Super R-Type

Développeur : Irem Corp.
Éditeur : Irem Corp.
Testé sur : Super Nintendo
Disponible sur : Wii

La saga R-Type (jusqu’à 2000) :

  1. R-Type (1987)
  2. R-Type II (1989)
  3. Super R-Type (1991)
  4. R-Type Leo (1992)
  5. R-Type III : The Third Lightning (1993)
  6. R-Type Delta (1998)

Version Super Nintendo

Date de sortie : 13 juillet 1991 (Japon) – Septembre 1991 (Amérique du Nord) – Mai 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le succès critique et commercial de la Mega Drive en occident, particulièrement aux États-Unis, aura constitué un véritable coup de pied dans la fourmilière vidéoludique du début des années 90. Nintendo, qui régnait alors en maître au Japon (en dépit de la résistance acharnée de NEC) et sur une large partie du globe, dut pour la première fois composer avec une vraie rivale pour sa NES et se résigner à produire à son tour un système 16 bits apte à aller chercher une firme soudain devenue un concurrent crédible sur son propre terrain.

On ne peut pas dire que le premier boss en mette plein les yeux

Sur le papier, la Super Nintendo, commercialisée à partir de novembre 1990 au Japon, avait de quoi donner des sueurs froides à SEGA, notamment grâce à sa capacité à afficher 256 couleurs – quatre fois plus que la Mega Drive – et à ses très bons processeurs audio livrés par Sony. Mais à l’instar des plans de l’Étoile Noire, la prometteuse console embarquait également un saisissant point faible : un processeur à peine à moitié aussi puissant que celui de sa redoutable concurrente. Un talon d’Achille qui allait causer de nombreux problèmes à la machine lors de ses premières années de commercialisation, notamment pour un genre particulièrement gourmand : le shoot-them-up. L’une des plus cruelles démonstrations allait en être faite avec ce qui devait être un des mastodontes du lancement américain de la console : Super R-Type.

« Tiens, salut, toi. T’as pris du galon, alors, depuis R-Type II ? »

Sur le papier toujours, le jeu directement programmé par l’équipe d’Irem avait de quoi faire rêver : un titre exclusif à la Super Nintendo et capable de rivaliser techniquement avec la version arcade de R-Type II, ce que les quelques conversions sur ordinateur avaient été à des kilomètres de réussir. Les premières captures d’écran faisaient briller bien des yeux : la réalisation s’annonçait sublime, et laissait entrevoir les miracles dont allait être capable la nouvelle machine de chez Nintendo – et quelle meilleure réponse aux claques qu’avaient constitué des titres comme Thunder Force III ou M.U.S.H.A. ? Une fois la manette en main, toutefois, la magie ne fonctionna pas tout à fait comme prévu. Mais commençons déjà par le commencement…

Le niveau « aquatique » signe son grand retour, lui aussi

Super R-Type est composé de sept niveaux, qu’on pourrait penser originaux au petit détail près que, dans les faits, quatre sont tirés plus ou moins directement de R-Type II. Il arrive que leur déroulement connaisse des modifications, voire que le boss soit changé, mais dans l’ensemble les joueurs s’étant essayé au deuxième opus devraient reconnaître immédiatement de larges portions du jeu. Les trois autres niveaux, eux, sont inédits mais ne s’éloignent pas beaucoup, eux non plus, du deuxième épisode : la flotte du niveau trois de la version arcade a ainsi été remplacée par un unique vaisseau géant, le premier niveau sert de prélude spatial, et le niveau de la casse a été repensé et redessiné. Le scénario ne s’embarrasse donc pas de la moindre finasserie : l’empire Bydo est de retour, ça ne fait jamais que deux fois, il va être temps de lui donner (encore) une bonne leçon. Vous reprenez donc les commandes de votre chasseur R-9C pour aller sauver l’univers une nouvelle fois.

Les nouveaux niveaux restent dans le même esprit que les anciens

En termes de mécanismes de jeu, on assiste, comme on pouvait s’y attendre, pratiquement à un décalque de R-Type II : deux des trois nouveaux power-up sont présents, ainsi que les deux niveaux de charge du tir principal. Les lasers à tête chercheuse auront été remplacé par un tir plus couvrant rendant de fait un peu redondant le fameux upgrade « fusil à pompe ». Pour le reste, on est en terrain connu, pour ne pas dire rebattu, et la question va principalement être de savoir à quel point la cartouche tient la route sur le plan technique et sur celui de la jouabilité. Sans surprise, c’est là que vont émerger les vrais problèmes.

Il faudra une nouvelle fois penser à couvrir ses arrières

Graphiquement en tous cas, à première vue, Super R-Type fait mieux que se défendre. Les couleurs sont pratiquement identiques à celle de l’arcade, et les sprites sont très bien dessinés : pour un titre de 1991, c’est impressionnant. Seul regret : la résolution limitée de la Super Nintendo impose un certain manque de finesse, qui aurait facilement pu être contourné en ajoutant un défilement vertical comme dans l’excellente conversion du premier épisode sur PC Engine. Seulement voilà, en voyant tourner le jeu, on comprend immédiatement pourquoi cette solution n’a jamais été choisie : dès qu’il y a plus de deux sprites à l’écran, le jeu commence déjà à ralentir. Et comme il y en a souvent une dizaine… On a rarement vu un framerate aussi erratique, surtout sur un système 16 bits : la vitesse peut littéralement se retrouver divisée par trois ou par quatre, ce qui impacte forcément la difficulté (redoutable en temps normal) du programme, originellement pensé pour tourner beaucoup plus vite ! Conseil : si jamais vous souhaitez vous simplifier la vie, tirez en permanence pour ralentir le jeu, et n’utilisez le tir chargé que contre les boss… en prenant bien garde au timing, car votre charge maximale ne peut rester en l’état qu’une poignée de secondes avant de se réinitialiser !

C’était un peu gonflé, avec le recul, d’afficher autant de sprites à l’écran sur une Super Nintendo

Autant dire que le plaisir de jeu en prend un coup, pas aidé par des décisions de game design pas toujours très brillantes. Ainsi, le premier niveau est vide, pas très intéressant, pas très beau, et son boss est à la fois petit, moche et pénible à vaincre : on aurait autant apprécié commencer directement par le niveau 2 – soit le niveau 1 de R-Type II. Dans le même ordre d’idée, le deuxième boss est plus facile que le premier, et le quatrième niveau est plus simple que le troisième…

Le décor vous coûtera souvent la vie

Dans l’ensemble, la deuxième partie du jeu est plus intéressante que la première, encore faudra-t-il avoir la patience d’arriver jusque là. Au moins pourra-t-on compter, en plus des graphismes, sur des thèmes musicaux très réussis, versant parfois dans des sonorités funk inhabituelles pour la saga mais néanmoins très efficaces. Et il faudra, comme toujours avec la saga, composer avec des checkpoints très espacés, avec des morceaux de bravoure redoutables, et avec une mort qui vous fait perdre la totalité de vos upgrades – sans oublier, bien sûr, ces bonus chargés d’augmenter votre vitesse et qui deviendront vos pires ennemis dans les niveaux exigeant de manœuvrer dans des passages étroits.

Ce boss est toujours là, mais il est plus facile à affronter avec l’aide des ralentissements

Au final, Super R-Type se sera révélé être un cruel péché d’orgueil : Irem voulait peut-être montrer ce que la Super Nintendo avait dans le ventre, ils n’auront réussi qu’à la mettre immédiatement à genou – sans trouver aucune des très intelligentes réponses apportées par un titre comme Super Aleste.

Le boss final n’a pas changé, et il est toujours aussi dur

Une assez bonne vision d’avenir pour une console qui sera globalement resté fâchée avec les shoot-them-up pendant la plus grande partie de sa carrière. C’est réellement dommage, parce qu’avec un peu plus de savoir-faire l’autorisant à tourner à la bonne vitesse, le jeu aurait à n’en pas douter supplanté R-Type II et gagné une position un peu plus flatteuse dans les souvenirs des joueurs. Reste un shoot-them-up qui ne fait pas honte à la série mais qui souffre des erreurs de jeunesse de la console qui l’héberge. Tant pis.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 14,5/20 Super R-Type, c'est R-Type II dopé aux hormones : plus grand, plus beau, plus long, plus varié... ou du moins, c'est ce à quoi ressemblait le projet sur le papier. Dans les faits, la résolution limitée de la Super Nintendo empêche aux graphismes de se hisser tout à fait au niveau de l'arcade, et son processeur rachitique crible l'expérience de ralentissements qui la rendent plus pénible qu'autre chose. Comme promotion pour le hardware de la nouvelle console 16 bits, c'était plutôt raté... Malgré tout, le jeu a pour lui la qualité de sa musique, ainsi que sa dose de bons moments, particulièrement pour les amateurs de défi relevé. L'équilibrage maladroit achève cependant de réserver le titre aux nostalgiques, aux mordus et aux fans les plus patients de la licence. Pas un mauvais jeu, mais certainement pas la meilleure introduction à une série mythique.

CE QUI A MAL VIEILLI :Framerate totalement erratique – Difficulté toujours aussi frustrante – Équilibrage à revoir – Mécanisme de charge mal pensé

Les avis de l’époque :

« On avait déjà vu de bonnes adaptations. Mais celle-ci est sans conteste la plus réussie et la plus proche de l’original. Elle est basée sur la première version de R-Type sortie en jeu d’arcade (NdRA : Raté ! Elle est basée sur la deuxième). Elle est grevée cependant d’un très lourd handicap : l’animation est, à de nombreux endroits, TRÈS ralentie. Il arrive même qu’elle gêne le joueur, l’empêchant de tirer pendant quelques secondes, en attendant qu’il y ait un peu moins de sprites à l’écran, avant qu’elle retrouve sa vitesse normale ! »

Banana-San, Console + n°1, septembre 1991, 68%

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Super R-Type sur un écran cathodique :

Golden Axe II

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titres alternatifs : ゴールデンアックスⅡ (graphie japonaise), 战斧2 (Chine)
Testé sur : Mega DriveArcade (Mega-Tech/Mega Play)
Disponible sur : Linux, Macintosh, Wii, Windows
En vente sur : Nintendo eShop, Steam

La saga Golden Axe (jusqu’à 2000) :

1 – Golden Axe (1989)
2 – Golden Axe Warrior (1991)
3 – Golden Axe II (1991)
4 – Ax Battler : A Legend of Golden Axe (1991)
5 – Golden Axe : The Revenge of Death Adder (1992)
6 – Golden Axe III (1993)
7 – Golden Axe : The Duel (1994)

Version Mega Drive

Date de sortie : 27 décembre 1991 (Europe, Japon) – Janvier 1992 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, traduction française par Terminus Traduction
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Parmi la multitude de licences lancées par SEGA au cours des années 80, on ne sera pas surpris d’apprendre que certaines auront connu plus de succès que d’autres. À une époque où l’expérimentation était encore à l’honneur, il faut à minima reconnaître à la firme japonaise une audace indéniable, elle qui n’aura pas eu peur de défricher les univers originaux avec des titres aussi improbables que Dynamite Düx ou Fantasy Zone.

Toujours est-il qu’au début des années 90, et avant qu’un certain Street Fighter II ne vienne changer la donne, le genre roi, dans les salles d’arcade comme à domicile, c’était le beat-them-all. Et tandis que la Mega Drive commençait à reprendre du poil de la bête, enfin aidée par une ludothèque respectable, par des exclusivités séduisantes, et surtout par l’ouverture à un marché occidental beaucoup plus réceptif que le Japon aux arguments de la console 16 bits, l’idée de donner une suite au mythique Golden Axe était presque une évidence. Mais avant de lancer une nouvelle borne d’arcade, pourquoi ne pas commencer par doter la Mega Drive d’une nouvelle exclusivité, un peu comme cela avait été fait avec The Revenge of Shinobi ? Eurêka. La même année que Streets of Rage paraissait donc Golden Axe II.

Le scénario est encore plus chiche que celui du premier épisode : quelques temps après la défaite de Death Adder, c’est un nouveau grand méchant appelé Dark Guld (apparemment, dans ce métier, c’est le nom qui fait tout) qui a cette fois mis la main sur la Hache Dorée. Les trois héros de l’aventure originale, qui n’ont manifestement pas eu leur compte de vengeance personnelle, rempilent donc pour refaire ce qu’ils ont fait quelques mois plus tôt : taper des gens, avancer vers la droite et tuer des boss. Et pas grand chose d’autre.

La première chose qui risque de vous assaillir, en prenant les commandes de ce Golden Axe II, c’est en effet une indéniable sensation de déjà-vu. Déjà parce que nos trois héros n’ont pas changé d’un poil : pas de quatrième protagoniste, pas de re-design, on reprend juste les mêmes sprites et en voiture Simone. Tout juste remarquera-t-on que Gilius et Ax Battler ont pris le temps de se respécialiser en magie : le nain barbu est désormais un adepte des sorts de roche (et c’est toujours le meilleur guerrier et le moins bon sorcier), tandis que le sosie de Conan le barbare, période bleue, verse désormais dans l’élément du vent.

Tyris est toujours, elle, dans la magie du feu, et elle peut toujours invoquer un dragon – pas le même, histoire de ne pas trop forcer sur le recyclage – mais sinon, rien de neuf. On notera malgré tout que chaque personnage dispose d’un coup de désencerclement en activant saut + coup simultanément, et qu’il est désormais possible par défaut de ne pas employer tous vos grimoires d’un coup lorsque vous faites usage de la magie. Voilà pour les nouveautés. Et c’est tout. Car autant le préciser d’emblée, si on ressent indéniablement, à chaque seconde de jeu, l’héritage de Golden Axe premier du nom, la présence d’un « II » derrière le titre est déjà, elle, beaucoup plus sujette à débat.

Les montures sont toujours de la partie, et elles sont toujours un bon moyen de se faire respecter

Soyons honnêtes : le véritable problème de ce Golden Axe II, c’est que j’aurais pu faire exactement la même chose que SEGA, à savoir reprendre le test du premier Golden Axe et changer une virgule par-ci, un adjectif par là, et obtenir un produit tout neuf. On pensait en avoir fini, en 1991, avec les exclusivités Mega Drive qui n’étaient au final que des versions 1.1 des jeux d’arcade dont elles étaient tirées ; on avait visiblement tort.

Rarement a-t-on eu l’occasion de mettre les mains sur une suite aussi fade : même Double Dragon II présentait plus de nouveautés par rapport à l’opus original, alors qu’il n’avait été designé au départ que comme une suite de niveaux supplémentaires. Mêmes personnages, même déroulement, même objectif, mais aussi, beaucoup trop souvent, environnements très semblables et même ennemis directement repompés, pratiquement à l’identique, du premier opus : le cahier des charges, visant manifestement à proposer la même chose que Golden Axe, a sans doute été trop scrupuleusement respecté. Non seulement il n’y a strictement rien de neuf à se mettre sous la dent, mais certaines des nouveautés qui commençaient à s’imposer comme des évidences dans le genre en 1991, comme la présence de pièges ou la possibilité de ramasser des armes, sont totalement absentes ici. On a presque l’impression de jouer à une sorte de remake du premier épisode – en légèrement plus fignolé, le jeu ayant par exemple le bon goût de ne plus se figer à chaque fois qu’un adversaire pousse un gargouillis d’agonie – mais on ne ressent vraiment pas les deux ans qui séparent les deux titres, ni ludiquement, ni techniquement.

Du côté de la réalisation, c’est assez terne. Graphiquement, tout semble repris directement du premier opus, à quelques très rares exceptions près comme la grotte volcanique, qui est d’ailleurs l’un des seuls niveaux à contenir des animations dans le décor. C’est plat, répétitif, sans idée ; on dirait qu’on a pris des blocs tirés du premier jeu pour tenter de les réassembler différemment. Les bruitages se comptent sur les doigts d’une main, tout vos adversaires (squelettes compris) poussent le même cri quand ils meurent à part les boss, lesquels sont aussi peu variés que le reste du famélique casting : vous aurez le droit à des armures sans tête, des hommes-béliers géants équipés d’une masse, et rien d’autre. Pour ne rien arranger, dès la fin du troisième niveau, vous aurez pour ainsi dire déjà aperçu tous les adversaires du jeu, à l’exception du boss final. Seule bonne surprise : les musiques, elles, sont assez réussies.

Tant qu’à faire, autant évoquer la catastrophique I.A. du jeu : vos adversaires ne connaissent littéralement que deux méthodes : vous prendre en sandwich (ce qu’ils font bien, et qui est extraordinairement pénible quand on joue seul), ou bien vous foncer dessus lorsque vous êtes sur la même ligne qu’eux et que vous vous trouvez à plus de cinq mètres de distance. Ça, et rien d’autre. Le truc, c’est qu’ils sont tellement stupides qu’ils se jetteront d’eux-mêmes joyeusement dans le vide en cherchant à vous rejoindre – oui, même les mini-boss – ce qui fait qu’un joueur malin n’aura pas trop de mal à manœuvrer pour écourter plusieurs confrontations d’un jeu déjà pas extraordinairement long, et surtout très répétitif.

Pourtant, dans l’absolu, le titre est loin d’être mauvais ; il est même objectivement légèrement supérieur à l’opus précédent, au moins dans sa version de salon. Le vrai problème est qu’il soit arrivé deux ans plus tard avec strictement rien de neuf dans son escarcelle : un pareil manque d’idées, de nouveautés et de prise de risques annonçait déjà, à sa manière, le destin d’une série qui n’aura jamais tout à fait réussi à trouver ses marques sur Mega Drive, ni surtout à prolonger sa légende au-delà de l’ère 16 bits. Golden Axe II, c’est Golden Axe, deuxième partie : le type de programme qui serait aujourd’hui vendu sous forme d’un DLC à 5 euros. Le titre étant désormais disponible à moins d’un euro, on n’aura heureusement aucune raison de faire la moue qu’on pu faire ceux qui avaient acquis le titre au prix fort il y a trente ans. Au moins sait-on dorénavant exactement ce qu’on s’apprête à acquérir.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 14,5/20 Golden Axe II est l'exemple-type de la suite qui ne prend strictement aucun risque : mêmes personnages, même concept, même déroulement ; on a davantage la sensation d'être face à un remake, pour ne pas dire face à une extension. Malgré tout, et en dépit de l'absence totale de la moindre forme d'idée neuve, le titre est indéniablement un peu plus fignolé, un tantinet plus jouable et un chouïa mieux équilibré que son prédécesseur sur la même console. Autant dire que ceux qui espéraient voir la licence franchir un cap feraient mieux de se diriger immédiatement vers la « vraie » suite sur borne d'arcade, beaucoup plus ambitieuse à tous les niveaux. Les fans du premier épisode désireux de rempiler pour plus ou moins la même chose, en revanche, devraient trouver leur compte - tout comme ceux découvrant la saga par le biais de cet opus.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Pratiquement rien de neuf depuis le premier épisode, à tous les niveaux – Des ennemis parfois directement recyclés du premier opus – Une réalisation pas franchement impressionnante comparée au premier épisode – Une IA stupide qui ne connait que deux approches et qui se jette dans le vide en cherchant à vous atteindre

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Golden Axe II sur un écran cathodique :

Version Arcade (Mega-Tech/Mega Play)

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : 27 décembre 1991 (Mega-Tech) – 1993 (Mega Play)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Un joystick et trois boutons
Version testée : Version européenne
Hardware : SEGA Mega-Tech
Processeurs : Motorola MC68000 7,670453MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz ; Zilog Z80 3,579540MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; YM2612 OPN2 7,670453MHz ; SEGA 315-5246 SMS2 VDP 10,73862MHz ; SEGA VDP PSG 3,57954MHz ; 2 canaux
Vidéo : 256 x 224 ; 320×224 (H) 59.922738 Hz (x2)

Mega Play :
Processeurs : Motorola MC68000 7,670453MHz ; Zilog Z80 3,579545MHz (x2)
Son : Haut-parleur (x2) ; SEGA 315-5313 Megadrive VDP 53,693175MHz ; SEGA VDP PSG 3,579545MHz ; YM2612 OPN2 7,670453MHz ; SEGA 315-5246 SMS2 VDP 10,738620MHz ; SEGA VDP PSG 3,579540MHz ; 2 canaux
Vidéo : 1280 x 224 (H) 59,922742Hz
La même chose, mais en encore moins bon. Remarquez la limite de temps, en haut à droite (version Mega Play)

Comme à peu près n’importe quel titre développé sur Mega Drive avant de finir dans les salles d’arcade, Golden Axe II n’a pas bénéficié d’une adaptation censée tirer parti d’un hardware supérieur : il s’agit, sans surprise, d’une énième version « Mega-Tech » (qui aura été suivie, deux ans plus tard, d’une version « Mega Play » légèrement différente) qui ne fait que proposer très exactement la même chose que la version console, mais en payant pour du temps de jeu. Difficile de dire si le procédé était encore franchement populaire en 1993, où les consoles 16 bits étaient déjà bien implantées dans les salons – et peinaient de plus en plus à soutenir la comparaison avec les bornes d’arcade – mais c’est en tous cas là qu’aura fini ce Golden Axe II, qui n’était pourtant certainement pas l’argument de vente le plus évident pour une Mega Drive qui avait bien mieux à offrir à l’époque. Notons toutefois des modifications pour la version Mega Play (celle de 1993, donc) qui auront toutes les raisons de refroidir les curieux : le jeu est plus difficile que sur Mega Drive (seulement deux vies, seulement deux blocs de santé par vie), et le temps de jeu est limité à 8 minutes. Oubliez également la possibilité de doser sa magie, ainsi que le mode duel. Bref, on ne regrettera pas franchement que cette itération soit devenue introuvable hors émulation.

NOTE FINALE : 14,5/20 (Mega-Tech) – 13,5/20 (Mega Play)

Si jamais, pour une raison mystérieuse, vous souhaitiez absolument vous essayer à une version de Golden Axe II techniquement identique à la version Mega Drive, bon courage pour mettre la main sur cette borne d’arcade. Et si vous voulez une version plus difficile et expurgée d’un mode de jeu, ce ne sera pas beaucoup plus facile à trouver – mais vous ne perdez pas grand chose dans les deux cas.

Astérix (SEGA)

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titre alternatif : Astérix in Egypt (titre de travail)
Testé sur : Master System

La franchise Astérix (jusqu’à 2000) :

  1. Astérix (Atari) (1983)
  2. Obélix (Atari) (1983)
  3. Astérix and the Magic Cauldron (1986)
  4. Astérix et la Potion Magique (1986)
  5. Asterix and the Magic Carpet (1987)
  6. Astérix : Le Coup du Menhir (1989)
  7. Astérix (SEGA) (1991)
  8. Astérix (Konami) (1992)
  9. Astérix : Le Défi de César (1993)
  10. Astérix and the Great Rescue (1993)
  11. Astérix (Infogrames) (1993)
  12. Astérix and the Secret Mission (1993)
  13. Astérix et le Pouvoir des Dieux (1995)
  14. Astérix & Obélix (1995)
  15. Astérix & Obélix contre César (1999)
  16. Astérix : La bataille des Gaules (1999)
  17. Astérix : Sur la Trace d’Idéfix (2000)

Version Master System

Date de sortie : Décembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, français
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Astérix, au rang de la bande dessinée franco-belge, c’est un peu le patron, la star, le pape, voire tout cela à la fois – sa vitalité l’ayant même poussé à éclipser le père fondateur qu’était le vénérable Tintin, quelque peu laissé à l’abandon depuis la mort de son créateur, ce dernier ayant exprimé de multiples fois son désir que son héros ne soit pas repris par quelqu’un d’autre après son décès.

À croire que les aventures du guerrier gaulois et de son village résistant encore et toujours à l’envahisseur sont plus universelles qu’il n’y parait, en dépit du fait que le héros moustachu fasse aujourd’hui pratiquement figure de mascotte pour représenter les forces et les travers des habitants de l’Hexagone. Un statut que l’on retrouve d’ailleurs jusque dans le jeu vidéo, le personnage imaginé par René Goscinny et Albert Uderzo s’étant invité sur console dès 1983, à une époque où Mickey lui-même hésitait encore à y mettre les pieds.

Ceci dit, les tout premiers jeux Astérix parus sur Atari 2600 n’étaient pas grand chose de plus que des adaptations locales de jeux mettant en scène d’autres héros, le côté rudimentaire des réalisations d’alors rendant assez facile de remplacer un personnage par un autre sans même avoir à adapter les graphismes.

Et de fait, après quelques tentatives par des studios européens comme Coktel Vision, principalement sur ordinateur, il aura fallu attendre 1991 pour que le guerrier gaulois tombe sous la houlette d’une firme au standing un tantinet plus important : SEGA. Laquelle aura dépêché certains de ses meilleurs spécialistes pour donner à Astérix un jeu digne de lui sur Master System, jugez plutôt : Tomozou (game designer sur Castle of Illusion), Taku S. (programmeur sur le ce même Castle of Illusion et plus tard sur Land of Illusion) ou encore Ryo Kudo, dont la participation graphique s’étend de Shinobi à Shenmue III. Ce qu’on appelle du beau linge !

Astérix prend donc la forme à laquelle on pouvait s’attendre : celle d’un jeu de plateforme (autant dire ce qui était encore le genre roi à l’époque). Le titre vous proposera de parcourir sept niveaux, chacun divisés en trois stages (sauf le premier, qui n’en contient que deux), et vous menant de la Gaule à l’Égypte (d’où le titre de travail : Astérix in Egypt) avant de vous envoyer libérer Panoramix le druide lors d’un ultime niveau à Rome – soit pas moins de 21 stages à parcourir en tout, excusez du peu.

Ce nombre est d’ailleurs lui-même un peu trompeur, car si le titre vous laissera l’opportunité de choisir avant chaque stage qui contrôler entre Astérix et Obélix, cela ne se limitera pas à un choix purement cosmétique (tu prends des notes, Great Rescue ?) mais bien à une alternative entre deux parcours, les deux gaulois étant chacun dotés de leurs capacités propres et de leur façon de franchir les obstacles.

Un mot sur les commandes, tout d’abord : 1 sert à sauter et 2 à envoyer un coup de poing sur les malheureux romains et autres cochonneries placées sur votre route, on fait difficilement plus simple. Frapper en étant en l’air vous servira en fait à attaquer vers le bas, grâce à une attaque ressemblant, selon le cas, au pogo-stick de Duck Tales pour Astérix ou au coup de popotin de Mickey dans Castle of Illusion pour Obélix.

Les deux héros (plus particulièrement Astérix) pourront également trouver de temps à autre des flacons qui pourront être déposés en faisant B plus bas ou lancés avec B plus haut et dont les effets varieront selon les circonstances : explosifs capables de détruire des blocs, générateurs de plateforme, feu pour éclairer l’intérieur d’une pyramide, etc. Obélix y aura moins recours pour la bonne et simple raison qu’il peut détruire les blocs à mains nues, ou même directement avec la tête (coucou Super Mario) ou avec ses fesses (coucou Castle of Illusion). Celui-ci étant également un tantinet plus lent et sautant un poil moins loin que son compagnon, chacun aura donc un défi adapté à ses capacités quel que soit le niveau choisi.

C’est là la première très bonne idée du jeu, qui offre un facteur de rejouabilité fort appréciable, et même l’opportunité de voir deux joueurs parcourir des niveaux sensiblement différents lorsqu’ils jouent en alternance, le deuxième joueur ayant l’obligation d’incarner le personnage laissé libre par son ami.

Mais là où le titre vise particulièrement juste, c’est dans son désir de renouveler au maximum un déroulement que l’on pourrait s’attendre à trouver atrocement prévisible en début d’aventure. Ainsi, si les premiers stages vous resservent les bases du genre, avec une poignée de sauts, quelques adversaires épars et un boss à la fin, le concept du boss finit rapidement par passer à la trappe, et le déroulement linéaire laisse de plus en plus la place à des niveaux un peu plus labyrinthiques où l’objectif sera souvent de trouver une clef déverrouillant la porte finale.

C’est, disons-le, réellement à ce niveau que le titre de SEGA parvient à tirer son épingle du jeu, réussissant à faire oublier une jouabilité ultra-classique et jamais surprenante grâce des niveaux bien conçus, au défi progressif, et qui savent se montrer amusants à parcourir sans être trop longs ni inutilement alambiqués.

Traduit en clair, on maîtrise toutes les possibilités du jeu en quelques secondes à peine, mais on prend un réel plaisir à surmonter chaque stage un à un, quitte à changer de personnage de temps à autre pour casser un peu la routine et redécouvrir des niveaux qu’on a déjà écumé de long en large avec l’autre héros. Bref, c’est tout le contraire d’une révolution mais ce n’était de toute façon pas franchement ce qu’on était venu chercher. On voulait un jeu de plateforme, on en a un, et un bon.

Du côté de la réalisation, Astérix donne une nouvelle fois dans le classique. L’univers graphique de la BD n’est que rarement trahi, et sans atteindre le brio auquel les productions Disney allaient commencer à nous habituer dès la même année, le tout est lisible, coloré et fluide.

Du côté de la musique, on pourra regretter, comme souvent, des thèmes trop courts qui tournent vite en boucle, et surtout un peu trop redondants en dépit du soucis qu’à le programme de chercher à les alterner au maximum. Mais cela n’empêche pas de passer un très bon moment, malgré quelques passages assez ardus sur la toute fin du jeu, en retrouvant des sensations de jeu qu’on avait plutôt connues que chez la concurrence jusqu’alors. Oui, Astérix, c’est un peu la rencontre de ce qui fonctionnait chez Nintendo, de Super Mario à Duck Tales, avec une toute petite partie de la magie des productions Disney. Autant dire qu’on a vu pires références, et que sans jamais transcender en rien les titres dont il s’inspire, le logiciel de SEGA parvient à en tirer une expérience certes convenue, mais aussi ludique que plaisante. C’était sans doute ce qu’il pouvait faire de mieux.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 17/20 Pour réaliser la potion magique d'Astérix, prenez un grand chaudron, versez-y un soupçon de Duck Tales, un zeste de Castle of Illusion et une bonne dose de Super Mario Bros. 3, et vous obtiendrez un très bon jeu de plateforme sur Master System. Certes, c'est rarement follement original et la réalisation n'atteint pas le sublime des meilleurs jeux Disney, mais c'est ludique, efficace, bien pensé et rejouable, si bien qu'on se surprend à penser qu'on aurait volontiers signé pour quelques niveaux en plus. Le petit gaulois et son compagnon Obélix offrant des gameplays suffisamment différents pour qu'on ait envie d'épuiser le jeu avec l'un comme avec l'autre, on n'est jamais soufflé, très rarement surpris, mais ça n'empêche pas de passer un très bon moment. CE QUI A MAL VIEILLI : – Quelques thèmes musicaux qui reviennent un peu trop souvent – Des niveaux bonus sans intérêt – Un ou deux passages vraiment corsés sur la fin

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Astérix sur un écran cathodique :

Legend of Success Joe

Développeur : Wave Corp.
Éditeur : SNK Corporation
Titre original : あしたのジョー伝説 (Ashita no Joe Densetsu, Japon)
Testé sur : Neo Geo (MVS/AES)

La série Ashita no Joe :

  1. Success Joe (1990)
  2. Legend of Success Joe (1991)
  3. Ashita no Joe (1992)

Version Neo Geo (MVS/AES)

Date de sortie : Juillet 1991 (version MVS) – 30 août 1991 (version AES)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Un joystick (huit directions) et quatre boutons (deux employés)
Version testée : Version internationale
Hardware : Neo Geo MVS/AES
Processeurs : Motorola MC68000 12MHz ; Zilog Z80 4MHz
Son : 2 hauts-parleurs ; YM2610 OPNB 8MHz ; 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 59,185606Hz (résolution effective : 304×224)
Carte mémoire supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’arrivée de la Neo Geo sur le marché des consoles en 1991 avait fait l’effet d’une bombe, mais d’une bombe à la portée extrêmement restreinte (comme le chantait Boris Vian dans sa Java des bombes atomiques : « C’est qu’celles de ma fabrication/ont un rayon d’action/de 3m50 »). Car à une époque où les premières consoles 16 bits commençaient tout juste à débarquer en occident, le fantasme de pouvoir acquérir une véritable borne d’arcade chez soi était certes d’autant plus jouissif que lesdites bornes représentaient le sommet de la technologie ludique d’alors, mais n’empêchait en rien la somptueuse machine de SNK d’être réservée à une élite particulièrement fortunée.

Quand une simple cartouche de jeu valait déjà parfois plus de deux fois plus cher qu’une Mega Drive vendue avec une manette et un jeu, on comprend pourquoi le rêve était d’autant plus merveilleux qu’il était largement inaccessible au commun des mortels. Une assez bonne raison, également, pour s’efforcer de proposer des titres à la hauteur du support : difficile d’espérer écouler des palettes entière d’un jeu médiocre vendu à un prix prohibitif. Et pour être bien certain de l’intérêt ludique d’un logiciel, quoi de mieux que de commencer par aller glisser une pièce dans la version MVS de la machine ? C’est probablement ce qui aura scellé le destin d’un jeu comme Legend of Success Joe.

Pour ceux qui l’ignoreraient, le titre développé par Wave Corp est avant tout l’adaptation d’un manga très célèbre au Japon, publié dans le magazine Shonen entre 1968 et 1973, et mettant en scène l’ascension d’un jeune orphelin nommé Joe Yabuki dans l’univers impitoyable de la boxe. Une licence déjà âgée, donc, mais que le studio japonais – qui venait de publier un an auparavant une autre adaptation nommée simplement Success Joe – n’était visiblement pas décidé à lâcher. Sans surprise, vous allez vous placer dans les baskets de Joe et entreprendre de vous frayer un chemin jusqu’aux sommets du monde de la boxe en commençant par survivre dans les bas-fonds et en gravissant les échelons à la force de vos poings.

Le gameplay consiste en fait en l’alternance entre deux séquences de jeu, un peu à la manière d’un Heavy Nova – la comparaison avec ce titre est d’ailleurs loin d’être innocente, comme nous allons le découvrir. Vous commencerez d’abord dans des rues mal famées, face à plusieurs adversaires – jamais plus de trois ou quatre – sur qui vous faire les griffes, avant d’affronter un adversaire plus coriace directement sur le ring, et ainsi de suite jusqu’à la fin de la partie. Les premières séquences seront l’occasion de vous confronter à des adversaires qui n’hésitent pas à utiliser à peu près tous les coups bas possibles et imaginables histoire de vous compliquer la vie, tandis que les secondes se dérouleront en trois mises au tapis d’affilée, avec un sempiternel ralenti du coup ayant fait tomber votre opposant dans les pommes sur les écrans géants de la salle en cas de victoire. Voilà pour le principe.

Dans le détail, l’essentiel du titre repose sur une jouabilité à deux boutons qui se veut à la fois complète et technique : frappes directes, uppercuts, crochets, garde haute ou basse, coups puissants ou plus rapide ; tout cela est possible selon un système qui demande en théorie de prévoir les frappes de vos adversaires pour mieux les contrer et ainsi leur allonger un bourre-pif apte à les mettre à terre pour de bon.

Je dis « en théorie », car dans les faits, il est strictement impossible d’anticiper quel type d’attaque votre opposant va bien pouvoir employer face à vous. Bloquer devenant rapidement une nécessité, et la difficulté du titre étant telle que vous pourrez littéralement vous faire étaler en une poignée de secondes, on se retrouve au final avec un système aussi injuste qu’aléatoire qui n’est pas sans rappeler celui du catastrophique Kabuki-Z. Autant dire qu’avec de telles références en tête, on comprend vite pourquoi Legend of Success Joe est un des rares titres publiés sur une Neo Geo encore en tout début de vie qui se soit fait incendier par une critique d’ordinaire dithyrambique à l’égard de tout ce qui tournait sur la console de SNK. Et n’espérez même pas récupérer un choix de la difficulté dans la version AES : il n’y en a pas.

Il faut dire que même en creusant, on a bien du mal à trouver la moindre circonstance atténuante en faveur des laborieuses tribulations de notre boxeur. La jouabilité est aussi cataclysmique que la difficulté est infecte : il m’est arrivé de ne pas réussir à remporter un combat même en trichant pour être invincible tant parvenir à toucher un adversaire qui me matraquait inlassablement de coups était tout simplement infaisable !

La réalisation est sans conteste une des plus mauvaises de toute la ludothèque de la Neo Geo : les sprites sont certes très grands, mais ils sont dessinés avec les pieds, et les décors se limitent au même ring répété à chaque stage et précédé d’un cadre dont la surface de jeu excède péniblement un seul écran. En fait, j’adorerais descendre le jeu en flammes à l’aide d’expressions fortes et imagées, mais le fait est qu’il n’y a tout simplement rien à décrire : le gameplay est indigent, les graphismes sont au mieux quelconques, l’histoire n’a aucun intérêt, et on a fait le tour de ce que le titre a à offrir au bout de vingt secondes. Et même ceux qui parviendraient à trouver une vague technicité cachée au milieu de cette jouabilité infecte s’arracheront de toute façon les cheveux à force de se faire passer à tabac par des adversaires totalement inapprochables.

Ce n’est même pas drôle : c’est juste moche, ennuyeux et frustrant. Pour enfoncer le clou, je n’ai d’ailleurs toujours rien compris au soi-disant mode deux joueurs du programme : il s’agit apparemment de jouer à tour de rôle, sauf que le deuxième joueur n’a la main que lorsque le premier a utilisé tous ses crédits et pas avant ! Les rares joueurs à avoir glissé une pièce dans la fente de la borne ont dû le regretter immédiatement, imaginez alors la tête du joueur ayant dépensé l’équivalent d’une semaine de salaire d’un cadre pour acquérir la cartouche… Autant dire que, dans ces circonstances, on ne sera pas franchement surpris d’apprendre que le titre n’aura jamais quitté le Japon, ni que Wave Corp aura disparu corps et bien un an après la sortie du jeu. Parfois, le mieux est peut-être tout simplement de changer de métier.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 06/20 Joe Yabuki aura peut-être atteint les sommets de la boxe mondiale dans le manga de Tetsuya Chiba et Asao Takamori, mais pour ce qui est de Legend of Success Joe, le titre peut davantage revendiquer la ceinture du plus mauvais beat-them-all/jeu de combat de tout le catalogue de la Neo Geo, et sans doute bien au-delà. Entre une réalisation honteuse, une jouabilité abjecte, un game design torché à la va-vite et une difficulté absolument atroce, on ne sait plus trop ce qu'on est censé sauver dans une adaptation qui fait honte à l’œuvre dont elle est tirée. Les joueurs vouant une passion secrète pour les titres indéfendables seront peut-être heureux de trouver là le vrai paria au sein d'une ludothèque riche en logiciels d'exception, les autres n'auront aucune raison de s'en approcher. K.O. technique, ludique et commercial. CE QUI A MAL VIEILLI : – Deux phases de jeu sans intérêt en alternance – Difficulté insurmontable – Système de jeu qui se veut technique mais qui repose à 99% sur la chance – Une réalisation qui ne fait pas franchement honneur au support – Une narration qui fait honte au manga original – Même pas de vrai mode deux joueurs

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Legend of Success Joe sur une borne d’arcade :

Heavy Nova

Développeur : Holocronet
Éditeur : Micronet Co, Ltd.
Titre alternatif : ヘビーノバ (graphie japonaise)
Testé sur : Mega-CDGenesisSharp X68000

Version Mega-CD

Date de sortie : 12 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction du jeu :

L’un des principaux arguments de vente du Mega-CD, au moment de sa sortie, était qu’on allait en prendre plein les mirettes. « Plein les esgourdes » serait probablement plus proche de la vérité, le support CD ne modifiant pas à lui seul les capacités graphiques de la Mega Drive (enfin, le support, non, mais la machine… bon, on abordera ça une autre fois), contrairement à ses capacités sonores, mais comme avec beaucoup de technologies nouvelles, l’avantage était qu’on pouvait promettre à peu près n’importe quoi. Et là, à grands coups de vidéos, d’animations et de chansons, on allait quand même être suffisamment bien équipé pour rendre le camarade de classe malade de jalousie, ce qui est quand même un des objectifs officieux de la technologie de pointe. Très bon exemple avec Heavy Nova : commencez par regardez l’introduction en ouverture du test. Si, si, sérieusement. Essayez de vous replacer dans l’imaginaire d’un enfant de dix ans qui n’avait jusqu’ici vu tourner que des jeux NES. Tout de suite, ça annonçait le niveau au-dessus, non ?

Toutes ces images animées de robots géants et d’astéroïdes dans l’espace sont certes très jolies, mais au fait, Heavy Nova, c’est quoi au juste ? À ceux qui penseraient à la fille cachée de Mamie Nova, je vous remercie à la fois de bien vouloir sortir immédiatement et de m’avoir permis d’écrire ce calembour consternant qui me démangeait l’occiput depuis plusieurs jours. Non, imaginez plutôt un futur vachement visionnaire, pour le coup, puisque non seulement il s’agit du XXIe siècle (on parle du futur de 1991, souvenez-vous) mais qu’en plus la situation climatique est tellement catastrophique que les différentes nations terriennes en sont venues à arrêter de se battre pour essayer de sauver leur planète. Allons à l’essentiel : une race d’extraterrestres débarque, réussit à nettoyer l’atmosphère et à sauver le monde, avant que les humains ne découvrent qu’il ne s’agit que d’une manœuvre pour tenter de les asservir et ne décident donc de déclarer courageusement la guerre à leurs sauveurs avant de leur mettre une peignée en huit ans à peine. De manière totalement illogique, le jeu vous place donc APRÈS la guerre, pour suivre un programme d’entrainement pour robots géants appelés DOLLS, et dont les meilleurs membres gagneront le titre de « Heavy Nova ». Voilà pour l’histoire.

Dans les faits, le fameux « programme d’entrainement » qui constitue près de la moitié du jeu consiste en une simulation divisée en deux phases : une phase de plateforme/beat-them-all où vous avancerez vers la droite en évitant les obstacles et en combattant les quelques adversaires qui se dresseront sur votre route, puis une phase qui constitue le véritable cœur du jeu et qui vous proposera d’affronter un autre DOLL en un contre un. Alléchant, non ?

Non. Désolé pour le suspense, mais autant aborder immédiatement ce qui va constituer le plus important des très nombreux problèmes qui polluent l’expérience de jeu : la jouabilité du titre. « Heavy », comme les anglophones le savent tous, veut dire « lourd » ; et en terme de lourdeur la jouabilité du jeu atteint effectivement un seuil pachydermique. Cela devrait vous frapper dès la première phase : face à des obstacles évidents, inratables et souvent immobiles, vous serez déjà surpris de constater à quel point il sera fréquent de rater des sauts qui paraissent d’une facilité enfantine, la faute au réacteur placé dans votre dos et qui ne parvient pour ainsi dire jamais tout à fait à prendre la direction ni à parcourir la distance que l’on souhaite. Votre robot avançant littéralement à deux à l’heure, et ses coups sortant beaucoup trop lentement pour son propre bien, ce qui ressemblerait à un parcours de santé dans n’importe quel jeu de plateforme à peu près décent est ici une galère sans nom, l’essentiel de la difficulté provenant précisément du manque de réactivité hallucinant de votre machine. Dès le deuxième ou troisième stage (le jeu en compte huit), on s’arrache littéralement les cheveux à voir notre mastodonte se trainer comme une tortue rhumatisante face à des boules à pointes ou à des adversaires infiniment plus mobiles, et surtout à ne jamais parvenir à réaliser les actions pourtant basiques que l’on cherche à faire.

Le pic ultime de la nullité humaine sera néanmoins atteint lors de la fameuse deuxième phase, qui se déroulera sous la forme d’un combat en un contre un. À ce stade, la jouabilité du jeu n’est même plus catastrophique : elle en devient carrément surnaturelle. Car parvenir à concevoir un gameplay où porter un coup soit souvent le résultat de plus de trente secondes d’efforts semblait difficile ; heureusement, Holocronet aura réussi à concrétiser nos rêves les plus fous. Je sais à peine par où commencer, alors prenons d’abord l’exemple de l’une des idées de game design les plus stupides de tous les temps.

Figurez-vous une situation de combat classique à la Street Fighter, avec un combattant à gauche, un combattant à droite, la limite de temps en haut de l’écran et vos jauges de vie en bas. Quelle est l’action la plus extraordinairement crétine que pourrait bien accomplir votre robot lorsque vous lui demandez de s’éloigner de son adversaire situé, rappelons-le, à quelques mètres de lui ? Eh bien, commencer par faire un pas de recul, avant de se RETOURNER pour partir de l’autre côté, pardi ! Seule fonction de la chose : tourner le dos à votre ennemi pour lui offrir une magnifique occasion de vous donner un bon coup entre les omoplates, et il ne s’en privera pas, le bougre ! Et bien évidemment, cette idée était tellement géniale que la désactiver dans les options ne change pour ainsi dire rien !

Notez que même sans elle, les combats seraient de toute façon des séquences de torture absolument interminables : entre les moments où l’on est collé à son adversaire et où l’on passe son temps à essayer de se retourner (ce qui prend deux bonnes secondes) alors que votre opposant fait exactement la même chose, le fait que vous comme votre ennemi soyez totalement invulnérable dès l’instant où vous êtes en l’air OU lorsque vous êtes accroupis (!!!), le fait que chaque coup mette une heure à sortir, qu’il touche une fois sur dix alors qu’il devrait littéralement transpercer le robot collé à vous, qu’il n’y ait aucune frame d’invulnérabilité quand votre robot se relève ce qui permet à votre adversaire de vous aligner parfois jusqu’à dix coups d’affilée sans que vous ne puissiez rien faire, que la jouabilité n’utilise que DEUX boutons et qu’il est à peu près impossible de savoir quel coup va sortir ni pourquoi, que la plupart des attaques se débloquent au fur et à mesure des niveaux rendant les premiers combats encore plus pitoyables que ceux qui les suivent… C’est tout bonnement hallucinant, Holocronet est parvenu à concevoir le premier jeu de combat pacifiste du monde : celui où il est pratiquement impossible de se battre ! Le premier affrontement du jeu est déjà presque infranchissable : votre adversaire est plus rapide, a plus d’allonge, et tous ses coups ont la priorité sur les vôtres : par quel miracle êtes-vous censé le vaincre ?! D’ailleurs, on sent que les développeurs eux-mêmes ont compris que leur jeu était injouable, puisque non seulement l’écran des options offre accès à un choix de la difficulté, mais même carrément… à un choix du niveau. Comme ça, sans cheat code. C’est vrai que ce serait triste de ne pas voir tous ces niveaux de grillages industriels.

Ajoutons, pour peaufiner le tableau, que la réalisation est à la mesure de la jouabilité : vous composerez pendant toute la partie avec des décors tendance « chantier souterrain » ou « base militaire qui ressemble vachement au chantier souterrain », la palette de couleurs doit péniblement se limiter à dix teintes grisâtres, l’animation est poussive, et il sera sans doute difficile d’entendre la musique, couverte par vos hurlements de rage pendant la plus grande partie du jeu. Heureusement, le titre vous offre également l’occasion de perdre vos derniers amis en proposant un mode deux joueurs en tout point aussi injouable que l’expérience solo (mais limité, on s’en doute, purement à l’affrontement, cette fois). Si vous êtes animé d’une curiosité malsaine et que vous souhaitez vraiment découvrir à quoi peut ressembler l’un des plus mauvais titres du genre de toute l’ère 16 bits, préparez-vous à balancer entre le fou-rire (au début) et l’ennui (au bout de deux minutes). Pour les gens normaux, en revanche, aucun doute à avoir : voilà l’exemple même du titre à fuir d’urgence et à laisser sombre dans l’oubli. Heavy Nova, les mamies ne lui disent pas merci.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 07/20 Le nom Heavy Nova est certainement issu d'une erreur de traduction d'un mot japonais signifiant « douche froide ». Car au terme d'une introduction prometteuse qui augurait du meilleur, le logiciel présent sur le CD-ROM se révèle être l'un des pires jeux de combat jamais programmés, au point de faire passer le premier Street Fighter pour un chef d’œuvre en comparaison. Articulé autour d'affrontements interminables, injouables, incompréhensibles et fondamentalement injustes, le gameplay représente la crème de la crème de toutes les plus mauvaises idées du genre assemblées n'importe comment en un système qui aimerait être technique et qui non seulement ne l'est pas mais échoue surtout lamentablement à offrir ne fût-ce qu'une milliseconde de fun. Si les premiers possesseurs du Mega-CD espéraient toucher du doigt le nirvana vidéoludique, leur retour à la réalité a dû avoir la violence d'une explosion nucléaire. À utiliser en frisbee ou en butoir de porte, mais à ne jamais introduire dans votre console. CE QUI A MAL VIEILLI : – Jouabilité absolument catastrophique – Des attaques adverses qui passent systématiquement au-dessus des vôtres – Corps-à-corps illisibles – Des coups qui touchent une fois sur dix – Combats interminables – Réalisation honteuse – Mode deux joueurs encore plus inintéressant que le mode solo – Qui a réellement cru un seul instant que pouvoir tourner le dos à son adversaire était une bonne idée ???

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Heavy Nova sur un écran cathodique :

Version Genesis

Développeur : Holocronet
Éditeur : Micro Co. Ltd.
Date de sortie : 1992 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Il eut été bouleversant qu’un chef d’œuvre comme Heavy Nova restât cantonné au Mega-CD, c’est pourquoi l’humanité reconnaissante aura accueilli l’arrivée du messie sur Mega Drive à bras ouverts. Enfin, sur Genesis pour être plus précis : l’Europe n’aura, pour une fois, pas eu le privilège de servir de poubelle au Japon pour écouler ses pires bides invendables. Évidemment, le gros avantage d’une version Mega Drive/Genesis, c’est que ça ne demande pas un gros travail : on traduit le manuel, on fabrique les cartouches et on est prêt pour le recensement du nombre de gogos aux États-Unis. Seule bonne surprise : l’introduction du jeu est toujours là, à l’identique, sans perdre la moindre animation (c’est certainement là que sont passés les fameux « 8 MEGAS » annoncés sur la jaquette) ; la seule victime est bien entendu la musique CD, remplacée par le processeur sonore de la Mega Drive qui, sur le coup, ne casse pas des briques. Pour le reste, le jeu est strictement identique – ça aurait probablement été dommage de se repencher un peu sur la jouabilité – et reste toujours le parfait symbole du titre à éviter à n’importe quel prix.

NOTE FINALE : 07/20

Pas de jaloux : Heavy Nova sur Genesis est tout aussi mauvais que sur Mega-CD, ne sacrifiant que des compositions musicales qui constituaient certes à peu près la seule chose à sauver de la version originale mais qui n’impactaient de toute façon en rien le (non) plaisir de jeu. Si jamais vous trouvez la cartouche dans une poubelle, laissez-la à sa place.

Version Sharp X68000

Développeur : Holocronet
Éditeur : Takeru
Date de sortie : 10 avril 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, manette
Version testée : Version japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Signe qu’Holocronet semblait croire dur comme fer à son jeu pourri, Heavy Nova aura également été publié sur Sharp X68000. Certains affirment que c’est d’ailleurs sur cet ordinateur que le jeu a initialement été développé, mais les dates que j’ai trouvé ne collent pas. Quoi qu’il en soit, on sent que le portage, quel que soit le sens dans lequel il a été réalisé, n’a pas dût être tuant : c’est exactement la même chose que sur Mega-CD, et la musique n’a pas franchement à rougir de la comparaison. Certes, ça bouge plus vite, mais ça ne rend hélas pas le jeu plus jouable. Sachant que le jeu tient sur une seule et unique disquette 5,25″ (un format qui pouvait contenir au maximum 1,17Mo de données), on se demande au passage quel était l’intérêt de porter le jeu sur CD-ROM, mais bon… Bref, quoi qu’il en soit, vous pouvez oublier cette façon aussi facilement que toutes les autres.

NOTE FINALE : 07/20

Même un ordinateur comme le Sharp X68000 ne peut rien contre le naufrage qu’est Heavy Nova. Fuyez, pauvres fous, il n’y a rien à voir.

Alpha Mission II

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK Corporation
Titre original : ASO II 〜ラストガーディアン〜 (ASO II : Last Guardian – Japon)
Titre alternatif : ACA NEO GEO ALPHA MISSION II (collection Arcade Archives)
Testé sur : Neo Geo (MVS/AES)Neo Geo CD
Disponible sur : Android, Antstream, iPad, iPhone, PlayStation 3, PlayStation 4, PSP, PS Vita, Switch, Wii, Windows Apps, Xbox One, Xbox Series X/S
En vente sur : Nintendo eShop (Switch), PlayStation Store (PlayStation 4), Xbox.com (Xbox One, Xbox Series)

La Série Alpha Mission (jusqu’à 2000) :

  1. Alpha Mission (1985)
  2. Alpha Mission II (1991)

Version Neo Geo (MVS/AES)

Date de sortie : Mars 1991 (version MVS) – 1er juillet 1991 (version AES)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Un stick (huit directions) et quatre boutons (trois en usage)
Versions testées : Versions MVS et AES internationales
Hardware : Neo Geo MVS/AES
Processeurs : Motorola MC68000 12MHz, Zilog Z80 4MHz
Son : 2 hauts-parleurs – YM2610 OPNB 8MHz – 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 59,185606 Hz (résolution effective : 304×224)
Carte mémoire supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On a déjà souvent glosé ici sur une des prétentions récurrentes des consoles de jeu, autour du début des années 90, à représenter enfin ce Graal inaccessible qu’était « l’arcade à domicile » à une époque où les bornes d’arcade, justement, représentaient l’alpha et l’oméga de l’accomplissement technique dans le domaine vidéoludique. L’arrivée de la Neo Geo avait pris cette prétention au pied de la lettre en faisant – littéralement – débarquer une borne d’arcade à domicile, à des prix suffisamment prohibitifs pour réserver sa ludothèque à une élite fortunée qui aura valu à la machine de SNK d’être souvent qualifiée de « Rolls Royce des consoles ».

Autant dire qu’avec des jeux parfois vendus à plus de 350€, mieux valait avoir des arguments pour justifier des dépenses aussi somptuaires. « En prendre plein les yeux » devint donc souvent l’un des premiers arguments de vente de n’importe quel jeu publié sur le système, chargés de bien faire comprendre que toutes les autres machines étaient bonnes à mettre à la casse et que la qualité avait un prix. C’est également une des raisons pour laquelle la ludothèque de la machine aura principalement tourné autour du jeu de combat, du shoot-them-up et du run-and-gun : pour recevoir sa dose d’adrénaline, rien ne vaut l’Action avec un grand « A ». Alors quand on vit débarquer Alpha Mission II, l’un des premiers shoot-them-up de la console, six ans après un premier épisode sur arcade qui n’avait pas nécessairement marqué les esprits, on se dit que le cahier des charges allait être assez simple à résumer : de l’action, de l’action et encore de l’action.

Prenez un prétexte quelconque mettant en jeu la survie planétaire, lancez-y deux vaisseaux surarmés, et voilà les bases (convenues) de n’importe quel titre du genre. Alpha Mission II reprend, de fait, exactement les bases du premier opus qui était, rappelons-le, un sympathique clone de Xevious : un défilement vertical, un tir aérien et un tir au sol, ainsi qu’une « armure » qui va représenter ici une des clés du gameplay du titre, d’autant que, grande nouveauté, il y en a cette fois de plusieurs types.

Concrètement, le titre annonce tout de suite la couleur en vous laissant choisir le modèle de ladite armure qui équipera votre vaisseau en préambule du premier niveau. Celle-ci présente deux avantages évidents : celui de vous offrir une capacité à part entière, tout d’abord, parfois disponible en laissant appuyé le bouton A et parfois en employant le bouton B, parfois disponible de manière passive (comme avec le bouclier), et qui vous aidera à faire le ménage en profondeur. Celui de vous aider à encaisser quelques coups en plus, deuxièmement, l’un comme l’autre étant souvent liés à une jauge d’énergie alors affichée à gauche (ou à droite si vous êtes le deuxième joueur) de l’interface et qu’il faudra vous efforcer de maintenir aussi pleine que possible si vous ne voulez pas voir votre superbe armure durement gagnée se faire vaporiser au bout de dix secondes.

Pour conventionnel qu’il soit dans ses fondements, le gameplay du jeu ne tarde pas, en effet, à se montrer aussi exigeant qu’il est technique. Face à l’opposition pléthorique qui va se charger de faire de votre vie un enfer, le salut passera principalement par une chasse aux bonus, présentés sous la forme de lettres et dont vous pouvez changer la nature en tirant dessus. L améliore votre tir principal, M vos missiles (pour les cibles au sol), G fait office de monnaie pour investir dans une armure à la fin du niveau, S augmente votre vitesse, K vous permet de conserver tous vos power-up à la perte d’une vie, et ainsi de suite. Autant dire que mieux vaudra bien faire son choix, car si votre vaisseau doit par exemple avoir pour première priorité d’augmenter sa vitesse (la plupart des tirs adverses étant plus rapides que lui), aller trop vite risque en revanche de le transformer en savonnette incontrôlable.

Le problème se présentera en des termes identiques avec l’armure : loin d’être cantonné à un achat entre deux niveaux, vous pouvez effectivement collecter les trois parties d’un type d’armure donnée avant de le sélectionner avec C pour vous en équiper avec A. Seul souci : chaque type d’armure du jeu ne fonctionne qu’avec ses propres pièces, et en ramasser une d’un type différent réinitialise toutes les autres. Imaginons par exemple que vous ayez collecté deux éléments de l’armure « Thunder », un geste malheureux vous amène à passer sur un composant de l’armure « Bubble », et vous voilà avec ce dernier en ayant perdu tous ceux de l’armure précédente ! Pour ne rien arranger, après avoir présenté brièvement son nom, chaque type de composant prend ensuite la forme d’une simple icône accompagnée d’un chiffre qui fait qu’il est souvent très difficile, dans le feu de l’action, de ne pas ramasser un élément inapproprié par inadvertance.

En l’essence, tout le sel du jeu est là. Car face à des niveaux interminables où les moments de répit seront très rares, autant dire que la difficulté est redoutable, et que les premières parties risquent de ne pas vous laisser l’occasion de profiter du pouvoir de ces fameuses armures plus d’une poignée de secondes – car, naturellement, leur protection accru se paie aussi par un masque de collision beaucoup plus gros…

Oubliez donc le jeu popcorn à pratiquer aux réflexes : ici, il faudra constamment louvoyer entre les tirs et les adversaires, mais également trouver le temps de choisir ses bonus avec soin, tenir le temps nécessaire à collecter tous les composants qui nous intéressent – quitte à ce que ceux-ci ne se présentent jamais – et même s’arranger avec son partenaire, en cas de jeu à deux, pour se répartir les tâches et se distribuer les bonus. Comme souvent, se retrouver « à poil » face à un boss avec juste le petit tir de base est un game over quasi-assuré, à moins d’avoir les poches particulièrement rebondies, et autant dire que ceux qui n’apprécient pas les défis insurmontables exigeant d’être en transe pendant une bonne quarantaine de minutes risquent de passer un moins bon moment que les amateurs du genre.

Lesquels devraient, en revanche, être servis : Alpha Mission II a beau être un logiciel programmé pour une console en début de vie, il annonce déjà très bien les impressionnantes capacités de la machine de SNK.

Les niveaux sont dynamiques, on survole souvent des structures gigantesques, il n’y a pas l’ombre d’un ralentissement quel que soit le nombre de sprites massifs à l’écran… et d’ailleurs, entre le défilement vertical, le passage à l’intérieur d’une structure au sein d’un même stage, les niveaux interminables ou encore la ballade dans un long canyon riche en plans parallaxes, difficile de ne pas penser à plusieurs reprises à un titre comme M.U.S.H.A., paru au Japon l’année précédente – on a vu pire, comme référence. Certes, on n’est pas vraiment dans le fun instantané – Alpha Mission II est un jeu qui s’apprivoise, voire qui se dompte, et qui demande d’y consacrer un minimum de temps avant de l’apprécier à sa juste valeur. Si vous vous sentez prêt à y consacrer quelques heures avant d’en voir le terme, vous devriez rapidement tomber sous le charme – particulièrement si vous avez la chance d’avoir un(e) ami(e) dans les mêmes dispositions histoire de faire le nombre. Si vous aspirez plutôt à jouer pour vous détendre, le mieux est sans doute de lui laisser sa chance le temps de voir et de ne pas trop insister.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15,5/20 Loin du simple défouloir pensé pour en mettre plein les yeux à l'occasion du lancement du système, Alpha Mission II est au contraire l'un des shoot-them-up les plus exigeants et les plus techniques de la Neo Geo MVS. En repartant, comme le premier épisode, sur les bases de l'antique Xevious, le titre de SNK lui apporte une gestion des power-up assez pointue qui demande d'être constamment aux aguets, au cœur de niveaux qui mettront votre endurance autant que vos réflexes à rude épreuve. Si ceux qui aiment jouer purement à l'adrénaline risquent de vite tirer la langue, même à deux joueurs, les amateurs de défi relevé exigeant de connaître le titre sur le bout des doigts devraient passer un bien meilleur moment. CE QUI A MAL VIEILLI : – Difficulté redoutable – Système d'upgrade pas très clair et long à mettre en place – Niveaux interminables – On peut très facilement ramasser un bonus dont on ne voulait pas – Très peu de temps pour choisir son armure entre les niveaux

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Alpha Mission II sur une borne d’arcade :

Version Neo Geo CD

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK Corporation
Date de sortie : 9 septembre 1994 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Autant ne pas se leurrer : le principal intérêt de la Neo Geo CD, c’était avant tout de se débarrasser du support cartouche et avec lui de ses prix prohibitifs. Cela tombe bien, car si vous étiez venu chercher quoi que ce soit de neuf dans cette itération CD-ROM, vous en serez pour vos frais : c’est une copie on-ne-peut-plus conforme de la version cartouche sortie trois ans plus tôt, avec le même menu des options et un léger temps de chargement au lancement du jeu en prime. Ne cherchez pas de cinématiques supplémentaires ou de musique CD, il n’y en a pas. C’est un peu dommage, car on aurait autant aimé trouver dans cette version une authentique valeur ajoutée, mais peut-être que découvrir la ludothèque de la Neo Geo à un prix à peu près décent était déjà une victoire en soi.

NOTE FINALE : 15,5/20

Si vous avez aimé la version cartouche d’Alpha Mission II, vous serez heureux de la retrouver parfaitement identique dans cette itération CD-ROM qui n’apporte strictement rien. Au moins sera-t-il sans doute plus facile de trouver le jeu à un prix abordable dans cette version.

Earnest Evans

Développeur : Wolf Team
Éditeur : Wolf Team
Titre alternatif : アーネストエバンス (graphie japonaise)
Testé sur : Mega-CDGenesis

La série El Viento (jusqu’à 2000) :

  1. El Viento (1991)
  2. Earnest Evans (1991)
  3. Anett Futatabi (1993)

Version Mega-CD

Année de sortie : 20 décembre 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Normalement, si l’on vous demande un jour de citer un archéologue célèbre doté d’un fouet et d’une veste en cuir, votre réponse devrait fuser avec la rapidité de l’évidence : s’il est un personnage qui aura réussi à inscrire son nom en lettres d’or au panthéon de la pop culture, c’est bien Indiana Jones. Et comme toutes les références indépassables, le personnage imaginé par Steven Spielberg et George Lucas aura également dû composer avec son lot de clones plus ou moins assumés, de Jack Colton à Benjamin Gates du côté du grand écran, ou de Rick Dangerous à Lara Croft dans l’univers du jeu vidéo. Mais sa célébrité aura visiblement largement dépassé les frontières de l’occident, car au pays du Soleil Levant, on trouve également un archéologue à mi-temps nommé Earnest Evans.

Si ce titre, référence au véritable nom d’un « Mr. Twist » des années 60 un peu oublié depuis, ne vous dit rien, sachez donc qu’Earnest Evans aura fait partie des tout premiers jeux disponibles sur Mega-CD au moment de sa sortie… au Japon, dont il ne sera parti qu’au format cartouche un an plus tard. Première conséquence évidente : l’histoire narrée à coups de longues séquences animées et entièrement doublées chargées de mettre en valeur le CD-ROM ne sera donc accessible qu’aux joueurs disposant d’une très bonne maîtrise de la langue de Mishima, ce qui n’est pas mon cas. On y retrouve bien évidemment tous les éléments du genre : un grand méchant aux airs de caïd, une jeune fille en détresse, un rival charismatique, et des artéfacts anciens dont dépend probablement le destin du monde. Qu’importe : piqué par l’introduction du jeu, on se lance à l’aventure avec l’espoir qu’elle puisse rivaliser avec celles du professeur Jones.

La jouabilité est a priori très simple, et tire efficacement parti des trois boutons de la manette : A sert à utiliser le fouet, B à sauter, et C vous permettra occasionnellement de changer d’arme pour une durée limitée lorsque vous aurez la chance d’en trouver une. On se retrouve immédiatement face à un jeu d’action/plateforme conforme aux canons de l’époque, où l’on cherche à arriver au terme d’une grande variété de niveaux pour y affronter un boss, et on se prend même à rêver que le Mega-CD dispose dès sa première semaine de lancement d’un rival crédible au Super Castlevania IV sorti sur Super Nintendo le même mois. Malheureusement, Wolfteam n’avait visiblement ni les moyens ni le talent de Konami, et aura fait le choix de bâtir tout son jeu autour d’une idée « révolutionnaire » qui se sera révélée une des plus mauvaises de toute la décennie. Explication.

Animer n’importe quel sprite, à l’ère de la 2D, était un travail qui ne laissait pas beaucoup de place à l’alternative : comme pour un dessin animé, il s’agissait de dessiner toutes les étapes de l’animation une à une, pixel par pixel, afin de pouvoir faire bouger tous les personnages du jeu. Wolfteam, pour sa part, a fait un choix qui se voulait visionnaire : composer chaque personnage d’une série d’éléments indépendants (par exemple : le torse et les quatre membres) qui bougeraient donc tous de manière fluide en s’adaptant au relief – un peu comme on peut le faire aujourd’hui pour un modèle 3D, mais en 2D. Sur le papier, le résultat devait offrir une animation « organique » d’une fluidité et d’un réalisme inégalables. Dans les faits, on pense plutôt à une sorte de pantin désarticulé bougeant anarchiquement sans aucune logique et en dépit du bon sens le plus élémentaire. Le verdict ne se fait pas attendre : c’est profondément grotesque, et le résultat aurait été sensiblement meilleur sans demander plus de travail simplement en daignant animer les sprites en trois ou quatre images. Premier coup dans l’eau, donc.

Le vrai problème, c’est que le fiasco de cette animation expérimentale ne se limite pas à l’aspect graphique. La maniabilité du jeu est également très largement impactée par notre personnage en caoutchouc et sa prétention à suivre le moindre relief avec une précision encore jamais vue – qui se traduit malheureusement par une réalité moins enchantée, à savoir les masques de collisions les plus catastrophiques jamais vus dans un jeu en 2D.

Concrètement, le simple fait d’avancer est déjà une gageure dans le jeu : une fois sur deux, ce bon Earnest ne fait tout simplement pas ce qu’on lui demande, ou avec une lenteur qui transforme des séquences d’adresses qui eussent été une partie de plaisir dans n’importe quel autre titre en une bouillie totalement aléatoire. Souvent, bien trop souvent, on voit le personnage partir en roulade alors qu’on cherchait à sauter, ou bien se coincer dans un mur, ou bien parvenir à escalader une plateforme à force de glitchs rappelant les premières heures de la 3D sur PC ou sur PlayStation, ou bien rater avec une belle constance des actions normalement simplissimes.

On se vautre véritablement un saut sur deux, et de très nombreux adversaires vous déboulent dessus à une telle vitesse qu’ils sont purement et simplement inévitables. Afin de donner une idée de la catastrophe, un exemple typique : des crochets sont disponibles un peu partout dans le premier niveau afin que vous puissiez y accrocher votre fouet pour jouer les Simon Belmont… si vous y parvenez. Dans mon cas, le taux de réussite de la manœuvre au terme de très, très nombreux essais aura été d’environ un sur quarante-cinq. Oui, c’est mauvais à ce point-là. On espérait le Castlevania du Mega-CD, et on se retrouve avec la toute première version de Goat Simulator. Autant dire que la douche est froide.

Pour ne rien arranger, si les séquences animées qui parsèment l’aventure sont objectivement assez réussies, avec certaines animations très ambitieuses, on ne peut pas en dire autant de la réalisation du jeu en lui-même. Inutile de revenir sur l’animation, mais tous les personnages humains se réduisent à des pantins mal dessinés, et surtout les décors, en dépit de leur variété, sont souvent furieusement vides et composés de gros blocs répétés à l’envi. La musique CD relève heureusement le niveau, avec quelques thèmes entrainants mais hélas assez peu marquants, mais dans l’ensemble, on est très loin de pouvoir rivaliser avec les meilleurs jeux de la période. Dès 1989, on pouvait déjà trouver des logiciels plus beaux sur Mega Drive. Pas très emballant.

L’aspect le plus frustrant, malgré tout, c’est qu’on ne peut s’empêcher de penser que ce Earnest Evans aurait pu être un titre sympathique, à défaut d’un succès majeur, si quelqu’un s’était juste donné la peine de le tester avant de le lâcher sur le marché. L’aventure est assez longue, les niveaux s’enchainent vite, le rythme est nerveux, mais le tout est si lamentablement boiteux qu’on passe au final son temps à foncer tête baissée le plus vite possible tout simplement parce que c’est, dans 95% des cas, la meilleure façon de venir à bout des niveaux.

Quant aux combats de boss, la méthode conventionnée reste de se coller à eux en tabassant le bouton A et en priant pour avoir assez d’énergie pour survivre jusqu’à la victoire. On aimerait bien être plus subtil, sauter par dessus les projectiles ou s’accroupir sous les attaques ; mais notre archéologue, sans doute un peu crétin, met tellement de temps à comprendre ce qu’on lui demande que c’est de toute façon peine perdue. Après deux ou trois parties, la colère laisse la place à l’indifférence la plus totale, et on range le CD-ROM dans sa boîte pour ne plus l’en sortir. C’est triste à dire, mais n’est décidément pas Indiana Jones qui veut…

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 09/20 Earnest Evans espérait peut-être s'inscrire dans la lignée du plus célèbre archéologue du septième art. Malheureusement, non seulement il est resté très loin de son illustre modèle, mais il aura également dû affronter la concurrence d'un autre redoutable manieur de fouet – d'ailleurs beaucoup plus compétent que lui – nommé Belmont. Le gros problème est que toutes les idées originales ou « révolutionnaires » du jeu se révèlent être de sinistres ratages, avec notamment une animation qui prête à rire et une maniabilité qui donnerait plutôt, pour sa part, l'envie de hurler. En résulte un jeu de plateforme à peine jouable, à la réalisation ratée, où on ne comprend jamais trop ce qui se passe ni pourquoi, et où on rate régulièrement les actions les plus simples tout en réussissant, à force de bugs et d'exploits, des sauts qui semblaient impossibles. Le genre de titre auquel on peut donner sa chance avec beaucoup de patience, mais qui aurait sérieusement gagné à être testé six à huit mois de plus avant d'être lâché sur le marché. CE QUI A MAL VIEILLI : – Jouabilité catastrophique – Animation « révolutionnaire » qui confine au grotesque – Le « moteur physique » le plus raté de toute l'ère 2D – Une réalisation qui ne fait pas honneur au support

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Earnest Evans sur un écran cathodique :

Version Genesis

Développeur : Wolf Team
Éditeur : Renovation Products, Inc.
Année de sortie : Mars 1992 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En dépit de ses défauts pour le moins pénalisants, Earnest Evans aura bel et bien fini par tenter sa chance hors du Japon, mais uniquement aux États-Unis et au format cartouche. Il est assez facile d’imaginer ce que le jeu aura perdu dans l’opération : ses cinématiques et sa musique CD. La vraie question est plutôt de savoir si l’année écoulée entre la version CD-ROM et la version cartouche aura servi à peaufiner un peu un gameplay qui en avait dramatiquement besoin.

Malheureusement, le transfert se sera fait de la façon la plus paresseuse possible : en se contentant de tout couper. En-dehors de l’introduction (sérieusement rabotée pour l’occasion), n’espérez pas croiser ne fut-ce qu’un écran de texte pour vous expliquer l’intrigue : il n’y en a tout simplement plus. Il n’y a d’ailleurs plus d’autres personnages en-dehors du héros éponyme non plus : ne comptez même pas apercevoir une seule fois le visage du grand méchant ! Le titre se limite désormais à une suite de niveaux sans jamais prendre la peine de suggérer le moindre enjeu – sachant que la narration était LE seul point fort de la version Mega-CD, on grince quand même un peu des dents : on ne nous fera jamais gober que la cartouche était trop pleine pour contenir trois ou quatre illustrations.

Un malheur n’arrivant jamais seul, la maniabilité n’a pas bougé d’un pouce, et on se retrouve une nouvelle fois à retenter à cinq reprises des sauts qu’on aurait dû réussir du premier coup. L’honnêteté force à reconnaître qu’on trouve également quelques très rares changements, comme la fin du premier stage qui a la mauvaise idée de vous obliger à courir au niveau inférieur sans aucune explication ; décidément, le game design, c’était vraiment pas leur truc… Seule (relativement) bonne surprise : la musique a plutôt bien supporté la disparition du CD-ROM, et reste incontestablement l’aspect du jeu qui a le mieux vieilli. Mais ce n’est en tous cas pas ce portage qui aura contribué à redorer le blason d’Earnest Evans.

NOTE FINALE : 08,5/20

Faute de véritable adaptation, Earnest Evans format cartouche se sera contenté de sortir la paire de ciseau pour couper tous les apports du CD-ROM : adieux les cinématiques, adieu l’histoire, adieu la musique CD. La traduction n’a pas dû couter cher, et pour cause: la moindre bribe de texte a simplement été supprimée. Reste donc toutes les très nombreuses faiblesses du titre moins ses rares points forts. Un tribut qui n’en vaut clairement pas la peine.

Battle Isle

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : Blue Byte Software GmbH
Éditeur : UBI SOFT Entertainment Software
Titre alternatif : Battle Isle : Air-Land-Sea Strategy (titre complet)
Testé sur : AmigaPC (DOS)
Les extensions du jeu : Scenario Disk Volume One, Battle Isle ’93 : The Moon of Chromos
Disponible sur : Windows (7, 8, 10)
En vente sur : Gog.com (Windows)

La série Battle Isle (jusqu’à 2000) :

  1. Battle Isle (1991)
  2. Historyline : 1914-1918 (1992)
  3. Battle Isle 2 (1994)
  4. Battle Isle 3 : L’Ombre de l’Empereur (1995)
  5. Incubation : Time is Running Out (1997)
  6. Battle Isle : The Andosia War (2000)

Version Amiga

Date de sortie : Octobre 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe
Installation sur disque dur supportée
*512ko de chip RAM et 512ko de Fast RAM requis pour bénéficier de tous les effets sonores

Vidéo – L’introduction du jeu :

La stratégie est un genre qui aura toujours connu une forte affinité avec les ordinateurs domestiques. C’est, après tout, parfaitement cohérent : l’une des premières applications ludiques de l’intelligence artificielle aura été de fournir un adversaire dans des jeux de logique – à tel point que mesurer les progrès de l’avancement informatique par les performances des derniers programmes d’échecs ou de go face aux champions humains est encore une pratique courante. Mais, curieusement, si le genre partage, avec le jeu de rôle, la caractéristique d’être plus vieux que la micro-informatique elle-même, il est assez difficile de nommer des titres vraiment marquants publiés avant le début des années 90. Il faut dire que, à quelques titres façon Defender of the Crown près, le genre avait une furieuse tendance à proposer des mécanismes tellement balisés qu’on choisissait plus souvent un jeu de stratégie en fonction de la période ou des batailles traitées que pour une illusoire originalité dans son déroulement.

Battle Isle et son interface inimitable…

À ce titre, Battle Isle aura représenté une des premières initiatives pour venir dépoussiérer un peu un genre qui commençait déjà à sentir la naphtaline. Par son cadre futuriste, tout d’abord, pas encore si fréquent à une époque où la seconde guerre mondiale représentait le contexte ultra-majoritaire des titres du même genre. Mais bon, soyons honnête : le fait de combattre un adversaire quelconque sur la lointaine planète Chromos ne métamorphose visiblement pas la guerre telle qu’on la connait aujourd’hui ; on commande toujours des blindés lourds et légers, des unités anti-aériennes, des navires, des sous-marins, des avions, des hélicoptères… Bref, oubliez les lasers ou les robots géants : monde extraterrestre ou pas, on reste dans un conflit parfaitement conventionnel. Mais alors, qu’est-ce qui peut bien faire la spécificité de ce Battle Isle, au point d’en avoir fait un authentique succès critique et commercial à sa parution en 1991 ?

La collecte du minerai peut faire la différence entre une large victoire et une défaite cuisante

Le premier élément de réponse, et sans doute le plus original, apparait dès le lancement d’une des 32 niveaux du jeu (16 niveaux solos, 16 niveaux multijoueurs) : l’action est systématiquement découpée en deux fenêtres, une par joueur. Pourquoi s’échiner ainsi à sacrifier la moitié de la surface de jeu à un adversaire qui est normalement en train d’attendre son tour pour jouer ? Pour une raison très simple : Battle Isle est sans aucun doute le premier jeu de stratégie au tour par tour… en simultané.

Il est possible d’afficher des informations sur les unités, histoire d’éviter les mauvais choix

Concrètement, et contrairement à ce que proposaient tous les titres du genre à l’époque, il n’est nul besoin pour un joueur de laisser sa place à son adversaire – voire de quitter la pièce – à la fin de son tour de jeu. Le déroulement est en fait divisé en deux phases : une phase de mouvement et une phase d’action, et chaque joueur participe obligatoirement à la phase complémentaire à celle de son opposant. Exemple : le joueur un est en phase de mouvement, il ne peut donc que déplacer ses troupes. Pendant qu’il le fait, son adversaire peut ordonner à ses unités de faire feu ou à ses usines de produire de nouveaux véhicules. Une fois qu’un joueur a terminé son tour, il sollicite l’autorisation de passer à la phase suivante, qui ne débutera donc que lorsque les deux joueurs l’auront accordée. Et ainsi, le joueur un se retrouve cette fois en phase d’action, pendant que le joueur deux se retrouve à déplacer des unités… qui ne seront peut-être déjà plus là au moment d’exécuter les mouvements planifiés, au tour suivant.

À gauche, un bon exemple de rapport de force déséquilibré. Il faudra débarquer des unités en vitesse et protéger le QG coûte que coûte

Le premier aspect un peu déstabilisant du jeu est en effet cette gestion de tour simultanée, qui commande donc de donner des ordres partiellement à l’aveuglette, puisque le tank ou l’unité d’infanterie que l’on est en train de déplacer est peut-être en train de servir de cible, au même moment, à une des unités commandées par l’adversaire pendant sa phase d’action. L’anticipation est donc la clef pour éviter de mener une offensive qui s’avèrera en fait tuée dans l’œuf faute d’avoir pris en compte les dégâts causés par les actions adverses au moment où l’on donnait nos consignes. Autant dire que si cela est déroutant au début, c’est en revanche l’une des trouvailles les mieux pensées pour permettre à deux joueurs humains de s’affronter simultanément avant que des titres comme Dune II et surtout Warcraft (Dune II ne comportant pas de mode multijoueur) ne viennent résoudre définitivement le problème en popularisant le concept de la stratégie en temps réel.

Les scènes de combat et les captures de bâtiments sont les seules animations du jeu

Le titre de Blue Byte préfigure d’ailleurs, à bien des niveaux, celui de Westwood Studios. On y trouve ainsi déjà une composante gestion, avec l’existence de dépôts permettant de réparer les troupes, d’usines permettant d’en produire, et surtout de ressources de minerai réparties sur la carte (on pensera immédiatement à Full Metal Planète) qui serviront à alimenter les différents bâtiments en énergie afin qu’ils puissent produire et réparer davantage. Il existe même une unité de chantier mobile qui pourra produire de nouveaux dépôts ! Bien évidemment, ces bâtiments seront la clé de n’importe quelle partie, l’objectif final étant soit la destruction totale de l’adversaire, soit la capture de son QG par le biais d’unités d’infanterie, seules aptes à prendre possession des bâtiments adverses.

Il est également possible de changer la palette du jeu pour remplacer les affrontements rouge/jaune par une opposition vert/bleu

Si le jeu a, à ce titre, plutôt bien vieilli lorsqu’on le pratique à deux (à quelques petits errements d’interface près sur lesquels nous reviendrons plus tard), le mode solo, lui, présente quelques écueils. Le premier est d’ailleurs son étrange manque d’accessibilité : le jeu est par défaut configuré pour vous faire démarrer une partie contre un joueur humain, et le seul moyen de lancer la campagne solo est d’entrer le mot de passe du premier niveau dissimulé dans la carte de référence ! Pas très ergonomique – il aura fallu que j’aille faire des recherches sur des forums pour réussir à jouer contre l’ordinateur, ce qui n’est jamais bon signe.

L’enrobage est minimal, mais a le mérite d’exister

Le deuxième tient à l’intelligence artificielle : celle-ci, disons-le tout net, n’est pas le point fort du jeu. Ayant une fâcheuse tendance à foncer tout droit vers vos unités les plus vulnérables, elle est assez facile à manœuvrer ou à contourner, ce que les développeurs ont d’ailleurs dû réaliser assez vite puisque l’essentiel des missions solos compensent sa faiblesse en lui accordant un avantage numérique complètement délirant approchant régulièrement le deux contre un. De fait, la clef de la plupart des opérations reposera quasi-systématiquement sur votre capacité à prendre possession des différents dépôts de la carte (qui contiennent de nouvelles unités au moment de leur capture) et à organiser votre ligne de défense autour en y rapatriant les troupes nécessitant d’être réparées et en en ressortant les véhicules flambants neufs afin de vaincre votre adversaire à l’usure en dépit de ses moyens considérables. Ce qui serait déjà fastidieux si l’intelligence artificielle ne mettait pas régulièrement plus de cinq minutes, sur un Amiga 500, pour prendre ses décisions à chaque tour de jeu ! Les choses vont un peu mieux sur un Amiga 1200 mais dans tous les cas, le jeu solo est indéniablement celui qui a le plus mal vieilli.

Le nombre d’unités à contrôler est parfois colossal

On pourra d’ailleurs regretter qu’il soit aussi difficile d’anticiper les résultats d’un affrontement en dépit des nombreuses informations délivrées par le jeu. Car si chaque unité dispose de ses propres affinités (un tank anti-aérien ne fera pas long feu contre des blindés lourds), l’une des données majeures sera constituée par l’expérience que celle-ci gagnera au fil d’une mission. Réparer régulièrement une unité avant de la renvoyer au front est souvent la clef de la victoire, tout simplement parce que cela aura un effet dramatique sur ses capacités de combat. L’ennui étant que vous ne connaissez naturellement rien du niveau d’expérience des unités adverses, pas plus que vous ne pourrez anticiper leur portée de déplacement, ni même connaître leur état de santé en-dehors des animations de combat. Une bonne partie de la maîtrise du jeu passera donc par une excellente connaissance des différentes unités – ce qui placera un lourd désavantage sur les épaules d’un joueur débutant face à un adversaire expérimenté.

Terre, air et mer : Battle Isle ne néglige aucun front

Au rang des errements, citons également une interface assez déstabilisante pensée pour être jouée au joystick plutôt qu’à la souris. Par exemple, ne cherchez pas les icônes : il n’y en a pas. Pour donner des ordres à une unité, il faut placer le curseur sur elle, laisser le bouton appuyé, puis pousser le manche dans une des quatre directions pour choisir l’action à effectuer ! On regrettera aussi que le scénario ne soit qu’un prétexte, que le contexte futuriste soit totalement négligé, ou que les unités aient une fâcheuse tendance à toutes se ressembler – sans parler d’une sauvegarde assez difficile d’accès dont bien des joueurs auront ignoré jusqu’à l’existence. Autant de faiblesses qui trahissent l’âge du jeu, qui resterait à n’en pas douter un excellent titre aujourd’hui encore avec une interface modernisée et remise au goût du jour. En l’état il conservera un charme indéniable aux yeux des nostalgiques et des amateurs du genre, mais la faiblesse de l’expérience solo, la lourdeur de la prise en main et le manque d’informations délivrées par le jeu risque en revanche de pousser les joueurs contemporains à faire assez rapidement demi-tour.

Vidéo – La première mission du jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20 Derrière son aspect classique, Battle Isle cache en fait un jeu relativement original rempli de bonnes idées... dont la plupart souffrent d'un exécution maladroite. Si la difficulté du jeu en solo ne tient qu'à des affrontements affreusement déséquilibrés nécessitant de bien maîtriser les forces et les faiblesses des différentes unités, c'est clairement à deux joueurs que le titre prend son intérêt - à condition d'avoir des amis retrogamers avec beaucoup de temps devant eux. On se retrouve ainsi aux prises avec un jeu de stratégie complet, parfois frustrant, avec une ergonomie pas toujours limpide mais offrant l'essentiel de ce qu'on est en droit d'attendre d'un programme de ce type. À essayer pour les amateurs du genre, mais les joueurs moins patients préfèreront sans doute débuter avec un des autres épisodes de la série. CE QUI A MAL VIEILLI : – Prise en main contre-intuitive – Besoin de passer par la carte de référence pour trouver comment lancer le mode solo – Intelligence artificielle très limitée... – ... compensée par un rapport de force très déséquilibré... – ...et qui met parfois beaucoup trop de temps à agir – Très difficile d'anticiper les résultats d'un affrontement... – ...tout comme la portée des mouvements adverses

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Isle sur un écran cathodique :

LES EXTENSIONS DU JEU :

Battle Isle : Scenario Disk Volume One

Date de sortie : Juin 1992
Publié sur : Amiga, PC

Les nouveaux graphismes apportent un peu de variété (Amiga)

Signe du succès rencontré par Battle Isle, le titre de Blue Byte n’aura pas tardé à accueillir son lot d’extensions – ou de « data disks », comme on les appelait plus volontiers à l’époque. Le principe était généralement d’offrir davantage de contenu au jeu de base en ne modifiant pas le gameplay d’un iota, ce qui est exactement le cas ici avec pas moins de 32 nouvelles cartes : 24 pour le jeu solo, et 8 pour le multijoueur. Un choix qui pourra paraître étrange à première vue – le jeu étant nettement plus amusant à deux – mais qui est au fond parfaitement logique si l’on considère qu’une carte multijoueur offre une rejouabilité très supérieure à celle d’une carte solo, surtout contre une I.A. aussi limitée. Histoire de soigner un peu l’enrobage, on remarquera que cette extension contient surtout un nouveau type de décor, sous la forme d’un désert (la boîte du jeu montrait également des étendues de glace, ce qui ressemble fort à de la publicité mensongère car je n’en ai jamais rencontré dans le jeu). Cela ne change hélas strictement rien en termes de possibilités de jeu (le gameplay n’a pas subi l’once d’une évolution), mais cela permet de remettre un coup de peinture fraîche histoire de rajeunir un jeu dont on commence à avoir fait le tour. L’extension étant de toute façon vendue par défaut, comme toutes les autres, avec le jeu de base, la question de son acquisition ne se pose pas. Un bon moyen de prolonger l’expérience au cas où vous auriez épuisé le contenu de base.

Autant dire qu’il y a encore matière à y passer des dizaines d’heures (PC)

Battle Isle ’93 : The Moon of Chromos

Année de sortie : Mars 1993
Publié sur : Amiga, PC

Si vous vouliez un contexte plus futuriste, au moins, vous êtes servis (Amiga)

Comme son nom l’indique, la deuxième extension de Battle Isle est parue en 1993. Sans surprise, elle propose une nouvelle brouette de contenu : encore 24 niveaux solos et 8 niveaux multijoueurs. La bonne nouvelle, c’est qu’elle intègre, en plus d’un nouveau décor lunaire un tantinet grisâtre, de nouvelles unités un peu plus originales comme des robots – cela reste de l’infanterie, mais on a enfin le sentiment de voir quelque chose d’un peu neuf. La mauvaise, c’est que le gameplay n’a, une nouvelle fois, absolument pas évolué. Plus frustrant, il n’intègre même pas les modifications aperçues dans Historyline (pourtant paru l’année précédente), à commencer par des scènes de combat un peu plus visuelles. N’espérez donc pas de révolution : on rempile pour plus ou moins la même chose avec un emballage tout neuf, et si vous commencez à estimer avoir fait le tour du jeu, peu de chance que vous y passiez plus de cinq minutes. Et la version PC ne reconnait toujours aucune carte son en dehors de l’AdLib et de la Sound Blaster ! En 1993 ! C’est dommage car le paysage vidéoludique avait énormément évolué en deux ans, et pour sympathique qu’elle soit cette extension a peut-être été celle de trop.

Notez comme les couleurs des deux camps ont été inversées par rapport à la version Amiga (PC)

Version PC (DOS)

Développeur : Blue Byte Software GmbH
Éditeur : Blue Byte Software GmbH
Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.2 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : EGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster
Système de sauvegarde par mot de passe
Disque dur requis

Vidéo – L’introduction du jeu :

Parallèlement à la version Amiga, Blue Byte aura également sorti Battle Isle sur PC – ce qui, en 1991, commençait à s’imposer comme une évidence tant le PC apparaissait alors de plus en plus comme une des plateformes de jeu les plus performantes disponibles sur le marché. On sent bien, ceci dit, que le jeu s’efforce de faire légèrement mieux qu’un bête portage : les graphismes sont légèrement plus colorés (on voit bien que certaines parties de l’introduction, par exemple, ont été redessinées : observez le ciel au-dessus de la maison). Du côté de la musique, petite déception : le titre ne reconnait que l’AdLib et la Sound Blaster, soit le minimum vital de l’époque. Si cela s’entend pendant l’introduction et l’écran-titre, où la puce Paula faisait clairement mieux, on ne peut pas dire que le thème musical en jeu en souffre beaucoup. Les sensations au cours de la partie sont globalement identiques – on se sent peut-être un tout petit peu plus à l’étroit – mais le gros avantage de cette version est bien évidemment la puissance des PC actuels : fini d’attendre cinq minutes que l’I.A. prenne ses décisions ! C’est quand même un gros avantage par rapport à un jeu solo qui accumulait les écueils, et c’est à coup sûr un très bon prétexte pour acquérir cette version à la vente sans nourrir de regrets.

Graphiquement, ce n’est peut-être pas très différent, mais ça tourne beaucoup mieux !

NOTE FINALE : 14/20

Pour une fois, l’âge vénérable de Battle Isle constituera plutôt un avantage pour les joueurs sur PC : vu la puissance des processeurs actuels, autant dire que l’I.A. réfléchit beaucoup plus vite et que le confort de jeu y gagne énormément en solo. La réalisation étant à peu près équivalente à celle de la version Amiga, aucune raison de bouder cette version MS-DOS.

HeroQuest

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphic Software Limited
Testé sur : AmigaAmstrad CPCAtari STCommodore 64PC (DOS)ZX Spectrum
Version non testée : Acorn 32 bits
L’extension du jeu : Return of the Witch Lord

La saga HeroQuest (jusqu’à 2000) :

  1. HeroQuest (1991)
  2. HeroQuest II : Legacy of Sorasil (1994)

Version Amiga

Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Ah, les jeux de société… Les après-midi passés en famille, à tenter de canaliser les psychodrames parce qu’on vient de pousser papa à la faillite au Monopoly, ou à consoler petit-frère parce que mémé n’a pas accepté qu’on mette le mot « prout » sur la case « mot compte triple » au Scrabble…

Ne rigolez pas : en réfléchissant un peu, on réalise qu’il ne s’agit finalement que du pendant « grand public » des jeux de rôles sur table qu’on pratiquaient déjà et qu’on pratique encore aujourd’hui. Et tous ceux qui auront eu la chance de passer une nuit à essayer de venir à bout d’une campagne de Donjons & Dragons sauront à quel point ce genre de soirée entre amis a un cachet particulier qu’on ne retrouve pas nécessairement lorsqu’on joue à Call of Duty en ligne avec de parfaits étrangers.

Le truc, c’est qu’on n’a pas toujours des amis, une table, une pièce et une longue nuit sous la main. Et que, lorsqu’on en a, il n’est pas non plus établi qu’ils aient forcément envie de jouer à un jeu de société – surtout au XXIe siècle, où la chose est un peu passée de mode.

Le problème était d’ailleurs déjà posé au siècle dernier, où il n’était pas rare de posséder un placard rempli de Mad, de Destins ou de Jeu des mille bornes destinés à y prendre la poussière faute de joueurs, ces derniers leur préférant souvent, les ingrats, les jeux vidéo. Quel meilleur retour d’ascenseur, dès lors, que d’imaginer des jeux vidéo permettant de redécouvrir les jeux de société sans avoir nécessairement besoin de mobiliser la famille ou un groupe d’amis ? Tous les plus grands succès auront eu droit à leurs (multiples) adaptations au fil des ans, et parmi eux, un certain… HeroQuest.

En quoi consiste fondamentalement le jeu imaginé par Stephen Baker et distribué chez nous par MB et Games Workshop ? Eh bien, à une sorte de « jeu de rôles light » : un plateau, des figurines, des dés, des cartes, et un maitre de jeu disposant les éléments et donnant les objectifs à un groupe composé de un à quatre joueurs.

Pas de grands débats quant à la façon d’ouvrir une porte, pas d’extérieurs, pas de personnages à qui parler : on est toujours dans un donjon avec les mêmes types de monstres, il n’y a ni caractéristiques ni points d’expérience, et les seules possibilités en-dehors des combats et de l’exploration se limitent à fouiller les différentes pièces à la recherche de trésors, de pièges ou de passages secrets. Autant dire les bases. La première édition du jeu proposait 14 quêtes, la réédition de 1994 sera venue en rajouter 13 et modifier légèrement les règles, et quatre des extensions officielles seront arrivées jusqu’en France histoire de venir étoffer encore un peu le contenu.

En l’absence de réelle progression de personnage (il n’y a, comme on l’a vu, ni expérience ni niveaux), chacun des quatre héros jouables présente des capacités légèrement différentes. Ainsi, le barbare ou le nain auront davantage de points de vie et pourront jeter plus de dés lors des phases de défense et d’attaque que l’elfe ou le magicien qui auront, en contrepartie, accès à des sorts très efficaces. Le but de chaque quête est toujours d’accomplir un objectif assez basique (trouver quelque chose ou tuer quelqu’un) avant de parvenir à quitter le donjon en vie.

Les richesses amassées à l’intérieur pourront alors être échangées contre de l’équipement qui apportera divers bonus à vos lancers d’attaque et de défense – et c’est bien cet équipement qui fera office de progression de personnage puisqu’il sera possible de le conserver d’une mission à l’autre. En revanche, à la mort d’un héros, celui-ci perd toute ses possessions et devra repartir les mains vides, exactement comme s’il fallait recréer un personnage de niveau un. Comme on peut s’en douter, la grande force de ce concept est son accessibilité : n’importe peut comprendre comment jouer en une poignée de minutes. Sa grande limite est, en contrepartie, son côté balisé : le maitre de donjon ne sert pas à grand chose de plus qu’à placer les différents éléments sur le plateau, et le déroulement d’une partie ne repose que sur des lancers de dés et des tirages de carte.

Que propose au juste l’adaptation réalisée par 221B Software Development ? Eh bien, très exactement la même chose que la boîte de jeu de base, au micron près. Aucune originalité, aucune prise de risque, aucune alternative : le programme se contente finalement de prendre la place du maître de donjon, et à vous les joies de pratiquer devant votre Amiga ce que vous faisiez autour de la table du salon, seul ou à plusieurs. Bien évidemment, le plateau a été remplacé par une représentation graphique assez fidèle, pratiquement sans aucune animation hors des combats : même les sortilèges se contente d’afficher une description textuelle. Les lancers de dés sont automatiques, et les différentes actions sont accessibles via quelques icônes en bas de l’écran. La réalisation est honnête sans être ébouriffante, et la musique d’ambiance qui tend à répéter les mêmes boucles sonores ad nauseam tape vite sur les nerfs, mais on obtient ce qu’on était venu chercher : le jeu de société, en version « je peux y jouer même quand je n’ai pas d’amis ».

La grande faiblesse de ce type de concept, c’est précisément qu’un jeu de plateau comme HeroQuest constitue, avant toute chose, un très bon prétexte pour passer du temps en famille ou entre copains – l’occasion de s’engueuler un coup, de faire preuve de mauvaise foi, de se chambrer et de rigoler un peu. Le pratiquer à plusieurs face à un écran n’a pas grand sens, chacun participant à un jeu de chaises musicales pour aller prendre le clavier et la souris le temps d’agir toutes les cinq secondes. Et le pratiquer seul ne fournit que la portion la plus extraordinairement limitée de l’expérience, sur un système où les bons jeux de rôles, beaucoup plus complets, ne manquent pas.

On s’agacera d’ailleurs souvent du fait que le programme ne propose strictement rien pour aider à accélérer les passages fastidieux d’une partie. Vous avez accompli votre mission au fond du donjon ? À vous le plaisir, à présent, de passer les dix prochaines minutes à lancer un dé à chaque tour et à vous déplacer de quelques cases jusqu’à avoir atteint la sortie. Intérêt : néant. Sachant que le programme n’offre finalement rien de plus à voir que ce que contenait le jeu de plateau – en moins beau et en moins tangible – en-dehors d’une vague cinématique d’introduction, on ne met guère plus de quelques dizaines de minutes à faire le tour de l’expérience. Et puisque le fait d’offrir une représentation graphique beaucoup plus variée que ce que permettait le plateau original ou bien des règles alternatives auraient été les deux seuls intérêts potentiels d’une version informatique, on réalise rapidement que le choix de la fidélité fanatique fait par l’équipe de développement est une fausse bonne idée.

Dès lors, on s’amuse une heure ou deux, en fonction de notre patience, avant de passer à autre chose – au hasard, une vraie soirée avec de vrais amis. Précisons enfin que la version française présente en jeu se contente de traduire les menus et les actions, et laisse les briefings en anglais… Une raison supplémentaire, si vous êtes allergique à la langue de Shakespeare, pour préférer investir dans le jeu de société – intégralement traduit, lui – à la place.

Vidéo – La première quête du jeu :

NOTE FINALE : 12,5/20 Dans la catégorie des adaptations de jeux de plateau, HeroQuest aura fait le choix d'une fidélité à toute épreuve : on retrouve tout le contenu et les possibilités du titre publié par Games Workshop et MB, ni plus, ni moins. Le joueur sachant exactement ce qu'il est venu chercher ne devrait donc pas être déçu par cette expérience de « jeu de rôles light », même s'il aurait également pu espérer un peu plus d'ambition du côté de la réalisation. Les autres, en revanche, devront être prêts à découvrir un concept limité reposant quasi-exclusivement sur des lancers de dés ou des tirages de carte, s'avérant rapidement répétitif et n'offrant que peu d'attrait à plusieurs. Une alternative correcte au jeu de plateau lorsqu'on n'a pas d'amis sous la main, au risque d'y perdre beaucoup en magie et en convivialité. CE QUI A MAL VIEILLI : – Musique qui tape vite sur les nerfs – Gameplay reposant principalement sur des jets de dés – Déroulement laborieux, particulièrement à quatre joueurs – Strictement aucun ajout par rapport au jeu de plateau – Réalisation correcte, sans plus – Pas assez de missions

Bonus – Ce à quoi peut ressembler HeroQuest sur un écran cathodique :

HeroQuest : Return of the Witch Lord

Date de sortie : Octobre 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Testé sur : Amiga, Amstrad CPC, Atari ST, Commodore 64, PC, ZX Spectrum

Tout comme le jeu de société original, la version informatique de HeroQuest projetait de commercialiser des extensions… il n’y en eut finalement qu’une seule, parue la même année, et dont le contenu correspondait très exactement à celui de la version « plateau » commercialisée l’année précédente : une dizaine de nouvelles quêtes plus difficiles que celles du jeu de base histoire de rentabiliser un peu votre groupe d’aventuriers suréquipés. Comment cela se traduit-il une fois en jeu ? Eh bien de manière très simple : un nouveau décor (on est toujours dans un donjon mais les murs ont changé d’apparence), quelques nouveaux monstres, les dix nouvelles quêtes… et c’est tout. Seule nuance : au moins, cette fois, les briefings ont bien été traduits en français. Encore une fois, ça reste vraiment le minimum syndical, et on peut comprendre que les joueurs ayant accroché au concept aient fini par préférer aller investir directement dans le jeu de plateau plutôt que dans ce genre de conversion minimaliste. Les amateurs, de leur côté, devraient trouver une nouvelle fois exactement ce qu’ils sont venus chercher : la même chose, avec un peu plus de contenu. Mais alors vraiment très peu. À noter que sur PC, l’extension ne sera jamais sortie sous cette forme : elle aura uniquement été vendue dans une version intégrant également le jeu de base.

NOTE FINALE : 13/20

Soyons clairs : pour ceux à qui elle s’adresse (c’est à dire les joueurs déjà parfaitement satisfaits de l’expérience offerte par le jeu de base), cette extension fait le travail en apportant ce qu’on attendait d’elle : du contenu. Dix nouvelles quêtes mettant en jeu un décor inédit et quelques nouveaux monstres – mais absolument aucun nouveau mécanisme –, voilà de quoi rempiler joyeusement. Les joueurs espérant des nouveautés autres que cosmétiques, eux, seront moins enthousiastes.

Version Amstrad CPC

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 *– RAM : 64ko*
*6128 Plus requis pour la version disquette

En 1991, le CPC n’était pas exactement au sommet de sa forme, et les rares développeurs à daigner encore développer sur la machine d’Amstrad avaient une furieuse tendance à ne le faire qu’à cause des similitudes que partageait le système avec le ZX Spectrum. On pouvait donc craindre un simple portage de la version parue sur la machine de Sinclair… C’est pire. Incroyable mais vrai, il y a MOINS de couleurs sur la version CPC que sur la version ZX Spectrum ! D’ailleurs, écrire « couleurs » au pluriel est sans doute un abus de langage, il serait plus honnête de parler de « dégradé »… À vous la joie, donc, d’un titre se déroulant intégralement en nuances de bleu (allez, il y a aussi un peu de gris). Il n’y a évidemment plus d’introduction. Bon, heureusement, la musique, elle, est très correcte, et tout le contenu du jeu de plateau est toujours là. Reste que le principal intérêt du jeu étant précisément sa représentation graphique, on réservera ce jeu à ceux n’ayant vraiment AUCUN ami et étant resté coincés sur la machine d’Amstrad. Sinon, autant acheter le jeu de plateau.

NOTE FINALE : 08/20

À une époque où on pouvait concevoir que vous n’ayez rien d’autre sous la main qu’un CPC pour jouer, on pouvait éventuellement comprendre qu’un joueur particulièrement misanthrope investisse dans cette version de HeroQuest. À l’heure actuelle, sauf crise de nostalgie ou curiosité scientifique, autant être clair: c’est absolument sans intérêt.

Version Atari ST

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’introduction du jeu :

On sait généralement à quoi s’attendre avec la version Atari ST d’un jeu développé sur Amiga : sensiblement la même chose, avec une qualité sonore inférieure. C’est très exactement ce qu’on obtient ici, au détail près que la résolution est ici un peu plus basse que sur Amiga (320×200 au lieu de 320×256) et que la musique est cette fois très supérieure aux modestes « bip-bip » auxquels la machine d’Atari nous a trop souvent habitués. Je vous laisse vous faire votre idée en écoutant l’introduction : c’est le même thème, mais c’est assez différent dans les sonorités – on peut même aller jusqu’à trouver cette musique supérieure à celle de la version Amiga. Cette légère nuance mise à part, les deux versions sont strictement identiques.

NOTE FINALE : 12,5/20

Comme souvent, la version Atari ST de HeroQuest livre une prestation sensiblement identique à celle observée sur Amiga. La résolution est un peu plus basse et la musique est légèrement différente, mais pas vraiment de quoi vous bouleverser.

Version Commodore 64

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Allemand, anglais, italien
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Au rang des machines en bout de course en 1991, l’autre ordinateur de Commodore ne savait pas encore qu’il allait disparaître en même temps que son cadet. Il représentait en tous cas encore un marché viable, en témoigne ce portage qui propose à peu près ce qu’on était en droit d’attendre : l’essentiel. Parmi les pertes : plus d’introduction, plus de version française (enfin, si on pouvait appeler ça une VF), et la musique ne se fait plus entendre que pendant le menu. Pour le reste, tout le contenu est là, même si les textes vont désormais à l’essentiel, et la réalisation offrant difficilement plus de quatre couleurs ne choque pas plus que ça – contrairement à ce qu’on avait pu voir sur CPC.

NOTE FINALE : 10/20

Difficile de trouver beaucoup de reproches à faire à HeroQuest sur Commodore 64 – mais difficile également de hurler au génie pour un titre qui montrait déjà vite ses limites sur les ordinateurs 16 bits. L’essentiel est là, pas grand chose d’autre, et on est en droit de se demander qui ira s’essayer aujourd’hui à cette version.

Version PC (DOS)

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Tandy/PCjr

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Aaaaah, le PC. Au moins, en 1991, les choses commençaient à être claires : un développeur proposant un portage PC n’étant pas à la hauteur des versions Atari ST ou Amiga n’avait plus d’autres excuses à invoquer que l’incompétence ou la fainéantise. Le VGA était déjà bien implanté, les cartes sonores commençaient à se démocratiser : on était en droit de se montrer optimiste. Et au final… on obtient à peu près ce qu’on était en droit d’attendre. Niveau sonore, c’est un peu décevant : le jeu intègre un programme de configuration extrêmement basique et ne reconnaît pas grand chose au-delà de l’AdLib et de la Roland MT-32. Dans les deux cas, c’est très honnête tout en restant un peu moins bon que ce qu’on pouvait entendre sur Amiga et Atari ST (comme toujours, cela reste une question de goûts : je n’irai pas me battre en duel contre quelqu’un qui me soutient que la version MT-32 est meilleure que ce qu’on entend sur ST). On notera en revanche qu’avec une Roland MT-32, il faudra tirer un trait définitif sur les bruitages. Graphiquement, le jeu a été redessiné : ce n’est pas extraordinairement plus beau, mais c’est indéniablement plus coloré, et c’est surtout beaucoup plus lisible. Tout juste pestera-t-on contre ces personnages un peu… courts sur pattes. En revanche, le jeu n’intègre pas NON PLUS de limitateur de vitesse : mieux vaut laisser les réglages en « auto » sous DOSBox. Le contenu, pour sa part, n’a pas bougé.

On ne va pas crier à la révolution, mais c’est quand même plus coloré

NOTE FINALE : 12,5/20

HeroQuest sur PC a au moins le bon goût de tirer un minimum avantage de la palette de couleurs du VGA. Ce n’est pas magnifique, mais c’est plus lisible et plus travaillé que sur Amiga et Atari ST. La musique, comme souvent, est un peu décevante (hors Roland MT-32), mais décider si cette version est supérieure ou inférieure aux autres itérations 16 bits demeurera principalement une question de goût.

Version ZX Spectrum

Développeur : 221B Software Development
Éditeur : Gremlin Graphics Software Limited
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette
Contrôleurs : Clavier, joystick Kempston
Version testée : Version disquette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Dernier exemple de machine en fin de vie en 1991 : Sinclair avait été vendu à Amstrad en 1986, et le ZX Spectrum poursuivait son petit bonhomme de chemin jusqu’à sa fin de production en 1992 (décidément une très mauvaise année pour la concurrence du PC). Encore une fois, l’idée était surtout de tirer les derniers revenus d’un marché sur le déclin, on ne sera donc pas surpris de composer avec un portage qui ne transcende pas exactement les capacités du ZX Spectrum. Ce qui ne l’empêche pas d’être assez honnête, au demeurant, et même plutôt supérieur à la version CPC – on a même droit à la musique pendant la partie. Seul véritable regret : l’essentiel des couleurs reste cantonné à l’interface, et il faudra donc se contenter d’une fenêtre de jeu monochrome, mais ça reste moins énervant que le pâté bleuâtre de la version Amstrad. Et en termes de contenu, au moins, tout est toujours là.

NOTE FINALE : 09/20

HeroQuest délivre sur ZX Spectrum à peu près l’expérience qu’on était en droit d’attendre – sauf pour ce qui est de la couleur, qui aurait pu s’étendre à la fenêtre de jeu au lieu de se cantonner à l’interface. Comme souvent, on se demande qui ira s’essayer à cette version aujourd’hui, mais on notera qu’elle reste plutôt supérieure à celle parue sur CPC.

The Lucky Dime Caper starring Donald Duck

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titre original : ドナルドダックのラッキーダイム (Donald Duck no Lucky Dime)
Titre alternatif : The Lucky Dime Caper estrelando Pato Donald (Brésil)
Testé sur : Master SystemGame Gear

Version Master System

Date de sortie : Décembre 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, traduction française par Génération IX
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

S’il fallait trouver des mérites à SEGA, il reviendrait d’évoquer à un moment ou à un autre le soutien indéfectible que la compagnie japonaise aura continué d’apporter à la Master System à un moment où elle avait pourtant tout à gagner à concentrer tous ses efforts sur une Mega Drive qui se portait beaucoup mieux. Si la vaillante 8 bits aura certes connu une deuxième jeunesse sur la marché brésilien, qui l’aura entraîné à survivre envers et contre tout jusqu’au début du XXIe siècle, le moins qu’on puisse dire est que la maison mère avait alors d’autres chats bien plus pressants à fouetter.

Pourtant, loin d’abandonner sa fille ainée qui n’avait jamais ne fut-ce qu’effleuré le succès rencontré par la NES concurrente, la firme au hérisson aura tenu à offrir (enfin, à vendre, mais vous m’aurez compris) le plus longtemps possible de véritables preuves d’amour à ses acheteurs. Il est ainsi particulièrement révélateur qu’une série aussi iconique du succès de la Mega Drive que celle des Illusion soit composée pour moitié d’exclusivités Master System et Game Gear ! De la même manière, au moment où Donald Duck débarquait en force sur la 16 bits pour s’y faire un nom avec QuackShot, il n’oubliait pas de faire simultanément une apparition sur les 8 bits avec The Lucky Dime Caper. Voilà ce qu’on appelle savoir mettre les formes.

L’histoire en vaut bien une autre : un jour, Picsou offre à Riri, Fifi et Loulou un sou – ce qui peut sembler aussi pingre que l’est le célèbre canard, mais vise surtout à leur porter chance et à représenter la première pierre de leur future fortune de la même façon que l’a fait son fameux sou fétiche (« lucky dime », en anglais). Mais voilà que Miss Tick, réalisant probablement que c’est un peu léger pour faire un jeu vidéo, décide d’enlever les trois neveux avec leur modeste présent, et surtout le « vrai » sou fétiche avec.

Picsou, s’avisant alors qu’il lui reste encore une aventure de Duck Tales à tirer sur NES avant la fin de son contrat, promet donc une récompense à Donald histoire de le motiver à faire le boulot à sa place en allant sauver les neveux et en ramenant, vous l’aurez compris, le sou fétiche du titre. Vous allez donc guider Donald à travers pas moins de sept niveaux histoire de montrer que Mickey, Picsou et Tic & Tac ne sont pas les seuls employés de chez Disney à mériter leur salaire.

Contrairement à son aventure dans QuackShot, notre canard ne pourra cette fois pas compter sur un pistolet à ventouse : sa meilleure arme sera, comme pour son comparse Mickey, de sauter sur la tête de ses adversaires. Il se verra également fournir un maillet, à la portée hélas très limitée, qui pourra se voir remplacer par un frisbee en trouvant le bonus correspondant. Que notre canard se fasse toucher une fois et il perdra son arme, une deuxième et il perdra la vie, ce qui permettra au passage de remarquer l’absence à l’écran de toute forme de jauge de santé pour nous indiquer l’état de forme de notre héros. Il en existe en revanche une, en bas à gauche, pour figurer la limite de temps qui ne devrait franchement pas vous poser de problèmes.

Le déroulement du jeu est extrêmement conventionnel : on commence par choisir son niveau (d’abord pour aller récupérer les neveux, puis pour récupérer leurs pièces, avec un niveau final pour le sou fétiche) et on se lance à l’aventure. On enchaine alors séquences de plateforme, brèves scènes sous-marines, et quelques rares phases plus originales comme celles où l’on dévale une pente dans le niveau sud-américain.

Chaque niveau se conclut par un boss généralement pas bien compliqué – le jeu n’est de toute façon pas trop difficile, ni même très long (comptez une demi-heure pour un joueur confirmé), et vous arrose d’un copieux nombre de vies au fil de l’aventure. La principale difficulté vient surtout du placement des checkpoints (tout le premier niveau sera à refaire si vous échouez contre le boss) et des errements de la jouabilité sur lesquels nous reviendrons un peu plus tard, sans compter un côté die-and-retry qui tranche un peu avec la relative facilité du jeu et qui vous obligera à passer l’arme à gauche face à certains pièges faute d’avoir pu deviner leur existence lors de votre premier passage. Rien de très original en-dehors de cela ? C’est effectivement la première réflexion que l’on risque de se faire, tant le titre semble remplir parfaitement son office de jeu de plateforme, mais en échouant à trouver cet ingrédient qui lui confèrerait de la personnalité.

Le level design est globalement assez décevant, les premiers niveaux sont trop courts, certaines séquences s’étirent au contraire sans qu’on trouve matière à s’en réjouir – à commencer par ces insupportables phases de labyrinthe, méthode bon marché pour rallonger la durée de vie du jeu en nous imposant de repasser par les mêmes salles faute d’avoir choisi la bonne porte. Les environnements n’étant pas particulièrement originaux ni franchement variés, les pyramides égyptiennes succèdent aux pyramides aztèques et aux temples des îles tropicales, et on se surprend à penser au final que Donald aurait facilement pu être remplacé par Mickey sans qu’on y perde au change – la souris, elle, ayant au moins dans ses itérations 8 bits la possibilités de lancer des blocs et de parcourir des niveaux plus intéressants ou plus ouverts.

Car entre la linéarité galopante de l’aventure (choisir l’ordre des niveaux n’y change pas grand chose) et une maniabilité souvent handicapée par la lourdeur du personnage qui nous amène à rater misérablement des sauts pourtant très simples, il faut bien reconnaître que The Lucky Dime Caper trouve sur sa route une concurrente de taille avec la série des Illusion qui lui est supérieure en tous points.

Certes, la réalisation du titre figure indéniablement dans le haut du panier de la Master System, avec notamment ces graphismes très colorés parfaitement en adéquation avec l’univers Disney, mais le maniement du personnage ne suit pas, Donald ayant par exemple une tendance insupportable à ne pas sauter au moment précis où on lui demande de le faire. Il m’est même arrivé de traverser le sol et de mourir de manière totalement inexplicable – à tel point qu’enregistrer la vidéo du premier niveau, pourtant très court, m’aura demandé pas moins d’une dizaine de tentatives ! On pourrait se dire qu’il s’agit là d’une simple période d’acclimatation, mais la vérité est que le jeu lui-même, en-dehors de ce problème de maniabilité, peine à se montrer mémorable faute de prise de risque – et finit même par se montrer vaguement redondant, le château de Miss Tick évoquant par exemple furieusement celui de Mizrabel dans Castle of Illusion. Un reproche qu’on pourra hélas étendre à une grande partie des niveaux du jeu, qui peinent à trouver une identité marquée.

En quelques mots, si l’on parcourt l’aventure avec un certain plaisir, à défaut d’un plaisir certain, le jeu échoue très largement à représenter vis-à-vis de Quackshot l’alternative que Land of Illusion sur Master System représenterait vis-à-vis de World of Illusion sur Mega Drive l’année suivante (vous suivez ?). Là où la souris mettrait dans le mille à tant de niveaux dans son itération 8 bits qu’elle en viendrait à refiler des complexes à sa version 16 bits, Donald, lui, apparait plutôt comme à court d’idées dans un jeu qui, malgré ses qualités, ne réussit tout simplement jamais à surprendre.

Pas nécessairement de quoi le bouder pour autant, surtout si vous savez ce que vous êtes venu chercher ; mais pour ceux qui chercherait LE jeu de plateforme avec un truc en plus pour leur remettre des étoiles dans les yeux, ce n’est peut-être pas le bon logiciel avec lequel commencer. Hé, parfois, même avec les héros Disney, il faut accepter l’idée de composer avec un bon petit jeu plutôt qu’avec un titre de légende. Ce n’est déjà pas si mal.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 15/20 Sans être un mauvais jeu – il en est même loin – The Lucky Dime Caper starring Donald Duck est un assez bon exemple de ces titres auxquels il manque clairement une idée originale pour s'extraire de la masse. Une certaine platitude dans le level design associée à une jouabilité loin d'être irréprochable forment une aventure pas forcément désagréable mais qui peine sérieusement à laisser un souvenir durable ; en un mot : un logiciel très honnête mais qui échoue clairement à se hisser au niveau des autres jeux Disney sur le support, à commencer par l'excellent Land of Illusion. Reste une aventure qui se montre sympathique par séquences, désespérément banale le reste du temps ; un avatar de ces titres qui nous font parfois penser, aujourd'hui, qu'on est simplement devenu un peu trop vieux pour s'amuser en jouant à ça. CE QUI A MAL VIEILLI : – Maniabilité parfois très frustrante – Le défilement qui ne reste pas toujours centré sur Donald – Des aspects die-and-retry qui coutent des vies sans qu'on ait grand chose à se reprocher – Des niveaux dont le déroulement peine très largement à surprendre

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Lucky Dime Caper sur un écran cathodique :

Version Game Gear

Développeur : SEGA Enterprises Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Octobre 1991 (États-Unis) – 20 décembre 1991 (Japon) – Février 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Comme c’était la coutume avec les jeux parus sur la Master System, The Lucky Dime Caper aura également fait le voyage jusque sur Game Gear (NdRA : Selon toute logique, le jeu a même été développé sur Game Gear et porté ensuite sur Master System). La principale crainte est de se retrouver devant un bête copier-coller du jeu, qui souffrirait plutôt mal de devoir proposer les mêmes embuches sur une fenêtre de jeu bien plus petite. Bonne nouvelle : on remarque dès l’introduction, visible ci-dessus, que le titre a de toute évidence fait l’objet de plusieurs adaptations. La cinématique de lancement est donc ici résumée en deux illustrations très réussies, avec des textes pour vous résumer l’enjeu.

Une fois la partie lancée, en-dehors d’une carte redessinée mais toujours aussi schématique, on remarque surtout que les niveaux ont été entièrement re-conçus pour proposer un défi plus adapté à la taille de l’écran. Si cela n’est pas toujours idéal (il arrive qu’on se fasse surprendre par un monstre qu’on ne pouvait pas voir arriver), le jeu compense en se montrant assez généreux vis-à-vis des bonus dans cette version. Un équilibrage un peu forcé, mais qui fonctionne au final plutôt bien tant la maniabilité m’a moins gêné dans ce portage que dans la version Master System. Bref, une conversion qui n’a pas été pensée avec les pieds, ce qui fait indéniablement plaisir.

NOTE FINALE : 15,5/20

Loin d’offrir un ersatz de la version Master Sytem en mode timbre-poste, The Lucky Dime Caper sur Game Gear à l’excellente idée de procéder aux modifications nécessaires pour rendre le titre parfaitement jouable malgré la taille de l’écran, quitte à redessiner l’essentiel des niveaux et à rendre l’expérience sensiblement plus abordable. C’est si bien fait qu’en dépit de quelques petits ratés, le jeu est plutôt plus agréable à parcourir sur la petite portable que sur la console de salon. Une très bonne conversion.