous-sols, asile, musée…) sont très variés, et la réalisation sonore, à base de nappes planantes et de portes qui grincent, fait toujours son petit effet quand on joue dans le noir au milieu de la nuit.

Le fait est qu’on a si peu d’exemples de survival horror/dungeon crawler auxquels comparer The Legacy que le titre de Magnetic Scrolls peut se vanter, encore aujourd’hui, de proposer une expérience originale qui fait regretter qu’une suite, un temps considérée, n’ait jamais vu le jour. Dans tous les cas, si vous êtes à la recherche d’un titre à la Dungeon Master mais dans un cadre original, avec un petit côté Fallout ou Wasteland dans la construction de personnage, ne passez pas à côté de The Legacy.

Quelques mots enfin, comme c’est la coutume, sur la version française du jeu : médiocre, mais fonctionnelle… ou presque. Si elle contient une large dose de coquilles, d’oublis et de contresens, on pourrait considérer qu’elle fait le travail si elle n’ajoutait pas, dans certaines versions, un bug bloquant empêchant le déroulement d’un événement crucial vers la fin du jeu ! La seule solution est alors d’aller éditer manuellement le fichier MESSAGES.FRE (ou juste MESSAGES dans la version ne contenant que la VF) pour aller raccourcir un certain message en enlevant des mots ! Bref, si vous êtes à peu près à l’aise avec la langue de Shakespeare, mieux vaut vous contenter de la V.O.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 17/20 Quand MicroProse expérimente un jeu de rôle à mi-chemin entre le dungeon crawler et le survival horror, cela donne The Legacy. En dépit de la précocité du concept – moins d'un an après Alone in the Dark – on est déjà surpris par sa maturité et par son efficacité, l'aventure devenant de plus en plus prenante à chaque minute de jeu. Alors oui, l'interface nécessite un temps d'adaptation, le scénario sent aujourd'hui beaucoup plus le déjà-vu et la réalisation sous 3D Studio n'a pas le charme du pixel art, il n'empêche que le titre développé par Magnetic Scrolls n'a toujours pas de réel équivalent aujourd'hui, 25 ans après sa parution, et qu'il fonctionne à merveille. Prenez le temps de vous imprégner de l'ambiance, jouez dans le noir et prenez des notes : vous pourriez passer beaucoup de temps dans la demeure des Winthorp. CE QUI A MAL VIEILLI : – Ergonomie assez maladroite – Beaucoup d'allées-et-venues dans une zone de jeu très étendue – Très facile d'égarer des objets importants - et il y en a beaucoup – Difficile de savoir où chercher quand on est bloqué – Le bug bloquant de la V.F.

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Legacy sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Un jeu de rôles très prenant qui vous ravira par la qualité de ses graphismes et de ses musiques. Le scénario hors-pair vous passionnera dès vos premiers pas dans le domaine Winthrop (sic). »

Thomas Alexandre, Tilt n°108, décembre 1992, 17/20

Fables & Fiends : Hand of Fate

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Titres alternatifs : Fables & Fiends : The Legend of Kyrandia – Book Two (PC CD-ROM – États-Unis), Fables & Fiends – The Legend of Kyrandia : Hand of Fate (Book Two) (Gog.com), Kyrandia 2 (titre usuel), Kyrandia II : The Hand of Fate (Japon), The Hand of Fate (écran-titre)
Testé sur : PC (DOS)FM TownsPC-98
Disponible sur : Mac OS X (10.7.0), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com (Mac, Windows)

La saga Kyrandia (jusqu’à 2000) :

  1. Fable & Fiends : The Legend of Kyrandia – Book One (1992)
  2. Fables & Fiends : Hand of Fate (1993)
  3. The Legend of Kyrandia : Book 3 – Malcolm’s Revenge (1994)

Version PC (DOS)

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (version CD-ROM) :

L’année 1992 avait marqué, on s’en souvient, l’entrée en fanfare de Westwood Studios dans le monde du point-and-click. Lâché au milieu d’un genre alors légèrement embouteillé, cannibalisé par les deux ogres LucasArts et Sierra On-Line, The Legend of Kyrandia avait fait l’effet d’une petite bombe – moins sous l’effet de ses mécanismes de jeu que de celui de sa réalisation enchanteresse, véritable monument du pixel art.

Les joueurs attendaient donc avec impatience une suite que laissait deviner le très parlant « Book One » apposé au sommet de la boîte du premier opus. Celle-ci débarqua dès l’année suivante, avec deux absences de taille sur les boîtes européennes : celle du titre de la saga, et surtout celle d’un gros « 2 » juste derrière qui aurait pourtant pris tout son sens autant chronologiquement que commercialement. L’explication en restera certes mystérieuse, mais on pourrait en hasarder une : Hand of Fate est autant une suite qu’un… spin-off.

Le scénario du titre part d’ailleurs sur des bases assez fantasques : Kyrandia est en train de disparaître ! Les mystiques royaux pédalent dans la semoule, tout le monde semble être pris de court, jusqu’à ce qu’une mystérieuse main géante ne vienne offrir la solution : il faut retrouver l’ancre de pierre qui amarre le royaume à la réalité. Et pour mener cette mission un peu étrange, c’est la jeune Zanthia, seule rescapée du casting du premier épisode, qui va donc devoir s’y coller, découvrant au passage que son expédition va être sérieusement compliquée par le fait qu’on lui a volé son chaudron et tous ses ingrédients…

Oubliez donc Brandon, Kallak, Brynn, Garm et Brandywine – ou même Malcolm, d’ailleurs, l’ex-grand-méchant de la saga. Oubliez également les territoires parcourus dans le premier opus : le seul lien existant est donc Zanthia, sa hutte et son marécage – lequel a d’ailleurs beaucoup changé. Oui, c’est un peu radical, mais hé, pourquoi pas. On s’est suffisamment plaint des suites opportunistes reprenant peu ou prou le pitch et le concept du titre de base pour aller protester contre un parti-pris un peu plus culotté !

La bonne nouvelle, c’est que si une chose n’a pas changé, c’est bien la qualité de la réalisation du jeu. Les studios Westwood ont probablement eu en leur sein certains des plus grands artistes de la période, et ça se sent : chaque écran du jeu tire véritablement la quintessence de ce que le VGA pouvait offrir. C’est beau ! La variété est également de mise : depuis votre marais initial jusqu’à un monde volant en passant par les champs de blé, les pentes enneigées ou les souterrains volcaniques, on en prend véritablement plein les mirettes.

Le travail réalisé est réellement impressionnant, car tout est animé avec un grand soin, et notre héroïne elle-même arbore pas moins de huit tenues différentes pendant la partie (ce qui signifiait redessiner tous les sprites de chaque étape de toutes ses animations à chaque fois) ! Pour ne rien gâcher, la réalisation sonore est elle aussi à la hauteur de celle du premier épisode, particulièrement avec une Roland MT-32 où on touche à la perfection de ce qu’avait à offrir la musique MIDI. De ce côté-là, rien à dire : le jeu est absolument inattaquable.

Là où les choses feront peut-être un peu moins l’unanimité, c’est que le système de jeu basé à 90% sur des objets à collecter, lui, est toujours de la partie. Le bon côté, c’est que leur placement et leur utilisation est désormais nettement moins aléatoire : Zanthia est une alchimiste, et vos premières actions consisteront à retrouver les pages de son précieux grimoire afin de disposer de recettes à utiliser pour créer des potions.

Le mauvais, c’est que la logique des énigmes est, elle, toujours aussi cryptique. Si, par la force des choses, on finit généralement par se douter que le programme attend de nous qu’on prépare telle ou telle potion par déduction en observant les ingrédients qu’il met à notre disposition (le déroulement de la partie est extrêmement linéaire : vous terminez un endroit avant de passer à un autre), mieux vaut s’accrocher, parfois, pour comprendre la logique des actions qu’on nous fait réaliser. Je n’ai toujours pas compris, par exemple, pourquoi la seule façon de détourner l’attention d’une mère de son nourrisson était de transformer un boulet de canon en or avant de lui offrir (!), ni en quoi il pouvait paraître naturel d’offrir à deux pêcheurs un fromage en guise d’appât.

On est face à une logique souvent opaque (les anglophones parlent de « moon logic »), qui pousse à une expérimentation frénétique évoquant des jeux comme Gobliiins – en moins maîtrisé. Si cela n’est pas forcément un défaut rédhibitoire en soi, les nombreuses déambulations et autres longues minutes passées à collecter des ingrédients ou à essayer des actions au hasard finissent, elles, par se montrer rébarbatives. Pour ne rien arranger, il est toujours possible de mourir (quoique plus rarement) et surtout de se retrouver dans des situations bloquantes, parfois de manière totalement imprévisible ! Bref, mieux vaut prendre l’habitude de sauvegarder régulièrement et sous plusieurs noms sous peine de s’exposer à de très mauvaises surprises.

L’autre aspect déroutant du jeu est… eh bien, son déroulement en lui-même. Legend of Kyrandia, on s’en souvient, n’était déjà pas un titre marquant de par la profondeur de son univers ou la complexité de ses personnages. Un sentiment prolongé dans cette aventure, où vous n’échangerez pour ainsi dire jamais plus de deux phrases avec quiconque. Chaque environnement traversé ne s’embarrasse jamais d’une introduction, d’un contexte, ou même – plus grave encore – d’une cohérence.

Le royaume de Kyrandia semble n’avoir ni unité, ni loi, ni coutume ; pas même une carte pour vous aider à vous en faire une vue générale : chaque personnage n’existe que par rapport au vôtre, quitte à en faire apparaître de nulle part pour les faire disparaître l’instant d’après sans rime ni raison. C’est déjà parlant pour le dénommé Marko qui revient systématiquement dans vos pattes pour tenter de vous séduire avec la subtilité d’un bulldozer, mais cela devient même gênant dans le cas du « grand méchant » du jeu, dont l’origine et les objectifs sont exposés en une simple phrase au détour d’une conversation anodine !

On ne saura d’ailleurs jamais pourquoi il cherche à faire disparaître Kyrandia – il est méchant, débrouillez-vous avec ça. Dans le même ordre d’idées, alors que vous êtes quand même censée porter le destin du monde sur vos épaules, ne comptez pas croiser une seule personne pour vous aider à rejoindre le centre de la terre : pas un mystique, pas un garde, pas un badaud ne viendra à votre secours quand bien même leur vie et celle du reste de la planète en dépend – d’ailleurs, alors que vous verrez fréquemment Kyrandia disparaître autour de vous au début du jeu, le phénomène semble cesser purement et simplement de se manifester sans aucune explication pendant tout le reste de l’aventure.

Bref, on peine quand même sérieusement à se sentir concerné par le destin de cet univers à la Lewis Carrol qui aurait pu être extraordinairement sympathique si quelqu’un s’était juste donné le mal d’imaginer un vague lien pour relier entre eux les dizaines d’écrans qui composent le jeu. En fait, c’est bien simple : sans Zanthia au casting, on passerait son temps à se demander si on est vraiment en train de jouer à un jeu situé dans le même monde que le premier opus…

La conséquence est que, si la magie opère toujours à un certain niveau, on peine parfois à se passionner pour l’improbable patchwork anarchique qui nous sert de terrain de jeu. Quand la réflexion se limite neuf fois sur dix à cliquer n’importe où en attendant de voir ce qui se passe, on finit par sentir s’installer un morne ennui qui fait qu’il est presque plus intéressant de parcourir le jeu avec une solution que sans – un cruel aveu de faiblesse. L’expérience a ses bons moments, mais aussi des passages vraiment laborieux (Volcania et ses collectes à répétition…) qui font qu’on reste davantage pour le plaisir de la découverte que pour celui de jouer. Bref, la nostalgie jouera certainement un rôle prépondérant au moment de trouver à Hand of Fate des qualités qu’il n’a pas toujours. Cela en fait-il un mauvais jeu ? Certes non, mais on se dit parfois qu’il aurait aussi pu être bien davantage que ce qu’il est avec un game design un peu plus cohérent.

Quelques mots, enfin, sur la version française : celle-ci est bien plus réussie que le travail assez bancal réalisé sur le premier opus. Plus de faute ni de barbarisme, le travail est fait proprement et ça fait du bien. Si la version disquette du jeu profite d’une introduction entièrement doublé en français, la version CD, pour sa part, la conserve… avant de proposer des dialogues intégralement en anglais pendant tout le reste de la partie, offrant ainsi un jeu en VOST à 99%, avec 1% de VF dedans. Vu la qualité des voix anglaises, on sera en tous cas heureux que l’équipe en charge de la localisation n’ait pas pris le risque de doublages réalisés par des acteurs sous-motivés ou pas assez nombreux.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :

NOTE FINALE : 15,5/20 En choisissant d'abandonner pratiquement tous les personnages du premier épisode pour se focaliser sur l'improbable quête de Zanthia, Fable & Fiends : Hand of Fate aura opté pour un choix assez radical. Il n'aura en revanche pas abandonné les mécanismes pour le moins nébuleux des énigmes du premier opus ni, heureusement, sa sublime réalisation. En résulte une aventure certes dépaysante et toujours emplie d'une indéniable magie, mais où l'absence quasi-totale de cohérence ou de profondeur risque également de laisser bien des joueurs assez dubitatifs. Une épopée à la Alice au Pays des Merveilles, avec ses morceaux de bravoure et ses errances, mais on ne peut s'empêcher de penser qu'il manque un petit quelque chose à cette aventure pour réellement entrer dans la cour des grands. CE QUI A MAL VIEILLI : – Logique des énigmes toujours aussi particulière (certaines sont totalement incohérentes) – Des situations bloquantes parfois totalement aléatoires – Énormément d'allées-et-venues – Collectes d'ingrédients souvent fastidieuses – Univers sympathique mais manquant cruellement d'épaisseur

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Hand of Fate sur un écran cathodique :

Version FM Towns
Kyrandia II : The Hand of Fate

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Comme beaucoup de jeux DOS occidentaux, Hand of Fate aura également tenté sa chance sur les ordinateurs japonais de la période – cela tombait bien, ceux-ci était justement de plus en plus proches de simples clones de la machine d’IBM, jusqu’au système d’exploitation. On ne sera donc pas surpris de se retrouver, sur FM Towns, face à une version au contenu et à la réalisation identiques à ce qu’on avait pu observer sur PC deux ans plus tôt. Seules nuances : le jeu étant désormais en japonais, les caractères kanjis sont affichés en 640×400 pour les rendre plus lisibles et, de façon plus surprenante, on constate surtout qu’il n’y a plus de doublage des voix une fois passée l’introduction – c’est littéralement la version disquette occidentale traduite en japonais et gravée sur un CD ! Autant dire qu’elle ne présente donc qu’un intérêt purement historique aux yeux des joueurs occidentaux, mais au moins le titre n’a-t-il rien perdu d’autre en route.

NOTE FINALE : 15,5/20

On s’attendait à la copie conforme de Hand of Fate sur PC traduite en japonais, et c’est exactement ce qu’on obtient – sauf que pour le coup, il s’agit de la copie de la version disquette, format CD-ROM ou pas, car tous les doublages ont disparu au-delà de l’introduction ! Cela rend cette version encore un peu plus inaccessible aux joueurs ne parlant pas japonais, mais ils n’auront de toute façon aucune raison de regretter une version autrement identique à celle parue sur PC.

Version PC-98
Kyrandia II : The Hand of Fate

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Pour cette itération PC-98 d’Hand of Fate, les choses vont avoir le mérite d’aller vite : c’est très exactement la même chose que sur FM Towns. La réalisation sonore peut offrir un rendu un peu différent en fonction de votre matériel, mais pour le reste, c’est toujours le même jeu, il est toujours en japonais, il n’y a toujours pas de voix passé la cinématique d’introduction, et les graphismes comme les énigmes n’ont pas changé d’un micron.

NOTE FINALE : 15,5/20

Exact équivalent de la version parue simultanément sur FM Towns, Hand of Fate délivre à peu près la performance à laquelle on pouvait s’attendre sur PC-98, même s’il est toujours aussi dommage que les voix aient disparu. Pour tout le reste, vous serez de toute façon au moins aussi bien sur PC, donc inutile de vous fatiguer à dénicher cette version.

STAR WARS : Rebel Assault

Développeur : LucasArts Entertainment Company, LLC
Éditeur : LucasArts Entertainment Company, LLC
Testé sur : PC & MacintoshMega-CD3DO
Disponible sur : Linux (Ubuntu 14.04, Ubuntu 16.04, Ubuntu 18.04), Mac OS X (10.7.0+), Windows (XP, Vista, 7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com, Steam.com (version DOS vendue dans un pack comprenant Rebel Assault 1 et 2)

La série Rebel Assault (jusqu’à 2000) :

  1. STAR WARS : Rebel Assault (1993)
  2. STAR WARS : Rebel Assault II – The Hidden Empire (1995)

Version PC & Macintosh

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’arrivée du CD-ROM sur les ordinateurs occidentaux, au début des années 1990, aura représenté à la fois une révolution et le début d’un surprenant paradoxe. Une révolution de par l’explosion des capacités de stockage : un CD pouvait contenir 450 fois plus de données qu’une disquette 3,5 pouces – un sacré bouleversement en termes de possibilités !

Mais également un étrange paradoxe, donc, en découlant : à peine les développeurs disposèrent-ils de plus de place qu’ils n’en avaient jamais rêvé qu’ils ne tardèrent pas à découvrir que ce n’était pas encore assez… Ainsi, si le premier jeu à être paru exclusivement sur CD-ROM en occident, The 7th Guest, aura vu le jour en 1993 (le Japon, lui, aura découvert le support dès la deuxième moitié des années 1980), dès l’année suivante, des titres comme Wing Commander III ou Under a Killing Moon se démenaient déjà pour ne tenir que sur trois ou quatre CD ! Les choses allaient décidément extrêmement vite, à cette époque… Et de place de stockage ainsi que de vitesse de l’évolution informatique, il sera question ici au moment d’évoquer Rebel Assault.

En quoi consiste le titre imaginé par Vince Lee ? En la concrétisation d’un fantasme déjà très vivace en 1993 : vivre La Guerre des Étoiles à la première personne. Pas dans la peau de Luke Skywalker, d’ailleurs évacué de cette version, mais bien dans celle d’un (ou une) pilote bien décidé(e) à accomplir exactement la même chose, au point, comme dans X-Wing, de s’en aller détruire l’Étoile Noire lui(ou elle)-même.

Mais avant de pouvoir concourir au Graal éternel de la série, il faudra commencer par faire ses preuves dans les canyons de Tatooine, dans les champs d’astéroïdes, dans les assauts de destroyers impériaux et même – petite entorse à la chronologie de la saga – à la surface de la planète Hoth. Au fil des quinze niveaux du jeu, c’est donc bien une sorte de best of de STAR WARS qui va être proposé au joueur – qui n’attendait bien évidemment que ça pour voir enfin ce que ce fameux support révolutionnaire avait réellement dans le ventre.

« En mettre plein les yeux » était d’ailleurs certainement le premier objectif figurant dans le cahier des charges au moment de réaliser le programme. On avait enfin la place pour caser de la musique numérique et des extraits de vidéo tirées directement des films ? On allait s’en servir ! Et je peux vous dire que l’introduction visible en ouverture du test suffisait à coller des frissons à n’importe qui s’approchant d’un PC à cette époque.

Quand on sortait du monde des programmes occupant 15 à 20 mégas, pour les plus ambitieux, pour basculer dans ceux en mobilisant 640, le gouffre qui s’était ainsi créé du jour au lendemain était immédiatement visible – et audible. Tout à coup, on se baladait dans des décors et des séquences puisées directement dans le film, avec des dialogues intégralement parlé et des effets comme on n’avait encore jamais eu d’en voir à l’époque, et on lançait la première partie en frissonnant d’anticipation tant le simple fait d’entendre le thème culte de John Williams en qualité CD (encore assez basse, ironiquement) avait suffit à nous charger d’adrénaline.

Mais en quoi consistait au juste ce titre révolutionnaire qui venait de nous transporter aux portes du Nirvana ? Eh bien, en le recyclage d’un concept antédiluvien, lui : le rail shooter. Concrètement, 90% du jeu consistera à promener un curseur sur un écran pour faire feu sur ce qui viendra à notre rencontre, les 10% restant consistant à déplacer un vaisseau à la place du curseur, ou à choisir sa direction dans un très délicat passage de labyrinthe à l’intérieur de la base de Hoth. Oui, derrière son orgie technologique, Rebel Assault ne dissimule au fond qu’un clone de n’importe quel jeu de tir façon Operation Wolf – et le pire, c’est qu’il ne le fait même pas spécialement bien.

Quelqu’un chez LucasArts a en effet fatalement dû réaliser que promener un curseur sur l’écran à l’aide de la souris ne demandait pas des compétences extraordinaires. L’idée a donc été… de rendre la jouabilité du titre infecte. Concrètement, pensez d’ores et déjà à préparer un joystick, et conseil : prenez bien le temps de le calibrer correctement. Parce que jamais vous n’aviez imaginé à quel point placer un curseur précisément à l’endroit où on le souhaite pouvait être une gageure.

Entre la latence et l’imprécision de la chose, l’essentiel de la difficulté du titre proviendra de votre capacité (ou non) à domestiquer cette foutue jouabilité, qui vire parfois à la farce – attendez de rater systématiquement des adversaires situés à moins de deux mètres de vous dans les couloirs de la base de Hoth pour comprendre ce que je veux dire. Sachant que les séquences de pilotage se réduisent de toute façon à déplacer un sprite sur une vidéo projetée en fond, bon courage également pour deviner à quel moment vous allez toucher le décor et à quel moment le programme considère que vous ne risquez rien. Bref, le prix du rêve d’enfant qui nous envoyait jouer à Star Wars « comme si on y était » est cruel : il faudra accepter un jeu où chaque instant passé est un combat entre le joueur et son joystick, qui n’y est pourtant pas pour grand chose, le pauvre.

Pour ne rien arranger, si la jouabilité ne s’est certainement pas arrangée avec le temps, l’enrobage, lui, aura violemment accusé les plus de vingt-cinq ans nous séparant de la sortie du titre. Concrètement, ce qui faisait rêver tout le monde en 1993 sent dramatiquement la naphtaline, à l’ère du 4K, du Blu-Ray et des jeux pesant 150 gigas.

Les vidéos qui impressionnaient tant à l’époque s’affirment aujourd’hui comme ce qu’elles sont : de dramatiques bouillies de pixels encodées directement avec les pieds. Même la musique respire les balbutiements de la compression audio : on a l’impression d’entendre la version numérique d’un enregistrement réalisé sur cassette depuis la pièce d’à côté. Pire encore : faute de place, on retrouve certains avatars oubliés de cette période pionnière, à l’instar de ces images fixes où seuls les yeux et la bouche des personnages étaient animés, comme dans Inca II. Dire que le procédé a mal vieilli serait un euphémisme, et on se retrouve face à un titre dont le principal argument de vente, à savoir la réalisation, est aujourd’hui tragiquement dépassé à tous les niveaux, même et surtout pour les fans du pixel art. Dès lors, que reste-t-il à sauver ?

Aussi improbable que cela puisse paraître, le fait est que Rebel Assault conserve encore les restes d’une certaine magie, en dépit de ses très, très nombreux défauts. Le mirage du rêve d’enfant qui attendait depuis toujours de pouvoir – enfin ! – jouer à La Guerre des Étoiles se manifeste encore, par bribes, tandis qu’on se surprend à laisser pour la vingtième fois sa chance à une mission qui aurait été bouclée depuis deux heures si la jouabilité avait eu le bon goût d’être décente. Inutile de dire que la nostalgie – ou le fait d’être un fan irréductible de Star Wars – seront sans doute indispensables pour vous pousser à vous montrer patient avec le jeu et à vous accrocher le temps de dompter son maniement. Dans le cas contraire, le temps a déjà rendu son jugement et celui-ci est implacable : peine capitale d’oubli, sans espoir de réhabilitation.

Vidéo – Le premier chapitre du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’argent 1993 – Meilleur jeu CD (Tilt n°121, décembre 1993)

NOTE FINALE : 11/20 STAR WARS : Rebel Assault est sans doute l'un des meilleurs représentants de la période folle qu'aura représenté l'arrivée du CD-ROM sur les ordinateurs domestiques : un jeu qui décrochait la mâchoire de toute la famille en 1993, et qui n'impressionnait déjà plus grand monde un an plus tard... Une fois l'aspect tape-à-l’œil mis de côté, que reste-t-il ? Un rail shooter dont le maquillage ne fait clairement plus illusion, basique dans ses mécanismes, plombé par une jouabilité médiocre, et dont l'éventuel capital sympathie tient exclusivement à la nostalgie ou à l'univers dans lequel il se déroule. Sachant que le voyage est aussi éprouvant que l'enrobage est daté, rares seront les joueurs découvrant le titre au XXIe siècle qui pourront espérer tomber sous son charme. Mais si jamais vous voulez savoir à quoi ressemblait la pointe de la technologie vidéoludique au début des années 90, vous en aurez ici un exemple parlant... et un peu cruel. CE QUI A MAL VIEILLI : – Imprécision notoire : on sait où on tire, mais on ne sait jamais où on va, et on a bien du mal à y aller – Très difficile, en grande partie à cause de la jouabilité – Réalisation dont on perçoit aujourd'hui immédiatement les ficelles - et les énormes limites

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Rebel Assault sur un écran cathodique :

Version Mega-CD

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En dépit de la rareté des machines occidentales ayant adopté le support CD en 1993, Rebel Assault ne sera pas resté cantonné au PC. En plus des versions Macintosh et 3DO, une autre machine aura également accueilli le rail shooter de LucasArts : le Mega-CD. Si ce n’est en soi pas très surprenant (la machine de SEGA aura souvent servi de passerelle entre les ordinateurs et les consoles, comme le rappellent les portages de titres comme Eye of the Beholder, Dungeon Master II, Dune ou Monkey Island), la grande question restait de savoir comment le Mega-CD allait s’en tirer sans pouvoir compter sur la puissance de son processeur ni, surtout, sur les 256 couleurs de la palette du VGA. La réponse tient en un mot : mal.

Dès les premiers instants, on sent que le lecteur CD tire la langue, avec des temps d’accès bien plus importants que sur PC. Dès que les premières images apparaissent, on voit bien à quel point on a perdu en couleurs : ce n’est même plus de la bouillie de pixels, c’est du gruau. Le jeu n’étant de toute façon plus très beau selon les critères modernes, on pourrait penser que cela ne change finalement pas grand chose, mais allez donc distinguer quelque chose dans ces scènes illisibles, et vous allez vite comprendre. Pire encore, si le pad de la Mega Drive est sensiblement plus précis que ce que propose un joystick sur PC, la jouabilité est toujours aussi catastrophique – peut-être même pire. Ainsi, lors de la première mission, mon vaisseau était systématiquement déporté sur la gauche au premier virage, et même avec la flèche de droite enfoncé au maximum, il était impossible de s’éloigner de la paroi, provoquant ainsi un game over pratiquement inéluctable au bout de quinze secondes de jeu ! Les choses s’améliorent heureusement un peu par la suite, et les phases de shoot pur sont indéniablement plus précises que sur PC, mais on commence à se demander si on a réellement envie d’être précis en bougeant un curseur sur une bouillie illisible, de toute façon. Même la musique connait des latences et des dégradations à cause de la faiblesse du processeur, bref, on sent bien que ce n’est pas sur Mega-CD que Rebel Assault va connaître sa rédemption.

NOTE FINALE : 09/20

Rebel Assault étant un logiciel qui faisait presque davantage office de benchmark que de jeu à proprement parler, on ne sera pas très surpris qu’il s’affirme plus comme un révélateur de toutes les limites du Mega-CD que comme un programme transcendant son support. Sachant que l’essentiel de l’expérience de jeu se limite dorénavant à essayer de distinguer quelque chose dans une soupe marron/noire pendant l’essentiel de la partie, et que la jouabilité est parfois si bancale qu’on en vient à se demander si le titre a jamais été testé, autant dire que le peu de magie que conservait encore la version PC fond ici comme neige au soleil.

Version 3DO

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On tend à l’oublier, mais avant la PlayStation ou la Saturn, la grosse révolution 32 bits qui faisait frétiller d’aise dans les rédactions journalistiques, c’était la 3DO. Si un prix bien trop élevé additionné à une politique éditoriale rédhibitoire auront eu raison de la machine, il faut bien reconnaître qu’elle avait malgré tout quelques arguments pour faire rêver à l’époque.

Avec cette version de Rebel Assault sur 3DO, au moins, les choses sont claires : en termes de réalisation, c’est la copie carbone de l’itération PC – ce qui n’est déjà pas rien, la version originale tournant sur des configurations encore bien plus coûteuses que la console. Son, image : pas de problème, ça tourne toujours aussi bien, et la jouabilité est même sensiblement plus précise… au niveau du joystick, en tous cas, car les masques de collision sont toujours aussi catastrophiques, et on a bien du mal à deviner à quel endroit on se fera toucher et à quel endroit on s’en sortira indemne. Cependant, le résultat est clairement meilleur pendant les phases de tir, ce qui fait sans doute de cette version la moins frustrante, d’une courte tête.

NOTE FINALE : 11,5/20

la 3DO pouvait rivaliser avec bien des modèles de PC, et ce portage de STAR WARS : Rebel Assault en est un excellent exemple : c’est techniquement parfaitement identique à la version originale, et c’est même sensiblement plus précis pendant les phases de tir. Tant qu’à faire, autant préférer cette version aux autres.

The Punisher (Capcom)

Développeur : Capcom Co., Ltd.
Éditeur : Capcom U.S.A., Inc.
Testé sur : ArcadeMega Drive

La licence The Punisher (jusqu’à 2000) :

  1. The Punisher (The Edge) (1990)
  2. The Punisher (Beam Software) (1990)
  3. The Punisher (Paragon Software) (1990)
  4. The Punisher : The Ultimate Payback! (1991)
  5. The Punisher (Capcom) (1993)

Version Arcade

Date de sortie : 22 avril 1993 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et deux boutons
Version testée : Version internationale
Hardware : Capcom Play System (CPS)
Processeurs : Motorola MC68000 10MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz
Son : Haut-parleur ; YM2151 OPM 3,579545MHz ; OKI MSM6295 ADPCM 1MHz ; 1 canal
Vidéo : 384 x 224 (H) 59.637405 Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À une époque où le cinéma, même à gros budget, n’avait pas encore réellement les moyens de leur rendre justice, les super-héros devaient se contenter de cartonner en salles d’arcade ou sur les systèmes domestiques plutôt que d’aller peupler les salles de cinéma à raison de quinze films par an. Et, croyez-le ou non, les joueurs de l’époque le vivaient généralement plutôt bien. Car après tout, si même une bande dessinée comme Astérix ou un dessin animé comme Les Simpson pouvaient donner lieu à d’innombrables adaptations vidéoludiques, imaginez les possibilités que laissaient entrevoir des héros surpuissants ?

On ne sera donc pas surpris d’apprendre qu’à peu près tous les mutants ou les justiciers en combi lycra seront allé pointer à l’époque chez Konami, chez Virgin ou chez Capcom, bien décidés à servir de tremplins commerciaux à des titres dont le principal intérêt résidait bien souvent dans l’enrobage.

Les plus célèbres, comme Superman, Spiderman ou Batman, auront bien évidemment été les premiers servis, mais le secteur d’alors était suffisamment florissant pour donner du travail à tout le monde : preuve avec le Punisher, héros finalement assez secondaire dans l’univers Marvel, et qui aura malgré tout bénéficié de pas moins de cinq titres à son nom dans les années 90 (et quand je dis « à son nom », ce n’est pas une image : la liste présenté en introduction de ce test vous démontrera l’extraordinaire manque d’imagination dont les différents développeurs auront fait preuve au moment de donner un titre à leur jeu).

En bout de file débarque donc Capcom, en 1993, qui a très bien cerné l’enjeu majeur de The Punisher : Frank Castle est un ancien marine qui aura vu toute sa famille se faire descendre sous ses yeux par la pègre locale, et il va tout péter. Comme Frank est plutôt un solitaire, du genre « je fais mon boulot tout seul, même à un contre mille », on aura dépêché rien de moins que Nick Fury, le boss du S.H.I.E.L.D., pour lui donner un coup de main au cas où un deuxième joueur voudrait venir participer à la fête. Car, au cas où vous ne l’auriez pas encore deviné, The Punisher version Capcom est un beat-them-all, un vrai, un pur, un où l’on rend la justice à coups de poings, de pieds… mais aussi de grenades ou d’armes de poing. Oui, c’est déjà un peu plus original.

Le jeu va donc vous amener à parcourir six niveaux au gré d’un scénario tout à fait dispensable, où votre héros Frank Castle devra nettoyer la moitié de la criminalité américaine pour découvrir que le chef de la pègre, appelé « Kingpin » avec une grande originalité, est retranché dans un gigantesque hôtel qui porte son nom… Qu’importe, on n’était pas franchement venu pour l’histoire. Et niveau action, on débarque tout de suite en terrain connu, surtout pour n’importe qui ayant déjà approché Final Fight : Chopes, projections, coups spéciaux puisant dans votre jauge vitale et bien évidemment boss géants – tout y est, présenté avec une belle efficacité et avec de gros sprites qui bougent très bien quel que soit la quantité d’adversaires à l’écran.

La première bonne nouvelle, c’est qu’en dépit de sa jouabilité simplissime à deux boutons, The Punisher n’aura pas décidé de vous brider au niveau des possibilités. Votre coup spécial, par exemple, utilisable en pressant les deux boutons à la fois, donnera des résultats très différents selon que vous vous en serviez au sol, en sautant ou en effectuant une chope.

On peut également courir, partir en roulé-boulé, lancer une arme plutôt que de s’en servir… Car autant vous prévenir, des armes, vous allez en trouver à la tonne. À tel point que vous ne vous battrez finalement pas si souvent à mains nues : couteaux, battes, sabres, étoiles ninja, barres de plomb n’attendent que d’être trouvées ou ramassées sur un adversaire. Mais tout le mobilier pourra également servir de projectile, des tabourets aux cabines téléphoniques, et vous pourrez également trouver des pistolets, des uzis, des fusils d’assaut ou même des lance-flammes !

Il arrive en effet régulièrement que, confronté à des hommes armés, votre Punisher décide de ne pas rester les bras ballants et préfère directement sortir son arme. À vous alors le plaisir de faire le grand ménage de printemps en martelant votre bouton de tir – viser est rarement nécessaire – jusqu’à ce qu’on y voit plus clair. Un très bon moyen de dynamiser un peu l’action et de briser la routine, qui finira fatalement par s’installer en dépit de l’efficacité du titre, surtout si vous n’avez pas de deuxième joueur sous la main.

On pourra ainsi regretter que le roster du jeu se limite à deux personnages fondamentalement identiques dans leurs capacités, à tel point que le programme ne vous laissera même pas le loisir de choisir lequel des deux vous incarnerez au moment de lancer la partie : ce sera Frank Castle pour le joueur un et Nick Fury pour le joueur deux, point barre.

C’est d’ailleurs un des seuls reproches à faire à un logiciel pas franchement original, mais qui remplit parfaitement sa mission de bon défouloir jouissif. Certes, on ne peut pas dire qu’on croule sous les surprises, et si le gameplay reste plus technique que celui de la grande majorité des beat-them-all de chez Konami, il n’offre pas assez de possibilités pour vous scotcher pendant des dizaines d’heures. En revanche, pour ce qui est de passer un très bon moment seul ou à deux avec un déluge d’action à l’écran servi par une réalisation irréprochable, on peut dire que personne ne sera déçu. Il manque certainement au programme le vrai « truc en plus » pour le faire quitter le moule solidement établi par Final Fight, mais en tant que représentant de la « vieille » école, difficile de trouver beaucoup mieux.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 17,5/20 The Punisher version Capcom n'invente peut-être pas grand chose, mais vu l'efficacité avec laquelle il déploie la palette habituelle de tout beat-them-all qui se respecte, on ne lui en tiendra même pas rigueur. Grâce à une réalisation de haute volée et à une action de tous les instants, le titre offre le type de défoulement efficace qu'on est en droit d'attendre au terme d'une trop longue journée de travail et procure quelques dizaines de minutes d'adrénaline salutaire - particulièrement à deux. Aucune révolution à l'horizon, mais parfois, on est pleinement satisfait de trouver exactement ce qu'on était venu chercher. CE QUI A MAL VIEILLI :Roster très limité : un personnage par joueur et basta – Pas grand chose de neuf à se mettre sous la dent

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler The Punisher sur une borne d’arcade :

Version Mega Drive

Développeur : Sculptured Software, Inc.
Éditeur : Capcom Co., Ltd.
Date de sortie : Février 1995 (États-Unis) – 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe des temps : alors que Capcom était un partenaire privilégié de Nintendo, la compagnie japonaise aura commencé à accepter de voir ses titres adaptés sur le Mega Drive dès la fin des années 80. Je dis « accepter », car Capcom n’aura jamais assuré aucune de ces adaptations (pas plus qu’aucune de celles qui auront vu le jour sur PC Engine), laissant aux équipes internes de SEGA ou de NEC le soin de s’en charger.

Si cela avait pu donner de très bons résultats, du côté de la firme au hérisson bleu, avec des portages comme Strider ou Ghouls’n Ghosts, SEGA commençait visiblement à être occupé en 1994 avec la sortie de sa console 32 bits, laissant à Sculptured Software le soin de s’occuper de cette version. Le programme est relativement fidèle à la version arcade en terme de contenu, au détail près que la violence a été largement censurée (plus d’exécution sommaire à la fin du premier niveau, par exemple). Un menu des options permet de choisir la difficulté, mais aussi de répartir Frank Castle et Nick Fury entre le joueur un et le joueur deux sans avoir à s’échanger la manette. Une fois la partie lancée, force est de reconnaître que la superbe réalisation de la version arcade a pris du plomb dans l’aile : si les décors sont à peu près corrects (mais des kilomètres derrière ceux de Streets of Rage II), les sprites manquent cruellement de couleurs, et le fait de les avoir détouré avec un gros trait noir n’arrange rien. Côté son, curieusement, la 16 bits s’en sort mieux, avec des bruitages digitalisés assez réussis alors que ce n’était normalement pas franchement le point fort de la machine. L’action est moins frénétique, les boss sont encore plus pénibles, et si on ne peut pas hurler à la catastrophe, le jeu a énormément de mal à soutenir la comparaison avec les meilleurs titres de la console dans le domaine. Autant dire que le logiciel n’aura globalement pas laissé un grand souvenir aux possesseurs de Mega Drive.

NOTE FINALE : 13/20

Porté sans grand génie sur Mega Drive, The Punisher y perd beaucoup de sa superbe et se révèle nettement moins amusant que sur la borne d’arcade. Entre une réalisation aux fraises et une jouabilité montrant vite ses limites, reste un beat-them-all honnête comme la console en compte des dizaines, mais rien d’inoubliable.

Simon the Sorcerer

Développeur : Adventuresoft Ltd.
Éditeur : Adventure Soft Publishing Ltd.
Titres alternatifs : 魔法师西蒙 (Chine), שוליית המכשף (Shuliyat Hamechashef, Israël)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAmiga CD32
Version non testée : Acorn 32 bits
Disponible sur : iPad, iPhone, Macintosh, Windows (7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com, Steam.com (Édition 25ème Anniversaire)

La série Simon the Sorcerer (jusqu’à 2000) :

  1. Simon the Sorcerer (1993)
  2. Simon Woodroffe’s Simon the Sorcerer II (1995)
  3. Simon the Sorcerer’s Pinball (1998)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Septembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Allemand, anglais, français (voix en anglais, textes en français)
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Versions testées : Version CD-ROM et disquette émulées sous ScummVM
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : MS-DOS 5.0 – RAM : 640ko – Vitesse lecteur CD-ROM : 1X (150ko/s)
Modes graphique supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (version CD-ROM) :

Il en va parfois du jeu vidéo comme du vin rouge : il y a de bonnes et de mauvaises années.

Prenez 1993, par exemple. Pour le jeu d’aventure, c’est un peu l’équivalent de 1959 pour le Pommard : l’année du siècle. Du côté de chez LucasArts : millésime exceptionnel avec Day of the Tentacle et Sam & Max, soit deux des meilleurs titres jamais produits par la firme américaine. Les choses n’allaient pas mal non plus du côté de Sierra Online, avec Freddy Pharkas, Space Quest V, Leisure Suit Larry 6 et surtout Gabriel Knight, là encore un des plus grands jeux d’aventure jamais produits par la société de Ken et Roberta Williams. Cerise sur le gâteau : Westwood Studios touchait également les étoiles avec le deuxième épisode de Legend of Kyrandia : Hand of Fate. Autant dire que s’il fallait isoler un âge d’or du genre, il tiendrait sans difficulté dans cette simple période de douze mois, définitivement gravée dans la légende.

D’ailleurs, cette année 1993 fut si exceptionnelle pour le point-and-click qu’elle vit également arriver un outsider inattendu, sous la forme d’Adventuresoft, société britannique venue crânement tenter sa chance avec Simon the Sorcerer.

Face aux écrasants concurrents évoqués plus haut, c’était déjà extraordinairement gonflé. Mais l’ambition du jeu imaginé par Simon Woodroffe était visiblement sans limite : non content de débarquer au beau milieu de la production des ténors du genre comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, le titre se permettait même d’aller invoquer des références aussi indépassables que Secret of Monkey Island, Tolkien, C. S. Lewis ou la saga des King’s Quest. Un sacré culot de la part d’un petit David au milieu de tous ces Goliath ! Et de quoi piquer la curiosité du joueur au moment de lancer les improbables aventures du jeune sorcier.

Vous incarnez donc le jeune Simon, transporté contre son gré dans un monde magique en cherchant à récupérer son chien. Votre mission, que vous l’acceptiez ou non, consistera à arrêter le maléfique sorcier Sordide, principal obstacle entre vous et Calypso, le magicien qui vous a fait atterrir ici. Vous n’aurez pour seul guide qu’une lettre laissée par Calypso lui-même avant de vous retrouvé lâché dans la nature. Premier objectif : devenir un sorcier en commençant par rencontrer le Conseil des Magiciens, justement réuni à l’auberge locale, qui devra d’abord vous faire passer une épreuve…

Cela vous rappelle quelque chose ? C’est parfaitement normal : comme cela a déjà été dit, Simon the Sorcerer est un jeu qui regorge de références, et Monkey Island n’est que l’une d’entre elles. En dirigeant votre jeune apprenti sorcier et son cynisme à toute épreuve, doublé d’une libido clairement plus prononcée que celle du premier Guybrush Threepwood venu, vous aurez ainsi le plaisir de trouver de nombreuses références aux contes de fées comme dans n’importe quel King’s Quest, mais cette fois lourdement parodiées : quand les trolls ne font pas grève face aux boucs, c’est Raiponce qui est en fait une truie à demi métamorphosée en femme.

On notera aussi un certain « Golem » qui vous appelle « Mon Trésor » et qui fait en fait partie d’une société de fans de Tolkien, un duel contre une sorcière tout droit sorti de Merlin l’Enchanteur, des nains outrageusement portés sur la bière qui sifflent en travaillant, sans oublier des clins d’œil appuyés au cycle de Narnia, comme lorsque vous trouvez une table de sacrifice que votre Simon vous décrira comme « utile pour raser les lions ».

Il y en a partout, dans tous les sens, et le jeu ne se prend strictement jamais au sérieux, quitte à faire intervenir un coup de fil en plein milieu de l’affrontement final. On appréciera d’ailleurs, à ce titre, que le logiciel reprenne non seulement l’interface des jeux LucasArts de l’époque, avec les verbes de commande et l’inventaire graphique, mais également leur philosophie : impossible de mourir ou d’être définitivement bloqué. Votre logique sera donc la seule arme indispensable – à condition que vous puissiez la tordre un peu au besoin, naturellement.

Si la plupart des énigmes du jeu sont, à leur manière, parfaitement logiques, il faudra également y placer l’indispensable dose d’absurdité pour espérer triompher de l’aventure – quitte à ce que Simon lui-même vous fasse remarquer que ramasser de l’or avec un aimant au bout d’une corde ne devrait pas fonctionner dans un monde plus cohérent. Si le jeu sait se montrer très drôle, il peut également se montrer parfois un peu trop bavard, et on aimerait que certains des longs échanges qui se produisent entre plusieurs interlocuteurs sans solliciter votre intervention aient la bonté de s’écourter un peu. On regrettera également une certaine dose de chasse au pixel, certains objets comme des boîtes d’allumettes, des pierres ou des brindilles étant rarement évidents à trouver au milieu des (très) nombreux écrans du jeu.

Car s’il est une autre qualité à reconnaître à Simon the Sorcerer, c’est bien l’étendue de sa surface de jeu. Loin de se cantonner à une ville, voire à une simple maison comme l’excellent Day of the Tentacle, le titre de Simon Woodroffe vous place à côté d’une gigantesque forêt placée au pied de montagnes enneigées que vous pourrez parcourir d’un bout à l’autre au sein de ce qui doit facilement représenter une bonne cinquantaine d’écrans.

Cerise sur le gâteau : les extérieurs sont absolument magnifiques. Peut-être pas au point de rivaliser avec un Legend of Kyrandia pratiquement indépassable en la matière, ni avec la patte inimitable des productions LucasArts d’alors, mais on sera surpris du soin hallucinant du détail du moindre écran, avec ces visages dessinés dans la pierre et ces multiples décors d’une poésie rare qui donnent toute sa raison d’être à la carte magique livrée en début de partie, laquelle vous permettra fort heureusement d’écourter les très nombreux aller-et-retours que vous allez devoir effectuer. Même ainsi, il arrive que l’on tourne un peu en rond, peinant à retrouver un personnage ou un site particulier au sein de cet univers ô combien ambitieux mais que l’on apprend à connaître avec une sympathie indéniable au cours de la trentaine d’heures que pourra nécessiter le jeu.

Les rares reproches que l’on puisse formuler à l’encontre d’un titre auquel on finit rapidement par s’attacher tiendraient plus à quelques point de détails de la réalisation. On regrettera, par exemple, que les cinématiques d’introduction comme de fin soient simplement réalisées avec le moteur du jeu plutôt que de nous offrir des mises en scènes plus travaillées, avec des plans de coupes, des illustrations, voire des images de synthèse, comme celles que proposait la concurrence.

La fin est également un tantinet décevante, vous privant des remerciements et des félicitations que vous étiez en droit d’attendre pour vous précipiter immédiatement dans une future suite. Mais dans l’ensemble, on est rarement déçu de l’extraordinaire promenade qui nous est offerte, et on accueille rapidement Simon au sein du panthéon des personnages marquants de l’âge d’or du point-and-click où sa place était pourtant loin d’être gagnée d’avance. Mais hé, quand on connait le personnage, on sait les miracles qu’il est capable d’accomplir simplement au culot.

Un mot enfin sur la version française du jeu, qui a le mérite d’être relativement efficace en dépit d’un certain nombre d’erreurs de débutants (« rude » en anglais ne veut pas dire « rude » en français, confusion entre « sting » et « stink », plusieurs tournures calquées sur l’anglais…). Rien de trop pénalisant pour un joueur français, heureusement, et on ne trouve heureusement pas les nombreux errements orthographiques et/ou grammaticaux des productions Sierra de l’époque. Aucune raison de bouder cette version, donc. Pour ce qui est de la version CD, elle n’ajoute rien d’autre que des doublages – en Anglais, malheureusement, ce qui n’enlève malgré tout rien à la qualité du travail, exécuté de manière très professionnelle. On appréciera quelques grands moments, comme la conversation avec les vers à bois, particulièrement efficace.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (CD-ROM) :

Récompenses :

  • Tilt de bronze 1993 (Tilt n°121, décembre 1993) – Meilleur jeu d’aventure

NOTE FINALE : 17/20 C'est réellement un fameux tour de magie qu'a accompli Simon the Sorcerer, en parvenant à se faire un nom au cœur de la plus grande année de toute l'histoire du point-and-click. Porté par un humour à toute épreuve et une réalisation qui côtoie souvent le merveilleux, le titre de Simon Woodroffe ose tout, parfois à contre-courant des attentes de l'époque, et parvient à écrire une histoire longue, mémorable et particulièrement efficace. Lâché dans un univers hyper-référencé doté d'une véritable magie, on accompagne le jeune sorcier jusqu'au terme de son périple sans jamais ressentir la lassitude, en dépit de quelques dialogues qui tirent parfois un peu en longueur, et on l'abandonne à contrecœur tant on était prêt à l'accompagner pour une aventure de plus – ce qui sera heureusement possible grâce à Simon the Sorcerer II. Un quasi sans-faute miraculeux, et un titre à (re)découvrir d'urgence CE QUI A MAL VIEILLI : – Dialogues parfois inutilement longs – On peut vite se perdre, même avec la carte magique – Cinématiques un peu plan-plan réalisées directement avec le moteur du jeu – Fin un peu décevante

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Simon the Sorcerer sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« J’adore les Lucas et Simon est de la trempe des softs de l’éditeur américain. On baigne littéralement dans le bonheur avec une ambiance magnifique digne des meilleurs contes de fées. Le système et la réalisation sont largement à la hauteur et parfois supérieurs aux Lucas. Le seul reproche que j’aurai à faire, c’est le manque d’originalité de l’histoire. »

Michel Houng, Génération 4 n°58, septembre 1993, 89%

« Franchement, je ne pensais pas trouver de sitôt un programme capable de rivaliser avec Day of the Tentacle. Dès les premières secondes du jeu, on est sous le charme de l’animation et de la richesse des décors. Mais heureusement, Simon the Sorcerer ne se contente pas d’être un beau jeu, il a aussi du coffre. »

Jacques Harbonn, Tilt n°118, octobre 1993, 88%

Version Amiga

Date de sortie : Février 1994
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x9)
Contrôleur : Souris
Versions testées : Versions disquette OCS et AGA testées sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo (1,5Mo en cas d’installation sur disque dur)
Modes graphiques supportés : AGA, OCS/ECS
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu (AGA) :

En 1994, Commodore n’était pas franchement au sommet de sa forme (et pour cause : la société était sur le point de faire faillite), mais cela, le joueur lambda ne le savait pas forcément. Techniquement, le bon vieil Amiga 500 commençait à être sérieusement largué face à la concurrence des consoles de salon et des PC dopés aux hormones – mais les amigaïstes convaincus avaient bon espoir que l’Amiga 1200 allait changer la donne… quand bien même la machine flambant neuve avait sans doute perdu la guerre avant même sa commercialisation.

Pour les fans de jeu d’aventure, en tous cas, pas de jaloux pour ce qui est de la version AGA : elle est graphiquement identique à la version PC. La qualité musicale n’a également pas de quoi rougir de la comparaison avec la Roland MT-32, même s’il faudra en revanche obligatoirement se passer des voix, aucune version CD n’ayant vu le jour sur Amiga 1200. On pouvait se montrer un peu plus inquiet pour la version en 64 couleurs, mais force est de reconnaître que celle-ci s’en sort beaucoup mieux que l’itération Amiga de Legend of Kyrandia.

La palette de couleurs est très bien utilisée, et même si le jeu est légèrement moins beau, il reste très agréable à l’œil. En revanche, et pour une raison mystérieuse, la moitié de l’introduction a sauté dans cette version : vous vous retrouvez donc en jeu directement après la séquence de crédits sans rien voir des causes ni du déroulement de l’arrivée de Simon dans le monde magique. C’est… surprenant, et surtout dommageable, car cela prive encore un peu plus le jeu de sa dimension cinématique. À ce détail près, le contenu du jeu est strictement identique – et il existe également en français.

NOTE FINALE : 17/20 (version AGA), 16,5/20 (version OCS/ECS)

Simon the Sorcerer livre, dans sa version AGA, une version extrêmement proche de la version parue sur disquettes sur PC – son seul défaut, en somme, étant de n’avoir jamais bénéficié d’une version doublée sur CD-ROM. La version ECS, elle, impressionne par sa qualité visuelle en dépit de la palette réduite, mais doit également composer avec une coupe malheureuse qui ne s’imposait pas vraiment.

Version Amiga CD32

Date de sortie : Juillet 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Parlons peu, parlons bien. Prenez la version PC CD-ROM de Simon the Sorcerer, mettez-y la musique de la version Amiga, jouez-y au pad, et voilà ! Vous avez un portage ma foi très fidèle à la meilleure version du jeu (à quelques ratés dans la synchronisation des voix digitalisées près), même si cela n’aura visiblement pas suffi à sauver l’éphémère console de Commodore de son tragique destin. Quoi qu’il en soit, on tient là à n’en pas douter l’un des meilleurs jeux d’aventure de l’Amiga CD32 – qui n’en compte de toute façon pas beaucoup, ce qui offre encore une raison supplémentaire de ne pas laisser passer celui-là. En revanche, il n’existe à ma connaissance pas de version française du jeu dans cette version.

NOTE FINALE : 17/20

Portage extrêmement proche de la version PC CD, Simon the Sorcerer sur Amiga CD32 profite à la fois des qualités de l’AGA et de celles du support CD pour offrir une version identique à 99% à l’originale – seule la musique reprend les sonorités des versions disquette sur Amiga, mais les voix, elles, sont là et c’est bien tout ce qu’on leur demande.

The 7th Saga

Développeur : Produce Co., Ltd.
Éditeur : Enix America Corporation
Titre original : エルナード (Elnard)
Testé sur : SNES

La série 7th Saga (jusqu’à 2000) :

  1. The 7th Saga (1993)
  2. Mystic Ark (1995)

Version SNES

Date de sortie : 23 avril 1993 (Japon) – Septembre 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 12 Mb
Système de sauvegarde par pile
Lien utile : Patch pour aligner la difficulté de la version américaine sur celle de la version originale japonaise du jeu

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Les jeux de rôles auront entretenu, vis-à-vis de la Super Nintendo, une relation que l’on peut qualifier de « privilégiée ». Pour s’en convaincre, le plus simple est souvent d’évoquer le sujet au milieu d’un groupe de nostalgiques de la console 16 bits et de compter le nombre de titres majeurs évoqués dans les minutes qui suivent : le fantastique Chrono Trigger, le fascinant Final Fantasy VI, le magnifique Secret of Mana… sans oublier tous ces jeux qui n’auront, à l’époque, pas daigné quitter le Japon, comme ces monuments qu’étaient Tales of Phantasia, Star Ocean ou Seiken Densetsu 3. Mais le plus impressionnant reste de se souvenir que, sous cette pelletée de jeux marquants, subsistent encore des dizaines de RPGs plus ou moins méritants dont la liste pourrait noircir bien des pages de n’importe quelle encyclopédie du jeu vidéo. Des logiciels un peu plus oubliés, à la Lufia ou à la Dragon View, mais qui comptent encore parfois de solides bases de fans – ou dont le nom est connu des amateurs les plus éclairés.

The 7th Saga figurerait, à n’en pas douter, dans cette dernière catégorie. Le titre développé par Produce jouit en effet d’une certaine réputation, mais pas nécessairement la plus flatteuse qui soit : celle d’être l’un des jeux de rôles les plus difficiles jamais publiés sur Super Nintendo… ou plutôt, sur Super NES, le jeu n’étant jamais arrivé en Europe. Une réputation a priori plutôt surprenante, le titre original, nommé Elnard au Japon, n’étant pas connu sur l’Archipel pour le défi qu’il propose. L’explication, comme souvent, est assez simple : c’est bien Enix America qui aura pris la décision d’augmenter drastiquement la difficulté du programme lors de la localisation. Mais avant de nous attaquer à ce détail ô combien clivant, le mieux est sûrement de commencer par présenter le jeu en lui-même.

The 7th Saga vous place sur le monde de Ticondera et vous propose d’incarner un des sept personnages disponibles au lancement du jeu. On reconnaîtra parmi les archétypes disponibles des grands classiques, comme un guerrier nain, un aventurier humain ou un magicien elfe, mais également des catégories un peu plus dépaysantes, puisqu’il est également possible de jouer un démon, un robot ou même un extraterrestre. Prenez bien le temps de considérer les caractéristiques de votre futur héros, car elles auront un impact crucial sur à la fois votre façon d’aborder les (très nombreux) combats du jeu et sur la difficulté de l’aventure – d’autant plus que vous commencerez la partie seul, et que votre « groupe », si on peut l’appeler ainsi, ne pourra jamais compter plus de deux membres. D’emblée, cela limite drastiquement les possibilités, mais autant se faire à l’idée et débuter la partie.

Le scénario du jeu est aussi simple qu’il est, pour parler brutalement, relativement stupide. Le roi Lemele a donc convoqué sept aventuriers, parmi lesquels celui que vous venez de sélectionner, pour mettre la main sur sept runes magiques, qui sont censées rendre celui qui les possède virtuellement omnipotent. Désire-t-il les rassembler pour asseoir sa domination planétaire ? Que nenni ! Le héros qui parviendra à mettre la main sur chacune d’entre elles sera libre de les conserver – et donc, de devenir s’il le souhaite un tyran à la puissance quasi-divine. Premier accroc : absolument personne ne semble déceler la moindre incohérence dans ce point de départ pour le moins tiré par les cheveux.

Deuxième pépin : les runes sont juste « quelque part dans le monde », sans plus de précision, et vous ne disposerez que d’une sorte de radar évoquant un peu celui de Dragon Ball pour espérer les trouver. Seule idée vaguement intéressante de ce point de départ pour le moins vaseux : les autres aventuriers seront parfois vos alliés, mais surtout vos concurrents – et il faudra être prêt à leur faire face si jamais ils venaient à se mettre en travers de votre route. Vous serez donc régulièrement amené à les recroiser au cours de vos pérégrinations… et à profiter de l’indigence des dialogues, puisque l’écran de sélection vous aura déjà permis de constater qu’aucun de ces personnages n’était doté d’un quelconque background. À vous la joie, donc, d’évoluer dans un monde très mal introduit, avec un objectif flou, et peuplé de personnages creux. Disons-le franchement : ça ne commence pas très bien.

Vos premiers pas hors de la ville de départ ne devraient d’ailleurs pas vous rendre plus enthousiaste. Vous réaliserez rapidement que les différents monstres rodant dans les parages sont affichés dans une sorte de boule de cristal à gauche de l’écran : il aurait été infiniment plus pratique qu’ils apparaissent directement sur la vue principale, ce qui vous aurait permis de les éviter bien plus simplement, mais vous devrez vous contentez de manœuvrer un point louvoyant entre d’autres points – les ennemis se déplacent de toute façon plus vite que vous, ne gaspillez donc pas trop d’énergie à essayer d’éviter les combats, vous allez quoi qu’il arrive passer 95% du jeu à vous battre.

« Bon, me direz vous, mais pourquoi est-ce que je voudrais éviter des combats dans un jeu de rôle alors que c’est l’un des mécanismes de base du genre ? » La réponse arrivera lors de votre première rencontre aléatoire. Le jeu zoome alors en employant le fameux mode 7 de la console pour vous placer devant un décor qui correspondra donc à la texture de la carte agrandie au maximum en un tas de gros pixels baveux. Certes, c’est très moche, mais les adversaires, eux, ont le mérite d’être animés, ce qui n’était pas toujours évident à l’époque. Vos options disponibles sont celles de n’importe quel J-RPG : attaque physique, défense, magie, utiliser un objet ou fuir.

Autant annoncer immédiatement la couleur : il y a 90% de chance pour que vous ne surviviez même pas à ce premier combat. Vous vous souvenez de la difficulté évoquée plus haut ? Autant être très clair : Enix America a totalement salopé l’équilibrage, au point de rendre le jeu absolument atroce. Non seulement le programme vous délivre bien moins de points de caractéristiques que la version japonaise à chaque montée de niveau, mais en plus les adversaires sont atrocement puissants, et les boss comme les autres aventuriers vont même jusqu’à s’aligner sur votre niveau (avec des caractéristiques très supérieures aux vôtres, naturellement).

Pour parfaire le tableau, la distribution d’expérience est buguée, et certains adversaires peuvent être littéralement impossibles à vaincre quel que soit votre niveau ou votre équipement, étant systématiquement plus puissant que vous quoi qu’il arrive. Oui, ça calme. Autant vous y faire : pour progresser, il va falloir faire du grinding systématique, le pire étant que ça ne sera peut-être même pas suffisant. Mais le déséquilibre va dans les deux sens : Valsu le soigneur, par exemple, est atrocement difficile à jouer pendant une large partie du jeu… jusqu’à ce qu’il atteigne le niveau 42, où il acquiert alors un sort de soin total si monstrueusement puissant (il régénère même les points de magie !) que le personnage en devient virtuellement invulnérable. Conseil : ne vous en faites pas un ennemi si vous jouez un autre personnage, sans quoi vous pourriez avoir à l’affronter un jour, et à ne jamais pouvoir le vaincre.

La bonne nouvelle, c’est que la perte d’un combat n’entraînera pas le game over. Vous repartirez simplement de la dernière auberge… en ayant perdu la moitié de votre or. Vu à quel point il est difficile d’accumuler assez d’or pour s’équiper dans ce jeu, le titre propose heureusement une parade : vous pouvez acheter des pierres précieuses et les revendre au prix d’achat, sachant que celles-ci ne disparaitront pas à votre « mort ». Il est donc possible de mettre de l’argent de côté grâce à ce système inutilement fastidieux, mais c’est déjà mieux que de passer la très grande majorité de la partie avec les poches vides.

Le déroulement, pour sa part, sera généralement atrocement linéaire, du moins dans la première moitié du jeu : vous arrivez dans une ville, où on vous demande généralement de faire quelque chose dans un donjon, dans lequel vous trouvez un boss. Oui, à la Final Fantasy, sorti rappelons-le quelque six ans plus tôt – encore l’histoire de l’antique titre de Square était-elle objectivement plus intéressante que celle de The 7th Saga. À se déplacer d’une ville à l’autre sans jamais rien apprendre d’intéressant sur le monde ni sur son histoire, sans rencontrer un seul personnage valable ni voir apparaître le moindre enjeu, attendez-vous à sacrifier plusieurs dizaines d’heures de votre belle jeunesse avant que le scénario ne daigne enfin dévoiler un semblant d’épaisseur. Mais bon sang, quel intérêt de créer autant de personnages simplement pour échanger avec eux une fois toutes les cinq heures, s’allier avec l’un d’eux et en combattre un ou deux autres, sans jamais prendre le temps développer qui ou quoi que ce soit ?

On tient d’ailleurs sans doute là le véritable problème de The 7th Saga : son atroce difficulté n’est finalement qu’un cache-misère très efficace pour dissimuler le fait que l’aventure en elle-même a déjà bien du mal à se montrer intéressante. Passer des heures à monter de niveau entre chaque ville pour ne se voir récompenser que par des échanges sans intérêts avec des PNJs creux à pleurer, avant de retourner se promener sur une carte moche en affrontant sempiternellement les mêmes monstres n’est, quoi qu’on en pense, pas extraordinairement motivant.

Une fois l’idée des sept personnages – qui n’apporte objectivement rien – écartée, le jeu de Produce colle si fidèlement au moule du J-RPG initié par Dragon Quest sept ans plus tôt qu’il est pratiquement impossible de se montrer surpris à un quelconque niveau, à une très vague révélation près lors de la conclusion du jeu. Des dialogues aux combats en passant par l’exploration et le déroulement de l’aventure, il est pratiquement impossible de déceler un aspect du jeu qu’on n’ait pas déjà rencontré dans 150 jeux équivalents – souvent en mieux – au cours des années 80 et 90. Et ce n’est pas la réalisation à peine honnête qui va relever le niveau – à titre de comparaison, Secret of Mana allait sortir la même année !

Bref, on se retrouve face à une expérience tellement balisée qu’on la parcourt en mode pilote automatique, jusqu’à ce que l’on finisse par décider qu’on a gaspillé assez de temps à aligner des combats impossibles et sans intérêt, après quoi on éteint généralement le jeu pour ne plus jamais le relancer. Le carnage est tel que plusieurs équipes de codeurs ont mis au point des patchs visant à repenser l’équilibrage du jeu, le plus souvent pour le réaligner sur celui de la version japonaise, comme à cette adresse. Mais sincèrement, je ne saurais recommander à quiconque de se lancer dans l’aventure, quelle que soit sa difficulté, à moins d’être décidé à épuiser la totalité du répertoire des jeux de rôles sur Super Nintendo. Si vous n’êtes pas totalement fanatique du genre, le jeu aura bien du mal à retenir votre intérêt un seul instant.

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 10/20 (Version US) - 13/20 (Version japonaise ou patchée) Inutile de se leurrer : si The 7th Saga jouit, aujourd'hui encore, d'une certaine renommée dans la ludothèque RPG de la Super Nintendo, c'est avant tout pour la difficulté aussi ahurissante qu'insupportable de sa version américaine. Une fois cet obstacle accepté, que reste-t-il ? Un jeu de rôle très générique, atrocement linéaire, où les quelques rares idées originales sont sous-exploitées et où 95% de l'expérience jeu se limite à un empilement de combats extrêmement limités sur le plan tactique. Ajoutez-y un scénario qui met de très, très nombreuses heures avant de présenter un vague intérêt, et vous obtiendrez un titre qui a indéniablement pris un gros coup de vieux. Les fans de J-RPG à la recherche d'un défi extrêmement relevé y trouveront peut-être leur compte, les autres feraient mieux de se tourner vers la version japonaise ou vers les patchs d'équilibrage disponibles en émulation pour découvrir une expérience convenue et loin d'être inoubliable, mais déjà nettement plus plaisante. CE QUI A MAL VIEILLI : – Difficulté assommante, mal pensée, buguée (version américaine) – Grinding systématique obligatoire pendant la totalité du jeu (version américaine) – Univers générique sans aucune personnalité – Scénario insipide pendant la moitié du jeu, pas beaucoup plus passionnant ensuite – Pas d'équipes de plus de deux personnages – Combats tactiquement assez limités – Techniquement daté – Donjons moches et mal conçus

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The 7th Saga sur un écran cathodique :

Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine

Développeur : Compile
Éditeur : SEGA Enterprises, Ltd.
Titre original : Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine (États-Unis)
Testé sur : Mega DriveGame GearMaster SystemPC (Windows 9x)
Disponible sur : 3DS, Linux, MacOS X, Palm OS, Switch, Wii, Windows – Figure au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini (version Mega Drive)
En vente sur : Nintendo eShop (3DS, Switch, Wii), Steam.com (Linux, MacOS X, Windows)
Présent au sein des compilations :

  • Sonic Compilation (1995 – Mega Drive)
  • SEGA Puzzle Pack (1999 – PC (Windows 9x)
  • Sonic Mega Collection (2002 – GameCube)
  • Sonic Mega Collection Plus (2004 – PlayStation 2, Xbox, Windows)
  • SEGA Mega Drive Classic Collection Volume 4 (2011 – Windows)

Version Mega Drive

Date de sortie : Décembre 1993 (États-Unis) – Janvier 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, dématérialisé
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Les voies du marketing, à l’instar de celles du Seigneur, sont souvent impénétrables. S’il est un concept universel qui transgresse sans difficulté la barrière de la langue, c’est bien celui du puzzle game. Que l’on soit japonais, américain ou ouzbek, on est généralement équitablement armé pour comprendre le concept de pièces qui tombent pour former des lignes ou des combinaisons, et traduire les cinq lignes d’explications accompagnant le titre est rarement un obstacle insurmontable pour la localisation.

Mais il faut croire que Puyo Puyo était, à sa sortie, conçu comme trop japonisant pour le marché occidental, puisqu’il aura changé de nom et d’univers graphique à chacune de ses incursions sur les machines 16 bits hors de l’Archipel. Ainsi, les possesseurs de Super Nintendo auront dû attendre 1995 pour le voir débarquer en occident sous le nom de Kirby’s Avalanche, là où les joueurs sur Mega Drive avaient déjà pu poser les mains dessus deux ans plus tôt, cette fois sous l’intitulé Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine. La France, ne faisant décidément rien comme tout le monde, aura opté pour un titre encore un tout petit peu plus alambiqué : Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine. Tout un programme.

Pour ceux qui ne connaîtraient pas le principe de Puyo Puyo, vous trouverez une présentation très complète à la fin de la vidéo qui ouvre ce test. Pour les plus flemmards, on précisera que le jeu consiste à associer des blobs de couleur qui tombent par paires depuis le sommet de l’écran. Chaque blob situé directement au-dessus, en dessous, à gauche ou à droite d’un blob de la même couleur se retrouvera alors lié à lui ; liez-en quatre en suivant cette règle et il disparaitront. Là où le concept devient intéressant, c’est que la gravité s’applique, et que chaque série de blobs amenée à disparaître en viendra donc à faire tomber les éléments placés directement au-dessus d’elle… et ainsi, à permettre éventuellement une nouvelle combinaison, autorisant donc le système d’enchaînements inauguré par Columns.

Si ce principe de combo est déjà sympathique lorsque l’on joue seul, il révèle tout son potentiel lors de l’opposition contre un adversaire : chaque enchainement réussi se traduira par l’apparition d’un ou plusieurs blobs transparents dans la grille de votre ennemi. Ces blobs ne peuvent pas être liés entre eux, et le seul moyen de les faire disparaître est de réaliser une combinaison à proximité – nécessitant ainsi de sacrifier du temps pour « nettoyer » son plateau.

L’idée géniale est que le nombre de blobs transparents envoyés dans le camp adverse est directement lié à l’ampleur de l’enchainement que vous venez de réaliser, et pourra aller d’une unité à plus d’une dizaine de lignes d’un coup ! Autant dire que l’adrénaline est alors à son comble, tant parvenir à accomplir des combos le plus vite possible afin de saturer le plateau adverse nécessite des trésors d’anticipation, de planification et de réflexes. Le principe est enfantin mais les possibilités stratégiques sont immenses, et les parties opposant deux joueurs de niveau équivalent sont généralement aussi disputées qu’hilarantes. Le titre ne s’y trompe d’ailleurs pas en faisant du duel le mode principal du jeu, afin de vous faire affronter pas moins de treize adversaires dans des parties à la vitesse et à la difficulté croissante.

Ces adversaires, pour le coup, tireront directement leur inspiration de Sonic the Hedgehog, et plus précisément de la série animée diffusée au début des années 90. Les connaisseurs retrouveront donc le maléfique Robotnik, qui fera bien évidemment office de boss final, ainsi qu’une batterie de ses sous-fifres qui seront pour certains directement tirés de la série évoquée plus haut.

L’occasion pour les fans de découvrir que Scratch est beaucoup plus fort que Grounder, ou que le pauvre Coconuts n’est décidément bon qu’à servir de chair à canon. La réalisation n’a pas été galvaudée, et non seulement le jeu est très bien présenté graphiquement, avec tous ses intervenants soigneusement animés, mais les thèmes musicaux sont absolument parfaits, réussissant à être rythmés et très prenants sans jamais se montrer répétitifs. Loin de vous resservir le même pendant tout le jeu, le titre a la très bonne idée d’en proposer cinq différents pour la campagne principale, un pour le mode solo et un dernier pour le mode deux joueurs – et cerise sur le gâteau, ils sont tous excellents.

Si la difficulté peut se révéler particulièrement corsée lors des derniers affrontements du mode principal, le jeu met de toute façon à votre disposition un système de mots de passe ainsi que des continues illimités, vous ne devriez donc pas mettre très longtemps à en venir à bout.

Le vrai garant de la durée de vie sera en fait la présence ou non d’un deuxième joueur à vos côtés, auquel cas vous serez sans doute ravi de constater à quel point le principe du jeu ne s’essouffle jamais, procurant un plaisir réel pour des dizaines, voire des centaines d’heures. Le mode versus de Puyo Puyo a toujours été l’un des plus magistralement réussis de tous les puzzle games, et ce n’est certainement pas cette excellente version qui va venir changer les choses. Même si vous n’avez jamais pris aucun plaisir en jouant à Tetris, laissez sa chance à Puyo Puyo ou à Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine. Vous pourriez bien adorer ça.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 18/20

Simple transposition du concept de Puyo Puyo dans l'univers de la série animée Sonic the Hedgehog, Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine accomplit sa mission à la perfection en offrant un titre extraordinairement prenant pour tous ceux qui accrocheront au concept, précieusement placé dans un écrin très soigné avec notamment des thèmes musicaux absolument irréprochables. Si l'expérience est déjà très satisfaisante en solo, elle risque hélas de se révéler un peu courte, et le mode « exercise » n'est clairement pas le point fort du jeu. En revanche, invitez un(e) ami(e), un(e) ex ou un souffre-douleur, et vous pourriez bien enchaîner les parties pendant des heures sans jamais vous lasser. Définitivement l'un des meilleurs titres du genre.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Campagne principale trop courte
– Ne donne réellement sa pleine mesure qu'à deux joueurs

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine sur un écran cathodique :

Version Game Gear
Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine

Développeur : Compile
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Décembre 1993 (États-Unis) – Janvier 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (Avec deux consoles reliées par un câble Gear-to-Gear)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Depuis Tetris et son succès planétaire sur Game Boy, les consoles portables ont souvent été les associées naturelles des puzzle games. SEGA ne s’y était d’ailleurs pas trompé en lançant sa Game Gear en bundle avec Columns. On ne sera donc pas surpris de voir Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine débarquer sur la portable de SEGA – mais sous son titre original, cette fois, sans profiter des petites facéties de la distribution française. En terme de réalisation, le titre va droit à l’essentiel : ce n’est pas spécialement beau, mais c’est lisible. Les adversaires ne se présentent plus, et les musiques deviennent cette fois un tantinet répétitive. Plus grave : on sent que le programme hésite beaucoup plus à augmenter la vitesse, ce qui ne se produit que tardivement dans une partie, et jamais au niveau de la version Mega Drive. En résulte un jeu beaucoup plus facile que sur la console 16 bits, et surtout des parties globalement moins rythmées. Le jeu à deux est heureusement toujours possible, à condition d’avoir deux consoles, deux cartouches et un câble. Seule nouveauté : l’apparition d’un mode puzzle, très proche de ce que proposaient les Nazo Puyo, qui aura au moins le mérite d’étendre quelque peu la durée de vie rabotée par une campagne principale vite expédiée.

NOTE FINALE : 15/20

En passant sur Game Gear, Dr. Robtnik’s Mean Bean Machine n’aura pas juste perdu quelques plumes en terme de réalisation, il aura hélas également abandonné une grosse partie de la difficulté du mode campagne, ainsi qu’une bonne part du rythme des confrontations. L’apparition d’un mode Puzzle aide à faire passer la pilule, mais même le mode deux joueurs – et tout le couteux attirail nécessaire à le faire exister – a un peu perdu de sa superbe sur la portable de SEGA. Une conversion correcte, mais préférez-lui clairement la version Mega Drive.

Version Master System
Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine

Développeur : Compile
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Février 1994 (Europe) – Septembre 1994 (Brésil)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Preuve que SEGA n’avait pas encore abandonné sa petite 8 bits en 1994, Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine aura également atterri dessus. Ceci dit, on se doute bien que ce portage n’aura pas nécessité une énergie et des moyens colossaux : c’est exactement la même chose que sur Game Gear… en à peine plus grand. En effet, plutôt que de remettre l’interface à l’échelle d’une télévision, l’équipe responsable du portage aura préféré reprendre les proportions de la console portable et les perdre au milieu de l’écran. En résulte une réalisation un peu grotesque où la moitié de la surface de jeu ne sert strictement à rien. Seul avantage : jouer à deux sur la console de salon sera un peu plus facile que sur Game Gear, mais les quelques acheteurs du titre ont quand même dû avoir le sentiment de se faire pigeonner.

NOTE FINALE : 15/20

Dr. Robotnik’s Mean Bean Machine sur Master Sytem n’est rien d’autre qu’un portage extraordinairement fainéant de la version Game Gear. Si l’essentiel de ce qui a fait le succès du jeu est toujours là, le fait de jouer dans une fenêtre minuscule perdue au milieu de l’écran est clairement impardonnable. À ne conseiller que si vous n’avez aucune autre version du jeu sous la main.

Version PC (Windows 9x)
SEGA Puzzle Pack

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA PC
Date de sortie : 1999
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium/AMD K5/Cyrix 6X86 133Mhz – OS : Windows 95 – RAM : 16Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 1X (150ko/s)
Configuration graphique : Résolution : 640×480 – Couleurs : 256 – DirectX : 7
Configuration sonore : Sound Blaster 16

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Surprise : Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine aura fini par atterrir sur PC… six ans après sa sortie, et uniquement dans une compilation regroupant des puzzle games de SEGA, où il était vendu avec Columns III et Lose Your Marbles. Inutile de s’attendre à une refonte graphique : le titre tourne grâce à une version modifiée de l’émulateur KGen (déjà !) et propose donc une retranscription pratiquement pixel perfect de la version Mega Drive. Au rang des curiosités, on remarquera que le jeu tourne ici un peu moins vite que dans la version console, et que les ombres des blobs bénéficient d’un effet de transparence absent de la version originale (et dont ne profitent pas les ombres des décors). Un menu permettant de configurer les touches du clavier et/ou du joystick a également été ajouté, et l’interface globale est excellente, tout comme la réalisation en plein écran (avec deux bandes noires) plutôt qu’en fenêtre. Bref, ce n’était jamais qu’une ROM gravée sur un CD-ROM avec une interface adaptée, mais cela fait parfaitement le travail.

NOTE FINALE : 18/20

Simple version émulée – mais bien émulée – de la cartouche publiée sur Mega Drive six ans plus tôt, Dr. Robotnik and his Mean Bean Machine sur PC permettait, dès 1999, de découvrir un clone de Puyo Puyo dans des conditions optimales sur Windows 95 ou Windows 98. Et au fond, ça ne se refusait pas.

Prince of Persia 2 : The Shadow & The Flame

Développeur : Brøderbund Software, Inc.
Éditeur : Brøderbund Software, Inc.
Titres alternatifs : הנסיך הפרסי 2 (Hébreu), Prince of Persia 2 (Super Nintendo)
Testé sur : PC (DOS)FM TownsMacintoshPC-98Super Nintendo
Présent au sein des compilations :

  • Prince of Persia CD Collection (1995 – Macintosh, PC (DOS))
  • Prince of Persia Collection (1998 – Macintosh, PC (DOS, Windows 9x))

La saga Prince of Persia (jusqu’à 2000) :

  1. Prince of Persia (1989)
  2. Prince of Persia 2 : The Shadow & The Flame (1993)
  3. Prince of Persia 3D (1999)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Juillet 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko
Mode graphique supporté : VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, Disney Sound Source, IBM PS/1, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, Roland MT-32/LAPC-1/CM-32L, Sound Blaster, Tandy

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

La question revient souvent en ces pages, et a certainement occupé les réflexions de bien des développeurs de jeux vidéo : quels ingrédients doit-on mettre dans la suite d’un succès commercial ? Créer un jeu ad nihilo est un défi en soi, mais repartir sur un concept déjà éprouvé n’est pas nécessairement plus simple, très loin de là. En fait, comme Jordan Mechner et des dizaines d’autres avant et après lui s’en sont rendus compte, imaginer une suite vidéoludique se limite rarement à proposer exactement la même chose avec un « 2 » derrière – à moins, bien sûr, que vous ne soyez cynique, opportuniste ou simplement pragmatique.

On s’approche en fait bien plus d’un délicat numéro d’équilibriste marchant en funambule entre deux injonctions contradictoires de la part des joueurs : d’un côté resservir précisément ce qui a marché, et de l’autre innover pour parvenir à offrir quelque chose de sensiblement plus neuf. Enfin, si vous êtes ambitieux, bien sûr. Dans le doute, la solution « la même chose avec un 2 derrière » n’a finalement pas que des défauts, et ce ne sont pas Super Mario, Sonic ou Doom qui viendront prétendre le contraire.

Confrontés à ces questions existentielles, Jordan Mechner aura finalement tranché en demandant à son prince de retourner sauver sa princesse comme le premier Mario venu. L’histoire, très bien résumée dans la charmante introduction visible ci-dessus, se déroule presque immédiatement à la suite de celle du premier épisode, puisqu’on y apprend que nos deux tourtereaux n’auront eu le temps de roucouler ensemble que onze jours après leur mariage. Après quoi, le matin du douzième, le prince débarque dans la salle du trône pour y affronter des regards hostiles et découvrir que non seulement Jaffar n’est pas mort, mais qu’il est parvenu à se faire passer pour le héros. Désormais traité comme un paria, le jeune marié n’a d’autre solution que de prendre la fuite en sautant par la fenêtre… et c’est très exactement là que commence le jeu.

Immédiatement après la fin de la cinématique d’introduction, vous voilà donc lâché sur les toits de la ville avec un garde qui vous fonce dessus et une marge d’action d’environ une seconde et demi. Cette mise en situation brutale vous résumera très bien, à sa manière, la principale orientation du jeu : la même chose en plus grand, en plus beau, en plus varié, en plus ambitieux… et en plus difficile.

Quitte, d’ailleurs, à s’asseoir sur un cahier des charges qui paraissait pourtant évident même en 1993 : là où le premier niveau de Prince of Persia faisait, à sa manière, office de didacticiel, rien de tout ça dans sa suite. Vous démarrez littéralement dans le feu de l’action, et pour peu que vous n’ayez pas pris le temps de prendre connaissance des commandes du jeu, mieux vaudra être très très réactif sous peine de revivre votre saut par la fenêtre plusieurs fois de suite, la mort vous faisant toujours recommencer au début du niveau, ou parfois à un checkpoint un peu plus avancé.

Et puisque l’on a commencé à aborder les nouveautés introduites par cet épisode, autant commencer par la plus évidente : l’ambition. Car si notre prince est toujours doté des mêmes capacités que dans le premier opus, il va cette fois visiter beaucoup plus de choses que les cachots du palais. En fait, il va même voir suffisamment de pays pour se confronter à des éléments tirés des mythologies grecque ou égyptienne, tout en s’efforçant de revenir sauver la princesse dans une limite de temps qui n’a plus vraiment de sens puisque Jaffar pourrait cette fois se contenter de tuer la belle mais qui aura été élevée, pour le coup, à 75 minutes.

Entre les grottes, les ruines anciennes, un temple égyptien et un final dans un univers onirique où l’on devra en découdre avec Jaffar, le jeu affiche cette fois une variété graphique qui avait cruellement fait défaut au premier épisode. Non seulement les environnements sont réellement variés, ce qui donne une très bonne raison de chercher à avancer encore un peu plus loin, mais les pièges et les adversaires le sont aussi, le titre trouvant toujours le moyen de nous surprendre avec de nouvelles cochonneries. Le scénario se veut également plus ambitieux, revenant à la fois sur les origines du prince et s’efforçant de faire monter la sauce à l’aide de magnifiques écrans fixes accompagnés de voix digitalisés.

Il se perd aussi un peu, hélas, dans des méandres assez fumeux qui font qu’on ne sait pas trop pourquoi on finit par aller récupérer la flamme du titre, avant de composer avec un affrontement final tellement obscur qu’on ne sait tout simplement pas ce qu’on est censé faire alors que l’objectif (vaincre Jaffar) est quand même évident ! Il est donc dommage qu’un détour par le manuel du jeu soit quasi-obligatoire afin d’y pêcher les indices vous aidant à comprendre l’emploi d’une capacité qui n’est jamais explicitée et qui ne vous servira qu’une seule et unique fois de tout le jeu – à sa conclusion. Pas franchement ce qu’on appelle la quintessence du game design – ce qui est dommage, car c’était là le véritable génie du premier épisode.

S’il est de fait assez difficile de prendre le jeu en défaut sur sa réalisation – seuls les sprites sont un peu cheap – sa progression, elle, est loin d’être irréprochable. Passons rapidement sur ce scénario qui vous trimballe un peu partout sans jamais vous donner une raison claire au pourquoi de toute cette épopée, et abordons rapidement le point le plus clivant du jeu : sa difficulté. Là où l’équilibrage de Prince of Persia avait visé juste à à peu près tous les niveaux, sa suite décide de passer au braquet supérieur… et de tomber dans le camp de la frustration.

Premier point énervant : si le jeu comporte beaucoup plus de situations surprenantes et réellement mises en scène que dans le premier opus – on pensera par exemple à ce combat contre un squelette sur un pont branlant – celles-ci trouvent souvent leur résolution d’une manière qui vous impose de mourir au minimum une fois avant de comprendre ce que l’on attend de vous. Le titre bascule cette fois clairement dans le camp du die-and-retry extrêmement punitif : il n’est pas rare que terminer le niveau ou atteindre un bonus intéressant demande une séquence d’actions extrêmement précise à accomplir sous peine de mort. Il faudra donc non seulement mourir à plusieurs reprises pour comprendre le trajet à suivre, mais il faudra en plus composer avec des combats beaucoup plus exigeants que dans le premier épisode.

Entre ces squelettes qui peuvent se relever dans votre dos si vous n’êtes pas parvenu à les faire tomber dans des trous de lave, ces maudites têtes volantes qui peuvent vous boulotter jusqu’à quatre points de vie en une seule attaque (!) et les gardes du temple d’Horus qui vous attaquent parfois carrément à trois – et qui savent se défendre, les bougres – mieux vaudra être très bon, et surtout très patient, la mort signifiant bien souvent tout reprendre à zéro depuis le début du niveau – sans que le chrono se réinitialise, histoire de vous mettre un coup de pression en plus. La palme de l’insupportable revenant malgré tout aux serpents de la ville en ruines, qui vous tuent non seulement en un coup quelle que soit la taille de votre jauge de vie, mais qui exigent en plus un timing délirant de l’ordre du dixième de seconde pour espérer les vaincre ! Croyez-moi, reprendre une séquence entière de cinq bonnes minutes, avec plusieurs combats difficiles et des sauts au micropoil, simplement pour jouer sa vie sur une fenêtre d’action de 0,1 seconde est très, très désagréable.

Additionné au fait que Prince of Persia 2 ne propose pour ainsi dire rien de neuf en termes de mécanismes, on se retrouve face à une expérience qui commence à apparaître d’autant plus redondante qu’elle repose précisément sur le fait de reproduire les mêmes actions encore et encore avec en prime cette fameuse pression du temps – dont on se serait cette fois très bien passé, le jeu étant déjà largement assez difficile sans elle.

À tout prendre, on aurait d’ailleurs certainement signé des deux mains pour un titre plus long mais un peu moins frustrant – ou, au grand minimum, avec un peu plus de checkpoints. En l’état, si les fans du premier épisode pourront y trouver leur compte, on ne conseillera néanmoins cet épisode qu’aux joueurs aimant les réels défis ou à ceux ayant une patience à toute épreuve. Non que le joueur occasionnel ne puisse espérer trouver son bonheur en s’essayant au titre – mais il devra certainement perdre quelques poignées de cheveux sur des passages profondément énervants.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15/20 En proposant une aventure plus longue et plus variée, avec une réalisation faisant honneur aux capacités du PC, on aurait pu penser que Prince of Persia 2 : The Shadow & The Flame enterrerait purement et simplement le premier opus. Malheureusement, une difficulté particulièrement frustrante propulse le titre de Jordan Mechner dans les rangs les plus sombres du die-and-retry, et on prend moins de plaisir à aligner les mêmes longues séquences trente fois de suite en temps limité – surtout quand la marche à suivre est loin d'être toujours claire. Quelques bonnes idées et la variété des situations ne feront hélas pas complètement oublier plusieurs passages particulièrement infects, voire incompréhensibles (le combat final !), ce qui fait qu'on préfèrera au final réserver cet épisode aux fans les plus patients du premier opus. CE QUI A MAL VIEILLI : – La limite de temps parait cette fois un peu sortie de nulle part – Certains combats exigeant un timing absolument délirant (ces satanés serpents !) – Le combat final, totalement incompréhensible si on n'a pas une solution sous les yeux – Une difficulté qui exigera des nerfs particulièrement solides – Les décors sont réussis, mais les sprites sont un peu plus décevants

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Prince of Persia 2 sur un écran cathodique :

Version FM Towns

Développeur : Brøderbund Software, Inc.
Éditeur : Interprog
Date de sortie : Juillet 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Tout comme le premier opus, Prince of Persia 2 aura tenté sa chance sur les ordinateurs japonais – il faut dire qu’en occident, de ce côté-là, les candidats commençaient à se faire rares. Le FM Towns étant fondamentalement un PC avec un lecteur CD-ROM, il constituait un candidat naturel… lequel fournit exactement ce à quoi on pouvait s’attendre, à savoir exactement la même chose que sur PC, au pixel près, mais traduit en japonais avec les voix redoublées pour l’occasion. Les thèmes musicaux, pour leur part, même s’ils tirent parti du CD-ROM, offrent une qualité équivalente au MIDI – mais objectivement, le rendu était de toute façon suffisamment bon pour qu’on puisse se demander ce qu’une réorchestration aurait réellement apporté. Bref, aucune surprise ni aucun véritable apport, et à moins de chercher spécifiquement à jouer en japonais, vous ne devriez pas avoir de raison de vous lancer sur ce portage.

NOTE FINALE : 15/20

Inutile de chercher un bonus caché : Prince of Persia 2 sur FM Towns, c’est tout simplement la version PC traduite en japonais et gravée sur un CD-ROM. Le résultat correspond très exactement à ce qu’on est en droit d’attendre, mais si vous cherchez sincèrement quelque chose que la version PC n’offrirait pas, allez plutôt chercher du côté de la version Mac.

Version Macintosh

Développeur : Brøderbund Software, Inc.
Éditeur : Brøderbund Software, Inc.
Date de sortie : Juillet 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur iMac G3
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68030 – OS : System 6.0.7 – RAM : 4Mo
Configuration vidéo requise : Résolution : 512×384 – 256 couleurs

Comme le premier épisode avant lui, Prince of Persia 2 aura bénéficié de son portage sur Macintosh. Et comme le premier épisode avant lui, cet opus aura bénéficié d’un ajout de taille : la haute résolution ! C’est, bien évidemment, la seule modification apportée à cette adaptation, autrement très fidèle à celle parue sur PC. Le bon côté est que cela embellit encore une réalisation déjà très satisfaisante sur la machine d’IBM, même si cela fait également plus nettement apparaître les lacunes dans l’animation. La qualité sonore étant également très satisfaisante, on tient là à coup sûr un des programmes qui pouvaient authentiquement prétendre être meilleurs sur Mac que sur PC.

NOTE FINALE : 15,5/20

Si Prince of Persia 2 sur Macintosh est toujours aussi frustrant, il se paie en revanche le luxe d’être encore plus beau que sur PC grâce à une résolution doublée par rapport à celle du VGA. Vu le peu de jeux de plateforme de qualité sur cette machine, on comprendrait aisément que personne n’ait daigné bouder celui-ci.

Version PC-98

Développeur : Brøderbund Software, Inc.
Éditeur : Interprog
Date de sortie : 8 janvier 1995
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En 1995, l’ordinateur personnel le plus populaire de NEC commençait furieusement à ressembler à un PC occidental tout ce qu’il y a de plus classique – il employait même MS-DOS, tout en s’apprêtant à accueillir Windows 95. On ne sera donc pas surpris de constater qu’on a une nouvelle fois affaire à une conversion pixel perfect de Prince of Persia 2, où les quelques très rares nuances, comme sur FM Towns, ne seront pas à aller chercher du côté de la réalisation mais plutôt de celui de l’interface (présence d’un menu principal, comme sur la machine de Fujitsu) et de la langue, le titre étant à nouveau exclusivement disponible en japonais. Une nouvelle fois, un portage irréprochable, même si la machine aurait été largement capable d’afficher les mêmes graphismes que la version Mac.

NOTE FINALE : 15/20

Prince of Persia 2 livre sur PC-98 la prestation à laquelle on pouvait s’attendre de la part d’un portage d’un jeu occidental en 1995 : exactement la même chose que sur PC, mais en japonais.

Version Super Nintendo
Prince of Persia 2

Développeur : Titus France SA
Éditeur : Titus Software Corporation
Date de sortie : Octobre 1996 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Vu l’ambition énorme du portage du premier épisode du Super Nintendo, le moins qu’on puisse dire est que ce deuxième opus partait avec une certaine pression sur les épaules – surtout en considérant sa date de sortie très tardive, à une époque où de nombreux studios s’étaient déjà chargés de montrer ce que la 16 bits de Nintendo avait dans le ventre. Sauf que, bien évidemment, il était plus facile de rivaliser avec un titre développé sur Apple II en 1989 qu’avec un titre développé sur PC en 1993.

La machine de la firme au plombier n’abdique pas, cependant, et fait ce qu’elle peut pour se hisser à la hauteur de son modèle. Bon, certes, la moitié de l’introduction a disparu, tout comme les voix digitalisés, et la résolution à la baisse fait d’autant plus de dégâts que le jeu se sent parfois obligé d’ajouter un défilement horizontal qui représente objectivement une mauvaise idée dans un jeu fonctionnant par tableaux fixes. Cela n’empêche pas les graphismes d’être parfois plus étoffés que sur PC – mais également nettement moins fins, il n’y a pas de miracle. L’animation est extrêmement fluide – au point, d’ailleurs, d’être trop rapide sur les versions NTSC – mais la plus grosse perte se fait au niveau de l’ambiance sonore : beaucoup de bruitages ont purement et simplement disparu, et la musique est pour le moins discrète. Si le jeu respecte la plus grande partie du déroulement de la version originale, l’affrontement final a purement et simplement été coupé ! Vous ne verrez pour ainsi dire pas une seule fois Jaffar de tout le jeu en-dehors des cinématiques, et sachant que les combats sont encore un peu plus frustrant dans cette version, cela commence à faire beaucoup pour recommander à n’importe qui de s’essayer à ce portage.

NOTE FINALE : 12/20

En dépit de réels efforts pour proposer une expérience relativement fidèle à celle proposée sur PC, cette conversion de Prince of Persia 2 sur Super Nintendo cumule trop de maladresses pour mériter qu’on la sorte durablement de l’oubli dans lequel elle a sombré. Injouable sur les versions américaines, le jeu reste un peu bancal en Europe à cause de combats trop rapides, d’un enrobage trop laissé de côté et de coupes trop franches dans le déroulement du jeu. Un titre correct mais sans plus, qui n’a pas de réelle raison d’être dès l’instant où vous avez un PC ou un Mac sous la main.