Super Tetris

Développeur : Sphere, Inc.
Éditeur : Spectrum Holobyte, Inc.
Testé sur : PC (DOS/Windows 3.x)AmigaMacintosh
Présent dans les compilations :

  • 3 in One : Macintosh Best Sellers Collection (1992 – Macintosh)
  • Hits for Six : Volume Nine (1994 – PC (DOS))
  • 5 Plus One : Pack 6 (1996 – PC (DOS))

La série Tetris (jusqu’à 2000) :

  1. Tetris (1984)
  2. Welltris (1989)
  3. Faces… tris III (1990)
  4. Tetris 2 + Bombliss (1991)
  5. Super Tetris (1992)
  6. Tetris 2 (1993)
  7. Tetris Battle Gaiden (1993)
  8. Super Tetris 3 (1994)
  9. Tetris Blast (1995)
  10. V-Tetris (1995)
  11. 3-D Tetris (1996)
  12. Tetris Attack (1996)
  13. Tetris Plus (1996)
  14. Tetris S (1996)
  15. Tetrisphere (1997)
  16. Tetris : The Grand Master (1998)
  17. Tetris DX (1998)
  18. Tetris 64 (1998)
  19. Magical Tetris Challenge (1998)
  20. Tetris 4D (1998)
  21. Sega Tetris (1999)
  22. The Next Tetris (1999)
  23. The New Tetris (1999)
  24. Kids Tetris (1999)
  25. Tetris with Carcaptor Sakura : Eternal Heart (2000)
  26. Tetris the Absolute : The Grand Master 2 (2000)

Version PC (DOS/Windows 3.x)

Date de sortie : Mars 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2 (en local ou via modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″ (x2) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette Windows émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Version DOS :
Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr, Tandy DAC (TL/SL)
Système de protection de copie par consultation du manuel

Versions Windows 3.x :
Processeur : Intel 8088/8086 – OS : Windows 3.0 – RAM : 2Mo
Modes graphiques supportés : SVGA, VGA
Système de protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

La grande question de la succession à l’immense Tetris aura rapidement représenté une colle un peu plus coriace que prévu pour le studios occidentaux. Loin de générer immédiatement un genre à part entière composé de clones faciles à programmer, le titre d’Aleksei Pajitnov se sera révélé être un trop bon concept, de ceux qu’il est très délicat d’altérer sans les détruire dans le processus, et en dépit de son succès planétaire quasi-immédiat, la poule aux œufs d’or se sera révélée difficile à traire – je me comprends.

Du côté des américains de Spectrum Holobyte, les deux premières approches – pourtant hautement rationnelles – avaient fait chou blanc : Welltris, la suite officielle auréolée de la caution du créateur de la licence en personne, n’aura jamais ne fut-ce qu’égratigné le plébiscite atteint par son prédécesseur, quant à la piteuse tentative de Faces… tris III, elle aura achevé de démontrer qu’il ne suffisait pas de pondre n’importe quoi et de mettre le noms de Tetris dessus pour que ça se vende. Restait donc une troisième possibilité, un peu plus délicate car reposant par définition sur un subtil équilibre : proposer une suite avec suffisamment de nouveautés pour pouvoir être qualifiée comme telle, mais en restant suffisamment proche de l’inépuisable concept initial pour ne pas décontenancer les joueurs. Terrain glissant s’il en est, mais il aurait été dommage d’enterrer trop vite une licence aussi prometteuse, c’est pourquoi un certain Super Tetris finit bel et bien par se matérialiser au début de l’année 1992, deux ans après le fiasco d’un troisième épisode que tout le monde avait déjà oublié.

Le simple nom de Super Tetris est déjà intéressant en ce qu’il constitue tout un programme : ce n’est pas une suite, puis qu’il n’y a ni « 2 » ni « 4 » derrière (Face… tris III avait bien un numéro, mais c’était plus pour tenter piteusement de raccrocher le jeu à la saga que par réelle cohérence), c’est une version « Super » ; comprendre par là une version dopée du contenu initial. De fait, la partie solo repose une nouvelle fois sur un unique mode de jeu – il est toujours possible de choisir son niveau de départ et même de jouer avec une limite de temps, au hasard pour éviter d’être surpris par l’arrivée du patron à la fin de la pause déjeuner) – mais celui-ci n’est pas tout à fait le mode « illimité » qu’on avait toujours connu, et qui reste celui qui subsiste encore de nos jours.

En fait, Super Tetris est bel et bien une variante : quoi qu’il arrive, la moitié inférieure du plateau de jeu est systématiquement occupée par des lignes quasi-complètes, et l’objectif va être de faire disparaître un certain nombre de ces lignes pour pouvoir accéder au prochain niveau, où il faudra alors refaire la même chose avec des pièces tombant un peu plus vite. La première difficulté est donc que tout ce que le joueur « construit » au-dessus de ces lignes à éliminer ne sert pour ainsi dire qu’à le gêner : il n’est plus possible de jouer à Tetris à sa manière, toute la stratégie doit être orientée vers le ménage du bas de tableau, et c’est d’autant plus indispensable que le nombre de pièces alloué par le jeu – figuré par un compteur à gauche – est à présent limité. Le fait d’effacer une ligne a beau vous allouer deux pièces supplémentaires à chaque fois, le joueur sera doublement pénalisé de se placer dans une situation difficile – autant donc être prévenu : être mal engagé est devenu plus punitif encore dans cette version.

Le jeu introduit pourtant une idée originale, et pour tout dire assez gonflée, afin de laisser au joueur l’occasion de rattraper (une partie de) ses erreurs : les bombes. Concrètement, pour chaque ligne effacée, deux bombes viendront s’intercaler avant la prochaine pièce (si vous venez d’effacer quatre lignes, vous recevrez donc un ensemble de huit bombes) et permettront de détruire chacune le bloc avec lequel elle rentrent en collision.

Un très bon moyen, avec un peu de pratique, de se débarrasser précisément de ce qui gêne l’accès aux lignes inférieures, offrant ainsi une très originale gestion stratégique des erreurs – ou une optimisation sur mesure. Le programme y additionne également d’autre type de blocs – tous dans la partie inférieure – qui ajoutent une nouvelle fois un peu de piment : les éclairs détruisent toute la ligne à laquelle ils sont liés, les blocs explosifs font sauter tous les blocs alentours (ces deux types de blocs sont donc à activer spécifiquement avec des bombes), et les blocs affichant une ligne bleue permettent d’invoquer le Graal des combinaisons majeures : le tétrimino prenant la forme d’une ligne de quatre. Bref, de quoi renouveler un peu le jeu sans pour autant (trop) le trahir : le pied.

Jusqu’ici, le bilan est assez flatteur, et il ne fait que s’améliorer lorsqu’on jette un œil à la réalisation du jeu. Certes, on a par définition assez peu de temps pour s’intéresser aux illustrations qui décorent l’interface au fil d’une partie, mais il faut reconnaître que de ce côté-là, Sphere – qui a placé tout le jeu sous la thématique du cirque de Moscou, sans doute parce que c’était plus convivial que les chars russes envahissant l’Afghanistan – a mis le paquet. Dans sa version DOS, le jeu déploie toute la palette de 256 couleurs du VGA, et dans son itération Windows, il est même possible de jouer en SVGA – à savoir en 640×480 et 256 couleurs – ce qui n’était pas encore très courant en 1992.

Autant dire que la lisibilité est parfaite, même si on pourra se demander pourquoi le plateau en lui-même reste quoi qu’il arrive en 16 couleurs dans la version Windows. La musique, pour sa part, ne laisse entendre qu’une seule boucle par niveau avant de sombrer dans le silence, ce qui l’empêche de devenir fastidieusement répétitive. La jouabilité reconnait à peu près tout ce qui peut se brancher sur un ordinateur – clavier, joystick et souris –, ce qui est d’autant mieux que le titre compte un mode compétitif et un mode coopératif à deux joueurs, lesquels se limitent à jouer simultanément avec deux sets de pièces sur le même plateau plutôt que d’utiliser deux plateaux distincts. Des modes qui ont le mérite d’exister, mais qui sont encore très loin d’offrir les possibilités jouissives qu’allait imaginer la même année (mais d’abord uniquement au Japon, hélas) le deuxième opus des Puyo Puyo.

Le véritable problème de Super Tetris, cependant, est ce qu’on pourrait appeler une erreur de débutant : avoir oublié d’inclure Tetris. Car bien que les nouveautés soient intéressantes et que le nouveau mode de jeu puisse se révéler aussi addictif que l’ancien, les joueurs ne goutant pas les quelques limites de cette nouvelle approche – comme par exemple le fait d’être cantonné à la moitié supérieure du plateau quoi qu’il arrive, le fait que toute la construction soit désormais orientée vers la base ou encore une difficulté qui devient à peu près insurmontable dès que la vitesse augmente, c’est à dire dès le niveau six – auront de bonne raison de râler en constatant que le mode « illimité » de base tel qu’on l’a toujours connu n’est tout simplement pas disponible !

C’est sans doute là la dernière leçon qu’il restait à apprendre pour Spectrum Holobyte : il vaut mieux ajouter du contenu à un jeu comme Tetris que remplacer le contenu existant, car le public de destination du jeu – à savoir les fans de Tetris premier du nom – risque également d’être le moins réceptif aux nombreuses altérations de ce Super Tetris. Un paradoxe qui explique sans doute que cet épisode, pourtant objectivement bien pensé, ait une nouvelle fois échoué à égratigner le succès du titre original : à bien des niveaux, il offre à la fois trop et pas assez. Cela reste une curiosité un peu à part dans la série des Tetris, et une qui saura sans doute conquérir quelques curieux de nos jours – mais les fans irréductibles de la saga ? Ils feraient bien de se méfier : ce Tetris-là n’est pas forcément celui qu’ils aiment.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15/20

Après quelques expériences plus ou moins heureuses, Super Tetris a le mérite de revenir aux bases... du moins en apparence. Le titre de Sphere a des idées en stock – souvent bonnes, qui plus est, c'est indéniable ; son seul véritable défaut est de les imposer au joueur sans lui laisser l'opportunité de s'essayer au mode qui a toujours été le socle de la licence. Désormais cantonné à une sorte de « demi-plateau » pendant l'intégralité de la partie, le joueur a souvent l'occasion de se sentir à l'étroit, surtout dans les niveaux les plus rapides, et l'unique mode de jeu solo tend rapidement à dégager la même impression que ses deux modes multijoueurs : bien essayé, mais encore bancal. Un épisode un peu à part qui risque fort de ne pas plaire à tout le monde – à essayer.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un seul mode de jeu solo...
– ...et aucune possibilité de s'adonner au Tetris traditionnel
– Des modes multijoueurs qui ont le mérite d'exister, mais qui demeurent maladroits
– Une difficulté ingérable dans la deuxième moitié du jeu, pas du tout adaptée à la nouvelle approche

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Super Tetris sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Tous ces ajouts ne suffisent malheureusement pas à renouveler Tetris et ne font au final que disperser l’attention. La difficulté, modérée jusqu’au niveau 5, devient infernale au niveau (sic) 6 et 7, ce qui est assez désagréable. »

Jean-Loup Jovanovic, Tilt n°100, mars 1992, 14/20

Version Amiga

En 1992, le marché de l’informatique avait déjà bien changé, et on constatera rapidement que le bal des portages qui était encore la règle quelques années plus tôt ne se sera cette fois pas aventuré bien loin. L’Amiga, toujours un bon client pour le marché européen aura naturellement été servi – contrairement à l’Atari ST – et sa version de Super Tetris permet surtout de mesurer à quel point ses capacités graphiques commençaient à pâtir de la comparaison avec ce que proposait le VGA, surtout quand elles n’étaient pas très bien employées. On ne va pas dire que le jeu est devenu moche, mais les illustrations donnent l’impression d’être passées à travers un mauvais filtre aux teintes particulièrement mal choisies, et dans l’ensemble on ne retrouve pas le déluge de couleurs des versions sur PC – et naturellement, rien de la finesse de la version Windows. La bonne nouvelle étant que le contenu et la jouabilité, eux, n’ont changé en rien, mais Spectrum Holobyte aurait sans doute mieux fait de faire appel à des développeurs européens, plus à l’aise avec la machine, pour assurer la conversion.

NOTE FINALE : 14,5/20

En dépit d’un contenu et d’une jouabilité identiques à ceux des versions PC, Super Tetris ne brille pas exactement de mille feux sur Amiga, la faute à une réalisation graphique terne aux teintes délavées qui ne rend pas exactement justice au cirque de Moscou. Rien de rédhibitoire, mais il y avait mieux à faire.

Les avis de l’époque :

« Quant au jeu lui-même, je ne serai pas totalement de l’avis de Jean-Loup. Les bonus variés permettent une multitude de stratégies différentes. Certains choisiront de privilégier le score, d’autres la sécurité, d’autres encore l’accès au niveau suivant. le nombre limité de pièces, qu’il faut renouveler en complétant des lignes ou en récupérant les bonus correspondants apporte aussi un certain piment. Mais surtout les bombes gagnées à chaque ligne complétée introduisent une dimension très rare dans les jeux actuels : la gestion des erreurs. »

Jacques Harbonn, Tilt n°106, octobre 1992, 16/20

Version Macintosh

Dernier servi, le Macintosh fournit, comme souvent avec la machine d’Apple, une prestation solide. Ce qui n’empêche pas cette version de Super Tetris d’être techniquement légèrement inférieure à l’édition Windows, sa résolution en 512×384 restreignant sa fenêtre de jeu à une zone de 512×322 – encore assez loin, donc, des 632×434 de la fenêtre SVGA (qui nécessitait, certes, une très bonne carte graphique). Pour le reste, on retrouve le jeu pratiquement à l’identique, même si on pourra regretter qu’il soit impossible de jouer au joystick – et également, de façon plus surprenante, à la souris, le programme lui préférant un obscur périphérique commercialisé par Gravis ! Le multijoueur est pour sa part toujours présent, avec la possibilité de s’affronter par câble réseau conservée, et on hérite donc d’un portage qui ne devrait pas laisser les joueurs Macintosh écumer de jalousie devant la version PC.

NOTE FINALE : 15/20

Prestation sans surprise pour Super Tetris sur Macintosh, qui ne souffre pour ainsi dire que de la disparition du jeu au joystick et à la souris en plus d’une résolution légèrement inférieure à celle de la version Windows – mais cela reste très anecdotique dans ce dernier cas.

Fire and Forget

Développeurs : Alain Fernandes et Olivier Corviole
Éditeur : Titus France S.A.
Testé sur : Atari STAmigaAmstrad CPCPC (DOS)ZX Spectrum
Disponible sur : Antstream
Présent au sein de la compilation : High Energy (1990 – Amiga, Atari ST, PC(DOS))

La série Fire and Forget (jusqu’à 2000) :

  1. Fire and Forget (1988)
  2. Fire & Forget II (1989)

Version Atari ST

Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On a souvent l’occasion de disserter sur les mérites comparés des années 80, période pionnière où tout restait à défricher, ère enchantée où un adolescent plus ou moins boutonneux, tout seul dans son garage, pouvait programmer en quelques semaines un logiciel capable de le propulser vers la gloire ou, à défaut, vers le succès financier, vers l’autonomie et souvent vers sa propre entreprise. L’image est si rebattue qu’elle en est devenue une sorte de poncif, voire de mythe – combien de carrières pérennes auront réellement commencé dans un garage ? –, mais comme tous les clichés, elle s’appuie sur un fond de vérité. Quitte à évoquer ces obscurs qui font le jeu vidéo et dont la presse ne parlait jamais, trop occupée à aller interroger Peter Molyneux, les Bitmap Brothers et les autres noms clinquants qui faisaient immédiatement vendre du papier (en plus des jeux), il conviendrait de prendre le temps de se pencher sur une carrière aussi passionnante que celle d’Alain Fernandes.

Ayant débuté la programmation à l’âge de treize ans, terminé son premier jeu à quatorze et publié son premier jeu avant même d’avoir eu son bac, il aura commencé à travailler pour Titus dès la création de l’entreprise en 1985, et y aura travaillé sur la bagatelle de vingt-cinq projets sur quatorze ordinateurs différents en six ans – avant d’entamer un parcours professionnel englobant Loriciel, Ocean, Coktel Vision, Mindscape (pour n’en citer que quelques-uns !) et qui se poursuit encore aujourd’hui – les curieux pourront en apprendre plus directement sur sa page. Du vrai matériau pour une interview qui accompagnerait à merveille celle de Laurent Cluzel, avec qui il a travaillé sur Light Quest. Alain, si tu nous lis… Toujours est-il qu’en 1988, après avoir travaillé sur Crazy Cars, un titre ouvertement inspiré d’OutRun, c’est une nouvelle fois du côté de l’arcade qu’il sera allé chercher l’idée de son prochain jeu. De son propre aveu, prenez Buggy Boy, Spy Hunter et Spy Hunter II, et vous obtiendrez les bases de Fire and Forget – un nom qui devrait parler à énormément de joueurs de la période.

Le « scénario » (notez les guillemets) glorieusement étalé en cinq lignes dans le « manuel » du jeu (une feuille format A5 contenant les commandes pour les trois versions 16 bits du jeu, toute une époque…) est aussi stupide que génial : pour aboutir à la paix mondiale, rien de mieux qu’un véhicule tout-terrain futuriste surarmé envoyé péter la gueule à tous ceux qui ne sont pas des pacifistes !

L’idée va donc être de parcourir six zones de conflit – dans l’ordre de votre choix – afin de venir à bout de tout ce qui se trouvera sur votre route, littéralement, qu’il s’agisse de blindés, d’hélicoptères, de mines ou d’obstacles divers, sans oublier des tourelles placées sur le bas côté ; rien ne résistera à votre super canon – pardon, à votre lanceur de « missiles à propulsion tétranucléaire et guidage par fréquence vocale indécodable » (je n’invente rien !) – aux munitions illimitées. En fait, même le fait de se faire détruire ne sera qu’un contretemps, la seule véritable jauge de santé étant figurée par votre réserve de carburant, laquelle pourra être rechargée en passant sur un des cônes bleus ou verts faisant office de jerricans. Qu’elle arrive à son terme, en revanche, et ce sera le game over et l’aller simple au tableau des scores. Simple. Efficace.

Après avoir choisi un des trois niveaux de difficulté, le nombre de joueurs (nous y reviendrons) ainsi que le parcours, la partie se lance sous la forme la plus basique qui soit : un jeu de course en pseudo-3D, avec un canon pour détruire ce qui se trouve en face de votre véhicule. On règle sa vitesse en poussant le joystick vers le haut ou le bas, on tire avec le bouton, on ramasse le carburant en passant dessus, et tout contact avec n’importe quoi d’autre vaudra l’explosion de votre véhicule avant sa réapparition, arrêté, à l’endroit où il a connu son destin tragique quelques secondes plus tôt.

Il n’y a pas de carte, aucune indication de votre avancement dans des zones qui peuvent généralement être bouclée en une minute, aucun bonus ni power-up, deux types d’ennemis, trois types de décors. Cela semble peu ? Ça l’est, et pour tout dire, la jouabilité se résumant pour l’essentiel à foncer tout droit en tirant, votre seule marge de manœuvre consistera à choisir ou non de rouler un peu moins vite pour avoir davantage de temps pour anticiper et à apprendre la position des cônes de carburant par cœur pour être bien certain de ne pas les rater. L’inspiration de l’arcade est évidente : Fire and Forget est un jeu pensé pour des parties de cinq minutes, l’ennui étant que celles-ci, plutôt qu’une pièce de cinq francs, nécessitaient une machine à 6000 francs et un jeu à 300 francs pour pouvoir se matérialiser – un rapport qualité/prix qui nous rappelle à quel point les attentes en termes de contenu et de durée de vie ont eu l’occasion de changer en trente-cinq ans…

Histoire de densifier un peu les possibilités, le jeu est également doté d’un étonnant mode deux joueurs coopératif. Le deuxième larron prend alors les commandes d’une espèce de machine volante (dont il n’aura pas à régler la vitesse, celle-ci étant obligatoirement calquée sur celle de la voiture) et qui pourra lui aussi participer à l’action en tirant sur les adversaires. C’est atrocement limité, furieusement gadget, et cela achève surtout de démontrer à quel point la dimension « jeu de tir » du logiciel n’est finalement qu’un cache-misère pour camoufler un jeu de course lui-même atrocement limité. En gros on se retrouve avec Crazy Cars transformé en shoot-them-up, et si le concept aurait pu être intéressant avec un peu de réflexion et un minimum d’équilibrage – en gros, avec un soupçon de cette notion encore totalement inconnue en Europe qu’était le game design – il n’offre ici absolument rien qui aide le joueur à se sentir acteur de niveaux qui, pour l’essentiel, se résolvent tout seuls en bloquant le joystick vers le haut et en gesticulant au hasard avec le bouton enfoncé pendant toute l’opération.

Ça faisait peut-être illusion à l’époque (même si je soupçonne la presse française d’alors d’une large dose de chauvinisme intéressé tant la presse internationale, elle, était déjà moins emballée), mais aujourd’hui, on ne va pas se mentir : c’est juste OutRun en (nettement) moins bien, et le fait de tirer ne change pas grand chose de plus qu’il ne le ferait un an plus tard dans S.C.I. Bref, c’est le parfait avatar de ces jeux qu’on montrait aux voisins pour les épater avec notre Atari ST parce que quand même, ça allait vite et il y avait plein de couleurs, mais dont on avait fait le tour en deux parties et auquel on se forçait ensuite à rejouer parce qu’il avait quand même coûté bien cher… enfin, quand on l’avait acheté, bien sûr (toute une époque, bis). Autant dire un souvenir un peu jauni d’une époque un peu folle, de celle qu’on regarde avec les yeux embués de larmes perdus quelque part dans le lointain, mais d’un point de vue strictement ludique et à l’échelle du XXIe siècle, le constat est implacable : trop peu de choses et trop mal exécutées pour qu’on y consacre plus de cinq minutes.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 08/20

Fire and Forget est un jeu qui mérite assez bien son nom : dix minutes après l'avoir lancé, on l'a effectivement déjà oublié. Non que le titre imaginé par Alain Fernandes et Olivier Corviole soit particulièrement mauvais, mais disons qu'il correspond aux attentes de 1988 : un titre à la réalisation spectaculaire (pour l'époque) se limitant à foncer en tirant, avec une jouabilité ultra-limitée et un contenu anémique. Sur le plan purement technique, le programme n'aura pas mis très longtemps à être supplanté par des Lotus Esprit Turbo Challenge ou surtout par Vroom, et en termes d'action il a tout simplement trop peu de choses à offrir, que ce soit seul ou à deux, pour qu'on puisse prétendre y revenir. Bref, ce n'est même pas un jeu popcorn, c'est un jeu « sachet de cacahouètes apéritif » qui saura à peine combler votre appétit en attendant quelque chose de plus consistant. Bien essayé, mais insuffisant.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une jouabilité qui se limite à foncer en tirant...
– ...et une réalisation qui n'a même pas le courage d'offrir un décor différent par niveau
– Un mode deux joueurs coopératif tout aussi limité que le mode solo
– Trop peu de variété, à tous les niveaux

Ce à quoi peut ressembler Fire and Forget sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Fire and Forget est un bon shoot-them-up, rapide et violent. l’animation 3D rappelle étrangement celle de Crazy Cars, le précédent programme de Titus. Mais la ressemblance s’arrête là car l’esprit du jeu est différent. De bons graphismes et une animation rapide font de ce programme un shoot-them-up réussi. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°57, septembre 1988, 14/20

Version Amiga

Développeurs : Alain Fernandes, Olivier Corviole et Eric Caen
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Qui disait « Atari ST » en 1988 sous-entendait « Amiga également », c’était pour ainsi dire inévitable. On sera au moins reconnaissant aux responsables du portage de ne pas s’être contentés d’une bête conversion pixel perfect mais d’avoir pris le soin d’ajouter quelques couleurs à l’écran-titre ainsi qu’en jeu, où les dégradés du ciel, notamment, sont plus fins. Tant qu’à faire, le framerate est un peu meilleur. Les décors ne sont hélas pas plus variés, mais ils sont curieusement distribués différemment. La jouabilité, pour sa part, demeure toujours aussi limitée.

NOTE FINALE : 08,5/20

Pas de miracle pour cette version Amiga de Fire and Forget, qui tend à démontrer exactement les mêmes faiblesses que sa consœur sur Atari ST, mais qui affiche pour l’occasion des graphismes un chouïa plus colorés et des animations un tantinet plus fluides. Rien qui transfigure l’expérience de jeu, mais à tout prendre, cela reste la meilleure version pour découvrir le jeu.

Version Amstrad CPC

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Avec l’Atari ST, l’Amstrad CPC était l’ordinateur populaire en France (et souvent cruellement délaissé par les britanniques, qui pour leur part lui préféraient la fierté nationale qu’était le ZX Spectrum). Comme beaucoup de développeurs français, Titus aura donc pris soin de créer un portage à la hauteur de la machine, et il faut le dire : le résultat est très convaincant. Alors certes, on parle de Fire and Forget, donc le titre se limite toujours à foncer tout droit en tirant, mais dans ce domaine il présente une action fluide et une jouabilité qui répond au quart de tour, ainsi qu’une réalisation colorée qui ne souffre pas trop de la baisse de la résolution. Pour tout dire, en dépit de la disparition d’un mode deux joueurs relativement anecdotique, on s’amuse au moins autant que sur Atari ST ! Ce n’est peut-être toujours pas un logiciel auquel consacrer des jours, ni même des heures, mais à l’échelle du CPC en 1988, on comprend que ça pouvait avoir son petit effet.

NOTE FINALE : 08,5/20

Merci à Titus de nous rappeler avec Fire and Forget qu’un CPC bien employé était loin d’être une machine ridicule. C’est coloré, c’est lisible, c’est fluide – et c’est certes toujours aussi limité, d’autant que le mode deux joueurs a disparu, mais cela reste une occasion d’aller vite et de profiter d’un peu d’action nerveuse sur la machine d’Amstrad. De quoi tuer agréablement au moins dix minutes.

Version PC (DOS)

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 256ko
Mode graphique supporté : CGA
Carte son supportée : Aucune (haut-parleur interne)

En revanche, s’il était un système qui cartonnait ailleurs – et en particulier outre-Atlantique – tout en connaissant un succès plus mesuré en France en 1988, c’était bien le PC. Les nombreuses améliorations techniques de la très coûteuse machine mettaient souvent plusieurs mois, sinon plusieurs années, à se démocratiser sur le vieux continent, ce qui signifie que Fire and Forget aura visé des configurations qui correspondait plutôt à un PC de 1983, avec des graphismes en quatre couleurs et aucune carte son au menu (pour la défense de Titus, l’AdLib était alors encore quelque chose de très neuf paru à peine quelques mois plus tôt). Conséquence : comme on pouvait le craindre, le jeu qui ne tenait déjà que par sa technique devient ici un titre moche à peine capable de rivaliser graphiquement avec la version ZX Spectrum – oui, il se fait humilier dans tous les domaines par le CPC, mais à l’époque ça n’était même pas une surprise. Oh, et naturellement, le programme n’est pas ralenti – bloquez-le à 240 cycles sous DOSBox, sinon vous risquez de le regretter. Bref, une autre madeleine de Proust pour se rappeler à quel point personne n’avait envie de jouer sur un PC en France à cette époque.

NOTE FINALE : 07/20

Désormais limité à une réalisation en quatre couleur avec le haut-parleur interne du PC en guise de seul accompagnement sonore, Fire and Forget perd les quelques très maigres atouts dont il disposait sur les autre systèmes pour devenir un jeu à la fois moche, court et atrocement limité. C’était peut-être la norme sur la machine, en 1988, mais ça ne l’est plus aujourd’hui. À éviter.

Version ZX Spectrum

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Septembre 1988
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Incontournable à l’échelle du marché britannique, le ZX Spectrum était nettement moins populaire en France, et cela se sent en découvrant ce portage de Fire and Forget qui ne présente aucun des points forts de la version CPC. Niveau graphique, il faudra composer avec trois couleurs à l’écran – c’est moins que sur PC, bravo pour la performance. Niveau son, c’est encore pire, avec un vague crépitement en guise de moteur. Le framerate est correct, mais le vrai problème est que la lisibilité est si catastrophique, avec des ennemis qui apparaissent à la dernière seconde et des tirs adverses à peu près impossibles à distinguer, qu’on ne sait pour ainsi dire JAMAIS pourquoi notre véhicule explose. Bref, on va se contenter d’oublier cette version.

NOTE FINALE : 06,5/20

S’il fallait trouver un mérite à la version ZX Spectrum de Fire and Forget, ce serait d’être parvenu à démontrer qu’on pouvait faire pire que la version PC. Pour tout le reste, difficile de trouver un intérêt à une version qui n’en a pas. Allez jouer à autre chose.

Alpha Waves

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Titre alternatif : Continuum (Amérique du Nord)
Testé sur : Atari STPC (DOS)Amiga

La collection « Cristal » d’Infogrames :

  1. Welltris (1989)
  2. The Light Corridor (1990)
  3. Alpha Waves (1990)

Version Atari ST

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquettes 3,5″ double face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le jeu vidéo est un peu comme la grande salle d’un gigantesque palais : où que vous alliez, il y a forcément de l’écho.

On a déjà souvent eu l’occasion de se passionner à l’idée de trouver l’origine d’un genre, le père fondateur qui précède le père fondateur qui précède le père fondateur, et ainsi de suite. Le mieux, c’est qu’avec le temps, on semble toujours en trouver un nouveau ; un Alone in the Dark avant Resident Evil, un Project Firestart avant Alone in the Dark – et souvent, un obscur programme que tout le monde semble avoir oublié quelque part dans les années 80, voire dans les années 70, et qui avait eu la bonne idée avant tout le monde sans que personne ne semble s’en être aperçu sur le moment.

Dans le domaine de la plateforme, le jalon est en général simple à trouver : il suffit de chercher un épisode de Super Mario Bros. Ce n’est jamais le premier, le pionnier, mais c’est celui qui articule tout le reste et redéfinit le genre. Par exemple, pour ce qui est du passage à la 3D, l’emplacement chronologique de l’An I ne fait tout simplement aucun doute : juin 1996, Super Mario 64, un titre si extraordinairement fondateur qu’il aura balayé sans autre forme de procès les quelques tentatives – souvent objectivement ratées – qui l’avaient précédé. Dans l’inconscient collectif, c’est là que tout commence, et le reste est si anecdotique qu’il ne vaut même pas la peine d’être mentionné. Et pourtant, il est intéressant de se rendre compte que le concept de « jeu de plateforme en 3D temps réel » avait déjà trouvé une matérialisation dès 1990, et que la première pierre du monument aura été posée par Christophe de Dinechin et son équipe. C’est en effet au tout début de la décennie que la (trop) éphémère collection « Cristal » d’Infogrames, destinée à accueillir des logiciels ayant l’audace de sortir des clous, aura hébergé un titre qui aura marqué les (trop) rares joueurs à avoir eu l’occasion de poser les mains dessus : l’étrangement nommé Alpha Waves.

Le concept du jeu est pour ainsi dire celui du genre dans son ensemble : sauter de plateforme en plateforme pour atteindre la sortie. Pour l’occasion, le joueur est placé aux commandes d’un « module » dont il peut d’ailleurs choisir l’apparence – celle-ci étant vouée à ne pas dépasser une forme abstraite d’une poignée de polygones qui correspondait de toute façon à ce que la 3D de l’époque pouvait représenter de plus concret. Le terrain de jeu est un complexe de 256 salles, toutes composées d’un cube des mêmes dimensions, présentant parfois plusieurs sorties sur ses différentes faces.

Dans le mode « Arcade » du jeu, l’idée est de collecter les cristaux de lumières disséminés au sein du complexe tout en faisant face à une limite de temps ; chaque nouvelle pièce découverte ajoute une minute au compteur, et il est possible de trouver des bonus venant encore allonger le temps disponible – un score viendra également ajouter un objectif histoire de matérialiser les progrès du joueur d’une partie à l’autre. En mode « Emotion », le score et la limite de temps disparaissent : le joueur est alors libre de choisir sa zone de départ parmi les douze disponibles en fonction de leur nom et de son état d’esprit (chacune d’entre elles portant un nom onirique ou pseudo-mystique de type « rêve », « stimulation » ou « développement spirituel »), et l’idée est alors de visiter la zone concernée sans réel objectif autre que celui que s’imposera le joueur. Un moyen comme un autre de découvrir ce que le manuel du jeu présente comme une « réalité virtuelle » (mais n’est-ce pas là une définition s’appliquant à tous les jeux vidéo quels qu’ils soient ?)

À la grande question « comment jouer dans un espace en 3D ? », Alpha Waves aura en tous cas eu le mérite d’aboutir à une réponse très intelligente. Le jeu est intégralement jouable au joystick : l’axe horizontal contrôle à la fois votre module et la caméra placée par défaut immédiatement derrière lui, selon ce que l’on qualifierait aujourd’hui de « vue à la troisième personne » (il est également possible de passer à une vue subjective via les options, accessibles à tout moment grâce à la touche Echap), tandis que l’axe vertical, lui, ne contrôle que la caméra – votre fameux « module », pour sa part, étant voué à avancer ou à sauter droit devant lui grâce au bouton du joystick.

De fait, le terrain est en quelque sorte « balisé » : placé directement sur le sol, le module ne fait rien d’autre qu’y glisser ; il faut l’amener sur une des plateformes faisant office de trampoline pour qu’il puisse commencer à rebondir sur place et à acquérir l’inertie pour démarrer une succession de sauts apte à le guider de plateforme en plateforme. Parfois, certains accès seront verrouillés et demanderont d’aller dénicher un cube qui fera en quelque sorte office de clef. Tout le reste prendra la forme d’une exploration, méthodique ou non, qui demandera de parvenir à vaincre chaque salle présentant, à sa façon, un petit casse-tête d’adresse. Et c’est tout.

On pourrait arguer que le concept est basique, pour ne pas dire primitif, mais c’est en fait précisément ce qui fait sa force : en déguisant ses quelques maigres polygones en expérience mystique au cadre et aux mécanismes dépouillés, Alpha Waves a le mérite de proposer une expérience à la jouabilité intuitive – ce qui était encore loin d’être une évidence pour un genre que le logiciel venait pour ainsi dire de créer – sans même imposer son rythme au joueur grâce à la pertinence du mode « Emotion », bon prétexte pour lâcher la pression du chronomètre et explorer le contenu du jeu à sa manière.

Il n’y a pas d’objets idiots à collectionner, pas d’étoiles à débusquer, pas de passages secrets à trouver, et cette « pureté » dans l’approche est certainement l’aspect du jeu qui a le mieux vieilli : seules demeurent la jouabilité et la latitude laissée au joueur, et c’est tant mieux. Ici, on n’a pas besoin de ré-explorer la même galerie pour la trentième fois à la recherche du machin vicieusement planqué qui va permettre de débloquer l’accès au niveau suivant où la sorcière Bidule va nous donner pour quête de collecter cent bitoniaux pour faire sa potion, et parfois, ça fait plaisir. Cette approche directe est d’ailleurs si efficace qu’on en vient à regretter que les développeurs aient eu la mauvaise idée d’ajouter des ennemis volants aux patterns impossibles à anticiper qui viennent compliquer la tâche du joueur en se mettant dans ses pattes au pire moment, ce qui aboutit très souvent à un retour à la case départ et à une bonne trentaine de secondes de manœuvres pour espérer revenir là où on en était – ça, sincèrement, on aurait pu s’en passer. Une petite maladresse qui rappelle à quel point tout restait à défricher en la matière – et à quel point l’équipe de développement s’en sera magnifiquement tirée.

Évidemment, il faudra également composer avec quelques petites contraintes techniques qui nous rappellent à quel point le matériel de l’époque n’était absolument pas pensé pour la 3D polygonale, avec des baisses de framerate dès qu’il y a trop de choses à l’écran (c’est à dire souvent), quelques imprécisions dans les masques de collision des plateformes et une ambiance sonore qui se limite à quelques bruitages et à un petit jingle à chaque fois qu’on franchit une porte pour quitter une salle – pas de musique pour accompagner l’action, donc.

Des broutilles, tant le jeu fonctionne précisément dans son essence ; non, il n’y a aucune fioriture, pas de vie à ramasser, pas de bonus, pas de chaussures pour aller plus vite ou de canon pour dégommer les monstres, aucune réelle variété dans l’action, mais c’est dans cette obsession bornée à ne pas se disperser que le titre parvient à être l’expérience qu’il prétendait offrir – une expérience parfaitement inscrite dans son époque, mais n’est-ce pas très exactement ce qu’on tend à chercher via le retrogaming ? Il y a quelque chose d’addictif, de presque hypnotique dans cet Alpha Waves, et rien que pour cela il mérite d’être redécouvert ne fut-ce qu’une heure ou deux – pour se souvenir d’une époque plus simple où moins, c’était plus et où le véritable plaisir était souvent de s’égarer dans un concept qui se suffisait à lui-même pendant le temps qu’on était prêt à lui consacrer. Une approche qui nous manque un peu.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20


Six ans avant Super Mario 64, il y avait déjà un jeu de plateforme intégralement en 3D temps réel, il était l’œuvre de l'équipe de Christophe de Dinechin et il s'intitulait Alpha Waves. Au-delà de l'aspect profondément visionnaire du concept, ce qui fait mouche est précisément sa simplicité : sauter de plateforme en plateforme afin de rejoindre une des sorties, tout en explorant un environnement tentaculaire de 256 salles. Tout n'est pas parfait dans le meilleur des mondes, la faute a un framerate inconstant, à un certain manque de précision et à quelques idées qui n'étaient bonnes que sur le papier (les ennemis...), mais il faut reconnaître que le programme a quelque chose de stupidement addictif et que son esthétique dépouillée aurait plutôt tendance aujourd'hui à procurer un petit pincement : celui du souvenir de cette époque où l'informatique parvenait encore régulièrement à surprendre et à faire rêver. Clairement une expérience à (re) découvrir tant elle se révèle à la fois singulière et familière.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un framerate qui dégringole quand il y a un peu trop de choses à l'écran
– Pas de musique durant la partie
– Des ennemis volants qui viennent plomber une action qui aurait déjà été largement assez exigeante sans eux

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Alpha Waves sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Alpha Waves développe un jeu lent, onctueux comme un mal de mer sur le Titanic. L’animation est si souple et les visions 3D si chavirantes que l’on ne peut qu’accrocher à cette partie toute en finesse, à cette prise de tête infernale. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°89, avril 1991, 15/20

Version PC (DOS)

Développeur : Frédéric Raynal
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquettes 3,5″ et 5,25″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.0 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Tandy/Pcjr
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien que techniquement un portage de la version Atari ST, Alpha Waves sur PC sera paru simultanément et aura même été envoyé à la plupart des rédactions plusieurs semaines, voire plusieurs mois avant la version ST. Assuré par Frédéric Raynal (qui aura déclaré par la suite que c’est le travail sur ce jeu qui l’aura poussé à employer la 3D pour Alone in the Dark), ce portage est sans surprise très proche de la version ST (certaines éditions présentaient même les deux versions du jeu sur la même disquette), ce qui signifie également que même en VGA, les graphismes restent quoi qu’il arrive en seize couleurs.

On notera néanmoins trois différences avec la version originale : du côté de la réalisation, la plus évidente est que le framerate est plus stable et infiniment plus fluide sur un PC AT (laissez le cœur en « auto » sous DOSBox), ce qui a un impact direct sur la jouabilité, d’autant que – deuxième différence – l’inertie est également légèrement moins prononcée dans cette version. Si toutes les options sont présentes à l’identique, on bénéficie ici d’un petit bonus absent de la version ST, et qui constitue la troisième et dernière différence : la présence d’un thème musical en jeu, qui permet de bénéficier d’une atmosphère agréable et légèrement planante. Mises bout-à-bout, ces nuances permettent à cette version PC de se hisser au-dessus de sa consœur dans tous les domaines, ce qui fait d’elle la meilleure façon, aujourd’hui, de découvrir le jeu.

NOTE FINALE : 16/20

Plus fluide, plus jouable et n’étant plus condamnée à se pratiquer dans un silence de mort, cette édition PC d’Alpha Waves reste à coup sûr la meilleure façon de découvrir un jeu toujours aussi efficace en dépit de – ou grâce à – sa simplicité. Si vous souhaitez découvrir le jeu aujourd’hui, commencez clairement par cette version.

Les avis de l’époque :

« Alpha Waves développe un principe ludique très simple. C’est la souplesse de son jeu, de ses animations 3D, qui créent l’ambiance et l’intérêt de la partie. On se prend très vite à se pencher en avant ou à se cabrer sur sa chaise, comme si cela allait influencer la trajectoire du module ! Après quelques heures de jeu, les professionnels lanceront leur engin dans des vols rapider (sic) et dangereux. C’est le frisson assuré ! »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Fabrice Decroix
Éditeur : Infogrames Europe SA (Europe) – Data East Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Mode graphique : OCS/ECS
Protection de copie par grille codée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Autre passage indispensable pour Alpha Waves : l’Amiga qui, pour l’occasion, aura été la dernière machine servie. Assuré par Fabrice Decroix, ce portage s’inscrit lui aussi droit dans les clous de la version ST sans qu’on y retrouve les nuances ajoutées par la version PC : il n’y a donc plus de musique une fois en jeu, et le framerate est plus irrégulier et moins élevé que sur PC – assez équivalent à celui de la version originale. Sur un Amiga 1200, cette version se hisse pratiquement à la hauteur de la version PC, mais il faudra toujours composer sans la musique. On notera d’ailleurs que le thème de l’écran-titre, pour sa part, choisit d’adopter des sonorités électroniques assez agressives qui le rendent nettement moins planant que dans les autres versions, mais cela reste assez anecdotique. Pour le reste, rien n’a changé, et les amateurs de plateforme en 3D devraient trouver assez facilement leur compte ici.

NOTE FINALE : 15,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 16/20 (Amiga 1200 ou ultérieur)

Techniquement très proche de la version ST, cette itération Amiga d’Alpha Waves en reprend exactement les forces et les faiblesses – sauf sur un Amiga 1200, où le framerate et la jouabilité se rapprochent alors énormément de ceux de la version PC. La seule vraie nuance sera alors à aller chercher du côté de la musique, qui ne se fera jamais entendre au-delà de l’écran-titre dans ce portage, mais cela n’impacte qu’assez peu l’expérience.

Das Boot : German U-Boat Simulation

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Testé sur : PC (DOS)Amiga
Disponible sur : Windows
Présent dans la compilation : Megafortress / Das Boot / Aces of the Great War (1992 – PC (DOS))
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on aura eu l’occasion de le mentionner par ailleurs (au hasard ici), la toute fin des années 80 aura correspondu à une timide tentative de démocratisation de la part d’un genre extrêmement exigeant par nature : la simulation. Accolade avait contribué à montrer la voie, mais celle-ci était finalement tracée d’avance, selon le bon vieux précepte qui veut que « toucher un public plus large » = « augmenter les chances de vendre le jeu » = « brouzoufs » – les simulateurs « allégés » à la Ace of Aces ne constituaient après tout pas une nouveauté en soi, disons simplement que l’on pouvait attribuer leur simplicité davantage à des contraintes techniques qu’à un réel choix de game design.

Mais tiens, puisque l’on évoque Ace of Aces, figurez-vous que le jeu avait justement déjà été distribué par Accolade, et que son équipe de développement se nommait alors Artech. Quatre ans plus tard, celle-ci n’avait visiblement pas gonflé que son nom pour devenir Artech Digital Entertainments, mais aussi ses effectifs puisqu’en parallèle de Blue Max, elle travaillait également sur un autre type de simulateur, lui aussi très en vogue à l’époque : le jeu de sous-marins. Terrain plus miné qu’on pourrait le penser, puisque déjà largement occupé par des références comme Silent Service II ou Wolf Pack – d’ailleurs sortis eux aussi en 1990 –, élevant de fait le seuil d’exigence de joueurs pas forcément décidés à acheter trois simulateurs d’U-Boot en un an. Alors histoire d’augmenter les chances, autant en profiter pour avoir recours à un licence célèbre ; de toute évidence, celle d’À la poursuite d’Octobre Rouge était déjà prise, alors il aura fallu aller chercher un peu plus loin avec le long-métrage Le Bateau (titre original : Das Boot) de Wolfgang Petersen, lui-même tiré du livre de Lothar-Günther Buchheim romançant des missions que l’auteur avait vécu pendant la seconde guerre mondiale. Et voilà comment on se retrouve avec Das Boot, un jeu… qui entretient en fait pour seul lien avec le film et le roman de se dérouler dans un sous-marin.

En vertu de la philosophie visant à offrir aux joueurs impatients un peu plus d’action effrénée et un peu moins de réglages techniques pointus proprement incompréhensibles aux malheureux n’ayant pas encore compulsé les 350 pages de manuel écrit petit, le titre d’Artech commence par proposer de courtes missions d’entraînement qui ont l’avantage de faire également office de mini-jeux pour les capitaines pressés n’ayant pas envie d’écumer les océans pendant un quart d’heure à la recherche d’un convoi allié (nous aurons l’occasion d’y revenir).

On pourra donc apprécier ici la variété des séquences : tir sur avions de chasse et bombardiers depuis le canon anti-aérien placé sur le pont, tir sur cibles marines avec un canon lourd, tir de torpille depuis la surface ou sous l’eau, en visant alors avec le périscope plutôt qu’avec les jumelles, combat sous-marin entre submersibles, champ de mines, phase d’évitement de charges explosives, etc. De quoi constater que la jouabilité de ces scènes est très simple – on vise avec les flèches, on tire avec Espace –, que la 3D est particulièrement efficace pour un titre de 1990 (les effets volumétriques visibles sous l’eau, particulièrement novateurs pour la période, avaient décroché la mâchoire de la presse de l’époque), et que certaines d’entre elles privilégient d’ailleurs la poudre aux yeux au détriment de la profondeur (sans mauvais jeu de mot) au point de s’avérer très limitées, en particulier du côté des phases sous-marines. Mais au moins, le ton est donné : les joueurs qui voudraient de l’action pourront en avoir, et ils pourront même en avoir tout de suite.

Cependant, comme on peut s’en douter, le principe même de la simulation de sous-marin ne repose pas exactement, d’ordinaire, sur le fait d’aller canarder des avions ou des destroyers depuis le pont de son submersible. Das Boot propose donc fort logiquement cinq missions plus conventionnelles et surtout beaucoup plus consistantes, aux objectifs relativement variés mais qui tourneront principalement autour du fait de patrouiller, de repérer des convois et leur escorte et de s’efforcer de couler le tout avant de repartir en un seul morceau. L’occasion de configurer de nombreux réglages pour s’approcher (ou non) d’une vraie simulation historique, et de goûter enfin à tous les postes du sous-marin, dans un mode qui devient alors immédiatement plus complexe.

Un exemple valant mieux qu’un long discours, imaginons un début de mission typique vous plaçant au milieu de l’océan. Même si vous avez déjà reçu des objectifs en prélude du démarrage, il pourrait être intéressant de commencer par passer par la station radio, d’où vous pourrez recevoir les messages du commandement – à condition de les passer par un des trois systèmes de décryptage avant de les comprendre, ce qui ne nécessite jamais que d’appuyer sur la touche correspondante. Vous serez d’ailleurs régulièrement invité à faire des rapports ou à solliciter des ordres additionnels, ce qui nécessitera donc d’émettre à votre tour – en n’oubliant pas, naturellement, d’opter vous aussi pour une transmission cryptée, sans quoi vous risqueriez rapidement de recevoir un message goguenard de la flotte ennemie vous remerciant de communiquer votre position en clair avant d’envoyer son aviation se débarrasser de vous ! Ceci dit, il pourra également arriver que vous interceptiez une communication qui ne vous était pas destinée, et que vous parveniez à votre tour à la décrypter pour obtenir des informations cruciales sur les navires adverses – bref, un système original assez intelligemment intégré sans se révéler inutilement opaque.

On pourra d’ailleurs regretter que l’interface, dans son ensemble, échoue à maintenir ce seuil d’accessibilité : en effet, si tous les postes et les raccourcis permettant d’y accéder sont clairement affichés en permanence au bas de l’écran, une large partie des fonctions indispensables, elle, n’est accessible que via des raccourcis qui ne sont indiqués nulle part ailleurs que dans le manuel.

Imaginons par exemple que vous ayez envie de repérer un convoi ennemi, ce qui est quand même la base : on se doute que se contenter de rester à la surface en utilisant les jumelles n’est pas exactement la méthode optimale, mais c’est la seule accessible par le menu. Pour toutes les autres, il va falloir faire chauffer le clavier, qu’il s’agisse d’utiliser l’hydrophone (Alt + H), le détecteur radio (Alt + R), le radar de détection (Alt + B) ou le radar aérien (Alt + O). On notera également des fonctions permettant de gagner un temps considérable dans le feu de l’action, comme celle vous permettant de plonger directement à la profondeur idéale pour utiliser le périscope (Alt + P), celle permettant de remonter à la surface (Alt + S), ou encore celle permettant de pivoter le sous-marin dans la direction que vous êtes en train d’observer (Alt + F). Sans oublier celle qui pourra vous éviter de dégommer bêtement un navire de votre propre camp en prenant le temps de demander à vos collègues d’identifier une cible (Alt +I).

Ce recours systématique à des raccourcis à noter ou à apprendre par cœur est d’autant plus incohérent que, en dépit de ses meilleurs efforts, Das Boot n’est pas vraiment un titre réaliste. Déjà parce qu’il est difficile de penser que la marine allemande ait suffisamment confiance en ses U-Boots pour envoyer un seul d’entre eux dégommer non seulement un convoi, mais aussi son escorte de destroyers, un porte-avions au milieu, et même toute une division aérienne simplement avec deux canons et une vingtaine de torpilles !

On pourra d’ailleurs regretter que tout l’aspect de chasse « en meute » introduit par Wolf Pack n’ait pas fait le trajet jusqu’ici : votre sous-marin devra toujours tout faire tout seul, même quand il y a des alliés dans les parages, ce qui est aussi grotesque qu’irritant. Ensuite, si on comprend que l’idée est précisément de nous faire incarner tous les membres d’équipage, la valse permanente d’un poste à l’autre pour accéder à des fonctions qui ne sont accessibles que via un menu en particulier est aussi contraignante qu’elle est contre-intuitive : pourquoi ne peut-on désigner le cap et la vitesse du submersible que lorsqu’on est sur le pont et en surface, par exemple ? Quel est l’intérêt de nous doter de cartes si celles-ci ne montrent, quatre fois sur cinq, qu’une immense zone bleue ? Pourquoi doter tout le jeu d’un pendant arcade assumé avec des scènes d’action irréalistes et des armes qui ne s’enraillent jamais… mais en limitant les munitions, obligeant le joueur à passer dix bonnes minutes à se désengager et à parcourir la moitié de la carte afin d’aller rejoindre un navire de ravitaillement avant de repasser dix minutes à retourner sur place pour finir le travail ? Bref, est-on face à une simulation, à une « simulaction », à un jeu d’action maladroitement délayé pour se faire passer pour une simulation ? La question reste ouverte.

Elle est d’autant plus pertinente que Das Boot offre réellement de bons moments : il peut en effet être particulièrement satisfaisant de traquer les communications radio adverses pour essayer de localiser un convoi, d’en identifier les premiers éléments après une observation aux jumelles, et de passer en plongée pour faire pleuvoir la mort avec des torpilles d’autant plus faciles à tirer qu’il n’est même pas nécessaire de pivoter le sous-marin dans la direction visée au périscope – et même si c’était le cas, la commande Alt + F fait tourner instantanément votre submersible, comme s’il se téléportait. Mais c’est comme si, à trop hésiter entre la simulation et l’arcade, le jeu ne savait jamais réellement où placer ses curseurs et proposait au final un jeu d’action avec le rythme d’un simulateur – alors qu’il aurait mieux valu faire exactement l’inverse.

Après de longues minutes de traque, les affrontements se limitent à des combats brouillons et totalement irréalistes, et si on est souvent très heureux de couler une dizaine de navires et d’abattre autant d’avions, l’idée de passer dix minutes à glander pour ravitailler risque de pousser bien des joueurs à écourter une mission sitôt le premier assaut fini. Les scènes de tir sur avion faisant davantage penser, pour leur part, à une sorte de brouillon primitif de titres à la Incoming, on se retrouve au final avec une expérience déséquilibrée qui se montre agréable à jouer par séquences mais qui échoue à l’être sur la durée faute de cohésion dans le rythme – le type même de logiciel qu’on prend plaisir à lancer dix minutes de temps à autres, mais dont on ne finit jamais la moindre mission en dépit d’un contenu objectivement rachitique. Les amateurs de simulation lui préfèreront les références évoquées plus tôt, et les amateurs d’action risquent d’en faire le tour en quelques minutes ; ce qu’on appelle un entre-deux maladroit, qui explique peut-être que le titre soit si peu cité de nos jours. Comme quoi, ce n’est pas si facile que cela, en fin de compte, de viser un large public…

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


Tout comme Blue Max : Aces of the Great War, développé par le même studio à la même période, Das Boot : German U-Boat Simulation entend entraîner l'austère simulation de sous-marin vers des eaux un peu plus accessibles au commun des mortels. Il n'y parvient certes qu'en partie, tanguant trop souvent entre des séquences de tir trop « arcade » et des séquences de navigation trop longues inutilement alourdies de changements de poste inutiles sans jamais s'approcher de la profondeur d'un Wolf Pack ou d'un Silent Service II, mais cela ne veut pas dire que l'expérience est désagréable – disons juste que l'aspect « simulaction » irréaliste se prête finalement assez mal à une chasse reposant sur la patience et sur l'observation silencieuse, et que c'est précisément l'aspect simplifié du jeu qui finit rapidement par composer sa principale limite. Il y a malgré tout largement matière à passer quelques heures à tenter de vaincre les cinq missions du programme, et même à être heureux d'y revenir de temps à autres, mais au final, il manque encore un petit quelque chose au titre pour réellement s'approcher de la cour des grands.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Énormément de raccourcis à mémoriser pour espérer accéder à des fonctions essentielles
– Des séquences d'action très limitées quel que soit le niveau de réalisme...
– ...et dans l'ensemble, un aspect « simulation » qui peine souvent à être crédible
– Seulement cinq missions
– Une gestion très fastidieuse du ravitaillement

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Das Boot sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« La simulation s’avère […] assez simple, peu d’options étant accessibles aux différents postes de votre U-Boot, ce qui risque de décevoir ceux qui sont passionnés par le réalisme ou la complexité des simulateurs. Ceux qui préfèrent l’action vont par contre se régaler ! »

Didier Latil, Génération 4 n°27, novembre 1990, 85%

« Les effets de couleur de ces vues sous-marines sont extraordinaires. On distingue à peine la silhouette du submersible ennemi qui s’approche de vous, prêt à larguer quelques salves. Toute la rédaction est restée muette d’admiration devant ce plan graphique… C’est dire ! […] Das Boot est un programme que vous devez posséder, ne serait-ce que pour ses graphismes et son animation, pour l’ambiance qu’il développe, une grande première sur PC. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc. (Amérique du Nord) – Mindscape (UK) Limited (Europe)
Date de sortie : Mai 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme Blue Max, Das Boot aura été porté sur Amiga quelques mois après la sortie de la version PC, et comme Blue Max, il aura hélas laissé quelques plumes au passage. Pas du côté du contenu, bien sûr – ce qui est une bonne chose, car celui-ci n’était déjà pas énorme à la base – mais encore une fois, les graphismes et surtout le framerate souffrent beaucoup du passage d’un hardware à l’autre.

La palette de couleurs a bien évidemment rétréci au lavage ; ce n’est pas hideux, mais disons simplement que les dégradés du ciel ne font pas vraiment illusion, et que les effets de profondeur qui avaient tant décroché la mâchoire des journalistes de Tilt ne sont plus vraiment au programme ici. Ce ne serait pas une grosse perte si le tout n’affichait pas une nouvelle fois un framerate dépassant péniblement les cinq images par seconde pendant l’essentiel de la partie sur une configuration d’époque : bon courage pour parvenir à toucher un avion dans cette version. C’est fort heureusement moins pénalisant au moment de viser un navire ou un sous-marin avec une torpille, ces séquences se jouant rarement au dixième de seconde près, mais on dira simplement que cela ne rend pas service à un jeu qui étalait déjà quelques problèmes de rythme sur PC. Sans être idéales, les choses sont une nouvelle fois meilleures sur un Amiga 1200, où on peut alors espérer approcher les quinze images par seconde dans le feu de l’action. Rien de dramatique, mais le jeu reste indéniablement plus agréable à découvrir sur PC.

NOTE FINALE : 12/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

Comme son alter ego Aces of the Great War, Das Boot souffre sur Amiga d’un moteur un peu trop puissant pour le hardware de l’époque, qui rend les parties « arcade » plus fastidieuses qu’amusantes. Si les choses s’améliorent sur un Amiga 1200, la réalisation graphique n’en reste pas moins inférieure, et dans l’ensemble on n’a tout simplement aucune raison de lancer ce portage dès l’instant où on a accès à la version PC.

New York Warriors

Développeur : Synergistic Software, Inc.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Titre original : NY Warriors (États-Unis)
Testé sur : AmigaAmstrad CPCZX SpectrumPC (DOS)

Version Amiga

Date de sortie : Mai 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
*Existe en version optimisée pour 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’un des (nombreux) charmes du retrogaming et de l’indissociable nostalgie qui l’accompagne, c’est cette évocation récurrente et en partie idéalisée d’une époque « plus simple ». Tout est toujours plus simple, dans les souvenirs : les problèmes de l’enfance sont amortis par un cadre établi où les adultes avaient toujours toutes les réponses et où toutes les crises existentielles avaient généralement le temps d’être résolues pour l’heure du goûter. Le monde était chargé d’espoir, l’avenir vu par Retour vers le futur II avait l’air cool avec ses voitures volantes, nos parents étaient jeunes et fringants, notre premier amour n’avait pas encore eu trois enfants avec ce commercial rencontré à son bureau, et puis surtout : les jeux se jouaient avec deux boutons au maximum – époque bénie.

Pour les développeurs aussi, les temps étaient plus simples, particulièrement en Europe : des termes comme « lore », « narrative design » ou « game design » ne voulaient rien dire, et à la façon des chansonniers du début du siècle qui écrivaient régulièrement de nouvelles chansons sur l’air d’une ancienne, créer un jeu revenait souvent par commencer par décider lequel on allait plagier – ne rigolez pas, c’est comme ça que naissaient, et naissent encore, les différents genres. Un de ceux qui étaient encore particulièrement en vogue à la fin des années 80 était celui du Commando-like : le titre de Capcom, en dépit de – ou grâce à – son apparente simplicité, n’avait pas tardé à engendrer une longue série de clones, d’Ikari Warriors à Guerrilla War en passant par Heavy Barrel, Secret Command ou MERCS, pour n’en citer qu’une infime poignée, et même si le concept avait fini par parvenir à s’éloigner de la référence obligée à Rambo lâché dans la jungle avec des Smash T.V. ou des Alien Syndrome, l’originalité n’était que rarement de mise tant on n’en avait cure, au fond. On voulait des soldats en train de tout péter dans des niveaux en vue de dessus consistant très largement en un défilement vertical imposé, ça marchait très bien, et c’était là l’intégralité du cahier des charges de titres comme New York Warriors – et personne ne s’en plaignait. Des temps plus simples, vous dis-je.

Par exemple, pour le scénario, autant aller puiser directement dans la production cinématographique des années 80, voire des années 70. Rambo et sa jungle commençaient à être un peu surexploités ? Pourquoi ne pas aller chercher du côté de l’une des grandes peurs réactionnaires de la période, en mettant en scène une ville de New York livrée à la criminalité, passée entre les mains de gangs meurtriers – au point que l’un d’entre eux a carrément mis la main on-ne-sait-comment sur une ogive nucléaire ?

Allez hop, une louche des Guerriers de la nuit, une pincée de New York 1997, et voilà un prétexte comme un autre pour aller sauver la civilisation du futur du passé (tous ces jeux situaient toujours leur action « futuriste » à la fin des années 90 ou au début des années 2000, soit il y a déjà 25 ans… « temps plus simples », tout ça…) en tirant sur tout ce qui bouge. Une ville, un soldat (ou deux, si vous avez un ami), des centaines de méchants à occire : pourquoi se fatiguer à concevoir quelque chose de plus complexe que ça ? Une idée originale ? Mais pourquoi faire ? Les gens voulaient du Commando, on leur vendait du Commando – on n’allait quand même pas prendre le risque d’y ajouter un truc dont ils ne voudraient pas, non ? On tient donc là toute la substantifique moelle du titre de Synergistic Software : c’est juste un autre Commando-like, et ça ne fait jamais semblant de chercher à être autre chose. Et quelque part, rien que pour cette rafraichissante honnêteté, on aurait presque envie de le remercier – et tant pis si une partie de la presse de l’époque l’avait brutalement congédié sans même lui laisser une chance précisément parce qu’il n’était qu’un titre de plus au sommet d’une très, très longue pile.

À défaut d’être original, la vérité est qu’on attend surtout de New York Warriors qu’il soit efficace – tant qu’on s’amuse, le reste est secondaire, et puis les surprises ça ne fonctionne jamais qu’une seule fois. Sur le papier, on est en terrain plus-que-connu : avancer vers le haut de l’écran, tirer sur tout ce qui bouge, collecter les quelques armes offrant des tirs plus puissants et plus couvrants pendant un certain temps – autant dire la base.

Seule minime variation : quitte à également proposer un défilement horizontal, le titre offre aussi une (petite) composante exploration en laissant le joueur s’enfoncer dans des ruelles ou des couloirs qui peuvent se terminer en impasse et l’obliger à faire demi-tour pour trouver un autre chemin. Juste de quoi récompenser un peu la connaissance du niveau sans pour autant le transformer en fastidieux labyrinthe : un compromis sensé, sur le plan ludique. On remarque d’ailleurs rapidement que le logiciel américain fait visiblement le choix de s’intéresser à des notions totalement désertées par la plupart de ses collègues européens. Au hasard, l’équilibrage : non seulement il est possible de choisir son niveau de difficulté parmi quatre – chose encore extrêmement rare au sein des jeux d’action sur ordinateur à l’époque – mais on observe même une forme de progression d’un niveau à l’autre : lors des premières zones, les ennemis ne tirent jamais en diagonale, leurs projectiles sont plus lents, etc. On s’approcherait presque d’une notion de – j’ose à peine le dire – game design. Et ça, mine de rien, ça fait une grosse différence au milieu de la ludothèque de l’Amiga.

De fait, New York Warriors est un très bon exemple de jeu qui n’invente rien et ne cherche même pas à faire semblant d’avoir inventé quelque chose mais qui se débrouille relativement bien dans ce qu’il a choisi de faire. Certes, on ne peut pas dire que les environnements urbains du jeu transpirent la personnalité, mais les ennemis représentés d’une façon « cartoon » ont une certaine personnalité, le défilement est fluide, l’action est nerveuse et ne connait pratiquement aucun ralentissement alors que ça pète dans tous les sens, et la difficulté a même le culot d’être surmontable lorsqu’on joue dans les modes inférieurs.

Non seulement on s’amuse, mais on s’amuse même davantage que sur beaucoup de bornes d’arcade incroyablement frustrantes de la période, et le fait que le jeu s’efforce de proposer une jouabilité cohérente la majeure partie du temps plutôt que de se contenter d’empiler les ennemis par dizaines (même si cela lui arrive aussi, on ne va pas se mentir) fait quand même une grosse différence. Un peu à la manière de Gain Ground, on réalise fréquemment que prendre le temps de choisir son angle d’attaque plutôt que de foncer tout droit permet d’obtenir de très bons résultats, et qu’on n’est pas face à une de ces centaines de logiciels qui pullulaient alors et qui se contentait de placer la difficulté à fond pour que jamais personne ne parvienne à atteindre ne fut-ce que le niveau deux sous prétexte que ça faisait « arcade ». New York Warriors est un jeu qui respecte ses joueurs. Et étant donné à quel point c’est rare sur Amiga, cela mériterait presque une statue. Vous voulez vous éclater, seul ou à deux, avec un joystick à un bouton, un peu d’adrénaline et vingt minutes à tuer ? Alors laissez-lui une chance. Qui sait, vous découvrirez peut-être que vous étiez passé à côté d’un bon jeu que vous ne connaissiez pas.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14/20

Il n'aura peut-être pas inscrit son nom dans la légende, mais New York Warriors n'en est pas moins un des meilleurs Commando-like de la ludothèque de l'Amiga. En choisissant de ne jamais perdre de vue des éléments trop souvent totalement délaissés par la production de l'époque – notamment le fun, le paramétrage de la difficulté et l'équilibrage –, le titre de Synergistic Software parvient à offrir exactement ce qu'on venait chercher : de l'action nerveuse, suffisamment de variété pour avoir envie de voir la suite, un défilement fluide et la possibilité de s'éclater à deux. Alors certes, on aurait pu rêver que les curseurs soient placés encore un peu plus haut : un peu plus d'idées, un peu plus d'ennemis, un peu plus de surprises, un peu plus de folie – mais pour ce qui est de se défouler vingt minutes, ça fait parfaitement le café. Et parfois, c'est tout ce qu'on demande. À découvrir.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une action souvent confuse, surtout dans les niveaux de difficulté supérieurs
– Pas l'ombre d'une idée neuve
– Un certain manque de variété dans les environnements

Bonus – Ce à quoi peut ressembler New York Warriors sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« New York Warriors n’apporte rien de vraiment neuf. Mais au sein de la ludothèque micro, il se place en bonne position. Un jeu riche, graphiquement très soigné et difficile à vaincre. À voir ! »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 15/20

Version Amstrad CPC

Développeur : The Big Red Software Company Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko*
*Existe en version optimisée pour 128ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1990, un utilisateur de CPC devait souvent se contenter de petites joies simples, comme par exemple ne pas se retrouver avec un portage sur son ordinateur qui ne soit qu’une conversion pixel perfect de la version ZX Spectrum. À ce niveau, l’équipe de Big Red Software Company a accompli l’essentiel : même s’il est évident que les deux adaptations ont été réalisées dans le même moule, au moins le jeu tire-t-il un minimum parti des capacités graphiques de la machine d’Amstrad. Alors certes, la fenêtre de jeu est minuscule, ce qui a un impact sur l’action : on a rarement plus de trois adversaires à l’écran, ce qui est normal vu qu’on ne pourrait pas en faire tenir plus.

Cela tend à rendre le jeu beaucoup plus simple au début, où les premiers écrans traversés sont pour ainsi dire vides, mais les choses se compliquent dès l’instant où ça canarde dans tous les coins, car alors difficile d’anticiper quoi que ce soit avec notre personnage énorme coincé au milieu d’un timbre-poste… éventuellement avec un ami, car il est toujours possible de jouer à deux. La musique, un brin répétitive, est réservée aux 6128, faute de quoi il faudra se contenter des bruitages. Comme on peut s’en douter, toutes ces contraintes font qu’on a perdu pas mal de choses depuis la version Amiga, mais l’expérience n’en est pas déplaisante pour autant, disons juste encore un peu moins lisible et reposant davantage sur la mémoire. On remarquera d’ailleurs qu’on ne commence plus la partie qu’avec trois vie, désormais, et qu’il n’y a plus de choix de la difficulté. On est plus proche, en termes de rythme, d’un Secret Command, mais cela reste un titre solide à l’échelle du CPC. Sans doute pas de quoi y consacrer plus de dix minutes de temps à autres, surtout à l’heure actuelle, mais pour se défouler le temps de la pause café, ça fait parfaitement le travail.

NOTE FINALE : 11/20

Bien évidemment, New York Warriors sur CPC aura dû composer avec de nombreux sacrifices, notamment au niveau de la taille de la fenêtre de jeu qui donne un peu l’impression de vivre dans un 6M² à Paris. Néanmoins, le cœur de l’expérience a été plutôt bien préservé, avec une action qui reste nerveuse et surtout la possibilité de jouer à deux. À l’échelle de la machine, un programme qu’on n’aura pas de raison de bouder.

Version ZX Spectrum

Développeur : The Big Red Software Company Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Fuller, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Avec la même équipe aux commandes, on se doute que New York Warriors sur ZX Spectrum va suivre une philosophie très similaire à celle de la version CPC. De fait, même si la résolution est ici un peu plus élevée, c’est surtout pour pouvoir faire tenir une interface qui vampirise pas loin d’un tiers de l’écran, et la fenêtre de jeu en elle-même est strictement monochrome. Pour ce qui est du son, les choses vont aller vite : il n’y en a pas, et aucune version ne semble avoir été développée pour les modèles à 128ko de RAM. Du côté des bonnes nouvelles, il est en revanche toujours possible de jouer à deux, le défilement est fluide et la jouabilité est bonne ; l’essentiel est donc parfaitement préservé. En fait, le jeu est même plutôt plus lisible dans cette version que sur la machine d’Amstrad ! Encore une fois, on se doute que le tout a pris un petit coup de vieux, particulièrement sur le plan de la réalisation, mais cela reste un run-and-gun parfaitement jouable à deux sur la machine de Sinclair, ce qui était exactement ce qu’on venait chercher. Du travail sérieux.

NOTE FINALE : 10,5/20

D’autres sacrifices en vue pour une version ZX Spectrum de New York Warriors qui renonce pour ainsi dire à la fois aux couleurs et au son, mais on n’en obtient pas moins le run-and-gun qu’on était venu chercher, jouable dans de bonnes conditions à deux. Pas de quoi en prendre plein les mirettes, mais pour ce qui est de s’amuser, le programme fait encore illusion.

Version PC (DOS)

Développeur : Arcadia Software, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : EGA, Tandy/PCjr
Cartes sons supportés : AdLib, Game Blaster (CMS), haut-parleur interne, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au début des années 1990, on le sait, si le PC représentait déjà un marché majeur aux États-Unis, les choses étaient un peu différentes en Europe où la machine d’IBM passait encore loin derrière les ordinateurs plus populaires – c’est à dire virtuellement tous les autres – au moment de réaliser des portages.

Cette version de New York Warriors vient nous rappeler que les choses n’avaient pas encore vraiment changé à ce niveau en 1991 (la date de sortie du logiciel, paru de façon assez confidentielle, reste à prendre avec des pincettes), avec un titre qui ne reconnait même pas le VGA, et qui ne semble pas davantage au courant de l’existence de la Sound Blaster (mais au moins, l’AdLib est reconnue, ce qui n’était pas encore gagné). Encore pensé pour les modèles XT, le jeu s’affiche dans une fenêtre rabotée en 248×200, et si la musique est toujours là, pas question de profiter des bruitages en même temps. Comme on peut s’en douter, ce n’est pas très beau, et jouer dans de bonnes conditions va demander d’expérimenter un peu sous DOSBox puisque le jeu n’est sans surprise pas ralenti… mais dans des circonstances « idéales », force est de reconnaître que l’action peut s’avérer aussi nerveuse et aussi fluide que sur Amiga, ce qui n’était pas gagné d’avance. Alors un peu comme pour les autres portages, difficile d’y engloutir des heures alors que la concurrence en la matière est particulièrement vive sur une machine qui, elle, est toujours en vie trente-cinq ans plus tard, mais disons simplement que si on parvient à faire abstraction de la réalisation, on trouve ce qu’il faut pour s’amuser.

NOTE FINALE : 12/20

Comme trop souvent, New York Warriors sur PC n’était pas exactement pensé pour les machines de sa génération au moment de sa sortie, ce qui cantonne le jeu à un ersatz en seize couleurs et en plus basse résolution de la version Amiga – sans même parler des pertes sur le plan sonore. Au moins le jeu est-il toujours jouable à deux et même parfaitement fluide dans les conditions idéales, mais on dira que lancer cette version n’a vraiment de sens qu’à partir du moment où on ne veut pas découvrir le jeu sur Amiga.

Blue Max : Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Titre alternatif : Aces of the Great War (Amiga, Atari ST)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari ST
Disponible sur : Windows
En vente sur : GOG.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Tout le monde aimerait savoir voler, mais tout le monde n’a pas nécessairement l’envie – sans même parler du temps ou des moyens – de consacrer des semaines, voire des mois ou des années, à apprendre à piloter un avion. De la même façon, ce n’est pas parce qu’on s’amuse sur un jeu de course qu’on a nécessairement envie de le complexifier au maximum en jouant avec une boîte manuelle et toutes les options de réalisme activées. Parfois, moins, c’est mieux.

Cela peut sembler évident aujourd’hui ou des notions comme l’accessibilité et le paramétrage de l’expérience sont au centre de l’expérience vidéoludique – on parle même de « casual gaming » – mais mine de rien, il aura pratiquement fallu attendre la fin des années 80 pour qu’un genre alors déjà « de niche », en l’occurrence celui de la simulation, commence à réaliser quelque chose qui avait jusqu’alors été à l’exact opposé de sa philosophie : « réaliste » ne signifie pas automatiquement « amusant ».

La société Accolade, notamment, aura commencé à se faire un nom via des Steel Thunder ou des Gunboat en commençant à étrenner un concept qu’on aura rapidement qualifié de « simulaction » : des titres où l’on veut bien piloter des jets, des hélicoptères, des tanks ou des bateaux, mais en se concentrant sur la partie fun (comprendre : celle où on tire sur tout ce qui bouge) sans avoir au préalable à consulter deux-cents pages de manuel pour avoir une chance de réussir péniblement un décollage au bout de quinze tentatives pour autant d’accidents mortels. L’idée n’aura pas tardé à faire du chemin : programmer un jeu moins complexe tout en visant un public plus large, cela ressemble fort à du gagnant-gagnant. Et les bonnes idées volant généralement par escadrilles, c’est sans doute totalement par hasard que MicroProse et Three-Sixty auront tous les deux publié le même mois deux programmes au pitch exactement similaire, à savoir une simulaction de combats aériens de la première guerre mondiale. Nous avons déjà eu l’occasion de voir ici Knights of the Sky, donc autant se pencher à présent sur Blue Max : Aces of the Great War.

Le jeu qui nous intéresse aujourd’hui va donc graviter autour de ce que l’on a tendance à retenir de l’aviation militaire en 1917, à savoir les dogfights endiablés menés par des biplans, des triplans et autres avions en bois, à une ère plus simple où il fallait compter sur de bons yeux plutôt que sur un radar et où le génie humain était déjà parvenu à concevoir une mitrailleuse synchronisée sur la vitesse de rotation des pales d’une hélice pour pouvoir tirer à travers sans casse.

Du côté du menu, Blue Max semble en tous cas ne commettre aucune faute : possibilité d’incarner les deux camps (même si parler d’«Alliés » et d’«Axe » pendant la première guerre mondiale comme le fait le jeu est pour le coup totalement anachronique), huit appareils pilotables au total (quatre pour la Triple-Alliance, quatre pour la Triple-Entente) avec leurs caractéristiques propres, plusieurs modes d’entraînement allant du simple vol libre au combat simulé pour se familiariser avec les commandes – lesquelles sont de toute façon très simples, et quasi-intégralement résumées sur un écran accessible en vol via la touche F9 – sans oublier les trois indispensables campagnes qui seront à accomplir sans faute, puisqu’en cas de décès votre pilote est automatiquement effacé (sauf si vous avez eu la bonne idée de faire une copie de sauvegarde du fichier au préalable, évidemment).

Plus surprenant : la présence d’un mode « stratégique » qui consiste… en un combat aérien au tour par tour, où les deux joueurs déplace leur avion d’hexagone en hexagone tout en paramétrant sa direction et son altitude. Un mode un peu gadget et manquant de profondeur, surtout parce qu’il reste limité à du un-contre-un (pourquoi ne pas diriger directement toute une escadre ?), mais on appréciera l’idée. Oh, et tant qu’à faire, n’oublions pas ce petit « plus » qui fait toujours plaisir : un mode deux joueurs en écran splitté, jouable aussi bien en compétitif qu’en coopératif. Oui, si le cœur vous en dit, vous pourrez tout à fait mener toute une campagne avec un ami à vos côtés, sans même avoir à dégainer un modem ou un câble série, et mine de rien cela restait assez exceptionnel en 1990.

Une fois en vol – littéralement, puisque chaque mission du jeu débute directement dans les airs, le décollage n’étant jamais géré – on se retrouve face à un modèle simple mais efficace : le clavier, le joystick ou la souris pour déplacer l’appareil et faire feu, une gestion (facultative) du vent et des nuages, des munitions limitées mais au nombre suffisamment généreux pour qu’il faille vraiment le faire exprès pour se retrouver à court, des informations essentielles (altitude, vitesse, dégâts encaissés) clairement affichées sans avoir à déchiffrer des jauges ou des cadrans, et vous voilà prêt à faire face aux forces adverses.

Seules les différentes vues et les actions de bombarder et de prendre une photo seront obligatoirement à aller chercher sur le clavier, et il ne sera pas question de compter ici sur des dégâts réalistes impactant le modèle de vol ni même sur des mitrailleuses qui s’enraillent : on est face à un titre très arcade, et qui fonctionne à ce niveau plutôt mieux que Knights of the Sky : Pas besoin ici de composer avec la vitesse des balles ni de devoir lutter pendant dix minutes pour parvenir à atteindre miraculeusement un avion de deux pixels qui virevolte comme un fou : les adversaires ont tendance à voler tout droit jusqu’à vous et les combats à être assez expéditifs dès l’instant où un ennemi est au milieu de votre viseur. Ce n’est peut-être pas très réaliste, mais bon sang, on a aussi le droit de trouver cela plus amusant sans se sentir coupable. En revanche, jouabilité simplifiée ou pas, une mission ne pourra se terminer qu’en étant prêt à poser son avion en rase-campagne – et du bon côté des lignes, lesquelles ne sont pas toujours faciles à identifier. La manœuvre demande un peu de maîtrise et de temps, ce qui est toujours moins amusant au bout de la quinzième fois (et personne n’aime planter sa campagne et perdre son pilote pour s’être posé un peu trop vite au terme d’une mission réussie), mais c’est bien là la seule concession au réalisme d’un titre qui offre ce qu’on était venu chercher : le plaisir de faire « tacatacatac » sur des vieux coucous en pirouettant follement dans les airs.

Histoire d’introduire un peu de variété, le programme est organisé autour de cinq types de missions : les patrouilles (abattre au moins un appareil ennemi), les missions de défense (empêcher un objectif allié d’être détruit), les bombardements (raser un bâtiment adverse à l’aide d’une bombe à lâcher minutieusement à la main), les reconnaissances (prendre un bâtiment en photo) et enfin les missions demandant de détruire un ballon adverse.

Le jeu ne comporte qu’une seule carte par mode de jeu (ce qui signifie que chaque campagne se déroule sur une seule et unique carte) ; celles-ci ne sont ni très variées ni très différenciables, mais le moteur de jeu a l’avantage de tourner comme un charme et de proposer une action fluide et des affrontements nerveux dès l’instant où l’ordinateur est équipé d’un processeur correct – ce qui, dans un XXIe siècle déjà bien entamé, ne devrait pas exactement être un problème à trouver. En résulte une expérience qui fournit exactement ce qu’on pouvait espérer… avec ses limites, malgré tout. Avec une jouabilité aussi basique, on se doute qu’il ne faut pas des semaines pour faire le tour de ce que le jeu a à offrir, et même si on peut se fixer l’objectif de boucler les trois campagnes avec les deux camps, il ne s’agit jamais que de reproduire les cinq mêmes types de missions sur les trois mêmes cartes. La possibilité de jouer à deux sur un même écran est fort heureusement très appréciable – aucun as de la grande guerre n’étant aussi jouissif à abattre que le petit frère ou le copain à grande gueule – et aide à donner une bonne raison de ressortir le titre de temps à autres histoire de décider qui va se coltiner la vaisselle ce soir. Rien de très marquant ni de révolutionnaire, mais quand on n’a pas envie de lutter pendant des semaines pour parvenir à dompter une simulation ultra-pointue, c’est vrai que ça fait toujours plaisir de pouvoir compter sur des titres à la Blue Max.

Vidéo – La première mission du jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


En choisissant de s'éloigner de la simulation pure pour assumer un tournant plus arcade, exactement comme un certain Knights of the Sky d'ailleurs paru au même moment, Blue Max : Aces of the Great War aura su préserver l'essentiel de ce qui fait l'intérêt des dogfights de la première guerre sans les réserver aux joueurs les plus patients et les plus adroits. Le résultat, s'il manque fatalement de profondeur et de variété, est néanmoins plutôt plus convaincant que ce qu'offre son concurrent direct, surtout grâce à la possibilité bienvenue de jouer à deux en écran splitté pour affronter un ami, pour mener une campagne en coopératif, voire même pour s'essayer à un surprenant mode stratégique qui risque cependant de ne pas dépasser le stade de la curiosité. Certes, on fait assez rapidement le tour du programme en dépit des trois campagnes et des deux camps jouables, mais on tient clairement le type de jeu auquel on peut revenir régulièrement pour une partie de cinq minutes sans avoir à déterrer le manuel pour se souvenir comment démarrer le moteur. Une approche qui n'a finalement pas si mal vieilli.


CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des atterrissages qui demanderont un peu de pratique pour éviter de saboter bêtement une mission gagnée...
– ...d'autant plus qu'en cas de crash, le personnage est automatiquement effacé !
– Très peu de moyens d'identifier la position de ses lignes...
– ...surtout quand les seules cartes du jeu sont à aller chercher dans le manuel, lequel n'est même pas fourni avec la version vendue en ligne !
– Un mode stratégique assez gadget

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Blue Max sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Si The Blue Max (sic) ressemble à un simulateur de vol, ce n’est qu’une apparence, car il s’agit en fait d’un shoot-them-up réaliste. Le pilotage est réduit à sa plus simple expression et vous ne contrôlez que la direction, l’altitude et la vitesse de votre appareil. Les différentes missions commencent en vol. Vous n’avez pas le moindre décollage à effectuer, ni aucun atterrissage (NdRA : dans les faits, toutes les missions demandent d’atterrir). Cela fera sans doute grimacer les fans de simulateurs de vol, mais l’action est suffisamment prenante pour compenser cela. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeurs : Three Sixty Pacific, Inc. – Mindscape International Ltd.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Blue Max aura dû attendre quelques mois pour débarquer sur Amiga – perdant au passage une partie de son titre sur la boîte pour mieux la récupérer à l’écran-titre, les grands mystères du marketing. Il hérite pour l’occasion d’une petite animation au lancement absente de la version PC, mais pour le reste, le contenu reste strictement identique (à un détail près : il est ici impossible de définir le niveau de réalisme du pilotage). Graphiquement, on ne peut pas dire que la déperdition soit spectaculaire comparé aux 256 couleurs du VGA – les dégradés sont clairement moins fins et les détails moins nombreux, mais rien de vraiment dramatique. En revanche, vous risquez d’avoir tout loisir d’admirer la différence, car autant vous prévenir : sur un modèle « de base » de type Amiga 500/600/1000, le jeu se traîne au point d’en être à peine jouable. Même avec les détails au minimum, le framerate ne dépasse jamais les huit images par seconde, et en mettant tout à fond, là il ne dépasse carrément plus les quatre ! Heureusement, les choses vont tout de suite mieux sur un Amiga 1200, où on retrouve une action à peu près fluide sans pour autant pouvoir rivaliser avec ce qu’offraient les PC les plus puissants, naturellement. Mais étant donné que l’Amiga 1200 n’existait pas encore à la sortie du jeu, on comprend qu’une partie de la presse n’ait pas été franchement emballé par cette séance diapo qui ne pouvait même pas s’enorgueillir de son réalisme. Si vous n’avez pas un Amiga 1200 ou supérieur, fuyez !

NOTE FINALE : 08,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

L’expérience délivrée par Aces of the Great War sur Amiga dépendra grandement du modèle sur lequel le jeu est lancé : en-dessous d’un Amiga 1200, le framerate risque d’être si bas que le jeu en sera pratiquement injouable. Dans de meilleures conditions, le titre peut se hisser assez près de la version DOS, mais sans le matériel approprié, ce ne sera clairement pas un jeu vers lequel vous diriger. Vous êtes prévenu.

Version Atari ST
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1024ko
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Après avoir vu le résultat d’Aces of the Great War sur Amiga, on avait de quoi se montrer inquiet pour l’Atari ST. Malheureusement, et comme on pouvait le craindre, le miracle n’aura pas eu lieu : en dépit du fait que le moteur de jeu n’emploie plus que seize couleurs, le framerate ne côtoie l’acceptable qu’en mettant tous les détails au minimum, et même sous cette forme on est encore très, très loin de l’expérience offerte par la version PC. Pour ne rien arranger, le jeu est donc devenu sensiblement plus moche (équivalent graphiquement parlant à la version EGA), le rendu sonore est inférieur, et l’expérience est empoisonnée de temps de chargement interminables. Bref, même si le programme pouvait encore faire illusion à une époque où on avait l’habitude de jouer à sept images par seconde, le constat est implacable : pour découvrir le jeu, ne commencez clairement pas par là.

NOTE FINALE : 08/20

On peut prendre le problème sous n’importe quel angle, mais la fluidité, ça compte, surtout quand elle impacte aussi dramatiquement la jouabilité. Condamné à se traîner lamentablement dans des décors qui ont perdu beaucoup de leur charme en seize couleurs, Aces of the Great War sur Atari ST se réservera aux joueurs les plus nostalgiques, les plus patients ou les plus masochistes.

Sliders

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royaume-Uni) – Titus (Amérique du Nord)
Testé sur : AmigaAmstrad CPCAtari STPC (DOS)

Version Amiga

Date de sortie : Décembre 1990 (France) – Septembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Une période où l’univers vidéoludique ne se divisait pas uniquement entre d’un côté les AAA en monde ouvert réalisés par des équipes de 800 personnes et de l’autre les rogue-lite, les deckbuilders et les Metroidvania en pixel art de la production indépendante.

Une ère qui avait encore cette magie de l’incertitude et de l’expérimental, et où il suffisait généralement d’un codeur et d’un graphiste, avec parfois un copain qui venait dépanner pour la musique, pour programmer un jeu en six mois, sur un coup de tête, sur une vision, ou encore mieux : sur une idée. Un siècle où Microïds, plutôt que de nous embarrasser avec des adaptations de Goldorak ou de Tintin qui nous fassent détourner les yeux avec pudeur, tentait des choses sans trop réfléchir, sans rester suspendu à des études de marché pour tenter de découvrir quelle licence grand public aller déterrer pour espérer enfin vendre quelque chose. Bref, des temps plus simples, plus purs, où en tout cas aimerait-on le croire au nom de cette nostalgie qui nous habite et qui veut nous convaincre que l’herbe était toujours un peu plus verte avant. Des temps où on voyait apparaître régulièrement des Sliders dans les magazines et dans les bacs, avec de belles boîtes en carton ou en plastique, plutôt que d’aller les dénicher au fin-fond des listes de jeux à moins de 4,99€ dans les offres promotionnelles de Steam. *Soupir*.

Mes excuses pour ce bref instant de mélancolie nostalgique que l’on pourrait qualifier de « moment vieux con » ; il y a des logiciels, de temps à autres, qui agissent comme de véritables voyages temporels. Si vous avez appartenu à l’ancienne génération, à celle qui traînait dans les salles d’arcades enfumées des années 80 au lieu d’être au collège ou au lycée, je peux déjà deviner la première chose que vous avez pensée en voyant les images de Sliders : « Ça ressemble à Marble Madness ».

Sans doute est-ce dû à cette vue isométrique présentant des reliefs couverts d’un quadrillage les mettant très bien en valeur, ou simplement à la présence de deux billes à l’écran, mais à la vérité cette similitude esthétique est une fausse piste : Sliders, quels que soient les airs qu’il se donne, est plus proche d’un jeu de football. Ou de hockey. En fait, le principe est limpide : chaque joueur commence sur une petite zone colorée représentant son « but » et a pour objectif d’aller chercher la balle et de la propulser quelque part au-dessus du but adverse. C’est tout. C’est un peu Kick Off en un contre un sans les ligne de touche, les fautes, les hors-jeu et toutes ces bêtises. Ou, pour prendre un exemple encore plus pertinent, cela ressemble énormément à Ballblazer en changeant la vue. En résumé, c’est exactement le type de programme dont on a compris tous les tenants et les aboutissants en une demi-seconde, mais qui va nécessiter davantage de temps avant d’être dompté.

Par essence, Sliders est un match ou une succession de matchs ; inutile de chercher un championnat, ou un tournoi, ou un mode « carrière » ou que sais-je encore : La sélection se limite au mode de contrôle (au clavier, à la souris ou au joystick), au mode de jeu (contre l’ordinateur ou contre un humain) et à la sélection d’une, de plusieurs ou de la totalité des douze arènes disponibles pour y affronter votre adversaire.

On notera néanmoins la présence d’un bouton « Data Disk » qui nous annonce que le jeu comptait accueillir des extensions – lesquelles n’auront au final jamais vu le jour – et surtout celui d’un menu de configuration extrêmement complet laissant au(x) joueur(s) la possibilité de paramétrer à peu près tous les aspects de la partie : durée, inertie, puissance des tirs… et d’autres notions plus obscures liées à la façon dont vos billes, en l’absence de mains ou de pieds, se saisissent de la balle : par aimantation. Une fois la balle « capturée », votre bille ne peut plus bouger, et sa seule action disponible est de viser et de projeter le ballon… laissant ainsi le temps à la bille adverse de venir le lui disputer en lui rentrant dedans ou, à défaut, en venant se placer sur la trajectoire du projectile afin de l’intercepter. Le reste du temps, la balle peut donc être attirée à distance par l’aimant… ce qui complique énormément les choses dès l’instant où les deux billes sont en train de chercher à le faire simultanément, les mécanismes d’attraction/répulsion rendant très difficile le fait de parvenir à immobiliser la balle et à s’en emparer.

En fait, le cœur du jeu est là : une espèce de match de hockey sur glace (à cause de l’inertie) en un contre un, où les duels deviennent rapidement confus tant il est difficile de deviner où va finir une balle tiraillée entre deux aimants. Les arènes fournissent juste de quoi pimenter les choses : des reliefs, pour commencer, mais aussi des tremplins, des plaques de glaces, des zones fléchées vous poussant dans une direction… Dommage que les environnement soient graphiquement toujours identiques, mais on appréciera le fait que la vue soit affichée dans une résolution assez élevée, en 320×270, qui offre une lisibilité parfaite et quelques moments de chaos ludique à deux.

Seul contre l’ordinateur, en revanche, le tableau est déjà moins rose : la prise en main demandera un vrai temps d’adaptation qui n’est certes pas très pénalisant entre deux joueurs de même niveau, qui seront très heureux d’apprendre ensemble, mais qui risque en revanche de se révéler particulièrement frustrant face à une intelligence artificielle qui, pour sa part, vous fera des misères dès le mode facile en vous humiliant sans effort pendant que vous cherchez encore à réussir à comprendre où est la balle. Autant vous prévenir : si vous n’avez pas les nerfs solides, il est possible que la première heure de jeu vous amène à prononcer à un volume beaucoup trop élevé des termes que vous préfèreriez normalement éviter d’employer devant vos enfants, votre famille, ou même devant vos voisins. Sliders est un jeu qui ne vous prend pas par la main, et c’est sa première grave erreur : servir de punchingball à une machine qui a tout compris dès le début pendant que vous êtes en train de chercher à tenir debout n’est pas l’expérience de jeu la plus ludique qu’on puisse concevoir – sauf à être masochiste.

Le vrai problème, cependant, celui-là même qui aura valu au titre un accueil critique assez tiède à peu près partout sauf dans les magazines français (sans doute pas du tout influencés par le fait que Microïds leur achetait des pages de publicité), c’est surtout qu’il n’y a simplement pas assez de profondeur dans le jeu pour justifier de passer une heure ou plus à lutter pour parvenir à avoir enfin une chance de livrer un match vaguement équilibré contre l’ordinateur.

Le contenu comme la jouabilité n’offrent aucun renouvellement, les arènes sont trop semblables et les modes de jeu pas assez nombreux, et même si le gameplay fait illusion un temps avec un ami, ce qui passait encore assez bien à l’époque de Kick Off commençait à apparaître comme un peu court face à des concurrents qui se nommaient désormais Kick Off 2 ou Speedball 2, et qui étaient simplement plus fun, plus accessibles et avec beaucoup plus de contenu. Une constatation qui ne s’est pas améliorée depuis : qui a encore envie de passer une heure à dompter un jeu pour s’amuser avec dix minutes ? Loin du petit jeu efficace face auquel on aurait pu se trouver, on compose donc avec une curiosité maladroite qui demande un investissement trop important pour ce qu’elle a à offrir au final. Parfait pour s’amuser dix minutes avec votre petit cousin le temps de lui faire découvrir l’Amiga, quoi.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 11/20 (seul) - 13/20 (à deux)

Sous ses faux airs de Marble Madness jouable à deux, Sliders dissimule en fait une expérience de jeu qui fait plutôt penser à une sorte de Kick Off sur glace avec des aimants. L'idée a le mérite d'être originale, on ne peut pas lui enlever ça, malheureusement entre une prise en main qui suivra une courbe d'apprentissage encore plus exigeante que celle du jeu de football de Dino Dini, un contenu solo qui se limite à affronter l'ordinateur et une difficulté globalement bien trop frustrante alliée à des situations trop vite confuses en cas de duels rapprochés, il faut bien reconnaître que c'est surtout entre deux joueurs de niveau équivalent que le programme dévoile un peu d'intérêt sur la durée, surtout avec les options de configuration pour pimenter les choses. Cela reste beaucoup d'investissement pour un maigre résultat, on pourra donc comprendre que le commun des mortels puisse décider de passer à autre chose au bout de cinq minutes – au hasard, pour retourner jouer à Speedball 2. Bien essayé, mais pas assez bien pensé.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un contenu solo qui se limite à jouer contre l'ordinateur
– Une prise en main qui risque de nécessiter beaucoup de temps...
– ...face à un ordinateur qui, pour sa part, se balade quel que soit le mode de difficulté
– Des situations rapidement confuses ou verrouillées lorsque les deux concurrents sont trop proches

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Sliders sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Sliders est un programme très soigné, qui présente une réalisation irréprochable. Le jeu est en plein écran lorsque vous êtes seul. À deux, chaque joueur dispose d’un écran centré sur sa boule. Dans ce cas, chaque écran dispose d’un scrolling multidirectionnel des plus fluides, ce qui est assez impressionnant. C’est vraiment du beau travail, d’autant que la jouabilité est tout aussi réussie. […] Sliders est aussi simple que passionnant, et c’est un plaisir d’y jouer avec un ami, entre deux parties de Kick Off. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 16/20

« Compétent, mais répétitif, peu inspiré et, pour beaucoup, susceptible de se révéler rigoureusement incontrôlable. Seulement amusant à deux, ou chacun a de fortes chances d’être aussi mauvais que l’autre. »

Amiga Power n°5, septembre 1991, 56/100 (Traduit de l’anglais par mes soins)

Version Amstrad CPC

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds
Date de sortie : Janvier 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au début des années 90, l’Amstrad CPC restait un ordinateur extrêmement populaire en France – même si on se doute que la plupart des joueurs en ayant les moyens avaient entamé depuis longtemps leur migration vers des systèmes plus puissants, Amiga ou Atari ST en tête. Sliders n’aura donc pas fait l’impasse sur le vaillant ordinateur 8 bits – contrairement à toutes les autres machines de la même génération – et aura bénéficié d’un portage très sérieux s’efforçant de coller au maximum à l’expérience originale. Le contenu, par exemple, est pour ainsi dire le même : des terrains de jeu aux options, rien n’a changé en-dehors de l’impossibilité de jouer à la souris ; sincèrement, on s’en remettra.

La résolution est bien évidemment infiniment plus basse que sur Amiga, mais cela n’a heureusement pas trop d’incidence sur la lisibilité ni sur la capacité du joueur à anticiper, et pour cause : le jeu tourne beaucoup plus lentement, ce qui laisse infiniment plus de temps pour préparer ses mouvements et compenser l’inertie. Ironiquement, c’est précisément cette limitation technique qui rend le jeu beaucoup plus facile à aborder que sur Amiga : même s’il faut se méfier des très, très longues secondes que peut prendre le fait de parvenir à accomplir un demi-tour après être parti un peu trop vite un peu trop loin, on a nettement moins l’impression de subir les événements que dans la version originale, et on trouve ses marques infiniment plus vite. Du coup, le mode solo se montre moins frustrant ici que dans la version originale, et le mode deux joueurs un peu plus équilibré. Évidemment, dès qu’on commence à modifier les options pour tenter d’accélérer le jeu, les choses peuvent se compliquer, mais plus besoin cette fois de passer dix minutes à tâtonner face aux réglages pour espérer configurer une expérience de jeu à peu près gérable pour le joueur lambda, et c’est quand même une très bonne chose. Du coup, on recommandera beaucoup plus volontiers le titre aux nostalgiques du CPC qu’à ceux de la machine de Commodore.

NOTE FINALE : 12/20 (seul) – 12,5/20 (à deux)

Parfois, moins, c’est mieux, et en offrant par contrainte une expérience plus lente, Sliders se révèle plus simple à prendre en main et à apprécier sur CPC. Cela signifie également que l’inertie pourra se révéler plus traitresse que jamais en mode deux joueurs et que l’action, moins chaotique, pourra également être un peu moins amusante contre un ami, mais à tout prendre le jeu est indéniablement plus agréable à découvrir sur la machine d’Amstrad, particulièrement en solo. Comme quoi…

Version Atari ST

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royauem-Uni)
Date de sortie : Août 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Optimisé pour la gamme STe
Protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Petite incongruité : l’Atari ST, ordinateur 16 bits chouchou des développeurs français (et de leur public : la France est l’un des pays où l’ordinateur d’Atari aura connu le plus grand succès), aura pour une fois dû se contenter d’un simple portage d’un jeu programmé pour Amiga. Si cela ne change bien évidemment rien au contenu (on remarque néanmoins que le jeu à la souris a disparu, tout comme sur CPC, dont cette version reprend d’ailleurs l’écran-titre), on se doute également qu’il ne sera pas question ici de disposer d’une fenêtre de jeu en 320×270 comme sur Amiga.

La fenêtre de jeu est donc naturellement plus petite et la visibilité un peu plus restreinte, ce qui est d’autant plus dommage que le jeu va toujours aussi vite. Remarque, il serait malvenu de reprocher à Microïds d’avoir accompli pour l’occasion ce que pratiquement aucun autre développeur n’aura fait (hélas), à savoir tirer spécifiquement profit du blitter des modèles STe pour offrir un des défilements les plus fluides qu’on ait jamais vu sur la machine d’Atari ! Malheureusement, cette louable prouesse technique signifie également que le titre est toujours aussi ridiculement frustrant en solo où on passe plus de temps à courir derrière la balle (et l’ordinateur) qu’à réellement participer au match. Encore une fois, c’est surtout à deux que le jeu dévoilera sa pleine mesure – et qu’il finira par se montrer rapidement répétitif, faute de variété dans les environnements et les règles. Bel effort, cependant.

NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 13/20 (à deux)

On sera heureux de profiter avec Sliders d’un des (trop) rares titres à tirer pleinement profit des capacités du STe pour offrir un des jeux les plus techniquement aboutis dont on ait pu bénéficier sur la machine. Malheureusement, cette fluidité et cette rapidité éblouissantes ne sont pas forcément à verser au crédit de l’expérience de jeu, tout aussi frustrante que sur Amiga – et même davantage, réduction de la résolution oblige. Encore une fois, c’est surtout à deux que le titre dévoilera son intérêt – mais pour combien de temps ?

Version PC (DOS)

Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds (France) – Palace Software, Ltd. (Royauem-Uni)
Date de sortie : Mars 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Disquette 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Sound Blaster
Protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les joueurs PC auront donc dû attendre près d’un an et demi avant de pouvoir s’essayer à Sliders. La raison, on s’en doute, trouve probablement une partie de son explication dans le hardware en lui-même : si les PC étaient déjà intouchables en termes de puissance processeur en 1992, aucun d’entre eux n’a jamais possédé de blitter, et parvenir à afficher un défilement fluide sur ce type de machine aura souvent représenté une colle pour une bonne partie des années 90. Sur le plan technique, le titre de Microïds représente donc une nouvelle fois un petit exploit : c’est parfaitement fluide… au prix de quelques sacrifices.

Le plus dommageable étant la disparition totale de la moindre forme d’interface une fois un match lancé : non seulement on n’a plus le droit à la barre pour signifier l’écoulement du temps, ni même à la flèche pour donner la direction de la balle, mais on n’a même plus le droit à l’affichage du score non plus ! En écran splitté, on peut également être amené à composer avec un tremblement de l’écran sur la partie inférieure (celle du deuxième joueur) très désagréable, ce qui aura carrément poussé les développeurs à ajouter un mode radar où le deuxième joueur évolue sous la forme d’un point se déplaçant sur une vue aérienne de la carte ! Regrettable, dans un jeu où l’intérêt provenait précisément du multijoueur… On remarquera également que le jeu ne se joue désormais plus qu’au clavier (?!) et que, si la résolution est toujours bloquée en 320×200 (un peu agaçant sur une machine qui pouvait afficher le double, mais encore une fois, on se doute que la fluidité du défilement avait ce prix), la vue a cette fois été franchement éloignée, ce qui permet enfin d’anticiper… à condition d’avoir de bons yeux. Malheureusement, le mode solo est toujours aussi pénible, et les nombreux sacrifices pour fluidifier le jeu à deux font que l’expérience n’est pas bien meilleure à deux. Comme quoi, la technique ne résout pas tout, surtout quand elle n’est pas totalement maîtrisée…

NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 11,5/20 (à deux)

À force de rogner les angles pour préserver la fluidité de son défilement, Sliders sur PC finit par sacrifier trop de choses au bénéfice d’une vitesse qui ne lui rend de toute façon pas service et par offrir une expérience aussi désagréable en solo qu’en multijoueur. Certes, on appréciera que les développeurs aient ENFIN eu l’idée de reculer la vue, mais ralentir le jeu et diminuer l’inertie aurait été une bien meilleure idée.

James Pond 3

Développeurs : Millenium Interactive Ltd. – Vectordean Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Titres alternatifs : James Pond 3 : Splash Gordon (titre de travail), James Pond 3 : Operation Starfish (écran-titre), James Pond 3 : Operation Starfi5h (Amiga, Amiga CD32, Game gear, Super Nintendo)
Testé sur : Mega DriveAmigaAmiga CD32Game GearSuper Nintendo

La série James Pond (jusqu’à 2000) :

  1. James Pond : Underwater Agent (1990)
  2. James Pond 2 – Codename : RoboCod (1991)
  3. New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (1992)
  4. James Pond 3 (1993)

Version Mega Drive

Date de sortie : 14 décembre 1993 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le succès, sur le papier, c’est bien. Je veux dire : ça doit forcément être bien, puisque c’est ce que tout le monde recherche. Seulement, comme beaucoup de choses, les avantages sont fournis avec leur facture, et dans la longue liste de problèmes que peut engendrer le succès, la pression occupe certainement une place dans le trio de tête.

De la pression, en l’occurrence, Chris Sorell en aura eu un sacré paquet sur les épaules après la sortie de James Pond 2. Il faut dire que le soudain succès critique et commercial de son poisson, jusqu’ici à peine connu au-delà d’une frange d’amigaïstes, aura soudainement fait grimper en flèche les attentes suscitées par le désormais inévitable troisième opus, et qu’il n’est pas toujours facile de prendre du recul pour analyser les raisons d’un tabac que personne n’avait vu venir. Alors Chris et son équipe se seront remis au boulot. Longtemps. En fait, le temps de développement de James Pond 3 aura été deux fois plus long que la durée cumulée de développement des deux premiers épisodes – au point d’aller chercher rien de moins que le grand Steve Bak pour programmer en vitesse un Aquatic Games histoire de faire patienter les joueurs en attendant ce fameux titre qui allait devoir faire mieux, plus grand, plus beau, plus fort. On peut imaginer Chris bien embêté à l’idée de dénicher une idée originale – James Pond 2, après tout, n’en avait jamais proposé qu’une seule avec son mécanisme d’étirement – alors, en dernier recours et plutôt que de chercher à réinventer la poudre, il sera tout simplement aller taper dans les valeurs sures, et pas exactement les moins célèbres : un seau de Super Mario World, un seau de Sonic the Hedgehog, mélangez dans un chaudron avec une spatule et vous obtiendrez James Pond 3 – le premier (et dernier) épisode de la série à être développé sur Mega Drive plutôt que sur Amiga. Avec des références pareilles, qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?

Le scénario, qui prend la peine d’exister, tourne autour d’une fois autour du Dr. Maybe (blague hilarante en rapport avec le Dr. No, got it ?) qui, après avoir été défait au terme du deuxième épisode, met en place un nouveau plan diabolique pour conquérir le monde : cette fois, il va aller construire des mines de fromage sur la lune (selon la conception folklorique qui voudrait que la lune soit faite de fromage) et saturer le marché terrien de fromage de qualité supérieur à bas prix histoire d’en prendre le contrôle et ainsi de financer ses projets de domination totale.

Un prétexte grotesque comme un autre pour introduire un épisode prenant un tournant science-fiction – le titre de travail, Splash Gordon, annonçant clairement la couleur, il est d’ailleurs dommage qu’il n’ait pas été conservé. Comme d’habitude, c’est Pond, James Pond qui va être charger d’aller arrêter le Dr. Maybe, et tant qu’à faire il pourra aussi en profiter pour détruire ses mines et pour libérer les agents capturés – et si jamais ça ne l’intéresse pas, il pourra dire « Tintin » à la bonne fin du jeu. Son arme ? Eh bien, aucune, à vrai dire : il va juste chausser des baskets sur ses nageoires, courir vite comme un certain hérisson, et frapper des blocs avec sa tête comme un certain plombier, tout en explorant une carte gigantesque riche en niveaux secrets et en raccourcis, là encore inutile de préciser la référence. Bref, comme un vulgaire colon, James débarque sur la lune pour prendre possession d’un territoire qui ne lui appartient pas.

Le truc, c’est que s’il suffisait de mélanger Sonic et Super Mario pour obtenir un jeu de plateforme d’exception, on se doute que tout le monde se serait empressé de le faire depuis longtemps en signant à chaque fois des succès planétaires – la réalité est forcément un peu plus complexe, et demanderait à minima d’analyser en profondeur les mécanismes des titres précités et de comprendre ce qui les rend à la fois ludiques et efficaces. Seulement, un sentiment se dessine rapidement tandis que l’on dirige notre poisson dans des niveaux dont le level design évoque furieusement la philosophie générale du deuxième épisode : et si Chris Sorell, en bon représentant de la production européenne de l’époque, ne s’était pas posé davantage de questions que les créateurs du premier Zool venu et s’était contenté de penser qu’il suffirait que son poisson aille vite pour qu’on s’éclate à retourner collecter des trucs et des machins dans une centaine de niveaux tentaculaires ?

Car le petit problème, ce serait précisément de ne pas avoir réalisé que Sonic n’était pas juste un jeu où le héros va vite ; c’était un programme dont tout le game design était pensé spécifiquement pour embrasser cette vitesse et faire en sorte qu’elle soit au service de l’expérience du joueur plutôt que de simplement lui offrir un jeu de plateforme lambda où les temps de réaction seraient divisés par dix. Dans les aventures du hérisson bleu, tout était pensé pour que le joueur ne soit pas puni de chercher à accélérer : le système des anneaux à récolter, qui autorisait un grand nombre d’erreurs, le principe de se rouler en boule qui offrait là encore la possibilité de foncer dans une relative sécurité, et surtout un level design tout entier pensé pour pouvoir, avec un minimum d’expérience, passer sans heurt d’un chemin à un autre et explorer différentes voies sans jamais avoir le besoin impérieux de revenir en arrière ou de tourner en rond pour comprendre où on a besoin d’aller. Même la talentueuse Sonic Team avait commis quelques erreurs en ce sens, dans un première épisode qui s’accrochait encore parfois maladroitement à la philosophie du jeu de plateforme « à l’ancienne » qu’il venait justement de dynamiter, et Sonic the Hedgehog 2 aura su embrasser définitivement une approche plus mature et plus assumée de la vitesse, créant une formule que pratiquement personne ne sera parvenu à reproduire. Bref, qui dit « mécanisme » dit « réflexion quant à la pertinence de ce mécanisme ». Autant dire une réflexion qui parait absente d’un bout à l’autre d’un jeu qui cherche surtout à empiler du contenu sans trop se soucier de savoir combien de temps ce contenu va se montrer intéressant.

Des maladresses, James Pond 3 en commet beaucoup, et c’est d’autant plus dommage que c’est objectivement un jeu bien programmé et bien réalisé qui dévoile régulièrement des arguments laissant à penser qu’il n’est pas si loin d’être un jeu extrêmement sympathique à défaut d’être original – si seulement quelqu’un avait pris le temps de réfléchir un peu au game design.

Avoir des dizaines de bonus à collecter dans un niveau, c’est une chose – un bon moyen de justifier une composante « exploration », par exemple – mais quand les deux tiers de ces bonus ne servent à strictement rien d’autre qu’à gonfler le score et que le dernier tiers se révèle souvent si indispensable que le joueur doit passer de longues minutes à courir et à sauter en tous sens à la recherche d’une tasse de thé ou d’une paire de ressorts sous peine de ne pas pouvoir accéder à la fin du niveau, ça marche déjà moins bien. Quand, dès les premiers écrans des premiers niveaux, courir pendant plus de dix secondes vous expédie systématiquement sur un monstre ou au fond d’un gouffre tapissé de pointe, on comprend rapidement que les quelques six personnes responsables du level design ne se sont pas exactement posé les bonnes questions et ont transformé ce qui aurait dû être un mécanisme ludique fondamental en un obstacle permanent pour le joueur. James Pond 3 est un jeu qui vous invite à aller vite, mais qui vous punit constamment lorsque vous cherchez à le faire. Une incohérence navrante qui se retrouve hélas à pratiquement tous les niveaux du jeu.

Si on a ainsi beaucoup abordé l’échec de la composante « Sonic the Hedgehog », on ne peut pas dire que la partie « Super Mario World » fonctionne beaucoup mieux. Collecter des centaines de lunes qui ne servent à rien d’autre qu’à gagner des points est déjà idiot (au moins les pièces de Super Mario permettaient-elles de gagner des vies), mais trouver le moyen de proposer une carte du monde si opaque – avec sa dose d’embranchements et de niveaux secrets – qu’on n’ait jamais une vague idée de la direction à suivre pour se diriger vers le boss final est tout aussi révélateur.

Et il faut dire que quand les niveaux en eux-mêmes ne se renouvèlent jamais, que les décors se limitent constamment aux mêmes blocs de fromage devant l’éternel même ciel noir étoilé et qu’il faut bien entendu galérer pendant des dizaines de minutes pour espérer dénicher un des rares mots de passe du jeu, non seulement on commence très vite à trouver le temps long mais en plus on a l’impression que le réservoir de talent de l’équipe s’est vidé tout entier dans la réalisation du deuxième épisode – qui, lui, proposait des niveaux en véhicule, des phases en défilement imposé, des décors variés débordant de couleurs et un game design basique, certes, mais cohérent d’un bout à l’autre et sachant mettre à profit son unique mécanisme original – soit précisément tout ce qui manque à ce James Pond 3 dont le véritable sous-titre aurait dû être : « cette fois, on est complètement à court d’idées ».

Reste donc un jeu boiteux, maladroit, souvent inutilement frustrant (ah, ces sauts de la foi ! Ah, ces pièges dont on ne peut jamais anticiper la position si on n’avance pas à deux à l’heure ! Ah, ces interminables phases d’allers-et-retours à chercher à comprendre où est cachée cette maudite tasse qui va enfin nous ouvrir l’accès au milliardième niveau du jeu ! Ah, ces boss aux mécanismes fumeux qui font qu’on met parfois un quart d’heure à comprendre comment on est censé leur faire du dégât !) et beaucoup, beaucoup trop long pour son propre bien qui a juste oublié un minuscule ingrédient dans sa recette pompée de toute part : le plaisir.

C’est vraiment l’avatar du jeu pensé par des codeurs : des plateformes, des monstres, des idées piquées ailleurs, et hop, ça va forcément être amusant – un manque de clairvoyance consternant qui rend ce qui aurait pu être un programme tout à fait correct en expérience pénible faute d’avoir mené la moindre réflexion. Un ratage qui, malgré un accueil critique plutôt positif, aura sonné définitivement la mort de la licence : l’équipe de Vectordean, absorbé par celle de Millenium, aura disparu des radars (la carrière de designer de Chris Sorell se sera terminé en 2006 avec un jeu adapté de la série 24H), quant à James Pond, ses maigres espoirs de retour auront été annihilés quand un kickstarter lancé en 2013 aura péniblement réuni 16% de la somme demandé avant son annulation. Il aura depuis terminé, comme une star sur le retour, dans un pitoyable quatrième épisode sur smartphone nommé James Pond and the Deathly Shallows que tout le monde s’est hâté d’oublier, par respect. Un assez bon résumé de la trajectoire du jeu de plateforme « à l’européenne » et des raisons pour lesquelles on a nettement moins envie, aujourd’hui, de lancer un James Pond 3 qu’un Sonic the Hedgehog ou qu’un Super Mario World : parce que ça n’en vaut tout simplement pas la peine.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 12,5/20

Après un James Pond 2 – Codename : Robocod qui était parvenu à placer tous les curseurs au bon endroit, James Pond 3 aura hélas dissipé un cruel malentendu en démontrant que ce deuxième opus avait bel et bien été un accident. En congédiant l'unique idée vaguement originale de l'épisode précédent, l'équipe de Vectordean a cru pouvoir donner le change en pillant sans vergogne Sonic the Hedgehog et Super Mario World ; malheureusement, elle aura surtout démontré au passage à quel point le game design lui était un concept largement étranger en accumulant les maladresses jusqu'à transformer ce qui aurait pu être un jeu sans réelle identité mais efficace en une bouillie de mécanismes mal amalgamés servie sur un lit de level design aléatoire. Fatigué par une difficulté frustrante pour de mauvaises raisons, le joueur pas très patient aura probablement reposé la manette au bout de dix minutes – et celui qui persévèrera finira par trouver le temps long à force d'empiler les niveaux sans idées au milieu d'un monde chaotique où rien n'est clair, pas même la direction à suivre. Un condensé de tout ce qu'on était en droit de reprocher à la production européenne de l'époque, et une attente qui n'en valait clairement pas la peine.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un game design bancal...
– ...entraînant une difficulté où la mémoire sera votre seul recours
– Des environnement qui ne se renouvèlent pas assez
– Un système de mot de passe particulièrement pénible à retranscrire

Bonus – Ce à quoi peut ressemble James Pond 3 sur un écran cathodique :

Version Amiga
James Pond 3 : Operation Starfi5h

Développeurs : Millenium Interactive Ltd. – Vectordean Ltd.
Éditeur : Millenium Interactive Ltd.
Date de sortie : Avril 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1200 – OS : Kickstart 3.0 – RAM : 2Mo
Mode Graphique supporté : AGA
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Signe des temps : James Pond 3 aura donc été le premier – et le dernier – épisode de la saga à ne pas avoir été développé sur Amiga. les possesseurs de la machine de Commodore auront ainsi dû attendre plusieurs mois avant de voir débarquer le poisson/agent secret, et pas question cette fois de l’héberger sur un Amiga 500 : ce sera mode AGA ou rien. On aurait d’ailleurs pu penser que cette exigence en termes de hardware permettrait au jeu d’offrir une réalisation supérieure, ou au moins équivalente, avec celle d’un Mega Drive qui ne pouvait pas compter sur 2Mo de RAM ou sur 256 couleurs affichables, mais non seulement le titre n’est au final pas plus coloré sur Amiga, mais il perd même carrément en détails au niveau des décors (plus de collines avec défilement parallaxes en fond : ce sera grande nuit étoilée en permanence), voit sa fenêtre de jeu réduite, et il faudra même composer avec quelques ralentissements. Niveau jouabilité, on sera surtout heureux de pouvoir connecter un pad, car on se doute qu’il n’est pas exactement pratique de jouer avec un seul bouton à un jeu en demandant trois. Pour le reste, le contenu n’a bien évidemment connu aucune modification (à part le retour du sponsor des biscuits Penguin) et le titre avait certainement de quoi être mieux accueilli sur un Amiga en fin de vie que sur une Mega Drive où la concurrence était nettement plus redoutable. On le réservera néanmoins aux vrais mordus de la plateforme, pour les mêmes raisons que sur la console de SEGA.

NOTE FINALE : 12/20

Pour sa dernière apparition sur Amiga – et sa dernière apparition tout court – James Pond perd quelques détails et assiste à une légère dégradation de ses performances ; rien de catastrophique, loin de là, mais une raison supplémentaire pour préférer découvrir le jeu sur console.

Version Amiga CD32
James Pond 3 : Operation Starfi5h

Développeurs : Millenium Interactive Ltd. – Vectordean Ltd.
Éditeur : Millenium Interactive Ltd.
Date de sortie : Août 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’Amiga CD32 n’étant pas grand chose de plus qu’un Amiga 1200 simplifié avec un lecteur CD-ROM – et n’ayant, en conséquence, pas rencontré plus de succès que sa version de bureau – on se doute que la plupart des développeurs ne se seront pas senti obligés de tirer parti des capacités du support. Énième démonstration avec James Pond 3 qui se révèle, comme on pouvait s’y attendre, une simple copie carbone de la version disquette copiée sur un CD-ROM. N’espérez pas de la musique numérique, ce n’était pas prévu. Histoire de remplir un minimum la galette (le jeu pèse 11Mo !), on assistera quand même à l’ajout d’une courte vidéo animée présentant le personnage… et reprise directement de l’épisode précédent ! Bref, ce n’est clairement pas ce jeu-là qui vous donnera une raison valable d’acquérir une Amiga CD32.

NOTE FINALE : 12/20

Grop coup de flemme de James Pond 3 sur Amiga CD32 qui se contente de reprendre à la ligne de code près la version parue sur Amiga 1200 – ce qui signifie que les possesseurs de la coûteuse machine pouvaient acquérir, au prix fort et après huit mois d’attente, une version inférieure à celle parue sur une console de la génération précédente. À se demander pourquoi elle ne s’est pas vendue comme des petits pains…

Version Game Gear
James Pond 3 : Operation Starfi5h

Développeur : Teque London Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Juin 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

James Pond 3 n’aura visiblement pas bénéficié du même enthousiasme que son prédécesseur, et il aura fallu attendre plus d’un an et demi pour qu’il arrive sur une Game Gear alors en sérieuse perte de vitesse, elle aussi. Confié pour l’occasion à Teque, le portage s’efforce de respecter le contenu et l’esprit de la version originale, mais en ayant malgré tout la bonne idée de miser un peu moins systématiquement sur la vitesse – ce qui, vu la taille de l’écran de la console portable, est plutôt un soulagement. Le contenu a bien évidemment été raboté : il n’y a plus qu’une soixantaine de niveaux, ils sont nettement plus courts, mais très honnêtement le fait de ne plus passer son temps à errer dans des stages tentaculaires est loin d’être une perte. Ce qu’on peut regretter, en revanche, en-dehors d’une difficulté plus frustrante encore que sur Mega Drive, c’est surtout une jouabilité à deux boutons loin d’être irréprochable : par défaut, James se traîne comme c’est pas permis, et il faut appuyer sur la croix directionnelle PRÉCISÉMENT à l’horizontale pour qu’il daigne enfin se remuer un peu – seul moyen d’espérer gravir une des innombrables pentes. Comme on peut s’en douter, le manque de variété et d’originalité du jeu est toujours présent ici, et la taille de la fenêtre de jeu complique encore les choses, mais on dira qu’on a vu bien pire en la matière sur Game Gear. À réserver aux mordus, quoi qu’il en soit.

NOTE FINALE : 11,5/20

Adapté vaille que vaille aux capacités de la Game Gear, James Pond 3 y devient un jeu encore un peu plus banal, un peu plus générique et un peu plus pauvre en idées. Certes, la vitesse y est suffisamment réduite pour ne plus agir comme une punition permanente, mais entre le peu de visibilité offert par la fenêtre de jeu et la jouabilité souvent contre-nature, difficile de s’enthousiasmer outre-mesure pour une cartouche qui n’a rien d’inoubliable.

Version Super Nintendo
James Pond 3 : Operation Starfi5h

Développeurs : Millenium Interactive Ltd. – Vectordean Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Mai 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On peut légitimement se demander ce qui bien pu justifier que James Pond 3 mette près d’un an et demi pour arriver sur Super Nintendo – à une époque où le projecteur commençait à être nettement tourné vers les consoles 32 bits. Qu’il s’agisse d’un choix ou d’une contrainte, le fait est que l’équipe de développement en aura profité pour revoir légèrement sa copie – pas du côté de la jouabilité, qui n’a pas changé, ni de celle de la réalisation, qui doit juste souffrir d’une résolution rabotée en 256×224, comme toujours sur Super Nintendo, mais bien de celui du contenu. Dès le premier niveau, on assiste ainsi à des modifications sensibles du level design, qui semble tendre vers une certaine simplification. J’aimerais dire que ces modifications rendent le jeu sensiblement plus passionnant, mais ce serait un peu exagéré : on retrouve exactement les mêmes limites, et au final le rééquilibrage opéré ne change pas grand chose à la difficulté de la cartouche. Bref, une nouvelle fois, on ne sait pas trop à qui se destinait le titre au moment de sa sortie, mais ce n’est clairement pas le premier sur lequel vous devriez vous précipiter dès l’instant où vous possédez une Super Nintendo.

NOTE FINALE : 12,5/20

En dépit de quelques réadaptations, cette version Super Nintendo de James Pond 3 ne parvient pas exactement à supplanter une version Mega Drive pourtant largement perfectible. Si on appréciera l’effort, il manque toujours l’essentiel : de la variété, des idées et du rythme. Ou, en un mot : une âme.

New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats

Développeur : Vectordean Ltd.
Éditeur : Millenium Interactive Ltd.
Titres alternatifs : Aquatic Games (titre usuel), The Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (écran-titre), The Aquatic Games Estrelando James Pond and the Aquabats (Brésil), The Super Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (SNES – Amérique du Nord), James Pond’s Crazy Sport (Super Nintendo – Europe)
Testé sur : AmigaMega DriveSuper Nintendo

La série James Pond (jusqu’à 2000) :

  1. James Pond : Underwater Agent (1990)
  2. James Pond 2 – Codename : RoboCod (1991)
  3. New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (1992)
  4. James Pond 3 (1993)

Version Amiga

Date de sortie : Septembre 1992
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Un des principes fondamentaux du commerce repose sur deux mécanismes simples : créer un besoin, et le combler. Non non, revenez tout de suite, on ne va pas démarrer un cours sur le capitalisme – ce serait sans doute très intéressant, mais tout le monde en aurait Marx avant qu’on en ait abordé le Karl. On pourrait plutôt rebondir sur un exemple plus concret : après le succès triomphal – et pour ainsi dire quelque peu inattendu – de James Pond 2, l’équipe de Vectordean aura senti que son héros aquatique avait le courant dans le dos et aura naturellement commencé à travailler sur un James Pond 3 pour surfer sur le succès du précédent volet.

Malheureusement, de contretemps en complications, le jeu tant attendu cumula les retards – tant et si bien que le studio britannique en vint à craindre que les joueurs, lassés de poireauter, ne passent définitivement à autre chose dans un secteur alors très, très actif. Alors histoire d’entretenir la flamme (ce qui est toujours difficile, sous l’eau), ils optèrent pour un choix radical : développer en vitesse un jeu mettant en scène James Pond histoire que le pastiche de 007 continue d’occuper l’espace et de se rappeler au bon souvenir des joueurs. Évidemment, vu les difficultés rencontrées par James Pond 3, pas question de se lancer dans un nouveau jeu de plateforme qui n’aurait fait que représenter un problème supplémentaire. Et qu’est-ce qui se développe vite et qui avait encore un certain attrait (quoique déjà déclinant) en 1992 ? Un jeu de sport multi-épreuve à la California Games, pardi ! Et voilà comment Steve Bak et son équipe se seront retrouvés aux commandes de New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats, un jeu conçu pour boucher les trous en attendant mieux. Tout un programme.

Pour proposer des « jeux aquatiques », il faut commencer par imaginer des épreuves – en l’occurrence, tout le programme reposant là-dessus, mieux vaut éviter de se rater. Aquatic Games, comme on l’appellera à partir de maintenant, en propose huit, plus deux discipline additionnelles qui peuvent s’activer en obtenant suffisamment de point bonus dans les épreuves « standard ».

On y trouve quelques grands classiques vaguement remis au goût du jour, comme le « cent mètres splash » qui consistera à agiter le joystick de droite à gauche, du triple saut reprenant fondamentalement les mêmes mécanismes en sautant au moment demandé et en choisissant l’angle au moment du bond final, un 110 mètres haies avec des anguilles électriques en guise d’obstacle ou une épreuve de monocycle demandant, cette fois, d’effectuer des rotations avec le stick. Un peu plus original : une épreuve demandant de remplir une mangeoire et de nourrir des poissons avant que des pêcheurs ne leur mettent l’hameçon dessus, une autre demandant d’empêcher des phoques d’être réveillés par des jets de ballon, sans oublier les deux disciplines « techniques » : un saut sur éponge demandant de réaliser six fois six figures différentes en un minimum de temps, et une dernière demandant de jouer à Super Mario sur des crabes pour les collecter avant de les utiliser comme munitions pour détruire des ballons, là encore le plus rapidement possible. S’y ajouteront donc deux activités bonus pour les joueurs les plus doués : du jonglage et du saut en longueur.

Tout cela est bien beau, mais une longue série de titres du même genre, de Summer Games à World of Sports, nous aura appris à quel point il est souvent difficile de trouver un juste milieu entre disciplines trop courtes et disciplines trop longues, et surtout entre disciplines trop simples et disciplines trop complexes – sans parler du problème récurrent de la durée de vie avec des activités dépassant rarement la demi-minute.

À ce niveau, Aquatic Games a l’intelligence de se rendre le plus accessible possible en ne cherchant jamais à compliquer la jouabilité pour le simple plaisir de le faire : si les disciplines les plus complexes pourront nécessiter un passage par le manuel pour comprendre exactement ce qu’on attend du joueur, on comprend généralement comment jouer en une fraction de seconde, et les épreuves ne sont jamais pensées pour qu’on se fasse bêtement éliminer au bout de quatre secondes pour ne pas avoir compris immédiatement dans quelle direction on était censé pousser le stick au signal. Mieux encore : la plupart des épreuves recèle leur surcouche de petites subtilités à dénicher ; on peut par exemple se faire transporter par un pélican pendant une bonne partie du cent mètres, ou bien trouver le moyen d’accéder à un deuxième étage avec des bonus cachés pendant l’épreuve de tir. Pas de quoi étirer le plaisir pendant des heures tant chaque discipline est, par définition, conçue pour être pratiquée sur une durée extrêmement courte, mais la bonne nouvelle est qu’on s’amuse en jouant, ce qui n’était pas toujours gagné avec ce type de jeu.

Au rang des bonnes nouvelles, on appréciera naturellement le soin apporté à la réalisation avec de personnages bien campés et bien animés, une animation d’une fluidité à toute épreuve, quelques effets (comme les reflets dans l’eau) tirant finement parti des capacités de l’Amiga et une jouabilité difficile à prendre en défaut. Au rang des moins bonnes, on regrettera des thèmes musicaux se contentant d’aller piller la musique classique et se limitant pour ainsi dire à l’Hymne à la joie et à La truite de Schubert. Surtout, on assistera à des pics de difficulté pas justifiés d’autant plus pénalisants que le mode de jeu principal ne vous laisse pas enchaîner toutes les épreuves si vous échouer à atteindre les minimas de qualification – il faudra reprendre depuis le début, ce qui est inutilement punitif dans un jeu basé sur le score.

Le multijoueur, pour sa part, se limitant à jouer une fois de plus à tour de rôle, on n’assiste pas exactement à une révolution ni à l’acte de naissance du party game, mais il faut bien reconnaître que dans le secteur embouteillé et en fin de vie des jeux multi-épreuves, Aquatic Games peut au moins se vanter de représenter le haut du panier grâce à son accessibilité, à un équilibre relativement bien trouvé entre épreuves courtes et épreuves longues et à une réalisation qui fait le travail. Cela ne l’empêche hélas pas de se révéler fatalement répétitif au bout d’une heure ou deux, particulièrement en solo où la carotte de deux épreuves bonus assez gadgets n’est pas suffisante pour donner envie d’aller décrocher des records – néanmoins, pour réunir des amis sur un jeu « à l’ancienne » sans les voir s’arracher les cheveux de ne pas comprendre comment on est censé réussir à tenir debout sur une planche de surf, c’est clairement une des meilleures portes d’entrée du genre à l’échelle de la génération 16 bits. Bouche-trou, peut-être, et clairement pas pour très longtemps mais hé, pour une fois que ce n’est pas trop mal fait, on ne va pas hurler au cynisme mercantile, non ?

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 13/20

Envoyé faire patienter les joueurs en attendant un James Pond 3 qui avait pris beaucoup de retard, New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats se lance sur les traces de séquences de mini-jeux à la California Games, et il ne s'en sort pas trop mal. Comme d'habitude, l'amalgame entre les épreuves trop difficiles et celles qui ne le sont pas assez n'est pas parfait, d'autant que le mode principal ne tolère aucune erreur, mais la jouabilité relativement accessible et l'univers graphique coloré aident à rendre le jeu plus sympathique que la plupart des titres dont il s'inspire – ayant même la bonne idée d'ouvrir l'accès à des activités bonus en guise de récompense. Le mode multijoueur aurait vraiment gagné à ce que les épreuves puissent être disputées en simultané, et le solo risque de s'éventer assez vite, mais il y a malgré tout matière à passer un bon moment sur le programme – quitte à ce que celui-ci ne dure pas des heures. Allez, on prend.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des épreuves assez déséquilibrées...
– ...et qui auraient gagné à être plus nombreuses
– Un multijoueur limité à des parties à tour de rôle

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Aquatic Games sur un écran cathodique :

Version Mega Drive
The Aquatic Games Starring James Pond and The Aquabats

Développeurs : Vectordean Ltd. – Millenium Interactive Ltd.
Éditeur : Electronic Arts, Inc. (Amérique du Nord, Europe) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Date de sortie : Septembre 1992 (Amérique du Nord) – Octobre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Aquatic Games aura très rapidement fait un saut sur les deux consoles 16 bits – en fait, il est même assez crédible que la version Mega Drive ait été développée en parallèle plutôt que de faire l’objet d’un portage, à en juger par la proximité des dates de sortie. En termes de réalisation, la Mega Drive est d’ailleurs très proche de la machine de Commodore : si certains effets spécifiques au hardware de l’Amiga ont disparu (les dégradés du ciel, les reflets dans l’eau), les décors restent suffisamment détaillés et colorés pour que la déperdition soit très symbolique. On remarquera également que la jouabilité a été subtilement réadaptée : plutôt que de secouer le joystick de gauche à droite dans les épreuves de course, à présent (ce qui n’aurait pas vraiment de sens avec la croix directionnelle d’un pad), il faut marteler le bouton B. Dans l’ensemble, l’expérience de jeu n’a que peu changé, et les joueurs qui préfèreront découvrir le titre via cette version plutôt que sur Amiga n’auront aucune raison de se sentir floués.

NOTE FINALE : 13/20

Peu de différences notables pour The Aquatic Games sur Mega Drive comparé à la version Amiga : la réalisation est largement à la hauteur en dépit de la disparition de certains effets graphiques, et la jouabilité a été adaptée au pad. Du bon travail.

Version Super Nintendo
James Pond’s Crazy Sports

Développeurs : Vectordean Ltd. – Millenium Interactive Ltd.
Éditeur : The Sales Curve Ltd. (Europe) – Seika Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Juillet 1993 (Europe) – Octobre 1993 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Elle se sera certes davantage faite attendre, mais la version Super Nintendo de The Aquatic Games aura elle aussi fini par se matérialiser – en changeant au passage de nom, un exercice auquel le titre se sera beaucoup livré au fil de son développement. Elle hérite au passage de quelques adaptations, notamment à cause de la résolution réduite de 256×224, mais bénéficie en contrepartie d’une épreuve supplémentaire de relais d’ailleurs assez mal fichue. On ne retrouve pas davantage les effets graphiques de la version Amiga que sur Mega Drive, mais les graphismes sont dans l’ensemble encore un peu plus colorés ici – c’est, une fois de plus, très anecdotique. Un menu des options a fait son apparition, avec un choix du mode de difficulté (qui fait un peu doublon puisque les épreuves d’entraînements existent déjà en trois variantes), mais il s’ait plus d’une refonte du menu principal que d’une réelle modification. Bref, ça ne valait sans doute pas la peine d’attendre près d’un an pour gagner une épreuve qui n’apporte rien, mais ça ne pénalise pas le jeu outre mesure pour celui qui le découvrirait aujourd’hui.

NOTE FINALE : 13/20

En dépit de l’ajout d’une très dispensable épreuve de relais, James Pond’s Crazy Sports reste très semblable, dans son itération Super Nintendo, à ce qu’il était sur Amiga – à savoir un jeu multi-épreuves assez facile à prendre en main mais qui s’essouffle trop vite. Une curiosité qui peut avoir un certain charme entre amis mais qui ne devrait pas vous retenir très longtemps.

Battle Chess II : Chinese Chess

Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : Electronic Arts, Inc.
Testé sur : PC (DOS)Amiga
Disponible sur : Antstream, Linux, Mac OS, Windows
En vente sur : GOG.com (Linux, Mac OS, Windows), Steam.com (Linux, Mac OS, Windows)

La série Battle Chess (jusqu’à 2000) :

  1. Battle Chess (1988)
  2. Battle Chess II : Chinese Chess (1990)
  3. Battle Chess 4000 (1993)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, en local ou via modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Covox Sound Master, Game Blaster, haut-parleur interne, Innovation Sound Standard, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et MCGA

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le problème avec beaucoup de bonnes idées, c’est qu’elles fonctionnent rarement plus d’une fois.

À l’ère où l’informatique était encore entourée d’une certaine magie de par sa capacité à donner vie à des choses qui avaient jusqu’ici été réservées à l’imagination, Battle Chess avait mis étonnamment dans le mille grâce à une idée si simple qu’un joueur n’ayant pas grandi dans les années 80 pourrait s’interroger sur son simple intérêt : faire bouger les pièces. Voir les très abstraits pions, tours et cavaliers du très austère échiquier se livrer bataille via des saynètes animées correspondait visiblement à une véritable attente, à en juger par le succès du titre et le nombre impressionnant de portages auxquels il aura donné lieu.

Mais ceci étant placé, une fois le concept matérialisé, quelle marge de progression lui restait-il ? Deux axes se présentaient aux développeurs d’Interplay pour une éventuelle suite : reprendre exactement le même principe en changeant juste les graphismes, ou bien – approche plus risquée – en changeant carrément le jeu. Petite surprise : la première approche, la plus prévisible et la plus attendue, aura dû attendre 1993 pour voir le jour avec Battle Chess 4000 ; car auparavant, la firme américaine n’aura pas hésité à déployer une certaine dose de culot en osant lancer en premier Battle Chess II : Chinese Chess. Un nom qui est déjà tout un programme, car là où les joueurs s’attendaient fort naturellement à repiquer pour d’autres parties d’échecs – c’est après tout le nom du jeu – le sous-titre annonce immédiatement le contrepied en proposant des échecs… chinois. Stupeur et tremblements : là où on attendait bêtement un nouvel habillage – qu’on obtenait au passage – il allait également falloir (ré)apprendre à jouer.

Pour ceux qui ne connaîtraient pas les règles du xiangqi (à ne pas confondre avec le shōgi, communément considéré comme « les échecs japonais », dont il se rapproche), le manuel du jeu sera fort heureusement l’occasion de découvrir les subtilités d’une activité qui pourra au premier abord paraître fort déroutante – en particulier aux yeux des connaisseurs des échecs occidentaux.

On ne se lancera pas ici dans un déroulé des très nombreuses différences existant entre les deux jeux, d’autant que les règles sont dorénavant facilement trouvables en ligne, mais on mentionnera quand même le fait que dans le xiangqi, les unités se déplacent sur des lignes et non dans des cases, que le roi ou général y est cantonné à un espace constitué d’un carré et de ses deux diagonales (le « palais »), que les pions n’ont accès à toute leur mobilité qu’à partir de l’instant où ils ont franchi la « rivière » – une ligne horizontale séparant les deux moitiés du plateau – ou encore que les cavaliers, s’ils bougent de la même façon que dans le jeu occidental, n’ont pas ici la capacité d’« enjamber » les autres unités. Surtout, les débuts de partie tendent à être nettement plus offensifs et nettement moins cantonnés au déploiement des troupes, notamment grâce à une unité redoutable lors des premières minutes : le canon. Celui-ci présente en effet une particularité notable : celle de pouvoir toucher une unité situé sur la même ligne ou la même colonne, comme une tour, mais à la condition qu’une autre unité se trouve entre sa cible et lui-même. Cette petite spécificité introduit un vaste aspect tactique qui oblige à penser très soigneusement ses premiers mouvements, et représentera sans doute un de vos premiers axes de réflexion au moment de réfléchir à vos ouvertures.

Mais au fait, nous sommes toujours dans un Battle Chess : que sont devenues les fameuses animations qui avaient fait la renommée du premier épisode ? Naturellement, elles sont toujours de la partie, et elles mettront ici en scène une imagerie chinoise peuplée de dragons et d’éléphants (un autre nom possible d’une des unités du jeu, autrement traduit par « Ministre ») avec des petites animations qui s’efforcent d’être divertissantes mais y parviennent rarement avec trente-cinq ans de recul.

On appréciera néanmoins l’ambiance globale qui se dégage du plateau et de l’activité qui y règne, avec des unités globalement bien reconnaissables (sauf pour les cavaliers qui, de dos, ressemblent un peu trop aux soldats), et surtout le fait que cette représentation aide à égayer des premières parties qui auraient autrement été un peu intimidantes en déplaçant des unités rendues trop abstraites par de simples symboles. Avec le temps, on se hâtera de basculer vers le plateau en 2D, plus lisible, pour s’adonner à des parties rendu plus rapides par la suppression de toutes ces animations qui perdent rapidement de leur charme. Toutes les options du premier épisode sont toujours là, à commencer par les neuf niveaux de difficulté, même si l’équilibrage est un peu plus consistant ici (l’ordinateur est moins redoutable dès les premiers niveaux) et surtout, le fait que le jeu soit pensé dès le départ pour un 286 ou supérieur fait qu’il est ici très aisé de déployer toute la puissance du processeur et de profiter ainsi de temps de réflexion infiniment plus courts (pour ne pas dire inexistants, la plupart du temps) que ce qui avait été observé sur Amiga deux ans plus tôt.

Ironiquement, l’une des raisons les plus probables pour lesquelles ce deuxième opus n’aura pas rencontré le succès du premier – à savoir le fait de proposer un jeu nettement moins connu en occident que les échecs « traditionnels » – est précisément celle qui rend le titre attractif aujourd’hui, à une ère où le xiangqi ne court toujours pas les rues au sein de la production vidéoludique occidentale (même si on peut facilement trouver quelques programmes vendus à bas prix sur les plateformes de vente en ligne).

Pour le coup, profiter d’un plateau animé chargé de donner un peu de vie aux unités le temps de briser la glace est plutôt une bonne chose, et aide à faire passer la pilule des inévitables premières raclées qu’on est voué à subir le temps d’assimiler les nombreuses subtilités du jeu, à commencer par le fait que de nombreuses unités n’ont pas du tout la même valeur selon qu’on soit en début ou en fin de partie. Pas de « reine » surpuissante pour faire basculer le cours d’une rencontre serrée ici, et beaucoup d’unités qu’il peut être profitable de sacrifier à la première occasion – notamment au sein de votre « palais » – afin de gagner en liberté de mouvement. C’est vraiment toute une philosophie à découvrir, avec des parties qui débutent régulièrement sur les chapeaux de roue et des escarmouches sur tous les fronts là où les échecs occidentaux nous avaient plutôt habitués à une longue mise en place et à une bataille focalisée sur les cases centrales. Une très bonne façon d’étendre ses horizons et de découvrir un jeu encore trop méconnu hors d’Asie, et un bon moyen de se trouver un nouveau dada qui soit à la fois vaguement familier et réellement dépaysant. À tout prendre, c’est certainement ce qu’on pouvait espérer trouver de plus original au sein des très nombreux jeux d’échecs du siècle dernier, et on remerciera Interplay d’avoir accepté de prendre ce risque. Parfois, on trouve du neuf même dans le vieux, et ça n’est pas plus mal.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20

Observer des pièces de jeu d'échecs gigoter et se crêper le chignon sur un plateau virtuel était certes une idée qui avait su faire mouche en 1988, mais qui restait fondamentalement un fusil à un coup – dès lors, on était en droit de se demander quel pouvait être l'intérêt réel d'un Battle Chess II... jusqu'à ce qu'on réalise que celui-ci aura fait le pari plutôt culotté d'être un des rares titres occidentaux de la période – si ce n'est le seul – à permettre de jouer aux échecs chinois. C'est d'ailleurs là son principal point fort, bien au-delà d'animations peu imaginatives qui perdront l'essentiel de leur valeur divertissante dès l'instant où on les aura vues une fois. Passé une heure ou deux de curiosité polie, c'est en effet bel et bien sur le plateau en 2D qu'on passera l'essentiel de son temps, à chercher à maîtriser les subtilités de règles dépaysantes pour les habitués des échecs « traditionnels ». Évidemment, ce qui était encore profondément original en 1990 l'est nettement moins à l'ère où les alternatives sont bien plus nombreuses mais on trouvera ici une manière comme une autre de s'initier de façon visuelle à un jeu qui mérite d'être mieux connu.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des animations qui perdent l'essentiel de leur intérêt au bout de dix minutes
– Pas de didacticiel ni d'explications des règles en-dehors du manuel

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Chess II sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Un bon logiciel, mais réservé aux amateurs du genre. »

Dany Boolauck, Tilt n°84, décembre 1990, 16/20

Version Amiga

Développeur : Silicon & Synapse, Inc.
Éditeur : Interplay Productions, Inc. (Amérique du Nord) – Electronic Arts, Inc. (Europe)
Date de sortie : Août 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, en local ou via modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko*
Mode graphique supporté : OCS/ECS
*1Mo requis pour bénéficier de la musique en jeu

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Signe des temps : Alors que Battle Chess avait été développé, sur Amiga puis porté sur une pléthore de systèmes, Battle Chess II, pour sa part, aura été développé sur PC… et uniquement porté sur Amiga, ce qui tend à indiquer que ce deuxième opus n’aura clairement pas rencontré le même succès que le premier. Développée par la jeune équipe de Silicon & Synapse (futur Blizzard Entertainment), cette version du jeu doit composer avec les quelques faiblesses que présentait désormais la machine de Commodore face à celle d’IBM – ce qu’elle fait plutôt bien. Graphiquement, on perd bien quelques couleurs comparé au mode VGA, mais on ne peut pas franchement dire que la différence saute aux yeux. La vraie bonne surprise, c’est surtout que les temps de réflexion de l’ordinateur demeurent globalement extrêmement courts, y compris dans les modes de difficulté les plus élevés – ne pas avoir à aller prendre un café entre chaque coup dès les premiers échanges est quand même un progrès notable comparé au premier épisode où ladite attente ne servait d’ailleurs pas à grand chose, le niveau de l’intelligence artificielle restant globalement le même quoi qu’il arrive.

NOTE FINALE : 15,5/20

Un tout petit peu moins beau que sur la machine d’IBM, Battle Chess II : Chinese Chess sur Amiga n’en reste pas moins une version qui n’a pas grand chose à envier à celle parue sur PC, et un moyen comme un autre de découvrir les échecs chinois dans la joie et la bonne humeur.