Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd. Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc. Titre alternatif :Aces of the Great War (Amiga, Atari ST) Testé sur :PC (DOS) – Amiga – Atari ST Disponible sur : Windows En vente sur :GOG.com (Windows)
Version PC (DOS)
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr *640ko requis pour les modes VGA et Tandy
Tout le monde aimerait savoir voler, mais tout le monde n’a pas nécessairement l’envie – sans même parler du temps ou des moyens – de consacrer des semaines, voire des mois ou des années, à apprendre à piloter un avion. De la même façon, ce n’est pas parce qu’on s’amuse sur un jeu de course qu’on a nécessairement envie de le complexifier au maximum en jouant avec une boîte manuelle et toutes les options de réalisme activées. Parfois, moins, c’est mieux.
On ne peut pas dire que le pilotage soit extrêmement différent d’un appareil à un autre, mais la vitesse, notamment, est à prendre en compte
Cela peut sembler évident aujourd’hui ou des notions comme l’accessibilité et le paramétrage de l’expérience sont au centre de l’expérience vidéoludique – on parle même de « casual gaming » – mais mine de rien, il aura pratiquement fallu attendre la fin des années 80 pour qu’un genre alors déjà « de niche », en l’occurrence celui de la simulation, commence à réaliser quelque chose qui avait jusqu’alors été à l’exact opposé de sa philosophie : « réaliste » ne signifie pas automatiquement « amusant ».
Toutes les informations pertinentes sont accessibles via la touche F9. Et non, il n’y a pas de carte à consulter
La société Accolade, notamment, aura commencé à se faire un nom via des Steel Thunder ou des Gunboat en commençant à étrenner un concept qu’on aura rapidement qualifié de « simulaction » : des titres où l’on veut bien piloter des jets, des hélicoptères, des tanks ou des bateaux, mais en se concentrant sur la partie fun (comprendre : celle où on tire sur tout ce qui bouge) sans avoir au préalable à consulter deux-cents pages de manuel pour avoir une chance de réussir péniblement un décollage au bout de quinze tentatives pour autant d’accidents mortels. L’idée n’aura pas tardé à faire du chemin : programmer un jeu moins complexe tout en visant un public plus large, cela ressemble fort à du gagnant-gagnant. Et les bonnes idées volant généralement par escadrilles, c’est sans doute totalement par hasard que MicroProse et Three-Sixty auront tous les deux publié le même mois deux programmes au pitch exactement similaire, à savoir une simulaction de combats aériens de la première guerre mondiale. Nous avons déjà eu l’occasion de voir ici Knights of the Sky, donc autant se pencher à présent sur Blue Max : Aces of the Great War.
Trois appareils en formation en face de moi. Ils n’ont aucune chance.
Le jeu qui nous intéresse aujourd’hui va donc graviter autour de ce que l’on a tendance à retenir de l’aviation militaire en 1917, à savoir les dogfights endiablés menés par des biplans, des triplans et autres avions en bois, à une ère plus simple où il fallait compter sur de bons yeux plutôt que sur un radar et où le génie humain était déjà parvenu à concevoir une mitrailleuse synchronisée sur la vitesse de rotation des pales d’une hélice pour pouvoir tirer à travers sans casse.
Le très surprenant mode « stratégique » risque malgré tout de ne pas vous retenir très longtemps
Du côté du menu, Blue Max semble en tous cas ne commettre aucune faute : possibilité d’incarner les deux camps (même si parler d’«Alliés » et d’«Axe » pendant la première guerre mondiale comme le fait le jeu est pour le coup totalement anachronique), huit appareils pilotables au total (quatre pour la Triple-Alliance, quatre pour la Triple-Entente) avec leurs caractéristiques propres, plusieurs modes d’entraînement allant du simple vol libre au combat simulé pour se familiariser avec les commandes – lesquelles sont de toute façon très simples, et quasi-intégralement résumées sur un écran accessible en vol via la touche F9 – sans oublier les trois indispensables campagnes qui seront à accomplir sans faute, puisqu’en cas de décès votre pilote est automatiquement effacé (sauf si vous avez eu la bonne idée de faire une copie de sauvegarde du fichier au préalable, évidemment).
Pour repérer un ennemi, il faudra compter exclusivement sur vos yeux
Plus surprenant : la présence d’un mode « stratégique » qui consiste… en un combat aérien au tour par tour, où les deux joueurs déplace leur avion d’hexagone en hexagone tout en paramétrant sa direction et son altitude. Un mode un peu gadget et manquant de profondeur, surtout parce qu’il reste limité à du un-contre-un (pourquoi ne pas diriger directement toute une escadre ?), mais on appréciera l’idée. Oh, et tant qu’à faire, n’oublions pas ce petit « plus » qui fait toujours plaisir : un mode deux joueurs en écran splitté, jouable aussi bien en compétitif qu’en coopératif. Oui, si le cœur vous en dit, vous pourrez tout à fait mener toute une campagne avec un ami à vos côtés, sans même avoir à dégainer un modem ou un câble série, et mine de rien cela restait assez exceptionnel en 1990.
Abattre un appareil ennemi n’a jamais été aussi simple
Une fois en vol – littéralement, puisque chaque mission du jeu débute directement dans les airs, le décollage n’étant jamais géré – on se retrouve face à un modèle simple mais efficace : le clavier, le joystick ou la souris pour déplacer l’appareil et faire feu, une gestion (facultative) du vent et des nuages, des munitions limitées mais au nombre suffisamment généreux pour qu’il faille vraiment le faire exprès pour se retrouver à court, des informations essentielles (altitude, vitesse, dégâts encaissés) clairement affichées sans avoir à déchiffrer des jauges ou des cadrans, et vous voilà prêt à faire face aux forces adverses.
Pourvoir jouer à deux sur un même écran est un vrai bonheur… même si on aurait apprécié une fenêtre plus grande
Seules les différentes vues et les actions de bombarder et de prendre une photo seront obligatoirement à aller chercher sur le clavier, et il ne sera pas question de compter ici sur des dégâts réalistes impactant le modèle de vol ni même sur des mitrailleuses qui s’enraillent : on est face à un titre très arcade, et qui fonctionne à ce niveau plutôt mieux que Knights of the Sky : Pas besoin ici de composer avec la vitesse des balles ni de devoir lutter pendant dix minutes pour parvenir à atteindre miraculeusement un avion de deux pixels qui virevolte comme un fou : les adversaires ont tendance à voler tout droit jusqu’à vous et les combats à être assez expéditifs dès l’instant où un ennemi est au milieu de votre viseur. Ce n’est peut-être pas très réaliste, mais bon sang, on a aussi le droit de trouver cela plus amusant sans se sentir coupable. En revanche, jouabilité simplifiée ou pas, une mission ne pourra se terminer qu’en étant prêt à poser son avion en rase-campagne – et du bon côté des lignes, lesquelles ne sont pas toujours faciles à identifier. La manœuvre demande un peu de maîtrise et de temps, ce qui est toujours moins amusant au bout de la quinzième fois (et personne n’aime planter sa campagne et perdre son pilote pour s’être posé un peu trop vite au terme d’une mission réussie), mais c’est bien là la seule concession au réalisme d’un titre qui offre ce qu’on était venu chercher : le plaisir de faire « tacatacatac » sur des vieux coucous en pirouettant follement dans les airs.
Prendre une photo vous demandera d’être à la bonne distance de l’objectif
Histoire d’introduire un peu de variété, le programme est organisé autour de cinq types de missions : les patrouilles (abattre au moins un appareil ennemi), les missions de défense (empêcher un objectif allié d’être détruit), les bombardements (raser un bâtiment adverse à l’aide d’une bombe à lâcher minutieusement à la main), les reconnaissances (prendre un bâtiment en photo) et enfin les missions demandant de détruire un ballon adverse.
La vue extérieure : un très bon moyen de poser son avion sans casse
Le jeu ne comporte qu’une seule carte par mode de jeu (ce qui signifie que chaque campagne se déroule sur une seule et unique carte) ; celles-ci ne sont ni très variées ni très différenciables, mais le moteur de jeu a l’avantage de tourner comme un charme et de proposer une action fluide et des affrontements nerveux dès l’instant où l’ordinateur est équipé d’un processeur correct – ce qui, dans un XXIe siècle déjà bien entamé, ne devrait pas exactement être un problème à trouver. En résulte une expérience qui fournit exactement ce qu’on pouvait espérer… avec ses limites, malgré tout. Avec une jouabilité aussi basique, on se doute qu’il ne faut pas des semaines pour faire le tour de ce que le jeu a à offrir, et même si on peut se fixer l’objectif de boucler les trois campagnes avec les deux camps, il ne s’agit jamais que de reproduire les cinq mêmes types de missions sur les trois mêmes cartes. La possibilité de jouer à deux sur un même écran est fort heureusement très appréciable – aucun as de la grande guerre n’étant aussi jouissif à abattre que le petit frère ou le copain à grande gueule – et aide à donner une bonne raison de ressortir le titre de temps à autres histoire de décider qui va se coltiner la vaisselle ce soir. Rien de très marquant ni de révolutionnaire, mais quand on n’a pas envie de lutter pendant des semaines pour parvenir à dompter une simulation ultra-pointue, c’est vrai que ça fait toujours plaisir de pouvoir compter sur des titres à la Blue Max.
Vidéo – La première mission du jeu :
NOTE FINALE : 13,5/20
En choisissant de s'éloigner de la simulation pure pour assumer un tournant plus arcade, exactement comme un certain Knights of the Sky d'ailleurs paru au même moment, Blue Max : Aces of the Great War aura su préserver l'essentiel de ce qui fait l'intérêt des dogfights de la première guerre sans les réserver aux joueurs les plus patients et les plus adroits. Le résultat, s'il manque fatalement de profondeur et de variété, est néanmoins plutôt plus convaincant que ce qu'offre son concurrent direct, surtout grâce à la possibilité bienvenue de jouer à deux en écran splitté pour affronter un ami, pour mener une campagne en coopératif, voire même pour s'essayer à un surprenant mode stratégique qui risque cependant de ne pas dépasser le stade de la curiosité. Certes, on fait assez rapidement le tour du programme en dépit des trois campagnes et des deux camps jouables, mais on tient clairement le type de jeu auquel on peut revenir régulièrement pour une partie de cinq minutes sans avoir à déterrer le manuel pour se souvenir comment démarrer le moteur. Une approche qui n'a finalement pas si mal vieilli.
CE QUI A MAL VIEILLI : – Des atterrissages qui demanderont un peu de pratique pour éviter de saboter bêtement une mission gagnée... – ...d'autant plus qu'en cas de crash, le personnage est automatiquement effacé ! – Très peu de moyens d'identifier la position de ses lignes... – ...surtout quand les seules cartes du jeu sont à aller chercher dans le manuel, lequel n'est même pas fourni avec la version vendue en ligne ! – Un mode stratégique assez gadget
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Blue Max sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Si The Blue Max (sic) ressemble à un simulateur de vol, ce n’est qu’une apparence, car il s’agit en fait d’un shoot-them-up réaliste. Le pilotage est réduit à sa plus simple expression et vous ne contrôlez que la direction, l’altitude et la vitesse de votre appareil. Les différentes missions commencent en vol. Vous n’avez pas le moindre décollage à effectuer, ni aucun atterrissage (NdRA : dans les faits, toutes les missions demandent d’atterrir). Cela fera sans doute grimacer les fans de simulateurs de vol, mais l’action est suffisamment prenante pour compenser cela. »
Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20
Version Amiga Aces of the Great War
Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeurs : Three Sixty Pacific, Inc. – Mindscape International Ltd.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée *Optimisé pour 1Mo
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Blue Max aura dû attendre quelques mois pour débarquer sur Amiga – perdant au passage une partie de son titre sur la boîte pour mieux la récupérer à l’écran-titre, les grands mystères du marketing. Il hérite pour l’occasion d’une petite animation au lancement absente de la version PC, mais pour le reste, le contenu reste strictement identique (à un détail près : il est ici impossible de définir le niveau de réalisme du pilotage). Graphiquement, on ne peut pas dire que la déperdition soit spectaculaire comparé aux 256 couleurs du VGA – les dégradés sont clairement moins fins et les détails moins nombreux, mais rien de vraiment dramatique. En revanche, vous risquez d’avoir tout loisir d’admirer la différence, car autant vous prévenir : sur un modèle « de base » de type Amiga 500/600/1000, le jeu se traîne au point d’en être à peine jouable. Même avec les détails au minimum, le framerate ne dépasse jamais les huit images par seconde, et en mettant tout à fond, là il ne dépasse carrément plus les quatre ! Heureusement, les choses vont tout de suite mieux sur un Amiga 1200, où on retrouve une action à peu près fluide sans pour autant pouvoir rivaliser avec ce qu’offraient les PC les plus puissants, naturellement. Mais étant donné que l’Amiga 1200 n’existait pas encore à la sortie du jeu, on comprend qu’une partie de la presse n’ait pas été franchement emballé par cette séance diapo qui ne pouvait même pas s’enorgueillir de son réalisme. Si vous n’avez pas un Amiga 1200 ou supérieur, fuyez !
Sur un Amiga 500, croyez-moi, vous allez avoir le temps de compter les nuages !
NOTE FINALE : 08,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)
L’expérience délivrée par Aces of the Great War sur Amiga dépendra grandement du modèle sur lequel le jeu est lancé : en-dessous d’un Amiga 1200, le framerate risque d’être si bas que le jeu en sera pratiquement injouable. Dans de meilleures conditions, le titre peut se hisser assez près de la version DOS, mais sans le matériel approprié, ce ne sera clairement pas un jeu vers lequel vous diriger. Vous êtes prévenu.
Version Atari ST Aces of the Great War
Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1024ko Installation sur disque dur supportée
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Après avoir vu le résultat d’Aces of the Great War sur Amiga, on avait de quoi se montrer inquiet pour l’Atari ST. Malheureusement, et comme on pouvait le craindre, le miracle n’aura pas eu lieu : en dépit du fait que le moteur de jeu n’emploie plus que seize couleurs, le framerate ne côtoie l’acceptable qu’en mettant tous les détails au minimum, et même sous cette forme on est encore très, très loin de l’expérience offerte par la version PC. Pour ne rien arranger, le jeu est donc devenu sensiblement plus moche (équivalent graphiquement parlant à la version EGA), le rendu sonore est inférieur, et l’expérience est empoisonnée de temps de chargement interminables. Bref, même si le programme pouvait encore faire illusion à une époque où on avait l’habitude de jouer à sept images par seconde, le constat est implacable : pour découvrir le jeu, ne commencez clairement pas par là.
Avec tous les détails à fond, on a bien le temps de mesurer tout ce qui séparait un Atari ST d’un 386 DX
NOTE FINALE : 08/20
On peut prendre le problème sous n’importe quel angle, mais la fluidité, ça compte, surtout quand elle impacte aussi dramatiquement la jouabilité. Condamné à se traîner lamentablement dans des décors qui ont perdu beaucoup de leur charme en seize couleurs, Aces of the Great War sur Atari ST se réservera aux joueurs les plus nostalgiques, les plus patients ou les plus masochistes.
Je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître. Une période où l’univers vidéoludique ne se divisait pas uniquement entre d’un côté les AAA en monde ouvert réalisés par des équipes de 800 personnes et de l’autre les rogue-lite, les deckbuilders et les Metroidvania en pixel art de la production indépendante.
Bonne idée : le jeu prend le temps de vous montrer le plan de l’arène avant de vous lâcher dedans
Une ère qui avait encore cette magie de l’incertitude et de l’expérimental, et où il suffisait généralement d’un codeur et d’un graphiste, avec parfois un copain qui venait dépanner pour la musique, pour programmer un jeu en six mois, sur un coup de tête, sur une vision, ou encore mieux : sur une idée. Un siècle où Microïds, plutôt que de nous embarrasser avec des adaptations de Goldorak ou de Tintin qui nous fassent détourner les yeux avec pudeur, tentait des choses sans trop réfléchir, sans rester suspendu à des études de marché pour tenter de découvrir quelle licence grand public aller déterrer pour espérer enfin vendre quelque chose. Bref, des temps plus simples, plus purs, où en tout cas aimerait-on le croire au nom de cette nostalgie qui nous habite et qui veut nous convaincre que l’herbe était toujours un peu plus verte avant. Des temps où on voyait apparaître régulièrement des Sliders dans les magazines et dans les bacs, avec de belles boîtes en carton ou en plastique, plutôt que d’aller les dénicher au fin-fond des listes de jeux à moins de 4,99€ dans les offres promotionnelles de Steam. *Soupir*.
Deux billes, une balle : l’essentiel
Mes excuses pour ce bref instant de mélancolie nostalgique que l’on pourrait qualifier de « moment vieux con » ; il y a des logiciels, de temps à autres, qui agissent comme de véritables voyages temporels. Si vous avez appartenu à l’ancienne génération, à celle qui traînait dans les salles d’arcades enfumées des années 80 au lieu d’être au collège ou au lycée, je peux déjà deviner la première chose que vous avez pensée en voyant les images de Sliders : « Ça ressemble à Marble Madness ».
Les options de configuration sont nombreuses, mais le jeu est déjà suffisamment délicat à dompter avec ses réglages par défaut sans aller modifier encore les choses
Sans doute est-ce dû à cette vue isométrique présentant des reliefs couverts d’un quadrillage les mettant très bien en valeur, ou simplement à la présence de deux billes à l’écran, mais à la vérité cette similitude esthétique est une fausse piste : Sliders, quels que soient les airs qu’il se donne, est plus proche d’un jeu de football. Ou de hockey. En fait, le principe est limpide : chaque joueur commence sur une petite zone colorée représentant son « but » et a pour objectif d’aller chercher la balle et de la propulser quelque part au-dessus du but adverse. C’est tout. C’est un peu Kick Off en un contre un sans les ligne de touche, les fautes, les hors-jeu et toutes ces bêtises. Ou, pour prendre un exemple encore plus pertinent, cela ressemble énormément à Ballblazer en changeant la vue. En résumé, c’est exactement le type de programme dont on a compris tous les tenants et les aboutissants en une demi-seconde, mais qui va nécessiter davantage de temps avant d’être dompté.
Interception désespérée pour empêcher la bille jaune d’atteindre mon en-but
Par essence, Sliders est un match ou une succession de matchs ; inutile de chercher un championnat, ou un tournoi, ou un mode « carrière » ou que sais-je encore : La sélection se limite au mode de contrôle (au clavier, à la souris ou au joystick), au mode de jeu (contre l’ordinateur ou contre un humain) et à la sélection d’une, de plusieurs ou de la totalité des douze arènes disponibles pour y affronter votre adversaire.
La présence d’une flèche pour vous indiquer en permanence la direction de la balle est une bonne chose
On notera néanmoins la présence d’un bouton « Data Disk » qui nous annonce que le jeu comptait accueillir des extensions – lesquelles n’auront au final jamais vu le jour – et surtout celui d’un menu de configuration extrêmement complet laissant au(x) joueur(s) la possibilité de paramétrer à peu près tous les aspects de la partie : durée, inertie, puissance des tirs… et d’autres notions plus obscures liées à la façon dont vos billes, en l’absence de mains ou de pieds, se saisissent de la balle : par aimantation. Une fois la balle « capturée », votre bille ne peut plus bouger, et sa seule action disponible est de viser et de projeter le ballon… laissant ainsi le temps à la bille adverse de venir le lui disputer en lui rentrant dedans ou, à défaut, en venant se placer sur la trajectoire du projectile afin de l’intercepter. Le reste du temps, la balle peut donc être attirée à distance par l’aimant… ce qui complique énormément les choses dès l’instant où les deux billes sont en train de chercher à le faire simultanément, les mécanismes d’attraction/répulsion rendant très difficile le fait de parvenir à immobiliser la balle et à s’en emparer.
Les différents obstacles ne font que compliquer les choses pour vous – l’ordinateur, lui, se baladera quoi qu’il arrive
En fait, le cœur du jeu est là : une espèce de match de hockey sur glace (à cause de l’inertie) en un contre un, où les duels deviennent rapidement confus tant il est difficile de deviner où va finir une balle tiraillée entre deux aimants. Les arènes fournissent juste de quoi pimenter les choses : des reliefs, pour commencer, mais aussi des tremplins, des plaques de glaces, des zones fléchées vous poussant dans une direction… Dommage que les environnement soient graphiquement toujours identiques, mais on appréciera le fait que la vue soit affichée dans une résolution assez élevée, en 320×270, qui offre une lisibilité parfaite et quelques moments de chaos ludique à deux.
Là, ça ne sent vraiment pas bon pour moi…
Seul contre l’ordinateur, en revanche, le tableau est déjà moins rose : la prise en main demandera un vrai temps d’adaptation qui n’est certes pas très pénalisant entre deux joueurs de même niveau, qui seront très heureux d’apprendre ensemble, mais qui risque en revanche de se révéler particulièrement frustrant face à une intelligence artificielle qui, pour sa part, vous fera des misères dès le mode facile en vous humiliant sans effort pendant que vous cherchez encore à réussir à comprendre où est la balle. Autant vous prévenir : si vous n’avez pas les nerfs solides, il est possible que la première heure de jeu vous amène à prononcer à un volume beaucoup trop élevé des termes que vous préfèreriez normalement éviter d’employer devant vos enfants, votre famille, ou même devant vos voisins. Sliders est un jeu qui ne vous prend pas par la main, et c’est sa première grave erreur : servir de punchingball à une machine qui a tout compris dès le début pendant que vous êtes en train de chercher à tenir debout n’est pas l’expérience de jeu la plus ludique qu’on puisse concevoir – sauf à être masochiste.
Ça aurait vraiment été tuant de proposer des colors swaps des décors pour varier un peu ?
Le vrai problème, cependant, celui-là même qui aura valu au titre un accueil critique assez tiède à peu près partout sauf dans les magazines français (sans doute pas du tout influencés par le fait que Microïds leur achetait des pages de publicité), c’est surtout qu’il n’y a simplement pas assez de profondeur dans le jeu pour justifier de passer une heure ou plus à lutter pour parvenir à avoir enfin une chance de livrer un match vaguement équilibré contre l’ordinateur.
Les duels sont souvent très confus, et l’impossibilité de bouger une fois la balle saisie ne simplifie pas les choses
Le contenu comme la jouabilité n’offrent aucun renouvellement, les arènes sont trop semblables et les modes de jeu pas assez nombreux, et même si le gameplay fait illusion un temps avec un ami, ce qui passait encore assez bien à l’époque de Kick Off commençait à apparaître comme un peu court face à des concurrents qui se nommaient désormais Kick Off 2 ou Speedball 2, et qui étaient simplement plus fun, plus accessibles et avec beaucoup plus de contenu. Une constatation qui ne s’est pas améliorée depuis : qui a encore envie de passer une heure à dompter un jeu pour s’amuser avec dix minutes ? Loin du petit jeu efficace face auquel on aurait pu se trouver, on compose donc avec une curiosité maladroite qui demande un investissement trop important pour ce qu’elle a à offrir au final. Parfait pour s’amuser dix minutes avec votre petit cousin le temps de lui faire découvrir l’Amiga, quoi.
Vidéo – Une partie lambda :
NOTE FINALE : 11/20 (seul) - 13/20 (à deux)
Sous ses faux airs de Marble Madness jouable à deux, Sliders dissimule en fait une expérience de jeu qui fait plutôt penser à une sorte de Kick Off sur glace avec des aimants. L'idée a le mérite d'être originale, on ne peut pas lui enlever ça, malheureusement entre une prise en main qui suivra une courbe d'apprentissage encore plus exigeante que celle du jeu de football de Dino Dini, un contenu solo qui se limite à affronter l'ordinateur et une difficulté globalement bien trop frustrante alliée à des situations trop vite confuses en cas de duels rapprochés, il faut bien reconnaître que c'est surtout entre deux joueurs de niveau équivalent que le programme dévoile un peu d'intérêt sur la durée, surtout avec les options de configuration pour pimenter les choses. Cela reste beaucoup d'investissement pour un maigre résultat, on pourra donc comprendre que le commun des mortels puisse décider de passer à autre chose au bout de cinq minutes – au hasard, pour retourner jouer à Speedball 2. Bien essayé, mais pas assez bien pensé.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un contenu solo qui se limite à jouer contre l'ordinateur – Une prise en main qui risque de nécessiter beaucoup de temps... – ...face à un ordinateur qui, pour sa part, se balade quel que soit le mode de difficulté – Des situations rapidement confuses ou verrouillées lorsque les deux concurrents sont trop proches
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Sliders sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Sliders est un programme très soigné, qui présente une réalisation irréprochable. Le jeu est en plein écran lorsque vous êtes seul. À deux, chaque joueur dispose d’un écran centré sur sa boule. Dans ce cas, chaque écran dispose d’un scrolling multidirectionnel des plus fluides, ce qui est assez impressionnant. C’est vraiment du beau travail, d’autant que la jouabilité est tout aussi réussie. […] Sliders est aussi simple que passionnant, et c’est un plaisir d’y jouer avec un ami, entre deux parties de Kick Off. »
Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 16/20
« Compétent, mais répétitif, peu inspiré et, pour beaucoup, susceptible de se révéler rigoureusement incontrôlable. Seulement amusant à deux, ou chacun a de fortes chances d’être aussi mauvais que l’autre. »
Amiga Power n°5, septembre 1991, 56/100 (Traduit de l’anglais par mes soins)
Version Amstrad CPC
Développeur : Microïds
Éditeur : Microïds
Date de sortie : Janvier 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Au début des années 90, l’Amstrad CPC restait un ordinateur extrêmement populaire en France – même si on se doute que la plupart des joueurs en ayant les moyens avaient entamé depuis longtemps leur migration vers des systèmes plus puissants, Amiga ou Atari ST en tête. Sliders n’aura donc pas fait l’impasse sur le vaillant ordinateur 8 bits – contrairement à toutes les autres machines de la même génération – et aura bénéficié d’un portage très sérieux s’efforçant de coller au maximum à l’expérience originale. Le contenu, par exemple, est pour ainsi dire le même : des terrains de jeu aux options, rien n’a changé en-dehors de l’impossibilité de jouer à la souris ; sincèrement, on s’en remettra.
L’action est peut-être nettement moins frénétique, mais parfois, ce n’est pas plus mal
La résolution est bien évidemment infiniment plus basse que sur Amiga, mais cela n’a heureusement pas trop d’incidence sur la lisibilité ni sur la capacité du joueur à anticiper, et pour cause : le jeu tourne beaucoup plus lentement, ce qui laisse infiniment plus de temps pour préparer ses mouvements et compenser l’inertie. Ironiquement, c’est précisément cette limitation technique qui rend le jeu beaucoup plus facile à aborder que sur Amiga : même s’il faut se méfier des très, très longues secondes que peut prendre le fait de parvenir à accomplir un demi-tour après être parti un peu trop vite un peu trop loin, on a nettement moins l’impression de subir les événements que dans la version originale, et on trouve ses marques infiniment plus vite. Du coup, le mode solo se montre moins frustrant ici que dans la version originale, et le mode deux joueurs un peu plus équilibré. Évidemment, dès qu’on commence à modifier les options pour tenter d’accélérer le jeu, les choses peuvent se compliquer, mais plus besoin cette fois de passer dix minutes à tâtonner face aux réglages pour espérer configurer une expérience de jeu à peu près gérable pour le joueur lambda, et c’est quand même une très bonne chose. Du coup, on recommandera beaucoup plus volontiers le titre aux nostalgiques du CPC qu’à ceux de la machine de Commodore.
La lisibilité n’est pas un problème quand on a (enfin !) le temps de réagir
NOTE FINALE :12/20 (seul) – 12,5/20 (à deux)
Parfois, moins, c’est mieux, et en offrant par contrainte une expérience plus lente, Sliders se révèle plus simple à prendre en main et à apprécier sur CPC. Cela signifie également que l’inertie pourra se révéler plus traitresse que jamais en mode deux joueurs et que l’action, moins chaotique, pourra également être un peu moins amusante contre un ami, mais à tout prendre le jeu est indéniablement plus agréable à découvrir sur la machine d’Amstrad, particulièrement en solo. Comme quoi…
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Optimisé pour la gamme STe Protection de copie par consultation du manuel
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Petite incongruité : l’Atari ST, ordinateur 16 bits chouchou des développeurs français (et de leur public : la France est l’un des pays où l’ordinateur d’Atari aura connu le plus grand succès), aura pour une fois dû se contenter d’un simple portage d’un jeu programmé pour Amiga. Si cela ne change bien évidemment rien au contenu (on remarque néanmoins que le jeu à la souris a disparu, tout comme sur CPC, dont cette version reprend d’ailleurs l’écran-titre), on se doute également qu’il ne sera pas question ici de disposer d’une fenêtre de jeu en 320×270 comme sur Amiga.
Encore une fois, mieux vaudra avoir un ami sous la main
La fenêtre de jeu est donc naturellement plus petite et la visibilité un peu plus restreinte, ce qui est d’autant plus dommage que le jeu va toujours aussi vite. Remarque, il serait malvenu de reprocher à Microïds d’avoir accompli pour l’occasion ce que pratiquement aucun autre développeur n’aura fait (hélas), à savoir tirer spécifiquement profit du blitter des modèles STe pour offrir un des défilements les plus fluides qu’on ait jamais vu sur la machine d’Atari ! Malheureusement, cette louable prouesse technique signifie également que le titre est toujours aussi ridiculement frustrant en solo où on passe plus de temps à courir derrière la balle (et l’ordinateur) qu’à réellement participer au match. Encore une fois, c’est surtout à deux que le jeu dévoilera sa pleine mesure – et qu’il finira par se montrer rapidement répétitif, faute de variété dans les environnements et les règles. Bel effort, cependant.
Ah ça, ça va vite, mais pour le coup on s’en serait peut-être passé…
NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 13/20 (à deux)
On sera heureux de profiter avec Sliders d’un des (trop) rares titres à tirer pleinement profit des capacités du STe pour offrir un des jeux les plus techniquement aboutis dont on ait pu bénéficier sur la machine. Malheureusement, cette fluidité et cette rapidité éblouissantes ne sont pas forcément à verser au crédit de l’expérience de jeu, tout aussi frustrante que sur Amiga – et même davantage, réduction de la résolution oblige. Encore une fois, c’est surtout à deux que le titre dévoilera son intérêt – mais pour combien de temps ?
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, VGA Cartes sons supportées : AdLib, Sound Blaster Protection de copie par consultation du manuel
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Les joueurs PC auront donc dû attendre près d’un an et demi avant de pouvoir s’essayer à Sliders. La raison, on s’en doute, trouve probablement une partie de son explication dans le hardware en lui-même : si les PC étaient déjà intouchables en termes de puissance processeur en 1992, aucun d’entre eux n’a jamais possédé de blitter, et parvenir à afficher un défilement fluide sur ce type de machine aura souvent représenté une colle pour une bonne partie des années 90. Sur le plan technique, le titre de Microïds représente donc une nouvelle fois un petit exploit : c’est parfaitement fluide… au prix de quelques sacrifices.
Comme sur Amiga et ST, ça va trop vite pour qu’on ait le temps de comprendre quoi que ce soit
Le plus dommageable étant la disparition totale de la moindre forme d’interface une fois un match lancé : non seulement on n’a plus le droit à la barre pour signifier l’écoulement du temps, ni même à la flèche pour donner la direction de la balle, mais on n’a même plus le droit à l’affichage du score non plus ! En écran splitté, on peut également être amené à composer avec un tremblement de l’écran sur la partie inférieure (celle du deuxième joueur) très désagréable, ce qui aura carrément poussé les développeurs à ajouter un mode radar où le deuxième joueur évolue sous la forme d’un point se déplaçant sur une vue aérienne de la carte ! Regrettable, dans un jeu où l’intérêt provenait précisément du multijoueur… On remarquera également que le jeu ne se joue désormais plus qu’au clavier (?!) et que, si la résolution est toujours bloquée en 320×200 (un peu agaçant sur une machine qui pouvait afficher le double, mais encore une fois, on se doute que la fluidité du défilement avait ce prix), la vue a cette fois été franchement éloignée, ce qui permet enfin d’anticiper… à condition d’avoir de bons yeux. Malheureusement, le mode solo est toujours aussi pénible, et les nombreux sacrifices pour fluidifier le jeu à deux font que l’expérience n’est pas bien meilleure à deux. Comme quoi, la technique ne résout pas tout, surtout quand elle n’est pas totalement maîtrisée…
Bon, au moins on voit ce qui se passe, mais de là à virer toutes les informations…
NOTE FINALE : 10,5/20 (seul) – 11,5/20 (à deux)
À force de rogner les angles pour préserver la fluidité de son défilement, Sliders sur PC finit par sacrifier trop de choses au bénéfice d’une vitesse qui ne lui rend de toute façon pas service et par offrir une expérience aussi désagréable en solo qu’en multijoueur. Certes, on appréciera que les développeurs aient ENFIN eu l’idée de reculer la vue, mais ralentir le jeu et diminuer l’inertie aurait été une bien meilleure idée.
Date de sortie : 14 décembre 1993 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Le succès, sur le papier, c’est bien. Je veux dire : ça doit forcément être bien, puisque c’est ce que tout le monde recherche. Seulement, comme beaucoup de choses, les avantages sont fournis avec leur facture, et dans la longue liste de problèmes que peut engendrer le succès, la pression occupe certainement une place dans le trio de tête.
J’espère que vous aimez les sauts de la foi parce que le jeu, lui, les adore
De la pression, en l’occurrence, Chris Sorell en aura eu un sacré paquet sur les épaules après la sortie de James Pond 2. Il faut dire que le soudain succès critique et commercial de son poisson, jusqu’ici à peine connu au-delà d’une frange d’amigaïstes, aura soudainement fait grimper en flèche les attentes suscitées par le désormais inévitable troisième opus, et qu’il n’est pas toujours facile de prendre du recul pour analyser les raisons d’un tabac que personne n’avait vu venir. Alors Chris et son équipe se seront remis au boulot. Longtemps. En fait, le temps de développement de James Pond 3 aura été deux fois plus long que la durée cumulée de développement des deux premiers épisodes – au point d’aller chercher rien de moins que le grand Steve Bak pour programmer en vitesse un Aquatic Games histoire de faire patienter les joueurs en attendant ce fameux titre qui allait devoir faire mieux, plus grand, plus beau, plus fort. On peut imaginer Chris bien embêté à l’idée de dénicher une idée originale – James Pond 2, après tout, n’en avait jamais proposé qu’une seule avec son mécanisme d’étirement – alors, en dernier recours et plutôt que de chercher à réinventer la poudre, il sera tout simplement aller taper dans les valeurs sures, et pas exactement les moins célèbres : un seau de Super Mario World, un seau de Sonic the Hedgehog, mélangez dans un chaudron avec une spatule et vous obtiendrez James Pond 3 – le premier (et dernier) épisode de la série à être développé sur Mega Drive plutôt que sur Amiga. Avec des références pareilles, qu’est-ce qui pourrait mal se passer ?
James Pond est de retour, mais il a laissé ses idées dans le casier du deuxième épisode
Le scénario, qui prend la peine d’exister, tourne autour d’une fois autour du Dr. Maybe (blague hilarante en rapport avec le Dr. No, got it ?) qui, après avoir été défait au terme du deuxième épisode, met en place un nouveau plan diabolique pour conquérir le monde : cette fois, il va aller construire des mines de fromage sur la lune (selon la conception folklorique qui voudrait que la lune soit faite de fromage) et saturer le marché terrien de fromage de qualité supérieur à bas prix histoire d’en prendre le contrôle et ainsi de financer ses projets de domination totale.
Même la carte du jeu trouve le moyen d’être confuse
Un prétexte grotesque comme un autre pour introduire un épisode prenant un tournant science-fiction – le titre de travail, Splash Gordon, annonçant clairement la couleur, il est d’ailleurs dommage qu’il n’ait pas été conservé. Comme d’habitude, c’est Pond, James Pond qui va être charger d’aller arrêter le Dr. Maybe, et tant qu’à faire il pourra aussi en profiter pour détruire ses mines et pour libérer les agents capturés – et si jamais ça ne l’intéresse pas, il pourra dire « Tintin » à la bonne fin du jeu. Son arme ? Eh bien, aucune, à vrai dire : il va juste chausser des baskets sur ses nageoires, courir vite comme un certain hérisson, et frapper des blocs avec sa tête comme un certain plombier, tout en explorant une carte gigantesque riche en niveaux secrets et en raccourcis, là encore inutile de préciser la référence. Bref, comme un vulgaire colon, James débarque sur la lune pour prendre possession d’un territoire qui ne lui appartient pas.
Ne perdez pas votre temps à essayer de détruire les monstres les plus coriaces ; le plus simple reste de se contenter de les éviter
Le truc, c’est que s’il suffisait de mélanger Sonic et Super Mario pour obtenir un jeu de plateforme d’exception, on se doute que tout le monde se serait empressé de le faire depuis longtemps en signant à chaque fois des succès planétaires – la réalité est forcément un peu plus complexe, et demanderait à minima d’analyser en profondeur les mécanismes des titres précités et de comprendre ce qui les rend à la fois ludiques et efficaces. Seulement, un sentiment se dessine rapidement tandis que l’on dirige notre poisson dans des niveaux dont le level design évoque furieusement la philosophie générale du deuxième épisode : et si Chris Sorell, en bon représentant de la production européenne de l’époque, ne s’était pas posé davantage de questions que les créateurs du premier Zool venu et s’était contenté de penser qu’il suffirait que son poisson aille vite pour qu’on s’éclate à retourner collecter des trucs et des machins dans une centaine de niveaux tentaculaires ?
L’interruption est constamment interrompue par des messages rarement utiles
Car le petit problème, ce serait précisément de ne pas avoir réalisé que Sonic n’était pas juste un jeu où le héros va vite ; c’était un programme dont tout le game design était pensé spécifiquement pour embrasser cette vitesse et faire en sorte qu’elle soit au service de l’expérience du joueur plutôt que de simplement lui offrir un jeu de plateforme lambda où les temps de réaction seraient divisés par dix. Dans les aventures du hérisson bleu, tout était pensé pour que le joueur ne soit pas puni de chercher à accélérer : le système des anneaux à récolter, qui autorisait un grand nombre d’erreurs, le principe de se rouler en boule qui offrait là encore la possibilité de foncer dans une relative sécurité, et surtout un level design tout entier pensé pour pouvoir, avec un minimum d’expérience, passer sans heurt d’un chemin à un autre et explorer différentes voies sans jamais avoir le besoin impérieux de revenir en arrière ou de tourner en rond pour comprendre où on a besoin d’aller. Même la talentueuse Sonic Team avait commis quelques erreurs en ce sens, dans un première épisode qui s’accrochait encore parfois maladroitement à la philosophie du jeu de plateforme « à l’ancienne » qu’il venait justement de dynamiter, et Sonic the Hedgehog 2 aura su embrasser définitivement une approche plus mature et plus assumée de la vitesse, créant une formule que pratiquement personne ne sera parvenu à reproduire. Bref, qui dit « mécanisme » dit « réflexion quant à la pertinence de ce mécanisme ». Autant dire une réflexion qui parait absente d’un bout à l’autre d’un jeu qui cherche surtout à empiler du contenu sans trop se soucier de savoir combien de temps ce contenu va se montrer intéressant.
Le plus difficile avec les boss est souvent de comprendre comment les toucher
Des maladresses, James Pond 3 en commet beaucoup, et c’est d’autant plus dommage que c’est objectivement un jeu bien programmé et bien réalisé qui dévoile régulièrement des arguments laissant à penser qu’il n’est pas si loin d’être un jeu extrêmement sympathique à défaut d’être original – si seulement quelqu’un avait pris le temps de réfléchir un peu au game design.
Le level design restera comme un des gros points faibles du jeu
Avoir des dizaines de bonus à collecter dans un niveau, c’est une chose – un bon moyen de justifier une composante « exploration », par exemple – mais quand les deux tiers de ces bonus ne servent à strictement rien d’autre qu’à gonfler le score et que le dernier tiers se révèle souvent si indispensable que le joueur doit passer de longues minutes à courir et à sauter en tous sens à la recherche d’une tasse de thé ou d’une paire de ressorts sous peine de ne pas pouvoir accéder à la fin du niveau, ça marche déjà moins bien. Quand, dès les premiers écrans des premiers niveaux, courir pendant plus de dix secondes vous expédie systématiquement sur un monstre ou au fond d’un gouffre tapissé de pointe, on comprend rapidement que les quelques six personnes responsables du level design ne se sont pas exactement posé les bonnes questions et ont transformé ce qui aurait dû être un mécanisme ludique fondamental en un obstacle permanent pour le joueur. James Pond 3 est un jeu qui vous invite à aller vite, mais qui vous punit constamment lorsque vous cherchez à le faire. Une incohérence navrante qui se retrouve hélas à pratiquement tous les niveaux du jeu.
Rester à côté d’une caisse d’explosifs sur laquelle on a posé un bâton de dynamite : mauvaise idée
Si on a ainsi beaucoup abordé l’échec de la composante « Sonic the Hedgehog », on ne peut pas dire que la partie « Super Mario World » fonctionne beaucoup mieux. Collecter des centaines de lunes qui ne servent à rien d’autre qu’à gagner des points est déjà idiot (au moins les pièces de Super Mario permettaient-elles de gagner des vies), mais trouver le moyen de proposer une carte du monde si opaque – avec sa dose d’embranchements et de niveaux secrets – qu’on n’ait jamais une vague idée de la direction à suivre pour se diriger vers le boss final est tout aussi révélateur.
Les divers mécanismes – comme ici la possibilité de marcher aux murs ou au plafond – sont souvent mal exploités
Et il faut dire que quand les niveaux en eux-mêmes ne se renouvèlent jamais, que les décors se limitent constamment aux mêmes blocs de fromage devant l’éternel même ciel noir étoilé et qu’il faut bien entendu galérer pendant des dizaines de minutes pour espérer dénicher un des rares mots de passe du jeu, non seulement on commence très vite à trouver le temps long mais en plus on a l’impression que le réservoir de talent de l’équipe s’est vidé tout entier dans la réalisation du deuxième épisode – qui, lui, proposait des niveaux en véhicule, des phases en défilement imposé, des décors variés débordant de couleurs et un game design basique, certes, mais cohérent d’un bout à l’autre et sachant mettre à profit son unique mécanisme original – soit précisément tout ce qui manque à ce James Pond 3 dont le véritable sous-titre aurait dû être : « cette fois, on est complètement à court d’idées ».
James Pond, pionnier dans la longue série de jeux de plateforme où on peut collecter des milliards de trucs qui ne servent à rien
Reste donc un jeu boiteux, maladroit, souvent inutilement frustrant (ah, ces sauts de la foi ! Ah, ces pièges dont on ne peut jamais anticiper la position si on n’avance pas à deux à l’heure ! Ah, ces interminables phases d’allers-et-retours à chercher à comprendre où est cachée cette maudite tasse qui va enfin nous ouvrir l’accès au milliardième niveau du jeu ! Ah, ces boss aux mécanismes fumeux qui font qu’on met parfois un quart d’heure à comprendre comment on est censé leur faire du dégât !) et beaucoup, beaucoup trop long pour son propre bien qui a juste oublié un minuscule ingrédient dans sa recette pompée de toute part : le plaisir.
Les diverses mines du jeu constitueront l’unique occasion de couper avec le sempiternel même ciel noir étoilé
C’est vraiment l’avatar du jeu pensé par des codeurs : des plateformes, des monstres, des idées piquées ailleurs, et hop, ça va forcément être amusant – un manque de clairvoyance consternant qui rend ce qui aurait pu être un programme tout à fait correct en expérience pénible faute d’avoir mené la moindre réflexion. Un ratage qui, malgré un accueil critique plutôt positif, aura sonné définitivement la mort de la licence : l’équipe de Vectordean, absorbé par celle de Millenium, aura disparu des radars (la carrière de designer de Chris Sorell se sera terminé en 2006 avec un jeu adapté de la série 24H), quant à James Pond, ses maigres espoirs de retour auront été annihilés quand un kickstarter lancé en 2013 aura péniblement réuni 16% de la somme demandé avant son annulation. Il aura depuis terminé, comme une star sur le retour, dans un pitoyable quatrième épisode sur smartphone nommé James Pond and the Deathly Shallows que tout le monde s’est hâté d’oublier, par respect. Un assez bon résumé de la trajectoire du jeu de plateforme « à l’européenne » et des raisons pour lesquelles on a nettement moins envie, aujourd’hui, de lancer un James Pond 3 qu’un Sonic the Hedgehog ou qu’un Super Mario World : parce que ça n’en vaut tout simplement pas la peine.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 12,5/20
Après un James Pond 2 – Codename : Robocod qui était parvenu à placer tous les curseurs au bon endroit, James Pond 3 aura hélas dissipé un cruel malentendu en démontrant que ce deuxième opus avait bel et bien été un accident. En congédiant l'unique idée vaguement originale de l'épisode précédent, l'équipe de Vectordean a cru pouvoir donner le change en pillant sans vergogne Sonic the Hedgehog et Super Mario World ; malheureusement, elle aura surtout démontré au passage à quel point le game design lui était un concept largement étranger en accumulant les maladresses jusqu'à transformer ce qui aurait pu être un jeu sans réelle identité mais efficace en une bouillie de mécanismes mal amalgamés servie sur un lit de level design aléatoire. Fatigué par une difficulté frustrante pour de mauvaises raisons, le joueur pas très patient aura probablement reposé la manette au bout de dix minutes – et celui qui persévèrera finira par trouver le temps long à force d'empiler les niveaux sans idées au milieu d'un monde chaotique où rien n'est clair, pas même la direction à suivre. Un condensé de tout ce qu'on était en droit de reprocher à la production européenne de l'époque, et une attente qui n'en valait clairement pas la peine.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un game design bancal... – ...entraînant une difficulté où la mémoire sera votre seul recours – Des environnement qui ne se renouvèlent pas assez – Un système de mot de passe particulièrement pénible à retranscrire
Bonus – Ce à quoi peut ressemble James Pond 3 sur un écran cathodique :
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1200 – OS : Kickstart 3.0 – RAM : 2Mo Mode Graphique supporté : AGA Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Signe des temps : James Pond 3 aura donc été le premier – et le dernier – épisode de la saga à ne pas avoir été développé sur Amiga. les possesseurs de la machine de Commodore auront ainsi dû attendre plusieurs mois avant de voir débarquer le poisson/agent secret, et pas question cette fois de l’héberger sur un Amiga 500 : ce sera mode AGA ou rien. On aurait d’ailleurs pu penser que cette exigence en termes de hardware permettrait au jeu d’offrir une réalisation supérieure, ou au moins équivalente, avec celle d’un Mega Drive qui ne pouvait pas compter sur 2Mo de RAM ou sur 256 couleurs affichables, mais non seulement le titre n’est au final pas plus coloré sur Amiga, mais il perd même carrément en détails au niveau des décors (plus de collines avec défilement parallaxes en fond : ce sera grande nuit étoilée en permanence), voit sa fenêtre de jeu réduite, et il faudra même composer avec quelques ralentissements. Niveau jouabilité, on sera surtout heureux de pouvoir connecter un pad, car on se doute qu’il n’est pas exactement pratique de jouer avec un seul bouton à un jeu en demandant trois. Pour le reste, le contenu n’a bien évidemment connu aucune modification (à part le retour du sponsor des biscuits Penguin) et le titre avait certainement de quoi être mieux accueilli sur un Amiga en fin de vie que sur une Mega Drive où la concurrence était nettement plus redoutable. On le réservera néanmoins aux vrais mordus de la plateforme, pour les mêmes raisons que sur la console de SEGA.
La réalisation rogne où elle peut
NOTE FINALE : 12/20
Pour sa dernière apparition sur Amiga – et sa dernière apparition tout court – James Pond perd quelques détails et assiste à une légère dégradation de ses performances ; rien de catastrophique, loin de là, mais une raison supplémentaire pour préférer découvrir le jeu sur console.
Version Amiga CD32 James Pond 3 : Operation Starfi5h
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
L’Amiga CD32 n’étant pas grand chose de plus qu’un Amiga 1200 simplifié avec un lecteur CD-ROM – et n’ayant, en conséquence, pas rencontré plus de succès que sa version de bureau – on se doute que la plupart des développeurs ne se seront pas senti obligés de tirer parti des capacités du support. Énième démonstration avec James Pond 3 qui se révèle, comme on pouvait s’y attendre, une simple copie carbone de la version disquette copiée sur un CD-ROM. N’espérez pas de la musique numérique, ce n’était pas prévu. Histoire de remplir un minimum la galette (le jeu pèse 11Mo !), on assistera quand même à l’ajout d’une courte vidéo animée présentant le personnage… et reprise directement de l’épisode précédent ! Bref, ce n’est clairement pas ce jeu-là qui vous donnera une raison valable d’acquérir une Amiga CD32.
C’était intéressant d’acheter une console 32 bits qui ne fasse même pas aussi bien que la Mega Drive !
NOTE FINALE : 12/20
Grop coup de flemme de James Pond 3 sur Amiga CD32 qui se contente de reprendre à la ligne de code près la version parue sur Amiga 1200 – ce qui signifie que les possesseurs de la coûteuse machine pouvaient acquérir, au prix fort et après huit mois d’attente, une version inférieure à celle parue sur une console de la génération précédente. À se demander pourquoi elle ne s’est pas vendue comme des petits pains…
Version Game Gear James Pond 3 : Operation Starfi5h
Développeur : Teque London Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Juin 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
James Pond 3 n’aura visiblement pas bénéficié du même enthousiasme que son prédécesseur, et il aura fallu attendre plus d’un an et demi pour qu’il arrive sur une Game Gear alors en sérieuse perte de vitesse, elle aussi. Confié pour l’occasion à Teque, le portage s’efforce de respecter le contenu et l’esprit de la version originale, mais en ayant malgré tout la bonne idée de miser un peu moins systématiquement sur la vitesse – ce qui, vu la taille de l’écran de la console portable, est plutôt un soulagement. Le contenu a bien évidemment été raboté : il n’y a plus qu’une soixantaine de niveaux, ils sont nettement plus courts, mais très honnêtement le fait de ne plus passer son temps à errer dans des stages tentaculaires est loin d’être une perte. Ce qu’on peut regretter, en revanche, en-dehors d’une difficulté plus frustrante encore que sur Mega Drive, c’est surtout une jouabilité à deux boutons loin d’être irréprochable : par défaut, James se traîne comme c’est pas permis, et il faut appuyer sur la croix directionnelle PRÉCISÉMENT à l’horizontale pour qu’il daigne enfin se remuer un peu – seul moyen d’espérer gravir une des innombrables pentes. Comme on peut s’en douter, le manque de variété et d’originalité du jeu est toujours présent ici, et la taille de la fenêtre de jeu complique encore les choses, mais on dira qu’on a vu bien pire en la matière sur Game Gear. À réserver aux mordus, quoi qu’il en soit.
Difficile de ne pas se sentir à l’étroit
NOTE FINALE : 11,5/20
Adapté vaille que vaille aux capacités de la Game Gear, James Pond 3 y devient un jeu encore un peu plus banal, un peu plus générique et un peu plus pauvre en idées. Certes, la vitesse y est suffisamment réduite pour ne plus agir comme une punition permanente, mais entre le peu de visibilité offert par la fenêtre de jeu et la jouabilité souvent contre-nature, difficile de s’enthousiasmer outre-mesure pour une cartouche qui n’a rien d’inoubliable.
Version Super Nintendo James Pond 3 : Operation Starfi5h
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
On peut légitimement se demander ce qui bien pu justifier que James Pond 3 mette près d’un an et demi pour arriver sur Super Nintendo – à une époque où le projecteur commençait à être nettement tourné vers les consoles 32 bits. Qu’il s’agisse d’un choix ou d’une contrainte, le fait est que l’équipe de développement en aura profité pour revoir légèrement sa copie – pas du côté de la jouabilité, qui n’a pas changé, ni de celle de la réalisation, qui doit juste souffrir d’une résolution rabotée en 256×224, comme toujours sur Super Nintendo, mais bien de celui du contenu. Dès le premier niveau, on assiste ainsi à des modifications sensibles du level design, qui semble tendre vers une certaine simplification. J’aimerais dire que ces modifications rendent le jeu sensiblement plus passionnant, mais ce serait un peu exagéré : on retrouve exactement les mêmes limites, et au final le rééquilibrage opéré ne change pas grand chose à la difficulté de la cartouche. Bref, une nouvelle fois, on ne sait pas trop à qui se destinait le titre au moment de sa sortie, mais ce n’est clairement pas le premier sur lequel vous devriez vous précipiter dès l’instant où vous possédez une Super Nintendo.
Ah, s’il y avait eu un peu moins de niveaux et qu’ils avaient été un peu plus intéressants…
NOTE FINALE : 12,5/20
En dépit de quelques réadaptations, cette version Super Nintendo de James Pond 3 ne parvient pas exactement à supplanter une version Mega Drive pourtant largement perfectible. Si on appréciera l’effort, il manque toujours l’essentiel : de la variété, des idées et du rythme. Ou, en un mot : une âme.
Développeur : Vectordean Ltd. Éditeur : Millenium Interactive Ltd. Titres alternatifs :Aquatic Games (titre usuel), The Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (écran-titre), The Aquatic Games Estrelando James Pond and the Aquabats (Brésil), The Super Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats (SNES – Amérique du Nord), James Pond’s Crazy Sport (Super Nintendo – Europe) Testé sur :Amiga – Mega Drive – Super Nintendo
Un des principes fondamentaux du commerce repose sur deux mécanismes simples : créer un besoin, et le combler. Non non, revenez tout de suite, on ne va pas démarrer un cours sur le capitalisme – ce serait sans doute très intéressant, mais tout le monde en aurait Marx avant qu’on en ait abordé le Karl. On pourrait plutôt rebondir sur un exemple plus concret : après le succès triomphal – et pour ainsi dire quelque peu inattendu – de James Pond 2, l’équipe de Vectordean aura senti que son héros aquatique avait le courant dans le dos et aura naturellement commencé à travailler sur un James Pond 3 pour surfer sur le succès du précédent volet.
Ne vous laissez pas déborder !
Malheureusement, de contretemps en complications, le jeu tant attendu cumula les retards – tant et si bien que le studio britannique en vint à craindre que les joueurs, lassés de poireauter, ne passent définitivement à autre chose dans un secteur alors très, très actif. Alors histoire d’entretenir la flamme (ce qui est toujours difficile, sous l’eau), ils optèrent pour un choix radical : développer en vitesse un jeu mettant en scène James Pond histoire que le pastiche de 007 continue d’occuper l’espace et de se rappeler au bon souvenir des joueurs. Évidemment, vu les difficultés rencontrées par James Pond 3, pas question de se lancer dans un nouveau jeu de plateforme qui n’aurait fait que représenter un problème supplémentaire. Et qu’est-ce qui se développe vite et qui avait encore un certain attrait (quoique déjà déclinant) en 1992 ? Un jeu de sport multi-épreuve à la California Games, pardi ! Et voilà comment Steve Bak et son équipe se seront retrouvés aux commandes de New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats, un jeu conçu pour boucher les trous en attendant mieux. Tout un programme.
Il va être temps de ré-enfiler le short !
Pour proposer des « jeux aquatiques », il faut commencer par imaginer des épreuves – en l’occurrence, tout le programme reposant là-dessus, mieux vaut éviter de se rater. Aquatic Games, comme on l’appellera à partir de maintenant, en propose huit, plus deux discipline additionnelles qui peuvent s’activer en obtenant suffisamment de point bonus dans les épreuves « standard ».
On peut trouver quantité de bonus cachés en cherchant bien
On y trouve quelques grands classiques vaguement remis au goût du jour, comme le « cent mètres splash » qui consistera à agiter le joystick de droite à gauche, du triple saut reprenant fondamentalement les mêmes mécanismes en sautant au moment demandé et en choisissant l’angle au moment du bond final, un 110 mètres haies avec des anguilles électriques en guise d’obstacle ou une épreuve de monocycle demandant, cette fois, d’effectuer des rotations avec le stick. Un peu plus original : une épreuve demandant de remplir une mangeoire et de nourrir des poissons avant que des pêcheurs ne leur mettent l’hameçon dessus, une autre demandant d’empêcher des phoques d’être réveillés par des jets de ballon, sans oublier les deux disciplines « techniques » : un saut sur éponge demandant de réaliser six fois six figures différentes en un minimum de temps, et une dernière demandant de jouer à Super Mario sur des crabes pour les collecter avant de les utiliser comme munitions pour détruire des ballons, là encore le plus rapidement possible. S’y ajouteront donc deux activités bonus pour les joueurs les plus doués : du jonglage et du saut en longueur.
Simple et efficace, mais pour combien de temps ?
Tout cela est bien beau, mais une longue série de titres du même genre, de Summer Games à World of Sports, nous aura appris à quel point il est souvent difficile de trouver un juste milieu entre disciplines trop courtes et disciplines trop longues, et surtout entre disciplines trop simples et disciplines trop complexes – sans parler du problème récurrent de la durée de vie avec des activités dépassant rarement la demi-minute.
Comme souvent, les épreuves s’enchainent un peu trop vite pour leur propre bien
À ce niveau, Aquatic Games a l’intelligence de se rendre le plus accessible possible en ne cherchant jamais à compliquer la jouabilité pour le simple plaisir de le faire : si les disciplines les plus complexes pourront nécessiter un passage par le manuel pour comprendre exactement ce qu’on attend du joueur, on comprend généralement comment jouer en une fraction de seconde, et les épreuves ne sont jamais pensées pour qu’on se fasse bêtement éliminer au bout de quatre secondes pour ne pas avoir compris immédiatement dans quelle direction on était censé pousser le stick au signal. Mieux encore : la plupart des épreuves recèle leur surcouche de petites subtilités à dénicher ; on peut par exemple se faire transporter par un pélican pendant une bonne partie du cent mètres, ou bien trouver le moyen d’accéder à un deuxième étage avec des bonus cachés pendant l’épreuve de tir. Pas de quoi étirer le plaisir pendant des heures tant chaque discipline est, par définition, conçue pour être pratiquée sur une durée extrêmement courte, mais la bonne nouvelle est qu’on s’amuse en jouant, ce qui n’était pas toujours gagné avec ce type de jeu.
L’épreuve de tir demande de gérer beaucoup de choses à la fois tout en vous montrant très précis à tous les niveaux
Au rang des bonnes nouvelles, on appréciera naturellement le soin apporté à la réalisation avec de personnages bien campés et bien animés, une animation d’une fluidité à toute épreuve, quelques effets (comme les reflets dans l’eau) tirant finement parti des capacités de l’Amiga et une jouabilité difficile à prendre en défaut. Au rang des moins bonnes, on regrettera des thèmes musicaux se contentant d’aller piller la musique classique et se limitant pour ainsi dire à l’Hymne à la joie et à La truite de Schubert. Surtout, on assistera à des pics de difficulté pas justifiés d’autant plus pénalisants que le mode de jeu principal ne vous laisse pas enchaîner toutes les épreuves si vous échouer à atteindre les minimas de qualification – il faudra reprendre depuis le début, ce qui est inutilement punitif dans un jeu basé sur le score.
Dans l’ensemble, on comprend très vite ce qu’on est censé faire
Le multijoueur, pour sa part, se limitant à jouer une fois de plus à tour de rôle, on n’assiste pas exactement à une révolution ni à l’acte de naissance du party game, mais il faut bien reconnaître que dans le secteur embouteillé et en fin de vie des jeux multi-épreuves, Aquatic Games peut au moins se vanter de représenter le haut du panier grâce à son accessibilité, à un équilibre relativement bien trouvé entre épreuves courtes et épreuves longues et à une réalisation qui fait le travail. Cela ne l’empêche hélas pas de se révéler fatalement répétitif au bout d’une heure ou deux, particulièrement en solo où la carotte de deux épreuves bonus assez gadgets n’est pas suffisante pour donner envie d’aller décrocher des records – néanmoins, pour réunir des amis sur un jeu « à l’ancienne » sans les voir s’arracher les cheveux de ne pas comprendre comment on est censé réussir à tenir debout sur une planche de surf, c’est clairement une des meilleures portes d’entrée du genre à l’échelle de la génération 16 bits. Bouche-trou, peut-être, et clairement pas pour très longtemps mais hé, pour une fois que ce n’est pas trop mal fait, on ne va pas hurler au cynisme mercantile, non ?
Vidéo – Une partie lambda :
NOTE FINALE : 13/20
Envoyé faire patienter les joueurs en attendant un James Pond 3 qui avait pris beaucoup de retard, New Aquatic Games starring James Pond and the Aquabats se lance sur les traces de séquences de mini-jeux à la California Games, et il ne s'en sort pas trop mal. Comme d'habitude, l'amalgame entre les épreuves trop difficiles et celles qui ne le sont pas assez n'est pas parfait, d'autant que le mode principal ne tolère aucune erreur, mais la jouabilité relativement accessible et l'univers graphique coloré aident à rendre le jeu plus sympathique que la plupart des titres dont il s'inspire – ayant même la bonne idée d'ouvrir l'accès à des activités bonus en guise de récompense. Le mode multijoueur aurait vraiment gagné à ce que les épreuves puissent être disputées en simultané, et le solo risque de s'éventer assez vite, mais il y a malgré tout matière à passer un bon moment sur le programme – quitte à ce que celui-ci ne dure pas des heures. Allez, on prend.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des épreuves assez déséquilibrées... – ...et qui auraient gagné à être plus nombreuses – Un multijoueur limité à des parties à tour de rôle
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Aquatic Games sur un écran cathodique :
Version Mega Drive The Aquatic Games Starring James Pond and The Aquabats
Éditeur : Electronic Arts, Inc. (Amérique du Nord, Europe) – Tec Toy Indústria de Brinquedos S.A. (Brésil)
Date de sortie : Septembre 1992 (Amérique du Nord) – Octobre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Aquatic Games aura très rapidement fait un saut sur les deux consoles 16 bits – en fait, il est même assez crédible que la version Mega Drive ait été développée en parallèle plutôt que de faire l’objet d’un portage, à en juger par la proximité des dates de sortie. En termes de réalisation, la Mega Drive est d’ailleurs très proche de la machine de Commodore : si certains effets spécifiques au hardware de l’Amiga ont disparu (les dégradés du ciel, les reflets dans l’eau), les décors restent suffisamment détaillés et colorés pour que la déperdition soit très symbolique. On remarquera également que la jouabilité a été subtilement réadaptée : plutôt que de secouer le joystick de gauche à droite dans les épreuves de course, à présent (ce qui n’aurait pas vraiment de sens avec la croix directionnelle d’un pad), il faut marteler le bouton B. Dans l’ensemble, l’expérience de jeu n’a que peu changé, et les joueurs qui préfèreront découvrir le titre via cette version plutôt que sur Amiga n’auront aucune raison de se sentir floués.
Ça bouge mieux que jamais, et c’est toujours aussi jouable
NOTE FINALE : 13/20
Peu de différences notables pour The Aquatic Games sur Mega Drive comparé à la version Amiga : la réalisation est largement à la hauteur en dépit de la disparition de certains effets graphiques, et la jouabilité a été adaptée au pad. Du bon travail.
Éditeur : The Sales Curve Ltd. (Europe) – Seika Corporation (Amérique du Nord)
Date de sortie : Juillet 1993 (Europe) – Octobre 1993 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Elle se sera certes davantage faite attendre, mais la version Super Nintendo de The Aquatic Games aura elle aussi fini par se matérialiser – en changeant au passage de nom, un exercice auquel le titre se sera beaucoup livré au fil de son développement. Elle hérite au passage de quelques adaptations, notamment à cause de la résolution réduite de 256×224, mais bénéficie en contrepartie d’une épreuve supplémentaire de relais d’ailleurs assez mal fichue. On ne retrouve pas davantage les effets graphiques de la version Amiga que sur Mega Drive, mais les graphismes sont dans l’ensemble encore un peu plus colorés ici – c’est, une fois de plus, très anecdotique. Un menu des options a fait son apparition, avec un choix du mode de difficulté (qui fait un peu doublon puisque les épreuves d’entraînements existent déjà en trois variantes), mais il s’ait plus d’une refonte du menu principal que d’une réelle modification. Bref, ça ne valait sans doute pas la peine d’attendre près d’un an pour gagner une épreuve qui n’apporte rien, mais ça ne pénalise pas le jeu outre mesure pour celui qui le découvrirait aujourd’hui.
Le format de l’image est un peu plus étroit, mais on s’en remet
NOTE FINALE : 13/20
En dépit de l’ajout d’une très dispensable épreuve de relais, James Pond’s Crazy Sports reste très semblable, dans son itération Super Nintendo, à ce qu’il était sur Amiga – à savoir un jeu multi-épreuves assez facile à prendre en main mais qui s’essouffle trop vite. Une curiosité qui peut avoir un certain charme entre amis mais qui ne devrait pas vous retenir très longtemps.
Développeur : Interplay Productions, Inc. Éditeur : Electronic Arts, Inc. Testé sur :PC (DOS) – Amiga Disponible sur : Antstream, Linux, Mac OS, Windows En vente sur :GOG.com (Linux, Mac OS, Windows), Steam.com (Linux, Mac OS, Windows)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, en local ou via modem ou câble null-modem)
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, Covox Sound Master, Game Blaster, haut-parleur interne, Innovation Sound Standard, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr *640ko requis pour les modes VGA et MCGA
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Le problème avec beaucoup de bonnes idées, c’est qu’elles fonctionnent rarement plus d’une fois.
À l’ère où l’informatique était encore entourée d’une certaine magie de par sa capacité à donner vie à des choses qui avaient jusqu’ici été réservées à l’imagination, Battle Chess avait mis étonnamment dans le mille grâce à une idée si simple qu’un joueur n’ayant pas grandi dans les années 80 pourrait s’interroger sur son simple intérêt : faire bouger les pièces. Voir les très abstraits pions, tours et cavaliers du très austère échiquier se livrer bataille via des saynètes animées correspondait visiblement à une véritable attente, à en juger par le succès du titre et le nombre impressionnant de portages auxquels il aura donné lieu.
On peut très vite aller placer le danger dans le camp adverse
Mais ceci étant placé, une fois le concept matérialisé, quelle marge de progression lui restait-il ? Deux axes se présentaient aux développeurs d’Interplay pour une éventuelle suite : reprendre exactement le même principe en changeant juste les graphismes, ou bien – approche plus risquée – en changeant carrément le jeu. Petite surprise : la première approche, la plus prévisible et la plus attendue, aura dû attendre 1993 pour voir le jour avec Battle Chess 4000 ; car auparavant, la firme américaine n’aura pas hésité à déployer une certaine dose de culot en osant lancer en premier Battle Chess II : Chinese Chess. Un nom qui est déjà tout un programme, car là où les joueurs s’attendaient fort naturellement à repiquer pour d’autres parties d’échecs – c’est après tout le nom du jeu – le sous-titre annonce immédiatement le contrepied en proposant des échecs… chinois. Stupeur et tremblements : là où on attendait bêtement un nouvel habillage – qu’on obtenait au passage – il allait également falloir (ré)apprendre à jouer.
Battle Chess II : et si on jouait aux échecs autrement ?
Pour ceux qui ne connaîtraient pas les règles du xiangqi (à ne pas confondre avec le shōgi, communément considéré comme « les échecs japonais », dont il se rapproche), le manuel du jeu sera fort heureusement l’occasion de découvrir les subtilités d’une activité qui pourra au premier abord paraître fort déroutante – en particulier aux yeux des connaisseurs des échecs occidentaux.
Une fois ses marques prises, on préfèrera la version en 2D, plus lisible
On ne se lancera pas ici dans un déroulé des très nombreuses différences existant entre les deux jeux, d’autant que les règles sont dorénavant facilement trouvables en ligne, mais on mentionnera quand même le fait que dans le xiangqi, les unités se déplacent sur des lignes et non dans des cases, que le roi ou général y est cantonné à un espace constitué d’un carré et de ses deux diagonales (le « palais »), que les pions n’ont accès à toute leur mobilité qu’à partir de l’instant où ils ont franchi la « rivière » – une ligne horizontale séparant les deux moitiés du plateau – ou encore que les cavaliers, s’ils bougent de la même façon que dans le jeu occidental, n’ont pas ici la capacité d’« enjamber » les autres unités. Surtout, les débuts de partie tendent à être nettement plus offensifs et nettement moins cantonnés au déploiement des troupes, notamment grâce à une unité redoutable lors des premières minutes : le canon. Celui-ci présente en effet une particularité notable : celle de pouvoir toucher une unité situé sur la même ligne ou la même colonne, comme une tour, mais à la condition qu’une autre unité se trouve entre sa cible et lui-même. Cette petite spécificité introduit un vaste aspect tactique qui oblige à penser très soigneusement ses premiers mouvements, et représentera sans doute un de vos premiers axes de réflexion au moment de réfléchir à vos ouvertures.
Le plateau de jeu tend à se clairsemer beaucoup plus vite que dans les échecs occidentaux
Mais au fait, nous sommes toujours dans un Battle Chess : que sont devenues les fameuses animations qui avaient fait la renommée du premier épisode ? Naturellement, elles sont toujours de la partie, et elles mettront ici en scène une imagerie chinoise peuplée de dragons et d’éléphants (un autre nom possible d’une des unités du jeu, autrement traduit par « Ministre ») avec des petites animations qui s’efforcent d’être divertissantes mais y parviennent rarement avec trente-cinq ans de recul.
Ça sent la fin, pour le général bleu…
On appréciera néanmoins l’ambiance globale qui se dégage du plateau et de l’activité qui y règne, avec des unités globalement bien reconnaissables (sauf pour les cavaliers qui, de dos, ressemblent un peu trop aux soldats), et surtout le fait que cette représentation aide à égayer des premières parties qui auraient autrement été un peu intimidantes en déplaçant des unités rendues trop abstraites par de simples symboles. Avec le temps, on se hâtera de basculer vers le plateau en 2D, plus lisible, pour s’adonner à des parties rendu plus rapides par la suppression de toutes ces animations qui perdent rapidement de leur charme. Toutes les options du premier épisode sont toujours là, à commencer par les neuf niveaux de difficulté, même si l’équilibrage est un peu plus consistant ici (l’ordinateur est moins redoutable dès les premiers niveaux) et surtout, le fait que le jeu soit pensé dès le départ pour un 286 ou supérieur fait qu’il est ici très aisé de déployer toute la puissance du processeur et de profiter ainsi de temps de réflexion infiniment plus courts (pour ne pas dire inexistants, la plupart du temps) que ce qui avait été observé sur Amiga deux ans plus tôt.
Les animations de combat sont toujours là pour égayer les parties, mais surprennent rarement
Ironiquement, l’une des raisons les plus probables pour lesquelles ce deuxième opus n’aura pas rencontré le succès du premier – à savoir le fait de proposer un jeu nettement moins connu en occident que les échecs « traditionnels » – est précisément celle qui rend le titre attractif aujourd’hui, à une ère où le xiangqi ne court toujours pas les rues au sein de la production vidéoludique occidentale (même si on peut facilement trouver quelques programmes vendus à bas prix sur les plateformes de vente en ligne).
Les simples soldats sont plus polyvalents que dans les échecs occidentaux, mais pas question ici d’en faire des reines.
Pour le coup, profiter d’un plateau animé chargé de donner un peu de vie aux unités le temps de briser la glace est plutôt une bonne chose, et aide à faire passer la pilule des inévitables premières raclées qu’on est voué à subir le temps d’assimiler les nombreuses subtilités du jeu, à commencer par le fait que de nombreuses unités n’ont pas du tout la même valeur selon qu’on soit en début ou en fin de partie. Pas de « reine » surpuissante pour faire basculer le cours d’une rencontre serrée ici, et beaucoup d’unités qu’il peut être profitable de sacrifier à la première occasion – notamment au sein de votre « palais » – afin de gagner en liberté de mouvement. C’est vraiment toute une philosophie à découvrir, avec des parties qui débutent régulièrement sur les chapeaux de roue et des escarmouches sur tous les fronts là où les échecs occidentaux nous avaient plutôt habitués à une longue mise en place et à une bataille focalisée sur les cases centrales. Une très bonne façon d’étendre ses horizons et de découvrir un jeu encore trop méconnu hors d’Asie, et un bon moyen de se trouver un nouveau dada qui soit à la fois vaguement familier et réellement dépaysant. À tout prendre, c’est certainement ce qu’on pouvait espérer trouver de plus original au sein des très nombreux jeux d’échecs du siècle dernier, et on remerciera Interplay d’avoir accepté de prendre ce risque. Parfois, on trouve du neuf même dans le vieux, et ça n’est pas plus mal.
Vidéo – Cinq minutes de jeu :
NOTE FINALE : 16/20
Observer des pièces de jeu d'échecs gigoter et se crêper le chignon sur un plateau virtuel était certes une idée qui avait su faire mouche en 1988, mais qui restait fondamentalement un fusil à un coup – dès lors, on était en droit de se demander quel pouvait être l'intérêt réel d'un Battle Chess II... jusqu'à ce qu'on réalise que celui-ci aura fait le pari plutôt culotté d'être un des rares titres occidentaux de la période – si ce n'est le seul – à permettre de jouer aux échecs chinois. C'est d'ailleurs là son principal point fort, bien au-delà d'animations peu imaginatives qui perdront l'essentiel de leur valeur divertissante dès l'instant où on les aura vues une fois. Passé une heure ou deux de curiosité polie, c'est en effet bel et bien sur le plateau en 2D qu'on passera l'essentiel de son temps, à chercher à maîtriser les subtilités de règles dépaysantes pour les habitués des échecs « traditionnels ». Évidemment, ce qui était encore profondément original en 1990 l'est nettement moins à l'ère où les alternatives sont bien plus nombreuses mais on trouvera ici une manière comme une autre de s'initier de façon visuelle à un jeu qui mérite d'être mieux connu.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des animations qui perdent l'essentiel de leur intérêt au bout de dix minutes – Pas de didacticiel ni d'explications des règles en-dehors du manuel
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Chess II sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Un bon logiciel, mais réservé aux amateurs du genre. »
Dany Boolauck, Tilt n°84, décembre 1990, 16/20
Version Amiga
Développeur : Silicon & Synapse, Inc.
Éditeur : Interplay Productions, Inc. (Amérique du Nord) – Electronic Arts, Inc. (Europe)
Date de sortie : Août 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle, en local ou via modem)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko* Mode graphique supporté : OCS/ECS *1Mo requis pour bénéficier de la musique en jeu
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Signe des temps : Alors que Battle Chess avait été développé, sur Amiga puis porté sur une pléthore de systèmes, Battle Chess II, pour sa part, aura été développé sur PC… et uniquement porté sur Amiga, ce qui tend à indiquer que ce deuxième opus n’aura clairement pas rencontré le même succès que le premier. Développée par la jeune équipe de Silicon & Synapse (futur Blizzard Entertainment), cette version du jeu doit composer avec les quelques faiblesses que présentait désormais la machine de Commodore face à celle d’IBM – ce qu’elle fait plutôt bien. Graphiquement, on perd bien quelques couleurs comparé au mode VGA, mais on ne peut pas franchement dire que la différence saute aux yeux. La vraie bonne surprise, c’est surtout que les temps de réflexion de l’ordinateur demeurent globalement extrêmement courts, y compris dans les modes de difficulté les plus élevés – ne pas avoir à aller prendre un café entre chaque coup dès les premiers échanges est quand même un progrès notable comparé au premier épisode où ladite attente ne servait d’ailleurs pas à grand chose, le niveau de l’intelligence artificielle restant globalement le même quoi qu’il arrive.
Graphiquement, le travail est fait – le reste dépendra surtout de la puissance de votre configuration
NOTE FINALE : 15,5/20
Un tout petit peu moins beau que sur la machine d’IBM, Battle Chess II : Chinese Chess sur Amiga n’en reste pas moins une version qui n’a pas grand chose à envier à celle parue sur PC, et un moyen comme un autre de découvrir les échecs chinois dans la joie et la bonne humeur.
Développeurs : Imagexcel – Gray Matter Inc. Éditeur : Mindscape International Ltd. Titre alternatif :Superbike Simulator Testé sur :Amiga – Atari ST
Version Amiga
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko* Mode graphique supporté : OCS/ECS Système de protection de copie par consultation du manuel *Optimisé pour les modèles à 1Mo
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Y’a t-il un sociologue dans la salle ? Ou bien un historien vidéoludique, ou peut-être encore mieux : un développeur ou un éditeur qui daigne se dévouer pour offrir la réponse à un grand mystère : pourquoi les jeux de course, genre représenté sans interruption pratiquement depuis les débuts de l’informatique, comptent-ils si peu de titres asseyant le joueur sur le siège d’une moto plutôt que dans le baquet d’une F1 ou dans l’habitacle d’une voiture de sport ? Un grand mystère qui se manifestait déjà dans les années 80, où le très sympathique Hang-On était pour ainsi dire le seul logiciel notable en la matière – avec sa non moins sympathique suite, Super Hang-On, et en mettant de côté des expériences à la Excitebike qui reposaient moins sur la vitesse que sur la course d’obstacle.
Les options de configuration sont nombreuses, et on ne s’en plaindra pas
Cette anomalie aura commencé à provoquer quelques timides réactions, dont certaines dont on se serait volontiers passé, mais l’un des tout premiers – et rares – programmes à tirer son épingle en la matière aura été l’œuvre d’une équipe impliquant notamment un certain Christopher Gray, fondateur du studio canadien Gray Matter, et que les lecteurs les plus érudits connaîtront surtout comme étant le créateur d’un certain Boulder Dash. Aura-t-il fait preuve du même talent au moment de livrer au monde ébahi The Ultimate Ride ? Il aura au moins eu une idée a priori évidente mais encore très rarement matérialisée à l’époque : asseoir le joueur en vue subjective directement derrière le guidon plutôt que de le placer aux commandes d’une caméra cinq mètres derrière le véhicule.
Goûtez enfin aux sensations de la course sur deux roues !
The Ultimate Ride est tout entier assis – blague volontaire – sur cet apport réaliste, ce qui ne veut pas dire qu’il s’agisse d’une simulation. Dans les faits, même si le titre s’efforce de bâtir quelques passerelles vers la technicité, en offrant par exemple au joueur le choix de sa moto parmi six modèles, plusieurs types de pneus et le traditionnel choix entre transmission manuelle ou automatique, il se montre largement permissif en termes de conduite, puisque le joueur sera autorisé à se planter en beauté à plusieurs reprises pour repartir quasi-immédiatement et sans une égratignure depuis le centre de la route – une philosophie préfigurant déjà celle d’un jeu comme Vroom, auquel ce titre peut faire penser par bien des aspects.
Quitte à faire le malin sur les routes, évitez de vous planter juste devant une voiture de police
En termes de contenu, le programme fait le choix d’une certaine variété, puisque qu’il offre d’un côté six courses sur circuits (avec séance préliminaire facultative de qualifications) et de l’autre six courses sur route, sur le modèle du rallye, au milieu de la circulation. L’aspect le plus intéressant au moment de choisir son poison, néanmoins, s’avère être la présence de pas moins de sept jauges réglées par des curseurs allant de un à cinquante, et qui permettront au joueur de paramétrer l’expérience de son choix en fonction de plusieurs critères : difficulté (la compétence des concurrents), mais aussi climat (les chances de courir sous la pluie), nombre de tours, et même de décider à quel point les reliefs et les différentes courbes seront marquées. On remarquera d’ailleurs que le titre ne cherche pas à se faire passer pour plus sérieux qu’il n’est, puisque parmi les dangers qu’il est possible de faire figurer sur la route, le joueur ne rencontrera pas des taches d’huile ou des nids de poule, mais plutôt des kangourous en Australie ou même des monstres façon Godzilla au Japon ! Cerise sur le gâteau : il est possible de jouer à deux simultanément, en écran splitté, ce qui était encore très loin d’être une option évidente en 1990.
Les sensations de vitesse sont correctes, voire bonnes sur une machine appropriée, mais les décors sont vraiment trop dépouillés
Tout cela est bien beau, mais un jeu de course repose principalement sur la qualité de sa jouabilité et sur les sensations qu’il offre une fois au volant – ou, en l’occurrence, au guidon – de son véhicule. En termes de réalisation, The Ultimate Ride fait le choix de la 3D pour la piste et les décors et de la 2D pour les obstacles, les éléments de bas-côté et les concurrents – exactement comme le ferait Vroom un an plus tard, encore une fois.
On ne met pas très longtemps à aller faire la fête au sommet du podium
Quitte à rester dans la comparaison entre les deux programmes, on notera que les décors sont ici particulièrement dépouillés et que la sensation de vitesse est nettement moins convaincante que dans le titre de Lankhor, la faute notamment à un framerate qui ne dépasse que trop rarement les dix images par secondes – ce qui a, comme on peut l’imaginer, un impact évident sur la réactivité du véhicule. Ironiquement, c’est sur des modèles qui n’existaient pas au moment de la sortie du jeu – à savoir Amiga 1200 et supérieur – que le programme exprime son plein potentiel, affichant alors un framerate plus stable et une animation bien plus fluide, s’approchant ainsi enfin (mais sans l’atteindre) de la vitesse que Vroom, lui, serait capable d’afficher sur une configuration moins puissante. Un bon moyen de réaliser, au passage, l’exploit technique qu’aura représenté le jeu de course français à sa sortie (Cocorico !). Toujours est-il que les joueurs découvrant le jeu sur un ordinateur de type Amiga 1000/500/600 pourront retirer un demi-point à la note finale, le jeu perdant alors en maniement autant qu’en nervosité.
La possibilité d’affronter un ami sur le même écran constitue un vrai plus
En revanche, dans les bonnes conditions, on sera très heureux de voir le monde basculer à chaque virage tandis que notre véhicule et la vue se penchent de concert, et on prendra d’autant plus vite ses marques que le jeu se montre, comme on l’a vu, très permissif et que même avec la difficulté bloquée à fond, les concurrents ne représentent pas exactement des adversaires invincibles.
Dépasser un adversaire ne demande pas des trésors de stratégie
On pourra d’ailleurs regretter que le titre se montre un peu trop simple en la matière, car il ne faudra clairement pas des semaines – ni même des jours – pour parvenir à terminer en tête sans avoir à prendre de risques inconsidérés, et les joueurs les plus compétitifs passeront sans doute l’essentiel de leur temps de jeu à parcourir les diverses pistes avec tous les potards de difficulté à fond pour trouver un semblant de défi dans un jeu dont ils risqueront autrement de venir très vite à bout – sauf à avoir un ami à affronter histoire de leur offrir un opposant à leur mesure, naturellement.
On peut afficher les caractéristiques des véhicules, mais sincèrement, les sensations sont très semblables d’un véhicule à l’autre
Après quelques gadins , le temps de comprendre les subtilités de la conduite, on ne met vraiment pas longtemps à se sentir sur sa moto comme dans un fauteuil et à enchaîner les records dans un logiciel qui soutient largement la comparaison avec Super Hang-On sur la même machine, et qui aurait sans doute davantage marqué les esprits s’il avait bénéficié d’encore un peu plus de contenu, d’adversaires un peu plus hargneux, et surtout d’une sensation de vitesse qui n’ait pas à attendre deux ans et la sortie de la génération suivante d’Amiga pour révéler son plein potentiel. En l’état, on a quand même de quoi passer un très bon moment sur le programme – particulièrement à deux – même si on risque d’en venir trop vite à bout. Les amateurs de simulation, pour leur part, vraisemblablement déçu par le peu d’impact du choix des pneus, par l’absence de réglages techniques ou de fonctions évidentes comme l’arrêt aux stands, se dirigeront sans doute directement vers No Second Prize – mais que cela ne dissuade pas les amateurs de courses typées arcade de laisser sa chance au jeu. En la matière, le titre a encore (hélas) trop peu de concurrents.
Vidéo – Course : Donington England :
NOTE FINALE : 13,5/20
Au rang des (trop) rares jeux de course à vous placer au guidon d'une moto, The Ultimate Ride parvient à tirer son épingle du jeu en situant la caméra au niveau du siège du pilote et en offrant une pléthore d'options de configurations qui aident le jouer à se façonner une expérience sur mesure sans jamais complexifier inutilement une conduite qui reste très arcade. Le résultat, s'il n'est ni aussi beau ni aussi fluide que ce que proposerait Vroom au volant d'une F1 quelques mois plus tard (surtout si vous jouez sur un modèle en-dessous de l'Amiga 1200), n'en est pas moins assez technique pour être amusant tout en restant assez accessible pour se dompter en quelques parties. Grâce à la possibilité de participer à des courses sur route et surtout à la présence d'un très sympathique mode deux joueurs en écran splitté, le titre de Gray Matter et Imagexcel reste une expérience à découvrir pour ceux qui chercheraient une approche plus directe et moins exigeante que celle d'une simulation à la No Second Prize. Sans doute pas un jeu sur lequel engloutir des dizaines d'heures, mais une bonne surprise néanmoins.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un framerate décevant en dessous de l'Amiga 1200 – Des décors très pauvres – Des sensations de courses qui différent assez peu d'une moto et d'une piste à l'autre – Aucune gestion des arrêts aux stands
Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Ultimate Ride sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Première simulation de moto à mettre le motard à sa vraie place, c’est à dire au guidon, Ultimate Ride donne presque l’impression de ressentir les cahots de la route. Des options à foison haussent le jeu à un niveau d’intérêt exceptionnel. »
Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20
Version Atari ST
Développeurs : Imagexcel – Gray Matter Inc.
Éditeur : Mindscape International Ltd.
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko* Système de protection de copie par consultation du manuel *Optimisé pour les modèles à 1Mo
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme 99% de ce qui sortait sur Amiga en 1990, The Ultimate Ride aura été développé en parallèle sur Atari ST, pour une sortie simultanée. Sans surprise, le contenu et la réalisation sont globalement identiques à ce qui a été observé sur la machine de Commodore, même si le rendu du thème musical de l’écran-titre est légèrement inférieur (mais vous devriez vous en remettre). La grande inconnue – mais elle est de taille – restait l’épineuse question du framerate, tant celui-ci pouvait se montrer handicapant sur Amiga 500 ; on dira qu’il est ici un peu meilleur pendant l’essentiel de la course, sauf lorsque de nombreux sprites sont présents à l’écran (au hasard, sur la ligne de départ), où il peut se montrer relativement problématique. Dans l’ensemble, le jeu reste jouable, mais il restera toujours plus agréable à découvrir sur un Amiga puissant.
Ça fonctionne encore bien, mais le framerate connait quelques gros creux lorsqu’il y a du monde à l’écran
NOTE FINALE : 13/20
The Ultimate Ride sur Atari ST offre une prestation globalement très proche de celle qu’on peut observer sur un Amiga 500 ou 600 – ce qui signifie que le framerate s’avère parfois problématique, notamment lorsqu’il y a plusieurs concurrents à l’écran. Si l’expérience demeure jouable et agréable, les joueurs les plus exigeants – ou les mieux équipés – préfèreront sans doute découvrir le jeu sur un Amiga 1200.
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Écran couleur requis Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Il arrive régulièrement au cours de l’existence d’un éditeur – au hasard, à une période où les ventes stagnent – de céder à la tentation de tenter quelque chose de « différent ». Un prise de risque étant par définition un acte, eh bien, risqué, on peut comprendre que les commerciaux hésitent régulièrement à franchir le pas, mais il peut également arriver que l’émergence d’un OVNI à la Tetris vienne rebattre momentanément les cartes et indiquer l’existence d’un marché massif auquel personne n’avait cru jusque là et qui n’attend que d’aller y puiser.
Les angles peuvent être particulièrement délicats à négocier, surtout si vous êtes trop près – ou trop loin
Naturellement, s’aventurer à la marge des formules éprouvées peut également signifier s’éloigner des attentes de la majorité des joueurs pour ne capter qu’une clientèle elle aussi marginale et se retrouver au final avec un public de niche ne correspondant pas exactement au marché massif susmentionné. Mine de rien, ce que je viens de décrire semble parfaitement résumer le sort de l’éphémère collection « cristal » d’Infogrames, qui aura entrepris de réunir des logiciels aux concepts « alternatifs » dans des packagings reconnaissables à leur suite de termes new age en deux langues sur fond blanc avant de disparaître presque aussi vite qu’elle était apparue, au bout de trois jeux et en moins d’un an. Un destin d’autant plus cruel que la collection aura bel et bien eu le mérite de rassembler des titres originaux ne ressemblant souvent à rien d’autre, et qui aurait certainement pu fédérer une réelle communauté en lui laissant davantage de temps. Au moins aura-t-elle eu le temps de nous laisser découvrir des curiosités comme The Light Corridor, un de ces programmes qui nous fait nous demander pourquoi personne n’y avait pensé avant.
Apercevrez-vous la lumière au bout du tunnel ?
Comment décrire le concept du logiciel imaginé par Vincent Pourieux et son équipe ? Pour faire vite : imaginez un casse-briques en 3D. Dans le détail, cette description n’est pas tout à fait exacte, et pour cause : il n’y a pas vraiment de « briques » à proprement parler.
Pour optimiser votre façon de jouer, vous allez devoir apprendre à réellement tirer parti de la troisième dimension
En fait, le but est bel et bien de pousser une bille à l’aide d’une raquette, mais l’objectif est davantage d’éviter les obstacles que d’espérer les détruire, et ce afin de mener votre précieuse bille jusqu’au bout du long, très long corridor du titre puisque celui-ci s’étend sans interruption sur pas moins de cinquante niveaux… lesquels sont introduits, sans transition, directement dans le décor en lui-même, tout comme le sera l’immanquable mot de passe de chacun d’entre eux qui sera présenté juste après. Un aspect fluide et sans temps morts qui correspond parfaitement à la philosophie du jeu, mais qui présente également une limite évidente : celle d’être obligé de mettre le jeu en pause pour noter le code, sauf à avoir une grande confiance en sa mémoire (le code n’étant, après tout, composé que de quatre chiffres). L’aspect le plus original reste l’avancée en elle-même, puisque celle-ci n’est pas imposée : c’est bien le joueur qui choisit à quelle vitesse avance la raquette – et avec elle la caméra – quitte à perdre la bille de vue pendant de longues secondes. Mieux vaut bien réfléchir, cependant, car il est impossible de reculer, et si vous allez coincer votre raquette trop près d’un obstacle et restreindre par là même votre marge de manœuvre, le seul recours sera souvent de perdre une bille et donc une vie avec elle.
Ça a l’air simple, mais on verra bien de temps combien de temps vous survivez !
On avance donc aux aguets, en explorateur, essayant à la fois de ne jamais être trop loin de notre précieuse bille pour éviter de se faire surprendre par son inévitable retour sans pour autant être trop près et se priver de l’espace nécessaire à manœuvrer efficacement.
Une raquette additionnelle ne se refuse pas, mais on peut rapidement perdre trace de laquelle on contrôle
On trouve en chemin quantité de bonus classiques (bille supplémentaire, « colle » sur la raquette, voire une raquette additionnelle venant tourner autour de la nôtre) ainsi que de malus (commandes inversées, raquette plus petite), sans oublier des obstacles de plus en plus vicieux : murs mobiles, éléments suivant votre raquette, porte à ouvrir en allant chercher un interrupteur, mur à détruire en un temps donné… le tout avec la pression d’un temps limité qui n’impactera fort heureusement que votre score – qui reste le seul réel objectif au-delà de la fierté d’être parvenu à vaincre les cinquante segments du jeu. Le tout est présenté dans une 3D simple mais surtout parfaitement lisible, avec un color swap tous les cinq niveaux histoire de varier un peu l’ambiance. Simple, efficace, et rapidement assez redoutable, car vous n’apercevrez plus votre bille au-delà de quelques mètres, ce qui demandera donc des réflexes constants pour éviter de vous faire surprendre par l’un de ses rebonds.
Ne laissez pas passer les quelques bonus, ils pourront drastiquement augmenter votre espérance de vie
Le gameplay est d’une telle évidence et d’une telle limpidité qu’on peut presque se demander pourquoi il n’a pas fait école – l’explication étant peut-être que tout était déjà là et qu’il ne restait pas grand chose à y apporter. Oh, certes, on aurait pu imaginer davantage de bonus, des pièges encore plus retors, des ennemis pour vous placer des bâtons dans les roues, voire même des coudes dans ce fameux couloir – mais c’est aussi dans sa parfaite accessibilité que le titre est le plus intéressant, et on lui saura gré d’avoir la bonne idée d’inclure un éditeur de niveaux histoire d’offrir l’occasion d’augmenter encore un peu le contenu.
Vous n’en avez pas eu assez ? Faites donc vos propres niveaux !
C’est, dans l’esprit, un jeu d’arcade pensé pour des parties de cinq minutes ; pas forcément le type de programme sur lequel on va enchaîner des séances de deux heures, mais un de ceux qui ne nous donne aucune envie de lâcher notre souris ou notre joystick avant la fin de la partie. C’est également ce qui le rend difficile à noter – c’est un concept auquel on accroche ou pas, et il n’y a pas vraiment de milieu – mais il mérite quoi qu’il arrive une chance ne fut-ce que par l’originalité qu’il parvient encore à représenter plus de trente ans après sa sortie. Un parfait avatar du programme capable de nous agripper cinq minutes avant de passer à autre chose et d’y revenir avec plaisir tant il peut être bêtement addictif, soit exactement le genre de logiciel qu’on est heureux de dénicher aujourd’hui. De quoi regretter le destin de cette décidément trop éphémère collection « cristal » : on aurait sans doute aimé en découvrir beaucoup d’autres, de ces jeux qui ne ressemblaient à rien.
Vidéo – Une partie lambda :
NOTE FINALE : 16/20
La grande force de The Light Corridor, c'est de porter un principe simple qui a le mérite d'être resté original après plus de trente ans : celui d'un casse-briques en 3D. Dans les faits, il s'agit moins de casser des briques – d'ailleurs, il n'y en a pas – que de réussir à progresser au fil d'un couloir d'obstacles long de cinquante niveaux, la clef étant autant l'adresse et l'anticipation que la capacité à avancer à la bonne vitesse, et jamais trop loin. La compréhension est immédiate, les mécanismes simples comme bonjour, et le plaisir qu'on en retire a quelque chose de viscéral : c'est, en un sens, un véritable héritier aux jeux d'arcade de la fin des années 70. Il en résulte un aspect fatalement redondant qui fait que la durée de vie du logiciel correspondra à celle de la patience du joueur, mais ça n'empêche pas le gameplay d'être assez efficace pour qu'on puisse relancer une partie de temps à autre avec un plaisir égal. Le genre d'OVNI qui nous fait regretter l'audace du siècle dernier.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des mots de passe à noter dans le feu de l'action – Des changements de décor qui se limitent à des color swaps – Un certain manque de profondeur dans les mécanismes qui empêche la mise en place de réelles stratégies
Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Light Corridor sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Casse-briques et casse-tête à la fois, The Light Corridor est une réussite sur le plan technique comme sur le plan ludique. Un programme vraiment titanesque ! […] Un superbe casse-briques qui renouvelle vraiment le genre. »
Jacques Harbonn, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20
Version Amiga
Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko Mode graphique supporté : OCS/ECS Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme souvent avec les jeux développés conjointement sur Atari ST et sur Amiga au tout début des années 90, The Light Corridor fournit sur la machine de Commodore une prestation identique à 99% à celle qui avait été observée sur celle d’Atari. Graphiquement, les deux versions sont pour ainsi dire identiques, et sur le plan sonore, on gagne bien quelques minuscules fioritures en termes de bruitages, mais le rendu est autrement extrêmement proche. Tant qu’à faire, le jeu est peut-être un chouïa plus fluide sur Amiga, mais la simple présence d’un « peut-être » dans cette phrase tend à indiquer que cela reste très subtil. Toujours est-il que l’expérience de jeu, elle, n’a pas changé d’un iota et qu’on peut donc toujours prendre exactement le même plaisir à conduire cette bille jusqu’au terme de son trajet, et c’est bien là tout ce qui compte.
Rien n’a changé, et au fond, tant mieux
NOTE FINALE : 16/20
The Light Corridor dévoile sur Amiga exactement les mêmes qualités que sur Atari ST, avec même quelques minuscules finitions supplémentaires du côté du son. Le concept, de son côté, est toujours aussi rafraîchissant et toujours aussi sympathique à explorer. Que du bonheur.
Version PC (DOS)
Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, français* *Seul le menu de configuration offre le choix de la langue. Le jeu en lui-même est en anglais
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko Modes graphiques supporté : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Tandy/PCjr Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Tout comme les ordinateurs 8 bits, le PC représentait encore une sorte de zone floue au moment d’héberger des portages de jeux développés pour les autres ordinateurs 16/32 bits, au début des années 90 – en particulier en Europe, où les incessantes nouveautés technologiques mettaient souvent un peu plus de temps à arriver. Fort heureusement, The Light Corridor tire parti des deux éléments qu’on espérait le plus : le VGA et les cartes sons (uniquement l’AdLib, mais on s’en remettra). Traduit en clair, le jeu est toujours en seize couleurs, mais il est graphiquement identique aux versions Amiga et Atari ST, et il tourne de manière d’autant plus fluide que sa vitesse est capée et qu’il n’est par conséquent pas nécessaire de tâtonner une demi-heure sous DOSBox pour espérer le faire avancer à un rythme acceptable. La jouabilité n’a pas changé d’un iota, pas plus que le contenu, et si la réalisation sonore a un tout petit peu moins de peps que sur ST ou sur Amiga, on reste là encore dans le domaine de l’anecdotique. Bref, c’est le jeu qu’on était venu chercher, et c’est tant mieux.
Les teintes choisies ne sont pas absolument les mêmes que sur ST ou Amiga, la belle affaire
NOTE FINALE : 16/20
Sortie de route évitée pour The Light Corridor sur PC qui parvient à offrir les graphismes, la réalisations sonores et la jouabilité qu’on était en droit d’espérer, et ce quelle que soit la configuration. Il va être temps de montrer à ce couloir qui est le plus fort
Version Amstrad CPC
Développeur : New Frontier
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Si on avait objectivement peu de raisons de s’inquiéter en découvrant The Light Corridor sur Amiga, les choses étaient un peu différentes au moment de s’attaquer aux versions 8 bits du jeu – et de se demander comment elles allaient gérer une 3D pour laquelle elles n’étaient pas exactement les mieux équipées. Pour l’occasion, Infogrames aura laissé les commandes à une équipe espagnole du nom de New Frontier spécialisée dans les portages sur MSX ou ZX Spectrum, et celle-ci s’en sera merveilleusement tirée. Première bonne surprise : tout le contenu est là, y compris l’éditeur de niveau (qui nécessitera une disquette vierge pour espérer sauvegarder vos créations). Deuxième bonne surprise : sans être aussi fluide que sur les machines 16/32 bits, le défilement n’en est pas moins impeccable et la lisibilité parfaite. Le color swap d’un niveau à un autre a été conservé, la musique est toujours présente, et la jouabilité a conservé toutes ses sensations – que demander de plus ? Alors certes, il n’y a apriori plus qu’une seule vitesse pour la raquette/caméra, mais c’est vraiment le seul sacrifice observé pour un portage qui accomplit parfaitement sa mission. Tant mieux.
Ça bouge bien et on comprend tout ce qui se passe : la base
NOTE FINALE : 15,5/20
On pourra remercier New Frontier d’avoir su faire le travail : The Light Corridor sur Amstrad CPC offre exactement l’expérience qu’on était en droit d’attendre en préservant tout ce qui faisait la force de la version originale. C’est un petit peu moins détaillé et un chouïa moins fluide, mais sincèrement, que ça n’empêche aucun possesseur de la machine d’Amstrad de découvrir ce titre assez unique en son genre.
Les avis de l’époque :
« Bien sûr, cette version CPC de The Light Corridor ne peut en aucun cas concurrencer les jeux ST ou PC. En revanche, puisque c’est surtout la stratégie qui donne du piment à cette partie, l’Amstrad se sort relativement bien de cette adaptation. »
Olivier Hautefeuille, Tilt n°89, avril 1991, 14/20
Version MSX
Développeur : New Frontier
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette testée sur MSX
Configuration minimale : Système : MSX 1 – RAM : 64ko Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Après avoir été rassurés par la version CPC de The Light Corridor, on retrouve la même équipe aux commandes pour la version MSX – qui risque de nous annoncer au passage, selon la grande tradition des portages à l’européenne, ce à quoi va ressembler la version ZX Spectrum. Bonne(s) nouvelle(s) : le contenu n’a pas bougé, la défilement est resté relativement fluide, et même si la fenêtre de jeu à proprement parler n’affiche plus que deux couleurs pendant la partie, le tout est toujours aussi lisible et la musique a eu la bonne idée de ne pas en profiter lâchement pour se faire la malle. Autant dire que si le jeu est moins beau et un tout petit peu moins réactif que sur ST ou sur Amiga, l’expérience reste très bonne et c’est bien là tout ce qu’on lui demande.
Le bleu a laissé place à du mauve, et on a perdu quelques nuances de couleur, mais l’essentiel est toujours là
NOTE FINALE : 15/20
Sacrifices minimaux – et tout à fait négligeables – pour The Light Corridor sur MSX. Certes, il est un peu dommage que la fenêtre de jeu soit désormais essentiellement monochrome, mais la jouabilité et le contenu sont à leur place et c’est tout ce qu’on en attendait. Un titre à découvrir, sur MSX ou ailleurs.
Version ZX Spectrum
Développeur : New Frontier
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette, microdrive
Contrôleurs : Clavier, joysticks Cursor, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko* Système de sauvegarde par mot de passe *Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Pour finir, le ZX Spectrum était encore un ordinateur très populaire au début des années 90 (en particulier outre-Manche), et quitte à servir les ordinateurs 8 bits, on ne sera pas surpris de voir The Light Corridor y faire une étape à son tour. Tuons d’emblée le suspense : comme on pouvait s’y attendre, ce portage est un calque de la version parue sur MSX, au détail près que la musique ne se prolonge pas au-delà de l’écran-titre et qu’il ne faudra par conséquent pas compter sur elle pour vous accompagner pendant la partie. Pour le reste, la réalisation est identique (comprendre : fenêtre de jeu monochrome), la jouabilité fait toujours mouche et toutes les options sont toujours présentes. Pas de quoi se plaindre, donc.
Bon, ce n’est pas l’orgie graphique, mais tant que ça bouge bien…
NOTE FINALE : 14,5/20
Prenez la version MSX de The Light Corridor, coupez la musique une fois la partie lancée, et vous obtiendrez cette version ZX Spectrum qui doit une nouvelle fois composer avec une fenêtre de jeu monochrome mais qui offre en contrepartie la jouabilité et la réactivité qu’on était en droit d’attendre. Un bon compromis, tout compte fait.
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko* *1Mo nécessaire pour avoir accès à tout le contenu du jeu
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
On aura déjà eu l’occasion en ces pages d’évoquer ce qu’on aime parfois désigner, faute d’un meilleur terme, par l’appellation « french touch » : cette période où la production française savait se faire remarquer précisément par sa capacité à sortir des clous (et du lot). De Captain Blood à Another World en passant par Alone in the Dark, on pourrait dire que ce mini-âge d’or de l’exception française aura principalement gravité autour de l’aventure, et plus spécifiquement autour de la narration et de la façon d’impliquer le joueur dans une expérience vidéoludique où il pouvait être spectateur autant qu’acteur – après tout, n’attribue-t-on pas régulièrement la paternité du concept de « scènes cinématiques » à Delphine Software (ce qui n’est d’ailleurs pas complètement exact, mais passons) ?
Ne vous attendez pas à ce qu’André Panza accepte de vous affronter d’entrée : il vous faudra d’abord vous frayer un chemin jusqu’à lui
En revanche, sorti de l’aventure en elle-même, la « patte » à la française a souvent eu plus de mal à laisser sa trace. Dans le domaine ô combien spécifique du jeu de combat, on pourrait même arrêter sa contribution à un seul et unique titre marquant : ce jour où Loriciels, alors encore orthographié avec un « s » à la fin, aura décidé de développer un jeu de kickboxing avec rien de moins que la participation du champion en titre de la discipline, André Panza. Nonuple champion du monde de trois disciplines de combat différentes, il se murmure même que le français, qui n’a connu que cinq défaites en cent-quatorze combats, pourrait être un des plus grands champions de sa génération et d’un sport auquel il a su imposer sa « patte », lui aussi – mais ne le lui faites pas dire, car il a su rester modeste, et en matière de « patte » il faut donc s’attendre à ce que Panza nie. Toujours est-il qu’en 1990, Panza Kick Boxing aura pris tout le monde un peu par surprise, autant par son sujet – les jeux de kickboxing ne couraient alors pas exactement les rues, ils n’ont d’ailleurs pas franchement proliféré depuis lors – que par sa redoutable efficacité.
En route vers la gloire (ou vers l’hôpital) !
Il appartient d’ailleurs sans doute dès maintenant de se replacer fin 1990, c’est à dire dans une ère qu’on pourra qualifier de « pré-Street Fighter II ». Cette précision a son importance, car avant que le titre de Capcom ne vienne dynamiter, redéfinir et propulser le genre vers de nouvelles et plus hautes sphères, « jeu de combat » était une appellation qui ne recouvrait fondamentalement et à de très rares exceptions près qu’une seule notion depuis ses débuts avec Karate Champ en 1984 : une simulation d’arts martiaux. Dans le genre, une forme d’apogée avait été atteinte dès 1989 avec l’impressionnant Budokan, mais les joueurs s’intéressant moins à l’aspect technique du genre qu’à son aspect fun se souviendront peut-être plus volontiers d’IK+, voire, pour évoquer une des rares exceptions susmentionnées, de Barbarian.
La possibilité de configurer ses coups risque de rapidement devenir centrale
Panza Kick Boxing, pour sa part, va clairement chercher du côté de la simulation, comme on va avoir l’occasion de le voir un peu plus bas. Pour ce qui est du contenu, à première vue, pas de chichis : huit combattants à vaincre, un seul véritable mode de jeu, le reste se décidera à la force des pieds et des poings – et du joystick. Cependant, histoire d’ajouter un peu d’épaisseur – et de durée de vie – au concept, le programme a la bonne idée d’inclure un mode « entraînement » qui permettra, à forces d’efforts, de faire progresser les trois caractéristiques qui définissent votre boxeur : la force, la résistance et les réflexes. Car autant s’y faire : aller défier André Panza himself, doté d’un score de 99% dans toutes les caractéristiques, sans avoir développé un peu votre personnage risque de se montrer aussi vain que suicidaire – parvenir à arriver jusqu’à lui dans ces conditions constituerait d’ailleurs déjà un premier exploit.
L’entraînement ne laisse pratiquement aucune marge d’erreur
À ce titre, on pourra regretter que l’entraînement en question soit aussi rigide qu’il est opaque. Il est ainsi constitué de trois épreuves : corde à sauter, haltérophilie et séquence de frappe, le petit problème étant qu’il vous laisse littéralement une demi-seconde pour comprendre ce que vous avez à faire. Par exemple, l’épreuve de la corde à sauter demande de respecter un rythme particulier en secouant le joystick de gauche à droite sans interruption pendant trente secondes. L’ennui, c’est que non seulement strictement rien ne vous indique le rythme en question, mais qu’en plus à la première erreur de votre part, votre boxeur repose immédiatement la corde pour passer à l’épreuve suivante, et il n’est même pas possible de retenter sa chance sans refaire une séquence d’entraînement en entier et depuis le début !
La « ring girl » représente une des rares fioritures d’un jeu qui va à l’essentiel
Sachant que parvenir à trouver le rythme et à le maintenir pendant vingt-neuf secondes et demi ne vous fera même pas gagner un point, et que la séquence d’haltérophilie est du même tonneau en pire (on est cette fois censé secouer le joystick dans toutes les directions, si quelqu’un a compris le truc, félicitations à lui), on se retrouve rapidement avec l’atelier « réflexes » comme seul axe de progression rapide. Fort heureusement, pour ceux que cela frustrerait, les caractéristiques peuvent également progresser en combat réel, ce qui fait que les combattants les plus actifs finiront bien par se faire un avatar capable de rivaliser avec les meilleurs, particulièrement s’ils cochent la case pour que le programme ne sauvegarde l’avancée des caractéristiques que lorsqu’elles progressent. Reste justement le plat de résistance, le cœur du jeu, sa raison d’être : les combats. Et dans ce domaine, fort heureusement, le jeu tient ses promesses.
On se sent toujours particulièrement fier au terme d’une victoire
Comme dans la plupart des références du genre – Budokan en tête –, Panza Kick Boxing présente un système de jeu ou chaque direction du, joystick correspond à un coup (sauf gauche et droite, qui servent à avancer et reculer, et bas, qui sert à esquiver et à parer), la palette s’enrichissant de huit coups supplémentaires lorsqu’on garde le bouton appuyé.
Une mise à terre représente bien souvent le tournant définitif d’un match
Un rapide calcul vous permettra d’établir qu’on en arrive à la bagatelle de quinze coups disponibles, ce qui est déjà impressionnant avec un joystick à un bouton, mais un total qui pouvait être optimisé avec une des fonctions les plus intéressantes du jeu (hélas uniquement accessibles aux configurations possédant au moins 1Mo de RAM) : celle de paramétrer ses coups. Via un menu dédié, il est en effet possible de décider de l’attribution de la totalité des mouvements disponibles – une soixantaine au total – à la combinaison de votre choix histoire de vous faire un boxeur sur mesure utilisant les techniques qui vous conviennent le mieux. Si vous voulez n’utiliser que des coups puissants – mais par définition plus lents – ou choisir de ne faire usage que des pieds ou que des poings, c’est tout-à-fait possible. Si la fonction pourra sembler gadget au début, après quelques combats il deviendra rapidement pertinent de se faire un combattant sur mesure sortant les coups les plus adaptés à votre façon de jouer et selon la combinaison la plus naturelle – et ça change tout.
Les coups les plus puissants mettent du temps à sortir – mais quand ils font mouche, on les sent passer !
Kung-Fu Panza
Car les affrontements, justement, reposeront sur l’observation et sur la capacité à sortir le bon coup au bon moment plus que sur l’espoir vain de faire n’importe quoi au hasard. Les règles imposent d’ailleurs de varier les attaques, n’espérez donc pas spammer en boucle un unique coup sous prétexte que vous avez jugé qu’il était plus efficace que les autres, car ce n’est tout simplement pas permis.
Les options vous permettront de paramétrer la durée de vie du jeu, notamment via le nombre de rounds
La santé, figurée ici par les projecteurs allumés ou éteints au-dessus des personnages, est d’ailleurs purement indicative : un combat peut facilement tourner sur une unique attaque qui fasse perdre à l’adversaire la moitié de sa jauge en l’envoyant au tapis. La clé sera donc de trouver les bons enchaînement de coups, de savoir ouvrir sa garde pour parer au bon moment – et ainsi laisser l’adversaire s’ouvrir à une contre-attaque dévastatrice –, savoir prendre de la distance pour les coups de pieds les plus puissants ou au contraire aller se coller au concurrent le temps de souffler un peu. On pourra d’ailleurs regretter que, comme dans la plupart des titres du genre, la mêlée tende à devenir confuse et imprécise dès l’instant où les deux combattants sont trop proches. Mais dans l’ensemble, les combats fonctionnent très bien – suffisamment pour qu’on ait envie d’y retourner et de tenter pour la centième fois de placer ce coup au menton qui va envoyer l’adversaire compter ses dents au pays des rêves pendant qu’on célèbre notre victoire.
Les derniers adversaires sont particulièrement difficiles à mettre au tapis
Reste qu’avec seulement huit combattants aux techniques semblables et deux décors, le jeu ne pourra pas exactement compter sur la variété de son action et de sa réalisation pour captiver les foules. Certes, les personnages sont superbement animés (observez l’attitude de l’arbitre !) et la jouabilité vise juste, mais dans le domaine un certain Budokan avait le mérite d’offrir un gameplay et une réalisation tout aussi satisfaisants tout en proposant davantage de disciplines.
Chaque coup au but est clairement visible à l’écran
En un sens, Panza Kick Boxing peut offrir lui aussi une certaine variété dans l’approche, à condition de réellement se pencher sur la configuration et l’attribution des coups (et d’avoir assez de RAM pour), mais il tend par là même à limiter son accessibilité et à réserver le mode deux joueurs à des participants dotés d’un niveau relativement similaire, là où IK+ permettait au débutant de jouer avec sa tête en utilisant intelligemment la présence d’un troisième combattant. Bref, la durée de vie du jeu risque de se montrer assez limitée faute de renouvellement, et ce même si vous accrochez à son très bon système de combat. C’est plus dans cet aspect que le titre a vieilli, ce qui ne l’empêchera pas de se montrer prenant au moins quelques heures dès l’instant où vous ne rechignez pas à revisiter cette époque bénie où les jeux de combats se jouaient un peu moins en sortant des quarts de cercle à répétition et un peu plus en jaugeant et en manœuvrant son ennemi comme on le ferait lors d’une partie d’échecs.
Vidéo – Combat contre Dom Weak :
NOTE FINALE : 13,5/20
Pour sa première incursion dans le genre du kickboxing – et une des rares dans celui du jeu de combat –, Loriciels aura visé relativement juste en parvenant à offrir une réalisation satisfaisante, une animation de haute volée et une technicité bienvenue. Panza Kick Boxing a toutes les bases pour offrir ce qu'on était en droit d'attendre d'un jeu de ce type à l'ère pré-Street Fighter II : un aspect tactique interdisant de jouer au hasard, une très large panoplie (configurable !) de coups, une jouabilité tirant le maximum d'un joystick à un bouton. Malgré de louables efforts pour étirer la durée de vie du logiciel, notamment via un mode entraînement pas assez bien pensé, on doit malgré tout reconnaître que le titre s'incline rapidement face à Budokan pour ce qui est de la variété et face à IK+ pour ce qui est du fun. Un entre-deux qui aurait mérité davantage de contenu, mais qui reste une référence dans le domaine de la simulation sportive.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un mode entrainement qui vous laisse exactement une demi-seconde pour comprendre ce qu'il attend de vous... – ...et qui ne tolère aucune erreur pour espérer progresser dans deux des trois catégories – Huit combattants qui emploient tous des sprites très semblables, deux décors, un seul mode de jeu : le contenu n'est pas exactement dantesque – Des combats rapprochés souvent confus
Les avis de l’époque :
« Là où Budokan apportait un choix de disciplines impressionnant et de très beaux graphismes sur PC EGA (NdRA : le journaliste voulait probablement dire VGA), Panza Kick Boxing mise à fond sur la stratégie et sur l’animation. La gestion des capacités de votre boxeur donne au jeu une continuité très motivante. […] D’autre part, l’animation de ce combat est l’une des plus réalistes qu’il m’ait été donné de voir sur Atari ST. Voici donc un grand hit, peut-être moins complet et novateur que ne le fut Tennis Cup dans un tout autre domaine, mais qui séduira tous les amateurs du ring. »
Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Panza Kick Boxing sur un écran cathodique :
Version Amiga
Développeur : Futura
Éditeur : Loriciels
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : OCS/ECS *1Mo nécessaire pour avoir accès à tout le contenu du jeu
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Cela a souvent été abordé en ces pages, mais lorsqu’il s’agit de la fin des années 80 et du début des années 90, on gagnerait souvent du temps (et de l’espace) à réserver un seul et même test aux versions Atari ST et Amiga d’un jeu, tant elles tendaient à être développées en parallèle et avec les mêmes spécificités en tête (c’est à dire, le plus souvent, celles de l’Atari ST, au grand déplaisir des possesseurs d’Amiga). Le constat se vérifie une fois de plus pour Panza Kick Boxing : c’est pour ainsi dire très exactement le même jeu que sur Atari ST, du contenu aux graphismes en passant par le rendu sonore – même les limites introduites par le fait de ne posséder « que » 512ko de RAM sont les mêmes. Je vous laisse comparer les captures d’écran : pas un pixel n’a bougé, ce qui aboutit à un match nul complet entre les deux versions. Au moins, pas de jaloux.
Si vous voyez une différence avec la version ST, prévenez-moi
NOTE FINALE : 13,5/20
Clone parfait de la version parue sur ST, Panza Kick Boxing sur Amiga fera peut-être râler quelques passionnés de la machine qui regretteront que celle-ci ne tire aucun parti de la palette étendue de l’ECS, mais ce seront bien les seuls. Pour tout le reste, c’est très exactement le jeu qu’on était venu chercher.
Version Amstrad CPC/GX4000
Développeur : Futura
Éditeur : Loriciels
Date de sortie : Décembre 1990 (Version 464) – Mars 1991 (version Plus/GX4000)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, français
Supports : Cartouche, cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick
Version testée : Version disquette et version cartouche testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Vidéo – L’écran-titre du jeu (version standard) :
Vidéo – L’écran-titre du jeu (version « Plus ») :
Petite curiosité pour cette version CPC de Panza Kick Boxing qui, contexte oblige (Amstrad venait de lancer son éphémère GX4000 sans se douter du four qu’elle allait être appelée à connaître) aura eu le doit à deux versions, dont une au format cartouche optimisée pour les capacités de la console (et donc, par extension, pour celles de la gamme « Plus » de l’ordinateur de salon). La mauvaise nouvelle, c’est que dans les deux cas, il faudra composer avec quelques coupes drastiques : il n’y a plus de mode entraînement, et il n’est également plus possible de configurer sa palette de coups, ni même de nommer son boxeur ou de sauvegarder sa partie. La bonne, en revanche, c’est que non seulement la réalisation est excellente dans les deux cas, mais qu’en plus les sensations en combat sont également très bonnes. L’arbitre a même la bonne idée ici d’intervenir dès que les deux combattants se « superposent », ce qui tend à supprimer les mêlées confuses des versions 16 bits, et la difficulté a été rééquilibrée pour composer avec l’impossibilité de se construire son personnage sur la durée. Sur cartouche, la réalisation n’est même pas si éloignée de ce qu’affichaient les itérations ST et Amiga : c’est certes moins fin (la résolution est néanmoins supérieure à celle de la version CPC « de base »), mais cela reste de très loin l’un des meilleurs jeux de combat de la machine et l’un des mieux réalisés. Une surprise comme on les aime.
Dans la version standard, on perd les projecteurs et la résolution est vraiment basse, mais ça reste plus que correct……et en version « Plus », en plissant les yeux, on se croirait presque sur une des versions 16 bits !
D’accord, Panza Kick Boxing sur CPC doit composer avec des coupes regrettables qui viennent endommager encore davantage une durée de vie déjà pas mirobolante. Mais en termes de réalisation et de jouabilité, on voit difficilement comment Futura aurait pu faire mieux, ce qui aura le mérite d’offrir aux possesseurs de la machine d’Amstrad – particulièrement ceux de la gamme « Plus » – un des meilleurs jeux de combat de la machine. Ça ne se refuse pas.
Les avis de l’époque :
« Pour les possesseurs de GX 4000, voilà bien un titre indispensable. »
Olivier Hautefeuille, Tilt n°89, avril 1991, 14/20
Version PC (DOS)
Développeur : Futura
Éditeur : Loriciels
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, français
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, VGA Carte son supportée : AdLib
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Début 1991, le PC était pleinement engagé dans la phase de transition qui allait l’amener du statut d’ordinateur de bureau à celui de véritable machine de jeu – même si les choses étaient un peu plus lentes en Europe, où des friandises comme le standard VGA ou les cartes sons auront souvent mis plusieurs mois, voire plusieurs années, à s’imposer comme des évidences. À ce titre, on sera heureux de constater que Panza Kick Boxing tire parti d’à peu près tout ce qu’il avait à disposition pour offrir une version aussi proche que possible de celles disponibles sur Amiga et Atari ST. Passons rapidement sur le contenu, qui n’a pas changé d’un bit, pour nous intéresser à celui de la réalisation : sur le plan où on avait le plus de choses à craindre, c’est à dire le son, une simple carte AdLib permet de profiter exactement de la même ambiance sonore que sur les ordinateurs concurrents, ce qui n’était pas gagné. En revanche, surprise moins agréable sur le plan graphique, où le mode VGA trouve le moyen d’offrir des visuels qui paraissent plutôt moins colorés que sur la version ST, qui utilisait pourtant seize fois moins de couleurs ! C’est particulièrement visible sur la round girl, heureusement nettement moins pendant les matchs en eux-mêmes, qui profitent juste d’une palette différente de celle à laquelle nous avaient habitués les autres versions. Fort heureusement, la jouabilité, elle, n’a pas changé, et on trouve donc à peu près le jeu qu’on était en droit d’espérer, ce qui est l’important.
Pourquoi avoir choisi des couleurs plus agressives que dans les autres versions ? Mystère…
NOTE FINALE : 13,5/20
Mission relativement bien accomplie pour Panza Kick Boxing sur PC, même si on pourra se demander pourquoi les graphismes en VGA ne reprennent pas tout simplement les teintes des versions ST et Amiga. Pour le reste, le contenu n’a pas bougé et la jouabilité est toujours irréprochable, les joueurs n’auront donc aucune raison de se sentir lésés.
Version TurboGrafx-16 André Panza Kick Boxing
Développeur : Futura
Éditeur : NEC Technologies, Inc.
Date de sortie : Novembre 1991 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Signe d’un indéniable succès d’estime – et sans doute commercial –, Panza Kick Boxing n’aura pas tardé à aller s’exporter sur consoles, même si son premier choix aura curieusement été la console de NEC plutôt qu’une Mega Drive qui semblait alors taillée pour les simulations sportives. Cette version, à ma connaissance uniquement publiée aux États-Unis (il est toujours difficile de suivre la commercialisation des jeux PC Engine en Europe), s’efforce de faire aussi bien que les versions informatiques et se débrouille plutôt bien. la sauvegarde a certes laissé la place à un système de mot de passe, et il n’est plus possible de choisir individuellement chacun de ses coups – il faudra désormais opter pour une des huit configurations disponibles. On aurait d’ailleurs pu souhaiter à ce sujet que le jeu tire parti des deux boutons du pad pour élargir la palette d’actions disponibles, mais le choix opéré aura été de rester cantonné à seize mouvements par combattant. la bonne nouvelle, c’est que la jouabilité est toujours aussi bonne, et que la réalisation est extrêmement proche des version ST et Amiga – le jeu va jusqu’à s’afficher dans une résolution en 340×232 très inhabituelle pour la machine afin de ne pas perdre un seul pixel comparé aux version informatiques. Bref, l’essentiel est resté exactement à sa place, et c’est chouette.
Sans le logo « NEC », on se croirait presque sur Amiga ou sur Atari ST
NOTE FINALE : 13,5/20
Très bon portage pour André Panza Kick Boxing sur TurboGrafx-16, qui ne doit composer qu’avec un unique sacrifice : la configuration des moindres coups du boxeur, remplacée par une sélection de configurations imposées. Pour le reste, c’est beau, fluide et jouable. Tant mieux.
Version PC Engine CD The Kick Boxing
Développeur : I.S.C. Co., Ltd.
Éditeur : Micro World
Date de sortie : 31 Juillet 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb Système de sauvegarde par mémoire interne
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Publié exclusivement à destination du marché japonais, le portage sur PC Engine CD de Panza Kick Boxing – qui perd pour l’occasion le nom du champion de la discipline, exactement comme sa « suite » Best of the Best publiée à la même période – y gagne pour l’occasion une introduction animée qui ne devrait pas vous décrocher la mâchoire, un thème musical tellement pompé sur celui de Rocky qu’on en a honte pour lui, un système de sauvegarde en « dur » plutôt que le système de mot de passe de la carte… et c’est tout. Du point de vue ludique, le jeu est resté exactement identique à ce qu’offraient les 4Mb (c’est à dire 512ko) de l’Hucard – pas un pixel n’a bougé, et il ne faudra pas davantage espérer entendre de la musique pendant les matchs. Bref, un programme vite copié en ajoutant une cinématique, comme trop souvent à l’époque. Dommage.
Je vous laisse comparer avec la capture d’écran de la version précédente…
NOTE FINALE : 13,5/20
The Kick Boxing sur PC Engine CD n’est vraiment pas grand chose de plus qu’André Panza Kick Boxing sur TurboGrafx-16 avec une nouvelle cinématique d’introduction et un thème musical qui aurait dû à lui seul lui valoir un procès. Aucune nouveauté à espérer sur le plan ludique, ce qui est un peu dommage mais n’enlève rien aux mérites du titre en tant que pur jeu de combat.
Développeur : Futura Éditeur : Loriciel SA Titres alternatifs :Panza Kick Boxing 2 (titre de travail), Super Kick Boxing (Super Famicom – Japon), The Kick Boxing (Game Boy – Japon) Testé sur :Game Boy – NES – Mega Drive – Super Nintendo Également disponible sur : Amiga, Amstrad CPC, PC (DOS)
Le simple fait que Best of the Best : Championship Karate apparaisse directement à la suite du test de Panza Kick Boxing a d’ores et déjà dû vous mettre la puce à l’oreille : il doit y avoir anguille sous roche. De fait, bien que le titre soit généralement présenté comme une suite (ce que suggère jusqu’à son titre de travail) et qu’il soit disponible sur d’autres plateformes que le jeu original, parler de « réédition » serait sans doute plus juste – les versions Amiga, CPC et PC du jeu n’étant d’ailleurs rien de plus que le même jeu vendu sous un autre nom, probablement à destination du marché américain, d’où le fait que le test de ces versions ne ne soit pas abordé ici sous peine d’offrir un simple doublon : il suffit littéralement d’aller relire les tests de Panza Kick Boxing un peu plus haut. Il y a cependant bel et bien un changement opéré dans ce Best of the Best, et qui transparait d’ailleurs déjà dans le titre : le fait que tous les combattants aient été renommées… à commencer par André Panza lui-même. Il est assez facile de subodorer les raisons de ce changement de nom, Loriciels ayant fermé ses portes entretemps… pour les rouvrir immédiatement sous le nom de Loriciel, sans le « s » : l’idée était très vraisemblablement de ne plus avoir à payer pour utiliser le nom d’André Panza. C’est d’ailleurs la version du champion lui-même, qui déclarait dans une interview à webmartial en 2001 : « Ce jeu a été le premier consacré au kick boxing et le top des softs. Ça a été un grand plaisir mais la société avec qui j’avais travaillé m’a baisé plus tard sur les royalties, en coulant et en rouvrant sous un autre nom ». Autant dire que les joueurs en quête d’une réelle « suite » peuvent immédiatement se faire une raison, mais pour une bonne partie des joueurs sur console, ce fut l’occasion de découvrir ce fameux Panza Kick Boxing… sans Panza.
Version Game Boy
Développeurs : Futura – Loriciel SA
Éditeur : Electro Brain Corp. (Amérique du Nord) – Loriciel SA (Europe) – Micro World (Japon)
Date de sortie : Novembre 1992 (Amérique du Nord) – Février 1993 (Europe) – Mars 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
On avait de quoi se demander comment la Game Boy allait s’en sortir avec Best of the Best (niveau jeux de combat, c’est souvent « tout ou rien » avec la petite portable de Nintendo). Et la réponse est : plutôt bien. Tout d’abord, on n’observe pas les mêmes coupes que dans les versions 8 bits de Panza Kick Boxing : le mode entraînement est toujours là (même s’il se limite désormais à une seule épreuve, la plus facile, ce qui signifie qu’il est très simple de faire progresser son personnage) et il est toujours possible de configurer ses coups, même s’il faut passer par des sélections préétablies, comme sur TurboGrafx-16. Et pour ce qui est des combats en eux-mêmes ? Il n’y a peut-être plus d’arbitre à l’écran (et enchaîner les mêmes coups en boucle ne semble pas poser problème ici), mais la jouabilité est restée exactement la même et les coups sortent toujours aussi bien. Faute de couleur, les corps-à-corps sont ici encore plus confus que dans les autres versions, mais dans l’ensemble, on hérite d’un jeu de combat qui sera sans doute d’autant plus vite vaincu qu’il n’est plus possible de sélectionner le nombre de rounds mais qui tient la route. Dommage que le mode deux joueurs ait disparu.
L’essentiel est là et bien là – sauf le mode deux joueurs
NOTE FINALE : 12,5/20
Conversion globalement réussie pour Best of the Best sur Game Boy, la plus grande perte correspondant au mode deux joueurs. Pour le reste, la jouabilité est toujours aussi satisfaisante, et les possibilités de configuration sont toujours à l’ordre du jour. Un jeu de combat que personne ne sera malheureux de posséder sur la portable de Nintendo.
Version NES
Développeur : Movie Interactive Software
Éditeur : Electro Brain Corp. (Amérique du Nord) – Loriciel SA (Europe)
Date de sortie : Décembre 1992 (Amérique du Nord) – Avril 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Fin 1992, on se doute que la NES n’était plus exactement la machine dans le vent. Cela se ressent dans le soin apporté à cette version NES de Best of the Best, qu’il serait sans doute plus rapide de décrire comme étant la version Game Boy du jeu, mais en couleurs. On assiste exactement aux même adaptations (disparition de l’arbitre, mode entraînement limité à une seule épreuve, configuration des coups réduite à une série de sélections données, système de sauvegarde par mot de passe), mais avec une nuance de taille : il est à nouveau possible de jouer à deux. Si la réalisation du jeu ne restera pas dans les annales (les graphismes se font littéralement humilier par ceux de la version GX4000 !), la jouabilité est toujours à la hauteur, et la NES ne croulant pas exactement sous les jeux de combat d’exception, ce titre figure plutôt dans le haut du panier.
Ce n’est pas sublime, mais ça fait le café
NOTE FINALE : 13/20
Sorte de « version Game Boy en couleurs » enrichie du mode deux joueurs qui faisait si cruellement défaut à la console portable, Best of the Best sur NES ne décrochera certes la mâchoire de personne par sa réalisation ni par son contenu, mais cela n’en reste pas moins un des meilleurs jeux de combat à l’échelle de la console.
Version Mega Drive
Développeur : Loriciel SA
Éditeur : Electro Brain Corp. (Amérique du Nord) – Loriciel SA (Europe) – Micro World (Japon)
Date de sortie : 29 Janvier 1993 (Japon) – Juillet 1993 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
il aura fallu attendre 1993 pour que Best of the Best débarque sur Mega Drive. Le timing n’était peut-être pas idéal – 1993 allait également être l’année de sortie d’un certain Street Fighter II’ : Special Champion Edition sur la même console – mais il semblerait de toute façon que la cartouche du jeu ait bénéficié d’une distribution assez heurtée, particulièrement en Europe où il est possible que le jeu n’ait été vendu qu’en France. Bref, loin de ces considérations commerciales, que vaut le titre ? Au rang des bonnes nouvelles, plus aucun sacrifice n’est à déplorer ici au niveau du contenu : il est enfin possible de choisir chacun des coups de son combattant, tout comme il est désormais également possible de choisir sa nationalité et une partie de son apparence – rien de mirobolant, mais on prend. L’entraînement est toujours de la partie, et les deux épreuves les plus « problématiques » ont été remplacées par des alternatives moins abstraites : un match contre un sparring partner à la place de la corde à sauter, et du martelage de bouton en bonne et due forme au lieu de la fonte. La jouabilité n’a pas changé et l’arbitre signe son grand retour ; en fait, le seul véritable reproche à formuler à cette version (en-dehors du peu de nouveautés) est à aller chercher du côté de la résolution rognée en 256×224 (ou 256×240 en PAL), alors que la résolution « traditionnelle » de la machine, en 320×224, aurait nettement mieux convenu, d’où des effets de dégradés ratés qui sentent la compression à la truelle. On notera également que le décor de la salle vide a ici disparu, remplacé vers le milieu du jeu par un décor de combat en arène au milieu du public… À ce détail près, on hérite d’une transcription fidèle – dommage qu’elle ne se soit pas montrée un poil plus ambitieuse.
Cette fois, on commence directement dans une salle pleine – mais pourquoi avoir raboté la résolution ?
NOTE FINALE : 13,5/20
Portage solide à défaut d’être parfait pour Best of the Best sur Mega Drive. Si on regrettera que la résolution ait été rabotée, la jouabilité irréprochable et le retour de toutes les possibilités des version sur ordinateurs – plus quelques autres, un peu gadgets – aident à faire de cette version un concurrent crédible à Budokan sur la même machine – mais sans doute pas à Street Fighter II’.
Version Super Nintendo
Développeur : Futura
Éditeur : Electro Brain Corp. (Amérique du Nord) – Loriciel SA (Europe) – Electro brain Corp. Japan (Japon)
Date de sortie : Mars 1993 (Japon) – Mai 1993 (Amérique du Nord, Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Au moment de porter Best of the Best sur Super Nintendo, on sent bien que Loriciel n’aura pas déployé de ressources extraordinaires : c’est, à peu de choses près, exactement le même jeu que sur Mega Drive (ce qui explique peut-être d’ailleurs que la console de SEGA ait dû se contenter d’un affichage en 256×224). En-dehors du fait que le thème de l’écran-titre démontre que les artistes de Loriciel ne savaient absolument pas comment tirer quelque chose du processeur sonore de la console et que le jeu soit un peu plus lent qu sur Mega Drive (ce qui n’est pas forcément un mal dans un jeu reposant davantage sur l’observation que sur le matraquage convulsif de boutons), on retrouve exactement les mêmes adaptations que chez la concurrence, pour un résultat dont on fera toujours aussi vite le tour mais qui a le mérite de rester assez unique en son genre sur Super Nintendo.
L’avantage de la rivalité entre Nintendo et SEGA, c’est qu’on pouvait se permettre exactement les mêmes tours de passe-passe qu’à l’époque de celle opposant Atari à Commodore.
NOTE FINALE : 13,5/20
Retranscription pratiquement pixel perfect de la version Mega Drive, Best of the Best sur Super Nintendo ne pêche que par sa relative lenteur, qui ne détériore heureusement en rien l’expérience de jeu. Si vous voulez une simulation d’arts martiaux sur Super Nintendo, c’est clairement ici qu’il faut commencer.
Développeur : Silicon Software Éditeur : Personal Software Services Testé sur :Atari ST – Amiga – PC (DOS) Disponible sur : Windows Présent dans la compilation :Legend of the Sword Series (2019 – Windows) En vente sur :GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)
Version testée : Version disquette testée sur Atari 520 ST
Configuration minimale : Système : 520ST – RAM : 512ko
Qui prendra un jour le temps de raconter l’histoire de tous ces studios de développement qui n’auront jamais accédé à la notoriété ?
Ah, ça, évidemment qu’on se doute que ça se bouscule davantage pour raconter l’irrésistible ascension de Steve Kelly, Mike Montgomery et Eric Matthews à la tête des Bitmap Brothers, pour cerner les personnages fantasques que sont Richard Garriott et Peter Molyneux, ou pour se pencher sur l’influence de Chris Metzen au sein du futur géant Blizzard Entertainement. C’est normal, c’est tout de suite plus vendeur – ce sont des noms qui parlent à tous ceux qui s’intéressent au medium et à son histoire.
Puisque le jeu vous fournit si généreusement une épée à côté du serpent qui vous menace, autant s’en servir !
Il n’empêche, quels espoirs déçus pourraient donc nous raconter les créateurs de Silicon Software, petite compagnie qui n’aura existé que le temps de développer Legend of the Sword et sa suite, et dont les membres semblent avoir depuis lors durablement quitté l’univers du jeu vidéo ? Qui saura la frustration d’avoir œuvré à deux programmes ayant reçu un très bon accueil critique à leur sortie mais ayant depuis sombré si profondément dans l’oubli que vous rougissez déjà en avouant à demi-mots que vous n’aviez jamais entendu parler du premier opus ni de sa suite directe, The Final Battle ? Ah, comme disait Brassens, trompettes de la renommée, vous êtes bien mal embouchées… Qu’importe, faute de l’opinion des premiers concernés, il ne sera plus question ici de drame ou du justice, mais simplement de ce qui nous intéresse nous, égoïstement, en tant que joueur : The Final Battle vaut-il seulement la peine qu’on se penche à nouveau sur son cas aujourd’hui ?
Il est temps de retrouver nos héros dans un monde désormais un peu plus tangible !
Comme dans le premier épisode, l’histoire est ici brièvement présentée en quelques lignes au lancement du jeu, sans bénéficier d’une scène d’introduction ou même d’un thème musical pour accompagner l’écran-titre.
La très pratique carte du jeu est toujours présente, et elle vous autorise à présent à faire du voyage rapide
Pour aller à l’essentiel, la fine équipe du précédent opus n’aura visiblement pas eu le temps de célébrer sa victoire sur le maléfique sorcier Suzar, puisqu’après une embuscade et une courte échauffourée, votre héros se réveille seul dans une cellule et en bien mauvaise posture, pour ne pas dire « revenu au point de départ mais en pire » puisqu’il n’a bien évidemment plus la fameuse épée magique ni le bouclier qui l’accompagnait, et qu’il va rapidement falloir trouver un moyen de décamper de la prison qui le retient pour aller libérer ses alliés – s’ils sont encore en vie –, en débusquer d’autres si nécessaire et aller enfin régler son compte à ce grand méchant qui commence à être un tantinet pénible. Bref, du classique, et une aventure qui vient s’inscrire dans la continuité directe de la précédente sans contenir d’éléments trop complexes pour avoir une chance de décontenancer les joueurs qui découvriraient la série via ce chapitre. Pour l’originalité, on repassera, mais on se souvient que Legend of the Sword avait précisément su viser juste en dépit d’une quête assez banale en soignant sa narration et son ergonomie au détriment d’une réalisation purement fonctionnelle mais qui accomplissait l’essentiel : laisser travailler l’imagination.
Un seul moyen de vaincre ce serpent de mer : utiliser le sort adéquat !
Seulement voilà : en deux ans, le marché vidéoludique avait déjà beaucoup changé et les attentes des joueurs avec lui, et The Final Battle fait donc le choix assez sensé de soigner sa présentation, cette fois. Dès le lancement, le jeu s’affiche fièrement dans une vue en 3D isométrique qui a le mérite de matérialiser de manière un peu plus visible tout ce que le précédent jeu prenait le temps de vous détailler via des pavés de texte.
Pour attaquer un ennemi, il faut commencer par cibler une partie de son corps. Celui-là a l’air coriace, méfiez-vous !
Place ici aux courtes description, qu’il s’agisse de nommer un objet ou un élément de décor sur lequel vous venez de cliquer ou simplement de détailler l’atmosphère lorsque vous pénétrez dans une nouvelle pièce (il n’y a ni défilement ni animation : le monde se dévoilera écran par écran, exactement comme dans Legend of the Sword). Le tout a beau souffrir ponctuellement de quelques petits problèmes de lisibilité (et être tragiquement dépourvu de son), la représentation de l’univers a un cachet certain, et Silicon Software semble avoir parfaitement saisi le sens du vent (et de l’histoire) en faisant transiter son aventure graphique vers ce qui est désormais un point-and-click en bonne et due forme, entièrement jouable à la souris, au détail près que votre personnage – et tous ceux qui viendront à l’accompagner – n’est visible à l’écran qu’une seule fois de la partie, lors de sa première apparition. Après quoi, bien que tout soit vu à la troisième personne, le jeu part du principe que vous voyez le monde selon ses yeux et il ne sera plus matérialisé que par son portrait en haut à gauche de l’écran, tout comme ses camarades.
Sachez fouiller partout, et ne laissez jamais de la nourriture derrière vous
Justement, on en revient à ce qui avait été la première grosse satisfaction de Legend of the Sword : le soin et l’intelligence avec lesquels l’interface du jeu avait été conçue. On aimerait que ce soit également le cas ici, mais on va dire qu’en s’aventurant sur un terrain encore relativement vierge en 1990, l’équipe de Silicon Software aura choisi des sentiers qui paraissent nettement moins judicieux avec trente-cinq ans de recul.
Un jeune homme en mauvaise posture ; allez donc donner une leçon à ces bandits
Pourtant, à première vue, tout est parfaitement en place : un mois avant King’s Quest V (mais deux ans après Explora), The Final Battle emploie déjà une interface intégralement à base d’icônes, reprenant une partie de l’interface de Legend of the Sword (pour les déplacements) tout en y ajoutant des fonctions autrefois accessibles uniquement via la liste de verbe, comme une paire de lunettes pour observer les environs, une oreille pour écouter ce qui se passe ou des icônes un peu moins claires pour les actions. Vous pensez que la main sert à se saisir de quelque chose ? Raté : elle correspond en fait à l’acte de lancer un objet. La bouche sert à se nourrir, et pas à discuter, quant à la fonction la plus évidente de toutes, à savoir « utiliser », elle se dissimule en fait maladroitement derrière le point d’interrogation… et encore, pas toujours. Car en dépit de ses symboles pas toujours judicieusement choisis (on se souvient d’errances similaires dans le premier volet d’Explora que nous mentionnions un peu plus tôt, par exemple), la jouabilité du jeu ne prendrait finalement que quelques minutes tout au plus à maîtriser… si elle n’avait pas la mauvaise idée de se doter d’une surcouche de complexité en ajoutant des actions qui ne sont accessibles que via un double-clic, d’autres qui ne le sont que par un clic droit, et d’autres encore qui ne le sont que via l’inventaire ou la feuille de personnage de vos héros… à condition, là encore, de savoir comment y accéder !
Crysella et Pagan pourront encore être sauvés… si vous les libérez suffisamment vite !
Un exemple valant mieux qu’un long discours, autant utiliser la première situation qui se présentera à vous : quitter la cellule dans laquelle vous débutez le jeu. La solution, pas forcément évidente au premier regard, est pourtant assez simple : déplacer le banc situé près du mur pour aller le placer sous une grille d’aération (oui, c’est un univers où les forteresses médiévales ont des conduits d’aérations), ouvrir la grille et s’enfuir par ce biais. A priori, l’action est simple, surtout une fois qu’on a compris que la commande « utiliser » correspondait au point d’interrogation… sauf que je vous annonce d’ores et déjà que vous n’aboutirez sans doute à rien au terme de dix minutes de lutte. L’icône « utiliser » est en fait réservée à un usage spécifique : pour employer un objet avec un autre objet. Si vous voulez utiliser un objet seul (ouvrir une porte ou la grille qui nous intéresse, par exemple), il faut double-cliquer dessus.
Voilà tout ce qu’il reste de Cornilius et les autres : des squelettes au fond d’un puits. Désolé, les gars…
Ça n’a l’air de rien, et ça paraît évident une fois qu’on le dit, mais le problème est que beaucoup d’actions qui semblent évidentes au premier abord choisissent ici des mécanismes qui ne sont absolument pas naturels aux yeux d’un joueur moderne. Par exemple, si vous voulez lancer un objet sur quelque chose, il faut bien choisir l’icône idoine, mais pour sélectionner d’abord la cible et ensuite le projectile, là où tous les jeux d’aventure nous ont depuis appris à faire exactement l’inverse – et bien évidemment, le programme ne vous précise jamais dans quel ordre vous êtes censé faire les choses. Vous voulez parler à quelqu’un ? Ne cherchez pas à double-cliquer dessus : il faut afficher sa feuille de personnage en faisant un clic droit sur son portrait, et ensuite allez y sélectionner l’icône « discuter » – eh oui, l’icône de la bouche sert à manger, vous vous souvenez ? Ah mais attention, si vous faites un clic gauche, là, vous accéderez à son inventaire – à condition qu’il fasse partie de votre groupe, auquel cas son portrait apparaîtra cette fois à gauche, si vous avez auparavant sélectionné le petit bouclier correspondant à sa position dans votre coterie. Inventaire d’ailleurs classé en quatre catégories (objets, armes, clefs, nourriture), ce qui s’applique également aux coffres et aux corps que vous fouillez. N’oubliez donc JAMAIS de vérifier les quatre onglets à chaque fois que vous inspectez un meuble ou un tiroir, car vous pouvez très facilement rater une clef vitale pour avoir oublié d’inspecter la catégorie correspondante !
Pénétrer dans cet arbre sans risque vous demandera d’avoir un Jack en bonne santé, capable d’escalader les branches et de jouer du couteau
Conséquence : au bout de deux heures de jeu, on se surprend encore à faire des dizaines de tentatives pour chercher à comprendre comment réaliser une action selon la logique très spécifique du jeu. Ce qui peut se montrer d’autant plus problématique à cause d’une donnée supplémentaire introduite par le programme : le temps réel. Imaginons par exemple que votre lutte avec l’interface vous occupe cinq minutes de trop : vous débarquez dans une cellule censée contenir Pagan et Crysella, deux de vos compagnons prisonniers… et vous n’y trouvez que deux squelettes (!). Bah oui, pendant que vous vous battiez pour comprendre comment ouvrir une porte, eux sont morts !
La vue isométrique employée a un charme certain
Autant dire que non seulement il va donc falloir faire les choses correctement, mais que vous seriez également bien inspiré de les faire vite, surtout au début du jeu : ce qu’on appelle une fausse bonne idée, et un mécanisme supplémentaire pour vous pousser à recommencer une aventure loin d’être évidente. Le truc, c’est qu’il est toujours aussi difficile de fouiller un monde aussi étendu que dans le premier épisode : comment deviner par exemple que vous êtes censé « utiliser » le sol à un endroit qui n’a rien de notable, près d’un arbre comme le jeu en compte des dizaines, pour trouver une gemme indispensable à la résolution du jeu ? L’exploration est d’autant plus complexe que non seulement il est possible de diviser son groupe, mais que certaines actions ne peuvent être accomplies qu’à certains moments de la journée, d’autres uniquement par certains personnages (à vous de deviner lesquels !) et que leur état de forme a une influence sur la réussite de leurs actions ! Par exemple, vous pouvez à un moment sauver un jeune garçon d’un groupe de bandits pour qu’il vous rejoigne, mais attention : pour qu’il ne soit pas blessé avant que vous interveniez, vous devez courir jusqu’à lui dès que vous entendez ses cris… ce qui implique donc de savoir a/ que vous pouvez courir et surtout b/ comment. Je vous livre la méthode : il faut bien évidemment faire un clic droit sur le portrait de votre personnage, et aller cliquer sur l’icône des jambes. Ah oui, c’est limpide…
Comme dans le premier opus, la surface à fouiller est très intimidante
Le pire, c’est qu’il m’est également arrivé de voir mon personnage principal mourir d’épuisement après avoir abattu un arbre simplement parce qu’il ne s’était pas assez reposé – ou qu’il n’avait pas assez mangé, je ne suis même pas sûr – ce qui implique une sorte de microgestion où on doit constamment aller surveiller les diverses jauges de nos compagnons et s’efforcer de les conserver en bonne santé sans trop savoir comment. Imaginez à quoi ressemble un combat lorsque non seulement celui-ci est impacté par l’arme que vous utilisez, mais également par qui la manie, quelle partie du corps elle vise et l’état de santé de celui ou celle qui la tient !
Lancé à pleine vitesse, ce chariot pourrait bien être la clef pour ouvrir les portes de la forteresse
Bref, en tant que pure aventure, le déroulement de l’épopée est souvent nébuleux, et comme les indices sont aussi rares que vos compagnons sont désormais désespérément silencieux une fois qu’ils ont rejoint vos rangs, tout ce qui contribuait à rendre Legend of the Sword vivant (les interventions des personnages, les descriptions d’ambiance, l’humour) n’a plus vraiment cours ici. Sachant que l’interface aura elle aussi confondu « richesse des possibilités » et « passer un quart d’heure à essayer de comprendre comment insérer une clef dans une serrure », on se retrouve face à un titre dont on ne peut s’empêcher de déceler le potentiel, mais qui représente finalement plutôt un pas en arrière face au premier épisode, la faute à une réalisation certes plus soignée mais qui introduit au final plus de problèmes qu’elle n’en résout.
Il y a toujours énormément de passages dérobés à découvrir
En y ajoutant une version française assez lunaire puisqu’elle se contente de traduire (mal) le texte introductif et le nom des lieux (!), on se retrouve au final devant un jeu qui demande beaucoup, beaucoup de temps pour qu’on puisse enfin y rentrer… pour découvrir ce qui n’est finalement qu’une redite du premier opus. C’est dommage, car avec une interface mieux pensée, un déroulement moins punitif et un aspect jeu de rôle qui aille plus loin qu’une gestion de la faim, de la fatigue et de la santé qui n’apporte au final absolument rien, on aurait au moins pu espérer bénéficier d’une aventure un peu rafraichissante de par sa vue isométrique et sa gestion de groupe. Mais devant ce qui restera plutôt au final comme un Legend of the Sword en moins bien, les amateurs d’aventure mêlée de jeu de rôle passeront sans doute un meilleur moment sur un des épisodes de la saga Heroes of the Lance. Bien essayé quand même, Silicon Software. Vous méritiez sans doute une autre chance.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
NOTE FINALE : 12,5/20
Là où Legend of the Sword avait su tirer la quintessence de l'aventure graphique grâce à une ergonomie irréprochable et à une narration efficace au détriment de la réalisation, The Final Battle aura involontairement accompli exactement l'inverse : un point-and-click poussif à l'univers intrigant et bien présenté mais à la prise en main problématique et la narration anémique. Chaque fois qu'on semble sur le point de pardonner au jeu ses infinies lourdeurs pour essayer de s'enticher de son univers, on finit sempiternellement par se prendre les pieds dans une des très nombreuses zones d'ombre de son interface et de sa jouabilité, et ce qui aurait pu être une aventure prenante vire hélas rapidement à une errance désabusée où on passe davantage de temps à lutter contre le programme qu'à jouer avec lui. Le potentiel était là, si seulement les compagnons avaient conservé leur gouaille et leur personnalité, si les indices étaient plus nombreux et le cheminement plus intuitif, mais au final on hérite plutôt d'une redite du premier opus en vue isométrique, en dix fois moins maniable et en moins bien raconté. Une curiosité qui peut avoir son charme, mais à réserver aux joueurs patients.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Une interface peu claire qui risque de nécessiter un long, très long moment pour être domptée – Une pression du temps en début de partie qui peut facilement ruiner vos espoirs pour avoir musardé deux minutes de trop – Un déroulement flou avec extrêmement peu d'indices sur la marche à suivre – Une jouabilité peu réactive avec de nombreuses latences – Une version française qui laisse 95% du jeu en anglais
Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Final Battle sur un écran cathodique :
Version Amiga
Développeur : Silicon Software
Éditeur : Personal Software Services
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Comme une large des jeux développés sur Amiga ou sur Atari ST dans une période s’étendant grosso modo de 1987 à 1992, The Final Battle aura été développé en parallèle sur les deux machines en vue d’une sortie rapprochée sur les deux supports. Conséquence évidente : les deux versions sont extrêmement proches, et on pourrait même les décrire comme « jumelles » sur le plan visuel si les couleurs de cette itération Amiga n’étaient pas un tantinet plus vibrantes et surtout si une barre n’avait pas fait son apparition en haut de l’écran pour afficher à la fois le nom du lieu et un pourcentage correspondant à la progression de l’aventure, à la manière du score affiché par les productions de chez Sierra On-Line. Bon, pourquoi pas… Pour le reste, on notera surtout une jouabilité un peu plus réactive, des commandes qui répondent mieux et des transitions d’un écran à un autre plus rapides, ce qui, sans résoudre les nombreux problèmes de l’ergonomie, a au moins le mérite de rendre l’expérience un chouïa plus confortable. On bénéficie également de quelques (très rares) bruitages digitalisés, mais toujours aucune musique à se mettre sous la dent. Bon, ce n’est déjà pas si mal.
NOTE FINALE : 13/20
Techniquement extrêmement proche de la version Atari ST, cette itération Amiga de The Final Battle a cependant pour elle de s’avérer plus réactive, plus jouable et en deux mots plus confortable. Quitte à découvrir le jeu, l’expérience sera sans doute un tantinet moins frustrante sur la machine de Commodore.
Les avis de l’époque :
« The Final Battle est un bon jeu d’aventure teinté de jeu de rôle. Les graphismes sont fins et variés, l’ergonomie tout-souris excellente (NdRA : Tu parles !), le scénario logique et intéressant et quelques bruitages digitalisés viennent renforcer le tout. »
Jacques Harbonn, Tilt n°83, novembre 1990, 17/20
Version PC (DOS)
Développeur : Silicon Software
Éditeur : Personal Software Services (édition originale) – Throwback Entertainment Inc. (réédition numérique de 2019)
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 640ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr Carte son supportée : Aucune Pas de programme de configuration. Pour jouer en EGA (le jeu se lance par défaut en CGA), ajoutez /e derrière l’exécutable
Ah, l’EGA et sa palette, toute une époque…
Par une de ces étranges décisions commerciales qui restera nimbée de mystère, The Final Battle aura eu droit à une réédition au format numérique dès 2019, et ce alors que le jeu, qui n’aura pas déplacé les foules à sa sortie, ne jouissait même pas d’un quelconque succès d’estime. Quoi qu’il en soit, si vous voulez y jouer aujourd’hui sans avoir une machine d’époque ou un émulateur sous la main (même si, techniquement parlant, cette version est bel et bien émulée pour faire tourner DOS, mais au moins le programme s’en charge pour vous), il vous restera cette version PC… par ailleurs réduite à l’essentiel, puisque le manuel n’est même pas disponible dans cette édition (ce qui représente un vrai problème avec une interface aussi peu naturelle) ! Bien que paru en 1991, le jeu ne tire toujours aucun parti du VGA (on dira qu’il est sorti dans une année de transition à ce niveau, surtout pour la production européenne), et il ne faudra pas espérer de son non plus, mais bon, vu ce que les autres versions avaient à proposer dans ce domaine… Le résultat, comme souvent, propose des couleurs assez criardes – ce n’est pas forcément très gênant, disons que ça a le mérite de rendre les tableaux assez lisibles grâce à des contrastes bien tranchés, le reste est une question de goût. En revanche, la bonne nouvelle, c’est que la jouabilité est aussi réactive que sur Amiga, ce qui donne un peu moins l’impression de pédaler dans la semoule et de devoir patienter cinq secondes entre chaque écran. Les joueurs qui parviendront à maîtriser l’interface devraient pouvoir jouer dans un confort appréciable.
NOTE FINALE : 13/20
Comme souvent, The Final Battle sur PC est un peu la version « contraste à fond » de la version Atari ST sur le plan graphique – la faute à une réalisation cantonnée à l’EGA – mais a le mérite de tourner de manière infiniment plus réactive, comme sur Amiga. Cette itération représente donc une bonne façon de découvrir le jeu – dommage que le manuel ne soit pas fourni avec l’édition commerciale en vente en ligne, parce qu’il n’aurait vraiment pas fait de mal.
Développeur : Sphere, Inc. Éditeur : Spectrum Holobyte, Inc Titre alternatif :FacesTris (appellation commune) Testé sur :PC (DOS) – Macintosh – Amiga Présent dans la compilation :Triple Tris Challenge (1993 – PC(DOS))
Tetris with Carcaptor Sakura : Eternal Heart (2000)
Tetris the Absolute : The Grand Master 2 (2000)
Version PC (DOS)
Date de sortie : Août 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément, via modem et câble null-modem) – 1 à 10 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″ (x2) et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Carte son supportée : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
À une époque où le puzzle game n’était pas encore un genre à part entière – mais travaillait précisément à le devenir –, le succès international de Tetris aura eu de quoi faire cogiter bien des développeurs (et des commerciaux) désireux de reproduire le tabac du titre d’Alexei Pajitnov. On aura déjà vu en ces pages comment Spectrum Holobyte aura récupéré les droits du jeu pour le territoire américain alors même que ceux-ci n’avaient pas encore été négociés avec les russes, puis comment un certain Welltris était parvenu à accomplir une première fois ce que tout le monde cherchait à réaliser : une suite qui renouvèle le concept tout en lui restant familier.
Le score composera une fois de plus l’unique objectif du jeu
Désireux de continuer à profiter de leur planche à billets magique, les responsables de Spectrum Holobyte auront donc confié une nouvelle fois aux équipes de Sphere la responsabilité d’accoucher d’un clone de Tetris qui soit davantage qu’un clone de Tetris tout en en restant suffisamment proche pour pouvoir continuer à être appelé Tetris – ou, a minima, un truc en « tris » comme l’avait été le deuxième épisode. Vaste programme, car quoi qu’on en dise, les possibilités ne paraissaient pas illimités – et des concurrents à la Columns ou à la Block Out avaient déjà commencé à voir le jour, entretenant la pression pour sortir ZE idée simple-mais-géniale. Le truc, c’est que du côté de chez Sphere – surtout connu jusqu’alors pour ses simulations comme Falcon, Vette! ou Stunt Driver –, on n’avait pas nécessairement un Alexei Pajitnov de substitution pour pondre en vitesse une idée géniale aux répercussions planétaires. Alors, faute de réinventer la poudre, on aura tenté un coup de poker : un jeu en « tris » qui se revendique de Tetris… mais qui ressemble, dès le départ, à une mauvaise idée – sans doute parce que c’en est une.
Quand les bonnes idées sont épuisées, pourquoi ne pas faire un jeu avec les mauvaises ?
À la grande question « Mais qu’est-ce qu’on pourrait bien assembler comme machins cette fois ? », après les tétriminos ou les couleurs, quelqu’un aura donc eu l’illumination de proposer des visages. Faces …tris III, comme son nom l’indique, n’est donc pas un jeu qui vous demande d’assembler des lignes, mais bien des mentons, bouches, nez, yeux et autres front pour arriver à reconstituer des têtes entières.
On ne peut pas dire que les décors, systématiquement en noir et blanc, en envoient plein les yeux
Si le principe est toujours d’assembler des « blocs » (correspondant aux diverses parties susmentionnées) qui tombent du haut de l’écran et d’empêcher que ceux-ci ne viennent s’empiler jusqu’à atteindre son sommet, il ne sera pas question ici de les faire pivoter ; le gameplay aura donc imaginé une alternative en imposant de manier deux blocs à la fois, en parallèle, la touche d’action servant cette fois non à les faire tourner mais simplement à échanger leur position. On devra donc s’efforcer non seulement de façonner des visages selon des règles précises (un visage constitué sans mélanger les éléments de divers portraits rapporte davantage de points et fait disparaître tous les blocs inutiles de sa colonne), mais de les faire deux par deux, quitte parfois à manœuvrer finement pour éviter de bloquer une construction en en réalisant une autre. Voilà pour le concept. Sur le papier, on sent déjà quelques points problématiques, mais l’idée se défend. La (deuxième) grande question étant à présent « et dans les faits ? ». Eh bien c’est là que les problèmes dont on subodorait l’existence se confirment, et en vitesse.
Attendez-vous à devoir rapidement composer avec une très encombrante colonne centrale
Commençons par adresser le problème le plus évident : la grande force de Tetris, c’était à la fois la simplicité et la versatilité de son approche. Avec simplement sept formes différentes, les combinaisons pour former des lignes étaient nombreuses, rapides à imaginer et immédiatement compréhensibles. Avec des visages… eh bien il est hors de question de les assembler autrement que de la façon prévue, depuis le menton jusqu’au front, et ce n’est pas négociable.
Il faut rarement plus d’une ou deux erreurs pour se retrouver dans une situation inextricable
Autant dire que cela limite drastiquement les stratégies, surtout quand le fait de devoir composer avec deux blocs à la fois impose de facto un tableau divisé en deux moitiés où il est très difficile de sacrifier une colonne pour se « défausser » des pièces surnuméraires. Ici plus que dans n’importe quel autre puzzle game, si les pièces n’arrivent pas dans le bon ordre, vous ne pouvez tout simplement rien faire d’autre que les empiler dans un coin – ou dans deux – en attendant que la partie désirée arrive. S’il vous faut une bouche, vous devez attendre une bouche et si elle n’arrive pas, pas question de créer un façonnage en catastrophe comme on pouvait se résoudre à le faire quand la fameuse ligne de quatre ne se présentait pas dans Tetris : vous êtes foutu, et tant pis pour vos capacités d’adaptation qui, très honnêtement, ne seront jamais réellement consultées.
Le septième niveau est le seul à proposer des portraits un peu dépaysants
Dès lors, tout ce qui faisait la force de Tetris – et du genre dans son ensemble –, à savoir la capacité à improviser le plus vite possible avec ce qu’on nous offre, n’a pas vraiment cours ici où on est d’autant plus tributaire de ce qu’on nous offre que le tableau ne permet de bâtir que cinq colonnes simultanément.
Un jeu auquel il aura sans doute manqué plusieurs mois de réflexion
Bref, une fois qu’une partie commence à être très mal embarquée, il est souvent à peu près impossible de corriger le tir, et le simple fait de parvenir à terminer un niveau en assemblant dix visages différents risque déjà de constituer une performance difficile à accomplir. Ce n’est pas tant qu’on passe un mauvais moment sur Faces …tris III, c’est surtout que passé la curiosité face au concept loufoque et à ses mécanismes un peu déstabilisant, il ne reste plus grand chose pour s’amuser faute de réelle profondeur – ce qui revient à dire que le jeu a essoré la quasi totalité de son potentiel ludique au bout d’un quart d’heure, peut-être le double si vous êtes vraiment curieux. Mais le côté addictif du père fondateur du genre ne se manifeste jamais vraiment ici, où l’on fait strictement la même chose d’un bout à l’autre sans aucune possibilité d’aborder les situations différemment.
On fait très, très vite le tour du jeu faute de matière
Pour ne rien arranger, ce ne sont pas les modes de jeu qui vont venir allonger la sauce, puisqu’il faudra se contenter des dix niveaux du jeu et d’un mode « avancé » consistant en exactement la même chose, mais en plus rapide. La réalisation n’a rien d’inoubliable, entre des décors fades et des portraits de personnalités historiques n’ayant rien d’emballant – le seul niveau du jeu mettant en scène des monstres dans une ambiance de film d’horreur constituant l’unique bouffée d’originalité dans un univers trop monochrome et qui sent rapidement la poussière.
Qu’est-ce qu’on (baille) s’amuse !
Même si on notera la possibilité de pouvoir importer ses propres portraits ou encore un mode deux joueurs via modem ou câble null-modem, c’est tout simplement le cœur du jeu qui montre trop vite ses limites, et on comprend assez rapidement les raisons pour lesquelles le titre semble n’avoir jamais quitté le continent américain et qu’on n’en ait pour ainsi dire jamais entendu parler de par chez nous. Reste une curiosité qui a de quoi, comme à sa sortie, soulever un intérêt poli le temps de quelques parties avant de retourner prendre sa place éternelle dans l’oubli qu’elle mérite. Parfois, il vaut mieux reconnaître qu’on n’a plus d’idées et passer à autre chose – Faces …tris III ne restera dans les livres d’histoire les plus exhaustifs que comme la première (et dernière ?) grosse impasse de la licence.
Vidéo – Une partie lambda :
NOTE FINALE : 09,5/20
L'obsession mercantile visant à essorer le succès du mythique Tetris jusqu'à l'ultime molécule de la dernière goutte aura parfois accouché de propositions originales, certes, mais ludiquement aussi mal pensées que farfelues. Faces ...tris III est un de ces logiciels dont il ne faut guère plus de quelques minutes pour constater qu'il s'agit d'une mauvaise idée : les possibilités ludiques très limitées résultant d'un concept qui paraissait boiteux dès le départ permettent au titre de bénéficier d'une certaine curiosité le temps de quelques parties avant de constater qu'il ne se renouvèle jamais et qu'il manque cruellement de finitions. Vous n'en aviez jamais entendu parler ? Essayez et vous comprendrez pourquoi.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un concept simplement mal pensé au gameplay qui montre trop vite trop de limites – Très peu de modes de jeu... – ...et un multijoueur qui ne montre pas plus d'intérêt que le solo
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Faces …tris III sur un écran cathodique :
Version Macintosh
Développeur : Sphere, Inc.
Éditeur : Spectrum Holobyte, Inc.
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1 à 10 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh IIci
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – OS : System 6.0 Configuration graphique : Mode noir & blanc et couleur (256 couleurs)
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme on l’a vu, on peut hasarder que Faces …tris III ait été un jeu pensé en premier lieu pour le marché américain, sans doute en guise de galop d’essai avant de s’aventurer sur le marché international – et probablement d’y renoncer, à en juger par le peu de portages existants. Le Macintosh aura en tous cas fait partie des trois heureuses (?) machines à avoir hébergé le jeu, et comme on pouvait s’y attendre, le résultat est très proche de la version PC. Certes, la résolution est plus élevée, mais comme le prouve l’écran-titre redimensionné à la truelle (observez la forme des pixels du dégradé), on ne s’est pas embarrassé à tout redessiner pour l’occasion, mais le résultat est déjà plus convaincant une fois en jeu. Le menu principal se résume désormais au choix du niveau, du mode et du nombre de joueurs, toutes les autres options ayant basculé dans le menu déroulant en haut de l’interface. Le contenu et les possibilités sont identiques à ceux de la version originale, à une petite nuance près : la disparition du jeu à deux par modem et câble null-modem. Ça ne change objectivement pas grand chose à un titre toujours aussi limité, mais qui devrait se laisser découvrir une demi-heure.
Exactement ce à quoi on pouvait s’attendre : du VGA redimensionné à la truelle (mais bon, ça passe)
NOTE FINALE : 09,5/20
Faces …tris III débarque sur Macintosh sans trop se fouler : si la réalisation est un peu plus fine, il faudra en revanche tirer un trait sur un mode deux joueurs de toute façon très anecdotique. Les joueurs curieux de découvrir cette suite de Tetris dont ils n’ont jamais entendu parler seront au moins heureux de pouvoir le faire également sur la machine d’Apple.
Version Amiga
Développeur : Sphere, Inc.
Éditeur : Spectrum Holobyte, Inc.
Date de sortie : Janvier 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (simultanément, via modem et câble null-modem) – 1 à 10 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : OCS/ECS *1Mo requis pour la musique en jeu
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Faces …tris III aura également tenté un timide passage sur Amiga – qui n’aura, comme on le sait, jamais rencontré aux États-Unis le succès connu par son illustre prédécesseur, le Commodore 64. On hérite pour l’occasion de l’interface de la version Macintosh avec le contenu de la version PC – oui, le mode deux joueurs par modem ou câble null-modem est de retour. À cette nuance près, et en incluant la possibilité de jouer au joystick, on hérite d’une version graphiquement légèrement moins colorée que sur les deux autres ordinateurs – mais sincèrement, on ne peut pas dire que la différence soit bouleversante. La réalisation sonore étant, pour sa part, toujours aussi discrète (et nécessitant 1Mo de RAM !), on hérite d’un portage équivalent à la version originale, dans ses (rares) forces comme dans ses (nombreuses) limites.
On ne peut pas dire qu’on sente un gouffre avec ce qu’offrait le VGA ou un Macintosh couleur
NOTE FINALE : 09,5/20
Comme sur les autres systèmes, Faces …tris III sur Amiga offre un contenu maigrelet et une réalisation plus fonctionnelle qu’ébouriffante au service d’un concept qui s’essouffle affreusement vite. Au moins récupèrera-t-on ici la possibilité de jouer à deux, mais je doute que vos amis se bousculent pour expérimenter ce mode.