Turrican

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Rainbow Arts Software Gmbh
Éditeur : Rainbow Arts Software Gmbh
Titre alternatif : Hurrican (titre de travail)
Testé sur : AmigaCommodore 64Amstrad CPCAtari STZX SpectrumAmiga CDTVGame BoyMega DrivePC Engine
Disponible sur : BlackBerry

La série Turrican (jusqu’à 2000) :

  1. Turrican (1990)
  2. Turrican II : The Final Fight (1991)
  3. Turrican 3 (1993)
  4. Super Turrican (Rainbow Arts) (1993)
  5. Super Turrican (Factor 5) (1993)
  6. Super Turrican 2 (1995)

Version Amiga

Date de sortie : Avril 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.3 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au rang des classiques immortels, des titres ayant gravé leur nom au panthéon de ce qui a défini et définira toujours l’Amiga 500, une poignée de noms sont condamnés à être perpétuellement cités, bien souvent à l’origine d’une série elle aussi légendaire. S’il fallait en isoler deux, nul doute que de très nombreux fans de la machine de Commodore ne verraient aucun inconvénient à voir apparaître Shadow of the Beast et Turrican. Le deuxième nommé aura entraîné à sa suite le nom de Rainbow Arts (déjà responsable du très bon portage de Katakis), qui résonnera aussi agréablement aux oreilles des nostalgiques que celui des Bitmap Brothers, par exemple, tant il sera devenu indissociable de l’Amiga. Et pourtant, choisir quelle version mettre en valeur a été un véritable dilemme pour ce test, car Turrican a été développé parallèlement sur Commodore 64 et Amiga, et les deux versions sont légendaires à leur façon…

De l’action, des gros sprites, et de la musique qui déboîte : bienvenue dans Turrican

Passons rapidement sur le scénario qui vous envoie affronter un monstre à trois têtes appelé Morgul – même les fans les plus irréductibles et les plus nostalgiques du jeu ne s’en souviennent probablement pas, et pour cause : il n’a aucun intérêt. Non, la raison pour laquelle on joue à un run-and-gun comme Turrican, c’est pour l’adrénaline, l’action, le gameplay – tout ce qui peut nous river à notre joystick jusqu’à la fin du jeu, quitte à batailler pendant des heures.

Les derniers niveaux sont assez délicats

Ce qui, dans ce cas précis, n’est pas une exagération : le titre imaginé par Rainbow Arts est en effet assez long – comptez facilement une heure et demi au minimum pour le boucler – et ne compte ni système de mot de passe ni sauvegarde, il faudra donc être prêt à aller au charbon pour de longues sessions de jeu. Ce qui pourrait être une gageure si le programme se révélait trop basique pour être intéressant sur la durée ; heureusement et comme on va le voir, l’équipe de développement s’est montrée particulièrement ambitieuse.

Apprendre à fouiner partout va rapidement devenir une seconde nature

Vous contrôlez donc un humanoïde en armure qui donne son nom au jeu, dans des tableaux au défilement multidirectionnel. L’objectif en lui-même n’aura rien d’original : atteindre la fin de chaque niveau, en éliminant si possible tout ce qui aura le malheur de se présenter sur votre route, y compris quelques boss fort impressionnants pour l’époque qui – première originalité – peuvent parfois survenir en début ou en milieu de stage.

Trouver un bloc rempli de bonus et de power-up est toujours un grand moment

Votre Turrican peut sauter ou tirer face à lui, il peut également utiliser un pouvoir pour nettoyer l’écran en lançant deux vagues qui seront bloquées par les murs – à employer intelligemment, donc – mais aussi lancer une grenade ou même placer une mine au sol. Mais ce n’est pas tout ! En laissant le bouton de tir appuyé, votre arme générera un faisceaux continu qui pourra ensuite être orienté dans toutes les directions – très pratique pour atteindre les adversaires vicieusement placés dans des angles morts, à condition, bien sûr, qu’il vous en laissent le temps. Dernière surprise : trois fois par vie, votre personnage peut se transformer en une sorte d’étoile ninja vivante donc le fonctionnement rappellera immanquablement la célèbre Morph Ball de Metroid. Sous cette forme, le Turrican est invincible (sauf s’il tombe dans le vide, naturellement) et peut même continuer à tirer, mais sera bloqué par la plupart des reliefs. Une arme redoutable, cependant, particulièrement si vous avez la bonne idée de vous en servir contre les boss…

Le premier boss est finalement très simple une fois que vous avez compris le truc

Comme on le voit, les possibilités sont déjà très étendues – le jeu a heureusement l’excellente idée de reconnaître des joysticks à plus d’un bouton, ce qui vous permettra de ne pas avoir à aller chercher une partie de vos pouvoirs sur le clavier. La jouabilité, si elle prend quelques minutes à être apprivoisée, est très satisfaisante (en dépit d’une certaine raideur dans les sauts), et on sent déjà qu’on a tous les éléments pour passer un bon moment.

On a même droit à des séquences de shoot-themp-up

On court, on saute, on tire, dans une fluidité absolue et une animation bluffante, avec un gameplay qui doit beaucoup à un titre comme Psycho-Nics Oscar de chez Data East. Mais Rainbow Arts n’étant visiblement jamais à court de bonnes idées, le déroulement d’un niveau est très loin d’être linéaire. En effet, la structure de chacun d’entre eux (sauf certains stages pensés comme des phases de shoot-them-up) est ouverte, ce qui signifie que l’exploration sera une donnée fondamentale. Cela est d’autant plus vrai que les niveaux peuvent se montrer gigantesques – il n’y a rien d’exceptionnel à passer une bonne dizaine de minutes à l’intérieur de l’un d’entre eux – et parfois même labyrinthiques. Fort heureusement, loin de réduire leur traversée à une épreuve fastidieuse, le jeu a le bon goût de récompenser le joueur qui met son nez partout, en délivrant une quantité assez généreuse de bonus cachés, de vies et de power-up qui contribuent à rendre le jeu beaucoup plus abordable que ce que les premières minutes de jeu pouvaient laisser craindre.

Bien employée, votre forme d’étoile peut vous sauver la vie

On pourra ainsi trouver un laser frontal qui fait beaucoup de dégâts, un tir couvrant très pratique pour faire le ménage, des bonus de vie, de puissance, une invincibilité temporaire, des grenades ou des smart bombs supplémentaires, et même des bonus prenant la forme de cristaux et qui vous accorderont un continue supplémentaire au bout de 300 ! La bonne nouvelle, c’est qu’on prend immédiatement beaucoup de plaisir à aller traquer les blocs cachés remplis de power-up ou les grottes difficiles d’accès au fond desquelles on trouve souvent des vies. L’action est parfaite, les possibilités innombrables, et on prend très vite ses marques – et avec quel plaisir !

L’ambiance du jeu peut se montrer assez lourde

Autant en profiter pour évoquer la réalisation sublime du jeu : programmé à une époque où l’Amiga et l’Atari ST commençaient à subir de plein fouet la concurrence des premières consoles 16 bits – la Mega Drive et la PC Engine à l’époque – plus puissantes et mieux équipées, Turrican aura démontré qu’un Amiga 500 bien programmé était très largement capable de rivaliser avec les meilleurs titres du catalogue de ces machines.

Le boss final et ses trois têtes

Non seulement les graphismes sont fins, détaillés, variés et colorés, mais surtout l’animation est extrêmement détaillée et la fluidité hallucinante – et il n’y a jamais l’ombre d’un ralentissement ! Pour ne rien gâcher, la musique est excellente et les bruitages pêchus – à l’époque, il fallait vraiment sortir des monuments comme Thunder Force III pour espérer rivaliser avec ça. On ne pourra que regretter une certaine omniprésence des motifs mécaniques qui finit par lasser – le niveau organique situé vers le milieu du jeu est à ce niveau une bouffée d’air frais, à sa façon. Signalons également que, tandis que les ennemis deviennent de plus en plus coriaces et que les niveaux s’étirent, le jeu finit par s’essouffler un peu dans sa deuxième moitié – particulièrement si vous n’aimez pas jouer aussi longtemps sans interruption. Mais ce sont là des récriminations finalement assez anecdotique quand on voit à quel point le jeu est resté extrêmement ludique de nos jours, c’est même un titre sur lequel quelqu’un n’ayant jamais touché à un Amiga de sa vie pourrait parfaitement s’amuser immédiatement aujourd’hui encore. Bref, si vous n’avez jamais eu l’occasion de vous essayer à Turrican, c’est probablement le moment de le faire: je serais très, très surpris que vous le regrettiez.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1990 – Meilleur jeu d’action (ex-aequo avec The Revenge of Shinobi), Tilt n°85, décembre 1990

NOTE FINALE : 17,5/20 Si Turrican a marqué l'Amiga 500 et tous ses possesseurs au fer rouge, ce n'est pas uniquement pour avoir démontré avec brio que la machine de Commodore était en fait largement capable de rivaliser avec les consoles 16 bits qui commençaient alors à contester son hégémonie, c'est aussi et surtout pour avoir su procurer une expérience ludique de très haut niveau. Grâce à une réalisation exemplaire, à un level design ambitieux et à de très bonnes idées intelligemment grappillées ailleurs, le titre de Rainbow Arts offre un défouloir extrêmement bien conçu qui n'a pratiquement pas pris une seule ride. Certes, le jeu peut virer à l'épreuve d'endurance dans ses derniers niveaux - particulièrement si vous ne raffolez pas des parties à rallonge - mais vu à quel point la jouabilité a été ciselée comme un bijou, on en redemande. CE QUI A MAL VIEILLI : – Niveaux qui tirent un peu en longueur, surtout sur la fin – Pas de mot de passe ni de sauvegarde pour des parties d'1h30 à 2h – Décors parfois redondants

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Turrican sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : Rainbow Software GmbH
Éditeur : Rainbow Software GmbH
Date de sortie : Avril 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme cela a déjà été évoqué, Turrican a été développé parallèlement sur Amiga et Commodore 64 – deux machines très différentes en termes de possibilités techniques. Difficile de ne pas se montrer curieux à l’idée de lancer le titre de Rainbow Arts sur l’ordinateur 8 bits, afin de voir comment la première machine de Commodore s’en sort avec un jeu qui en demandait déjà beaucoup à l’Amiga 500. Dès le lancement, on est immédiatement mis à l’aise par une voix digitalisée de très bonne qualité qui vous lancera du rire sardonique en terminant par le fameux « Remember : shoot or die ! » Alors qu’on aurait pu s’attendre à un lot de coupes et d’adaptations pour permettre à la version Commodore 64 de rivaliser à hauteur de ses propres moyens avec la version Amiga, on sera surpris de constater que non seulement l’interface n’a pas changé, non seulement la jouabilité n’a été amputée de strictement aucune possibilité, mais les niveaux eux-mêmes reprennent le plan de ceux de la version Amiga à l’identique ! Les blocs cachés sont toujours là, tout comme les multiples possibilités d’exploration – et le mieux reste que le C64 affiche tout cela de manière parfaitement fluide, rendant la jouabilité toujours aussi irréprochable. De manière étrange, si le premier niveau se fera avec les seuls bruitages en guise d’accompagnement sonore, la musique refera son apparition dans les stages suivants – et vu sa qualité, on ne peut que regretter qu’elle se soit ainsi faite attendre. On ne peut qu’admirer le savoir-faire évident qu’aura nécessité la programmation de ce logiciel irréprochable : évidemment, c’est moins beau que sur Amiga, mais parvenir à conserver des sensations de jeu aussi proches tient véritablement du miracle. Difficile d’en exiger plus d’un C64, pour ce qui restera sans discussion possible comme un de ses tout meilleurs jeux d’action.

Un jeu sur Commodore 64 qui offre les mêmes sensations qu’un des meilleurs titres de l’Amiga ? C’est possible !

NOTE FINALE : 16/20

Que Turrican sur Commodore 64 ne puisse pas rivaliser avec la réalisation de la version Amiga ne sera une surprise pour personne, considéré le gouffre béant entre les capacités des deux machines. La vraie claque, cependant, est que le jeu parvienne à rivaliser avec tout le reste ! Non seulement pratiquement rien n’a été amputé depuis la version Amiga, mais la jouabilité et la fluidité de l’ensemble sont proprement incroyables, et les sensations de jeu équivalentes – de quoi donner des complexes à pratiquement tout le catalogue vidéoludique de la machine. Une véritable leçon de programmation, et un des meilleurs jeux de la machine.

Version Amstrad CPC

Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : Rainbow Software GmbH
Date de sortie : Septembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Ah, si tous les portages CPC avaient été de cette qualité…

Rainbow Arts et Factor 5 étaient capables de véritables miracles sur la machine de Commodore, c’était acquis. La vraie question était de savoir comment les équipes responsables des portages allaient s’en sortir sur les autres machines, à plus forte raison sans le talent des deux sociétés allemandes dans leurs bagages. Pour le CPC et le ZX Spectrum, c’est Probe Software qui s’y est collé, pour quel résultat ? Eh bien… plutôt bon, pour être honnête. Certes, la musique a disparu, c’est moins fluide, c’est un tantinet moins jouable, le Turrican ressemble un peu à un astronaute, mais la réalisation est sans difficulté dans les meilleures qu’on ait pu voir sur la machine d’Amstrad. Pour ne rien gâcher, le contenu du jeu est toujours présent en intégralité (sauf la musique, donc, pour ceux qui suivent), bref, c’est du travail du haut niveau, et un jeu qui n’a pas dû décevoir grand monde parmi les possesseurs de CPC.

NOTE FINALE : 15,5/20

Marcher dans les traces de Factor 5 pour adapter un des meilleurs titres parus sur Amiga et Commodore 64 n’était vraiment pas une mission facile, mais Probe Software l’a parfaitement accomplie pour ce portage CPC de Turrican. Si le jeu est légèrement moins maniable et moins fluide que sur les machines de Commodore, difficile de ne pas être impressionné par le travail réalisé par la société britannique – c’est, à coup sûr, une version à la hauteur de la légende du titre original.

Version Atari ST

Développeur : Factor 5 GmbH
Éditeur : Rainbow Software GmbH
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’Atari ST était un ordinateur capable de nombreux miracles, mais la moitié de ces miracles consistaient justement à faire oublier à quel point la machine était, à bien des niveaux, techniquement inférieure à l’Amiga 500. Quand on sait que c’est une deuxième équipe issue de Factor 5 qui s’est chargée de ce portage, on tend à être rassuré et on a raison : c’est très proche de la version Amiga. Alors certes, la fenêtre de jeu est légèrement plus petite, la qualité sonore a baissé (le thème de l’écran principal crache plus qu’il ne joue), mais on est très loin de se sentir roulé, surtout quand on compare cette superbe adaptation à un ratage majeur comme l’était Shadow of the Beast sur la même machine. Toujours aucun ralentissement à déplorer, et la jouabilité est parfaite : le pied.

Factor 5, faiseurs de miracles

NOTE FINALE : 17/20

On peut se prendre à rêver en imaginant à quoi aurait ressemblé le catalogue de l’Atari ST si tous les programmeurs ayant approché la machine avaient été du niveau de ceux de Factor 5 : nul doute que la guerre ouverte avec l’Amiga aurait alors été un peu plus serrée. Ce Turrican superbement porté sur la machine d’Atari en est un parfait exemple : c’est si bien programmé que c’en est presque exactement à la hauteur d’une version qui tirait déjà le maximum de l’Amiga 500. Un jeu à ne pas laisser passer sur Atari ST.

Version ZX Spectrum

Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : Rainbow Software GmbH
Date de sortie : Juin 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, disquette 3″, microdrive
Contrôleurs : Clavier, joystick Kempston
Version testée : Version disquette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko*
*Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko
Pour un peu, on se croirait presque sur CPC – et, pour une fois, ce n’est parce que la version CPC a été bâclée

On sait en quoi consistait la majorité des titres parus sur ZX Spectrum : réalisation quasi-monochrome, ersatz bon marché des versions proposées sur des machines plus prestigieuses, plus performantes et surtout plus chères. Mais on se souvient aussi que Probe Software avait accompli des miracles avec la version CPC de Turrican, alors… Les miracles ont beau avoir leurs limites, on pourra quand même se montrer impressionné par cette version ZX Spectrum, qui doit être une des plus détaillées et des plus colorées jamais publiées sur la machine de Sinclair. Surtout, le jeu est toujours aussi immense, et même s’il faut désormais composer sans la musique et avec une vitesse et une fluidité qui n’ont plus rien à voir avec les versions 16 bits, on ne peut qu’apprécier à sa juste valeur le travail qui a été réalisé sur cette adaptation.

NOTE FINALE : 13,5/20

D’accord, c’est moins fluide ; OK, c’est moins maniable ; évidemment que c’est moins beau que sur Amiga ou Atari ST. Mais ce Turrican sur ZX Spectrum est toujours aussi impressionnant de par sa taille, son action et les possibilités qu’il offre. Alors certes, on comptera plus sur la mémoire et l’observation que sur l’adrénaline et les réflexes, mais on n’a quand même pas souvent eu l’occasion de bénéficier de jeux de ce niveau sur la machine de Sinclair.

Version Amiga CDTV

Développeur : Factor 5 GmbH
Éditeur : Rainbow Software GmbH
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version CD-ROM
Configuration minimale : –
C’est tout pareil, comme qui dirait

On se souviendra de la tentative – assez pitoyable, a posteriori – de Commodore pour rivaliser avec le CD-i en vendant un Amiga 500 doté d’un lecteur CD à un prix prohibitif. Non seulement le CDTV aura, au final, été un bide absolu, mais quand on lance Turrican sur cette machine, on comprend immédiatement pourquoi. Quoi ? Le jeu serait subitement devenu mauvais ? Ah non, je vous rassure : il n’est rien devenu du tout. En fait, c’est très exactement le même jeu de 950ko copié sur un CD. De la musique numérique ? Pourquoi faire ? Même pas une animation en plus, rien, le néant – pas franchement ce qu’on pourra considérer comme un argument de vente.

NOTE FINALE : 17,5/20

Parler de « version Amiga CDTV » pour Turrican est clairement un abus de langage : ce n’est ni un portage, ni une adaptation, c’est simplement le même jeu, à l’octet près, que sur Amiga 500, copié sur un CD-ROM qui sonne creux à 99,9%. Évidemment, le titre n’a pas souffert du transfert, mais on ne pourra que s’agacer qu’il n’ait strictement rien gagné au passage. Au moins, vu le devenir commercial de l’éphémère arnaque de Commodore, on ne pourra pas trop en vouloir à Factor 5 d’avoir eu la clairvoyance de ne pas consacrer de temps ni de moyens à cette version.

Version Game Boy

Développeur : The Code Monkeys, Ltd.
Éditeur : Accolade, Inc.
Date de sortie : 30 septembre 1991 (Amérique du Nord) – 24 mars 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Turrican sur Game Boy ? L’idée a, à première vue, de quoi laisser sceptique. Non que le jeu de Rainbow Arts ne puisse espérer proposer une version décente sur un système 8 bits – les très bons portages informatiques sont là pour nous prouver le contraire – mais la petitesse de l’écran, elle, présente des problèmes évidents dans un jeu basé sur les réflexes et l’anticipation. Heureusement, les petits gars de chez The Code Monkey, responsables des versions consoles, ont été assez intelligents pour prendre la seule décision valable : rapetisser au maximum les sprites. Et vous savez quoi ? C’est très jouable ! Bon, d’accord, ce n’est pas toujours facile de savoir où est-ce qu’on va atterrir lorsqu’on saute, et l’interface souffre un peu du manque de boutons sur la console (les smart bombs, par exemple, demandent d’appuyer deux fois de suite sur Select), mais c’est fluide, efficace et amusant – ce qui était très exactement ce qu’on était en droit d’attendre de mieux. Sachant qu’en plus, rien n’a été raboté en terme de contenu – et qu’on a même eu la très bonne idée d’ajouter le système de mots de passe qui manquait cruellement aux autres versions – difficile de bouder cette excellente adaptation.

Hé, mais… c’est pas mal du tout, en fait !

NOTE FINALE : 15/20

Turrican sera décidément parvenu à éviter tous les pièges qui se dressaient sur sa route, quelle que soit la machine à l’accueillir. Ils étaient pourtant nombreux, sur Game Boy, mais The Code Monkey est parvenu à programmer une version inchangée en terme de contenu, jouable, lisible et fluide – une sacrée prouesse. De quoi laisser rêveur en pensant à tout ce qu’on pouvait tirer de cette petite console.

Version Mega Drive

Développeur : The Code Monkeys, Ltd.
Éditeur : Accolade, Inc.
Date de sortie : Juillet 1991 (Amérique du Nord) – Septembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

S’il y avait une machine qui se prêtait excellemment bien à un portage de Turrican, c’était bien la Mega Drive. Vu les miracles accomplis sur un Amiga 500, on avait hâte de voir ce que pourrait donner la 16 bits de SEGA en plaçant à ses commandes une équipe capable d’en tirer le meilleur… Malheureusement, on n’en a visiblement pas trouvé, on a donc décidé de reprendre la version Amiga à l’identique. Si c’est un peu décevant, ce n’est pas un énorme défaut en soi, surtout quand on voit avec quelle fluidité tourne le jeu – de quoi enterrer la version originale, qui était pourtant déjà un modèle du genre. La musique, par contre, n’est vraiment pas à la hauteur. Le premier vrai problème, cependant, se présente lorsque l’on désire accéder à n’importe laquelle des armes secondaires : il faudra appuyer sur C jusqu’à avoir sélectionné le pouvoir désiré, puis appuyer sur le bouton de tir. Oui mais voilà : c’est beaucoup trop long à réaliser pour être utilisé dans le feu de l’action, et il aurait fallu que le jeu bascule en pause quand on choisit une arme. C’est d’autant plus criant que quelqu’un a eu la très mauvaise idée d’augmenter la difficulté du jeu en flèche : non seulement il y a beaucoup plus d’adversaires, non seulement ils sont beaucoup plus rapides, mais en plus, votre jauge de vie vous aidera à peine à survivre pendant plus d’un dixième de seconde en cas de contact avec un ennemi. C’est absolument atroce – au point que finir le premier niveau relève de l’exploit – et c’est surtout un bon moyen de rendre totalement infect un jeu très amusant. À fuir.

Heu… attendez… c’était vachement moins dur, dans mon souvenir…

NOTE FINALE : 09,5/20

Quelle douche froide ! On attendait la version ultime de Turrican, celle capable de renvoyer l’Amiga 500 dans ses cartons, et non seulement on se retrouve avec une copie à peine honnête, moins jouable et avec une musique très oubliable, mais en plus la difficulté est devenu si ridiculement élevée qu’on peut parler de véritable sabotage. Difficile de s’amuser quand le simple fait de franchir trois écrans du jeu tient du miracle – alors imaginez la souffrance pour le mener à son terme… Allez hop, balancez-moi ça tout de suite par la fenêtre et allez jouer à un bon jeu à la place.

Version PC Engine

Développeur : The Code Monkeys, Ltd.
Éditeur : Accolade, Inc.
Date de sortie : Novembre 1991 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : HuCard de 4Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Après le ratage en beauté de la version Mega Drive de Turrican, on est déjà un peu plus méfiant au moment d’aborder l’adaptation sur PC Engine. Aura-t-on droit à un portage fidèle à la version Amiga ou bien à une nouvelle entrée dans la catégorie « jeux totalement impossibles » ? Malheureusement, on penche clairement vers la deuxième catégorie : si le jeu est légèrement moins difficile que sur Mega Drive, la résolution limitée complique les choses, et les problèmes de jouabilité observés sur Mega Drive sont toujours vrai ici. On remarquera, par exemple, qu’il est très fréquent de se transformer en boule sans le faire exprès, et qu’utiliser les autres armes secondaires tient de l’impossibilité totale. On meurt toujours beaucoup trop vite, et la réalisation n’a pas progressé, bref, c’est encore un coup dans l’eau.

Résolution limitée + beaucoup trop de monde à l’écran = mauvais mélange

NOTE FINALE : 09/20

Prenez tous les défaut de la version Mega Drive, ajoutez-y une résolution limitée qui pénalise l’anticipation, et vous avez Turrican sur PC Engine : un jeu beaucoup trop difficile pour son propre bien, et qui verse du côté de l’épreuve plutôt que de celui du moment ludique. Les joueurs friands de ce type de défi pourront s’arracher les cheveux pendant de longues heures, les autres lui préfèreront sans aucun doute une des dizaines de très bons shoot-them-up sur la machine.

The Immortal

Développeur : Sandcastle
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Titres alternatifs : ウイザード オブ イモータル (Wizard of the Immortal, Japon), QUByte Classics : The Immortal by PIKO (Switch)
Testé sur : AmigaApple ][gsAtari STNESMega DrivePC (DOS)
Disponible sur : Antstream, Linux, Macintosh, PlayStation 4, Switch, Windows, Xbox One, Xbox Series
En vente sur : GOG.com (Linux, Macintosh, Windows), Nintendo eShop (Switch)

Version Amiga

Date de sortie : Septembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Il était magicien, il était à la fois votre maître, votre mentor et votre ami, et son nom était Mordamir. Vous ne l’avez plus revu depuis de très nombreuses années, et vous pensiez qu’il était mort. Jusqu’à ce que les rêves arrivent, de manière insistante, pour vous parler de lui et des ruines d’une ville ancienne : Erinoch, rasée par les dragons voilà plus de 1000 ans, et le labyrinthe qui s’étend sous ses fondations. Vous vous êtes rendu sur place, et vous avez trouvé le message de votre vieux professeur qui, s’adressant à vous, vous a demandé de le rejoindre au fin-fond du donjon pour le libérer. Un seul détail cloche. Dans ce message, Mordamir vous a appelé Dunric… et ce n’est pas votre nom.

Ainsi débute The Immortal, sans fioriture, sans introduction, sans même un écran-titre : un magicien, appuyé sur son bâton, l’épée à la main comme le premier Gandalf venu, dans une salle souterraine où il découvre le message évoqué plus haut. Il franchit l’unique porte, pour découvrir un cadavre dans une mare de sang. Une rapide fouille révèle un parchemin de boule de feu et un anneau. Un gobelin s’approche du magicien, visiblement prêt à en découdre : le sorcier le grille sur place. Un peu plus bas, un autre gobelin est aux prises avec un guerrier humain, une nouvelle boule de feu vient à bout du monstre. Le guerrier reconnaissant s’adresse alors au vieil homme pour lui donner une clé et quelques conseils : le début d’une longue expédition qui demandera de s’enfoncer tout en bas des huit étages du donjon.

Intrigué ? Le fait est que le titre publié par Electronic Arts se montre immédiatement immersif, surtout pour tous les joueurs qui ont connu ces nuits passées, seul dans le noir, devant l’écran de leur ordinateur. Le jeu se présente sous la forme d’une vue en 3D isométrique dans laquelle vous serez libre de vous diriger dans les huit directions.

Les chausses-trappes, les projectiles, les pièges mortels et les combats délicats pullulent

La jouabilité est très simple : on se déplace au joystick, on affiche l’inventaire avec la barre espace. Que l’on se rapproche d’un objet intéressant ou d’un corps à fouiller, et le jeu affiche un message pour nous présenter nos trouvailles. En cas de combat, votre héros (le magicien évoqué depuis le début de l’article, au cas où vous n’auriez pas encore compris), se retrouve pris dans un corps à corps duquel il ne peut pas fuir. Il peut éviter les coups en allant à gauche ou à droite, armer une frappe puissante en se penchant vers l’arrière, et frapper l’ennemi en poussant le stick dans sa direction ; autant dire que les réflexes et l’observation seront primordiaux pour ne pas vous faire tailler en pièces, car la posture de votre adversaire vous enseignera de quel côté il s’apprête à frapper. Le bouton du joystick sera utilisé pour jeter certains sortilèges préalablement sélectionnés dans votre inventaire sur demande. Et voilà toute l’interface.

La vraie trouvaille du jeu est que toute votre exploration se fera à l’instinct. Chaque rencontre, chaque pièce du donjon, comporte son lot de pièges, d’énigmes, de surprises, et il n’existe bien souvent qu’une seule façon de les franchir. Vous allez donc devoir apprendre à réfléchir vite et bien, à vous montrer logique, réactif… et à mourir très, très souvent. Le titre The Immortal pourrait en effet apparaître comme une boutade, tant le concept même du jeu développé par Sandcastle est l’archétype absolu du die-and-retry.

Les chausses-trappes, les projectiles, les pièges mortels et les combats délicats pullulent, et en cas d’erreur, c’est très souvent la mort immédiate qui s’offrira à vous. Les indices sont rares, et il arrivera fréquemment que vous ne compreniez la façon de franchir un passage délicat qu’après y avoir laissé la vie à de très nombreuses reprises. Oubliez les sauvegardes : vous aurez juste le droit à un mot de passe au commencement de chaque étage, et chaque trépas vous renverra imparablement au début du niveau – oui, même quand vous mourrez d’avoir raté l’échelle qui vous emmenait au niveau suivant pour aller vous écraser lamentablement au fond du puits. Pas de point de passage, même après dix bonnes minutes de souffrance.

Fort heureusement, le manuel dispense à sa façon une forme intelligente de protection de copie, en vous livrant dans ses pages la solution de tout le premier étage, et en vous glissant des nombreuses informations très précieuses pour les niveaux à suivre. Les petits malins les plus observateurs y trouveront même le mot de passe du deuxième niveau… Autant dire que cela ne sera sans doute pas de trop, car même si les niveaux sont généralement assez courts, on devra apprendre à les connaître centimètre par centimètre pour espérer y progresser, et trépasser prématurément pour avoir voulu franchir un peu trop vite une difficulté qu’on était pourtant déjà parvenu à contourner cent fois ne fait que croître en frustration avec le temps qui passe.

La bonne nouvelle, c’est que non seulement l’ambiance fait mouche et qu’on se sent réellement isolé dans un donjon, mais qu’en plus la visite sait rester intéressante sur la durée de plusieurs manières. La première, c’est que ces fameuses ruines sont vivantes : les gobelins que vous affronterez au début du jeu pourraient devenir de précieux alliés, voire solliciter votre aide selon les circonstances. Vous pouvez parfois surprendre des adversaires en train de se battre entre eux, vous croisez des personnages amicaux ou même des vendeurs, et les dizaines de façons dont votre personnage peut trouver la mort ont toutes une représentation graphique qui fait qu’on y croit à fond.

C’est paradoxalement la difficulté de l’aventure qui transforme chaque nouvel étage en récompense

La deuxième, c’est que le scénario prend également le temps de se développer à sa façon, souvent par le biais des rêves que fera votre personnage lorsqu’il trouvera un tas de paille pour y dormir un moment. Plus on s’enfonce dans les ruines et plus on a envie de comprendre ce qui s’y joue, l’identité et le rôle de ce fameux Dunric, et la raison qui aurait pu conduire Mordamir à s’aventurer ici en premier lieu. Les informations sont délivrées au compte-goutte, avec un certain sens de la mise en scène, et il faut avouer qu’on a réellement envie de connaître le fin mot de l’histoire. Le combat final, épique à souhait, demandera de faire preuve de réflexion autant que de réflexe, pour venir à bout des ultimes embuches tout en collectant les derniers éléments qui nous manquaient pour finalement comprendre le rôle que l’on était censé jouer dans cette épopée.

C’est d’ailleurs la plus grande réussite de The Immortal, sans doute un des premiers titres à nous donner à ce point le sentiment de participer à une aventure graphique où n’importe quoi peut arriver, avec ce soupçon d’adrénaline et cet atmosphère oppressante qu’on vivait parfois, tard le soir, en lisant un livre fantastique.

Certes, la maniabilité est parfois frustrante, et il faut vraiment avoir les nerfs solides pour garder son calme lorsque l’on doit retenter une séquence pour la millième fois après avoir eu le malheur d’être allé un pixel trop loin. Mais c’est paradoxalement la difficulté de l’aventure qui transforme chaque nouvel étage en récompense, et chaque nouvelle résolution en triomphe. Finir le jeu en trichant n’a aucun sens, tant la satisfaction qu’il procure repose précisément sur cette sensation d’être un héros, à notre tour, pour avoir surmonté une aventure que tant d’autres auront préféré abandonner, écœurés, avant d’arriver à son terme. Si c’est ce petit frisson que vous cherchez dans les jeux d’antan, plongez-vous dans The Immortal, car vous ne le regretterez pas. Dans le cas contraire, faites demi-tour et fermez soigneusement la porte : votre santé mentale est peut-être à ce prix.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20 The Immortal est un titre qu'il est très difficile de classer dans une catégorie à part entière : action, aventure et réflexion s'y mêlent harmonieusement dans une expédition prenante à la recherche de votre mentor. La mémoire et la patience seront malgré tout vos deux meilleures armes : chaque erreur est mortelle, chaque expérience met en jeu votre vie, et maîtriser chacun des huit niveaux du donjon demandera de le recommencer inlassablement jusqu'à parvenir à accomplir une longue série d'actions précises. C'est à la fois la grande force et la seule faiblesse d'un titre qui symbolise à la perfection le concept du die-and-retry : se relever et réessayer, encore et encore. Les amateurs du genre se laisseront sans difficulté prendre au jeu, happés par la fantastique ambiance qui donne réellement l'impression de s'enfoncer dans un donjon et curieux de saisir le fin mot de l'histoire. Les autres risqueront de se décourager bien avant d'en voir le terme. CE QUI A MAL VIEILLI : – Combats confus, particulièrement si vous êtes derrière un élément de décor – La 3D isométrique complique les déplacements et les actions – Logique des énigmes du jeu pas toujours facile à saisir – C'est vraiment dur – Joueurs impatients ou nerveux, passez votre chemin

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Immortal sur un écran cathodique :

Version Apple ][gs

Développeur : Sandcastle
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe

Pour la petite histoire, The Immortal aura été le dernier jeu publié par Electronic Arts sur Apple IIgs. Il y a de pires façons d’effectuer sa sortie : le jeu est, sans surprise, très proche de la version Amiga. Graphiquement, les deux versions sont jumelles, mais la qualité sonore est clairement supérieure sur la machine d’Apple. Autre petite amélioration : l’Apple IIgs reconnaissant les joysticks à deux boutons, plus besoin de passer par le clavier pour afficher l’inventaire. En-dehors de ces quelques légères nuances, le jeu est très exactement identique à ce qu’il était sur Amiga.

NOTE FINALE : 16/20

Avec The Immortal, Electronic Arts aura tiré en beauté sa révérence à la machine d’Apple. Le jeu est toujours aussi bon que sur Amiga, et même légèrement meilleur grâce à une réalisation sonore retravaillée et à une maniabilité qui ne nécessite plus de passer du joystick au clavier. Un bon jeu de plus dans la ludothèque de la machine.

Version Atari ST

Développeur : Sandcastle
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Septembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 1Mo
Écran couleur requis
Système de sauvegarde par mot de passe

The Immortal ayant été développé conjointement sur Amiga et Atari ST, on sait dès le début qu’on ne devrait pas trouver d’énormes différences entre les deux versions. Impression confirmée dès le lancement du jeu : les graphismes sont identiques au pixel près (on pouvait quand même faire, quoi qu’on en dise, de très belles choses avec 16 couleurs), tout comme l’animation, le contenu et jusqu’aux mots de passe. En revanche, du côté sonore, la musique a clairement perdu en qualité, tout comme les bruitages, quasi-inexistants.

NOTE FINALE : 15/20

The Immortal sur Atari ST est un bon jeu, c’est indéniable, mais la qualité sonore n’y est clairement pas à la hauteur des autres versions 16 bits. Le jeu est fort heureusement toujours aussi prenant, mais on sent que l’atmosphère y a malgré tout laissé quelques plumes.

Version NES

Développeur : Sandcastle
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par bObba
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 3Mb – Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La NES aura été le seul système 8 bits à accueillir une adaptation de The Immortal – un choix étrange, à première vue, tant la console de Nintendo ne semblait pas la mieux armée pour reproduire la formidable atmosphère du jeu original, mais on peut également comprendre qu’Electronic Arts n’ait pas souhaité laisser passer un marché aussi porteur que celui de la NES. Graphiquement, comme on pouvait s’en douter, le portage n’a aucune chance de rivaliser avec les versions 16 bits – mais l’honnêteté force à reconnaître qu’il s’en sort plutôt bien.

La palette de couleurs est limitée et les sprites beaucoup plus petits, mais l’ambiance n’est pas trop trahie et l’animation est bonne. En revanche, je ne sais pas qui a décidé que le titre original, pourtant réputé comme l’un des plus difficiles de la ludothèque de l’Amiga ou de l’Atari ST, était trop simple. Car cette adaptation regorge de pièges qui sont absents des autres versions – non, franchement, ça n’était pas nécessaire ! Dès le premier écran, on peut se faire gober par des vers géants, et votre première rencontre avec des gobelins se déroulera au milieu des boules de feu. Le jeu a également son lot de coupes – le niveau de l’araignée géante a disparu, par exemple – mais les divers passages marquants comme le tapis volant, le niveau aquatique et le boss final, eux, sont toujours là. Le meilleur ajout, cependant – qui perdurera d’ailleurs dans les portages suivants – est celui d’un écran à part pour les combats, qui offre une action beaucoup plus claire et l’apparition d’une jauge d’endurance, ainsi que la possibilité de voir les points de vie de l’adversaire en même temps que les vôtres.

NOTE FINALE : 14,5/20

The Immortal sur NES a acquis sa propre légende : celle d’un des titres les plus difficiles du catalogue de la console, qui était pourtant bien servie de ce côté. L’expérience, déjà très exigeante sur ordinateur, devient ici cauchemardesque, tant absolument tout ce que contient chaque écran est pensé pour vous faire côtoyer la mort. Malgré tout, pour les amateurs de défi, la réalisation correcte associée à un système de combat plutôt moins frustrant que dans la version originale en font une curiosité à essayer – et une épreuve supplémentaire pour ceux qui avaient vaincu le jeu sur les autres systèmes.

Version Mega Drive

Développeur : Electronic Arts, Inc.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Novembre 1991 (États-Unis, Europe) – 10 août 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Hardware oblige, la Mega Drive est généralement la candidate rêvée pour accueillir des portages de jeux parus sur Amiga. Electronic Arts se sera donc précipité dans la brèche dès 1991 pour offrir une version qui, contrairement à l’adaptation parue sur NES, est très fidèle à l’originale. Les graphismes sont curieusement un peu moins colorés, mais certains décors sont également plus travaillés – on trouve enfin quelques nuances dans l’éternel carrelage qui couvre 95% du sol du jeu. La musique s’en sort assez bien, elle aussi.

Surtout, le titre a l’excellente idée de reprendre le système de combat dans un écran à part de la version NES, rendant ceux-ci bien plus lisibles et plus techniques, et va même jusqu’à rajouter une dose de gore très imaginative ! En effet, vous pourrez voir vos malheureux adversaires se faire couper le crâne en deux, exploser la tête d’un coup de bâton ou réduire en cendres – un petit ajout purement cosmétique mais qui permet de se laisser surprendre par l’issue de chaque affrontement. La jouabilité m’a parue irréprochable, à part pendant les combats où elle demandera un temps d’adaptation. Pour le reste, le jeu est d’une fidélité presque totale à ce qui a été observé sur Amiga – à une énorme différence près : vous ne recommencez plus au début du niveau en cas de trépas, mais dans la pièce précédente ! Autant dire que la difficulté n’a plus rien à voir avec celle de la version originale, et que vous devriez cette fois pouvoir mener l’aventure à son terme sans passer des semaines à vous arracher les cheveux.

NOTE FINALE : 16,5/20

En dépit d’une réalisation qui aurait pu tirer un peu mieux parti des capacités de la console, The Immortal sur Mega Drive est une vraie réussite. Non seulement l’expérience originale est toujours là, mais elle a en plus été peaufinée grâce à quelques ajouts esthétiques bienvenus, à une difficulté revue à la baisse, et surtout au système de combat emprunté à la version NES et qui fait énormément de bien aux nombreux affrontements du jeu. Une excellente trouvaille, et certainement une version à privilégier à l’originale.

Version PC (DOS)

Développeur : Kenneth L. Hurley
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Novembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Carte sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Tandy/PCjr
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dernière machine servie, le PC n’aura pour une fois pas été galvaudé, en proposant l’une des meilleures version de The Immortal. Graphiquement, si le jeu ne tire clairement pas parti des 256 couleurs de la palette du VGA, il n’en reste pas moins toujours aussi joli, et même un peu plus, grâce à des teintes un peu mieux choisies. Dommage, en revanche, qu’on ne retrouve pas les fioritures apportées par la version Mega Drive : fini les animations gores des combats et les variétés dans les motifs du sol. En revanche, le système de combat amélioré, lui, est toujours là et fait toujours autant de bien. Le jeu est jouable au clavier ou au joystick – le clavier apportant d’ailleurs une précision salutaire qui rend le jeu d’autant moins difficile. Niveau musical, si le titre s’en sorte déjà très bien avec une AdLib, il entre encore dans une autre dimension avec une Roland MT-32. La musique, planante, devient alors aussi oppressante que magnifique, et les bruitages sont clairement les meilleurs entendus toutes versions confondues – c’est bien la seule fois que vous pourrez sursauter en ouvrant une porte. Le contenu du jeu reste identique à celui de la version Amiga, à part pour l’ajout d’un écran-titre.

NOTE FINALE : 16,5/20

The Immortal sur PC est clairement la meilleure version parue sur ordinateur, particulièrement si vous avez la chance de posséder une Roland MT-32. Désormais dotée d’une réalisation irréprochable, d’une maniabilité précise et d’un système de combat bien mieux pensé, cette adaptation ne pêche que par la disparition des quelques animations et graphismes supplémentaires observés sur Mega Drive, mais on le lui pardonnera aisément. Un très bon moyen de découvrir cet excellent jeu.

PowerMonger

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Titres alternatifs : Power Monger (écran-titre, Mega Drive), パワーモンガー (Japon), パワーモンガー 魔将の謀略 (Power Monger : Mashō no Bōryaku, Japon, Super Famicom)
Testé sur : AmigaAtari STPC-98Sharp X68000FM TownsPC (DOS)Mega DriveSuper NintendoMacintoshMega-CD
L’extension du jeu : PowerMonger : World War I Edition

Version Amiga

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Croyez-le ou non, mais les idées de jeu vidéo ne viennent pas toujours comme des illuminations en se réunissant en équipe pendant six heures avec comme réunion thématique « Qui a une idée pour notre prochain jeu ? ». On se souvient comment Will Wright, par exemple, avait enfanté du génial SimCity simplement en travaillant sur un éditeur de niveau conçu pour un autre jeu. Eh bien figurez-vous qu’il est arrivé un peu la même chose à Peter Molyneux – oui, le célèbre chantre du « tout ce que vous avez toujours rêvé de voir dans un jeu et que je vous promets pour mon prochain titre alors que l’équipe n’est même pas au courant » a derrière lui une très longue carrière, pour ceux qui l’ignoreraient. Et c’est précisément en tâtonnant sur le concept de Populous, à la fin des années 80, que naquirent les premières ébauches d’un monde virtuel beaucoup plus axé sur la gestion militaire. Si la direction choisie pour le premier God game de l’histoire aura finalement été tout autre, cette piste d’un jeu de stratégie reposant sur autre chose que de simples enchaînements de combats en tour par tour sembla suffisamment pertinente pour en faire un jeu à part entière. Ainsi naquit PowerMonger.

La bataille fait rage au milieu de la dernière ville, comme vous le montrent ces petits anges s’envolant au-dessus des corps des trépassés

Le titre publié par Bullfrog Productions en 1990 vous place dans les royales bottes du souverain de Miremer, qui vient de voir son royaume s’effondrer – littéralement. Chassé de ses terres par un bouleversement sismique avec une poignée de ses sujets, notre bon roi aura parcouru les océans pendant plusieurs semaines avant de trouver une terre étrangère au sol fertile et aux vertes prairies. Problème : ce fameux pays ayant le tort d’être déjà gouverné par quantité de petits seigneurs de guerre, le suzerain, pas franchement décidé à leur servir de vassal, décide donc tout simplement de recomposer son royaume sur place – avec ou sans l’accord des seigneurs locaux. Vous allez donc prendre la tête des quelques hommes qui lui restent afin de conquérir les 195 (!) territoires dont est composé ce pays inconnu, par la force des armes, mais aussi par la ruse ou le commerce. Tout un programme.

Cherchez à aller un peu trop vite et vous pourriez rapidement le regretter

Sitôt la première partie lancée (que ce soit par la campagne de 195 niveaux ou même par un générateur de cartes aléatoires, au cas où vous n’auriez pas encore votre compte), le lien avec l’interface de Populous saute immédiatement aux yeux. On retrouve la vue extrêmement caractéristique en 3D isométrique, avec les boutons répartis de part et d’autre de la fenêtre de jeu, en bas de l’écran. La carte du jeu a été basculée à gauche, au-dessus d’une balance qui symbolisera le rapport de force des armée en présence (et où le plateau représentant votre puissance est placé à droite). Première nouveauté : le terrain est désormais représenté en vraie 3D, ce qui explique à la fois qu’il soit possible de le faire pivoter et la présence d’une boussole pour vous aider à vous y retrouver. Deuxième changement : la présence d’un ou plusieurs personnages surplombant la fenêtre de jeu ; ceux-ci représentant en fait vos généraux, soit celui avec lequel vous commencez la partie à l’extrême gauche auquel viendront éventuellement s’ajouter ceux que vous aurez soudoyés, avec qui vous vous serez alliés ou qui se seront rendus.

Les premiers niveaux se résoudront très vite

Ces généraux représenteront un peu, à leur manière, le principe des « groupes » qui fera son apparition plus tard dans le canon de la stratégie en temps réel : chaque armée sous votre contrôle est irrémédiablement liée à un commandant, et donner des ordres à celui-ci revient à en donner à toute son armée, à propos de laquelle vous pourrez obtenir les informations principales en cliquant sur les médailles des capitaines ou en consultant les jauges dans la partie supérieure de l’écran.

Le jeu prend en compte les saisons, et partir en guerre en plein blizzard n’est pas une bonne idée

Le concept est d’ailleurs employé d’une façon assez réaliste, car si votre commandant principal répondra immédiatement à vos sollicitations, les autres devront attendre d’avoir reçu des consignes de lui par le biais d’un pigeon voyageur, ce qui signifie que coordonner les assauts de plusieurs armées peut s’avérer complexe.

Dommage qu’on ne puisse jamais réellement savoir ce à quoi aboutiront nos recherches

Coordonner ? Oui, car le jeu est, surprise, en temps réel, deux ans avant Dune II ! Il est d’ailleurs surprenant que PowerMonger n’apparaisse pratiquement jamais dans les listes des pères fondateurs de la stratégie en temps réel, car c’est pourtant très exactement ce qu’il est – même si l’aspect « gestion » qui est une des marques caractéristiques du genre n’est que très peu présent ici. En effet, le jeu ne vous propose jamais de construire le moindre bâtiment : vous démarrez chaque niveau à la tête d’une petite armée, sans que les résultats de vos campagnes précédentes n’aient aucune influence sur la taille ou la composition de celle-ci. Vos hommes sont de bons soldats, mais ils commencent mal équipés et avec des réserves de nourriture limitées. Le principe du jeu va donc être de vous intéresser aux différentes villes dispersées sur la carte et de chercher à les conquérir, à les corrompre ou à vous allier à elles jusqu’à ce que la balance évoquée plus haut penche intégralement de votre côté, après quoi, vous pourrez vous retirer et passer au niveau suivant. Mais comment fonctionne une conquête, au juste ?

Raser des forêts entières ne sera pas sans conséquences

Vu votre puissance limitée en début de partie, votre premier objectif sera certainement de trouver un petit village accueillant et d’en faire votre camp de départ. Étant donné qu’à ce stade du jeu, vous n’avez pas franchement les ressources pour corrompre, ni les arguments pour demander une alliance, la solution militaire est certainement la plus appropriée. Vous pourrez donc vous lancer à l’assaut du village, en sélectionnant un niveau d’agressivité parmi trois dans les icônes à gauche de l’interface, et qui sera en réalité la clé de bien des aspects du titre.

Votre armée en formation, prête à aller mettre une bonne dérouillée à l’adversaire

Pour le comprendre, imaginons que vous ayez remporté la victoire. Il pourrait être intéressant de recruter des hommes au sein du village vaincu : une nouvelle fois, votre niveau d’agressivité définira l’efficacité de la manœuvre, entre se contenter de recruter des volontaires ou embarquer tout le monde de force. Il en ira de même pour la nourriture : vous pouvez littéralement mettre à sac une ville, ou bien choisir d’y aller mollo. Mais l’aspect le plus intéressant sera la recherche, qui sera non seulement dictée par ce fameux seuil d’agressivité  mais également par la composition du terrain. Une fois vos hommes engagés dans la recherche, ils commenceront à se lancer à l’assaut des forêts ou des mines environnantes, à amasser du bois et du minerai, et à apporter les ressources à l’atelier où vous pourrez voir apparaître le fruit de leurs travail après un petit moment d’attente : cela peut aller des poteries (utiles pour commercer) à des embarcations (équipez-en vos hommes pour franchir les mers), jusqu’à des épées, des arcs, voire des catapultes ou même des canons ! Le plus fascinant est que vous pourrez voir vos hommes faire usage de cet équipement au cours des combats, entendre les détonations et même voir des bâtiments se faire raser dans la manœuvre.

Construire suffisamment d’embarcations vous permettra de mener de véritables invasions maritimes

Autant en profiter, d’ailleurs, pour évoquer le côté « monde virtuel » du jeu. Celui-ci, loin d’être gadget, est en réalité déterminant, puisque la quasi-totalité des informations qui pourront vous être utiles au cours de la partie seront en fait à glaner à l’aide de vos yeux et de vos oreilles. Si vous cherchez de la nourriture, par exemple, écoutez bien les bêlements qui vous signaleront la présence de moutons, et dans le même ordre d’idée, un groupe d’oiseaux en train de s’envoler pourra vous signaler le passage d’une armée ennemie. On peut voir les âmes des combattants s’élever au-dessus de leur corps en cas de décès, les projectiles des catapultes voler jusqu’à leur cible, vos homme couper les arbres dans un raffut de scies et de hache… Pour l’époque, c’était réellement bluffant. Le terrain change au fil des saisons, la météo est visible à l’écran, et raser des forêts entières peut même avoir des conséquences sur la pluviométrie ! Pas de problème, on peut vite mordre au concept et assister avec intérêt aux tribulations de nos armées au fil de nos conquêtes – quelque chose de très novateur en 1990.

La carte du jeu : chaque poignard représente une région conquise. Il va y avoir du boulot !

Le vrai problème du jeu, au fond, tiens d’ailleurs précisément à son intérêt en tant que pur jeu de stratégie. Car en dépit de possibilités tactiques réelles, force est de constater que la grande majorité d’entre elles ne servent pratiquement à rien. La force brute est d’une telle efficacité que le recours aux alliances ou à la corruption n’intervient qu’à un stade extrêmement avancé du jeu, et il est de toute façon souvent plus viable et plus simple de jouer au chat et à la souris avec les puissants généraux adverses à la tête d’une unique armée plutôt que d’aller éparpiller vos troupes entre plusieurs capitaines – surtout que jongler de l’un à l’autre pour s’assurer que tout le monde reste actif et bien nourri représente un investissement qui ne se justifie pas. En fait, le cycle le plus évident (capturer un village, recruter, inventer, passer au suivant) est parfaitement efficace pendant la plus grande partie du jeu, et certaines des fonctions intéressantes sur le papier, comme l’espionnage, ne servent pratiquement à rien. Chaque niveau tient souvent plus de la planification optimale de l’ordre dans lequel on doit piller les villages, et même à deux joueurs on trouve rarement une réelle raison de contourner le simple rapport de force. Pour ne rien arranger, on a accès à très peu de données objectives, et la plupart des batailles se jouent généralement au jugé sans qu’on ait la moindre prise dans leur résolution – ce qui, pour un jeu de stratégie, est très handicapant.

Le jeu a un peu de difficulté à afficher clairement les reliefs les plus prononcés

Autant dire qu’une fois ces limites apparues au grand jour, PowerMonger représente une expérience dont on a de grandes chances de se lasser bien avant de venir à bout des 195 niveaux du jeu. L’absence d’une quelconque forme de gestion sur le long terme n’améliore pas les choses, et le fait de repartir de zéro à chaque niveau pour refaire la même chose sans réellement considérer d’autres facteurs que le simple rapport de force à un moment t montre très rapidement ses limites. C’est dommage, voire réellement frustrant, car le titre de Bullfrog était extrêmement rafraichissant au moment de sa sortie et demeure, aujourd’hui encore, une expérience unique en son genre, et qui aura certainement inspiré autant des titres stratégiques comme Dune II que des expériences de monde virtuel façon The Settlers. Un brouillon, malgré tout, plus qu’une œuvre accomplie.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1990 (Tilt n°85, décembre 1990) – Meilleur jeu de réflexion/stratégie (versions Amiga et Atari ST), ex aequo avec Full Metal Planète

NOTE FINALE : 13/20

PowerMonger est, à bien des niveaux, un titre précurseur. Monde virtuel avant l'heure, pionnier dans le domaine de la stratégie en temps réel, le titre imaginé par Bullfrog Productions demeure aujourd'hui encore une expérience très singulière, à des kilomètres des cartes d'état-major couvertes d'hexagones et des approches purement militaires qui composaient alors les fondements du genre. Malheureusement, c'est également dans sa dimension stratégique que le programme montre le plus vite ses limites, et on peut littéralement vaincre la moitié des missions du jeu sans dévier d'un pouce d'une routine extrêmement basique. Malgré quelques idées originales et la possibilité de jouer à deux, le titre se parcoure aujourd'hui davantage par nostalgie ou par curiosité que par envie de surmonter un défi bien trop redondant.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Très peu d'informations claires à l'écran
– Des possibilités pas aussi étendues que les premiers instants le laissent croire
– Beaucoup de possibilités stratégiques (approvisionnement, invention, espionnage, coordination entre plusieurs armées) sous-exploitées

Les avis de l’époque :

« Sur le plan technique, Powermonger n’est pas spectaculaire. Les graphismes et l’animation sont corrects. L’environnement sonore est excellent ! La prise en main demande un certain temps. Mais je vous assure que le jeu vaut bien cet effort ! Je ne peux que recommander fortement ce soft aux fanas du genre. À mon sens, Powermonger est sans doute le meilleur programme de l’année 1990. »

Dany Boolauck, Tilt n°83, Novembre 1990, 19/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler PowerMonger sur un écran cathodique :

PowerMonger : World War I Edition

Date de sortie : Janvier 1992
Paru sur : Amiga, Atari ST

Toutes les nouveautés du jeu sont visibles sur cet écran. Peut-être parce qu’il n’y en a pas (Amiga)

Avant de nous intéresser aux différents portages de PowerMonger, penchons-nous un instant sur son unique data disk nommé World War I Edition. On serait presque tenté de dire que tout est dans le titre : l’extension vous propose, cette fois, de partir à la conquête de l’Europe pendant le premier conflit mondial.  Comment ? Eh bien… très exactement de la même façon que dans le jeu de base, pour être honnête. À tel point que l’on ne sait pas franchement quel camp on incarne ni pourquoi on va se battre dans des endroits n’ayant jamais servi de champ de bataille pendant toute la première guerre, mais on avait bien compris que le souci historique n’était pas exactement l’objectif du jeu. Toutes les modifications sont uniquement à chercher du côté de la réalisation : vos généraux portent des uniformes du XXe siècle, vos hommes ont des tenues de soldat, les ateliers ont laissé la place à des usines… mais le gameplay, lui, n’a pas évolué d’un micron, à aucun niveau. S’il est possible d’inventer des blindés ou des avions, ceux-ci ne font finalement rien d’autre que reprendre le rôle des canons, des catapultes et des embarcations, n’introduisant strictement aucune subtilité stratégique ; autant dire que c’est très exactement la même chose avec une couche de peinture neuve. Au moins bénéficie-t-on de 175 nouveaux niveaux, ce qui n’est pas rien, mais sachant que le jeu de base proposait de toute façon un générateur de niveaux aléatoires…  Bref, une curiosité pour varier un peu le temps d’une partie ou deux, mais certainement pas de quoi vous faire changer d’avis si vous n’aviez pas accroché au jeu original.

Voici la moitié de votre terrain de jeu. Ne cherchez pas de cohérence historique, il n’y en a pas (Amiga)

NOTE FINALE : 10/20

Soyons honnête : même pour un fan irréductible de PowerMonger, ce data disk est très loin de représenter un achat indispensable. Avec strictement aucune nouveauté au contenu, et avec une refonte graphique qui aura bien du mal à éveiller votre intérêt plus de cinq minutes, seuls les 175 niveaux supplémentaires présentent un (vague) intérêt. À réserver aux curieux et aux mordus incurables.

Version Atari ST

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On sait généralement à quoi s’attendre avec les portages sur Atari ST – et ce n’est que plus vrai lorsque les version Amiga et Atari ont été développées conjointement, comme c’est le cas pour PowerMonger. Sans surprise, on se retrouve donc avec un jeu fidèle à 99% à ce qu’on a pu manipuler sur la machine de Commodore, les seules différences se situant dans des détails infimes, comme le fait que l’introduction est légèrement moins détaillée ou bien que la qualité sonore est très légèrement inférieure (même si on entend bien qu’un réel effort a été fait, et que la seule véritable « perte » par rapport à ce que permettait la puce Paula est que le son crache davantage). Pour le reste, je vous renvoie au test de la version Amiga.

Pas très dépaysant, hein ?

NOTE FINALE : 13/20

Développé parallèlement à la version parue sur Amiga, PowerMonger sur Atari ST fait largement aussi bien à tous les niveaux, à deux ou trois minuscules petites fioritures près. Le jeu présente toujours très exactement les mêmes qualités – et les mêmes faiblesses.

Version PC-98

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 25 octobre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme Populous avant lui, PowerMonger se sera exporté jusqu’au Japon – par le biais de la même équipe et du même distributeur, d’ailleurs. Pour l’occasion, la philosophie n’a pas changé : il s’agit toujours de proposer un portage le plus fidèle possible à la version originale sans s’évertuer à tirer parti des capacités de la machine de NEC. À ce niveau-là, le contrat est rempli : le jeu est graphiquement très proche des versions Amiga et ST, même si les effets de mosaïque des dégradés sont légèrement plus fins, et il est même possible de le trouver intégralement en anglais ! Seule (petite) déception : les bruitages sont vraiment limités au minimum dans cette version, et sachant que l’ambiance sonore n’était déjà pas ébouriffante à la base, on passe 95% de la partie dans un silence quasi-total. Un léger déficit d’atmosphère, donc, qui vient légèrement pénaliser une version autrement très semblable à son modèle.

Il faut vraiment bien regarder pour voir la différence

NOTE FINALE : 12,5/20

Fidèle à ce qu’avait produit Infinity pour Populous, PowerMonger sur PC-98 demeure extrêmement fidèle à la version originale sur Amiga, en dépit d’une déperdition sonore dommageable. Le titre étant disponible en anglais (pour le peu de texte qu’il y a à y lire), on a affaire à une alternative sérieuse qui ne devrait pas trop frustrer ses possesseurs.

Version Sharp X68000

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 25 octobre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais (narration)/japonais (menus)
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Même équipe, même jeu, même date de sortie ; comme pour ce qui s’était passé avec Populous, on se doute que PowerMonger aura été porté en parallèle sur PC-98 et sur Sharp X68000, pour des résultats d’ailleurs très semblables. La bonne nouvelle, c’est que l’aspect sonore, cette fois, est resté aussi bon que sur Amiga, et qu’on n’aura donc pas à regretter la disparition de la majorité des bruitages du jeu. Pour le reste, la réalisation graphique est exactement identique à ce qui avait été observé sur la machine de NEC, mais les menus sont dorénavant en japonais – ce qui ne devrait pas vous poser des problèmes très longtemps, le reste du jeu se passant de toute façon de texte. Dans tous les cas, il est sans doute aussi simple de jouer sur Amiga, mais si vous voulez investir spécifiquement dans cette version, vous ne devriez pas avoir l’occasion de vous sentir lésé.

Une nouvelle fois, ne vous attendez pas à une révolution

NOTE FINALE : 13/20

Le Sharp X68000 savait très bien reproduire l’expérience des bornes d’arcade, et il n’a visiblement pas davantage de soucis pour reproduire celle d’un Amiga. PowerMonger y est ici porté fidèlement, avec des graphismes légèrement plus fins pour les dégradés, et pas grand chose de plus – mais ce n’était de toute façon visiblement pas ce qu’on lui demandait.

Version FM Towns

Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : Mai 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langues : Anglais (narration)/japonais (menus)
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

PowerMonger continue son chemin sur les systèmes japonais, avec la même équipe aux commandes, pour les mêmes résultats. N’espérez pas, à ce titre, voir le support CD-ROM transcender l’expérience : il y a moins de 2Mo de données sur le disque, ce qui signifie que vous pouvez également oublier toute idée de bénéficier de thèmes musicaux numériques pour vous accompagner durant la partie. Ces précisions faites, on se retrouve face à un portage qui se trouve être l’exact équivalent de celui paru sur Sharp X6800, c’est à dire grosso modo la copie quasi-conforme de la version Amiga avec des effets de mosaïque plus fins. Rien de révolutionnaire, mais pour ceux qui étaient venu chercher un portage fidèle du jeu, aucune raison d’être déçu.

Si ça a l’air plus verdoyant, c’est uniquement parce que j’ai attendu l’été pour attaquer

NOTE FINALE : 13/20

Pas davantage de nouveautés pour PowerMonger sur FM Towns, qui accomplit la même prestation que sur les meilleurs système japonais. Aucune mauvais surprise du côté de l’image ou du son, donc, et un support CD-ROM jamais mis à contribution. On s’en contentera.

Version PC (DOS)

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Juillet 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 3.0 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : EGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster

Vidéo – L’introduction du jeu :

Il aura fallu pas moins de deux ans pour voir PowerMonger débarquer sur PC – une bien longue attente, surtout si l’on réalise que cette adaptation est sortie… la même année que Dune II. Autant dire que le titre de Bullfrog commençait doucement à vieillir à l’époque – mais c’est une considération qui n’aura que peu d’impact sur le jugement qu’y porteront les joueurs du XXIe siècle. On passera rapidement sur la principale perte du jeu : l’introduction se limite désormais à une vague animation de cinq secondes en pseudo-3D, avant de laisser la place à un pavé de texte. Tant pis pour l’ambiance. En revanche, le jeu en lui-même est passé en 256 couleurs, et est de fait plus coloré que ses équivalents sur Amiga et Atari ST. Les commandants ont été redessinés, tout comme le décor de fond, les décors sont plus beau – et la caméra est par défaut plus éloignée, pour une raison inconnue, mais il vous suffira d’utiliser les boutons près de la boussole pour adapter cela à votre goût. Niveau sonore, le jeu reconnait l’AdLib, la Sound Blaster et la Roland MT-32 – mais comme vous n’entendrez de toute façon pas de musique au-delà de l’écran-titre, il faudra vous contenter de bruitages n’ayant aucun mal à rivaliser avec ceux de la version Amiga.

Pour une fois que c’est plus joli sur PC, on ne va quand même pas se plaindre !

NOTE FINALE : 13,5/20

Si on ne trouve, dans la version PC de PowerMonger, rien qui justifie qu’on l’ait attendue pendant deux ans, au moins a-t-elle fait l’effort de se mettre à niveau en proposant une réalisation en 256 couleurs incontestablement supérieure à ce qu’on avait pu voir sur Atari ST et Amiga, avec une qualité sonore équivalente. Dommage que l’introduction animée soit passée à la trappe dans le procédé – et surtout que le gameplay, lui, n’ait pas évolué d’un iota – mais cela reste objectivement la meilleure version parue sur ordinateur.

Version Mega Drive

Développeur : Sprytes Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Mars 1993 (Amérique du Nord, Europe) – 18 juin 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

PowerMonger aura également tenté sa chance sur les consoles 16 bits, ce qui peut se comprendre quand on sait à quel point le domaine du jeu de stratégie y était un genre cruellement sous-représenté. Porté sur Mega Drive, le jeu sacrifie immédiatement les fioritures : plus d’introduction (bon, on a un petit récit fait avec le moteur du jeu à la place), plus de mode deux joueurs (ce qui était à peu près inévitable), et la sauvegarde a été remplacée par un système de mots de passe (ce qui signifie, naturellement, que vous ne pourrez plus sauvegarder pendant une mission, rendant ainsi le jeu un peu plus difficile).

À vous les joies du mot de passe

L’interface, elle, demandera un petite temps d’adaptation : le bouton B vous servira à passer d’un écran à l’autre entre la fenêtre de jeu, la boussole et la carte (on remarquera d’ailleurs qu’il n’est plus possible de faire pivoter la vue ni de zoomer), le bouton C vous fera passer directement sur le menu d’action basculé à droite, et A vous servira à confirmer vos actions. Très bonne surprise, cependant : le bouton B vous apportera également des informations sur chaque icône du menu, permettant ainsi au joueur de connaître le rôle de chaque action sans avoir à retourner se plonger dans le manuel. En terme de contenu, le jeu n’a pas changé d’un iota, et la réalisation reste correcte, même si elle est moins colorée que sur Amiga et ST – ce qui ne se justifie pas vraiment – et que le titre est également un peu plus lent.

Bon, on a perdu quelques couleurs en route, mais pas de quoi hurler non plus

NOTE FINALE : 12/20

PowerMonger sur Mega Drive s’efforce de proposer une expérience aussi proche que possible de celle délivrée sur Amiga, et s’en sort d’ailleurs relativement bien en dépit d’une réalisation qui aurait pu prétendre à mieux. Le titre parvient même à gagner en accessibilité malgré l’obligation de jouer à la manette. Malheureusement, la disparition inévitable du mode deux joueurs ainsi que d’une partie de l’enrobage font qu’un joueur contemporain n’aura objectivement aucune raison de préférer cette adaptation à celles parues sur ordinateurs.

Version Super Nintendo

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 26 mars 1993 (Japon) – Juin 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad, souris
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Sur la Super Nintendo, PowerMonger reprend quelques couleurs – métaphoriquement parlant – puisque le jeu récupère l’introduction (un petit plus pour l’ambiance), et surtout reconnait la souris, ce qui fait énormément de bien en terme de confort de jeu. Si le contenu n’a connu aucune modification – plus de mot de passe, le jeu sauvegarde automatiquement la progression en campagne – la réalisation, en revanche, commence à réellement souffrir de la résolution limitée de la 16 bits de Nintendo, surtout avec une interface aussi envahissante. Le vrai problème, en revanche, vient plutôt de la lenteur générale du jeu : la Super Nintendo n’a jamais été connue pour la puissance de son processeur, et quand le programme doit commencer à animer soixante soldats en train de se battre sous la pluie, ça commence à sérieusement patiner dans la semoule. C’est dommage, car cette version serait sinon toute proche de se hisser à la hauteur des version Amiga et ST.

Rien de catastrophique, mais on se sent quand même un peu à l’étroit

NOTE FINALE : 12/20

PowerMonger sur Super Nintendo propose l’essentiel de ce qu’on était venu à apprécier dans le jeu de Bullfrog, en ayant notamment la très bonne idée de reconnaître la souris de la machine, dont la prise en main est infiniment plus naturelle que celle de la meilleure interface au pad qui soit. En revanche, le jeu doit souffrir de la résolution limitée de la machine et surtout d’une lenteur parfois réellement pénalisante et qui le réservera aux joueurs à la fois passionnés de stratégie et patients.

Version Macintosh

Développeur : Atreid Concept SA
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : 1994
Nombre de joueurs : 1 à 2 (par modem ou câble null modem)
Langue : Anglais
Supports : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Mac OS 8.1
Configuration minimale :
Bon, ce gros cadre est un peu dommage, mais ça vaut bien la version PC

Le Macintosh, l’autre ordinateur en (relative) forme de la première moitié des années 90, aura également reçu son portage de PowerMonger. Comme souvent, on sent une certaine forme d’envie d’aller à l’essentiel : il n’y a pas d’introduction, pas de texte de présentation, juste l’écran-titre avec le thème musical et basta sans même la moindre ligne de crédit qui défile à l’écran (ce qui explique que vous n’en ayez pas de vidéo ici : il n’y a tout simplement pas grand chose à voir). Une fois en jeu, on profite fort heureusement d’une résolution augmentée – ce qui n’empêche pas le titre de s’afficher fenêtré et entouré de larges bandes noires avec un bureau à une résolution de 640×480. Dans l’ensemble, la réalisation sonore est de toute façon largement à la hauteur de ce que proposaient un Amiga ou un Atari ST – il tourne en revanche très vite dès un Quadra 900, et il n’y aucun moyen de le ralentir. Mais pour le reste, aucune mauvaise surprise : c’est le jeu qu’on était venu chercher.

NOTE FINALE : 13,5/20

Programme respecté à la lettre pour PowerMonger sur Macintosh : c’est très exactement le même jeu, proposé dans une résolution plus élevée (mais pas en plein écran, hélas), avec une réalisation sonore à la hauteur. Attendez-vous en revanche à ce que le programme tourne un peu vite sur des systèmes trop puissants.

Version Mega-CD

Développeur : Sprytes Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Janvier 1994 (Amérique du Nord) – Avril 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne ou BackUp RAM Cart

Vidéo – L’introduction du jeu :

Voir PowerMonger débarquer sur Mega-CD deux ans après la version Mega Drive pourra surprendre – après tout, l’apport du support numérique au gameplay du jeu est loin d’être évident sur le papier, et la version informatique elle-même n’avait jamais connu d’adaptation sur CD-ROM. Au moins, et comme on pouvait s’en douter, cela aura représenté une très bonne excuse pour réintégrer l’introduction du jeu (assez sympathique bien que très courte, au demeurant), qui nous permettra au passage de réaliser que le scénario a été légèrement modifié puisque votre personnage a cette fois été banni de son royaume – ce qui ne change rien à la façon dont vous allez aborder le jeu, mais bon, pourquoi pas.

Une fois la partie commencée, surprise : la réalisation a été entièrement retravaillée depuis l’adaptation sur Mega Drive. À tel point, d’ailleurs, qu’on s’éloigne de toutes les autres versions existantes : les fonds ont été redessinés, les commandants avec eux – ces derniers sont d’ailleurs animés – et la fenêtre de jeu est bien plus grande. Bref, pas de doute : c’est plus joli. En revanche, je ne suis pas parvenu à faire fonctionner la souris avec le jeu, l’interface est un peu plus confuse, les messages d’aide ont disparu, et surtout le support CD ne sert strictement à rien une fois l’introduction finie : il n’y a toujours pas de musique, et les bruitages sont repris directement de la version Amiga. Le vrai problème, cependant, est la lenteur hallucinante du jeu, encore bien plus prononcée que sur Mega Drive ou même sur Super Nintendo : ça se traine. La moindre escarmouche s’éternise, et ça bouge tellement mal qu’on se demande parfois si parler « d’animation » n’est pas un abus de langage. Autant dire que les priorités n’ont pas été très bien définies pour ce portage, et qu’au final on aurait sans doute préféré qu’il privilège le gameplay sur la réalisation.

Voilà. Et donc, là, normalement, si vous attendez un peu, ça bouge. Normalement.

NOTE FINALE : 11/20

D’accord, PowerMonger sur Mega-CD peut sans difficulté prétendre au titre de plus belle version du jeu – sur console. Malheureusement, il remporte dans la foulée le titre de la version la plus lente et de la moins jouable. Les joueurs les plus patients pourront y trouver leur compte, à condition d’être un tantinet masochistes, mais tous les autres auront plus vite fait de se procurer la version PC.

Michael Jackson’s Moonwalker

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com/

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Europe Ltd.
Titre original : マイケル・ジャクソンズ モーンウォーカー (Maikeru Jakusonzu Mūn’wōkā, Japon)
Titre alternatif : Moonwalker (titre usuel)
Testé sur : ArcadeMega DriveMaster System

Les jeux inspirés de Michael Jackson (jusqu’à 2000) :

  1. Moonwalker (1989)
  2. Michael Jackson’s Moonwalker (1990)

Version Arcade

Date de sortie : Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1 à 3
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Circuit imprimé
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et trois boutons
Version testée : Version internationale
Hardware : SEGA System 18

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sera-t-il nécessaire, un jour, de présenter Michael Jackson ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, probablement. La gloire est ainsi faite : immortel un jour, mis en bière le lendemain. Et si certaines étoiles sont faites pour briller éternellement au firmament, qui peut prévoir lesquelles finiront fatalement par s’éteindre ? Un matin, on pense à un artiste qui a bercé notre jeunesse en même temps que celle de millions de personnes, et puis on entend une de ses chansons sur Radio Nostalgie et on se surprend à penser : « Tiens, ça fait déjà si longtemps qu’il est mort ? » Voilà comment on en vient à réaliser un beau jour, en se rasant, qu’on a quand même vieilli. Ô temps, suspend ton vol et tout ce genre de choses.

La petite mise en scène du jeu ne racontera pas grand chose à ceux qui n’ont pas vu le film

Retournons un instant en 1988 (trente ans déjà…). Le King of Pop (je parle toujours de Michael Jackson, pour ceux qui trouveraient le moyen d’être largués) est alors à ce qu’on pourrait considérer comme l’apogée de sa carrière. L’artiste vient de publier son septième album solo, Bad, qui est appelé à rester comme un de ses plus iconiques avec le précédent, Thriller – l’album le plus vendu de tous les temps, rien de moins, ce qui place assez bien la notoriété de son interprète. Plusieurs de ses clips étant alors réalisés par de grands noms du cinéma  (Martin Scorcese succédant à John Landis, excusez du peu), la suite logique était de proposer un long métrage, ce qui fut fait avec Moonwalker, objet cinématographique bizarre tenant autant du clip géant que du film de promotion d’une heure et demi. Et, signe des temps, le film fut adapté en jeu vidéo pour à peu près tous les supports de l’époque, d’abord par US Gold en 1989 pour les ordinateurs, puis par SEGA pour ses consoles l’année suivante sous le titre Michael Jackson’s Moonwalker – soit précisément le jeu qui nous intéresse à présent.

Michael, habillé comme dans Smooth Criminal, s’apprête à montrer le pouvoir de la danse. Enfin, la sienne, surtout

Le jeu imaginé par SEGA reprend la trame de la deuxième partie du film éponyme. Pour ceux qui auraient raté le long-métrage (on leur pardonnera…), Michael Jackson est gentil et aime les enfants (une phrase qui ne véhiculait pas, à l’époque, la même ambiguïté qu’aujourd’hui, mais ce n’est pas notre sujet). Il a, face à lui, un génie du mal qui n’aime pas les enfants parce que sinon il ne serait pas méchant, et qui répond au nom de Mr. Big. Lequel, en vrai vilain de Prisunic, est naturellement un baron de la drogue qui fait bien sûr enlever des enfants parce que c’est dans son script, déchainant la colère de Michael qui s’en va défier à lui tout seul l’organisation criminelle de Mr. Big et libérer les enfants retenus par ce dernier au fil des cinq niveaux du jeu. Voilà pour le prétexte.

Les boss sont parfois imaginatifs

Le jeu vous place donc directement aux commandes de Michael, voire de deux de ses frères jumeaux, puisque le titre est jouable jusqu’à trois, ce qui est toujours plus convivial. En vous déplaçant dans en vue en 3D isométrique assez originale pour le genre, vous pourrez soit attaquer vos adversaires grâce à une décharge d’énergie (?) à courte portée, soit maintenir le bouton appuyé pour charger votre coup, soit utiliser votre deuxième attaque : un pas de danse entrainant tout l’écran à votre suite dans une très sympathique chorégraphie, et qui fera office de smart bomb. Et c’est tout. C’est tellement basique qu’il est assez difficile de considérer Michael Jackson’s Moonwalker comme un beat-them-all : il n’y a ni prise, ni enchaînement, ni chope, ni coups spéciaux, et la portée de vos coups est trop limitée pour qu’on puisse parler d’un jeu de tir.

Il y a parfois beaucoup de monde à l’écran

Ceci dit, petit originalité : il vous arrivera de croiser Bubbles, le singe domestique de Michael. Ramassez-le comme vous le feriez d’un bonus (lesquels ne sont, normalement, délivrés que par les enfants que vous libérez au fil des niveaux et se limite à un regain de vie ou à une nouvelle smart bomb), et Michael se transformera alors en robot chromé comme il le faisait lors d’un passage du film. Le titre se transforme alors, pour le coup, en véritable jeu de tir à la Escape from the Planet of the Robot Monsters puisque vous pourrez cette fois arroser à longue portée, et même continuer de charger votre pouvoir histoire de tirer des missiles.

Chorégraphie dans un cimetière… mais où est la musique de Thriller ?

Les cinq niveaux du jeu – qui s’efforcent de suivre le semblant de trame du film – alternent donc les phases de beat-them-all simplistes et les phases de shoot-them-up tout aussi basiques. L’avantage, c’est que la prise en main est immédiate, et que n’importe qui devrait trouver ses marques en une dizaine de secondes pour profiter d’un gameplay basé avant tout sur l’adresse et l’évitement. L’inconvénient, c’est que, comme on peut s’en douter, le concept s’épuise suffisamment vite pour qu’on ne soit pas trop triste de voir la partie s’achever au bout de vingt-cinq minutes. Cela ne signifie pas pour autant qu’on ne s’amuse pas, loin de là, mais on n’aurait pas nécessairement craché pour autant sur un gameplay un peu plus technique, ni surtout un peu plus varié. On ne peut pas faire des milliers de choses, en se contentant d’appuyer sur un bouton…

Les passages Shoot-them-up cassent un peu la routine

Qu’est-ce qui permet réellement de s’accrocher, au fond ? La réalisation, en grande partie, qui est très réussie pour un jeu de 1990. Non seulement la vue en 3D isométrique a un cachet certain, mais les décors sont finement détaillés – quoique parfois un peu vides – et on appréciera les bribes de mise en scène qui verront, par exemple, les membres du gang de Mr. Big débarquer en voiture ou en sortant par les fenêtres des immeubles.

On se surprend à siffloter en accompagnement du jeu

L’animation est très travaillée, avec des pas de danse qui en envoyaient plein les yeux à l’époque, et c’est toujours un plaisir de voir les malfrats, les machines ou les zombies participer à la chorégraphie autour de vous. Le vrai bonus, bien sûr, est de profiter des compositions du King of Pop en qualité MIDI très correcte (avec même quelques digitalisations, comme le célèbre « Who’s bad » !), et pratiquement toute tirées de l’album Bad (Bad, Smooth Criminal, Another Part of Me)… à l’exception, curieusement, du thème du niveau quatre, Beat It, qui est lui tiré de Thriller. Je dis « curieusement » car le niveau quatre prenant place dans un cimetière, quel thème aurait été mieux adapté que Thriller en lui-même ? Une bizarrerie qui continuera d’ailleurs dans les versions consoles. Les voies du marketing…

Roadkill…

Dans tous les cas, il faut également reconnaître que les titres vous proposant d’incarner Michael Jackson ne sont pas légion, sans même parler de ceux qui vous proposent de le faire avec les thèmes musicaux de ce qu’on peut considérer comme ses deux meilleurs albums en fond sonore. Les fans de l’artiste, ou ceux du film (s’il en existe ?), seront donc certainement aux anges à l’idée de se lancer dans un logiciel aussi singulier. Les simples amateurs de beat-them-all, en revanche, n’y passeront sans doute pas beaucoup de temps – une ou deux parties maximum – avant de retourner à des programmes plus exigeants ou simplement mieux pensés. Une curiosité, malgré tout.

Vidéo – Les cinq premières minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20 Michael Jackson's Moonwalker est, à bien des niveaux, un objet aussi étrange que le film dont il est tiré. Ni complètement un beat-them-all, ni tout à fait un shoot-them-up, le titre imaginé par SEGA propose une balade assez dépaysante quoique rapidement redondante et qu'on appréciera mieux à trois, avec certains des morceaux les plus célèbres du King of Pop en fond sonore. En dépit de mécanismes de jeu (très) limités, il faut reconnaître que ce Moonwalker a également l'avantage d'être un de ces logiciels particulièrement inscrits dans leur époque et qui ne ressemblent à rien d'autre, et surtout l'un des seuls à vous mettre aux commandes du chanteur et chorégraphe de légende. À découvrir pour les fans. CE QUI A MAL VIEILLI : – Mécanismes beat-them-all très limités, et les parties shoot-them-up sont très courtes – Pourquoi ne pas avoir utilisé Thriller comme thème musical du cimetière ?

Version Mega Drive

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 25 août 1990 (Japon) – Septembre 1990 (États-Unis) – Février 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version internationale, révision A
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Le jeu commence comme le clip de Smooth Criminal : en lançant une pièce dans un juke-box

La même année que sa sortie en arcade, SEGA aura décidé de rentabiliser sa licence en la portant également sur ses consoles de salon. En revanche, la formule du beat-them-all jouable à plusieurs dût ressembler à un trop gros défi pour l’époque, car le jeu prend, une fois adapté sur la Mega Drive, une forme assez différente. Oubliez la vue isométrique et le multijoueur : le titre est cette fois en vue de côté, et offre une jouabilité qui fera davantage penser à celle de Shinobi. Concrètement, votre mission consiste toujours à sauver des enfants, dont vous pourrez consulter le total grâce à un compteur en bas à droite de l’interface. Trouver ceux-ci vous demandera d’explorer chacun des stages du jeu pour débusquer les précieux otages, puisque si certains sont simplement abandonnés au milieu de votre passage, d’autres sont dissimulés dans l’un des nombreux « conteneurs » du jeu (portes, fenêtres, coffres de voiture ou même pierres tombales, selon le niveau). Ce n’est qu’une fois ces enfants sauvés que Bubbles, votre singe, reviendra faire une apparition pour vous guider jusqu’au boss, lequel vous demandera généralement de repousser une vague d’ennemis avant de passer au prochain niveau.

Pour trouver les enfants, il faudra chercher partout

Pour vaincre l’abondante opposition qui ne manquera pas de se mettre en travers de votre chemin, vous pourrez bénéficier de deux types d’attaque : une sorte de poudre magique qui s’échappe des doigts de Michael, et une attaque chargée qui prend une forme un peu différente de celle utilisée en arcade. Laissez-la appuyée, et le King of Pop tournera sur lui-même, blessant tout ceux qui s’approcheront, lâchez-la après une poignée de secondes et il lancera son chapeau qui blessera tout ce qui se trouvera sur son chemin. Laissez-la appuyée suffisamment longtemps, et cette fois tous les adversaires à l’écran participeront à une chouette chorégraphie sur l’un des morceaux du maître. Les thèmes utilisés sont d’ailleurs exactement les mêmes que ceux de la version arcade, dans une qualité assez proche, tout comme les niveaux qui sont en revanche dans un ordre différent (on commence par le Club 30 avant de sortir dans les rues, etc.)

Les chorégraphies ont de l’allure

L’exploration ne sera pas sans danger, car en plus des nombreux adversaires sur votre route, il arrivera fréquemment que l’un des conteneurs que vous fouillez contienne un piège en lieu et place d’un enfant à sauver – vous disposerez alors généralement d’une demi-seconde pour l’éviter avant de vous le prendre en pleine poire. Votre attaque de base sera largement suffisante pour faire rapidement le ménage pendant la première partie du jeu, ce qui n’est pas plus mal car votre attaque chargée présente un gros défaut : elle puise dans votre jauge de vie. Lancer une chorégraphie demande déjà la moitié de votre jauge, ce qui fait qu’on évite d’y avoir recours lorsque les choses commencent à se gâter – c’est à dire précisément au moment où cette fameuse attaque pourrait enfin s’avérer utile. Le jeu n’est de toute façon pas très difficile, mais même si la composante exploration est originale, le concept s’essouffle une nouvelle fois assez vite pour qu’on finisse par trouver le temps long. À noter qu’il est toujours possible de se transformer en robot, mais cela est si difficile que c’est pratiquement un bonus secret : une étoile filante traverse en effet, très rarement, l’écran du jeu. Placez-vous à l’emplacement de sa chute, et à vous le plaisir d’être un robot surpuissant, mais bon courage, car vous aurez rarement plus d’un dixième de seconde pour réussir à vous placer au bon endroit.

L’action est hélas assez répétitive

Globalement, Michael Jackson’s Moonwalker sur Mega Drive colle très bien à l’esprit de la version arcade, en dépit de son système de jeu différent. Une nouvelle fois, si le jeu est agréable à jouer le temps de quelques niveaux, ce sont avant tout les chorégraphie et la bande son qui pousseront à réellement y passer du temps, faute de quoi on risque de s’en lasser en quelques heures, voire moins. Un titre original et dépaysant, mais pas forcément très ludique.

NOTE FINALE : 12,5/20

Le King of Pop aura été une source d’inspiration pour SEGA, qui aura su lui offrir sur Mega Drive un titre original à plus d’un titre, et surtout superbement réalisé pour l’époque. Michael Jackson’s Moonwalker devait être un des tout premiers jeux à donner le sentiment d’assister à des chorégraphies tirées d’un clip. Malheureusement, une fois ce côté « tape-à-l’œil » épuisé, il ne reste pas grand chose de plus qu’un jeu très répétitif aux mécanismes pas toujours bien pensés. Une nouvelle fois, un logiciel à réserver aux fans ou aux curieux.

Les avis de l’époque :

« Moonwalker n’est pas très varié mais il est tellement beau qu’on y revient, uniquement pour le plaisir de se livrer à de nouvelles chorégraphies. Et puis c’est vraiment le genre de cartouche qu’on montre avec fierté à tous les amis qui viennent voir la « nouvelle console 16 bits dont tout le monde parle ». »

Olivier Scamps, Tilt n°83, Novembre 1990, 15/20

Version Master System

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Février 1991 (Europe) – Mai 1991 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Manette
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
On reprend la même en 8 bits… Bon, jusque là, ça va…

Sans surprise, si la Mega Drive n’avait pas osé se risquer au portage de la version arcade, ce n’était pas la Master System qui allait tenter le grand saut. Michael Jackson’s Moonwalker est donc, sur la 8 bits, une adaptation de la version Mega Drive. On y retrouve exactement le même système de jeu, à quelques détails près : l’interface n’est plus visible à l’écran, et voir le nombre d’enfants qu’il vous reste à sauver nécessite d’appuyer sur le bouton Start – situé, rappelons-le, directement sur la console ; pas très pratique, donc. Michael ne tire plus de poussière magique, mais se contente de frapper avec les poings et les pieds, ce qui rend le jeu inutilement difficile, Bubbles n’apparait plus pour vous guider au boss mais vous vous téléportez directement au combat final, etc. Graphiquement, si le jeu fait illusion lors des premiers instants, il perd rapidement en superbe lors des chorégraphies : en effet, non seulement le décor passe au noir (ce qui ne serait pas un gros problème) mais surtout, les adversaires disparaissent aussi, ce qui signifie que Michael fera désormais ses numéros de danse… tout seul. Sachant que la musique en qualité 8 bits perd également beaucoup de son charme, on se retrouve avec un jeu possédant tous les défauts de la version Mega Drive, plus quelques autres, moins ses qualités. Pas vraiment ce qu’on pouvait attendre de mieux, donc.

Par contre, pour ce qui est des numéros de danse, on se sent un peu seul dans le noir…

NOTE FINALE : 08/20

Déjà assez limité sur le plan ludique sur Mega Drive, Michael Jackson’s Moonwalker devient en plus inutilement frustrant et techniquement daté sur Master System. Loin du strass et de l’ambiance de clip vidéo qui régnait sur 16 bits, on se retrouve avec un ersatz pas très jouable, aux graphismes corrects mais jamais transcendants, à l’ambiance musicale poussive et au gameplay jamais amusant. À réserver aux collectionneurs.

Columns

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com

Développeur : SEGA Enterprises, Ltd.
Éditeur : SEGA Europe Ltd.
Titre alternatif : Shapes and Columns (Brésil)
Testé sur : ArcadeArcade (Mega-Tech)Game GearMega DriveMaster SystemMSXPC EnginePC-98Sharp X68000PC-88Super Nintendo
Version non testée : FM Towns
Disponible sur : 3DS, Linux, Macintosh, Sharp Zaurus, Wii, Windows – Figure au sein de la ludothèque pré-installée de la Mega Drive Mini (version Mega Drive)
En vente sur : Steam.com (Linux, Macintosh, Windows)

La saga Columns (jusqu’à 2000) :

  1. Columns (1990)
  2. Columns II : The Voyage Through Time (1990)
  3. Columns III : Revenge of Columns (1993)
  4. Stack Columns (1994)
  5. Super Columns (1995)
  6. Columns ’97 (1997)
  7. Hanagumi Taisen Columns : Sakura Taisen (1998)
  8. Columns GB : Tezuka Osamu Characters (1999)
  9. Hanagumi Taisen Columns 2 (2000)

Version Arcade

Date de sortie : Mars 1990 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (quatre directions) et un bouton
Version testée : Version internationale
Hardware : SEGA System C-2
Processeur : Motorola MC68000 8,948862MHz
Son : Haut-parleur ; SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; YM3438 OPN2C 7,670453MHz ; 1 canal
Vidéo : 256 x 224 (H) 59,922743Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Rebondir sur un concept sans le révolutionner est, et a toujours été, un des piliers de la conception vidéoludique. En forçant un peu le trait, on pourrait facilement prendre n’importe quel jeu vidéo et le décrire comme une simple mise à jour des mécanismes mis en place par un titre plus ancien, lequel tirait lui-même son inspiration d’un programme antérieur, et ainsi de suite. Les seules exceptions à cette règle constitueraient soit des titres totalement inclassables et uniques en leur genre, soit d’authentiques précurseurs – ceux ayant mis en place toutes les structures servant à édifier le genre qu’ils auront eux-mêmes initié.

Un concept simple, un seul bouton, et on a de quoi s’amuser pendant des heures

Pour ce qu’on a pris l’habitude de qualifier de puzzle game, au moins, les débats sont rares : tout le monde ou presque en reviendra fatalement à Tetris, le succès du titre imaginé par Alekseï Pajitnov n’étant concurrencé que par l’ampleur de son influence. Le principe du jeu est si simple que s’en inspirer sans recourir au plagiat pur et simple a certainement été une colle pour bien des équipes de développement – à tel point que les clones ont finalement été beaucoup moins nombreux que ce qu’on aurait pu imaginer. Former des lignes avec des pièces de formes différentes ? Non, pas assez original… Mais il n’est pas toujours nécessaire de réinventer la poudre pour partir d’un principe génial et en tirer un autre tout aussi intéressant, et c’est sans doute là la principale leçon donnée par Columns.

Votre unique décision se bornera à choisir le niveau de difficulté

Prenez le tableau de Tetris, faites-y tomber des pièces pour les assembler – a priori, rien de bien neuf sous le soleil. Mais imaginez à présent que la forme de ces pièces ne vous préoccupe plus d’aucune manière, pas plus que le fait de former des lignes. Non, visualisez plutôt des assemblages de gemmes colorées : n’importe quelle ligne horizontale, verticale ou diagonale composée avec au moins trois gemmes de la même couleur disparaitra, faisant tomber les éléments qui la surplombait. Non seulement vous retrouvez alors les bases du puzzle game – réfléchir vite et bien pour ne pas vous laisser submerger par des pièces qui tombent de plus en plus vite – mais vous introduisez aussi une possibilité extrêmement intéressante au moment de penser votre façon de jouer : celle de réaliser des combos.

Le mode deux joueurs est hélas extrêmement limité

Si un joueur débutant se contentera ainsi, la plupart du temps, d’empiler les couleurs comme elles viennent histoire de faire le ménage le plus vite possible, un joueur expérimenté s’efforcera de planifier chacun de ses mouvements pour qu’une ligne détruite puisse provoquer la chute de gemme, entrainant à son tour la destruction d’une deuxième ligne, puis d’une troisième et ainsi de suite, instaurant un effet domino redoutablement efficace qui pulvérisera également tous les scores.

Qu’une seule de vos pièces dépasse le sommet du tableau, et c’est le game over

Mine de rien, cela modifie drastiquement la façon d’aborder une partie, car si tout le monde se souvient de cette fameuse gouttière de quatre lignes de profondeur qu’on pouvait laisser, lors d’une partie de Tetris, pour y glisser l’unique pièce droite et ainsi faire disparaître quatre lignes d’un seul coup, les possibilités sont ici dramatiquement étendues – au point, pour un joueur bien rodé, de transformer chaque partie en un fascinant échafaudage bâti quatre, cinq, voir dix coups à l’avance. Et, tant qu’à faire, à apprendre à faire les bons choix à une vitesse record, puisque le seul mode de jeu du titre reprend, une fois encore, le principe de Tetris en allant de plus en plus vite au fur et à mesure de l’avancée de la partie.

Échouez à planifier – ou faites-le trop lentement – et la fin de partie se dessinera vite

Seule nuance : si vous décidez de commencer la partie en difficulté « medium » (c’est à dire à un niveau plus rapide), une ligne de gemmes « magiques » fera parfois son apparition au sein de vos pièces, qui aura pour effet de détruire toutes les gemmes de la couleur avec laquelle elle rentrera en contact. C’est hélas la seule variété apportée au jeu, puisqu’il n’y a aucun autre mode de jeu, et donc pas d’énigmes à résoudre ou de petits casses-têtes pensés pour rompre un peu la monotonie. Une nouveauté réjouissante fait malgré tout son apparition : le mode deux joueurs. Chacun se débattra de son côté avec les mêmes pièces, et tâchera de survivre plus longtemps que son adversaire… et c’est tout. Il est hélas totalement impossible d’envoyer des malus à son opposant, comme cela sera popularisé, de manière particulièrement jouissive, par des titres comme Puyo Puyo. Chacun joue en fait dans son coin sans impacter en rien la partie de l’autre – et il est même tout à fait possible pour un joueur culotté de laisser tomber les pièces le plus lentement possible en attendant que son adversaire s’enfonce tout seul.

Ici, une gemme violette bien placée vous permettra de détruire deux lignes à la fois

C’est d’ailleurs le plus grand regret laissé par le très bon titre qu’est Columns : celui d’avoir conçu un système ingénieux et de l’avoir livré tel quel sans jamais avoir cherché à le creuser en profondeur. Le jeu est réellement amusant en solo, et peut le rester un très long moment tant l’aspect stratégique qu’il instaure lui donne une profondeur que n’avait pas nécessairement le logiciel imaginé par Alekseï Pajitnov, mais on ne peut que grincer des dents en voyant que le titre tient finalement en deux écrans, et que le mode deux joueurs aurait pu être extraordinairement convivial si on avait simplement pris la peine d’y réfléchir dix minutes. En l’état, SEGA avait déjà parfaitement rempli sa mission en parvenant à imaginer un programme parfaitement apte à rivaliser avec le tabac planétaire qu’était Tetris – mais au lieu de révolutionner le genre une deuxième fois, Columns aura finalement plutôt montré la voie à d’autres puzzle games plus ambitieux – au hasard, Puyo Puyo, encore lui. Ce n’est déjà pas si mal.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20 En remplaçant les formes utilisées dans Tetris par des couleurs, Columns ne s'est pas contenté d'engendrer un clone sympathique à peu de frais ; il a surtout contribué à ajouter une mécanique très importante au sein du puzzle game en créant le système de combo, et avec lui tout un nouveau degré de planification à moyen terme. Grâce à cette dose de stratégie supplémentaire qui doit toujours composer avec la pression du temps, le titre imaginé par SEGA demeure, aujourd'hui encore, capable de se rendre addictif pendant plusieurs dizaines d'heures. Il est d'autant plus dommage qu'il n'offre qu'un seul mode de jeu et que le mode deux joueurs se montre finalement assez peu intéressant, sans quoi on aurait sans doute tenu là une série majeure qui aurait laissé une trace plus marquante encore dans l'histoire du jeu vidéo. CE QUI A MAL VIEILLI : – Un seul mode de jeu – Un mode deux joueurs mal pensé et extrêmement sous-exploité – Présentation minimaliste (un seul décor, un seul thème musical)

Version Arcade (Mega-Tech)

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et trois boutons
Version testée : Version européenne
Hardware : SEGA Mega-Tech
Processeurs :Motorola MC68000 7,670453MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz ; Zilog Z80 3,579540MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; YM2612 OPN2 7,670453MHz ; SEGA 315-5246 SMS2 VDP 10,73862MHz ; SEGA VDP PSG 3,57954MHz ; 2 canaux
Vidéo : 256 x 224 (H) 59.922738 Hz (x2)
On ne peut pas dire qu’on soit surpris par ce qu’on trouve dans cette version

Quelques mois à peine après avoir investi les salles d’arcade, Columns y sera retourné… mais cette fois, en tant que portage du jeu sur Mega Drive. Je vous renvoie au test de cette version quelques paragraphes plus bas, mais en résumé : voilà bien un portage qui n’avait aucune raison de rougir face à la borne dont il était tiré, y compris sur le plan de la réalisation, pratiquement identique. Seule nuance, comme toujours : un crédit achetait ici du temps de jeu. Comme l’offre Mega-Tech n’existe plus depuis belle lurette, il y a de fortes chances pour que vous ne puissiez vous essayer à cette borne que via l’émulation – auquel cas, il ira de toute façon plus vite d’émuler la Mega Drive elle-même. Subsiste donc une version que seule la curiosité pourra vous amener à essayer, et qui reste de toute façon l’une des meilleures.

NOTE FINALE : 17/20

Comme toujours avec Mega-Tech, cette version de Columns n’est évoquée ici que dans un souci d’exhaustivité, et vous saurez tout ce qu’il y a à savoir en vous reportant directement au test de la version Mega Drive.

Version Game Gear

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 6 octobre 1990 (Japon) – 26 avril 1991 (États-Unis) – 29 juin 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Gear-to-Gear)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 256kb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La Game Boy avait son Tetris ? Alors la Game Gear aurait son Columns ! Le succès du bundle de chez Nintendo, qui vendait sa console portable avec le hit d’Alekseï Pajitnov, avait de quoi donner des idées à SEGA – on pourrait même se demander si ce n’est pas la principale raison pour laquelle la firme japonaise a tenu à développer Columns. Quel meilleur pied de nez, pour répondre à la console monochrome de la concurrence, que de programmer un jeu basé sur la couleur ? Tetris était jouable à deux avec deux consoles et un câble adapté ? Alors Columns aurait la même fonction ! Bref, pour lancer la rivale de la Game Boy, quelle meilleure option que de proposer la même chose en mieux ?

Le jeu est désormais bien plus paramétrable

On remarquera d’ailleurs que le portage se montre bien plus généreux que l’original au niveau des options. On a cette fois un menu de sélection, qui permet non seulement de sélectionner le niveau de départ, mais également de choisir parmi trois thèmes musicaux au lieu d’un seul. Le niveau de difficulté est toujours présent, mais il impacte désormais le nombre de couleurs mises en jeu, de quatre (easy) à six (hard). Cerise sur le gâteau, le titre propose également un deuxième mode de jeu, poétiquement nommé « Flash », et qui propose de parvenir à détruire une gemme placée au fond d’un tableau déjà à moitié rempli. Bref, une bonne partie de ce qui manquait à la version arcade est désormais présent, et on ne peut que s’en réjouir. Pour ne rien gâcher, la réalisation est elle aussi très agréable. La lisibilité est parfaite, les thèmes musicaux rentrent aussi facilement dans le crâne que ceux de Tetris, et le décor de fond a même la bonne idée de se modifier d’un niveau à l’autre ! Ce n’est certes pas une orgie graphique apte à servir de vitrine technologique, mais c’était déjà largement assez pour aller chercher la Game Boy sur son propre terrain.

Prends ça, Tetris !

NOTE FINALE : 16,5/20

Pensé comme une réponse au Tetris de la Game Boy, Columns sur Game Gear remplit son rôle avec un tel brio qu’on aurait facilement pu croire, en se basant sur ce premier titre, que la portable de SEGA connaitrait un meilleur sort. Non seulement le jeu est largement aussi agréable à pratiquer que sur arcade, mais il dispose en plus d’un contenu étendu qui rend cette version supérieure à l’originale. Parfaitement adapté aux courtes sessions de jeu, le logiciel développé par SEGA se montrera toujours aussi prenant après des dizaines d’heures de pratique : ce qu’on appelle une mission réussie, à tous les niveaux.

Version Mega Drive

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 30 juin 1990 (Japon) – Septembre 1990 (États-Unis) – Février 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version 1.1 internationale
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien évidemment, Columns n’était pas juste pensé pour être vendu en bundle avec la Game Gear ; c’était également un candidat naturel pour le lancement occidental de la Mega Drive. On sera heureux, à ce titre, de retrouver l’intégralité du contenu de la version arcade (mode deux joueurs inclus) avec une qualité quasiment équivalente, ainsi que tous les ajouts de la version Game Gear – mais pas uniquement. Un troisième mode de jeu fait également son apparition, ou plutôt, une nouvelle façon de jouer qui pourra être appliquée à tous les autres modes. La fonction « doubles » inclut en effet une approche assez particulière : il s’agit d’un mode deux joueurs… en coopératif. Concrètement, chaque joueur place une pièce à tour de rôle, et dispose de son propre indicateur pour voir de quel pièce il bénéficiera ensuite. Une idée très originale – et d’ailleurs très peu réutilisée depuis – qui permet enfin à deux joueurs de pratiquer une partie commune plutôt que de jouer chacun sur leur grille. Bref, la principale lacune de la version arcade, à savoir son manque de modes de jeu, commence à ne plus être qu’un lointain souvenir.

Tout le contenu de la version arcade est toujours là…

NOTE FINALE : 17/20

En poursuivant son petit bonhomme de chemin sur les consoles de salon, Columns a sérieusement gagné en épaisseur et l’unique mode de jeu de la version arcade est désormais accompagné sur Mega Drive d’une multitude d’ajouts, à un comme à deux joueurs. Bénéficiant en plus d’une réalisation qui n’a rien à envier à celle de son modèle, ce portage est indéniablement une des meilleures versions du titre de SEGA.

Version Master System

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Septembre 1990 (États-Unis) – Décembre 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Un jeu SEGA ne pouvait pas décemment être publié sur Mega Drive et sur Game Gear en oubliant, au passage, l’ainée de la famille. La Master System aura donc naturellement profité à son tour de son portage de Columns. Au menu : très exactement tout ce qu’on pouvait trouver sur la version Mega Drive – mais en moins fouillé graphiquement, cela va de soi. On remarque d’ailleurs que les décors fixes des précédentes versions ont cette fois laissé la place à des décors animés : un fond étoilé pour le mode arcade (en gros, un grand fond noir avec trois pixels qui bougent) et une route défilant façon Hang-On pour le mode « Flash ». Rien de bien extraordinaire – surtout que ces fameux décors ne changent pas en cours de partie – mais on appréciera l’effort.

C’est moins beau que sur Mega Drive, mais en terme de contenu, c’est la même chose

NOTE FINALE : 16,5/20

Comme sur Mega Drive, Columns sur Master System récupère la totalité des modes de jeu développés depuis lors, parmi lesquels les fameux modes « versus » et « doubles » (ici simplement appelé « 2 players ») qui aident à profiter du jeu sur la durée. La réalisation n’est certes pas très impressionnante – mais pour un puzzle game, est-ce franchement un drame ? Le plaisir de jeu, lui, est toujours là et bien là.

Version MSX

Développeur : Compile
Éditeur : Telenet Japan Co., Ltd.
Date de sortie : 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joypad
Version testée : Version disquette japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2
C’est joli, mais où est passé le contenu ?

Confié aux développeurs de Compile (dont on connait l’extrême appétence pour les shoot-them-up), Columns aura naturellement fait un détour par le MSX, ou plutôt le MSX 2 pour une version… eh bien, un peu décevante. Oh, il n’y a rien à dire du côté de la réalisation : les graphismes comme la musique sont parfaitement réussis, et la jouabilité ne rencontre bien évidemment aucun problème. En revanche, du côté des options, c’est la cure d’amincissement : non seulement le mode deux joueurs a disparu, mais en plus il n’y a qu’un seul et unique mode de jeu en solo – inutile d’espérer profiter des nouveautés aperçues sur les machines SEGA, ici ce sera le mode arcade ou rien ! Alors certes, il est possible de gonfler la difficulté jusqu’à jouer avec huit couleurs, mais cela reste quand même un peu léger. Du coup, même s’il est tout-à-fait possible de s’amuser avec cette version, on ne pourra que conseiller les joueurs de se diriger vers une autre itération, au hasard celle parue sur Mega Drive.

NOTE FINALE : 15/20

Columns sur MSX 2 accomplit le nécessaire sur le plan technique, mais le contenu ne suit pas : un seul mode de jeu, plus aucune possibilité de jouer à deux, on ne peut vraiment pas dire qu’on croule sous les options. L’essentiel étant là, le joueur occasionnel ne devrait pas se sentir trop lésé, mais pour ceux qui souhaiteraient quelque chose de plus consistant, le mieux est sans doute de se diriger vers n’importe quelle autre version.

Version PC Engine

Développeur : Shin-Nihon Laser Soft Co., Ltd.
Éditeur : Telenet Japan Co., Ltd.
Date de sortie : 29 mars 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Columns ne se sera pas cantonné aux machines SEGA : une partie de la concurrence aura, elle aussi, pu bénéficier de sa propre version. C’est ainsi que la PC Engine aura pu accueillir, avec un peu de retard, une version assez proche de celle parue sur Mega Drive – mais curieusement cantonnée au marché japonais. C’est toujours aussi joli, c’est toujours aussi jouable, c’est un tout petit peu moins fin et la musique est d’une qualité légèrement inférieure, mais pas vraiment de quoi tourner les talons devant ce très sympathique portage. En revanche, le mode « Flash », lui, a disparu, mais c’est la seule victime collatérale de cette adaptation.

Rien de bien neuf sous le soleil, mais c’est toujours aussi joli

NOTE FINALE : 16,5/20

Columns sur PC Engine était à deux doigts de prétendre faire aussi bien que l’excellente version Mega Drive, mais la disparition inexpliquée d’un mode de jeu pénalise une version qui n’a autrement pas grand chose à se reprocher. Comme souvent, la console de NEC s’invite sans difficulté dans la cour des consoles 16 bits, même si l’honneur est sauf pour SEGA qui sauvegarde la meilleure version pour sa console de salon.

Version PC-98

Développeur : SystemSoft
Éditeur : SystemSoft
Date de sortie : 26 juillet 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version japonaise
Configuration minimale :
Les graphismes manquent un peu de panache, mais il y a de quoi s’amuser

Développée et publiée par SystemSoft, cette itération PC-98 de Columns est un peu la version MSX en négatif. Comprendre par là que, malgré la haute résolution, c’est cette fois la réalisation graphique qui est un peu décevante, la faute à des grands fonds souvent assez vides qui ne restituent pas exactement l’ambiance de la version arcade. Mais alors pour ce qui est du contenu, pardon ! Tous les modes de jeu aperçus sur Mega Drive sont de la partie : normal, flash et versus, avec à chaque fois une variante multijoueur pour les modes solos, et on notera même l’apparition d’un mode « stage » correspondant à des niveaux flash qu’il est possible d’enchaîner, avec même une sauvegarde en sortant. Et pour faire bonne mesure, il est également possible de configurer la difficulté, le niveau de départ, et de choisir ses gemmes et ses décors parmi quatre sets différents ! Bref, pour ceux qui seraient venus chercher du contenu, cette fois pas de discussion, c’est ici qu’ils trouveront leur bonheur. Ceux qui déprimeraient un peu devant la réalisation, pour leur part, trouveront certainement largement leur compte sur Mega Drive.

Les modes de jeu devraient avoir de quoi vous garder occupé

NOTE FINALE : 17/20

Cela se joue à peu de choses, car certaines options (en particulier du côté du multijoueur) sont un peu gadgets, mais Columns sur PC-98 est clairement la version à choisir en termes de contenu. Dommage que la réalisation ne se hisse pas à la hauteur de ce qu’on peut trouver sur les consoles 16 bits, mais pour le reste, c’est absolument inattaquable.

Version Sharp X68000

Développeur : SystemSoft
Éditeur : SystemSoft
Date de sortie : 16 octobre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :
Yep, le portage n’a pas dû demander des ressources exceptionnelles

Avec la même équipe aux commandes que pour la version PC-98, on ne s’attend pas nécessairement à de grands bouleversements au moment de lancer Columns sur Sharp X68000… et ça tombe bien, puisqu’on n’en obtient pas. Inutile de faire durer le suspense : ce portage est tout simplement la transition pixel perfect – ou presque, la résolution ayant changé pour passer de 640×400 à 512×512 – de l’itération PC-98. Ceux qui espéraient que le passage sur la puissante machine de Sharp puisse inspirer une refonte graphique et sonore en seront donc pour leurs frais, mais la bonne nouvelle est que tous les modes de jeu, eux, sont toujours là.

NOTE FINALE : 17/20

Simple transposition de l’itération parue sur PC-98, on pourra se lamenter de ce que Columns sur Sharp X68000 ne cherche jamais réellement à profiter des capacités de la machine qui l’héberge, mais au moins tous les modes de jeu sont-ils là.

Version PC-88

Développeur : SystemSoft
Éditeur : SystemSoft
Date de sortie : Avril 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version japonaise
Configuration minimale :
Ca commence quand même à faire un peu « version au rabais »

Signe de la transition qui commençait à s’opérer au sein de la gamme de NEC au début des années 90, le PC-88 aura été servi après le PC-98 au moment d’héberger sa version de Columns. Parler de « sa » version est d’ailleurs sans doute un abus de langage : Comme on pouvait s’y attendre, il s’agit très exactement du même jeu que sur PC-98 et Sharp X68000, mais avec seulement seize couleurs disponibles à l’affichage. Le résultat est parfois un peu terne, pour ne pas dire moche, mais le contenu, lui, n’a fot heureusement pas varié d’un iota. Néanmoins, inutile de vous donner toutes les peines du monde à dénicher cette version, sauf à être un collectionneur de tout ce qui sort sur PC-88.

NOTE FINALE : 16,5/20

Difficile de dire ce qui aura bien pu demander un an pour porter cette version de Columns, simple transposition extrêmement paresseuse du portage réalisé pour le PC-98, sur PC-88. Dans tous les cas, si la réalisation n’est vraiment pas fameuse, le contenu, lui, est toujours de la partie et c’est bien là l’essentiel.

Version Super Famicom

Développeur : Marigul Management, Inc.
Éditeur : Media Factory, Inc.
Date de sortie : 1er août 1999 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Shocking ! Un jeu SEGA sur une console Nintendo ? La chose est surprenante, mais l’année de sortie extrêmement tardive du titre nous livre déjà un indice : à la fin du XXe siècle, la carrière de la firme au hérisson, en tant que constructeur, n’était pas au mieux. La Saturn pouvait d’ores et déjà être considérée comme morte et enterrée face à la déferlante PlayStation, et la flambant neuve Dreamcast commençait à peine à arriver en occident. Curieux choix, malgré tout, de porter un jeu aussi ancien que Columns sur une machine 16 bits qui ne représentait certainement pas le marché le plus porteur à la veille de l’arrivée des consoles de sixième génération… Du côté de la réalisation, en tous cas, difficile de prendre le jeu en défaut : non seulement c’est beau, mais on a en plus le choix entre différents types de gemmes, et le titre propose pas moins d’une vingtaine de thèmes musicaux. En revanche, les décors ne changent plus, et surtout tous les modes de jeux « coopératifs » à deux joueurs sont purement et simplement passés à la trappe, tout comme le mode « Flash », autant de manques que ne compense pas l’apparition d’un tutoriel franchement inutile.

On pourra au moins varier les plaisirs en échangeant les gemmes pour des fruits ou des animaux

NOTE FINALE : 16/20

Neuf ans d’attente pour voir Columns enfin porté sur Super Famicom – et SEGA aura poussé le pied de nez jusqu’à faire en sorte que cette version ne soit même pas la meilleure. Difficile de savoir pourquoi la plupart des modes marquants du jeu ont purement et simplement disparu, on se retrouve désormais avec le contenu de la version arcade et rien d’autre, ce qui était franchement gonflé en 1999. On comprend mieux que ce portage n’ait jamais daigné quitter le Japon.

Flood

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : Bullfrog Productions, Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Testé sur : AmigaAtari ST

Version Amiga

Date de sortie : Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme tous les vieux briscards de l’informatique le savent déjà, Bullfrog Productions, la société fondée par Peter Molyneux, a longtemps été le studio de tous les succès planétaires : de Populous à Theme Hospital, de Syndicate à Dungeon Keeper, chaque jeu issu des écuries Bullfrog semblait destiné à devenir un hit instantané. Une sorte de pierre philosophale qui pouvait transformer n’importe quel concept en or.

Méfiez-vous du fantôme !

Cela revient malgré tout à oublier que cette glorieuse légende est une version sensiblement embellie de la réalité. Non que le succès de la compagnie anglaise soit exagéré – celle-ci s’est très bien portée à peu près jusqu’au début du XXIe siècle, merci pour elle – mais cette vision un tantinet romantique d’une perfection atteinte dans tous les domaines occulte sciemment des titres aujourd’hui largement tombés dans l’oubli. Combien de joueurs actuels ont entendu parler de titres pourtant développés par Bullfrog comme Fusion, Enlightenment… ou même Flood, le jeu qui nous intéresse aujourd’hui ?

Voici Quiffy dans ses œuvres, lors de son odyssée vers la surface

À sa sortie, en 1990, ce qui était déjà le quatrième titre développé par les studios de Peter Molyneux avait pourtant fait du bruit, à sa manière, pour deux raisons. La première, comme on peut s’en douter, était qu’il s’agissait du « nouveau jeu du créateur de Populous », nous ne nous attarderons donc pas dessus. La seconde était quelque chose de plus inscrit dans l’époque : c’était le sentiment qu’une équipe occidentale était enfin parvenue à développer un jeu de plateforme capable de rivaliser avec les titres japonais qui paraissaient sur les consoles de salon – à commencer par la flambant-neuve Mega Drive – et qui commençaient à faire beaucoup, beaucoup d’ombre aux titres publiés sur les ordinateurs 16 bits. La vraie question est de savoir si cette affirmation reste vraie près de trente ans après la sortie du jeu.

Quiffy est un bon nageur, mais il ne tiendra pas longtemps sous l’eau

Flood vous place aux commandes d’un sympathique… heu, truc ?… appelé Quiffy. Malgré sa bonne bouille, Quiffy est en réalité le héros d’une situation tragique : il est le dernier représentant de son espèce, qui survivait sous terre depuis des siècles en collectant les déchets d’une mystérieuse civilisation de la surface. Malheureusement, son peuple a été exterminé par d’étranges créatures, et pour ne rien arranger, voilà que des litres d’eau envahissent les galeries où il vit, menaçant d’inonder définitivement son habitat. Ne pouvant vivre sous l’eau, Quiffy décide d’entreprendre le voyage de la dernière chance : celui qui le mènera jusqu’à la surface. Il devra pour cela traverser 42 niveaux – et collecter les déchets qui lui permettront d’assurer sa survie.

Les choses ne vont pas tarder à se gâter

Pour se faire, la créature imaginée par Bullfrog dispose d’une panoplie typique : elle peut bien évidemment sauter, mais aussi faire usage de toute une variété d’armes qu’elle trouvera au gré des niveaux (une à la fois, hein, ce n’est pas un run-and-gun), de la grenade au boomerang en passant par le lance-flammes, et qui lui permettront de se débarrasser de l’opposition sur sa route. Jusqu’ici, en-dehors du contexte, on ne peut pas dire qu’on ait vu grand chose d’original. Heureusement, Flood a la bonne idée de ne pas s’arrêter en si bon chemin et de proposer une série de petites trouvailles destinées à transformer le titre en autre chose qu’un énième clone de Super Mario.

Flood comprend son lot de salles cachées

La première est le déroulement du jeu, qui lui vaut parfois le sobriquet de « Collect-them-up ». Dans Flood, atteindre la fin du niveau n’est pas nécessairement très difficile – on pourrait même dire qu’il s’agit de la partie « aisée » du jeu. La vraie difficulté, c’est que cette sortie ne s’ouvrira que si vous avez collecté tous les déchets du niveau, dont le nombre restant est indiqué par un compteur sobrement intitulé « trash » en haut de l’écran. Si trouver ces déchets ne devrait pas vous demander de gros efforts lors des premiers niveaux, les choses ne tardent pas à se compliquer, et même si le jeu n’est jamais assez stupide pour aller dissimuler ces précieux sésames derrière des passages secrets comme dans un vulgaire Daffy Duck in Hollywood, le programme ne va pas tarder à se transformer en un logiciel d’exploration qui vous demandera de visiter méthodiquement des niveaux de plus en plus tentaculaires – dans des conditions de plus en plus délicates, cela va de soi.

On regrettera que les environnements ne soient pas plus variés

La bonne nouvelle, c’est que Quiffy n’est pas juste une créature capable de sauter : votre héros peut également se promener sans difficulté sur les murs ou au plafond avec une aisance à en humilier le premier Strider venu. Cela va bien sûr modifier drastiquement votre façon d’aborder une situation, l’aspect plateforme du titre vous demandant le plus souvent de réfléchir à la façon intelligente d’atteindre une corniche plutôt que de multiplier des sauts au millimètre. C’est, mine de rien, une vraie trouvaille de gameplay qui bouscule réellement la routine des titres du genre – et qui donne lieu à quelques situations assez imaginatives, même si on ne peut s’empêcher de penser, par moment, que l’idée a été légèrement sous-exploitée, surtout quand on pense à des titres comme VVVVVV qui ont bâti, bien plus tard, toute leur jouabilité sur le simple fait de jouer avec la gravité. Cela reste néanmoins suffisamment rafraîchissant pour nous pousser à prolonger l’expérience pendant plusieurs heures.

Quiffy a beau être sympa, faut pas l’énerver trop longtemps !

La mauvaise nouvelle, c’est que Quiffy devra également composer avec deux difficultés qui viendront remplacer le chronomètre qui avait tendance à punir les joueurs un peu trop lents dans les programmes de l’époque. La première est celle qui donne son nom au jeu : la lente inondation qui viendra progressivement noyer les niveaux, et qui verra l’eau monter jusqu’au plafond. Si Quiffy est capable de nager, il ne peut retenir sa respiration (figurée par une barre bleue) que quelques secondes, après quoi il commencera à perdre de la vie (figurée, cette fois, par une barre marron) avant de trépasser lamentablement.

Chaque niveau a ses propres pièges à surmonter. Comment passer ?

Mieux vaut donc que votre exploration soit aussi méthodique que rapide, sans quoi les choses ne vont pas tarder à aller en se compliquant. D’autant qu’il faudra également composer avec une deuxième difficulté originale (et qui sent l’hommage à Spelunker) : le fantôme de la tante de Quiffy. Kezaco ? Ce spectre va apparaître dans tous les niveaux, un peu après vous, et suivre un trajet très précis : il va reproduire exactement tous vos mouvements. Il vous blessera en vous touchant – jusqu’à vous tuer – ce qui signifie que vous aurez tout intérêt à rester mobile et surtout à limiter autant que possible les allers-et-retours et les trajets qui vous amèneront à le recroiser. C’est donc un autre critère à prendre en compte pour optimiser vos trajets et pour augmenter vos chances de survie.

Parfois, collecter des déchets vous demandera juste d’avancer en ligne droite

Tout cela fait qu’un joueur connaissant parfaitement un niveau et son parcours « optimal » s’en sortira beaucoup mieux qu’un explorateur confus, ou qu’un joueur lâché dans un stage pour la première fois. C’est d’ailleurs le plus grand facteur de rejouabilité du titre, qui a également le bon goût de vous proposer un système de mots de passe… à condition de les trouver. Chaque niveau comprend en effet son lot de passages dérobés et de bonus cachés, et mettre la main sur un mot de passe vous demandera d’abord de fouiner partout – ce qui correspond à une prise de risque supplémentaire, puisque le temps joue contre vous.

Ici, la collecte sera un peu plus compliquée

Un bon moyen de placer le joueur sur la corde raide pour une raison qui en vaut la chandelle, même si on aurait sans doute tout autant apprécié que le programme se contente de nous donner ces maudits codes… Trouver ces fameux mots de passe n’est de toute façon plus un problème à l’âge d’internet, ce sera donc au joueur moderne de décider à quel point il a envie de jouer le jeu ou de s’épargner le fait de refaire plusieurs niveaux en boucle faute d’avoir trouvé le sésame. La question pourra d’autant plus se poser que Flood est loin d’être un jeu facile, et que sans être exagérément punitif, le programme nécessitera une patience certaine pour être mené à son terme.

Certains bonus, comme cette balle sauteuse, sont assez originaux

Côté réalisation, le logiciel de Bullfrog a cette aura particulière des titres Amiga et Atari ST du début des années 90 – on pense aussitôt à des jeux comme Magic Pockets. Une fois la nostalgie mise de côté, néanmoins, quand on compare Flood à des programmes parus sur d’autres plateformes la même année – au hasard Castle of Illusion – on comprend immédiatement pourquoi les ordinateurs étaient en train de perdre la guerre menée par les consoles. Non que le jeu soit moche, loin de là, mais entre le manque de variété des environnements, les blocs très semblables qui les composent, l’absence de décor de fond remplacé par un bête aplat noir et surtout l’absence de musique, on sent que l’ambition de Flood est très loin de rejoindre celle des jeux qui commençaient à pulluler sur les machines japonaises. C’est dommage, car avec un peu plus de soin, le titre aurait très certainement acquis une renommée à la hauteur des programmes plus huppés de la compagnie anglaise – il devra se contenter de n’être qu’un autre jeu sympathique disparu dans un relatif anonymat.

Vidéo – Les cinq premières minutes de jeu:

NOTE FINALE : 14/20 Au milieu des très nombreux jeux de plateforme parus sur ordinateurs 16 bits, Flood est plus qu'une curiosité : un titre réellement original, agréable à jouer, rempli de petites trouvailles de gameplay qui font qu'on aura encore beaucoup de mal, aujourd'hui, à lui trouver un réel équivalent. Emmener Quiffy en quête de ses déchets au sein de cavernes menacées d'être inondées reste une aventure dépaysante qui récompensera l'exploration autant que la créativité. Dommage que la réalisation assez plate du titre rende les niveaux redondants et ternisse quelque peu la magie. CE QUI A MAL VIEILLI : – Réalisation décevante : des fonds noirs, des niveaux qui se ressemblent et pas de musique – Le principe de recherche systématique, des déchets à collecter jusqu'aux mots de passe du jeu, ne plaira pas à tout le monde – Comme pour tous les jeux de cette période, le défi est corsé

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Flood sur un écran cathodique :

Version Atari ST

Développeur : Bullfrog Productions1 Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Date de sortie : Juillet 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme Bullfrog nous y avait déjà habitué, Flood a été développé dès le départ pour sortir parallèlement sur Amiga et Atari ST. Autant dire que les deux versions sont extrêmement proches – ce qui aurait tendance à nous confirmer, une nouvelle fois, que la machine de Commodore était très loin d’être poussée dans ses derniers retranchements. Que ce soit au niveau graphique ou sonore, une fois passé l’écran-titre, difficile de faire la différence – on remarquera, malgré tout, que l’interface a été déplacée vers le bas de l’écran, avec des barres de santé et d’oxygène plus grandes et plus lisibles, tandis que les mots « trash » et « lives » ont été remplacés par de petites icônes largement aussi parlantes. En revanche, le « défilement » du jeu, si on peut appeler ainsi la transition d’un écran à l’autre, est nettement moins fluide sur ST. Des nuances qui demeurent assez anecdotiques.

Les possesseurs d’Atari ST n’auront pas de quoi jalouser les possesseurs d’Amiga

NOTE FINALE : 14/20

Copie conforme à 95% pour ce Flood sur Atari ST : c’est pratiquement la même chose que sur Amiga, en un peu plus saccadé. Difficile de privilégier une version plutôt qu’une autre, mais le titre de Bullfrog reste dans les deux cas une curiosité à découvrir.

Les avis de l’époque :

« Au niveau de l’imagination, les programmeurs de Bullfrog n’ont rien à envier aux japonais, qui sont pourtant des maîtres. En effet, Flood fourmille d’idées originales. (…) Flood bénéficie d’une réalisation soignée, avec un graphisme assez particulier. Bien sûr, les sprites sont petits, mais cela est inévitable dans ce type de jeu. Ce sont mes seules réserves, car on sent qu’il ne s’agit pas d’un soft bâclé, comme c’est assez souvent le cas sur micro. »

Alain Huygues-Lacour, Tilt n°81, Septembre 1990, 17/20

Sid Meier’s Railroad Tycoon

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : MPS Labs
Éditeur : Microprose Software, Inc.
Titre alternatif : Railroad Tycoon (titre usuel)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STMacintoshPC-98
Version non testée : FM Towns
Également testé : Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe
Testé sur : PCPC-98

La saga Railroad Tycoon (jusqu’à 2000) :

  1. Sid Meier’s Railroad Tycoon (1990)
  2. Railroad Tycoon II (1998)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Juin 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25 (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0* – RAM : 512ko**
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Tandy/PCjr, Tandy DAC (TL/SL)
*MS-DOS 5.0 requis pour la version CD-ROM
**640ko requis pour le mode VGA, 4Mo requis pour la version CD-ROM

Vidéo – L’introduction du jeu :

Lorsque l’on cherche à comprendre ce que nous propose réellement un jeu vidéo au fil des âges, on retrouve grosso modo cinq activités qui pourraient à elle seule résumer la quasi-totalité de la production vidéoludique depuis les années 70 : éviter des obstacles, détruire des trucs, tuer des gens, résoudre des énigmes… et aller travailler.

Vous aurez même l’occasion de battre quelques records tandis que vos trains se moderniseront

Si cette dernière catégorie peut surprendre – après tout, le jeu vidéo est plutôt une manière de s’évader, et on préfère généralement effectuer une activité professionnelle pour toucher un salaire et non payer pour aller bosser – il faut bien comprendre qu’au lieu de vous demander d’aller changer une ampoule ou de remplacer la chasse d’eau, l’idée était généralement de vous confronter à des métiers un peu plus ambitieux que celui d’ouvrier non-qualifié. En fait, plutôt que dans la position du travailleur, le jeu vidéo a souvent considéré comme plus pertinent de vous placer dans celle de l’entrepreneur ou du gestionnaire. Après tout, il n’est pas nécessairement donné au commun des mortels de se retrouver à la tête d’une puissante chaîne d’hôtels, d’une ville… ou d’une compagnie de chemins de fer.

Le terrain de jeu est immense, et les réseaux peuvent vite être tentaculaires

Si, en 1990, Sid Meier ne s’était pas encore fait un nom au point d’être connu à l’échelle planétaire auprès des joueurs, il avait déjà pu démontrer tout son savoir-faire en terme de simulations historiques (et sa tendance mégalomane à inscrire son nom partout) grâce à Sid Meier’s Pirates! en 1987 – un titre qui évoquera encore d’interminables parties mêlées d’aventure et de chasse au trésor aux vieux briscards émus. Mais même au XXIe siècle où son nom est immédiatement associé à la saga Civilization, combien ignorent encore que Sid est également l’initiateur d’une autre grande série, celle des Tycoon, qui avant même de vous proposer de diriger des pizzérias, des zoos ou des hôtels, vous plaçait dans le costume d’un des grands pontes du chemin de fer avec Railroad Tycoon ?

Le tracé de vos voies ne peut pas être fait n’importe comment et nécessitera parfois une réflexion poussée

Le titre édité par Microprose vous propose a priori un objectif simple: créer votre compagnie de chemin de fer à l’une des époques pionnières sélectionnables en début de partie, depuis la côte est des États-Unis en 1830 jusqu’à l’Europe en 1900 (un choix de date d’ailleurs assez étrange dans ce dernier cas : le vieux continent était déjà largement couvert de voies ferrées au début du XXe siècle). Selon le niveau de difficulté sélectionné, une partie pourra s’étendre sur 40 à 100 ans et, à l’instar de SimCity, il n’y a pas de réel objectif en-dehors de la prospérité – et de ce plaisir inexplicable qu’on ressent à aller construire des trucs partout – la différence étant que le jeu bénéficie bel et bien d’une fin et d’un score qui vous aidera à mesurer la qualité de votre performance. La difficulté, modulable selon plusieurs critères, aura un impact tant sur votre score que sur votre façon de jouer comme nous le verrons bientôt ; mais avant d’entrer dans les détails, commençons déjà par le commencement : vos premiers instants dans Railroad Tycoon.

Penchez-vous sur les capacités de vos locomotives pour optimiser vos lignes

Quel que soit le cadre choisi, le titre commencera par vous placer devant une carte très imposante – qu’il s’agisse du Royaume-Uni ou d’un continent entier, attendez-vous à découvrir un terrain de jeu comprenant à chaque fois pas loin d’une centaine de villes. Ces villes, d’ailleurs, comme tout ce qui les entoure, ne sont pas de simples espaces symboliques matérialisés par une case, mais bien des assemblages de différentes habitations, services et commerce qui auront un impact durable sur les marchandises que vous souhaiterez transporter à l’aide de vos trains.

Mieux vaudra concevoir vos trajets avec le plus grand soin

Une petite bourgade de quelques milliers d’habitants n’offrira pas autant de clients qu’une mégalopole, et une mine de charbon ne fournira pas les mêmes matières premières qu’une scierie ou qu’un puits de pétrole. Votre première préoccupation, celle à laquelle vous ne devrez pas hésiter à consacrer plusieurs minutes, sera donc de trouver l’endroit idéal pour démarrer votre compagnie, le plus souvent dans une position centrale peuplée ou riche en ressources, afin qu’elle constitue la première pierre de votre future empire. L’intérêt sera de penser à long terme dès le début du jeu, car si vous serez libre de construire votre première ligne n’importe où sur la carte, toutes les suivantes devront nécessairement partir de votre réseau initial – d’où l’intérêt de ne pas aller s’isoler dans une zone prometteuse, mais entourée de régions économiquement sans intérêt.

L’interface de composition des trains est très complète

Le plus simple est généralement de commencer par relier deux grandes villes : les transports de passagers et de courrier devraient vous assurer un revenu stable et modérément impacté par la conjoncture économique. Vous allez donc utiliser votre capital de départ pour construire une voie de chemin de fer tronçon par tronçon, en réfléchissant bien à votre trajet pour éviter les détours inutiles, les reliefs qui pénaliseraient la vitesse de vos trains, et les fleuves qui vous imposeraient de construire d’imposants – et coûteux – ponts qui auraient eux aussi un impact sur la vitesse de pointe de vos machines. Puis vous construisez deux gares dont la taille définira le rayon d’action, et vous achetez votre premier train.

Il faudra également composer avec la conjoncture économique

Ce sera l’occasion pour vous de sélectionner votre locomotive parmi une sélection qui ira en s’étendant au gré de la partie et des avancées technologiques. Loin d’être purement esthétique, ce choix mérite d’être médité, car chaque machine a ses capacités propres, et un train capable de rouler très vite ne sera pas nécessairement la meilleure sélection pour aborder une côte à 5% ni pour trainer six wagons à sa suite. Mieux vaut donc savoir quelle quantité de marchandises vous vous apprêtez à transporter et sur quel type de terrain avant d’investir. Après quoi, vous aurez accès à une interface très complète qui vous permettra non seulement de composer votre train wagon par wagon, mais aussi de choisir son trajet, ses arrêts – libre à vous de lui faire desservir plusieurs gares – et même de changer la composition de son chargement à chaque étape. Après quoi, il quittera votre dépôt, et vous pourrez commencer à l’observer sur la carte du jeu, en temps réel, tout en suivant les rentrées d’argent qu’il génère.

Les différents niveaux de zoom ne délivrent pas les mêmes informations

Bien évidemment, il n’y aurait que peu d’intérêt à ce que votre empire ferroviaire se limite à une seule ligne et à un unique train. L’intérêt va donc être de partir à la recherche des trajets rentables, ce qui va vous obliger – particulièrement dans les niveaux de difficulté élevés – à vous pencher sur l’économie locale. S’il est tout à fait possible, à bas niveau, de transporter n’importe quoi n’importe où en ne vous souciant que de remplir vos wagons, il faudra rapidement commencer à s’intéresser à acheminer des matières premières vers les industries locales. Transporter du pétrole vers une ville, c’est une chose, mais le transporter vers une ville dotée d’une raffinerie est déjà beaucoup plus censé. Et une industrie rendue fonctionnelle par vos apports de matières premières génèrera à son tour de nouvelles ressources plus précieuses que vous serez libre de transporter vers un endroit qui en a besoin – ce qui devient bien plus intéressant. Rapidement, votre réseau ne se contentera pas de relier des villes, mais servira carrément d’infrastructure à une large part de l’économie locale qui ne pourra fonctionner que grâce à votre compagnie… ou aux sociétés adverses qui ne manqueront pas d’apparaître au gré du jeu afin de vous disputer vos précieuses parts de marché.

Quelques petites animations viennent égayer un peu la partie

Car le jeu ne rate bien évidemment pas l’occasion de vous confronter à une concurrence, qui ne se contentera pas de construire ses propres lignes, mais qui pourra également chercher à prendre le contrôle de votre compagnie en en achetant des parts – tout comme vous serez libre de faire la même chose, à condition, naturellement, d’en avoir les moyens. Autant dire que dans les niveaux de difficulté les plus élevés, là où le réalisme est le plus poussé, une part importante de vos ressources devra être consacrée au fait de garder le contrôle de votre entreprise, et de savoir investir ou vendre au bon moment afin de gagner en bourse ce que vous ne serez pas parvenu à obtenir par le commerce.

La réalisation était déjà dépassée au moment de la sortie du jeu

Il faudra aussi se préoccuper de l’entretien de vos locomotives, des fluctuations de l’économie, des inévitables accidents qui pourront se produire, des industries qui ne manqueront pas de se développer en temps réel… En fait, en dépit de l’absence d’objectif, on ne s’ennuie tout simplement jamais, les motifs de préoccupation ne manquant pas au gré du jeu – surtout lorsque vous commencez à vous retrouver à la tête d’un empire de plusieurs dizaines de lignes. Certes, on aurait pu apprécier d’avoir des missions avec des buts précis à remplir dans le temps – ce qui sera fait, et bien fait, dans le deuxième épisode – mais cela n’empêche pas le titre d’être doté de ce très parlant syndrome du « allez, je joue encore cinq minutes » alors que la nuit est déjà bien avancée.

Construire des voies peut être une gageure, surtout si vous débutez

Les vrais reproches à faire à Railroad Tycoon, au fond, se situeraient plutôt au niveau de la réalisation, et surtout de l’interface du jeu. Soyons francs : même en 1990, on trouvait ça moche. Le mode VGA du jeu est en fait en 16 couleurs, il n’y a aucun moyen d’augmenter la résolution, et la musique se limite à quelques jingles composés avec des vieux morceaux libres de droits et aux bruitages de vos trains – pour le reste, ce sera un silence de mort.

Les terrains de jeu ne manquent pas

Plus grave, maitriser l’interface nécessitera vraisemblablement un long passage dans le manuel, le simple fait de poser des rails étant anti-naturel au possible – on regrettera, à ce titre, que la souris soit aussi lourdement sous-exploitée. Au moins sera-t-on heureux d’apprendre que le jeu comme le manuel ont été traduits en français – dans un français assez brut de décoffrage en ce qui concerne le programme, mais il y a de toute façon assez peu de choses à traduire. Bref, tous ceux qui voudront lancer une partie en imaginant devenir un magnat en dix minutes en seront pour leurs frais : maîtriser tous les tenants et les aboutissants du jeu risque de réclamer plusieurs heures, le temps de découvrir et d’expérimenter les possibilités du titre. Le bon côté étant qu’il faudra, dans tous les cas, plusieurs semaines pour pouvoir prétendre en avoir fait le tour – encore faudra-t-il, naturellement, avoir accepté de souffrir quelques heures pour dompter enfin la bête et se lancer à la conquête du marché du rail.

Vidéo – Les dix premières minutes de jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1990 (Tilt n°85, décembre 1990) – Prix spécial du jury

NOTE FINALE : 16,5/20 Programme de gestion très complet et d'une richesse toujours aussi impressionnante près de trente ans après sa sortie, Sid Meier's Railroad Tycoon propose une épopée prenante capable de vous garder le nez au-dessus de vos trains pendant plusieurs dizaines d'heures. Si les mécanismes de jeu savent se montrer abordables pour se complexifier au gré de vos exigences,  dévoilant des possibilités de plus en plus étendues et de plus en plus intriquées les unes avec les autres, il faudra malheureusement composer avec une interface inutilement lourde ainsi qu'avec une réalisation des plus spartiates. Si cela ne devrait pas freiner les puristes, les nouveaux joueurs trouveront sans doute bien plus facilement leur bonheur avec les autres épisodes de la série. CE QUI A MAL VIEILLI : – Interface inutilement lourde qui ne tire pas réellement profit de la souris – Réalisation hideuse, même en 1990 – Même si le contenu est impressionnant, le jeu est finalement cantonné à un mode « bac à sable » – Difficile de retrouver une ligne spécifique lorsque les trains commencent à s'accumuler

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Railroad Tycoon sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Le système de jeu de Railroad Tycoon ressemble un peu à celui de Sim City. La prise en main est si facile qu’on entre rapidement dans le jeu. J’avoue que, dès que j’ai eu ce logiciel entre les mains, je ne l’ai plus lâché : c’est pire que Tetris ! Il n’y a pas de temps mort car le joueur a mille choses à faire. De plus, le réalisme a été très soigné et le jeu est très visuel. »


Dany Boolauck, Tilt n°79, Juin 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Sid Meier’s Railroad Tycoon aura également bénéficié de son adaptation sur les autres ordinateurs 16 bits, l’année suivant celle de sa sortie. Sans surprise, le jeu en lui-même n’a connu que peu de modifications – osons même dire que les mécanismes comme les possibilités sont strictement identiques à celles aperçues sur PC. La seule modification se trouve du côté de la réalisation : bon, d’accord, c’est plus coloré, mais ça ne casse toujours pas trois pattes à un canard. La musique n’étant pas franchement supérieure, elle non plus, à ce qu’on pouvait entendre sur la machine d’IBM, on ne peut pas dire qu’un possesseur de la version originale ait une bonne raison d’investir dans celle-ci… sauf, peut-être, l’existence d’une version française dont je n’ai jamais trouvé la trace sur PC. À noter que les utilisateurs d’Amiga 600, privés de pavé numérique, ne pourront tout simplement pas jouer au jeu puisqu’il ne pourront pas poser de voies ferrées.

Les graphismes sont plus colorés, mais c’est surtout la possibilité de jouer en français qui est appréciable

NOTE FINALE : 16,5/20

Railroad Tycoon a beau bénéficier de quelques couleurs de plus une fois porté sur Amiga, on ne peut pas franchement dire que le résultat ait valu un an d’attente. La réalisation du titre ne fait clairement pas partie de ses points forts, même et surtout sur une machine qu’on sait capable de faire infiniment mieux que ça, mais le plaisir de jeu est toujours intact, on s’efforcera donc de ne pas bouder notre plaisir – surtout à présent que le jeu est traduit en français.

Version Atari ST

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : Octobre 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À quoi était-on en droit de s’attendre en lançant la version Atari ST de Sid Meier’s Railroad Tycoon ? À un calque de la version Amiga. Et que trouve-t-on en lançant le jeu ? Un calque de la version Amiga – à quelques nuances près qui vous demanderont généralement de regarder les graphismes de très près pour constater qu’il y a des couleurs en moins, et la qualité sonore a comme très souvent souffert de la transition, mais honnêtement, rien de catastrophique, surtout pour le nombre de fois que vous risquez d’entendre la musique une fois l’écran-titre franchi. Pour le reste, tout est exactement identique à la version originale, je vous renvoie donc au test de la version PC.

Les couleurs sont un peu moins vibrantes et c’est légèrement moins détaillé, mais il faut vraiment scruter chaque pixel pour s’en rendre compte

NOTE FINALE : 16,5/20

Portage sans surprise, Sid Meier’s Railroad Tycoon sur Atari ST propose un calque fidèle de la version Amiga – qui n’avait elle-même pas grand chose de plus à offrir que la version PC. Le jeu est toujours aussi prenant, mais dommage que Microprose n’ait jamais vu l’intérêt de se préoccuper de la réalisation.

Version Macintosh

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Quadra 900 avec MacOS 8.1
Configuration minimale : Système : Macintosh Plus – OS : System 6.0 – RAM : 1Mo*
Modes graphiques supportés : 8 bits, monochrome
*2Mo pour la version couleur
Résolution doublée, interface hyper-lisible : que demande le peuple ?

Il aurait été dommage pour Sid Meier’s Railroad Tycoon de faire l’impasse sur un ordinateur de bureau comme le Macintosh. Bonne nouvelle : le titre aura bel et bien débarqué sur la machine d’Apple, et il y aura débarqué à la fois en haute résolution et en couleurs (même s’il est possible de jouer en noir et blanc, où la réalisation demeure très lisible). Si le contenu n’a pas changé d’une virgule, on pourra apprécier quelques petits agréments de confort comme la possibilité de redimensionner les différentes fenêtres de jeu en fonction de la taille de votre bureau, et le rendu sonore est très correct, bien au-dessus de l’Atari ST, même s’il est toujours aussi discret. Pour le coup, aucune de ces quelques nouveautés tenant en large partie à l’intégration à l’interface de System ou de MacOS ne transcendent l’expérience de jeu, mais en termes de prise en main et de lisibilité, on tient largement de quoi rivaliser avec ce que proposera la version « Deluxe » trois ans plus tard – d’autant qu’il est enfin possible d’utiliser la souris pour poser des voies, en conjonction avec la touche Maj. Bref, exactement ce qu’on était venu chercher.

NOTE FINALE : 17/20

Sid Meier’s Railroad Tycoon sur Macintosh vient offrir exactement ce qu’on était en droit d’espérer, à savoir l’intégration harmonieuse de la haute résolution et de l’interface de l’OS. Ce n’est peut-être pas beaucoup plus beau ni immensément plus jouable, mais c’est d’une lisibilité à tout épreuve, et c’est plus agréable à prendre en main. Un bon point de départ pour les amateurs du genre.

Version PC-98

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Japan K.K.
Date de sortie : 6 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : Carte sonore supportée : Roland MT-32

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Microprose aura fait partie des entreprises vidéoludiques occidentales prêtes à investir sur le marché japonais – une décision somme toute logique, le hardware des systèmes locaux étant souvent très proche de celui du PC. Cela explique d’ailleurs peut-être pourquoi ce portage de Sid Meier’s Railroad Tycoon semble tout droit venu du PC – incluant jusqu’à la reconnaissance de la Roland MT-32 – alors que la résolution native du PC-98 aurait pu nourrir l’espoir de trouver l’équivalent de la version Macintosh. Rien de tout cela, hélas : la haute résolution n’est utilisée que pour afficher les caractères japonais, car le jeu a été intégralement traduit pour l’occasion. Pour tout le reste, c’est à peu de chose près la copie conforme de la version PC avec ses graphismes seize couleurs en 320×200, au détail près que l’on pose désormais les rails avec la touche Alt plutôt qu’avec la touche Maj. Au moins n’aurez-vous pas à vous griffer le visage en vous lamentant de ne pas posséder un ordinateur du cru : pour le coup, c’est exactement comme sur PC… mais réservé aux joueurs parlant le japonais.

Je sens poindre la déception de ceux qui espéraient être dépaysés

NOTE FINALE : 16,5/20

Inutile de chercher les nouveauté ou une refonte graphique : Sid Meier’s Railroad Tycoon sur PC-98, comme souvent avec MicroProse, n’est rien de plus que la copie carbone de la version PC traduite en japonais. Autant dire une curiosité qui n’aura que peu de raisons de retenir les joueurs occidentaux.

 Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : MPS Labs
Éditeur : Microprose Software, Inc.
Testé sur : PCPC-98

Version PC (DOS)

Date de sortie : Juillet 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 640ko* – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s)
Modes graphiques supportés : SVGA (640×400)
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, Covox Sound Master, Genereal MIDI, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum/Plus, Roland MT-32/LAPC-I/RAP-10, Sound Blaster/Pro/16
*1Mo requis pour la version CD-ROM

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme d’autres titres parus à la même époque (au hasard : Sid Meier’s Pirates!), Railroad Tycoon aura connu, trois ans après sa sortie, une édition « Deluxe » vendue au prix fort. Celle-ci aura connu une genèse assez particulière, détaillé dans un fichier texte de la version PC : suite au portage sur PC-98 pour le marché japonais, en 1991, Microprose aura découvert que les orientaux étaient encore moins emballés que les européens par les graphismes en EGA basse résolution. Il fut donc décidé de redessiner les graphismes, toujours en 16 couleurs, mais en 640×400, et, tant qu’à faire, d’y rajouter quelques bruitages digitalisés, de redessiner les menus, d’y adjoindre quelques nouveaux scénarios et de la proposer également au marché européen – et exclusivement sur PC, cette fois.

Le contenu s’est étoffé, et la présentation est plus soignée, c’est indéniable…

Concrètement, cette refonte graphique tient quand même furieusement du gadget : la résolution a beau être plus élevée, force est de reconnaître que c’est largement aussi moche – et en 1993, cela commençait à faire tache. Les menus sont certes beaucoup plus travaillés qu’auparavant, mais on ne peut pas dire qu’ils représentent une énorme partie de l’expérience de jeu – et l’interface n’a pas bougé d’un iota ! Quant à la réalisation sonore, elle s’est effectivement améliorée – on appréciera ou non les différentes digitalisations comme les bruitages plus ou moins idiots qui se font entendre chaque fois que vous cliquerez sur une industrie, mais difficile d’y voir une raison de mettre une nouvelle fois la main à la poche, même si bénéficier de thèmes musicaux pendant la partie est un ajout bienvenu. Le véritable intérêt de cette version résidera plutôt dans les nouveaux scénarios : certes, la carte dédiée à l’Angleterre a disparu pour des raisons mystérieuses, mais on pourra se jeter sur des cadres un peu plus dépaysants comme l’Afrique ou l’Amérique du Sud. Pas de quoi se précipiter sur cette version Deluxe pour les possesseurs de la version originale, mais une alternative acceptable pour ceux qui voudraient découvrir le premier épisode de la saga.

…Mais bon sang, on pouvait sans doute faire mieux que ça en 1993

NOTE FINALE : 17/20

Inutile de se mentir : dans les faits, cette version Deluxe tient plus du patch que du titre à part entière. Les graphismes, même en haute résolution, sont toujours aussi hideux, et l’interface aurait bien bénéficié d’une refonte. Reste que le contenu s’est étoffé et que le jeu est toujours aussi agréable à jouer, mais vendre cette version à peine retouchée au prix fort était quand même assez gonflé.

Version PC-98

Développeur : MPS Labs
Éditeur : MicroProse Japan K.K.
Date de sortie : 2 avril 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Une fois qu’on a compris que l’itération PC-98 de Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe est la version qui aura servi de base à la version PC occidentale, on a d’ores et déjà dit l’essentiel. Le même jeu ? Pour l’essentiel, oui : le contenu, les graphismes et l’interface sont exactement les mêmes, et j’espère qu’un employé de chez MicroProse viendra un jour nous expliquer pourquoi la carte de l’Angleterre a disparu (parce que ce n’est certainement pas lié à une question de droits !). Du côté des différences, en-dehors du fait que le titre soit bien évidemment intégralement en japonais, la qualité musicale est légèrement inférieure à celle de la version occidentale : on n’a pas le droit ici aux bruitages digitalisés. Encore une fois, rien de fondamentalement traumatisant, et rien qui justifie de bouder la version PC pour lui préférer ce portage, mais au moins, maintenant, vous savez que vous n’avez rien raté.

Ces images commencent à se ressembler, hein ?

NOTE FINALE : 17/20

Peu de surprises pour cette version PC-98 de Sid Meier’s Railroad Tycoon Deluxe : c’est exactement la même chose que sur PC, mais en japonais, et avec quelques fioritures en moins du côté sonore. Si vous voulez découvrir le jeu, autant commencer directement par la version PC.

Jumping Jack Son

Cette image provient du site http://www.atarimania.com

Développeurs : Christophe Laboureau, Didier Chanfray et Charles Callet
Éditeur : Infogrames Europe SA
Titre alternatif : Jumping Jack’Son (écran-titre)
Testé sur : Atari STAmiga

Version Atari ST

Date de sortie : Janvier 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Vous est-il déjà arrivé d’écouter un morceau de musique et de vous dire « Tiens, qu’est-ce que ça donnerait si on en faisait un jeu vidéo ? »

Les challenges pour obtenir les mots de passe ne sont pas simples – surtout que vous n’aurez droit qu’à un seul essai

L’idée, pour incongrue qu’elle puisse paraître, n’est pourtant pas neuve. On se souvient, par exemple, de l’énorme influence qu’avait eu le Lac des Cygnes de Tchaïkovski sur le développement de Loom. Mais un des éléments qui participent à la magie du début des années 90 est l’existence de ces titres improbables, souvent réalisés par des petites équipes, et qui basaient l’essentiel de leur gameplay sur une idée plus ou moins bizarre qui ne ressemblait à rien d’autre – un domaine dans lequel les Français étaient d’ailleurs passés maîtres, à tel point que je vous mets au défi de parvenir, encore aujourd’hui, à trouver un jeu qui ressemble à un OVNI comme l’Arche du Captain Blood. On sera donc à peine surpris de découvrir qu’un groupe de trois personnes, mené par Christophe Laboureau, aura programmé en 1990 un programme inspiré d’un morceau des Rolling Stones : Jumping Jack Son.

Des dalles, des vinyles et des platines : bienvenue dans Jumping Jack Son

Le pitch du jeu, comme souvent, est d’une simplicité confondante : le héros de l’aventure, une espèce de petite créature tendance punk-rock nommée Jack, vit dans une réalité où les instruments de musique classique se sont mis en tête de se débarrasser une bonne fois pour toute de ce qui représente pour eux l’hérésie absolue : la musique rock. Bien décidé à ne pas rester les bras ballants pendant qu’on s’en prend à son unique passion, Jack entreprend de collecter les vinyles (ah, quelle époque…) éparpillés dans les niveaux du jeu pour aller les replacer sur les platines dédiées – et ainsi ne pas laisser mourir le rock’n roll.

Un seul contact avec un ennemi, et c’est une vie de perdue

Ce prétexte aussi sympathique qu’idiot va matérialiser, mine de rien, un concept limpide et génial qui sera le socle, l’objectif et la plus grande idée du jeu : dans chaque niveau se situent des zones musicales constituées de dalles colorées. En sautillant sur chacune d’entre elles en rythme, Jack les fait changer de couleur – en même temps que ses cheveux, brillante trouvaille pour que vous puissiez voir ce qui se passe sous les pieds de votre personnage. Une fois la zone unifiée, un disque de la même couleur fera son apparition : allez le placer sur une platine au coloris équivalent, selon un mode qui évoque déjà Tiny Skweeks paru l’année suivante, et le vinyle commencera à jouer l’une des pistes musicales de Jumpin’ Jack Flash : la batterie, la basse, la guitare, etc. Activez toutes les platines d’un stage, et vous pourrez rejoindre la sortie pour passer au niveau suivant. Simple, non ?

Les choses ne tardent pas à se compliquer

Évidemment, histoire de pimenter un peu les choses, il vous faudra à la fois composer avec des instruments de musique hostiles bien décidés à ne pas vous laisser ressusciter le rock, et avec un level design de plus en plus complexe qui constituera le véritable aspect « réflexion » du titre. Les ennemis ont chacun leur propre façon de vous nuire : certains suivent un trajet prévu d’avance, d’autres se promènent au hasard, d’autres encore vous collent aux basques et ne vous lâchent jamais. Sachant qu’un seul contact avec eux signifie la mort, mieux vaut les éviter avec soin, où déposer une des cassettes de votre inventaire au sol pour leur bloquer la route quelques instants. Pour ce qui est du level design, le jeu se divise en deux modes de seize niveaux chacun, faisant office de niveaux de difficulté.

Ce niveau est beaucoup plus compliqué qu’il en a l’air

Si le mode « A » est relativement simple, les choses commencent à se corser à mi-chemin, quant au mode « B », il monte encore la barre d’un cran et il faudra souvent s’accrocher pour venir à bout d’un stage. Ceux-ci seront d’autant plus coriaces que, si le jeu propose un système de mots de passe tous les quatre niveaux, obtenir ceux-ci vous demandera de réussir un challenge assez compliqué d’une seule traite, faute de quoi, le précieux sésame vous échappera ! Une méthode assez fourbe pour augmenter la durée de vie – le titre n’ambitionne pas, de toute façon, de vous occuper pendant des dizaines d’heures, mais il sait se montrer largement assez addictif pour que vous puissiez nourrir l’envie de le finir.

Ces tapis roulants ne sont que gênants – jusqu’au moment où vous avez un adversaire aux trousses

On appréciera, par exemple, les petites trouvailles faites pour vous surprendre d’un niveau à l’autre : passages secrets, téléporteurs, tapis roulants, tout y passe, et ce qui peut parfois passer pour une promenade de santé au premier regard peut rapidement se transformer en parcours du combattant où se déplacer anarchiquement en ne comptant que sur ses réflexes est le plus sûr moyen de finir sur l’écran de game over. Le jeu compte également son lot de bonus, et si la plupart n’ont d’autre objectif que le scoring (une autre époque…), on notera également l’existence de ces juke-box qui vous faciliteront la vie en vous autorisant à transporter deux, voire trois disques à la fois là où vous ne pouvez originellement n’en porter qu’un. Bref, on a affaire à un programme bien ficelé, qu’on comprend en une poignée de secondes et sur lequel on peut s’amuser des heures.

Le jeu comprend également sa part de passages secrets

Niveau réalisation, Jumping Jack Son ne fait pas honte à l’Atari ST : la réalisation graphique, très colorée et très agréable, fait immédiatement penser à Skweek – sans doute à cause de la vue aérienne et du système de dalles. Niveau sonore, on sera heureux de voir que la machine d’Atari s’en tire cette fois avec les honneurs, elle qui bénéficiait trop souvent d’une bande-son à peine supérieure au haut-parleur interne du PC : certes, ce n’est pas encore au niveau de ce que pouvait proposer l’Amiga, mais cela reste très au-dessus de la grande majorité du catalogue de l’Atari ST sur la période.

On ne s’en lasse pas

Le thème de Jumpin’ Jack Flash est reproduit avec soin (bon, juste quelques mesures, on se doute que les Rolling Stones n’avaient pas exactement donné leur accord….), et l’Atari ST se sort les tripes pour que la qualité de la musique fasse honneur au programme – dommage que les bruitages des divers instruments interrompent systématiquement les pistes musicales. Bref, une très bonne pioche dans la catégorie « jeux comme on n’en fait plus », largement apte à vous faire passer un très bon moment. Que demander de plus ?

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15/20 Ni tout à fait un jeu d'action, ni complètement un jeu de réflexion, Jumping Jack Son réunit les influences les plus improbables, depuis Skweek jusqu'aux Rolling Stones, pour proposer un de ces logiciels inimitables comme seules les années 80-90 savaient en offrir. Grâce à un principe ingénieux et plus profond qu'il en a l'air, le titre offre une expérience plaisante qui saura mettre à contribution vos réflexes sans délaisser pour autant votre matière grise. On aurait volontiers rempilé pour davantage de niveaux, davantage d'idées – et davantage de thèmes musicaux, tant qu'à faire, parce qu'on fait rapidement une indigestion de Jumpin' Jack Flash – mais pour s'amuser quelques heures avec un jeu qui ne ressemble pas à grand chose d'autre, le contrat est parfaitement rempli. Encore un titre étonnant à (re)découvrir. CE QUI A MAL VIEILLI : – On aurait apprécié plus de 32 niveaux – Dommage que le mode deux joueurs soit en alternance - il y avait sans doute un concept à creuser – Les niveaux permettant d'obtenir les mots de passe sont parmi les plus durs du jeu... – Avec un peu plus d'ambition, le jeu aurait vraiment pu laisser une trace indélébile dans l'histoire du jeu vidéo

Les avis de l’époque :

« Voilà un petit jeu d’action amusant. L’idée est originale et la réalisation sympathique. J’en ferais quelques parties avec plaisir, mais je pense que l’on risque de s’en lasser assez rapidement. Ce n’est pas aussi ludique que Skweek, ni aussi intéressant que Bombuzal. »


Alain Huygues-Lacour, Tilt n°78, Mai 1990, 15/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Jumping Jack Son sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeurs : Christophe Laboureau, Stéphane Picq, Damien Petit et P. Sciro
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mai 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme la quasi-totalité des jeux développés sur Atari ST, Jumping Jack Son était destiné à sortir sur Amiga un jour ou l’autre – ce qui fut fait quelques mois plus tard. Sans surprise, le contenu du jeu n’a pas changé d’un iota, et on retrouve toujours les deux modes de difficulté avec le système de mots de passe, le mode démo et le mode deux joueurs en alternance.

Graphiquement, rien n’a changé

Du côté graphique, on se retrouve avec un calque fidèle de la version Atari ST, qui était déjà très agréable à l’œil, on ne s’en plaindra donc pas. En revanche, on sait que s’il était un domaine où l’Amiga pouvait faire la leçon à tout le monde en 1990, c’est bien le son. On retrouve d’ailleurs aux crédits de ce portage un certain Stéphane Picq, dont le nom ne manquera pas de tirer une larme aux nostalgiques de Dune. Et de fait, pour un titre reposant sur la musique, on est très heureux de profiter des capacités de la puce Paula : le son ne crache plus comme sur ST, et les différentes pistes peuvent désormais se superposer sans heurts et sans être interrompues par les bruitages. À noter également que si l’écran-titre reprend sans vergogne Jumpin’ Jack Flash, les platines en jeu offrent une partition différente qui rend le thème musical bien moins répétitif – ce qui est un gros plus. La maniabilité, elle, est toujours irréprochable.

Pourquoi bouder son plaisir ?

NOTE FINALE : 15,5/20

Sans révolutionner en rien tout ce qui avait fait le sel de la version ST, Jumping Jack Son sur Amiga a le bon goût de tirer intelligemment parti des capacités sonores de la machine de Commodore pour offrir une partition de qualité supérieure – ce qui, dans un titre largement basé sur la musique, est très appréciable. Rendu plus agréable que jamais par des thèmes entrainants et un son qui ne crache plus, ce portage en devient légèrement meilleur que la version originale, et reste sans conteste le meilleur moyen, aujourd’hui, de découvrir le très sympathique titre de Christophe Laboureau et son équipe.

The Secret of Monkey Island

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STFM TownsMacintoshSEGA CD
Disponible sur : Browser, iPad, iPhone, Macintosh, PlayStation 3, Windows, Xbox 360 (The Secret of Monkey Island : Édition Spéciale)
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

La saga Monkey Island (jusqu’à 2000) :

  1. The Secret of Monkey Island (1990)
  2. Monkey Island 2 : LeChuck’s Revenge (1991)
  3. The Curse of Monkey Island (1997)
  4. Escape from Monkey Island (2000)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Octobre 1990 (version EGA) – Décembre 1990 (version VGA) – Août 1993 (version CD-ROM)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Versions testées : Versions EGA, VGA et CD-ROM émulées sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 (version disquette), Intel 80286 (version CD-ROM) – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA (version VGA), Tandy/PCjr, VGA (version VGA)
Cartes sonores supportées : AdLib, Game Blaster, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I (via un patch pour la version EGA), Sound Blaster, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu (VGA) :

Au plus profond des Caraïbes…


Voilà déjà une phrase qui plante immédiatement le décor. Le XVIIe siècle, l’âge d’or de la piraterie, le rhum, le grog, les corsaires, les ports improbables où la vie ne valait pas cher, les échanges de coups de canons entre les galions et les corvettes, et des îles plus ou moins connues éparpillées par dizaines entre la mer des Sargasses et Maracaibo. Avouez que ça fait rêver, non ?

The Secret of Monkey Island, un certain sens de la mise en scène (VGA)

Autres temps, autres mœurs : nous sommes en 1990, à un des tournants de l’âge d’or du jeu vidéo, et Lucasfilm est en pleine forme. Après avoir marqué les mémoires avec des titres comme Maniac Mansion ou Zak McKracken, le studio américain commençait à se faire un nom plus que respectable au sein de l’univers vidéoludique. Pourtant, le changement de décennie allait s’annoncer comme une année charnière, avec la parution de deux titres qui marqueront les mémoires pour des raisons différentes : l’excellent Loom et le légendaire The Secret of Monkey Island.

Guybrush Threepwood réussira-t-il à triompher de toutes les épreuves ? (EGA)

Prenez un jeune freluquet au nom improbable de Guybrush Threepwood. Imaginez-le en train de débarquer, une nuit, sur l’île de Mêlée™, en clamant haut et fort son unique objectif : devenir un pirate. Bien évidemment, rejoindre les Frères de la côte et consort ne se décrète pas : il faudra d’abord commencer par faire ses preuves face au conseil des pirates, en apprenant à maîtriser des disciplines constituant le B-A-BA de la piraterie : l’escrime, le vol et la chasse au trésor. Il faudra, surtout, composer avec la population… disons, « pittoresque » de l’île, apprendre à décrypter la logique très particulières des cartes aux trésors, composer avec le vaudou … et peut-être même rencontrer l’amour et affronter le fantôme du terrible pirate LeChuck, quitte, pour cela, à découvrir le secret de la légendaire Île aux Singes…

On était capable de très jolies choses avec 16 couleurs, en 1990 (EGA)

The Secret of Monkey Island est un jeu d’aventure conçu par Ron Gilbert, avec le secours de Tim Schafer et Dave Grossman dont on retrouvera, par la suite, les noms au générique de titres comme Day of the tentacle ou Full Throttle. Il s’agit, comme on peut s’en douter, d’un point-and-click vous plaçant aux commandes de Guybrush Threepwood, bien décidé à réaliser son rêve en embarquant dans une aventure qui le mènera bien au-delà de l’Île de Mêlée, via un scénario ouvertement inspiré du roman Sur des mers plus ignorées… de Tim Powers, publié en anglais trois ans plus tôt. Il est d’ailleurs intéressant de noter qu’à l’origine, le titre avait été considéré comme un possible jeu de rôle allant largement puiser dans Sid Meier’s Pirates! (Ron Gilbert cite même Ultima parmi ses inspirations) avant de revenir rapidement à une forme plus classique.

Le jeu multiplie les références à Loom, sorti la même année (EGA)

L’interface du titre repose, comme c’était déjà le cas pour tous les titres du studio depuis Maniac Mansion, sur une interface intégralement contrôlée à la souris et basée sur une série de verbes d’action servant à dicter vos actions sur votre inventaire ou sur le reste de l’environnement. Autant dire que la prise en main du titre nécessitera difficilement plus d’une poignée de secondes, d’autant qu’il bénéficie de ce qui deviendra la fameuse « philosophie Lucasfilm » qui fait que non seulement le jeu est non-bloquant (comprenez par là qu’il ne vous sera jamais nécessaire de recharger une partie pour avoir pris une mauvaise décision) mais également que votre personnage ne peut pas mourir (bon, en fait, il peut, lors d’une occasion particulière dans le jeu, mais il faut vraiment le vouloir).

Il faut trouver un trésor pour devenir pirate, donc les pirates vendent des cartes au trésor. Logique. (VGA)

Une philosophie d’ailleurs totalement imputable à Ron Gilbert qui, après avoir travaillé sur Indiana Jones and the Last Crusade, avait cherché à matérialiser ses réflexions sur le game design des jeux d’aventure via un manifeste intitulé, dans son style inimitable, Why Adventure Games Suck (soit en français : « Pourquoi les jeux d’aventure craignent ») et publié en décembre 1989 dans The Journal of Computer Game Design –  un document fondateur dans l’histoire du point-and-click, et peut-être l’un des plus importants de l’histoire du game design, rien que ça. Ce moment historique où un joueur n’aurait plus besoin de recommencer une partie depuis le début pour avoir oublié de ramasser un objet apparemment sans importance dans un jeu d’aventure, c’est The Secret of Monkey Island qui en aura été une des premières manifestations – avec Loom, paru quelques mois plus tôt.

L’Ile de Mêlée devrait vous servir de terrain de jeu pendant un bon moment (VGA)

Tant qu’à faire, la valeur d’un jeu d’aventure, on le sait, se mesure en partie à la qualité de sa réalisation, mais surtout à celles de son écriture et de la conception de ses énigmes. Sans surprise, Ron Gilbert et sa fine équipe seront parvenus à réaliser une alchimie si parfaite de ces trois critères que le titre en est venu à inscrire son nom bien au-delà du monde du jeu vidéo.

Le gouverneur Marley, votre chasse au trésor à vous (EGA)

Le premier point devant absolument être mentionné est l’humour du titre, et sa capacité à faire mouche avec une belle régularité. La légende veut que Dave Grossman et Tim Schafer aient des humours très différents, au point de se voir confier des sections différentes du jeu, et que la rencontre de l’ironie pince-sans-rire de l’un avec les gags beaucoup plus visuels de l’autre aurait au final eu un effet détonnant. Si l’humour du titre est très différent de l’approche « Tex Avery-esque » de Day of the Tentacle, par exemple, le constant décalage entre son univers et les personnages, parfois farouchement anachroniques, qui y évoluent, est très efficace. Le jeu comporte à ce niveau quantité de morceaux de bravoures gravés au fer rouge dans la mémoire des joueurs, comme ces fameux combats au sabre se jouant… à la manière de concours d’insultes, dont les répliques savoureuses ont été écrites par l’écrivain Orson Scott Card (dont je vous recommande au passage l’excellent cycle d’Ender) ou encore cette scène absolument fabuleuse où toute l’action se déroule derrière un mur, hors de la vue du joueur, et où le déroulement des événements est en fait narré par la ligne de commande au milieu de l’interface ! Autant dire qu’il n’était pas encore fréquent, à l’époque, de rire jusqu’à en avoir les larmes aux yeux devant un jeu vidéo, et que Monkey Island est venu bousculer cela avec un aplomb qui force le respect.

Un pont, un troll, logique. Même dans ses choix les plus surprenants, le titre retombe toujours sur ses pattes (VGA)

Les énigmes, elles aussi, savent se montrer aussi absurdes que retorses – sans jamais se montrer illogiques pour autant. Quand vous évoluez dans un univers où il est parfaitement évident de trouver un poulet en caoutchouc avec une poulie au milieu, et où le grog est si corrosif qu’il vous permet de faire fondre des serrures, autant vous habituer à changer votre façon de penser – la qualité globale des énigmes du jeu mérite dans tous les cas d’être saluée pour sa faculté à mettre exactement dans le mille d’un bout à l’autre.

L’humour de la VF n’est hélas pas au niveau de celui de la VO (EGA)

Quitte, d’ailleurs, à vous pousser à vous arracher les cheveux un bon moment, car le titre est loin d’être facile, mais il n’est absolument jamais difficile pour de mauvaises raisons – une preuve définitive, au passage, qu’un joueur n’avait pas besoin d’aboutir à un game over toutes les deux minutes pour rencontrer des difficultés à terminer un jeu d’aventure, et une parfaite démonstration de la leçon de game design que Ron Gilbert venait de livrer au reste de l’industrie. Non seulement on ne peut pas « perdre » au sens d’être obligé de recommencer la partie ou de repartir d’une sauvegarde, mais en plus la difficulté ne repose jamais sur un objet de deux pixels de haut dissimulé à un endroit absurde. Apprendre à tenter les actions les plus improbables sur touts les objets passant à portée de votre main pourra en revanche rapidement devenir une seconde nature.

Les gros plans sont particulièrement réussis, surtout en 256 couleurs (VGA)

La bonne nouvelle est que l’aventure est d’autant plus agréable à parcourir que la réalisation du titre figure clairement dans le haut du panier de l’année 1990. Dans sa version originale en EGA, le titre tire déjà merveilleusement parti des 16 couleurs de sa palette pour afficher des décors grandioses et des animations soignées. Mais le programme aura également connu, quelques semaines après sa sortie, une version VGA en 256 couleurs qui relève encore le niveau d’un cran, particulièrement lors des portraits en plein écran, absolument superbes.

Les combats de sabre, un des nombreux moments cultes du jeu (EGA)

Dans les deux versions, le titre est très agréable à l’œil, et démontre déjà le savoir-faire indéniable des graphistes de chez Lucasfilm à cette époque. Niveau musical, le titre tire avantage des cartes AdLib et Sound Blaster, en proposant notamment ce fameux thème reggae qui sera réutilisé tout au long de la saga. Comme pour Loom, un patch ajoutant la gestion de la Roland MT-32 aura également été publié quelques semaines après la sortie du jeu, même s’il présente le défaut difficilement pardonnable de ne fonctionner qu’avec la version originale en anglais – un vrai faux pas (cela ne concerne apparemment que la version EGA). On regrettera juste que la musique ne se fasse pas toujours entendre, laissant trop souvent la place à de grands silences un peu oppressants.

L’univers du jeu, aussi délirant soit-il, est toujours animé d’une certaine cohérence. Même quand on rencontre des cannibales qui s’inquiètent de leur régime (EGA)

L’un des coups de génie de la saga, cependant, et l’un de ceux qui lui vaut d’être encore aujourd’hui le centre de débats passionnés entre les fans, est l’existence d’un second niveau de lecture du jeu.

Vous serez heureux de goûter enfin à la lumière du jour dans la deuxième partie du jeu (EGA)

En effet, le deuxième épisode de la saga (et le dernier à avoir été écrit par Ron Gilbert avant Return to Monkey Island en 2022) se sera terminé par une révélation majeure que je ne vais évidemment pas vous spoiler, mais qui aura jeté un regard nouveau sur l’aventure vécue au cours des deux premiers épisodes – et notamment sur certains écrans ayant fait cogiter les joueurs pendant des nombreuses heures. Cette idée absolument géniale permet, encore aujourd’hui, de redécouvrir le jeu après avoir fini sa suite et de chercher entre les lignes des indices pour comprendre le véritable secret de l’Île aux Singes – même près de trente ans après. Le genre de petits détails qui transforment un très bon jeu en un titre de légende.

On trouve de tout, sur l’île de Mêlée ! (VGA)

Quelques mots, en conclusion, sur la version française du titre. Celle-ci, malgré de réels efforts, est hélas passablement décevante. En-dehors d’un nombre dérangeant de coquilles, fautes d’accord (les traducteurs des jeux Lucas semblent avoir des problèmes récurrents pour distinguer un futur d’un conditionnel) et autres mots traduits n’importe comment (non, « exhilarating » ne veut pas dire « exhilarant » !!!), la plus grosse perte se situe au niveau de la traduction de l’humour en lui-même. Certes, cet humour passablement absurde et très anglo-saxon n’est pas forcément facile à rendre en français, mais en-dehors de quantités de gags tombant à plat, certains ont purement et simplement été ignorés ou mal compris – un travers qui restera hélas vrai pendant l’essentiel de la série. Pas de quoi fuir cette version pour les joueurs en froid avec la langue de Shakespeare, mais je ne peux que recommander aux anglophones de s’en tenir à la version originale, sous peine de voir le jeu amputé d’une partie de son humour.

La version CD-ROM :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Qui dit « début des années 90 » dit quasi-obligatoirement « CD-ROM » dans la même phrase, surtout dans le domaine du jeu d’aventure qui se prêtait particulièrement à la transposition sur galette numérique. Après le fiasco qu’avait été la version CD de Loom, on était en droit de se montrer méfiant face à ce portage de Monkey Island, qui ne reproduit heureusement pas les mêmes erreurs. Pas de coupes, cette fois : le contenu du CD est strictement équivalent à ce que proposait la version sur disquettes, la protection de copie en moins, naturellement.

L’interface, en bas de l’écran, est désormais bien moins austère

Côté graphique, le titre reprend sans surprise la réalisation de la version VGA, en prenant malgré tout le soin de dépoussiérer l’interface : les verbes « allumer » et « éteindre » ont disparu (et pour cause : ils ne servaient à rien), et surtout, l’inventaire bénéficie dorénavant d’une représentation intégralement graphique qui préfigure Day of the Tentacle, et s’avère moins tristounette que la simple liste textuelle des autres versions. Autant dire qu’on tient là la plus belle et la plus accessible de toutes les versions, au moins jusqu’à la sortie de l’Édition Spéciale de 2009.

Le coucher de soleil du début de la version EGA a disparu, en 256 couleurs

Côté son, évidemment, on attend cette version CD au tournant, et on sera heureux de profiter d’une musique qui enterre sans discussion possible les thèmes entendus sur Amiga ou avec une Roland MT-32. Je vous laisse profiter du thème, audible dans la vidéo ci-dessus, pour vous faire un avis. Le jeu bénéficie également de nouveaux bruitages de toute beauté, qui vous permettront enfin d’entendre la mer et le cri des mouettes sur la jetée près du SCUMM bar. En revanche, déception du côté des voix, puisqu’il n’y a tout simplement pas de doublages dans cette version, pas plus qu’il n’y en aura dans la suite. Il faudra donc attendre le troisième épisode, en 1999, pour connaître enfin la voix de Guybrush Threepwood, ce qui est un peu dommage.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (version CD-ROM) :

NOTE FINALE : 18/20 (versions EGA/VGA) - 19/20 (version CD-ROM) Rencontre improbable entre un humour absurde à la Monty Python, un univers délicieusement décalé où les fantômes pirates côtoient les cannibales végétariens, et un souffle épique portés par les ports des Caraïbes, The Secret of Monkey Island est peut-être l'un des représentants les plus mémorables et les plus accomplis d'un genre qu'il a largement contribué à populariser. Louvoyant entre les morceaux de bravoure et les scènes cultes, ballotés entre les énigmes retorses et les bijoux d'écriture, le navire mené par Ron Gilbert et son excellent équipage aura été mené à bon port avec une maestria rare, qui lui vaut d'être resté amarré à la légende près de trente ans après sa sortie. Une aventure à vivre au moins une fois, avec le reste de la saga dans la foulée. CE QUI A MAL VIEILLI : – Certaines énigmes particulièrement machiavéliques – Version française décevante – Pas de gestion de la Roland MT-32 sur les versions localisées (version EGA) – Connaîtra-t-on un jour le véritable secret de l'Île aux Singes ?

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Secret of Monkey Island sur un écran cathodique (version EGA) :

Les avis de l’époque :

« The Secret of Monkey Island est un de ces bons jeux d’aventure qui paraissent régulièrement. Il n’a rien d’exceptionnel mais il procure de longues heures de passionnantes recherches. Je le recommande donc uniquement aux mordus des aventures en tous genres. Aux autres, je dirais qu’ils ne ratent rien d’impérissable. »

Dany Boolauck, Tilt n°82, Octobre 1990, 15/20

Version Amiga

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS
Date de sortie : Janvier 1991 (Europe) – Juin 1991 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On aurait pu penser, en voyant la version Amiga de The Secret of Monkey Island paraître quelques semaines à peine après la version PC, que ce portage serait un simple clone des versions PC EGA et Atari ST, comme cela avait été le cas pour Loom. Mais grosse surprise en lançant le jeu : le titre est bien décidé à profiter de toute la palette de couleurs de la machine de Commodore, et le travail sur les portraits, notamment (ou le fait que le coucher de soleil du début du jeu ait là aussi disparu), tend à indiquer que cette version aura été développée en même temps que la version VGA.

Les portraits vont clairement lorgner du côté de la version VGA

Concrètement, le jeu est graphiquement plus détaillé que dans les version EGA et Atari ST, même si on perd également une partie des choix très marqués en terme de palette chromatique – et que le jeu est sensiblement plus lent. On sera donc tenté de placer ce portage au-dessus de la version originale, mais en-dessous de la version VGA. Côté musique, en revanche, l’Amiga met tout le monde d’accord : à part la Roland MT-32, aucune carte son ne rivalise avec ce qu’offre la puce Paula. Le fameux thème reggae du jeu est vraiment splendide, à tel point qu’on a bien du mal à se décider à le couper au lancement du jeu (lancez la vidéo, si vous ne me croyez pas !), et cela reste vrai pour les autres morceaux de musique pendant le reste de la partie. C’est bien simple : il faudra attendre les versions CD-ROM du jeu pour supplanter l’itération Amiga. En terme de contenu et de déroulement du jeu, en revanche, le titre est très exactement identique aux autres versions.

Le jeu est plus beau et plus détaillé qu’en 16 couleurs

NOTE FINALE : 18/20

Tirant, pour une fois, intégralement parti des capacités de l’Amiga, The Secret of Monkey Island dispose, sur la machine de Commodore, d’une excellente version qui n’est supplantée graphiquement que par la version VGA et musicalement que par les itérations CD.

Version Atari ST

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Ubisoft France SAS (France)
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français
Support : Disquette 3,5″ double-face (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1Mo
Écran monochrome supporté
Installation possible sur disque dur

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Peu de grosses surprises pour cette version Atari ST de The Secret of Monkey Island. Comme on pouvait s’y attendre, le jeu est graphiquement un calque de la version EGA, et l’aventure n’a pas changé d’un iota en passant sur la machine d’Atari. En revanche, la grosse déception se situe du côté sonore : non seulement ce portage rivalise à peine avec ce qu’était capable de produire le haut-parleur interne du PC, mais en plus, plusieurs des thèmes musicaux du titre ont purement et simplement disparu ! C’est d’autant plus dommage qu’il était tout à fait possible de connecter une Roland MT-32 à un Atari ST mais, contrairement à la version PC, aucun patch n’a a ma connaissance vu le jour pour en tirer parti. Cela ne pénalise heureusement que légèrement le jeu, mais suffit à faire de cette version la moins bonne de toutes celles parue sur le marché.

Pas de quoi se sentir dépaysé, pour les possesseurs de la version EGA

NOTE FINALE : 17,5/20

Ça a le gout de la version EGA, ça a la texture de la version EGA, ça pourrait être une simple copie conforme de la version EGA ; malheureusement, les limitations sonores de l’Atari ST additionnées à des coupes injustifiées dans les thèmes musicaux du jeu font de cette version de The Secret of Monkey Island le mouton noir de tous les portages du titre. Un joli mouton noir, mais quand même.

Version FM Towns

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Victor Musical Industries, Inc.
Date de sortie : Septembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale : RAM : 2Mo

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme Loom, paru la même année, The Secret of Monkey Island aura connu les joies d’un portage sur FM Towns. Mais contrairement à son collègue, qui s’était érigé en sorte de « version absolue » du jeu, la faute aux (très) nombreux errements de la version CD-ROM, les choses seront ici beaucoup plus simples : cette version est la copie conforme de celle parue sur PC (comprendre : la version CD-ROM, naturellement)… à quelques curieux détails près – le pirate qui tournoyait sur le lustre du SCUMM Bar a disparu, par exemple. Graphismes en 256 couleurs, bande sonore numérique, il ne manque une nouvelle fois que les doublages, mais pour le reste on ne voit pas trop ce qu’on pourrait demander de plus – on récupère même l’inventaire dessiné, à la Monkey Island 2. Pour ne rien gâcher, il ne sera même pas nécessaire ici de savoir lire le japonais, puisque la version anglaise est disponible au lancement. Évidemment, dénicher cette version a d’autant moins d’intérêt que celle parue sur PC, elle, n’a rien de rare, mais si jamais vous avez envie de découvrir le jeu sur la machine de Fujitsu, eh bien rien ne devrait vous encourager à changer d’idée.

Hmm… Il ne manquerait pas quelqu’un, là ?

NOTE FINALE : 19/20

Pas de version ultime ici, ou plutôt à peu près la même que celle qui aura été distribuée à la même époque sur PC : The Secret of Monkey Island sur FM Towns n’est rien d’autre que la transcription (presque) fidèle de la version CD-ROM du jeu, et en anglais s’il vous plait. Si, pour une raison quelconque, vous êtres bien décidé à ne pas la découvrir directement sur PC, voilà au moins une alternative qui ne vous privera pas de grand chose de plus que de la version française.

Version Macintosh

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x4)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68020 – OS : System 6.0.7 – RAM : 2Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1992, le Macintosh avait beau être toujours considéré comme un ordinateur de bureau (cela a-t-il vraiment changé ?), il commençait à pouvoir afficher sans difficulté exactement ce que proposait un PC de pointe. Cela se ressent d’ailleurs dans ce portage de The Secret of Monkey Island : graphiquement, c’est une pure transcription pixel perfect de la version VGA du jeu – cela tombe bien, c’était la plus belle. Au niveau sonore, le résultat est déjà un peu plus ouvert au débat : je le trouve personnellement plutôt inférieur à ce que laissait entendre une AdLib – et donc à des kilomètres d’une Roland MT-32 – mais on reste très au-dessus de ce qu’offrait la version Atari ST. Le résultat final ne devrait donc frustrer personne, même si on pourra regretter que la version CD-ROM n’ait pas fait le trajet jusqu’à la machine d’Apple.

On sait ce qu’on est venu chercher, et on l’obtient

NOTE FINALE : 18/20

Aucune mauvaise surprise pour The Secret of Monkey Island sur Macintosh, qui débarque dans une version graphiquement identique à l’itération VGA, avec une réalisation sonore qui ne fera certes pas oublier la version CD-ROM, mais qui ne devrait faire fuir personne non plus.

Version SEGA CD

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : JVC Musical Industries, Inc.
Date de sortie : 23 septembre 1993 (Japon) – Novembre 1993 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Manette, Mega Mouse
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Voyant débarque le Mega-CD dans les foyers européens, Lucasfilm y vit fort naturellement l’occasion rêvée de porter toute sa gamme de jeux d’aventure sur un support CD qui était fait pour cela, et sur une machine dont l’architecture était assez proche de celle de l’Amiga. The Secret of Monkey Island fut donc envoyé en éclaireur, histoire de juger de la viabilité du marché pour leur gamme de jeux… et de décider de ne pas prolonger l’expérience, après que le jeu a connu un bide commercial.

C’est largement aussi beau que sur Amiga, même si le jeu est étrangement devenu très sombre

On pourra très certainement attribuer ce bide aux difficultés rencontrées par le Mega-CD, à cette époque, pour trouver son public, la faute à un catalogue de titres se résumant à l’époque à 90% à une suite de jeux en FMV. Car le portage effectué sur la machine de SEGA, lui, est irréprochable. Jugez plutôt : niveau sonore, le titre est identique à la version PC CD-ROM sortie un an plus tôt, de la musique aux bruitages. Graphiquement, le Mega-CD ne peut évidemment pas rivaliser avec les 256 couleurs de la version PC, il reprend donc ceux de la version Amiga en plus sombre (j’ai augmenté la luminosité sur les captures) – l’interface retouchée en plus. La maniabilité au pad est un tout petit peu moins naturelle qu’à la souris, mais le titre reste parfaitement jouable, bref, un sans-faute presque intégral. Je dis « presque », car en plus des temps de chargement à répétition, la version française n’aura pas fait le chemin jusque sur la machine de SEGA, et pour cause : le jeu ne sera jamais sorti en Europe.

Mieux vaut pousser un peu la luminosité de votre écran (comme ici), sinon on n’y voit rien du tout

NOTE FINALE : 18/20

Porté sur Mega-CD, The Secret of Monkey Island y délivre une copie presque parfaite, la réalisation tirant le meilleur du hardware de la machine de SEGA. La qualité de la musique CD est toujours irréprochable, et la maniabilité au pad est limpide. Dommage, en revanche, que cette version soit strictement réservée aux anglophones – et qu’elle soit aussi sombre.

Veigues : Tactical Gladiator

Cette image provient du site http://www.pcengine.co.uk

Développeur : Game Arts
Éditeur : NEC
Titre alternatif : ヴェイグス (graphie japonaise)
Testé sur : PC Engine
Version non testée : PC-88

Version PC Engine

Année de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Disponible en Français : Non

Vidéo – L’écran-titre du jeu (avec extraits de gameplay) :

En l’an 2324, la planète Terre est en mauvaise posture. Engagée dans un conflit armé contre des forces extraterrestres depuis plus de trois ans, les choses ne se présentent pas très bien pour la population humaine. Jusqu’au jour où le gouvernement humain se décide à lancer son arme secrète, qui pour une fois n’est pas un chasseur dernière génération censé sauver l’univers alors qu’il se fait atomiser en un tir, mais bien un robot géant nommé « Veigues », parce que sinon on se demanderait sans doute pourquoi le jeu s’appelle Veigues : Tactical Gladiator. Pour ce qui est du « Tactical », on se demande d’ailleurs toujours, mais pour ce qui est du « Gladiator », en revanche, pas de surprise : s’il y a un robot géant censé vaincre la menace extraterrestre à lui tout seul, vous vous doutez bien que ça ne va pas se jouer à la belote, et que c’est bien évidemment à VOUS qu’il appartiendra de se taper tout le sale boulot parce que c’est ce pour quoi vous avez acheté la cartouche.

Un gros robot, plein d’adversaires et une résolution limitée : bienvenue dans Veigues

Partant de ce postulat, les studios Game Arts avaient originellement programmé Veigues : Tactical Gladiator en 1988 pour une autre machine de NEC : le PC-88. Cette version n’ayant jamais quitté le Japon, nous allons donc plutôt aujourd’hui nous intéresser à la seule version du jeu à avoir voyagé jusqu’au vieux continent, à savoir le portage sur PC Engine, qui propose une expérience assez proche – au prix d’une introduction passée à la trappe, mais la séquence de fin, elle, est toujours là, on dira donc qu’on a conservé l’essentiel (on sait tous à quel point il est frustrant de batailler des semaines pour obtenir un simple message de félicitations au terme du combat final).

Cet écran vous permettra d’améliorer les composants de votre machine. Notez que le bras gauche est le plus cher, alors qu’il est de loin le moins utile

Comment donc l’action se déroule-t-elle ? Eh bien, de façon très simple, a priori, quoique en vous forçant un peu la main : le jeu consiste en un défilement horizontal imposé, façon shoot-them-up. Votre robot, placé au sol, est libre de faire usage des armes montées sur son bras droit (bouton I) ou de frapper directement à mains nues (bouton II). Appuyer sur les deux boutons à la fois vous permettra de faire usage d’un canon monté directement sur votre torse, et qui a le gros avantage de pouvoir tirer n’importe où, mais surtout en direction du sol. Une simple pression sur la flèche du haut vous permettra de sauter tandis que la flèche du bas vous permettra de… vous retourner. Je me permets d’insister sur ce point, tant ce choix de game design a priori anodin contribue à compliquer inutilement la tâche du joueur : plongé dans le feu de l’action, le désir de se baisser pour éviter les tirs ennemis ou pour atteindre les adversaires placés au sol risque de se faire une bonne dizaine de fois par minute. Malheureusement, ce réflexe naturel se traduira quasi-systématiquement, au cours des deux ou trois premières heures de jeu, par le fait d’exposer votre dos à l’adversaire à cause de ce choix de jouabilité pas vraiment évident.

L’action serait sans doute plus lisible si votre robot n’occupait pas un quart de l’écran

La première originalité du titre est en effet de vous permettre de vous retourner histoire de faire face à l’adversité qui peut débarquer de partout. Cela pourrait rapidement se montrer extraordinairement punitif vu la place importante occupée par le sprite de votre robot à l’écran (la faible résolution de la PC Engine contribue effectivement à ce qu’on se sente immédiatement à l’étroit) et la faiblesse de votre marge de manœuvre, c’est pourquoi le jeu a la bonne idée de mettre à votre disposition un radar visible en bas à gauche de l’interface, et qui aura au moins le mérite de vous prévenir d’où viendra la prochaine vague. L’inconvénient étant que, si cela passe plutôt bien lors des premiers niveaux, l’action devient rapidement suffisamment confuse pour que ledit radar n’ait plus le temps de vous servir à grand chose… tant qu’il fonctionne.

Arriver à la cinématique de fin vous demandera une habileté certaine

Car oui, deuxième originalité : le jeu prend en compte chaque partie du « corps » de votre robot. Concrètement, cela se traduit par deux choses : ces parties sont destructibles, et une fois votre bouclier (qui représente grosso modo votre jauge de vie) réduit à néant, chaque impact va commencer à fragiliser vos systèmes. Si cela était sans doute censé donner au jeu un petit côté immersif, cela se traduit surtout par le fait de vous pénaliser encore davantage lorsque vous êtes à l’article de la mort, en vous faisant affronter un boss avec une arme ou le radar en moins… voire en ayant perdu vos deux bras, ce qui vous condamnera à attendre l’explosion de votre robot sans rien pouvoir faire (je vous rassure, ça ira très vite). Plus intéressant : vous aurez la possibilité d’améliorer chacune de ces parties lors d’un écran dédié entre les missions. Une fois boostées selon un système de points plus ou moins important selon les dégâts effectués au cours du niveau, vos composants seront plus efficaces, vous permettant de rester plus longtemps en l’air, de faire davantage de dégâts, etc. Conseil : vu la courbe de difficulté relativement raide du titre, investissez en priorité dans la solidité de votre bouclier, car sans lui, vous n’irez pas loin, et le fait de sauter plus haut n’y changera pas grand chose.

Beaucoup de projectiles sont extrêmement difficiles à éviter

Malheureusement, vous n’aurez pas la main pour développer la partie la plus évidente, à savoir votre tir, ce qui rend cette sélection de bonus un peu gadget – un reproche qu’on pourra d’ailleurs appliquer à l’essentiel des quelques bonnes idées du titre. Car une fois en jeu, des masques de collisions assez obscurs additionnés à une difficulté qui passe de la promenade de santé à l’enfer sur terre en à peine deux ou trois des dix niveaux que compte le programme risquent de ne pas aider à prendre le plaisir qu’on était en droit d’attendre de ce qui s’annonçait comme un bon gros défouloir.

Quand le décor commence à prendre de la place, on ne peut pas dire qu’il reste beaucoup d’espace pour bouger

Dans les faits, non seulement l’action est confuse, mais les choix de game design malheureux évoqués plus haut font qu’il faudra pas mal de temps pour réellement commencer à prendre ses marques, les premières parties laissant la très désagréable impression d’être simple spectateur d’un foutoir innommable où l’essentiel de l’action se déroule sans nous. L’ennui étant qu’une fois (péniblement) maîtrisée, la jouabilité ne justifie jamais les inutiles complications apportées à un modèle standard à l’époque, efficace et nerveux, où il était tout bêtement impossible de se retourner – ce qu’on compensait le plus souvent, tout bêtement, par le déploiement d’un tir vers l’arrière. Ajoutez-y une fenêtre de jeu cannibalisée par l’interface et par l’énorme sprite de votre robot, et vous réaliserez que Veigues : Tactical Gladiator n’a peut-être tout simplement pas fait les bons choix pour mettre le joueur à l’aise.

Les premiers boss sont de simples promenades de santé, mais ça se complique très vite

C’est dommage, car la réalisation, sans être renversante, était clairement dans le haut du panier pour un titre de 1990, surtout sur une console 8 bits. Les graphismes sont colorés, les environnements se renouvèlent bien – même s’il vaut mieux apprécier les dédales mécaniques – et la musique est suffisamment rythmée pour se laisser entendre avec plaisir. Malheureusement, face à la concurrence écrasante développée les années suivantes sur la machine de NEC – et sur les systèmes 16 bits – inutile de dire que le titre de Game Arts a pris un sacré coup de vieux, et que ce n’est certainement pas sa jouabilité qui va améliorer les choses.

Vidéo – Les dix premières minutes de jeu :

NOTE FINALE : 11,5/20 En dépit de quelques bonnes idées et d'une réalisation très correcte si l'on considère l'année de sa sortie, Veigues : Tactical Gladiator souffre d'une prise en main anti-intuitive qui constitue un handicap majeur dans un genre réputé pour sa nervosité et son adrénaline. Ceux qui parviendront à passer outre découvriront un jeu exigeant et plus ludique que ne le laisseraient penser les premières parties, mais difficile de donner aux joueurs déçus d'avoir le sentiment de ne pas contrôler grand-chose de vraies bonnes raisons de persévérer envers et contre tout, tant le titre de Game Arts semble condamné à rester un run-and-gun fondamentalement oubliable. CE QUI A MAL VIEILLI : – Jouabilité poussive – Cette idée de pouvoir se retourner est finalement un poison pour la prise en main du jeu – Fenêtre de jeu bien trop réduite

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Veigues sur un écran cathodique :