Développeur : Naxat Soft Éditeur : Hudson Soft USA, Inc. Titre original :PC電人 (PC Denjin, Japon) Testé sur :PC Engine Disponible sur : Wii, Wii U En vente sur :Nintendo eShop
Date de sortie : Octobre 1992 (Amérique du Nord) – 20 novembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Connaissez-vous Zonk ? À cette question, personne ne vous en voudra de répondre par la négative : la PC Engine aura constitué, au sein du marché européen, une rareté réservée à un public de connaisseurs. Le rattacher à son prédécesseur Bonk ne devrait pas beaucoup vous aider non plus : en effet, celui-ci ne portait ce nom que sur le marché américain, s’appelant originellement PC Genjin au Japon, FC Genjin également au japon, mais sur Famicom, et B.C. Kid ou PC Kid selon les versions en Europe…
Une spécificité d’autant plus malvenue que ce fameux personnage était censé être la mascotte de la PC Engine : difficile d’imposer une mascotte dont personne ne semble jamais s’entendre sur le nom… Quoi qu’il en soit, Zonk, lui, aura manifestement décidé de délaisser à la fois la préhistoire et le jeu de plateforme, les deux terrains de prédilection de son ancêtre, pour s’attaquer au shoot-them-up – ou plutôt, comme aiment à dire les anglophones, au cute-them-up. Ce jeu de mot délicieux (« cute » signifiant « mignon » en anglais…) aura au moins le mérite de vous annoncer tout de suite le programme : de l’action, du cartoon et des couleurs acidulées.
L’objectif de Zonk sera donc d’aller vaincre une espèce d’humanoïde à tête de lézard qui menace probablement la terre parce que c’est dans son contrat, il faudra donc parcourir cinq niveaux à défilement horizontal avant d’avoir le droit de vous farcir un boss gauntlet à l’ancienne et d’enchainer sur le combat final. Le fonctionnement est a priori simple : un bouton sert à tirer, l’autre à charger votre tir.
Ce tir chargé introduit d’ailleurs une légère composante tactique, car pendant la charge, votre personnage peut arrêter certains projectiles, avant de lâcher la purée (si vous attendez suffisamment longtemps, Zonk larguera carrément l’équivalent d’une smart bomb). Mais ce n’est pas tout ! Avant chaque niveau, le jeu vous laissera également sélectionner un allié, parmi une dizaine de personnages tous plus déjantés les uns que les autres allant de la vache volante (!) à la benne à ordure (!!) qui viendront, pour peu que vous dénichiez une sorte de smiley géant, vous prêter un coup de main en vous suivant et en tirant des missiles. Mais l’apothéose surviendra si vous trouvez un deuxième smiley géant : vous fusionnerez alors avec votre partenaire pour gagner une invincibilité temporaire et une attaque surpuissante qui devraient vous aider à faire le ménage en profondeur et en vitesse. Mieux vaudra ne discriminer personne, cependant, car chaque allié n’est sélectionnable qu’une seule fois par partie.
Le système d’upgrade du jeu est à la fois varié, original et singulièrement frustrant. Varié et original parce que chaque pouvoir est à peu près aussi cintré que l’esthétique globale du jeu : poings volants à la Goldorak, foudre, cartes à jouer, missiles à tête chercheuse, tout y passe, y compris une transformation plus originale qui a l’avantage de vous rendre plus petit (et donc plus difficile à toucher) mais l’inconvénient de vous priver de votre charge.
L’aspect frustrant, lui, provient du fait qu’il n’y a pas de montée en puissance : chaque tir n’a qu’un seul et unique niveau. Faites-vous toucher une fois et vous revenez au tir de base ; deux fois et vous êtes mort (vous réapparaissez alors directement là où vous venez de passer l’arme à gauche). Le bon côté, c’est qu’on n’est jamais réellement pénalisé de repartir de rien, tant aucun tir n’est pensé pour être surpuissant. Le mauvais, c’est qu’on aurait bien aimé pouvoir devenir un peu mieux armé, car la difficulté du jeu ne tarde pas à monter en flèche.
À ce titre, ne vous laissez pas berner par la (superbe) réalisation du jeu. Ce n’est pas parce qu’Air Zonk est un cute-them-up qu’il est facile, loin de là ! On ne tarde pas à crouler sous les tirs adverses, et les boss comme les mini-boss demandent souvent d’avoir d’excellent réflexes, ainsi qu’une bonne concentration car il n’est pas toujours facile de distinguer tout ce qui se passe devant les décors animés et psychédéliques des gros affrontements.
C’est d’autant plus dommage que vous aurez probablement tendance à profiter inconsciemment de la vue, tant les graphismes et les sprites gigantesques, tous plus imaginatifs les uns que les autres, tendent à faire passer pour une absurdité l’idée que la PC Engine puisse être une console 8 bits. Franchement, observez les captures d’écran et dites-moi si on est à des kilomètres de ce que pouvaient afficher une Mega Drive ou une Super Nintendo ! Les ralentissements sont relativement rares, mais souvent bienvenus vu la frénésie de l’action, et si on finit un peu par fatiguer tant on n’a pour ainsi dire jamais le droit de souffler plus de dix secondes, l’essentiel est qu’on se prend très rapidement au jeu.
Au final, ce Air Zonk vient rappeler pourquoi la ludothèque de shoot-them-up de la PC Engine est à ce point entrée dans les mémoires : voilà typiquement le genre de logiciel dont on trouve très peu d’équivalents chez la concurrence et qui tire magnifiquement parti d’une console originellement pensée, rappelons-le, pour rivaliser avec la NES ! Si le système de jeu, particulièrement exigeant, ne fera pas nécessairement mouche chez tout le monde, la simple originalité du titre fera qu’on sera de toute façon heureux de le relancer régulièrement pour se rafraîchir la mémoire et tenter d’aller un peu plus loin que la dernière fois. Si vous commencez à saturer des éternels univers science-fiction / biomécaniques, voilà un peu d’air frais à acquérir d’urgence.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 16/20
Sous ses dehors de titre acidulé destiné aux plus jeunes, Air Zonk cache en fait un shoot-them-up assez relevé, original et prometteur lors des premiers niveaux avant que le système de power-up ne finisse par se montrer assez frustrant par ses limites. Une chose est sûre : grâce à un univers graphique qu'on ne croise pas souvent dans les titres du genre et à un gameplay privilégiant l'adresse au surarmement, les joueurs souhaitant mettre à contribution leurs réflexes dans un logiciel tirant merveilleusement parti des capacités de la PC Engine ne seront vraiment pas déçus. Les autres tireront peut-être la langue sur la fin du jeu, mais ne devraient malgré tout pas regretter d'avoir tenté l'expérience. À tester.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Boss final vraiment corsé
– Système d'upgrade original, mais limité
– Alliés sous-employés
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Air Zonk sur un écran cathodique :
Développeur : Compile Éditeur : Toho Co., Ltd. Titre original :スーパーアレスタ (Japon) Titre alternatif :Space Megaforce (Amérique du Nord) Testé sur :Super Nintendo
Date de sortie : 28 avril 1992 (Japon) – Octobre 1992 (Amérique du Nord) – Août 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Vidéo – L’introduction du jeu :
Au cours de leur longue carrière, les studios Compile auront parfois laissé l’impression de s’être donné une sorte de mission sacrée : offrir à chaque système de la création certains de ses meilleurs shoot-them-up (entre autres choses, naturellement, Compile ayant été très loin de se limiter à un seul type de jeu). Gun-Nac sur Nes, Power Strike sur MSX et Master System, M.U.S.H.A. sur Mega Drive, Robo Aleste sur Mega-CD, Blazing Lazers sur PC Engine… le plus impressionnant avec cette liste déjà longue comme le bras est qu’elle est très, très loin d’être exhaustive.
Alors autant dire qu’à la sortie de la Super Nintendo, on attendait la pépite de chez Compile avec impatience, une impatience mâtinée d’une légère angoisse, cependant, tant le processeur de la toute nouvelle machine semblait alors incapable de faire tourner un shoot-them-up autrement qu’au ralenti. Mais les programmeurs compétents ont toujours un as dans leur manche, et Super Aleste sera venu proposer une solution gonflée, mais diablement efficace : aller puiser dans les ressources du processeur sonore de la console pour assister le processeur central. Le truc bien, avec les gens malins, c’est qu’il trouvent toujours une combine…
Super Aleste s’inscrit, comme son nom l’indique, dans la plus célèbre saga de Compile – c’est à dire nulle part, la série valsant entre les périodes et les univers sans réel soucis de cohérence. Dans votre éternelle quête pour sauver le monde ou l’univers tout seul comme un grand à bord de votre vaisseau, le véritable lien entre les différents épisodes d’Aleste se situe plutôt dans le système d’upgrade de votre astronef. Ici, vous aurez accès à pas moins de huit pouvoirs différents : missiles à têtes chercheuses, tir chargé, sphères rotatives faisant office de bouclier, tir groupé… ou plus original, comme ce tir qui explose dans toutes les directions au contact de l’adversaire.
Collecter des sortes d’œufs oranges ou verts vous permettra de faire progressivement grimper votre puissance de feu jusqu’au niveau six, où vous devriez alors être capable de vous faire respecter par tout ce qui se présente à l’écran. Attention de ne pas vous croire invulnérable pour autant, en revanche : le moindre coup encaissé vous fera dégringoler de plusieurs niveaux de puissance. Faites-vous toucher au niveau zéro, et ce sera la mort : votre vaisseau réapparaîtra alors au même endroit pour vous laisser une ultime chance de vous refaire la cerise… mais une nouvelle mort se traduira, cette fois, par un retour au dernier point de passage. Voilà pour le principe.
Ce système pour le moins déroutant a le mérite de vous donner le sentiment de toujours vous donner une chance, un peu à l’instar de Sonic avec ses anneaux : tant qu’il vous reste une bribe de puissance, vous pouvez encore espérer vous accrocher et revenir rapidement à votre puissance maximale.
Le moindre excès de confiance se payant, lui, souvent au prix fort… Et autant dire que vu la durée du jeu (pas moins de douze niveaux !), mieux vaudra être bien concentré pour espérer survivre aux derniers stages. Car suivant la tradition de la saga, ceux-ci sont bougrement longs ! Exception faites des niveaux 3, 6, 9 et 11, qui font un peu office de « stage bonus » (je dis « un peu » car le onzième niveau est bien corsé) en se montrant beaucoup plus courts et clos par des boss bien plus simples, vous allez voir du pays avec quelques passages très originaux (les grottes et ses passages ouverts à la foreuse) et d’autres… un peu moins.
On n’a pas toujours une réserve d’idées géniales sous la main, alors Compile aura décidé de recycler une partie des siennes. De fait, les joueurs ayant parcouru fidèlement les titres du studio risquent parfois d’avoir le sentiment de jouer à une sorte de best of des shoot-them-up de la firme – littéralement. Tiens, cette attaque au laser et sa forme ô combien caractéristique est un pur décalque de celle aperçue dans Blazing Lazers ! Tout comme ces sphères qui rapetissent et grandissent depuis le fond de l’écran… Et plusieurs passages font plus que rappeler Power Strike… mais, hé, l’auto-plagiat n’est pas un délit, et Super Aleste a fort heureusement largement assez de choses à offrir pour qu’on puisse lui pardonner le recyclage de quelques idées.
En terme de réalisation également, le titre de Compile semble bien décidé à faire la liste de tout ce que peut offrir la console de Nintendo et son fameux Mode 7 : depuis cette attaque de base spatiale riche en zooms et en rotations, en passant par les effets de transparence, les distorsions et tout l’orchestre avec les boutons neufs, Super Aleste plaçait dès 1992 une barre que peu de shoot-them-up sur la même console iraient prétendre à dépasser.
Le plus impressionnant restant bien évidemment la fluidité absolument irréprochable du tout : ça va vite, dans tous les sens, quel que soit le monde à l’écran, le tout sur une console qui nous avait habitué à tirer la langue en en montrant moitié moins. Les sensations de jeu sont particulièrement agréables, demandant une attention de tous les instants tout en autorisant l’erreur (à faible dose quand même, particulièrement sur la fin), et le fait est qu’on ne s’ennuie absolument jamais au cours de la bonne heure que nécessitera le titre pour espérer être vaincu. Au moins, les choses sont claires et démontrées avec brio : il est tout à fait possible de faire un excellent shoot-them-up sur Super Nintendo, il suffisait de faire appel à des gens qui s’y connaissent !
Le seul reproche que l’on pourra adresser à ce Super Aleste – et c’est largement subjectif – est son léger manque de personnalité. Loin de l’identité très tranchée de titres comme M.U.S.H.A. ou Power Strike II, qui allaient puiser leur esthétique dans le Japon médiéval ou dans des uchronies miyazakiesques, on se retrouve ici avec un univers de science-fiction assez générique où les nombreux emprunts aux autres épisodes de la saga donne parfois le sentiment de niveaux assemblés au hasard sans le moindre soucis d’unité ou de cohérence. Rien de franchement traumatisant pour un shoot-them-up, mais il manque cette petite étincelle de créativité pour transformer le très bon titre de Compile en chef d’œuvre définitif et incontestable. Reste l’un des meilleurs titres du genre sur Super Nintendo, et c’est bien là l’essentiel.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 17/20Super Aleste, c'est un peu le best of des shoot-them-up de chez Compile : une larme de Blazing Lazers, un soupçon de Power Strike, un grand verre de M.U.S.H.A.... Le résultat tire, comme souvent avec la compagnie japonaise, parfaitement parti des capacités de la Super Nintendo, offrant un jeu long et ambitieux dopé au Mode 7 sans souffrir du moindre ralentissement. Le tout est si parfaitement efficace qu'on ne peut guère reprocher à ce logiciel qu'un léger manque de personnalité, son univers ô combien générique n'étant pas le plus inspiré de la longue et prolifique saga. Il n'en reste pas moins que Super Aleste fait honneur à la série dont il est tiré en constituant un des meilleurs titres du genre au sein de la ludothèque de la Super Nintendo. L'essayer, c'est l'adopter.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des niveaux qui tirent un peu en longueur
– Vraiment corsé sur la fin
– Quelques idées directement repompées à l'identique sur d'autres titres de chez Compile
– Pas de mode deux joueurs
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Super Aleste sur un écran cathodique :
Développeur : Hot-B Co., Ltd. Éditeur : Flying Edge, Inc. Titre original :鋼鉄帝国 (Kōtetsu Teikoku, Japon) Titre alternatif :Steel Empire (Amérique du Nord) Testé sur :Mega Drive Disponible sur : 3DS, Game Boy Advance, Windows En vente sur :Nintendo eShop (3DS), Steam.com (Windows)
Version Mega Drive
Date de sortie : 13 mars 1992 (Japon) – Juin 1992 (Amérique du Nord) – Juillet 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
L’un des avantages du retrogaming, c’est qu’il permet, entre deux poussées de nostalgie, de donner une seconde chance à bien des titres passés sous les radars. Loin de l’époque où les magazines spécialisés étaient les principaux guides d’achat, bien des joueurs passionnés se mettent souvent en tête d’aller retourner chaque pierre d’un catalogue afin de mettre la main sur ce jeu dont ils n’avaient jamais entendu parler mais qui mériterait de profiter du bouche-à-oreille pour connaître une nouvelle carrière.
C’est ainsi que bien des logiciels n’ayant connu qu’un succès commercial relativement confidentiel au moment de leur sortie deviennent tout à coup des titres que tous les amateurs s’arrachent, exactement comme ces films s’étant plantés au cinéma pour rencontrer le succès plus tard par le biais du marché vidéo. Parmi les nombreux exemples de ces trésors autrefois cachés mais aujourd’hui beaucoup mieux connus, on pourrait notamment citer des titres comme Skyblazer, Terranigma, Pulseman ou encore… Empire of Steel.
Le jeu qui nous intéresse aujourd’hui est donc un shoot-them-up développé par Hot-B et paru sur Mega Drive en 1992. Pour ceux qui n’auraient jamais entendu parler de ce studio, celui-ci est principalement connu pour des jeux de rôles rarement sortis du Japon, pour des jeux de pêche (!) ou des jeux de catch (!!) mais aussi pour le très original Spy vs Spy et pour une poignée de shoot-them-up, parmi lesquels Cloud Master, Insector X, ou encore Empire of Steel, donc.
Celui-ci vous place sans surprise dans un conflit désespéré que vous allez être chargé de faire basculer à vous seul, mais pas d’empire extraterrestre ni de prototype de vaisseau spatial cette fois : choix ô combien original, surtout pour une époque où le terme comme le genre étaient encore relativement méconnus, le titre nous place dans un univers très connoté steampunk.
Face à un empire maléfique au look victorien dont les conquêtes reposent principalement sur des machines mues par la vapeur, vous allez donc devoir parcourir sept stages en faisant, en prélude de chacun d’entre eux, le choix entre deux appareils volants. Le premier sera un biplan agile, rapide et particulièrement adapté aux frappes au sol ; le second sera un dirigeable plus lent mais aussi plus résistant, un peu mieux armé contre les unités aériennes. À vous d’adapter votre véhicule à la situation ou de préférer vous spécialiser dans un modèle en particulier : dans tous les cas, chaque aéronef a ses avantages et ses inconvénients, même si la hitbox imposante du dirigeable joue en sa défaveur à mes yeux. Une fois votre choix arrêté, il est temps de prendre part à l’action.
Votre appareil, quel qu’il soit, est en fait équipé à la fois d’une mitrailleuse (pour les unités aériennes) et de bombes (pour les cibles au sol). Les deux armes seront activées simultanément chaque fois que vous ferez feu : B vous permettra de tirer vers la gauche de l’écran et C vers la droite – et non, vous ne pouvez pas tirer dans les deux directions en même temps. Au cas où vous commenceriez à vous sentir un peu débordé (spoiler : cela risque d’arriver souvent), vous pourrez puiser dans votre stock très réduit de smart bombs à l’aide de la touche A.
Le système de power-up du jeu, assez original, fait un peu penser à celui d’un titre comme Cotton : Votre montée en puissance se fera en montant de niveau, au détail près que l’expérience ne se collecte pas en détruisant les adversaires mais bien sous forme de bonus lâchés périodiquement par un certain type d’ennemi. Il faudra collecter trois éléments marqués Exp pour augmenter les dégâts et l’étendue de vos tirs comme de vos bombes. Les autres bonus incluent vies supplémentaires, smart bombs pour refaire votre stock, des satellites qui vous accompagneront jusqu’à votre mort ou encore des cœurs pour remonter votre jauge de vie. Car oui, vous en avez une. Joie.
À première vue, on pourrait d’ailleurs penser qu’Empire of Steel est un jeu plutôt simple, tant il semble faciliter la vie du joueur : entre le fait qu’on puisse parfois encaisser jusqu’à une dizaine de tirs sans mourir, le fait qu’on réapparaisse à l’endroit de notre mort avec une invincibilité temporaire, que la perte d’une vie n’entraine aucune baisse de niveau (et donc de puissance) et qu’il soit possible de choisir son nombre de vies et de continues dans les options du jeu, on part a priori pour une sympathique balade de santé.
Conseil : changez immédiatement d’idée, vous risqueriez d’être déçu. L’action, frénétique, lorgne très souvent du côté du manic shooter : il se passe tellement de choses à l’écran que le processeur de la Mega Drive tire fréquemment la langue, au point que les ralentissements soient légion. Ceux-ci risquent d’ailleurs de faire partie de vos meilleurs alliés, tant le titre de Hot-B ne laisse que rarement place à l’erreur ; j’ose même affirmer que le jeu serait rigoureusement impossible si votre aéronef avait la mauvaise idée de trépasser au premier coup encaissé. Face à des menaces qui viennent de tous les côtés de l’écran, souvent en même temps, les réflexes seront indispensables, mais ils ne seront pas suffisants : connaître le déroulement des niveaux est une nécessité absolue.
C’est d’autant plus vrai que facilement 80% de votre temps de jeu sera constitué d’affrontements (tirant d’ailleurs un peu en longueur) contre des boss ou des mini-boss : on tient clairement là la philosophie du titre, qui fait parfois penser à un boss rush, même si les morceaux de bravoure englobent aussi des passages plus originaux – et tout aussi difficiles – comme des courses-poursuites sous terre ou des vols en rase-motte à pleine vitesse. Quoi qu’il en soit, attendez-vous à transpirer, car l’action ne retombe jamais et la concentration sera essentielle.
Au rang des bonnes nouvelles, Empire of Steel ne se contente pas d’avoir une personnalité folle, évoquant par passages les obsessions « miyazakiennes » pour les châteaux volants et les univers industriels (un partenariat entre Hot-B et les studios Ghibli aurait d’ailleurs été considéré à l’époque, selon certaines rumeurs), la réalisation figure aussi clairement dans le haut du panier de la Mega Drive. On ne touche peut-être pas à la perfection représentée dans ce domaine par Thunder Force IV, mais au petit jeu des décors détaillés, des défilements parallaxes à foison, de l’action échevelée et d’une palette de couleurs qui tire le meilleur des capacités graphiques de la console, le titre de Hot-B fait mieux que se défendre ! Alors certes, on reste dans les mêmes teintes pendant l’essentiel de la partie, et le processeur a, comme on l’a vu, un peu de mal à suivre, mais on est malgré tout rarement déçu par ce qu’on peut voir lors des rares moments où on peut consacrer une demi-seconde à admirer le paysage.
La musique est, elle aussi, très efficace, et accompagne bien l’action. Autant dire qu’on a de quoi être surpris que le titre n’ait pas fait davantage de bruit au moment de sa sortie, peut-être un peu perdu au milieu d’un catalogue de shoot-them-up qui avait déjà de quoi faire bien des envieux. Le fait est qu’il fait aujourd’hui partie, aux yeux des connaisseurs, des valeurs sures de la console et des titres auxquels il faut avoir joué sur Mega Drive. Mieux vaudra être un joueur patient, habile et relativement maître de ses nerfs, mais pour tous ceux qui cherchent un bon représentant du genre sur Mega Drive, inutile de chercher plus loin.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 16,5/20Empire of Steel est un shoot-them-up passé un peu inaperçu à sa sortie et qui mérite clairement une place dans la collection de tous les amateurs du genre. Si l'aspect le plus marquant du jeu reste, à première vue, son esthétique steampunk franchement originale, particulièrement pour un titre de 1992, le déroulement évoquant un boss rush, la difficulté du jeu et la réalisation participent à n'en pas douter à faire du titre de Hot-B une expérience marquante. Si le côté « épreuve d'endurance » ne plaira pas nécessairement à tout le monde, les amateurs de shoot-them-up exigeants prêts à passer des heures à maîtriser le franchissement de chaque morceau de bravoure en auront à coup sûr pour leur argent. Les autres risquent de s'avouer vaincus avant d'en voir le terme.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Difficulté redoutable
– Nombreux ralentissements
– Boss interminables
– Boss final increvable
– Beaucoup de boss recyclés un peu trop souvent
– Autant dire que si vous n'aimez pas les combats de boss...
Même si les joueurs n’en avaient probablement pas conscience, pour la grande majorité, 1992 fut une année de transition assez délicate pour Commodore et sa machine-phare : l’Amiga 500. Si, du côté de la ludothèque, le glorieux héritier du Commodore 64 semblait au sommet de sa forme, écrasant sans forcer l’Atari ST et résistant encore assez bien à l’ascension de PCs certes bien plus puissants, mais aussi beaucoup plus chers, les choses n’étaient certainement pas aussi roses que les étals des boutiques de jeu vidéo pouvaient le laisser croire.
Personne en 1992 n’achetait un Amiga pour faire de la bureautique : de ce côté-là, le PC, bien soutenu dès l’origine par la puissance d’IBM, avait gagné depuis longtemps. L’ennui étant que de moins en moins de monde en achetait un pour jouer, les consoles 16 bits, moins chères et plus puissantes, représentant une alternative plus cohérente. Restait donc pour Commodore à espérer se lancer sur le marché des consoles tout en essayant de freiner la suprématie du PC et, pour les développeurs, à montrer que l’Amiga pouvait largement rivaliser avec les consoles de salon. Project-X est un jeu qui aura laissé croire, à l’époque, que la machine de Commodore avait de sérieuses chances dans une bataille qui était en réalité perdue depuis longtemps à tous les niveaux.
À l’origine de ce shoot-them-up développé et publié par l’équipe britannique de Team17, un prétexte qui en vaut un autre : prendre les commandes de votre vaisseau spatial pour partir à l’assaut de la planète Ryxx où pullulent des robots évoquant des insectes. Pour se faire, vous allez devoir traverser cinq longs niveaux (dont trois sont accessibles par le menu dès le début du jeu), depuis l’espace jusqu’au cœur de la planète, pour résoudre le problème en détruisant tout parce que bon, c’est comme ça qu’on s’amuse. Vous pourrez, en préambule, faire le choix entre trois modèles d’astronef (en substance : un rapide, un puissant et un équilibré), et activer un autofire par le biais des options (conseil : faites-le) avant d’aller semer le chaos et vous faire joyeusement démonter par l’opposition adverse.
Le système de jeu fait, à ce titre, plus que s’inspirer de celui de la saga Gradius : parler de pur décalque serait plus proche de la vérité. Pour ceux qui ne connaîtraient pas le principe et qui auraient la flemme d’aller lire le test, chaque power-up vient en fait débloquer des paliers de progression figurés par une liste placée au bas de l’écran. Plus vous attendrez pour les activer, plus vous aurez accès à des pouvoirs puissants, mais plus vous resterez vulnérable en attendant… Le cœur de la progression consistera donc en votre façon d’organiser votre montée en puissance de la manière la plus efficace possible – chaque mort vous ramenant au dernier point de passage avec une très sérieuse perte de puissance dans la manœuvre, autant dire que votre longévité risque d’être très sérieusement liée au temps écoulé avant de perdre votre première vie.
Car autant le dire tout de suite, Project-X est difficile. Très difficile. Face à des adversaires en surnombre suivant des patterns très souvent largement imprévisibles, face à des boss increvables qui vous demandent parfois d’aller vous placer au pixel près, face à un décor mortel au moindre contact, on comprend immédiatement comment l’idée de permettre au joueur de choisir son niveau de départ parmi les trois premiers a pu voir le jour, parce que sans elle, il y a fort à parier que 95% des joueurs n’auraient jamais découvert ne fut-ce qu’un tiers du contenu du programme. Même les niveaux bonus, qui vous demandent de survivre lancé à pleine vitesse dans des couloirs sans ennemis, reposent plus sur la mémoire que sur l’habileté. Project-X est bien un shoot-them-up à l’ancienne : frustrant, exigeant, insurmontable… et surtout extraordinairement plan-plan.
Car si la réalisation du titre figure à n’en pas douter dans le haut du panier de ce qu’a pu produire l’Amiga, au point de rivaliser par moments avec ce que la concurrence – même sur console – avait à offrir de mieux à l’époque, le level design, lui, n’a aucune chance de rivaliser avec un Thunder Force III, un Axelay ou un R-Type.
Traduit en clair : non seulement chaque niveau du jeu n’est pas grand chose de plus qu’un grand couloir vers la droite – ce qui en soit, n’est pas exactement inhabituel pour le genre – mais ce couloir correspond surtout aux mêmes éléments graphiques recopiés à l’envi (aucune variation au sein d’un même niveau), et surtout souvent aux mêmes vagues de monstres se répétant en alternance, au sein d’un même niveau et parfois même d’un niveau à l’autre. Autant dire que les passages marquants sont très rares et que, si le jeu mettait une bonne claque graphique au moment de sa sortie, les choses étaient déjà moins vraies un an ou deux plus tard, et qu’elles ne se sont pas améliorées depuis.
On regrettera également qu’en dépit du méga de mémoire exigé pour faire tourner le jeu, la très bonne musique du titre ne se fasse pas entendre au-delà du menu principal et des écrans de chargement.
L’un dans l’autre, on n’est jamais surpris, rarement amusé, et si surmonter la difficulté du jeu est un défi apte à vous tenir en haleine des mois, autant dire que les joueurs ne prenant pas spécialement de plaisir à recommencer les mêmes séquences en boucle pendant des heures pour espérer découvrir un écran ressemblant comme deux gouttes d’eau aux dix précédents risquent de décrocher bien avant d’en avoir vu le bout. Un assez bon résumé des jeux d’action développés sur ordinateurs à l’époque, en somme, et des raisons pour lesquelles ils ont souvent dramatiquement plus mal vieillis que leurs équivalents contemporains sur consoles.
Vidéo – Cinq minutes de jeu :
Récompenses :
Tilt d’argent 1992 – Meilleur jeu d’action micro (Tilt n°109, décembre 1992)
NOTE FINALE : 13/20
À sa sortie, Project-X était le shoot-them-up qui laissait espérer que non seulement l'Amiga était en pleine forme, mais qu'il pouvait même espérer rivaliser avec les consoles de salon. Avec près de trente ans de recul, force est de reconnaître qu'une réalisation bluffante pour un titre Amiga de 1992 ne suffit pas forcément à faire entrer un jeu dans la légende. Le titre de Team17 semble chercher à compenser son déroulement plat et sans imagination par une difficulté infecte jusqu'à côtoyer l'impossible, et les moments marquants sont désespérément rares au milieu du défilé ininterrompu des mêmes éléments de décors et des mêmes adversaires. On peut malgré tout passer quelques bons moments, surtout du côté des amateurs fanatiques de défis ultra-relevés, mais le fait est que le commun des mortels non-animés par la nostalgie, lui, risque de perdre patience assez vite. Encore un souvenir d'enfance qui prend un bon coup de vieux.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Beaucoup trop difficile
– Des niveaux qui s'étirent jusqu'à l'ennui
– Déroulement répétitif et sans surprise
– Pas de musique hors du menu et des écrans de chargement
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Project-X sur un écran cathodique :
Project-X Special Edition ’93
Date de sortie : 1993 Testé sur : Amiga
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Project-X aura connu, sur Amiga, un succès suffisant pour connaître une ressortie moins d’un an après sa publication. L’occasion pour Team17 d’en profiter pour offrir une version un peu plus fignolée de ce qui était alors leur titre-phare, en la présentant comme une édition spéciale à grands renforts de termes marquants parce que bon, c’est toujours plus sexy de vendre un gros patch comme une version à part entière capable de faire briller les yeux des fans. Ceci dit, le cahier des charges présentait visiblement les objectifs les plus demandés par les joueurs, à savoir : baisser la difficulté du titre, et en profiter pour corriger quelques bugs. Dans les faits, les différences ne sautent pas immédiatement aux yeux : le jeu est certes moins difficile, mais il est encore loin de la balade de santé. Les différents astronefs partent avec un meilleur arsenal, les adversaires sont moins résistants, on perd moins de bonus en mourant, et certains des passages les plus atroces ont été purement et simplement retirés, rendant les niveaux légèrement plus courts. Le jeu est à n’en pas douter mieux équilibré, mais vendre cette version comme un titre à part entière ne se justifie que par la difficulté de diffuser des patchs en 1993. Disons que si vous avez cette version sous la main, mieux vaut la lancer en priorité, mais les possesseurs de la première version de Project-X n’auront aucune raison d’hypothéquer leur maison pour acquérir celle-ci à la place.
NOTE FINALE : 13,5/20
En dépit de son nom pompeux, Project-X Special Edition ’93 n’est finalement pas grand chose de plus qu’un gros patch qui a le mérite de rendre l’expérience de jeu moins frustrante sans pour autant transcender les sensations originales. Un rééquilibrage tarifé qui devra néanmoins avoir votre préférence si vous avez accès aux deux versions.
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80386 SX – RAM : 2Mo Mode graphique supporté : VGA (320×240) Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Gravis UltraSound/ACE, Sound Blaster Système de protection de copie via consultation du manuel
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Il aura fallu deux ans pour que Project-X se décide à faire le trajet jusque sur la machine d’IBM. Trouver un PC capable de faire tourner un shoot-them-up n’avait plus rien d’exceptionnel, le problème étant que la plupart d’entre eux étaient surtout occupés à faire tourner Doom, ce qui explique que ce portage soit passé largement inaperçu. En effet, difficile pour un joueur PC en train de découvrir la révolution 3D de se passionner pour un portage assez fainéant de la version Amiga. Le jeu semble être tiré de la Special Edition, mais c’est objectivement assez difficile à dire. Le principal regret est surtout de ne rien y trouver de neuf : si le thème musical est toujours aussi bon pour peu qu’on possède une Gravis Ultrasound ou une Sound Blaster, il n’y a toujours pas de musique une fois en jeu ! Sur des machines qui commençaient à faire tourner des jeux en 3D sur CD-ROM, autant dire que c’était déjà un tantinet anachronique… Graphiquement, le jeu trouve même le moyen d’être légèrement inférieur à la version Amiga en dépit des 256 couleurs du VGA : on ne saura probablement jamais pourquoi les tirs de votre vaisseau avaient soudainement besoin d’être blancs plutôt que bleus… Autant dire qu’à une époque où il était à peu près établi qu’un PC haut-de-gamme pouvait faire bien mieux qu’un Amiga dans pratiquement tous les domaines, la pilule avait un peu de mal à passer. Vu la rareté des shoot-them-up sur PC, on pouvait essayer de ne pas trop faire la fine bouche au moment de la sortie du jeu, mais à une ère où même un téléphone peut facilement émuler un Amiga…
NOTE FINALE : 12/20
Comme un symbole, Project-X n’aura déclenché à sa sortie sur PC qu’une indifférence inversement proportionnelle à l’engouement qu’il avait provoqué sur Amiga – signe assez parlant du gouffre qui s’était créé en deux ans entre les joueurs et ce qu’on considérait comme la crème de la crème des jeux d’action de 1992. Dans une version même pas à la hauteur de celle qui tournait sur un Amiga 500, on oubliera certainement assez vite un titre qui n’a plus beaucoup d’arguments pour lui.
Développeur : T&E Soft, Inc. Éditeur : T&E Soft, Inc. Titre original :地球解放軍ジアース ZAS (graphie originale, Japon) Titre alternatif : ZAS (écran-titre) Testé sur :Game Boy
Version Game Boy
Date de sortie : 18 décembre 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb
Avec le temps, la Game Boy aura connu un succès commercial que les rivaux de Nintendo n’auront pu que lui envier, ayant souvent échoué à comprendre la véritable force de la petite console portable. La Lynx ou la Game Gear auront en effet fait l’erreur, en choisissant de donner dans la surenchère technique, de prendre la forme de mastodontes dont l’appellation « portable » pouvait déjà être sujette à débat, avec des titres rarement pensés spécifiquement pour le support, et une autonomie si pitoyable qu’elle aura sans doute participé à la fortune des marchands de piles. Gunpei Yokoi avait visé juste à tous les niveaux, et ce qui aurait pu passer pour un simple jouet aura même initié bien des récalcitrants aux plaisirs coupables du jeu vidéo.
Le problème, bien sûr, restait de savoir quel type de jeu offrir sur une machine dotée de 8ko de RAM et équipée d’un écran de 4,7 x 4,3cm. En dépit de l’ingéniosité réelle des développeurs, qui auront su offrir à la console une ludothèque impressionnante, on ne pouvait pas trop miser sur l’esbroufe au moment de commercialiser un jeu sur Game Boy. Ce qui explique sans doute que des concepts ayant fait fureur en arcade, comme les impressionnants shoot-them-up de la fin des années 80 et du début des années 90, n’aient pas vraiment fait florès sur la petite machine. Et pourtant, en jeu vidéo plus encore qu’en religion, les miracles existent.
Prenez l’exemple de T&E Soft. Avez-vous déjà entendu parler de cette société japonaise ? Il y a fort à parier qu’à côté de cadors comme Capcom ou Konami, le nom échoue à vous évoquer un titre majeur. Il faut dire qu’en-dehors de la très dispensable série des Hydlide, le studio sera principalement resté cantonné sur le marché nippon où il aura offert assez peu de logiciels méritant de faire le trajet jusqu’en occident. À part peut-être une bizarrerie comme Chikyū Kaihō Gun ZAS (que je vais juste appeler ZAS à partir de maintenant, si ça ne vous fait rien) qui doit être l’un des shoot-them-up les plus impressionnants programmés sur Game Boy. Comme quoi…
Passons rapidement sur le scénario ; la terre est menacée, je ne sais pas par qui vu que je ne parle pas le japonais, mais ça ne m’a jamais empêché de faire feu avec un vaisseau spatial. ZAS est donc un shoot-themp-up à défilement vertical vous embarquant dans cinq niveaux se bouclant en un peu moins d’une demi-heure ; ce n’est pas très long, mais cela correspond assez bien au côté nomade de la machine. On remarquera dans les options la possibilité de choisir son niveau de départ entre les quatre premiers : prenez cela comme une fonction d’entraînement, le cinquième et dernier niveau n’étant de toute façon accessible qu’en ayant bouclé les quatre autres. Il sera également possible de choisir sa difficulté, ce qui est assez bienvenu, le jeu n’étant par défaut pas spécialement facile. Après quoi, on lance la partie, et on admire le travail.
La lisibilité, on s’en doute, aura été un tracas récurrent sur l’écran minuscule, monochrome et non-rétroéclairé de la Game Boy. T&E Soft sera visiblement parvenu à trouver une manière intelligente de contourner le problème, en affichant un plan en parallaxe plus clair que l’autre afin de donner un effet de profondeur jamais vu sur la petite console.
Je vous laisse observer le résultat sur les captures d’écran : c’est quand même sacrément bien fichu. La technique repose en fait sur un effet de clignotement dont le seul défaut est qu’elle peut rendre le jeu assez délicat à émuler – ce qui est d’autant plus gênant que le titre est très difficile à trouver sous sa forme physique. Mais pour peu que vous puissiez poser les yeux sur le logiciel dans des conditions optimales, c’est assez bluffant, et cela démontre une nouvelle fois à quel point quelques bidouilles de programmation peuvent décupler les capacités d’une machine.
En terme de gameplay, ZAS ne fait pas dans la démesure, mais il est parfois bon de savoir où s’arrêter. La plus grande partie des possibilités sera incarnée par deux satellites venant se placer de part et d’autre de votre astronef, et que vous pourrez, au choix, rattacher à votre carlingue ou au contraire éloigner par simple pression du bouton A.
Séparés, vous toucherez une zone plus large, alors que groupés, vous bénéficierez d’un tir plus puissant. Il s’agit du seul véritable power-up du jeu avec un bouclier capable d’absorber un coup et quelques bonus de score. On pourrait croire que cela limite franchement l’intérêt du jeu, mais l’essentiel de la difficulté du titre reposera principalement sur votre science du placement plus que sur votre puissance de feu : obstacles en tous genres, labyrinthes, éléments de décor dynamiques ; tout cela sera en œuvre pendant toute la partie pour vous forcer à être constamment en mouvement et vous apprendre à louvoyer entre les tirs, les adversaires, les pièges et les murs pour espérer parvenir jusqu’au boss, faute de quoi le moindre pixel de travers signifiera votre mort et le retour au dernier checkpoint – mais sans perdre votre power-up. Sans être insurmontable, le jeu peut s’avérer coriace par séquences, particulièrement dans ses derniers niveaux, et mieux vaudra tirer parti de tous vos continues – et rester bien concentré – pour espérer le finir sans connaître précisément le déroulement de chaque stage.
Au final, la variété est de mise, on passe un bon moment tout en découvrant ce dont la Game Boy est capable, et on ne peut qu’apprécier l’intelligence d’un titre qui ne cherche jamais à en faire trop – sans quoi on aurait probablement eu à faire à un cafouillis illisible ou aux trois-quarts injouable.
Au lieu de quoi, ZAS est intelligemment articulé autour d’un défi bien conçu reposant autant sur vos réflexes que sur votre capacité d’observation, et on ne se sent jamais condamné à mort pour avoir perdu l’essentiel de sa puissance de feu au milieu du niveau comme c’est les cas dans la plupart des ténors du genre – n’est-ce pas, R-Type ? Bref, sans être estomaqué comme on pouvait l’être face à une borne d’arcade, on est néanmoins scotché à sa Game Boy d’un bout à l’autre de la partie, et ça, c’est bien l’essentiel. De quoi donner une belle leçon à bien des studios de développement plus cotés.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 15/20
Programmer un shoot-them-up sur Game Boy est loin d'être une évidence, mais à ce titre, Chikyū Kaihō Gun ZAS s'en tire si bien qu'on ne peut que pester que le jeu de T&E Soft n'ait jamais daigné quitter le Japon. Loin de se limiter à une prouesse technique, pourtant déjà assez bluffante, le titre a la bonne idée de proposer d'un bout à l'autre une expérience de jeu taillée sur mesure pour la console portable en choisissant de coller aux fondamentaux plutôt que de pêcher par excès d'orgueil. Le résultat constitue à n'en pas douter un des tous meilleurs programmes du genre sur Game Boy, et une bonne occasion de découvrir de quoi la petite console était capable lorsqu'une équipe compétente choisissait de se donner un peu de mal. Du très bon boulot, à découvrir si jamais vous avez la chance de parvenir à mettre la main sur une copie du jeu.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Très peu de power-up ; le gameplay ne repose à l'évidence pas sur la montée en puissance de votre vaisseau
– Un sélecteur de niveau qui ne sert pas à grand chose puisqu'il faudra de toute façon partir du début pour accéder au niveau cinq
Bonus – Ce à quoi ressemble ZAS sur l’écran d’une Game Boy :
Développeur : KID Corp. Éditeur : Naxat Soft Titre original :Summer Carnival ’92 烈火Recca (graphie japonaise originale) Titre alternatif :Summer Carnival 92 烈火 (écran-titre) Testé sur :Famicom Disponible sur : 3DS En vente sur :Nintendo eShop
RetroArchives.fr a beau s’attacher à tester des jeux commerciaux – à savoir, des titres généralement réalisés par des équipes professionnelles et distribués et vendus par le biais des circuits légaux, excluant de fait les mods, hacks et autres projets de fans – cela n’empêche pas de rencontrer, de temps à autres, quelques surprises. De fait, jusqu’à une récente apparition sur le Nintendo eShop, il y a fort à parier que le joueur lambda n’ait tout simplement jamais entendu parler de Summer Carnival ’92 : Recca.
Le titre en lui-même a déjà quelque chose de déstabilisant : un carnaval ? Qu’espérer trouver sur la cartouche, alors, une compilation de mini-jeux ? Non, le Summer Carnival en question était en fait une compétition organisée par Naxat Soft au Japon et reposant chaque année sur des shoot-them-up généralement développés spécialement pour l’occasion ! Inutile donc de pleurer votre inculture si vous n’aviez encore jamais entendu parler du jeu testé aujourd’hui : non seulement il n’était, jusqu’à sa re-parution sur 3DS, jamais sorti du Japon, mais il y avait même été distribué en très petites quantités ! Pourquoi, alors, s’attacher à présenter un programme aussi ciblé et, jusqu’à il y a peu, aussi confidentiel ? Pour une raison très simple : Recca, comme on se contentera de l’appeler à présent, est sans débat possible l’un des plus grands accomplissements technique de la NES. Rien que ça.
Le titre de KID Corp repose sur des mécanismes simples : un bouton pour tirer (en autofire, et encore heureux !), le relâcher vous permettra de charger un tir qui fera office de smartbomb. Select vous permettra de régler la vitesse de votre vaisseau, ce qui s’avèrera très rapidement indispensable (certains boss sont totalement infranchissables si votre astronef ne va pas précisément à la bonne vitesse pour les affronter).
Pour le reste, votre montée en puissance se fera par le biais de deux types de power-up : Les lettres bleues vous permettront de choisir votre tir principal (tir frontal, tir en cône, tir à tête chercheuse…) et les lettres rouges définiront le comportement des espèces de petits satellites qui pourront parfois vous accompagner, et qui peuvent parfois arrêter certains tirs. Augmenter la puissance de votre tir principal est possible, mais cela vous demandera de bien faire attention à reprendre la lettre correspondante ; pour cela, il suffit d’attendre, puisque la nature du bonus change à chaque seconde, mais vu la frénésie de l’action, croyez-moi, attendre constituera un luxe que vous pourrez rarement vous offrir.
L’action, justement, parlons-en. Recca est paru en 1992, à une époque où la NES était en fin de carrière. Le moyen d’offrir à la console de Nintendo un chant du cygne digne d’elle, les programmeurs commençant à être sérieusement rodés vis-à-vis de la machine. Et là, on peut carrément parler d’apothéose : dès les premières secondes de jeu, ce sont littéralement des dizaines de sprites qui se jetteront sur vous à une vitesse totalement délirante – le jeu tourne à un petit 60FPS de moyenne, tranquillement, sur du hardware 8 bits, et ce alors que la Super Nintendo elle-même est connue pour rencontrer les pires difficultés à faire tourner un shoot-them-up sans ralentissements !
Mais le véritable exploit repose précisément sur la pléthore d’ennemis à l’écran : rappelons-nous qu’afficher plus de quelques sprites en même temps était une des principales limites de la NES, à tel point que la conversion de Gradius, par exemple, avait fait le choix de limiter le nombre de tirs et de satellites pour soulager le processeur de la console. Six ans plus tard, en tous cas, on en était visiblement très loin : il y a des tirs et des adversaires partout, dans tous les sens, tout le temps, classant clairement le jeu dans la catégorie du manic shooter (le jeu est d’ailleurs parfois considéré comme le tout premier représentant du genre, avant Batsugun ou DonPachi) sans l’ombre du plus minuscule ralentissement ! De quoi littéralement humilier des dizaines de titres similaires sur consoles 16 bits !
En revanche, autant dire que ça clignote encore plus frénétiquement qu’une guirlande de Noël épileptique, mais le programme parvient malgré tout à rester lisible en toute circonstance, loin des errements à la R-Type sur Master System, par exemple. C’est tout simplement renversant ! Et histoire d’en remettre une couche, Recca se permet même des effets de distorsion très poussés que n’aurait pas renié le Mode 7 de sa petite sœur, ainsi qu’une pléthore de défilements parallaxes. Il y a de quoi se prendre à rêver de ce à quoi aurait pu ressembler la ludothèque de la machine si tous les programmeurs l’ayant approchée avaient atteint ce niveau de maîtrise. Si vous voulez savoir de quoi votre NES est capable, commencez donc par là !
En revanche, gardez bien à l’esprit que Recca est un shoot-them-up pensé pour la compétition. Traduit en clair : le jeu est extrêmement dur, et espérer en voir le bout vous demandera un entrainement régulier et des nerfs à toute épreuve tant le titre est exigeant.
Si le jeu ne comporte a priori que quatre stages, ceux-ci vous demanderont au grand minimum une bonne quarantaine de minutes d’efforts, ce qui devrait correspondre à une perte de poids de votre part tant vous n’aurez jamais une demi-seconde de répit. Et au cas où vous n’auriez pas encore votre compte, il existe même sept stages supplémentaires, encore plus difficiles (!), accessibles si vous poussez le bouton Reset à la conclusion de votre première aventure. Ajoutez-y des modes Time Attack et Score Attack, au cas où vous souhaiteriez vous placer dans les mêmes conditions que les compétiteurs, et vous allez vite réaliser que vous en aurez pour des mois avant de prétendre avoir fait le tour du jeu.
Naturellement, ce gameplay hyper-exigeant ne fera pas que des heureux, et les joueurs occasionnels risquent de jeter un coup d’œil par simple curiosité avant de prendre la fuite à toutes jambes. Les retrogamers à la recherche de la perle rare pourront en revanche sabrer le champagne, en découvrant un titre auquel ils auraient certainement rêvé de s’essayer au moment de sa sortie – mieux vaudra s’en remettre au Nintendo eShop, cependant, car autant dire que trouver une copie physique du jeu à un prix vaguement abordable aujourd’hui est totalement hors de question. Mais si jamais vous rêvez de voir enfin ce que votre NES a réellement dans le ventre, et d’en profiter pour découvrir l’un des shoot-them-up les plus impressionnants jamais publiés sur une machine strictement 8 bits, ne cherchez pas plus loin. En termes vidéoludiques, on appelle ça le Graal.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 17/20
Quand KID corp décide de montrer ce que la NES a dans le ventre, cela donne Summer Carnival '92 : Recca ; un manic shooter à l'action frénétique, à la difficulté inimaginable et à la réalisation renversante. En dépit des limitations techniques évidentes de la vaillante console 8 bits, la machine de la firme au plombier se sort les tripes pour afficher des dizaines de sprites à l'écran à une rapidité ébouriffante qui aurait de quoi donner de sérieux complexes à bien des titres parus sur Super Nintendo. Mieux vaudra avoir des réflexes surhumains et des nerfs d'acier, car le titre n'est pas franchement conçu pour autoriser l'erreur, mais les fans de scoring devraient trouver ici l'un des titres les plus marquants de tout le catalogue de la NES. Vous n'en aviez jamais entendu parler ? Profitez de sa réapparition sur le Nintendo eShop pour découvrir que votre antique console de salon peut encore vous surprendre. Et préparez-vous à en baver...
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Jeu pensé dès le départ pour être punitif
– Difficulté de compétition. Attendez-vous à souffrir
– Énormément de clignotements
– Vitesse ahurissante qui demande des réflexes à la hauteur
– Habillage minimal : pas de d'histoire, pas d'intro, aucune cinématique
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Recca sur un écran cathodique :
Développeur : id Software, Inc. Éditeur : Apogee Software, Ltd. Titres alternatifs :Wolfenstein 3-D (Shareware), Wolfenstein 3D : Third Encounter (Macintosh) Testé sur :PC (DOS) – Jaguar – Macintosh – PC-98 – Super Nintendo – 3DO Version non testée : Acorn 32 bits L’extension du jeu :Spear of Destiny Disponible sur : iPhone, iPad, Macintosh, Playstation 3, Windows, Windows Apps, Xbox 360, Xbox One En vente sur :Gog.com (Windows), Steam.com (Windows)
La série Castle Wolfenstein (jusqu’à 2000) :
Castle Wolfenstein (1981)
Beyond Castle Wolfenstein (1984)
Wolfenstein 3D (1992)
Version PC (DOS)
Date de sortie : 5 mai 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Remonter aux sources du genre qu’on en est venu à appeler, à force de changements sémantiques, le FPS – pour First Person Shooter (littéralement : « jeu de tir à la première personne », au cas où votre anglais laisserait vraiment à désirer) – revient d’abord à aller fouiller dans les balbutiements de la 3D texturée sur PC. « Au commencement était Wolfenstein 3D » dit parfois la légende – en se fourrant dramatiquement le doigt dans l’œil, comme souvent dans le cas du mythe.
« Au commencement était Ultima Underworld » , tentera le rôliste averti – et il sera déjà davantage sur la bonne piste, le titre de Blue Sky Productions étant une source d’inspiration majeure pour l’équipe d’id Software, même s’il y a débat (je laisserai les curieux consulter la page Wikipedia d’Ultima Underworld à ce sujet) – mais dans tous les cas, ce n’était pas un jeu de tir à proprement parler. En revanche, une chose est sûre : dès les premiers pas du genre avec un certain Hovertank en 1991, on trouve déjà deux noms : John Carmack et John Romero. Lesquels, avant de devenir mondialement célèbres grâce à Doom, développeront un autre FPS pour la compagnie américaine Softdisk Publishing, nommé Catacomb 3-D, avant de se lancer dans le jeu que tout le monde connait et qui nous intéresse aujourd’hui : Wolfenstein 3D – le premier grand succès d’une longue série.
Un prétexte en valant bien un autre, le titre d’id Software décide de rebondir sur le concept de l’antique Castle Wolfenstein, qui avait fait ses armes sur les ordinateurs 8 bits onze ans auparavant. Vous voici donc placé dans la peau de l’espion allié B. J. Blazkowicz, prisonnier de la forteresse nazie qui donne son nom au jeu, et bien décidé à reconquérir sa liberté avant d’aller régler son compte à Adolf Hitler en personne. Bien évidemment, pas question de furtivité dans cette version (même si cela avait été envisagé au début du développement) : vous avez un pistolet, des munitions, et vous êtes bien décidé à vous en servir, quitte à faire tomber le IIIe Reich pratiquement à vous tout seul. Et franchement, comment dire non ?
Du fait de son statut originel, Wolfenstein 3D est divisé en épisodes – naturellement tous disponibles aujourd’hui à la vente, le concept du shareware étant quelque peu tombé en désuétude. Le premier vous demandera de vous enfuir de la forteresse, le deuxième vous enverra combattre un savant fou occupé à créer des soldats-zombis, le troisième vous enverra régler son compte au führer sans lui laisser le temps de se suicider, et les trois derniers épisodes feront office de « préquelle » en vous mettant aux prises avec de nouvelles forteresses. Le concept ne change de toute façon jamais : neuf niveaux, un boss, des clés, des bonus et des passages secrets, autant dire la base.
De fait, l’amateur moderne de FPS devrait immédiatement trouver ses marques, et pour cause : un bouton pour tirer, un bouton pour « actionner » (les portes, les passages secrets ou la sortie du niveau), un autre pour le déplacement latéral (ou strafe) : difficile de faire plus simple. Il est impossible de sauter, de se baisser, de regarder vers le haut ou vers le bas, et il suffit de passer sur un objet pour le ramasser, vos clefs ouvrant automatiquement les portes correspondantes. Le jeu ne contient que quatre armes en tout, en comptant votre petit couteau : un pistolet, une mitrailleuse et une gatling, et toutes les armes à feu emploieront le même type de munitions, dont le nombre maximal est d’ailleurs fixé à 99. Ne cherchez pas de subtilités comme une valeur d’armure ou un moyen de dépasser les 100% de vie, il n’y en a pas.
Si la simplicité de l’approche du jeu est ainsi son principal point faible (on explore, on tire, on collecte), c’est aussi paradoxalement sa grande force. Proposer une expérience de jeu basique ne lui interdit pas d’être efficace, et progresser précautionneusement au sein d’un labyrinthe en gardant un œil sur sa santé et ses munitions est un principe qui a largement fait ses preuves. On sait tout de suite ce qu’on a à faire, on ne s’embarrasse pas à suivre des cinématiques ou une histoire dont on se fout royalement : on reste en vie, on tue du nazi et on gère ses munitions, et c’est parfaitement suffisant.
Non seulement c’est déjà beaucoup plus amusant qu’on pourrait le croire, biberonnés que l’on est par près de trente ans d’évolution du genre, mais le titre a même l’excellente idée de comporter une composante scoring en vous proposant de collecter des trésors, bien souvent dissimulés derrière des passages secrets, histoire de gagner des points. Sachant que votre score final dépendra à la fois du nombre de trésors collectés, du nombre d’adversaires tués, du nombre de passages secrets trouvés mais aussi du temps réalisé pour terminer le niveau, autant dire que les fanas de speedrunning devraient largement trouver matière à s’occuper. Les autres seront sans doute parfaitement heureux de débrancher leur cerveau pour revenir aux bases absolues du genre – et piquer quelques crises de nerfs face à des boss totalement increvables qui peuvent littéralement vous atomiser en une demi-seconde.
Du côté de la réalisation, Paul Neurath prétend se souvenir que John Carmack aurait affirmé, en voyant tourner la démonstration du premier prototype d’Ultima Underworld, être capable de concevoir un algorithme de mapping des textures plus rapide. Si le titre d’id Software est effectivement plus rapide, ce n’est pas franchement un exploit : très loin des nombreuses capacités de celui de Blue Sky Productions, le moteur de Wolfenstein 3D va à l’essentiel : pas de pentes, pas de reliefs, pas de gestion de la lumière, pas de moteur physique, et le sol comme le plafond se limitent à un simple aplat de couleur ; difficile de faire moins gourmand !
Cela n’empêche pas le titre de parfaitement accomplir sa mission, même si le manque de variété des textures pourra faire largement autant tiquer le joueur moderne que le côté pour le moins minimaliste des graphismes du jeu. Un manque de variété qui se retrouve d’ailleurs hélas à tous les niveaux : exception faite du boss, le premier épisode du jeu ne compte ainsi que trois types d’ennemis différents ! Auxquels le deuxième épisode rajoute des soldats zombis, et le troisième des officiers très rapides, on aurait quand même aimé avoir un peu plus de chair à canon à se mettre sous la dent. Niveau sonore, le jeu se contente du minimum, avec gestion de l’AdLib, de la Sound Blaster et, curieusement, de la Disney Sound Source, et rien d’autre. La musique se limite à un simple thème d’ambiance une fois passé l’écran-titre, et les bruitages font le travail, avec notamment quelques digitalisations en (mauvais) allemand histoire de mettre un peu de vie.
Au final, même si le concept finit fatalement par s’essouffler au bout de sept ou huit heures faute de la moindre forme de renouvellement, on sera surpris de passer encore un excellent moment sur ce Wolfenstein 3D qui n’offre aucune fioriture et se contente d’aller à l’essentiel, mais le fait à la perfection.
La jouabilité est irréprochable, le level design fonctionne à merveille, le titre est rarement injuste et on appréciera même les premiers efforts pour tenter de rendre certaines pièces reconnaissables à l’aide d’éléments de mobiliers afin de donner l’impression qu’on est en train de se balader dans une cuisine ou un dortoir. Alors oui, la réalisation pourrait être largement plus accomplie, les environnements et les adversaires plus variés, le contenu plus riche, les armes plus nombreuses… Mais on peut aussi être parfaitement heureux de trouver ce qu’on était venu chercher, sans la moindre forme de surprise, et de jouer à une partie de cache-cache mortelle avec les nazis le temps d’une ou deux soirées à décompresser après une dure journée de travail. Parfois, c’est très exactement ce qu’on demande aux jeux vidéo, et on est très heureux que cela fonctionne encore.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 15,5/20
Avec le temps, la légende aura fait de Wolfenstein 3D le tout premier first person shooter (ce qu'il n'est pas), voire le premier titre en 3D texturée (ce qu'il est encore moins), ainsi que le père spirituel deDoom(ce qu'il est, cette fois). Cet impressionnant pédigrée plus ou moins fantasmé aura parfois encouragé les nostalgiques à en faire un jeu extraordinaire, colossal, indépassable, là où sa principale force est précisément la fantastique simplicité de son concept : un labyrinthe, un fusil, des ennemis à tuer, des bonus - et strictement rien d'autre. Entièrement focalisé sur l'action, le joueur actuel peut encore passer un très bon moment sans jamais ressentir le besoin de rebrancher son cerveau, ce qui, parfois, est une bonne chose. Et quand on cherche un moyen de souffler un peu au terme d'une longue journée de travail, on trouve peut-être ici un des titres idéaux. Une valeur sûre.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Seulement quatre armes, un seul type de munitions, très peu d'adversaires différents : l'essentiel et rien d'autre
– Le côté labyrinthique ne plaira pas nécessairement à tout le monde, surtout en l'absence de carte
– Des boss qui peuvent littéralement vous descendre en une demi-seconde
– Très peu de subtilité(s)
– Franchement répétitif au bout de quelques heures
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Wolfenstein 3D sur un écran cathodique :
Spear of Destiny
Développeur : id Software, Inc.
Éditeurs : FormGen, Inc. (Amérique du Nord) – Psygnosis Limited (Europe)
Date de sortie : 19 septembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Testé sur : PC (DOS)
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Étant donné le succès fulgurant de Wolfenstein 3D, on ne sera pas surpris d’apprendre qu’une extension aura rapidement été mise sur les rails, et développée par la même équipe que le jeu de base en à peine deux mois. Comme surenchérir sur l’assassinat d’Hitler était une mission vouée à l’échec, l’extension se déroule une nouvelle fois avant le jeu à proprement parler, dans une mission qui vous enverra récupérer la lance ayant percé le flanc du Christ, et qui aurait, selon la légende, le pouvoir d’assurer la victoire éternelle à celui qui la possède – et la mort immédiate à celui qui la perd.
On se relance donc, cette fois, dans un seul – et long – épisode, divisé en trois missions, pour aller récupérer cette fameuse lance. Au menu ? Strictement la même chose que dans le jeu de base, plus un nouveau type d’adversaire (encore un soldat), un nouveau type de bonus (une caisse de munitions), quelques types de textures en plus pour les décors (plus quelques nouveaux boss, quand même), quelques nouveaux thèmes musicaux. Et à part ça ? Rien de neuf : on enchaine toujours les niveaux, il n’y a pas l’ombre d’une nouvelle arme ou d’un nouveau mécanisme, et on n’est au final pas franchement surpris que cette extension ait été développée aussi vite. Évidemment, la difficulté en a profité pour augmenter en flèche, les niveaux étant plus labyrinthiques que jamais, les ennemis plus nombreux, et chaque croisement ayant de fortes chances de vous placer directement entre deux adversaires. Autant dire que les joueurs n’ayant pas eu le courage de terminer les six épisodes du jeu original faute de renouvellement n’auront pour ainsi dire aucune raison de donner sa chance à Spear of Destiny. Les mordus de Wolfenstein 3D, pour leur part, seront certainement ravis de replonger pour quelques heures – et ils auraient torts de se priver, l’extension étant de toute façon vendue par défaut avec le jeu sur les sites en ligne.
Version Jaguar
Développeur : id Software, Inc.
Éditeur : Atari Corporation
Date de sortie : Septembre 1994 (Amérique du Nord, Europe) – 15 décembre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 16Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Bien qu’étant principalement connu pour son itération PC, Wolfenstein 3D ne sera pas resté cantonné sur la machine d’IBM. Signe des temps, c’est l’éphémère console 64 bits d’Atari, la Jaguar, qui aura été l’une des premières machines à profiter de son adaptation. Je dis « adaptation », car cette version n’est pas un simple calque du jeu paru sur DOS. Au rang des qualités, on remarquera l’apparition d’un briefing plus détaillé que les quelques lignes de la version shareware, une interface en plein-écran, des graphismes plus fins et plus détaillés (c’est particulièrement visible sur les ennemis et sur les armes, qui ne sont plus limitées à une simple bouillie de pixels), des bruitages et des voix digitalisées de meilleures qualité (le « Achtung ! » que lâchent les adversaires à chaque fois qu’ils vous voient devient assez vite énervant), des musiques remixées, ainsi que deux nouvelles armes : un lance-flamme et un lance-roquette.
Il est également enfin possible de posséder plus de 99 munitions, la vie peut monter au-delà de 100, et une carte est enfin disponible. Au rang des défauts, le jeu ne comporte plus « que » trente niveaux, repris directement de la version PC et de Spear of Destiny dans des versions simplifiées, ce qui n’est peut-être pas plus mal si l’on considère qu’il n’est plus possible de sauvegarder. Le jeu a de toute façon été rééquilibré : les adversaires sont plus nombreux, mais ils font moins mal. Dans l’ensemble, et en dépit de la déplorable manette de la Jaguar, on passe un bon moment qui ferait presque regretter que la console d’Atari n’ait pas connu un meilleur destin. Cette version a indéniablement son charme, mais on regrettera l’amputation de contenu.
NOTE FINALE : 15/20
Petite surprise que cette adaptation de Wolfenstein 3D sur Jaguar, qui se donne la peine d’être plus accomplie techniquement que sur PC. Si le jeu est mieux réalisé et tout aussi rapide, on regrettera néanmoins que près de la moitié de son contenu soit passé à la trappe, en dépit d’ajouts bienvenus, et que la jouabilité soit moins agréable au pad. Si vous avez un exemplaire de la console d’Atari sous la main, c’est en tous cas à n’en pas douter un des jeux à posséder dessus.
Version Macintosh
Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : MacPlay
Date de sortie : Octobre 1994
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette comprenant à la fois Second Encounter et Third Encounter
Configuration minimale : Processeur : PowerPC – OS : Mac OS 6.0
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Vu la proximité du hardware entre le PC et le Macintosh (certains pourraient même dire que le Mac n’est pas grand chose de plus qu’un PC avec un système d’exploitation différent), on pouvait s’attendre à ce que Wolfenstein 3D, porté sur la machine d’Apple, se contente d’être un bête clone au pixel près de la version DOS et passer à autre chose. Mais id Software, s’avisant probablement qu’on était déjà en 1994, et que le monde vidéoludique avait entretemps vu débarquer des mastodontes comme Doom ou Heretic, décida donc de procéder à un petit dépoussiérage encore plus prononcé que sur la version Jaguar. Traduit en clair : le jeu passe en haute résolution, des textures aux sprites en passant par l’interface, et ça fait quand même un bien fou. Pour ne rien gâcher, pour peu que vous ayez la chance de trouver l’édition « ultime » parue sur CD en 1995, vous bénéficierez non seulement des 60 niveaux de la version PC (renommés Third Encounter pour l’occasion), mais aussi… des 30 niveaux des version Jaguar et Super Nintendo (baptisés, cette fois, Second Encounter). On pourra rétorquer que ces 30 niveaux étant des versions remaniées des 60 premiers, on assiste donc à une certaine forme de redite, mais difficile de bouder sur du contenu supplémentaire. Pour ne rien gâcher, on profite également d’une musique qualité CD et de bruitages améliorés ; bref, on ne se moque pas de nous et ça fait plaisir.
NOTE FINALE : 16/20
Loin du bête portage à l’identique auquel on aurait pu s’attendre, Wolfenstein 3D sur Macintosh débarque au contraire avec le contenu de toutes les autres versions, de la musique CD et des graphismes en haute résolution. Si cela ne métamorphose pas une expérience de jeu qui reste de toute façon datée par rapport à la production actuelle, c’est néanmoins l’occasion de redécouvrir le jeu avec un peu plus de confort. On aurait tort de se priver.
Version PC-98
Développeur : Infinity Co., Ltd.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 18 Novembre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais/japonais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale : –
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Tandis qu’approchait le milieu des années 90, un constat s’imposait : la gamme propriétaire de NEC ressemblait de plus en plus à un PC occidental tout à fait banal. Cela se sent d’ailleurs au niveau des portages, qui s’avèrent généralement être de simples conversions pixel perfect de la version occidentale, le plus souvent traduit en japonais. Ici, on sent bien que l’équipe de développement ne s’est pas tuée à la tâche : non seulement c’est la copie conforme de la version PC originale en termes de réalisation et de contenu, mais il n’y a pas eu un grand souci d’harmonisation au moment d’intégrer les nouvelles options de configuration dans l’interface : il y a tout simplement des menus en japonais en plein milieu des menus en anglais. Dans le même ordre d’idée, on sent bien que tirer parti de la puce FM de la machine est ici une gageure : si vous voulez du son, il faudra une Sound Blaster, point barre ! Bref, de la conversion un peu à la truelle pour ce qui est du confort de l’utilisateur, mais à ce détail près, c’est toujours exactement le même jeu que sur PC, jusqu’aux cris en allemand.
NOTE FINALE : 15,5/20
Comme c’était déjà plus ou moins devenu la norme au moment de sa sortie, Wolfenstein 3D à la sauce PC-98 n’est rien de plus que la transposition pixel perfect de la version PC du jeu, avec quelques menus de configuration en japonais tassés au pied au milieu de l’interface (restée en anglais) du jeu. Autant dire que l’acquérir aujourd’hui n’a de sens que pour les collectionneurs.
Version Super Nintendo
Développeur : Interplay Productions, Inc.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 10 février 1994 (Japon) – Mars 1994 (Amérique du Nord) – Juin 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad, souris Super Nintendo
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Plus surprenant, Wolfenstein 3D aura également débarqué sur la console 16 bits de Nintendo. Surprenant car, en dépit de quelques affinités avec la 3D comme s’étaient chargés de le démontrer des jeux comme StarWing, on se souvient que la Super Nintendo et son processeur tiraient rapidement la langue au moment de faire tourner des adaptations comme celle de Wing Commander. Connaissant en plus la politique de la firme japonaise vis-à-vis de la censure, autant dire qu’on se demandait comment un jeu consistant à tirer sur des nazis à la première personne allait bien pouvoir s’en tirer.
Et la réponse est : mieux que ce qu’on aurait pu craindre. Certes, histoire de soulager le processeur, la résolution a été très sérieusement réduite : autant dire qu’on a l’impression que notre bon vieux Blazkowicz est soudain frappé de myopie, tant tout ce qui se trouve à plus de cinq mètres de vous se réduit à une bouillie de pixels. Et comme si ça ne suffisait pas, l’image n’est même pas en plein écran, avec des bandes noires de tous les côtés (coupées sur les captures d’écran, mais que vous pourrez voir dans la vidéo)… Ceci dit, force est d’admettre que ce choix assez radical permet également au jeu de tourner de manière relativement fluide, entre dix et quinze images par seconde, ce qui est d’autant plus admirable que non seulement il n’y a aucune puce Super FX à se mettre sous la dent ici, mais qu’en plus le Mode 7 n’est même pas employé. Tout ce que vous voyez tourner le fait donc uniquement grâce à un processeur de moins de 4Mhz, ce qui résume assez bien la performance. La jouabilité est d’autant plus satisfaisante que le titre a la bonne idée d’employer les boutons de tranche du pad pour faire les pas de côté. Cette adaptation reconnait d’ailleurs également la souris, ce qui est sympathique mais n’apporte pas tout le confort souhaité quand on n’a pas la possibilité d’employer un clavier à côté. La musique est très correcte et les bruitages très efficaces, surtout que l’on n’a pas perdu les voix digitalisées.
En terme de contenu, le jeu est l’équivalent de la version Jaguar, il n’y a donc plus que 30 niveaux au compteur. Et surtout, la censure Nintendo est passé par là : oubliez toutes les références au nazisme, mais aussi la moindre forme de goutte de sang. Autant dire que dans un titre dont une partie du charme reposait sur le côté bêtement transgressif, c’est quand même dommage. Reste un logiciel sympathique auquel on n’aura aucune raison de s’essayer dès l’instant où on a une autre machine de salon sous la main, mais qui reste une adaptation honnête à défaut d’être renversante.
NOTE FINALE : 13/20
Wolfenstein 3D sur Super Nintendo aura opté pour plusieurs choix assez radicaux. Si la censure bête et méchante n’était pas franchement indispensable, les sacrifices opérés sur les graphismes pénalisent certes un peu la jouabilité, mais permettent à l’expérience de rester fluide et agréable. Vu le peu de concurrence dans le domaine du FPS sur la machine de Nintendo, cela reste une curiosité appréciable pour peu que l’on ait pas une machine plus coûteuse pour faire tourner le jeu.
Version 3DO
Développeur : Logicware, Inc.
Éditeur : Interplay Productions, Inc.
Date de sortie : 19 octobre 1995 (Amérique du Nord) – Novembre 1995 (Europe) – 15 décembre 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mémoire interne
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Autre habituée des classements des éphémères consoles qui auraient pu connaître un meilleur sort, la (bien trop chère) 3DO aura également eu droit à son adaptation – id Software avait apparemment un faible pour les machines qui ne se vendaient pas, au point de les avoir privilégiées au détriment de la PlayStation, mais je m’égare. Dans tous les cas, c’est bien une copie (presque) conforme, non pas de la version PC, mais bien de la version Mac de Wolfenstein 3D : cela tombe bien, c’était la meilleure. On retrouve donc les 90 niveaux, la musique CD, et même la possibilité de sauvegarder – que du bonheur. Seule la résolution est restée équivalente à celle de la version PC (mais les sprites et les textures n’en sont pas moins nettement plus fins). La maniabilité au pad est également bien meilleure que sur Jaguar, à tel point qu’on ne voit pas trop ce qu’on pourrait reprocher à cet excellent portage qui doit assurément figurer dans la ludothèque de n’importe lequel des (rares) possesseurs de 3DO.
NOTE FINALE : 16/20
Nouvelle infidélité de Wolfenstein 3D, qui décide une nouvelle fois d’offrir une adaptation meilleure en tous points que l’originale sur PC, sur 3DO cette fois. Vu le destin tragique de la machine, il est évidemment assez difficile de se procurer cette version aujourd’hui, et c’est bien dommage, car c’est la meilleure à égalité avec celle parue sur Mac.
Développeur : Ocean Software Ltd. Éditeur : Ocean Software Ltd. Titre alternatif :Little Lancelot (États-Unis) Testé sur :NES
La licence Prince Valiant (jusqu’à 2000) :
The Legend of Prince Valiant (NES) (1992)
The Legend of Prince Valiant (Game Boy) (1992)
Version NES
Date de sortie : Décembre 1992 (États-Unis, Europe)
Nombre de joueurs: 1
Disponible en français: Non
Disponible en anglais: Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Dans la bande dessinée comme dans n’importe quelle forme d’art, il y a les références intemporelles, et il y a les autres. Aux yeux du néophyte français, il y a de fortes chances que Prince Vaillant, titre francisé du Prince Valiant créé par Harold Foster, n’évoque pas grand chose. Il faut dire qu’en dépit de sa vitalité impressionnante aux États-Unis, où la série se poursuit depuis ses débuts en 1937 (!), la longue histoire du prince de Thulé se sera montré nettement moins active en France où, en dépit de rééditions du côté de chez Soleil Productions, on ne peut pas franchement dire qu’elle soit durablement entré dans l’imaginaire collectif.
Cela n’aura manifestement freiné en rien les ardeurs d’Ocean Software, qui vit dans le jeune prince une occasion de récupérer une licence porteuse… mais visiblement pas trop, puisque le jeu n’est même pas sorti sous le nom de Prince Valiant aux États-Unis ! Le titre aura en tous cas visiblement inspiré la société britannique, qui n’aura pas hésité à la décliner en deux versions extrêmement différentes – l’itération Game Boy allant carrément chercher du côté de la gestion et de la stratégie, ce qui lui vaudra un test à part. Du côté de la version NES, on trouve également un mélange de gameplay assez disparate, mais tâchons déjà de commencer par le commencement.
Le cœur du jeu, ce sont avant tout des séquences de plateforme que l’on pourrait diviser en deux catégories. La première, que je surnommerais personnellement « Un level design ? Pourquoi faire ? » se cantonne à avancer vers la droite jusqu’à la fin du niveau, en sautant au-dessus de gouffres et de pièges, et en lançant des shurikens (?!) sur vos ennemis. C’est extrêmement basique et pas franchement passionnant, mais ça a le mérite d’être à peu près jouable sans être trop frustrant puisque le titre a le bon goût de vous doter d’une généreuse barre de vie et qu’il arrive fréquemment que les adversaires lâchent des bonus de soin.
On pourra également affronter des boss de quinze pixels de haut aux patterns hyper-prévisibles, mais ça brise (un tout petit peu) la monotonie qui s’installe au bout de vingt secondes. Probablement conscient des faiblesses de ce premier niveau, le jeu décide donc, à partir du troisième, d’opter pour la seconde catégorie : le niveau labyrinthique. À vous la joie de franchir des portes partout et, histoire de décupler le potentiel ludique, le titre décide alors que votre jauge de vie ne sert plus à rien et ne met sur votre route que des obstacles qui vous tuent tous un un seul coup. Encore mieux : le niveau semble bugué, et n’étant jamais parvenu à ouvrir une porte en dépit du levier situé à côté, j’ai dû me résoudre à employer un cheat code pour voir le reste du jeu ! Le cinquième et dernier niveau, lui, cumule toutes les, heu, bonnes idées des deux que nous venons d’évoquer en proposant un labyrinthe avec des clés et des ennemis. On pense parfois à Pitfall en beaucoup moins bon, parfois à une sorte d’ersatz de Willow version arcade. Que du bonheur.
« Attends une minute », vous entends-je objecter, « tu évoques cinq niveaux et tu n’en as présenté que trois ! » Eh oui car, petite surprise, les trois niveaux de plateforme sont entrecoupés de deux séquences plus originales qui prennent la forme d’un… rail shooter. Vous allez donc promener un curseur au milieu de la forêt du niveau deux pour tirer à l’arbalète sur des brigands, ou bien régler une mire au niveau quatre pour faire feu sur des bateaux à l’aide de vos canons. Soyons honnêtes : c’est très, très basique, mais ça a au moins le mérite de diversifier un peu une expérience de jeu qui en avait dramatiquement besoin.
Le vrai problème, c’est qu’il est assez difficile, même avec toute la bonne volonté du monde, de trouver des raisons objectives de passer du temps sur Prince Valiant. Le jeu est trop court, trop dur, et jamais assez intéressant pour qu’on parvienne à congédier cette petite voix intérieure qui nous rappelle avec insistance qu’on pourrait être en train de jouer à autre chose. Pour ne rien arranger, la réalisation, qui serait passée pour à peine correcte en 1987, a facilement cinq ans de retard.
Se retrouver devant ces grandes surfaces vides aux couleurs baveuses avait déjà quelque chose de furieusement anachronique à la sortie du jeu – paru, rappelons-le, en 1992, soit l’année de la distribution de la Super Nintendo en Europe. La musique s’en sort un peu mieux, dommage qu’elle soit atrocement répétitive. Mais surtout, comment s’empêcher de penser en enchainant des séquences sans saveur ni idée qu’on a déjà joué à un milliard de jeux semblables et mieux exécutés, y compris d’ailleurs sur la même plateforme ? Le titre d’Ocean fait plus penser à une armature de jeu qu’à un produit terminé : il manque de l’ambition, de l’idée, du liant, du talent… de tout. Vous n’aurez même pas le droit à un écran de fin, pour peu que vous poussiez le masochisme jusque là. On a parfois l’impression d’assister à du game design de 1985 ! Bref, autant dire que ce n’est certainement pas Prince Valiant qui participera à redorer le blason d’Ocean Software. À peine essayé, à peine oublié.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 09,5/20
En dépit de quelques choix originaux dans son déroulement, Prince Valiant est un jeu atrocement générique qui peine à manifester ne fut-ce qu'une bribe de personnalité. Sans être catastrophique, le titre d'Ocean Software doit tout simplement faire face à la concurrence de milliers de logiciels semblables face auxquels il semble n'avoir pratiquement rien à opposer, ni une réalisation honteuse pour un jeu paru sur une NES en fin de vie, ni un level design mort né, ni une difficulté incohérente, ni même une licence méconnue - le néant. Reste un petit titre trop difficile, trop plat et oubliable en une poignée de secondes, dont le seul argument de vente restera qu'on a déjà vu bien pire sur la console de Nintendo. Ça fait quand même léger.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un level design indigent
– Seulement cinq niveaux
– Une réalisation qui aurait déjà fait tiquer cinq ans plus tôt
– Une difficulté réglée n'importe comment
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Prince Valiant sur un écran cathodique :
Développeur : Konami Co., Ltd. Éditeur : Konami, Inc. Titres alternatifs :アクスレイ (graphie japonaise), 엑서레이 (Corée) Testé sur :Super Nintendo En vente sur : Nintendo eShop (Wii U)
Version Super Nintendo
Date de sortie : 11 septembre 1992 (Japon) – Septembre 1993 (Amérique du Nord) – 30 septembre 1993 (Europe)
Nombre de joueurs: 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Vidéo – L’introduction du jeu :
On tendrait presque à l’oublier tant la compagnie japonaise est parvenue à se faire un nom dans pratiquement tous les domaines, mais Konami était également une société célèbre, dès les années 80, pour la qualité de ses shoot-them-up.
Il faut dire que quand on comporte, dans son catalogue, des sagas aussi célèbres que Gradius ou Parodius, il y a de quoi avancer des arguments très pertinents face aux autres séries marquantes de l’époque, qu’elles s’appellent R-Type ou Thunder Force. Alors quand Konami sort un shoot-them-up en exclusivité sur Super Nintendo (suivant ainsi la loyauté indéfectible qui avait lié la compagnie à Nintendo pendant toutes les années 80 – les choses allaient changer pendant les années 90), on a envie de se frotter les mains et de regarder ce que l’une des machines à succès de l’époque a bien pu nous concocter cette fois.
Un système solaire menacé par une race extraterrestre, un ultime vaisseau envoyé faire ce que le reste de l’armée n’est pas parvenu à faire… Ce n’est pas du côté du scénario qu’Axelay innove, même si on pourra apprécier la présence d’une cinématique d’introduction très soignée, ce qui était loin d’être la règle à l’époque, en particulier pour un shoot-them-up.
Le titre de Konami vous place, sans surprise, aux commandes d’un vaisseau surarmé qui devra vaincre un n-ième empire du mal au terme de six niveaux revisitant des thèmes très familiers. Son arsenal se limitera, à l’origine, à trois types de tir, que vous pourrez choisir en préambule de chaque niveau. Votre arsenal s’enrichissant au terme de chaque mission réussie, c’est au final au sein d’une panoplie de pas moins de huit armes différentes que vous pourrez vous équiper – ce qui fait d’ailleurs regretter que ce choix ne soit pas disponible dès le début du jeu, l’ultime pouvoir n’étant ainsi accessible que pour les deux derniers niveaux. Toujours est-il que, confronté à une sélection imposée au lancement de la partie (on n’a de toute façon que trois tirs), on se lance en attendant de voir ce que le jeu à en réserve pour nous.
C’est d’ailleurs dès le décollage qu’Axelay a deux surprises à nous offrir. La première, c’est qu’à choisir entre les deux standards de l’époque, à savoir le défilement vertical et le défilement horizontal, le titre de Konami aura tout simplement opté pour les deux !
Exactement comme Thunder Force II près de quatre ans avant lui, Axelay alterne entre les deux styles, proposant trois niveaux verticaux et trois niveaux horizontaux – offrant ainsi une approche sensiblement différente selon l’angle choisi. Parler de « défilement vertical » n’est peut-être pas tout à fait honnête, ceci dit : la deuxième surprise du jeu est en effet le recours au célèbre Mode 7 de la Super Nintendo pour générer un effet de profondeur en pseudo-3D. L’objectif est clairement d’en envoyer plein les yeux, le titre étant d’ailleurs une véritable démo technique de l’encore toute jeune console 16 bits : zooms, rotations, distorsions, transparence ; tout y passe, histoire de bien montrer ce que la machine de Nintendo a dans le ventre !
Soyons honnête : l’effet de pseudo-3D employé dans ces niveaux peine aujourd’hui à faire illusion ; on a surtout l’impression de voler en rase-motte au-dessus d’un cylindre qui se déroulerait sous notre vaisseau. Plus gênant : cette vue inhabituelle handicape quelque peu la précision de vos tirs dirigés vers le fond de l’écran, et surtout elle semble imposer au jeu un rythme assez lent, pour ne pas dire paresseux, qui tranche radicalement avec la frénésie des références de l’époque – une sorte d’anti-Thunder Force IV, si vous préférez.
Il en résulte une expérience un peu déstabilisante, où l’adrénaline laisse la place à une concentration extrême, le jeu pouvant se montrer assez exigeant et les niveaux étant surtout assez longs – ce n’est pas Blood Money, mais on aurait quand même largement voté pour davantage de niveaux plus courts. Les environnements font certes des efforts pour évoluer, parfois au sein d’un même niveau, mais à ré-explorer les sempiternels environnements biomécaniques et autres planètes volcaniques, on a parfois l’impression de jouer à un milliardième clone de R-Type ce qui, cinq ans après la sortie du hit de Irem, commençait à devenir un peu lassant.
Fort heureusement, Axelay a aussi bien des arguments en sa faveur, à commencer par sa réalisation – moins tape à l’œil que ce qu’elle ambitionnait, certes, mais qui reste quand même sans difficulté dans le haut du panier de la console. Les boss, en particulier, sont massifs et superbement animés, et il arrive fréquemment que les stages à défilement horizontal soient noyés de tirs. Le tout sans le moindre ralentissement – une vraie performance pour un système qui aura souvent pâti de la faiblesse de son processeur, en particulier pour les shoot-them-up. Il faudra en revanche accepter de composer avec quelques clignotements de sprites lors des séquences les plus gourmandes mais, objectivement, cela reste du très beau boulot.
Au final, on est presque surpris de reprocher à ce Axelay un certain déficit d’âme : le titre a beau chercher à hurler son identité à chaque instant, il reste finalement un titre assez convenu, n’inventant strictement rien en terme de gameplay (pas même son alternance vertical/horizontal), et caractéristique surtout pour ses niveaux en Mode 7 qui sont, paradoxalement, également les moins agréables à parcourir.
Tous les amateurs du genre auront raison d’être tentés d’y jeter un œil : il demeure un logiciel particulièrement représentatif de ce qu’on pouvait espérer tirer d’une Super Nintendo en début de vie. Pour les néophytes, en revanche, ou ceux qui chercheraient à être réellement surpris, il n’est pas dit que le charme opère suffisamment pour transformer le jeu en expérience réellement marquante. Le genre de curiosité à essayer au moins une fois, le temps de voir si vous accrochez.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
Récompenses :
Tilt d’or 1992 – Troisième place dans la catégorie « Meilleur Shoot’Em Up Console » (Tilt n°109, décembre 1992)
NOTE FINALE : 15,5/20
En cherchant à mettre en avant la forme, Axelay n'aura pas transcendé le fond : original dans sa représentation, le titre de Konami échoue hélas à surprendre au-delà de son alternance entre les niveaux à défilement vertical et ceux à défilement horizontal. Avec peu d'idées originales et un faux rythme qui tranche avec celui des canons du genre, le titre ronronne, quitte, parfois, à s'égarer quelque peu en chemin. Le recours au Mode 7 restera plus, pour sa part, comme un gadget plutôt daté loin de justifier à lui seul l'achat du logiciel. Sans passer un mauvais moment - le titre comporte, après tout, sa dose de morceaux de bravoure -, le joueur lambda pourrait malgré tout finir par trouver le temps un peu long, la faute à un certain classicisme dans les environnements et dans les mécanismes qui échouent à donner au titre la personnalité qu'il revendiquait. Une curiosité.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Niveaux trop longs, boss trop longs, le jeu est mal rythmé
– Avoir accès à tous les types de tir dès le début de la partie n'aurait pas été un mal
– Une certaine mollesse dans le déroulement général, particulièrement dans les stages verticaux
– Les niveaux employant le Mode 7 ont plutôt plus mal vieilli que le reste
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Axelay sur un écran cathodique :
Développeur : Blue Byte Studio GmbH Éditeur : Blue Byte Studio GmbH Titre alternatif :The Great War : 1914-1918 (Amérique du Nord) Testé sur :Amiga – PC (DOS) Disponible sur : Windows (7, 8, 10) En vente sur :Gog.com (Windows)
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo Modes graphiques : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Battle Isle avait rencontré lors de sa sortie, en 1991, un joli succès critique et commercial qui aura fatalement donné des idées à ses développeurs, les allemands de Blue Byte. Étant parvenue à dépoussiérer un peu un genre d’ordinaire suffisamment austère pour le couper irrémédiablement du grand public, la compagnie à la tache bleue eut à cœur d’offrir du contenu pour capitaliser sur le succès du premier opus, comme en témoignent les deux data disks parus dans les deux années ayant suivi la publication du titre. Seulement voilà, à une époque où tout allait extrêmement vite, les trois ans nécessaires au développement de Battle Isle 2 ressemblaient à deux siècles, et l’idée de capitaliser sur le nom de la série avant même la sortie de son deuxième épisode dut fatalement se tracer un chemin jusqu’à l’esprit des commerciaux de chez Blue Byte, comme en témoigne la sortie en 1993 du seul véritable spin-off de la saga : Historyline.
Derrière ce nom ce cachait, à l’origine, un concept prometteur : utiliser le moteur de Battle Isle pour offrir des batailles à différentes périodes historiques : antiquité romaine, moyen-âge, guerres napoléoniennes… Mais les faibles ventes de cet opus décidèrent les développeurs à se cantonner, à l’avenir, à la science-fiction originelle.
Comme le sous-titre « 1914-1918 » vous l’aura déjà appris, cet épisode fait donc le choix un peu surprenant de vous placer en pleine première guerre mondiale. Surprenant car ce conflit, guerre de position par excellence où les choix stratégiques auront surtout brillé par leur médiocrité et par les répercussions catastrophiques qu’ils auront eu en termes de vies humaines, est rarement propice à un genre vidéoludique où l’intellect est censé primer sur la quantité de troupes alignées. Mais l’explication est finalement assez terre-à-terre : Blue Byte créait de rencontrer une certaine frilosité de la part des distributeurs au moment de vendre un jeu sur la seconde guerre mondiale développé par des allemands, d’où le choix d’une période historique un peu plus « neutre ».
Mais qu’apporte, au fond, ce changement de période au concept de Battle Isle ? Eh bien, en termes de possibilités de jeu, autant le dire tout de suite : pas grand chose. On retrouve l’interface, les mécanismes et la jouabilité du premier opus derrière un grand coup de peinture destiné à remplacer la planète futuriste de Chromos par le conflit franco-allemand – et aucun autre, autant le préciser d’emblée, le conflit étant purement réduit à son front le plus occidental. Oubliez donc l’Italie, la Russie, la Serbie, l’Autriche-Hongrie et toutes les autres nations donnant à cette guerre son appellation de « mondiale » : vous choisirez la France ou l’Allemagne en prélude de la première mission, chaque camp vous ouvrant une campagne longue de 24 missions, avec en plus les 24 cartes multijoueurs, cela fait donc pas moins de 72 missions au total. Un contenu qui témoigne de l’ambition réelle du titre, qui tient d’ailleurs sur par moins de sept disquettes : autant dire qu’un Amiga 1200 doté d’un disque dur est fortement recommandé pour vous y essayer dans des conditions optimales.
Les nouveautés en termes de gameplay sont, comme on l’a vu, pratiquement inexistantes : le jeu reproduit à l’identique ce que le premier épisode avait installé, seule la prise en compte du terrain ayant été enrichie pour que des unités placées au milieu d’une forêt ou d’une tranchée puissent bénéficier d’un véritable bonus défensif. Pour le reste, on retrouve les mêmes ficelles : terre, air, mer, blindés, avions, unités de cavalerie… En revanche, la capture de dépôts joue ici un rôle nettement moins important, éloignant le titre de son aspect puzzle pour le rapprocher de sa composante stratégie où le rapport de force est toujours déséquilibré, mais moins qu’avant, et où les assauts de masse sont clairement privilégiés.
Dans l’absolu, les principes gagnants sont toujours les mêmes : l’I.A. adverse, résolument agressive, essaiera de vous faire ployer sous le nombre pendant que votre salut reposera principalement sur votre capacité à éloigner les unités blessées de la ligne de front pour les convoyer jusqu’aux bases arrières pour y être soignées, afin d’accumuler des troupes de vétérans dont l’expérience jouera une nouvelle fois un rôle crucial sur les résultats des affrontements. Une unité d’artillerie d’élite, par exemple, pourra littéralement exterminer une division d’infanterie entière en un seul tour. Et tandis que de nouveaux modèles de tanks, de bateaux ou d’avions feront leur apparition, il sera toujours temps d’adapter votre stratégie à leurs caractéristiques.
C’est d’ailleurs l’une des grandes forces de cet opus : chaque niveau viendra introduire une nouvelle unité, décrite par le biais d’un texte historique fort intéressant vous décrivant son apport dans le conflit réel, et le monde parfois un peu opaque de Battle Isle gagne ainsi beaucoup à laisser la place à un univers plus familier où on peut avoir une idée immédiate de la fonction de chaque type de troupes. Non seulement l’enrobage a indéniablement progressé – c’est plus coloré, il y a davantage de scènes cinématiques et de types de décors, les animations de combat sont plus visuelles – mais surtout une grande partie des faiblesses du premier opus appartiennent désormais au passé.
Par exemple, l’état de santé et l’expérience de chaque unité apparaissent désormais clairement au bas de l’écran dès que votre curseur passe sur l’une d’entre elles – fini de compter uniquement sur sa mémoire. Le titre étant désormais pensé directement pour un Amiga 1200 ou des PC puissants, les temps de réflexion de l’I.A. sont nettement plus courts (conseil : n’y jouez pas sur A500), et l’expérience de jeu y gagne grandement en fluidité – rendant la partie solo d’autant plus intéressante. Les missions sont globalement plus variées, mieux pensées, plus longues, et mêmes si les mécanismes mis en jeu sont toujours à peu près identiques, on prend quand même plaisir à mener campagne dans un jeu qui aura eu le bon goût de se libérer d’une grande partie des lourdeurs du premier épisode.
Les innovations ont beau être extrêmement limitées, les deux années passées ont été plutôt bien employées, et à peu près tout ce qui contribuait à transformer Battle Isle en une expérience frustrante ou contre-intuitive (la maniabilité au joystick exceptée) est désormais passé à la trappe, ce qui tend à confirmer à quel point il ne manquait pas grand chose au premier opus pour reprendre un petit coup de jeune. On pourra regretter, en parallèle, le manque absolu de prise de risque : proposer de vraies batailles historiques plutôt qu’un simple environnement graphique « première guerre mondiale » aurait ainsi apporté un peu de nouveautés salutaires, par exemple. Mais le fait est qu’on s’amuse et qu’on peut même y passer volontiers des dizaines d’heures, preuve que le contrat n’en est pas moins rempli.
Quelques mots, en conclusion, sur la version française. Celle-ci compose avec quelques-unes des tares récurrentes de l’époque : elle contient son lot d’approximations (« unité nouveau ») et de petits ratages. En revanche, les textes historiques apparaissant entre les missions sont très bien traduits, aidant ainsi le joueur à avoir envie d’en apprendre un peu plus sur la période. Un travail correct, donc.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
NOTE FINALE : 15/20Historyline : 1914-1918, c'est un peu Battle Isle avec un simple coup de peinture neuf – ce qui n'interdit pas un grand soin dans les finitions. On a beau y trouver exactement ce qu'on était venu y chercher, à savoir sensiblement la même chose que dans le premier épisode, l’exécution est mieux pensée, le déroulement plus fluide, le cadre plus familier, l'interface plus fonctionnelle, l'I.A. bien plus rapide. Du coup, on a peut-être le sentiment de jouer à un n-ième data disk du premier titre, mais on y prend beaucoup plus de plaisir. Alors oui, on aurait aimé un peu plus de prises de risques : des embranchements dans la campagne, des missions un peu plus équilibrées, des batailles historiques, des équilibrages repensés, mais le tout est si efficace qu'on retourne au charbon avec un enthousiasme indéniable. Une très bonne porte d'entrée dans la saga.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Prise en main toujours aussi étrange, mais qui ne troublera plus les joueurs s'étant essayé au premier opus
– Des mécanismes ayant très peu changé depuis Battle Isle
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Historyline sur un écran cathodique :
Version PC (DOS)
Développeur : Blue Byte Softwate GmbH
Éditeur : Blue Byte Software GmbH
Date de sortie : Novembre 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Allemand, anglais, français
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko – Vitesse lecteur CD-ROM : 1X (150ko/s) Mode graphique supporté : VGA Cartes sonores supportées : AdLib, Sound Blaster Système de sauvegarde par mot de passe
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Développer un jeu pour le marché informatique sans le développer directement sur PC était déjà une énorme prise de risque en 1993 – ne parlons même pas de s’abstenir de le porter sur la machine d’IBM (NdRA : il semblerait d’ailleurs que cette version ait été commercialisée avant la version Amiga, ou au moins simultanément). On a d’ailleurs un peu le sentiment que l’équipe de Blue Byte aura vécu ce portage davantage comme une obligation que comme un choix, tant il ressort que cette version n’a pratiquement pas été optimisée. Déjà, ne reconnaître que l’AdLib et la Sound Blaster en 1993, sans même proposer un programme de configuration, trahit un retard de plusieurs années sur les conventions de l’époque. Offrir une jouabilité aussi pénible à la souris est également profondément anachronique. Et quand en plus la réalisation graphique trouve le moyen d’être moins colorée que sur Amiga 1200, on a quand même un peu l’impression d’être pris pour des truffes. Alors, certes, on ne peut pas dire que l’expérience de jeu en souffre énormément, mais quand on se souvient de la réalisation des titres parus la même année, on a quand même le sentiment que Blue Byte avait un sérieux train de retard.
NOTE FINALE : 14,5/20
Historyline : 1914-1918 sur PC accomplit le strict minimum de ce qu’on était en droit d’attendre de lui, c’est à dire une réalisation purement fonctionnelle ne se hissant même pas à la hauteur de la version Amiga 1200, et une maniabilité qui aurait sérieusement gagné à être repensée pour la souris. Si le jeu reste identique à 95%, on regrettera qu’il ne tire que si médiocrement parti du hardware des PC de l’époque.