Aces of the Pacific

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Dynamix, Inc.
Testé sur : PC (DOS)
Présent au sein des compilations :

  • Aces : The Complete Collector’s Edition (1995 – PC (DOS, Windows 3.x))
  • Classic Power Compilation (1995 – PC (DOS))
  • Aces : Collection Series (1997 – PC (DOS, Windows 3.x, Windows 9x))

L’extension du jeu : Aces of the Pacific – Expansion Disk : WWII: 1946

La série des Great War Planes (jusqu’à 2000) :

  1. A-10 Tank Killer (1989)
  2. Red Baron (1990)
  3. Aces of the Pacific (1992)
  4. Aces Over Europe (1993)
  5. Silent Thunder : A-10 Tank Killer II (1996)

Version PC (DOS)

Date de sortie : 10 septembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ (x4) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris, Thrustmaster
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel i386 SX – RAM : 2Mo
Modes graphiques supportés : VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, PS/1 Audio Card, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr, Thunderboard

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au début des années 90, mine de rien, Dynamix était en train de se faire un nom au milieu d’un secteur où il n’était pas si facile de s’en faire un : celui des simulateurs de vol. Une prouesse n’étant sans doute pas sans rapport avec une certaine obsession de l’un des cofondateurs du studio, Damon Slye, pour la 3D – n’avait-il d’ailleurs pas débuté sa carrière par un clone de Battlezone sur Apple II ?

Obsession poursuivie avec des Skyfox ou des Arcticfox, mais un tournant « simulation historique » assumé avait commencé à être observé avec A-10 Tank Killer, pour des résultats prometteurs… hélas quelque peu éclipsés, en dépit de retours critiques positifs, par la concurrence du très efficace LHX : Attack Chopper. À peine un an plus tard, cependant, c’était bel et bien Red Baron qui semblait ressortir vainqueur de la brève mais violente bataille des simulateurs de vol se déroulant pendant la première guerre mondiale, et face à des concurrents loin d’être anecdotiques, MicroProse en tête. Dès lors, face à un public de plus en plus réceptif à la production du studio et quitte à afficher son ambition, pourquoi ne pas aborder à présent la thématique de la seconde guerre mondiale en allant attaquer frontalement la principale référence en la matière, à savoir la trilogie de Lawrence Holland initiée en 1988 avec Battlehawks 1942 et achevée en 1991 avec Secret Weapons of the Luftwaffe ? C’était le cahier des charges assumé d’Aces of the Pacific, et bien que le jeu s’inscrive dans la droite continuité de ses prédécesseurs, on le sent rapidement prêt à prendre quelques risques – la question étant de savoir si ceux-ci sont les bons.

À première vue, en tous cas, on est en terrain plus que connu dès le menu principal : de l’interface aux options disponibles (missions historiques, missions « génériques », carrière, présentation visuelle des différentes unités), on a l’impression de retrouver exactement le menu de Red Baron, ce qui, en soit, est déjà plutôt positif. Néanmoins, dès qu’on commence à creuset un peu plus profondément le contenu, on a de quoi être assez impressionné par ce qui est offert : non seulement les deux camps sont jouables, mais il est même possible de rejoindre plusieurs corps d’armée (U.S. Navy, Marines ou U.S. Air Force pour les américains par exemple) – cinq au total en comptant les deux nations –, ce qui a un impact sur les appareils disponibles ainsi que sur le type et la répartition des missions.

Ajoutez-y une dizaine de campagnes, plus d’une trentaine d’avions différents à piloter, et vous commencerez à comprendre qu’il va y avoir beaucoup de choses à faire dans le jeu – d’autant que vos talents de pilote ne se réduiront cette fois pas nécessairement à des chasseurs : appareils multi-rôles et bombardiers sont également au menu, ce qui signifient que le programme ne se limitera pas, cette fois, à des dogfights. Raser des dépôts de carburant adverses ou couler des destroyers et des porte-avions est désormais une possibilité, et on ne va pas s’en plaindre. Et pour ne rien gâcher, toutes les options de configuration permettant de régler le degré de réalisme et la difficulté des combats sont toujours à l’ordre du jour – de quoi se faire une expérience à la carte allant de l’avion invincible aux munitions illimitées face à des pilotes débutants jusqu’à des missions nettement plus exigeantes où la moindre rafale tirée aura un prix et où la plus infime balle reçue pourra signifier votre mort ou l’explosion de votre moteur. De quoi convenir à tout le monde – ce qui constituera toujours à mes yeux la meilleure approche.

Une fois en vol, cependant, on sent néanmoins que le seuil d’exigence du pilotage a monté d’un cran quelle que soit la difficulté. Oh, Aces of the Pacific n’est certes pas devenu une simulation hyper-poussée à la F-19 Stealth Fighter, et il est toujours possible d’y jouer en n’utilisant qu’une poignée de touches du clavier – contexte historique oblige, comme on s’en doute, il ne sera jamais question ici de verrouiller un missile ou de s’inquiéter de la signature électromagnétique d’un appareil qui demande toujours largement de se repérer « à vue » plutôt qu’en s’aidant des instruments.

Néanmoins, entre la gestion des volets – dont la position pourra changer bien des choses à la manœuvrabilité de votre avion pendant les dogfights –, la possibilité de lâcher des réservoirs additionnels, la gestion du train d’atterrissage ou de divers types de freins, sans oublier la possibilité de communiquer par radio afin de signaler la position des ennemis ou de donner des consignes à vos coéquipiers, on sent rapidement que l’accessibilité est ici moindre et qu’il faudra sans doute plusieurs dizaines de minutes, voire une heure ou deux de pratique, pour réellement commencer à prendre ses marques. Sentiment renforcé par le fait que les combats ont tendance à être plus difficiles que dans Red Baron, même dans le mode le plus aisé, et que se retrouver avec un ennemi dans ses six heures – ou même dans ses douze, car les bougres sont précis et vous ratent rarement quand ils vous foncent dessus – tend à se payer très rapidement au prix fort. En y ajoutant des phases de décollage depuis une île ou un porte-avion et d’éventuels atterrissages (les missions peuvent se terminer automatiquement en cas de réussite, mais vous voudrez peut-être parfois faire demi-tour ou vous poser en catastrophe pour tenter de sauver votre peau dans une situation mal embarquée), on est en tous cas face à un pilotage qui mérite de plus en plus l’appellation « simulation ».

Avec une 3D relativement solide où il y a certes toujours très peu de détails au sol mais qui reste indéniablement dans le haut du panier de la période (le jeu nécessitait une configuration extrêmement musclée pour 1992, ce qui ne l’aura pas empêché de s’écouler à plus de 350.000 exemplaires – signe que Dynamix aura au final parfaitement réussi son pari), on commence à s’approcher de ce qu’on pouvait attendre de mieux. Il est d’autant plus dommage que certains détails irritants viennent ternir le tableau, le plus horripilant étant sans doute le manque absolu de précision des bombardements maritimes.

Je veux bien croire que je ne sois pas doué, mais quand je fais l’attaque de Pearl Harbor avec les munitions illimitées et que j’échoue à faire ne fut-ce qu’une égratignure aux navires présents après avoir lâché des CENTAINES de torpilles sous tous les angles, je pense quand même qu’il y a un léger souci. L’occasion d’ailleurs, de constater la passivité de vos coéquipiers, qui daignent s’impliquer dans les dogfights mais vous laissent assurer absolument tout le boulot dès lors qu’il y a une bombe à larguer. C’est particulièrement énervant, surtout quand on ne peut pas se permettre de gâcher une seule munition pour atteindre les objectifs, et cela amène à largement préférer les missions « classiques » consistant à dessouder les chasseurs adverses à celles qui devaient venir apporter un peu de variété. Dommage.

Dans l’ensemble, même si la courbe de progression est un peu plus délicate à aborder que celle de ses prédécesseurs, Aces of the Pacific vise néanmoins juste à de très nombreux niveaux – la solidité de ses dogfights, la marge de customisation de l’expérience et la richesse du contenu n’étant pas les moindres. Cela reste, aujourd’hui encore, un titre que l’on peut découvrir et pratiquer avec beaucoup de plaisir même et surtout en ne s’étant jamais senti une appétence particulière pour les simulateurs de vol un peu trop complexes et un peu trop exigeants.

Oui, on peut facilement se faire cueillir à froid lors des premières escarmouches – particulièrement si on n’a pas eu le réflexe d’aller toucher aux options de réalisme – mais une fois ses marques prises, c’est toujours un réel plaisir de retourner tenter sa chance avec l’un des deux camps. Un plaisir qui a d’autant mieux vieilli que le marché du simulateur « hybride » est devenu particulièrement marginal aujourd’hui, et qui risque de convenir aux néophytes souhaitant aborder une approche plus réaliste que celles de série à la Ace Combat sans pour autant consacrer des heures à comprendre comment réussir à démarrer le moteur de son avion. Un très bon moyen de prolonger le plaisir pour ceux qui auraient déjà découvert la trilogie de Lawrence Holland mentionnée plus haut, et une porte d’entrée pas trop intimidante pour ceux qui accepteront de tâtonner un peu avant de se sentir à l’aise. Dans tous les cas, un simulateur qui vaut le détour.

Vidéo – Carrière (US Air Force) : première mission :

NOTE FINALE : 17/20

Bien décidé à aller rivaliser avec la trilogie concurrente de Lawrence Holland qui venait justement de trouver sa conclusion, Aces of the Pacific aura débarqué avec la philosophie et le savoir faire de Dynamix... à quelques petites trahisons près. Le résultat est un titre au contenu véritablement impressionnant et toujours intégralement configurable, avec un réalisme accru en bonus. Si l'approche s'éloigne parfois de l'accessibilité qui avait jusqu'alors fait la réputation du studio, avec des dogfights plus exigeants et des missions plus longues, et connait également quelques ratés (des coéquipiers souvent trop passifs, des missions de bombardement pas au point), il faut bien reconnaître que dès l'instant où on commence à se prendre au jeu, on y revient toujours avec plaisir. Si l'idée de composer avec une courbe de progression un peu plus longue et avec quelques séquences frustrantes ne vous fait pas peur, laissez-vous tenter : dans le domaine de la simulation « light », c'est toujours aussi efficace.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une difficulté globalement revue à la hausse
– Des missions de bombardements maritimes aux mécanismes boiteux
– Des coéquipiers qui ne font souvent strictement rien hors des dogfights

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Aces of the Pacific sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Aces of the Pacific est un petit bijou, à ranger d’urgence auprès de Secret Weapons (NdRA : Secret Weapons of the Luftwaffe)… Magnifique programmation, excellente iconographie, superbe rendu de l’action ; s’il est moins ludique que Yeager Air Combat, il est aussi beaucoup plus fouillé et complet. Il constitue à mon sens un des meilleurs investissements actuels en matière de simulateurs de vol. »

Piotr Korolev, Tilt n°105, septembre 1992, 17/20

L’extension du jeu :
Aces of the Pacific – Expansion Disk : WWII: 1946

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Avec ses dizaines de campagne et son contenu pour le moins généreux, pour ne pas dire exhaustif, on était en droit de se demander ce qu’il allait bien pouvoir rester à ajouter au titre de Dynamix dans le cadre d’une des inévitables extensions qui tendaient à fleurir autour de tout ce qui avait un peu de succès à, l’époque. La réponse arriva sous la forme… d’une histoire alternative : que se serait-il passé si les États-Unis n’avaient pas développé la bombe atomique, si la Russie n’avait pas déclaré la guerre au Japon et si celui-ci n’avait pas capitulé en 1945 ?

Voilà un excellent prétexte pour introduire six nouvelles campagnes (trois pour chaque camp) et de nouveaux appareils ; les premières seront pour l’occasion basées sur d’authentiques plans américains pour une éventuelle invasion de l’Archipel (la fameuse opération « Olympic »), tandis que les nouveaux venus permettront surtout de découvrir les tout premiers jets : le P-80 Shooting Star pour les américains, et le Kikka, appareil basé sur le Messerschmidt 262 allemand, pour les japonais. S’y ajoutent des avions plus « classiques » : les F7F Tigercat et F8F Bearcat ainsi que le F2G-2 Corsair côté allié, et le J7W Shinden et le Ki-83 pour les nippons. Dans les faits, c’est surtout l’occasion de replonger pour refaire plus ou moins exactement la même chose : les jets n’introduisent rien de fondamentalement neuf, ils se battent toujours à la mitrailleuse, et leur vitesse est loin de n’avoir que des avantages dans un combat tournoyant. On est donc face à du pur contenu additionnel, ce qui risque de destiner cette extension uniquement aux joueurs n’ayant pas eu leur compte avec tout ce que proposait déjà le jeu original. Rien de dramatique, mais les joueurs qui espéraient quelques nouveautés en termes de gameplay en seront pour leur frais.

NOTE FINALE : 15/20

WW2: 1946 est une extension qui se contente d’ajouter ce dont Aces of the Pacific ne manquait pourtant pas : du contenu. Si les joueurs qui savent ce qu’ils viennent chercher seront heureux de pouvoir piloter de nouveaux appareils dans de nouvelles campagnes, ceux qui espèreraient la plus minime altération de la philosophie ou du gameplay ne trouveront ici strictement rien de neuf.

Red Baron

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Testé sur : PC (DOS)AmigaMacintosh
L’extension du jeu : Red Baron : Mission Builder
Présent au sein des compilations :

  • Sierra Award Winners (1992 (PC (DOS), Macintosh)
  • Golden 7 (1993 – PC (DOS))
  • The Lords of Power (1993 – Amiga, PC (DOS))
  • Aces : The Complete Collector’s Edition (1995 – PC (DOS, Windows 3.x))
  • Aviator Simulator (1995 – PC (DOS))
  • Aces : Collection Series (1997 – PC (DOS, Windows 3.x, Windows 9x))
  • Le Meilleur de Sierra (1997 – PC (Windows 9x))
  • Red Baron with Mission Builder (1997 – PC (Windows 9x))
  • Simulation (1997 – PC (Windows 3.1))
  • Red Baron History (2009 – Windows)

En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

La série des Red Baron (jusqu’à 2000) :

  1. Red Baron (1990)
  2. Red Baron II (1997)
  3. Red Baron 3-D (1998)
  4. Curse You! Red Baron (1999)

Version PC (DOS)

Date de sortie : 19 Décembre 1990 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Version disquette : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCJr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, PS/1 Audio Card, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr, Tandy DAC (TL/SL), Thunderboard

Version CD-ROM : Processeur : Intel 80386DX – OS : PC/MS-DOS 5.0 – RAM : 1Mo
Mode graphique supporté : VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Pro Audio Spectrum, PS/1 Audio Card, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr, Tandy DAC (TL/SL), Thunderboard

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il existe parfois de curieuses coïncidences, dans l’univers du jeu vidéo. D’étranges conjonctions planétaires qui veulent que soudainement, à un instant donné, tout un tas de monde se mette à avoir précisément en même temps une idée que (pratiquement) personne n’avait eue jusqu’alors. Et attention : on ne parle pas ici de surfer sur le succès d’un jeu ayant contribué à créer ou à ressusciter un genre, à la Doom ou à la Tomb Raider, mais bien de voir un concept jusqu’alors totalement laissé pour compte faire l’objet d’un étrange engouement simultané de la part de plusieurs studios avant de retomber presque immédiatement dans un relatif oubli.

Dans le domaine, difficile de trouver un exemple plus parlant que les simulateurs de vol se déroulant pendant la première guerre mondiale – une période totalement laissée de côté pendant toutes les années 80, décennie où la simulation était pourtant un genre de niche, certes, mais relativement florissant. Seule exception : une sorte de « jeu dans le jeu » baptisé WWI Ace qui figurait parmi les scénarios de… Flight Simulator II en 1984. Après cela, plus rien, à part peut-être le très oubliable War Eagles de Cosmi Corporation en 1989 – lequel était d’ailleurs plus un jeu d’action qu’un réel simulateur de vol. Et soudain, sans aucune raison, 1990 connut pratiquement du jour au lendemain un engouement inexplicable pour la période – que l’on pourrait même restreindre au seul mois de décembre, puisque celui-ci aura vu débarquer simultanément pas moins de trois titres décidant de placer le joueur aux commandes d’un antique coucou en bois : Blue Max, Knights of the Sky et Red Baron. N’en jetez plus ! Et encore, ceux-ci arrivaient moins de deux mois après le Wings de Cinemaware – qui n’était certes pas un pur simulateur, mais qui participa lui aussi à un des plus étranges bouchons spontanés de l’histoire du genre. Historiquement, quoi qu’il en soit – et en s’en tenant à l’échelle vidéoludique – un nom aura émergé au-dessus des autres au terme de cette brève escarmouche, et ce nom aura été celui de Red Baron. Une petite revanche pour Dynamix, dont le précédent jeu, A-10 Tank Killer, s’était lui aussi fait coiffer au poteau par un simulateur présentant déjà des caractéristiques assez semblables.

La première force du concept aurait donc théoriquement dû être l’originalité de la période abordée ; pour le coup, c’est un peu raté, mais les utilisateurs d’A-10 Tank Killer ne devraient pas être très dépaysés en découvrant le menu et les possibilités de Red Baron tant la filiation entre les deux est évidentes : une sélection de missions classées par type d’un côté, une carrière au long cours de l’autre, avec en plus la possibilité d’affronter divers authentiques as de la première guerre mondiale (dont celui qui donne son nom au jeu, naturellement, le légendaire Baron Rouge Manfred von Richtofen) en purs dogfights à l’ancienne, en un contre un.

« Dogfight » risque d’ailleurs d’être un mot qui va revenir souvent, car c’est un peu le cœur de l’expérience : que l’on parle de missions de reconnaissance, de missions d’escorte, d’attaques de ballons ennemis ou de patrouilles, les combats aériens virevoltants se résolvant à la mitrailleuse seront pour ainsi dire la seule réelle activité puisqu’il n’est possible ni de bombarder, ni de prendre des photos comme le proposaient ses deux concurrents. On appréciera, dans tous les cas, de pouvoir systématiquement jouer les deux camps dans n’importe quel mode, aux commandes d’une large sélection de chasseurs dont les différences de pilotage ne se font hélas pas vraiment sentir, même en poussant le réalisme à fond – mais on serait malavisé de cracher sur encore un peu plus de contenu.

Quitte à mentionner le réalisme, une autre excellente idée du programme est son degré de customisation d’à peu près tout : difficulté des affrontements, degré de réalisme du pilotage, heure de l’affrontement (il est possible de piloter de jour comme de nuit, à l’aube ou au crépuscule), densité de la couverture de nuages, etc. De quoi se faire en quelques clics exactement l’expérience et la courbe de progression qui nous intéresse, même si les plus mordus de la simulation à outrance regretteront peut-être que les possibilités en matière de réalisme demeurent finalement assez restreintes.

On parle, après tout, de piloter un avion en bois uniquement équipé d’une ou deux mitrailleuses, à une époque où il n’y avait ni missiles ni radars et où les défenses au sol représentaient souvent davantage une gêne qu’une réelle menace, sauf à voler à très basse altitude. Pas question donc de composer ici avec un appareillage ultra-complexe ni avec de la gestion électronique pour augmenter sa furtivité : on fait surtout attention au vent, à la position du soleil et surtout à l’altitude, un chasseur placé au-dessus de l’autre disposant d’un avantage non-négligeable (ce que l’on appelle « l’effet Obi-Wan ». Ou pas.). Dans tous les cas, le pilotage demeure extrêmement accessible : comme son prédécesseur, Red Baron nécessite le recours à un très faible nombre de touches du clavier, et encore, celles-ci ne servent pour l’essentiel qu’à accélérer le temps (très pratique pour éviter les baisses de rythme de l’action), à régler votre vitesse, à réparer votre mitrailleuse enraillée ou à choisir la vue. Et histoire de rendre les choses encore plus directes, il n’y a ni décollage ni atterrissage dans le jeu : quoi qu’il arrive, vous ne vous préoccuperez que de ce qui se passe dans les airs.

Ce côté très « recentré » qui a de quoi pousser les amateurs de réalisme à se griffer le visage est pourtant, paradoxalement, la plus grande force de Red Baron face à sa concurrence. Là où Blue Max avait fait l’erreur d’imposer les atterrissages (ce qui n’apportait rien d’autre que de passer la moitié du temps de jeu à essayer de se poser en un seul morceau) et où Knights of the Sky s’était un peu raté sur les bases, à savoir les affrontements en eux-mêmes, le titre de Dynamix fait le choix intelligent de se concentrer sur l’essentiel – et de le faire bien.

Certes, dans l’absolu, le programme du jeu – campagne incluse – n’est vraiment pas grande chose de plus qu’une suite de dogfigts, mais ceux-ci, qu’ils se déroulent en duel, escadre contre escadre ou quelque part entre les deux, tendent à être particulièrement satisfaisants. Les armes sont précises (pas besoin de viser deux kilomètres au-dessus de sa cible avec des balles qui vont à trente à l’heure comme dans Knights of the Sky), les sensations de vol sont efficaces grâce à un moteur qui fait le travail (même s’il n’y plus la moindre forme de relief, mais bon, ce n’est pas comme si les tranchées étaient creusées au milieu des montagnes), et l’adversité peut-être redoutable comme nettement plus anecdotique, à la convenance du joueur. La plus grande difficulté du pilotage est souvent de parvenir à reprendre de l’altitude après avoir fondu sur un adversaire (et mieux vaut ne pas le rater !) et pour le reste, tout reposera sur l’anticipation et la mobilité : pas question ici de compter sur une contre-mesure pour espérer échapper aux attaques d’une ennemi placé dans nos six heures ! En un mot : ça va vite, c’est intense et on s’amuse. Ce qui n’est pas rien.

Red Baron n’est donc sans doute pas la simulation définitive que les joueurs pourraient attendre, mais il offre un consensus largement aussi satisfaisant : celui d’un jeu qui sacrifie les fioritures inutiles pour pencher vers l’efficacité maximale. Le fait de pouvoir se façonner une expérience sur mesure est également très agréable, et aurait certainement fait grand bien à une concurrence qui aura, de con côté, un peu trop cherché à utiliser le réalisme comme un prétexte pour étirer artificiellement la durée de vie sans que cela se montre plus amusant à un quelconque niveau.

Le tout manque certes encore d’un chouïa de profondeur et de variété, sans parler de l’impossibilité d’affronter un humain, et quelques missions de bombardement, aussi gadget fussent-elles, n’auraient peut-être pas fait de mal. Une carte en jeu plutôt que d’avoir à la consulter à côté n’aurait pas non plus été de trop. Mais c’est précisément dans son aspect « pas de chichis » que le jeu vise le plus juste : une mission dure rarement plus d’une poignée de minutes, mais ce sont des minutes intenses passées à faire quelque chose de prenant plutôt que de glander au cours d’interminables phases de vol en attendant d’atteindre son objectif. Autrement dit, on est plus proche du véritable acte de naissance d’un sous-genre que de son apogée, mais tant que ça fonctionne aussi bien, pourquoi se plaindre ? Si les heures passées avec le nez dans un manuel pour essayer de découvrir laquelle des 105 touches du clavier est attribuée au train d’atterrissage vous effraient, Red Baron est un excellent moyen de se lancer dans l’univers de la simulation avec très peu d’efforts. Et si vous avez tout simplement envie de vous essayer à des dogfights à l’ancienne, avec rien d’autre que votre habileté et votre mitrailleuse en jeu, le logiciel demeure aujourd’hui encore un des meilleurs représentants en la matière.

Vidéo – Dogfight contre une escadre :

NOTE FINALE : 16/20

Figurant au sein d'un soudain embouteillage engageant les simulateurs de vol de la première guerre mondiale au cours de l'année 1990, Red Baron restera comme celui qui aura immédiatement tiré son épingle du jeu, et on comprend rapidement pourquoi : le titre de Dynamix parvient à accomplir un consensus particulièrement satisfaisant entre accessibilité et profondeur et entre fun et réalisme. Certes, l'expérience se limite pour l'essentiel à du pur dogfight, mais sa vraie force comparée à Blue Max et à Knights of the Sky demeure le caractère intégralement configurable de l'expérience, apte à convenir aux complets néophytes comme aux joueurs beaucoup plus rodés au genre. Si les mordus les plus exigeants pourront regretter certaines options de réalisme manquantes, une navigation purement anecdotique et une visibilité pénalisée par la basse résolution d'époque – et fonceront ainsi sans doute directement vers Red Baron II –, le logiciel vaut la peine d'être découvert même par les joueurs d'ordinaire peu intéressés par les simulateurs, tant il va efficacement à l'essentiel. Un bon moyen de piloter à l'ancienne sans avoir à composer avec une courbe d'apprentissage assommante.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Ni décollage, ni atterrissage
– Pas de missions de bombardement ni rien qui pousse à s'intéresser à ce qui se passe au sol

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Red Baron sur un écran cathodique :

L’extension du jeu :
Red Baron : Mission Builder

La grande mode, à la fin des années 80, pour n’importe quel programme affichant de bons chiffres de vente, était de proposer une extension de contenu – cela ne coûtait généralement pas très cher et permettait de surfer sur le succès en offrant aux joueurs ce qu’ils voulaient, à savoir davantage de la même chose. Dans le cas de Red Baron, le fameux « expansion disk » aura quand même mis deux longues années à se matérialiser, ce qui a de quoi surprendre. Pour le reste, tout est dans le titre : Mission Builder est, comme son nom l’indique, un éditeur de missions permettant de se faire des expéditions sur mesure en décidant du positionnement et de la nature de chaque escadre ennemi, du climat, de l’heure de la journée, de la composition du groupe du joueur, etc. L’interface n’est pas très ergonomique, et pour être honnête les possibilités ne sont de toute façon pas renversantes non plus dans un jeu limité à du dogfight – et non, ce n’est pas la peine d’espérer un nouveau type de mission, ou une nouvelle région à survoler. En revanche, on notera que quatre nouveaux avions sont pilotables (là encore, c’est assez gadget, le pilotage ne différant pas franchement d’un appareil à un autre, mais bon, pourquoi pas), et que de nouveaux as des deux camps peuvent être affrontés. Contenu ou pas, le programme n’apporte quand même vraiment pas grand chose de neuf, et surtout rien qui modifie d’un iota l’expérience originale – ou qui l’enrichisse vraiment. On pourrait donc assez facilement faire l’impasse sur cette extension très mineure si elle n’était pas de toute façon intégrée par défaut aujourd’hui avec toutes les éditions en ligne du jeu.

NOTE FINALE : 11/20

Vous avez la flemme de développer du contenu ? Laissez le soin aux joueurs de le faire eux-même ! C’est un peu la leçon de ce Red Baron : Mission Builder qui n’apporte pratiquement rien à un jeu qui tournait déjà très bien sans faire mine de produire quelque chose avec une interface pas très naturelle. On reteindra surtout aujourd’hui les avions et les as additionnels.

Version Amiga

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : Janvier 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo
Mode graphique supporté : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Red Baron était un jeu nécessitant un processeur assez costaud, exactement comme le précédent simulateur de vol du studio, A-10 Tank Killer, lequel employait le même moteur et tendait à tourner à la séance diapo sur Amiga 500. La bonne nouvelle, c’est que ce portage (qui aura mis plus d’un an à débarquer) s’en sort un tout petit peu mieux. La mauvaise, c’est que même sur un Amiga 1200, le framerate tend à s’effondrer dès qu’il y a un peu trop de monde à l’écran, ce qui risque d’arriver très vite en cas de rencontre entre deux escadres. Cela reste heureusement jouable, même si on ne pourra une nouvelle fois que conseiller de privilégier les configurations les mieux équipées pour bénéficier de la meilleure expérience possible. Pour le reste, le contenu est strictement le même que sur PC, et la réalisation ne souffre pas trop de la comparaison avec le VGA (on perd à peine quelques couleurs sur le tableau de bord). Comme sur la machine d’IBM, Red Baron tend en tous cas à enfoncer la concurrence en la matière sur Amiga et à s’affirmer comme LA simulation de vol de la première guerre mondiale à posséder sur la machine.

NOTE FINALE : 14/20 (Amiga 500/600/1000/2000) – 15,5/20 (Amiga 1200)

En dépit de quelques limites dans la fluidité de l’expérience, particulièrement sur les modèles antérieurs à l’Amiga 1200, Red Baron réussit le grand saut sur la machine de Commodore sans laisser trop de plumes et permet de bénéficier des meilleurs dogfights à l’ancienne de la machine. On aurait tort de se priver.

Version Macintosh

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Date de sortie : Juin 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh IIci
Configuration minimale : Système : Motorola 68000 – OS : System 7.0
Mode graphique supporté : 256 couleurs

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dernière machine servie au rang des adaptations de Red Baron, le Macintosh compose pour l’occasion avec ses forces et ses faiblesses. Sa principale force, pour l’occasion, est sans doute la résolution : pouvoir jouer en 640×400 dans un jeu où la lisibilité est primordiale est assurément un bonus bienvenu. En revanche, on pourra regretter que seule la 3D et l’interface profitent de ce gain (le cockpit et toutes les illustrations, eux, sont toujours en basse résolution), et surtout qu’il soit impossible d’afficher un véritable plein écran, le jeu étant fenêtré quelle que soit la résolution employée. Au rang des petits tracas, le fait que cette version ne soit pas ralentie risque de la rendre à peu près injouable sur virtuellement n’importe quoi au-dessus du Macintosh II. Dans les conditions optimales, on se retrouve avec un portage à la hauteur (et peut-être même sensiblement supérieur) à la version PC (si le fenêtrage ne vous gêne pas), mais dans le cas contraire, le gain de résolution ne vaut sans doute pas la peine de retourner ciel et terre pour obtenir cette version.

NOTE FINALE : 16/20

Portage un peu assuré au burin pour Red Baron sur Macintosh : c’est peut-être plus fin, mais on sent bien que l’idée de réellement adapter l’expérience de jeu à la machine ne figurait pas au sein du cahier des charges. Avec la bonne configuration, vous pouvez vous laisser tenter, mais dans le cas contraire, cela ira aussi vite de l’émuler sous DOSBox.

A-10 Tank Killer

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Dynamix, Inc.
Titre alternatif : A-10 Tank Killer : Version 1.5 (réédition augmentée de 1991 – Amiga, PC (DOS))
Testé sur : PC (DOS)Amiga
Présent au sein des compilations :

  • Dynamix Sample Pack (1992 – PC (DOS)
  • A-10 Tank Killer + Extra Missions (1995 – Amiga)
  • Aces : The Complete Collector’s Edition (1995 – PC (DOS, Windows 3.x))
  • Aces : Collection Series (1997 – PC (DOS, Windows 3.x, Windows 9x))

La série des Great War Planes (jusqu’à 2000) :

  1. A-10 Tank Killer (1989)
  2. Red Baron (1990)
  3. Aces of the Pacific (1992)
  4. Aces Over Europe (1993)
  5. Silent Thunder : A-10 Tank Killer II (1996)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1989
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ (x4) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCJr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, PS/1 Audio Card, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster, Tandy/PCjr

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

À l’ère de l’accessibilité, du jeu sur smartphone et de la petite partie de cinq minutes, on ne sera pas très surpris de réaliser que le simulateur de vol est une activité un peu passée de mode – très loin, en tous cas, de la quasi-institution qu’il constituait au cours des années 80. Pour tout dire, le genre était même si représenté, particulièrement sur PC (les consoles avaient moins de problèmes à ce niveau) qu’on pourrait commencer à parler d’embouteillage : piloter un jet en quête d’objectifs militaires tout en s’efforçant d’éviter les radars était devenu à peu près aussi commun que de prendre les commandes d’un vaisseau spatial pour aller sauver l’univers dans un shoot-them-up.

De Falcon à F/A-18 Interceptor en passant par F-16 Combat Pilot, la famille d’avions de combat multirôle développée par General Dynamics était devenue un passage quasi-obligé, à tel point qu’avoir l’occasion de piloter enfin autre chose qu’un jet était toujours perçu comme un mini-événement. En-dehors de l’idée d’aller explorer d’autres périodes historiques – qui commençait curieusement seulement à s’imposer via des titres comme Their Finest Hour – le simple concept d’aller s’asseoir dans le cockpit d’autres types d’appareils pour expérimenter une autre forme de pilotage demeurait une (trop rare) exception à la Gunship. Alors autant dire qu’à sa sortie, A-10 Tank Killer – le tout premier titre du genre à placer le joueur aux commandes d’un A-10 Thunderbolt II – avait quelque chose de rafraichissant : voler en rase-mottes pour chasser des blindés, mine de rien, ça changeait un peu des missions à 20.000 pieds à détruire des chasseurs. Et surtout, ça se jouait différemment.

Dès le lancement, l’équipe de Dynamix dévoile en tous cas une ambition certaine : pour un titre de 1989, difficile d’en demander beaucoup plus à la réalisation. Gestion du VGA, reconnaissance de toutes les principales cartes sons – Roland MT-32 incluse –, digitalisations très réussies en guise de menu et d’interface ; le titre annonce à sa manière la prise de pouvoir des nouveaux processeurs et l’essor à venir de la machine d’IBM, et ça se sent. Seule (petite) déception : les bruitages, eux, sont toujours confiés au haut-parleur interne quoi qu’il arrive, et pour être honnête la musique en jeu risque de taper sur le système suffisamment rapidement pour qu’on se hâte de chercher le raccourci permettant de la couper.

Mais pour le reste, on a hâte de découvrir le moteur de jeu – en ayant malgré tout une bonne raison de pester face à un contenu plutôt malingre : avec seulement sept missions au total, dont une d’entraînement, autant dire qu’il va être difficile de passer des mois sur le logiciel. La campagne, pour sa part, se contente d’enchaîner ces sept missions en y incluant un vague aspect « dynamique » (les objectifs ratés dans une opération pourront entraîner une hausse de la difficulté dans les suivantes), mais si jamais vous trouvez la mort, il faudra impérativement repartir du début : pas de résurrection miracle des pilotes tombés au champ d’honneur ! En-dehors des habituelles options de difficulté, pas grand chose à attendre du côté de la configuration : le système de jeu est, comme on va le voir, suffisamment accessible pour ne pas avoir besoin de tempérer son degré de « réalisme ».

On pourrait d’ailleurs parler de « simulaction » tant le titre de Dynamix ne cherche pas à noyer le joueur sous des sous-couches de termes techniques et de gestion poussée d’obscurs système de brouillage : l’interface n’emploie que quelques touches du clavier en plus de l’éventuel joystick, et une fois que vous savez régler votre vitesse et choisir votre arme en fonction de la cible, vous devriez être paré d’autant plus rapidement qu’il n’est pour ainsi dire jamais nécessaire d’atterrir et que le décollage se résume à pousser le moteur à fond et à tirer le manche vers soi.

Détruire une cible est rarement plus exigeant que de l’avoir à proximité de son viseur, d’attendre qu’elle soit verrouillée et de tirer – et pour économiser vos précieux missiles, votre canon est déjà largement assez puissant pour venir à bout de la plupart des blindés. Ceci dit, là où on aurait pu s’attendre à ce que ceux-ci constituent le plat de résistance d’un logiciel nommé « Tank Killer », les cibles pourront prendre des formes beaucoup plus variées : bâtiments, aéroports, hélicoptères ou même chasseurs pourront représenter des objectifs, et votre avion n’étant pas exactement le mieux armé pour faire face à un MiG-27, il faudra parfois savoir se retrancher derrière vos propres positions défensives pour avoir une chance de survivre.

La principale menace venant, on s’en doute, des missiles sol-airs et des défenses de type SCUD – dont le rayon d’action est clairement matérialisé sur votre carte, tout comme l’emplacement des divers objectifs – très bon point –, le cœur du jeu va être de voler à très basse altitude en louvoyant entre les positions défensives pour mener des raids éclairs sur les positions adverses en s’efforçant de ne pas récolter un missile au passage.

Plusieurs missions mettront en jeu d’autres avions, voire des pelotons de tanks au sol, pour vous assister, mais ceux-ci ont un comportement très scripté qui fait qu’il s’agira toujours de détruire des cibles dans un certain ordre et dans un certain laps de temps pour obtenir les meilleurs résultats. C’est simple, efficace et suffisamment varié pour offrir des situations intéressantes – même si, par sa nature de « simulateur light », le jeu montre fatalement des lacunes sur le plan de la profondeur et de la stratégie. On est plus proche de « Wing Commander au niveau du sol » que d’une expérience réaliste. Mais en l’état, l’action est indéniablement plaisante et aura d’ailleurs globalement tapé dans l’œil de la presse de l’époque… à un petit détail près.

Le détail en question, c’est qu’un autre jeu proposant une approche extrêmement similaire avec une réalisation et une jouabilité au moins aussi satisfaisantes – et, tant qu’à faire, avec un peu plus de contenu – aura vu le jour quelques mois à peine après lui ; dans le magazine Tilt, les deux logiciels auront d’ailleurs été testés le même mois, littéralement côte-à-côte. Le nom de ce fâcheux ? Un certain LHX : Attack Chopper, auquel il est difficile de ne pas penser en s’essayant au titre de Dynamix… qui, en un sens, ressemble presque à une version bêta du jeu d’Electronic Arts.

Non qu’il lui soit clairement inférieur – en termes de sensations et de réalisation, les deux programmes sont, comme on l’a vu, très proches –, mais disons simplement que le simulateur d’hélicoptère, un tout petit plus plus riche et un chouïa plus varié (notamment de par la possibilité de piloter plusieurs appareils aux capacités différentes), avait une très légère avance sur la photo finish… au moins jusqu’à la sortie de la version 1.5 du jeu (voir ci-dessous). On pourra également arguer que le système de ciblage d’A-10 Tank Killer, qui ne s’active que lorsque les cibles sont juste sous votre nez, oblige généralement à des approches kamikazes plutôt que de laisser le joueur tenter une stratégie réellement subtile. Dans tous les cas, cela reste un simulateur bien plus accessible que les références absolues du genre, et un bon moyen de s’amuser quelques heures sans avoir à mobiliser son week-end pour compulser le manuel – et cela, mine de rien, on était aussi heureux de le voir apparaître, à la fin des années 80.

Vidéo – La première mission du jeu :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’actualité politique du début des années 90 – et en particulier la guerre du Golfe – aura parfois été perçue comme une bonne occasion de ressortir les simulations militaires des cartons histoire de profiter que toutes les chaines de télé occidentales soient occupées à diffuser des images de tanks, d’avions et de bombardements en vision nocturne littéralement 24H/24 pour surfer sur « l’engouement ».

On se souvient que M1 Tank Platoon avait ainsi bénéficié d’un patch pour changer ses pleines en désert ; vers la même période, A-10 Tank Killer aura carrément profiter d’une réédition « surgonflée » bénéficiant pour l’occasion d’une nouvelle campagne inédite de sept missions additionnelles se déroulant, vous l’aurez déjà deviné, en Irak. En fait, il y a même trois campagnes en tout, puisque le jeu propose également une autre campagne en Europe – je ne suis pas parvenu à trouver d’où sort cette campagne (extension ?), qui n’apparait dans aucun document de promotion et que personne ne semble jamais mentionner dans les tests de la version 1.5 alors qu’elle ne faisait clairement pas partie de la première édition, mais le fait est qu’on se retrouve mine de rien avec un contenu triplé par rapport au jeu de base, excusez du peu ! Pour ne rien gâcher, en plus d’une refonte graphique de l’interface, qui profite de nouveaux écrans fixes, on note aussi une nette amélioration du côté sonore, où le bruit du moteur a remplacé l’envahissant thème musical, et où les différents tirs profitent enfin des cartes sonores plutôt que du haut-parleur interne, sans oublier une gestion améliorée des joysticks et autres palonniers. De quoi dépoussiérer agréablement un titre qui n’avait pas trop vieilli en deux ans, et indéniablement la meilleure façon de découvrir le logiciel de nos jours.

NOTE FINALE : 14/20 (v1.0) - 15/20 (v1.5)

Aux antipodes des simulateurs de vol hyper-exigeants à la Falcon ou à la F-19, A-10 Tank Killer est plus un jeu d'action en 3D dont on peut maîtriser les ficelles en une poignée de minutes avant d'aller voler en rase-motte pour détruire blindés, bâtiments ou même avions et hélicoptères ennemis. Si le pilotage très accessible annonce à sa façon celui d'autres « simulactions » à la LHX : Attack Chopper, l'expérience originale manque encore un peu de finesse, de profondeur et de contenu pour se révéler réellement marquante sur la durée. Amusant pour quelques heures, le titre de Dynamix s'essouffle ensuite assez vite faute d'une campagne réellement consistante et d'un gameplay aux possibilités plus étendues, mais cela reste un bon moyen de piloter un chasseur de tanks sans avoir à y consacrer des heures d'entraînement. Privilégiez dans tous les cas la version 1.5, au contenu nettement plus généreux et à la réalisation supérieure.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un contenu dont on fait vite le tour (v1.0)
– Un système de ciblage qui s'active trop tard pour autoriser la subtilité
– Un modèle de vol très basique, et très peu de relief au sol

Bonus – Ce à quoi peut ressembler A-10 Tank Killer sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« A-10 Tank Killer est une superbe simulation à recommander à tous les possesseurs de configuration un peu musclée. »

François Hermellin, Tilt n°78, mai 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Dynamix, Inc.
Date de sortie : Décembre 1990 (v1.0) – 1991 (v1.5)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 1Mo
Mode graphique supporté : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu (v1.0) :

Vidéo – L’écran-titre du jeu (v1.5) :

Comme beaucoup de simulateurs de vol de la fin des années 80, A-10 Tank Killer aura fait le trajet jusque sur Amiga – que ce soit dans sa version « de base » ou dans la version 1.5, qui aura elle aussi bénéficié de sa propre réédition alors que le jeu était sorti à peine quelques mois plus tôt. Dans les deux cas, on retrouve exactement le même contenu et les mêmes options que sur PC, avec quelques petites adaptations sur le plan de la réalisation. Sur le plan sonore, la version Amiga s’en tire mieux que la version PC en ce qui concerne la v1.0 et fait à peu près jeu égal pour ce qui est de la v1.5, en revanche la 3D semble avoir été un peu dépouillée dans le cas de la v1.0, avec moins de détails et une distance d’affichage plus faible. En revanche, autant vous prévenir : dans les deux cas le framerate doit péniblement atteindre les deux images par seconde sur un Amiga 1000/500/600. Ce n’est pas vraiment une surprise pour un jeu qui réclamait, par essence, un PC costaud pour l’époque pour tourner (comprendre : au grand minimum un 286), mais autant dire que les choses se passent déjà mieux sur un Amiga 1200, où on peut espérer accrocher les douze images par secondes dans les meilleurs moments. À moins d’avoir une configuration vraiment solide, vous serez dans tous les cas un peu mieux sur PC, mais dans les bonnes conditions l’expérience reste très solide.

NOTE FINALE : v1.0 : 11/20 (Amiga 1000/500/600) – 14/20 (Amiga 1200)
v1.5 : 11,5/20 (Amiga 1000/500/600) – 15/20 (Amiga 1200)

Expérience globalement préservée pour A-10 Tank Killer sur Amiga, même si mieux vaudra avoir une configuration plus conséquente que celles disponibles à la sortie du jeu pour vraiment profiter de l’action – faute de quoi, on est davantage face à une soirée diapo que face à un simulateur de vol. Encore une fois, la version 1.5 remporte tous les suffrages comparée à la version de base.

Les avis de l’époque :

« Les graphismes 3D surfaces pleines se paient le luxe d’inclure les ombres portées. L’animation est fluide est rapide (NdRA : Tu parles !). En revanche, les bruitages, bien que corrects, sont un peu restreints. A-10 Tabk (sic) Killer, avec son originalité, est un excellent simulateur de vol qui change des chasseurs habituels. »

Jacques Harbonn, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Falcon 4.0

Développeur : MicroProse (Alameda)
Éditeur : Hasbro Interactive, Inc.
Testé sur : PC (Windows 9x) & Macintosh
Présent au sein des compilations :

  • Modern Warfare Collection (1999 – PC (Windows 9x)
  • Totally Flying (2001 – Windows)
  • Falcon : Collection (2015 – Linux, MacOS, Windows)
  • Falcon 3.0 : Gold (2023 – Linux, MacOS, Windows)

En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

La série Falcon (jusqu’à 2000) :

  1. Falcon (1987)
  2. Falcon A.T. (1988)
  3. Falcon 3.0 (1991)
  4. Falcon (TurboGrafx-16) (1992)
  5. Falcon 4.0 (1998)

Version PC (Windows 9x) & Macintosh

Date de sortie : Décembre 1998 (PC) – Mai 1999 (Macintosh)
Nombre de joueurs : PC : 1 à 2 (avec deux ordinateurs reliés par un câble null-modem) –  2 à 16 (via Internet, modem ou réseau local)
Macintosh : 1 à 4 (via modem)
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé
Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous PCem
Configuration minimale : Version PC :
Processeur : Intel Pentium 166MHz – OS : Windows 95 – RAM : 32Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique : DirectX : 5 – API : Direct3D, Glide
Configuration sonore : Dolby Surround supporté

Version Macintosh :
Processeur : PowerPC 603e – OS : System 7.5.3 – RAM : 32Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s)
Configuration graphique : API : Glide

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au fil d’une décennie où tout sera décidément allé extrêmement vite, la mutation du statut de « simple machine de bureau » à « ordinateur multimédia » puis à « système capable de rivaliser avec les consoles » (voir à « master race », diront certains…) du PC aura également fait quelques victimes. Pas uniquement du côté de la concurrence – désormais réduite, du côté des ordinateurs personnels, à un Macintosh pesant moins de 10% du marché – mais aussi et surtout du côté de la ludothèque en elle-même. Autrefois bâtie autour de genres adaptés aux caractéristiques de l’ordinateur d’IBM – nommément les jeux de rôles, les jeux de stratégie, les simulations et les jeux d’aventure –, la bibliothèque du PC aura basculé à la fin des années 90 vers une offre plus variée tournant principalement autour du FPS et de la 3D triomphante.

Ironiquement, cette diversification ne sera pas passée loin de sonner le glas des genres susmentionnés, car si la stratégie avait réussi sa mue en se débarrassant de son austérité et de sa délicate courbe d’apprentissage avec l’arrivée du temps réel (elle était même en pleine âge d’or, avec des titres comme Homeworld, Starcraft ou Total Annihilation, tous parus entre 1997 et 1999), l’aventure était en train de vivre ses dernières grandes heures avec Grim Fandango et The Longest Journey, et le jeu de rôle avait frôlé la disparition pure et simple avant que Baldur’s Gate ne vienne lui offrir un second souffle. Quant à la simulation, qui avait sur le papier tous les éléments pour vivre ses plus belles heures – des processeurs surpuissants et des cartes accélératrices 3D en soutien –, elle aura bien connue une forme de baroud d’honneur avec la série des Jane’s Combat Simulations et autres F22 Air Dominance Fighter, mais elle se sera surtout déplacée du côté de l’accessibilité et de la simulation automobile, les simulateurs de vol, pour leur part, restant plus que jamais réservés à un public de niche prêt à passer des heures avec le nez dans un manuel épais comme le bottin, ce qui n’était déjà plus exactement la norme de la période. Parmi les derniers monstres sacrés d’un genre qui aura pratiquement disparu au cours de la décennie suivante figure Falcon 4.0, qui demeure aujourd’hui encore un des titres de références pour les amateurs de pilotage de F-16 avec sa suite de 2005, Allied Forces.

Un bon moyen, au passage, de mieux cerner les raisons du déclin du simulateur de vol en tant que genre. Car autant le dire tout de suite : on aura rarement pu juger plus pleinement de l’extraordinaire complexité du fonctionnement d’un jet qu’en lançant Falcon 4.0. La saga a toujours été réputée pour son réalisme, et elle n’était visiblement pas décidé à changer de cap – et autant vous prévenir : si vous vous imaginez empoigner le manche à balai et aller abattre des chasseurs adverses après vingt secondes de consultation de la carte de référence du jeu, vous allez être très, très déçu.

Certes, par définition, une simulation présente toujours un degré de complexité ; même les simulateurs adaptés de Star Wars, X Wing et Tie Fighter, ne se laissaient pas dompter en cinq minutes et demandaient un peu d’investissement pour cerner les gigantesques possibilités de l’interface et du moteur de jeu – même Wing Commander nécessitait un détour par le manuel, c’est dire ! Mais avec Falcon 4.0, comme avec beaucoup des simulations de pointe de la période, on aborde un autre niveau : musclez-vous les genoux, car il vont devoir héberger l’imposant manuel du jeu et ses 579 pages pendant un petit bout de temps. Première étape : préparez-vous à aborder dans l’ordre, et sans doute plusieurs fois, les quelques trente-et-une (!) missions d’entraînement du jeu, car aucune n’est superflue et toutes se révèlent rigoureusement indispensables pour espérer manœuvrer et utiliser votre Fighting Falcon à vingt millions de dollars. Si vous n’avez pas déjà une connaissance absolue de la signification de termes comme FPM, ADI, AOA, HSI, RWS ou ACM, n’espérez même pas avoir une chance de tirer quelque chose de l’impressionnant tableau de bord de l’appareil et de ses très nombreuses capacités. Même les connaisseurs des précédents épisodes auront tout intérêt à ne pas sauter une seule étape de la très longue courbe d’apprentissage du jeu : jouer à Top Gun, en vrai, ce sont des mois de formation et ce n’est pas pour rien.

Bien que le titre présente des options de configuration permettant à la fois de simplifier le modèle de vol et de tempérer les capacités de l’I.A. adverse afin d’avoir une petite chance de parvenir à cibler un ennemi sans maitriser les dizaines de modes radar ayant chacun une fonction spécifique devant être utilisée à la perfection en fonction du type d’adversaire et de la distance à laquelle il se trouve (avec, naturellement, la moitié de ces modes à destination des cibles au sol), même le modèle « simplifié » est déjà atrocement complexe – l’entrainement ne vous préparant en rien aux adaptations qu’il opère.

Quels que soient vos choix, il faudra obligatoirement une main sur le joystick, une autre sur le clavier dont chaque touche a une, sinon plusieurs, fonction, voire une troisième que vous devrez vous faire greffer à grands frais pour empoigner la souris afin de simplifier la navigation sur le tableau de bord – car oui, certaines actions comme le ciblage peuvent nécessiter que vous allier déplacer un curseur manuellement. Soyons au moins reconnaissant au programme d’avoir eu l’excellente idée d’inclure un système de « freeze », sort de pause active qui vous permet d’agir pendant que le temps est « gelé », car on doit souvent réaliser une dizaine d’actions dans un laps de temps extrêmement court au milieu d’un dogfight endiablé. Si tout ce que je viens de décrire vous intimide, autant vous préparer psychologiquement : on ne lance pas Falcon 4.0 pour se lancer dans le feu de l’action dix minutes plus tard, ni même deux heures. Avant d’aller gagner votre guerre, il va falloir la mériter !

La bonne nouvelle, c’est que le contenu vaut la chandelle : outre l’engagement immédiat qui permet d’affronter sans tarder chasseurs, bombardiers et/ou cibles au sol avec la présence ou nom d’unités antiaériennes et un mode multijoueur à réserver à une élite de passionnés du genre, la star du logiciel est indéniablement ses trois campagnes dynamiques toutes intégralement situées en Corée (car oui, l’ennemi sera ici la Corée du Nord).

« Dynamique » étant ici le mot-clef, car loin de vous proposer une succession de missions établies face à des forces prédéterminées, le jeu réévalue en permanence vos objectifs en fonction des mouvements et du statut des forces adverses – aériennes, navales ou au sol. Car ne vous attendez pas à survoler un grand désert pour aller attaquer une unité isolée : vous êtes en permanence au sein d’une escadrille lancée au-dessus d’un vaste champ de bataille, et ce sont des centaines de cibles qui se présenteront à vous – ce qui signifie qu’apprendre à identifier les vôtres et à réclamer des informations par radio afin d’y parvenir constituera une part de la difficulté. Mais cela signifie aussi et surtout qu’il va falloir apprendre à outrepasser vos ordres et à faire un maximum de dégâts pour vous simplifier les choses sur la durée, chaque unité ennemie détruite étant une unité de moins sur votre route pendant la suite de la campagne – mais évidemment, plus vous prenez de risques, plus vous et vos collègues pilotes risquez d’y laisser des plumes…

Ces formidables campagnes justifient à elles seules le colossal investissement que nécessite le jeu pour être dompté – sans même parler de le maîtriser. Avec le recul, on comprend aisément que les simulateurs de vol poussés aient quelque peu échoué à sortir de la niche où leur approche hyper-exigeante les avaient cantonnés : avoir des missions d’entraînement didactiques prenant le joueur par la main point par point sans avoir à ouvrir l’imposant manuel aurait assurément fait un bien fou à une expérience qui n’est clairement pas à destination des joueurs pressés.

Avoir un mode « arcade » plus basique, avec juste une poignée de fonctions indispensables (ciblage, choix des armes, tir) grandement automatisées aurait également rendu la courbe d’apprentissage un peu moins écrasante – ce n’est pas la philosophie du genre, c’est sans doute une erreur mais c’est à prendre ou à laisser. Si vous avez vraiment envie de découvrir ce que signifie réellement piloter un chasseur, vous aurez ici un des tout meilleurs représentants du genre, et même si la 3D fait son âge et que faire tourner le programme sur les configurations modernes pourra se révéler délicat, les joueurs venus chercher exactement cette exigence et cette difficulté seront aux anges pour de très, très nombreuses heures. En revanche, si le simple fait d’avoir à subir un didacticiel de quinze minutes vous fatigue au moment de lancer un jeu, soyons clair : ce type de jeu n’est pas pour vous, et sans un changement drastique de vos attentes, Falcon 4.0 ne viendra rien modifier à cet état de fait. Voilà au moins une chose qui n’aura jamais cessé d’être vraie au fil de l’histoire vidéoludique.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 18/20

Falcon 4.0 est sans doute l'un des tout derniers avatars de la simulation de pointe à l'ancienne : celle qui nécessite de compulser un manuel de 579 pages, qui a plusieurs fonctions pour absolument toutes les touches du clavier et dont la courbe de progression évoquant les pires flancs de l'Everest passe par la bagatelle de 31 missions d'entrainement. C'est l'exact opposé d'un titre accessible : c'est un jeu exigeant, réaliste jusqu'à l'excès, qui ne cherche jamais réellement à faire des cadeaux en dépit des indispensables options de configuration pour tempérer un peu la difficulté et le réalisme. Une fois cette philosophie acceptée, la bonne nouvelle est que le logiciel de MicroProse est l'un des meilleurs en la matière, avec un modèle de vol irréprochable et une campagne dynamique parmi les plus impressionnantes du genre ; la mauvaise étant que même les fonctions les plus basiques demanderont des heures d'entrainement pour être maîtrisées. Ce n'est clairement pas un jeu pour tout le monde, mais si vous avez pris votre pied avec Falcon 3.0, Longbow 2 ou F-15 – ou que vous êtes à a fois dévoué, curieux et patient –, attendez-vous à y engloutir des mois. Une référence à destination des joueurs les plus exigeants.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une phase d'apprentissage aussi longue qu'intimidante...
– ...notamment parce que le modèle de vol simplifié est déjà particulièrement complexe

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Falcon 4.0 sur un écran cathodique :

Bar Games

Développeur : Accolade, Inc.
Éditeur : Accolade, Inc.
Testé sur : PC (DOS)Amiga

Version PC (DOS)

Date de sortie : 25 septembre 1989 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 3,5″ et 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 384ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, Tandy/PCjr
Carte sonore supportée : aucune (haut-parleur interne, Tandy/PCjr)
*512ko pour les modes EGA et Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On ne peut sans doute pas tout-à-fait comprendre les années 80, en termes vidéoludiques, si on ne se penche pas sur le succès de la série des Games d’Epyx. À une époque où le multijoueur – en particulier sur ordinateur, et plus encore sur les ordinateurs 8 bits, alors encore très populaires – tendait à être un concept théorique davantage qu’une réalité manifeste, une partie de California Games ou de Winter Games était ce qui s’approchait le plus du pinacle de l’après-midi entre amis, longtemps avant l’émergence des party games.

Ce succès qui aura un temps propulsé Epyx dans une forme d’âge d’or (la firme comptait plus de deux-cents employés en 1986) aura fatalement contribué à aiguiser l’appétit des concurrents, l’ennui étant que trouver un cadre apte à héberger des mini-jeux qui puissent instantanément parler à tout le monde n’était pas forcément chose aisée une fois qu’on s’éloignait des Jeux Olympiques. Electronic Arts aura tenté l’approche « cool » avec la série des Skate or Die, les français d’Exxos auront carrément visé les étoiles – littéralement – avec Purple Saturn Day, et du côté d’Accolade, on aura eu une autre idée pour trouver un cadre convivial où pratiquer des jeux à plusieurs : les bars. Ainsi sera né Bar Games, un de ces improbables titres destinés à nous faire croire rappeler qu’il y a plein de chose à faire dans un troquet en-dehors de boire de l’alcool. Comme jouer à Pong ou au flipper ? Ah non, on est dans une approche plus américaine : dans les bars, on drague, on joue de l’argent ou on participe à des soirées t-shirt mouillé. Fameux programme.

Bar Games se présente donc comme une collection hétéroclite d’activités qu’on peut éventuellement s’attendre à pratiquer dans des bars, tout en occultant certaines des plus évidentes, puisqu’il ne faudra même espérer jouer au billard ou aux fléchettes comme dans Parlour Games.

Les cinq jeux disponibles sont les suivants : un jeu de dés basés sur le bluff et conséquemment nommé « Liar’s Dice » (littéralement : les dés du menteur), une soirée t-shirt mouillé intitulée « Wet n’ Wild », une activité de barman (« Last call »), le classique Air Hockey, et enfin une partie… de drague, présenté sous l’intitulé flatteur de « Pick-up Artist ». Un menu plutôt chiche, quoi qu’on en pense, même si on remarquera rapidement que le format des diverses « épreuves » tend à dépasser la poignée de secondes et peut même facilement approcher, dans le cadre du Air Hockey ou de la partie de dés, la dizaine de minutes – à condition d’être bon. On peut donc espérer, en cas de participation à l’habituel « tournoi » permettant d’enchaîner toutes les épreuves, une partie qui dépasse la quinzaine de minutes, ce qui figure indéniablement dans la moyenne haute du genre. La clef, comme souvent, va surtout résider dans la qualité intrinsèque des divers mini-jeux – et dans ce domaine, comme toujours, il y a à boire et à manger.

Le « Liar’s Dice » est ainsi – avec l’Air Hockey – une des rares activités pouvant soulever l’intérêt plus d’une poignée de minutes. Le principe est simple : chaque joueur lance cinq dés sans voir ceux de son adversaire, et l’idée va être de parier sur le nombre d’occurrences d’une valeur donnée en cumulant la totalité des dés – donc dix au total. Le jeu étant basé sur la surenchère (on ne peut que parier sur un nombre de dés plus élevé que celui du concurrent, ou sur un nombre équivalent de dés d’une valeur supérieure), il repose donc en partie sur le bluff et en partie sur la chance, le jeu ayant malgré tout la générosité de vous laisser accéder à une partie des pensées de la femme qui vous fait face histoire de délivrer quelques indices.

L’Air Hockey, quant à lui, se passe de description ; on y affronte divers adversaires de plus en plus redoutables, le gros problème étant surtout que cette activité arrive un an après un certain Shufflepuck Cafe qui proposait déjà la même chose, mais en nettement mieux. Dans le « deuxième rang » des mini-jeux, on trouve le « Wet n’ Wild » qui demande de verser des seaux d’eau sur des jeunes femmes (ou des hommes, on appréciera l’effort) jusqu’à rendre leur poitrine semi-apparente. L’exercice reposerait intégralement sur le timing s’il n’était pas rapidement compliqué, au fil des concurrent(e)s, par un parcours de plus en plus irrégulier et par l’apparition de personnages pour vous compliquer la tache en venant décrocher vos seaux ou en vous lançant des cochonneries sur la tête pendant que le chrono tourne. « Last Call » demande de faire glisser des bocks pleins jusqu’à leur destinataire sur le zinc, comme dans l’antique Tapper. Ici, tout repose sur le remplissage d’une jauge : envoyez le verre trop ou pas assez fort, et il ratera son client. Enfin, « Pick-up Artist » vous envoie draguer selon un mécanisme simple : le pif total. Sachant que vous n’avez aucun moyen de deviner les centres d’intérêts des femmes en face de vous et que la sélection est un plus compliquée par une rotation aléatoire dans le choix des phrases, c’est de très loin l’exercice le plus arbitraire et le plus inintéressant du lot.

Pour le coup, quel bilan ? Deux activités vaguement intéressantes sur la durée (comprendre : sur plus d’une partie), deux à peine correcte apte à donner le change cinq minutes, et une profondément sans intérêt : cela fait peu. Certes, les mini-jeux ont au moins le mérite d’être accessible et de ne pas imposer des dizaines de tentatives pour comprendre comment ils se jouent ; en fait, ce n’est pas tant qu’on passe un moment atroce sur le jeu dès l’instant où l’on fait preuve d’un minimum de curiosité, c’est surtout que les rares points forts de l’expérience sont de toute façon disponible ailleurs et en mieux.

Le jeu de dés doit connaître des centaines d’équivalents gratuits sur internet ou sur smartphone (et au pire, vous vous éclaterez au moins autant à aller jouer au poker aux dés dans The Witcher 2), l’Air Hockey est plus intéressant dans Shufflepuck Cafe, comme on l’a déjà vu, « Wet n’ Wild » et « Last Call » sont juste de petits jeux d’arcade totalement dépourvus de profondeur et « Pick-up Artist » a éventé son potentiel ludique (s’il existe) au bout de quinze secondes. Si les joueurs les plus patients trouveront peut-être matière à s’occuper une demi-heure, voire une heure pour ceux qui accrocheront vraiment à l’une des deux disciplines « prenantes », ils risquent ensuite d’estimer avoir fait le tour de la question et il sera difficile de leur donner tort. L’aspect multijoueur est d’ailleurs ici plus secondaire que jamais, pratiquer les jeux en alternance n’offrant pas grand intérêt, et au final le thème employé est clairement sous-exploité. la réalisation étant purement fonctionnelle (seize couleurs, plus aucune musique passé l’écran-titre, et le programme ne gère de toute façon aucune carte son), on pourra également regretter de gros problème de rythme (l’air Hockey s’étire inutilement sur des matchs en deux rounds). Reste de quoi tuer le temps sans passer un trop mauvais moment, mais autant dire que ça ne valait déjà pas l’investissement au prix fort en 1989 et que ça ne s’est pas exactement arrangé depuis.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 10,5/20

Simple collection de mini-jeux comme on en trouvait des dizaines à la fin des années 80, Bar Games représente un assez bon résumé des reproches que l'on pouvait adresser au concept : un contenu famélique de qualité très inégale qui ne représente que peu d'intérêt à plusieurs et moins encore en solo. Si une ou deux épreuves parviennent vaguement à tirer leur épingle du jeu, une difficulté un peu trop basée sur l'aléatoire, un rythme raté et un manque de profondeur font que l'essentiel de la curiosité se sera vraisemblablement dissipée au bout d'une heure. Rien de catastrophique, mais personne ne vous en voudra de faire l'impasse.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Seulement cinq épreuves...
– ...dont la majorité peinent à se montrer intéressante plus de dix minutes...
– ...et qui se joue un peu trop sur la chance plus que sur l'adresse
– Aucune possibilité de jouer à deux simultanément, alors que certaines activités comme l'Air Hockey s'y prêtaient à merveille

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Bar Games sur un écran cathodique :

Version Amiga

Développeur : ArtisTech Development
Éditeur : Accolade, Inc.
Date de sortie : Août 1990
Nombre de joueurs : 1 à 4 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Mode graphique supporté : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée*
*Uniquement pour les systèmes équipés de plus de 512ko de RAM

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Même si le concept de jeux de bar n’aura pas exactement déplacé les foules (ni encouragé à renouveler l’expérience), Accolade aura néanmoins décidé de porter le jeu sur Amiga quelques mois après la version PC. L’équipe d’ArtisTech Development en aura profité pour pratiquer un peu ravalement de façade et pour offrir une réalisation un peu plus colorée, même si on a l’impression que l’essentiel des efforts s’est arrêté à l’écran-titre : une fois en jeu, c’est certes un peu plus beau, mais le contenu comme la jouabilité n’ont pas bougé d’un pouce, et on ne peut pas franchement dire que le résultat soit beaucoup plus enthousiasmant que sur PC. Une nouvelle fois, on se retrouve face à un jeu qui pourra s’avérer divertissant le temps de quelques parties, probablement sur l’Air Hockey, mais qui risque de rejoindre définitivement l’étagère (ou la boîte à carton) au bout d’une demi-heure.

NOTE FINALE : 11/20

En dépit d’un petit coup de peinture pour tenter de le rendre plus sexy, Bar Games sur Amiga reste un des ces titres fondamentalement oubliables dont l’unique intérêt est de s’ébahir qu’ils aient pu exister. Passé dix minutes de curiosité, on aura vraisemblablement fait le tour du sujet une bonne fois pour toutes.

Les avis de l’époque :

« L’intérêt [des] différentes parties est très inégal. Le palet est le plus réussi et les différents partenaires jouent de mieux en mieux. Le barman et l’arrosage sont agréables sans plus. Le jeu de dés plaira aux amateurs de bluff mais risque de laisser les autres indifférents. Quant à la drague, elle est nulle, car fondée uniquement sur la chance. […] Un jeu dont on risque de se lasser assez vite. »

Jacques Harbonn, Tilt n°84, décembre 1990, 12/20

Air Combat (PlayStation)

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited (Japon) – Namco Hometek Inc. (Amérique du Nord) – Sony Computer Entertainment Europe Ltd. (Europe)
Titre original : Ace Combat (Japon)
Testé sur : PlayStation
Disponible sur : BREW

La série Ace Combat (jusqu’à 2000) :

  1. Air Combat (Arcade) (1993)
  2. Air Combat 22 (1995)
  3. Air Combat (PlayStation) (1995)
  4. Ace Combat 2 (1997)
  5. Ace Combat 3 : Electrosphere (1999)

Version PlayStation

Date de sortie : 30 juin 1995 (Japon) – 9 septembre 1995 (Amérique du Nord) – 10 octobre 1995 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, NeGcon
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (1 bloc)

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

L’avantage du présent, c’est que c’est le futur du passé.


Bon, laissez-moi développer un peu, parce que je sens que vous ne voyez pas très bien où je veux en venir.

Aujourd’hui, par exemple, on sait d’expérience que la licence des Ace Combat est une valeur sure, inscrite dans la durée, et qu’elle continue de vivre sa plus belle vie après plus de trente ans de bons et loyaux services. On peut donc en aborder chaque épisode en ayant pleinement conscience de sa place dans l’histoire vidéoludique au sens large, ainsi que de la trajectoire suivie sur le long-terme par les mécanismes et la philosophie de la saga.

On connait d’avance les impasses, on sait reconnaître les prémices de tout ce qui va fonctionner – un confort dont rêverait n’importe quel développeur. Et il est intéressant de chercher à aborder un épisode comme Air Combat sur PlayStation – le premier opus à quitter les salles d’arcade pour offrir une expérience domestique – précisément sous le prisme de ce que l’on sait, avec le recul, des forces et des faiblesses de la (longue) série. Ace Combat, de nos jours, c’est un peu le pinacle du simulateur de vol « light » : une expérience n’ayant jamais renié ses racines venues de l’arcade, et privilégiant l’action au réalisme ; les amateurs de technicité peuvent toujours aller jouer à Falcon 4.0, quand on juste envie de jouer à Top Gun avec un manche un balai, une gâchette et absolument aucune contrainte, on sait exactement vers quoi on va se tourner. Spoiler alert : toutes les prémices de cette approche sont déjà présentes dans cet épisode, parfois sous leur forme la plus « pure » – comprendre, la plus nue, et pas toujours la plus adroite.

Pour fêter ses débuts sur console, Air Combat commence par s’offrir un scénario – disons plutôt « un cadre » car face à une menace terroriste particulièrement vague ayant apparemment réussi à mener un coup d’État au sein d’un pays jamais nommé, l’important est que le joueur incarne un pilote mercenaire, et plutôt dans le genre « velu » – de ceux à qui on est prêt à confier à la fois le sort d’un pays et des sommes absolument stratosphériques en guise de rémunération, parce que parfois, un vrai héros vaut bien qu’on lui offre l’équivalent du budget de cinq ministères ; et puis qui aura besoin d’écoles, d’hôpitaux et de services publics dans son pays fraichement libéré de toute façon ?

L’unique mode de jeu solo prend donc la forme d’une campagne d’une vingtaine de missions, mais avec sa dose d’embranchements – dans les faits, les joueurs pressés pourront tout-à-fait boucler le jeu en sept ou huit sorties si le cœur leur en dit. Ce qui pourra également se comprendre dans le sens où la campagne en elle-même n’offre aucun mécanisme de sauvegarde ; il faudra donc tout faire d’une traite, et cet aspect « semi-ouvert » a donc le mérite d’offrir une certaine forme de rejouabilité qui devrait malgré tout difficilement étendre la durée de vie de l’expérience au-delà de deux ou trois heures, sauf à jouer dans les modes de difficulté les plus exigeants.

Chaque mission est précédé d’un briefing qui se charge de lister les objectifs, lesquels sont rarement plus complexes que ceux des opus parus sur bornes d’arcade : dans les faits, il s’agit toujours de détruire quelque chose, qu’il s’agisse de chasseurs, de bombardiers, d’avions de ravitaillement ou d’objectifs au sol (plus quelques navires).

Les deux seules armes disponibles étant un canon doté d’une très généreuse réserve de munitions et des missiles fournis, là aussi, en quantités totalement irréalistes (imaginez à quoi ressemblerait un jet avec quarante ogives sous chaque aile…), il n’y a donc ni bombes, ni projectiles guidés, ni contremesures – le cœur du jeu sera du bon gros dogfight à l’ancienne livré à des vitesses ne correspondant pas du tout à celle des appareils supersoniques engagés. On est face à de la « simulaction » assumée, ce qui signifie qu’il n’y a toujours ni décollage, ni atterrissage, ni ravitaillement – ni rien de ce qui menacerait dangereusement de ressembler à un temps mort de plus de trente secondes, ce qui fait précisément le charme de ce type de programme. Tout juste pourra-t-on afficher un radar avec le bouton , changer de vue avec Select, ou bien freiner ou activer la postcombustion avec les deux boutons de tranche – autant dire l’essentiel, et c’est très bien comme ça.

Chaque mission terminée permet d’encaisser des gains suffisamment colossaux pour que votre modeste pilote puisse carrément se payer un ou plusieurs nouveaux avions qui iront rejoindre les autres dans son hangar personnel. Chaque appareil a bien évidemment des caractéristiques spécifiques – certains sont même furtifs, ce qui n’a en fait pas grand effet une fois en jeu – mais le joueur n’a en revanche absolument aucune prise sur l’équipement : il n’y a qu’un seul type de canon, un seul type de missile et basta.

Et vu que le modèle de vol est quand même assez primitif, on ne peut pas dire qu’on ait besoin d’adapter sa façon de piloter d’un appareil à l’autre. Les missions, qui ne dépassent qu’occasionnellement les dix minutes, sont de toute façon très basiques, comme on l’a vu ; mais on peut néanmoins apprécier le fait que le programme ajoute quelques subtilités au fil de la campagne, comme la présence (facultative) d’un ailier à payer de votre poche en lui dictant à l’avance son comportement, ou bien des objectifs plus ambitieux (raser un pont suspendu, s’attaquer à une forteresse volante) ou plus originaux (voler en rase-motte au fond d’un canyon). Le défi est mesuré, le seul moyen d’éviter les tirs adverses est généralement de gesticuler en modifiant sa vitesse, et 95% des affrontements se résoudront à l’aide de vos missiles à tête chercheuse, le recours au canon étant le plus souvent fondamentalement inutile. Bref, c’est de l’arcade délayée avec quelques épices pour relever le plat, mais pas grand chose de plus que la borne d’Air Combat 22 en moins beau et avec beaucoup plus de contenu.

En dépit de la présence d’un sympathique mode deux joueurs en écran splitté (uniquement compétitif, certes, mais c’est toujours un excellent moyen pour décider qui va faire la vaisselle), l’expérience ne sera pas nécessairement du goût de tout le monde. En cause : une 3D pas très impressionnante (il n’y a pas grand chose à voir en dépit d’une louable variété dans les environnements et la distance d’affichage n’est pas extraordinaire), une vitesse poussive (surtout dans la version PAL), et une certaine lourdeur dans le maniement qui donne plus l’impression de piloter des biplans de la première guerre au ralenti que des jets lancés dans des combats tournoyants à pleine vitesse.

Les joueurs les plus méfiants ou les plus pressés pourront donc être tentés d’aller voir directement les épisodes ultérieurs en fonction de leur degré d’attachement au rétrogaming ; néanmoins, même si l’action est moins viscérale et un tout petit peu moins efficace que sur la borne (où il n’y avait, pour le coup, vraiment aucune lenteur), on se surprend à prendre un plaisir véritable à enchaîner des missions rapides aux mécanismes simples – sans doute pas pendant des mois ni même des semaines, mais qu’importe. L’expérience manque encore d’un poil de profondeur, d’un soupçon de défi et d’une bonne dose de nervosité, mais elle fournit néanmoins les bases essentielles pour donner envie de découvrir ce qu’offriront les autres épisodes à sa suite. Et puisque cet envie a manifestement survécu plus de trois décennies avec une quinzaine d’opus commercialisés depuis lors, c’est qu’elle devait bien avoir visé au moins un peu dans le mille, non ?

Vidéo – La première mission du jeu :

NOTE FINALE : 15/20

Pour ses débuts sur console, la licence Ace Combat accomplit déjà l'essentiel de ce qui sera amené à faire sa renommée : une jouabilité arcade assumée, une action accessible, un réalisme aux abonnés absents et juste ce qu'il faut de variété pour avoir envie de relancer une mission. Air Combat ne brille peut-être dans aucun domaine en particulier – 3D pas très impressionnante, nervosité mesurée, profondeur absente – mais tous les éléments sont déjà en place pour se surprendre à se pencher sur son siège en attaquant un pont suspendu ou en volant en rase-motte dans un canyon. Rien de fondamentalement neuf – on pense souvent à Strike Commander ou à Comanche : Maximum Overkill – mais les joueurs n'ayant jamais eu envie de compulser 200 pages de manuel pour se lancer dans un simulateur de vol trouveront déjà tout ce qu'il faut pour s'amuser pendant quelques heures, et c'est très bien comme ça.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une réalisation assez sommaire avec une distance d'affichage limitée et très peu de détails au sol
– Une jouabilité « arcade » qui manque rapidement de profondeur
– Une campagne à mener d'une traite sans aucun moyen de sauvegarde

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Air Combat sur un écran cathodique :

Air Combat 22

Développeur : Namco Limited
Éditeur : Namco Limited
Testé sur : Arcade

La série Ace Combat (jusqu’à 2000) :

  1. Air Combat (Arcade) (1993)
  2. Air Combat 22 (1995)
  3. Air Combat (PlayStation) (1995)
  4. Ace Combat 2 (1997)
  5. Ace Combat 3 : Electrosphere (1999)

Version Arcade

Date de sortie : Mars 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Borne
Contrôleurs : Un manche à balai avec deux gâchettes, une manette des gaz
Version testée : Version japonaise
Hardware : Namco System 22
Processeurs : Motorola MC68EC020 24,576MHz ; Texas Instruments TMS32025 40MHz (x2) ; Mitsubishi M37710S4 16,384MHz
Son : Haut-parleur (x3) ; Namco C352 24,576MHz ; 3 canaux
Vidéo : 640 x 480 (H) 59.904060 Hz

Note : L’émulation du Namco System 22 étant encore imparfaite au moment du test, il est possible que les captures d’écran ne correspondent pas avec exactitude au rendu de la borne.

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quand il s’agit de piloter (virtuellement) des avions de chasse, il y a deux écoles.

La première, c’est de penser que le véritable aspect grisant de la chose, c’est précisément son réalisme. Quitte à avoir raté une magnifique carrière de pilote pour cause de myopie, rien ne vaut la revanche de consacrer quarante-cinq heures à se former sur Flight Simulator histoire de savoir faire la différence entre un altimètre et l’autoradio (« Quelle est votre altitude ? – Hmmm, je dirais RMC ») et de prouver au monde que si on nous avait laissé notre chance, rien ne nous aurait empêché de jouer les Tom Cruise dans Top Gun. Et puis il y a la deuxième, à savoir se dire que ce qui demande du travail cesse par définition d’être du loisir, et que c’est fondamentalement au moins aussi intéressant de se débarrasser de toutes les contingences techniques pour nous laisser nous livrer à l’essentiel : jouer à piou-piou avec un manche à balai pendant cinq minutes avant de retourner bosser, parce que c’est tout le temps que ça mérite qu’on y consacre.

Curieusement, après avoir été un véritable pionnier dans le domaine de la deuxième catégorie avec les deux After Burner, SEGA aura semblé quelque peu avoir lâché le concept. Il faut dire que des bornes comme G-LOC : Air Battle et Strike Fighter, en plus d’avoir connu un rendement commercial sans commune mesure avec celles des deux références évoquées plus haut, commençaient à trahir un certain manque d’idées, pour ne pas dire une impasse absolue en termes de technique comme de game design.

À tel point que, surprise, en 1993 c’est bel et bien le grand rival Namco qui semblait avoir repris le filon – et sans opposition, qui plus est – avec Air Combat (et si jamais vous vous demandez pourquoi la borne n’est pas encore testée sur le site, la réponse est simple : l’émulation du System 21 est encore trop lacunaire pour permettre un test), point de départ pas forcément très connu d’une licence qui se porte encore très bien de nos jours, mais désormais sous le nom d’Ace Combat. Et au moment de lui donner sa première suite, en 1995 – trois mois à peine avant qu’un autre opus ne débarque sur PlayStation –, Namco l’aura logiquement intitulé… Air Combat 22. Non, ce n’est pas une coquille, juste une façon d’indiquer que la borne tourne sur le successeur du System 21, le System 22. Ah, vous voyez que quand on l’explique, c’est parfaitement logique.

Par essence, Air Combat 22 ne cherche d’ailleurs pas vraiment à être beaucoup plus que la mise à jour du précédent opus. Le menu est assez simple : trois jets qui se pilotent peu ou prou de la même manière (un F14 Tomcat, un F22 Raptor et un Su-27), une même mission déclinée en deux modes de difficulté (les deux premiers modes visibles sur le menu correspondant au fait d’afficher ou non des explications pendant la partie), un manche à balai, une manette des gaz, et à vous le plaisir de conquérir les cieux.

Oh, et au cas où les cinq grosses minutes nécessaires à compléter le jeu vous laisseraient sur votre faim, un mode « Dogfight » permettra d’affronter des appareils ennemis de plus en plus doués les uns à la suite des autres sans avoir à s’embarrasser avec une bribe de scénarisation ou de mise en scène – et uniquement en vue subjective, étrangement, alors que le mode principal, lui, se joue à la troisième personne. On pourra donc regretter qu’un simple bouton ne permette pas de basculer à la volée d’une vue à l’autre, comme cela aura vraisemblablement été assez simple à intégrer.

L’action en elle-même n’est pas plus complexe, et c’est à la fois ce qui fait sa grande force et celle de toute la licence à sa suite. Fondamentalement, vous prenez les commandes avec un avion déjà en vol (aucun décollage ou atterrissage à gérer) et vous devez détruire des vagues d’appareils ennemis dans un laps de temps donné, à l’aide de votre canon et de vos missiles à tête chercheuse, à munitions limitées dans les deux cas.

Il n’y a pas de cibles au sol à l’exception d’un porte-avion ennemi qui servira d’objectif lors de la dernière phase du mode principal, rien qui ressemble à de la DCA ou à des batteries sol-air, et l’essentiel du jeu se résumera donc à manœuvrer pour se placer dans les six heures des chasseurs et bombardiers adverses afin d’en faire des cibles faciles – en jouant avec votre vitesse pour s’efforcer de rester assez près pour qu’ils n’aient pas le temps de déployer des contre-mesures pour stopper vos missiles. Certes, votre propre chasseur ne bénéficie pas de cette capacité, mais il est de toute façon particulièrement solide, et puis hé, ça doit quand même être difficile de trouver de la place pour ranger les contre-mesures alors qu’il a déjà huit missiles sous chaque aile.

En l’état, tout est dit : on participe à la forme la plus simplifiée et la plus viscérale des dogfights, et ça fonctionne très bien. La jouabilité arcade est parfaite, suffisamment réaliste pour qu’on se sente bien plus aux commandes que dans After Burner sans jamais avoir à se soucier de tracasseries comme le voile noir, le voile rouge, ou même le sol ou la gravité la plupart du temps.

La 3D de pointe de 1995 n’a pas trop mal vieilli, même si la distance d’affichage est assez limitée et qu’il n’y a pas grand chose à voir au sol ; c’est lisible et parfaitement fluide, et on se prend au jeu à tous les niveaux, y compris lors de la phase bonus proposant de se ravitailler au vol en échange de secondes supplémentaires. Seul petit défaut : aucun moyen de consulter l’état de son avion tandis qu’il se fait canarder – ça n’aurait quand même pas été compliqué de glisser une jauge de vie quelque part. Est-ce réellement amusant plus de dix minutes ? Sans doute pas, faute de profondeur, de contenu et de renouvellement – la saga se montrerait un peu plus ambitieuse à ce niveau sur consoles – mais il faut bien reconnaître que pendant ces dix minutes, on s’amuse au moins autant que pendant n’importe quelle mission de n’importe quel épisode de Wing Commander. C’est de la « simulaction » taillée sur mesure pour l’arcade, et comme tout ce qui est bon, ça l’est parce que c’est suffisamment court et intense pour ne pas avoir le temps de devenir ennuyeux. Autant dire une très bonne affaire, en échange de quelques pièces.

Note : Bien que la borne ait apparemment été commercialisée aux États-Unis, la seule version actuellement disponible dans des conditions d’émulation correctes est la version japonaise. Très honnêtement, cela ne devrait pas beaucoup vous gêner pour trouver quelle gâchette correspond au canon et laquelle correspond aux missiles.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 15,5/20

Décidément toujours dans les bons coups, Namco démontrait une nouvelle fois en 1995 qu'en termes de simulateur de vol « allégés » à destination de l'arcade, la firme n'avait aucun complexe à nourrir face aux meilleures bornes de SEGA. Avec un très bon équilibre entre le fun et l'immédiateté de l'arcade et juste ce qu'il faut de réalisme pour y croire et se sentir aux commandes, Air Combat 22 capitalise à merveille sur les bases de son prédécesseur tout en offrant une réalisation remise à jour et qui a plutôt bien vieilli. Dommage que le contenu se limite à plus ou moins la même (courte) mission en deux niveaux de difficulté et à un mode « gunfight » qui aurait été plus divertissant contre un autre joueur, car pour l'essentiel les dix minutes qu'on y consacre donnent envie d'y revenir pour y passer beaucoup plus de temps. De la « simulaction » efficace comme on l'aime.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un contenu malingre, même pour une borne d'arcade
– Vue imposée, alors que les deux modes étaient disponibles et qu'on aurait facilement pu passer de l'un à l'autre avec un bouton dédié
– Aucun moyen de consulter les dégâts subis par l'avion

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Air Combat 22 sur une borne d’arcade :

Das Boot : German U-Boat Simulation

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Testé sur : PC (DOS)Amiga
Disponible sur : Windows
Présent dans la compilation : Megafortress / Das Boot / Aces of the Great War (1992 – PC (DOS))
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on aura eu l’occasion de le mentionner par ailleurs (au hasard ici), la toute fin des années 80 aura correspondu à une timide tentative de démocratisation de la part d’un genre extrêmement exigeant par nature : la simulation. Accolade avait contribué à montrer la voie, mais celle-ci était finalement tracée d’avance, selon le bon vieux précepte qui veut que « toucher un public plus large » = « augmenter les chances de vendre le jeu » = « brouzoufs » – les simulateurs « allégés » à la Ace of Aces ne constituaient après tout pas une nouveauté en soi, disons simplement que l’on pouvait attribuer leur simplicité davantage à des contraintes techniques qu’à un réel choix de game design.

Mais tiens, puisque l’on évoque Ace of Aces, figurez-vous que le jeu avait justement déjà été distribué par Accolade, et que son équipe de développement se nommait alors Artech. Quatre ans plus tard, celle-ci n’avait visiblement pas gonflé que son nom pour devenir Artech Digital Entertainments, mais aussi ses effectifs puisqu’en parallèle de Blue Max, elle travaillait également sur un autre type de simulateur, lui aussi très en vogue à l’époque : le jeu de sous-marins. Terrain plus miné qu’on pourrait le penser, puisque déjà largement occupé par des références comme Silent Service II ou Wolf Pack – d’ailleurs sortis eux aussi en 1990 –, élevant de fait le seuil d’exigence de joueurs pas forcément décidés à acheter trois simulateurs d’U-Boot en un an. Alors histoire d’augmenter les chances, autant en profiter pour avoir recours à un licence célèbre ; de toute évidence, celle d’À la poursuite d’Octobre Rouge était déjà prise, alors il aura fallu aller chercher un peu plus loin avec le long-métrage Le Bateau (titre original : Das Boot) de Wolfgang Petersen, lui-même tiré du livre de Lothar-Günther Buchheim romançant des missions que l’auteur avait vécu pendant la seconde guerre mondiale. Et voilà comment on se retrouve avec Das Boot, un jeu… qui entretient en fait pour seul lien avec le film et le roman de se dérouler dans un sous-marin.

En vertu de la philosophie visant à offrir aux joueurs impatients un peu plus d’action effrénée et un peu moins de réglages techniques pointus proprement incompréhensibles aux malheureux n’ayant pas encore compulsé les 350 pages de manuel écrit petit, le titre d’Artech commence par proposer de courtes missions d’entraînement qui ont l’avantage de faire également office de mini-jeux pour les capitaines pressés n’ayant pas envie d’écumer les océans pendant un quart d’heure à la recherche d’un convoi allié (nous aurons l’occasion d’y revenir).

On pourra donc apprécier ici la variété des séquences : tir sur avions de chasse et bombardiers depuis le canon anti-aérien placé sur le pont, tir sur cibles marines avec un canon lourd, tir de torpille depuis la surface ou sous l’eau, en visant alors avec le périscope plutôt qu’avec les jumelles, combat sous-marin entre submersibles, champ de mines, phase d’évitement de charges explosives, etc. De quoi constater que la jouabilité de ces scènes est très simple – on vise avec les flèches, on tire avec Espace –, que la 3D est particulièrement efficace pour un titre de 1990 (les effets volumétriques visibles sous l’eau, particulièrement novateurs pour la période, avaient décroché la mâchoire de la presse de l’époque), et que certaines d’entre elles privilégient d’ailleurs la poudre aux yeux au détriment de la profondeur (sans mauvais jeu de mot) au point de s’avérer très limitées, en particulier du côté des phases sous-marines. Mais au moins, le ton est donné : les joueurs qui voudraient de l’action pourront en avoir, et ils pourront même en avoir tout de suite.

Cependant, comme on peut s’en douter, le principe même de la simulation de sous-marin ne repose pas exactement, d’ordinaire, sur le fait d’aller canarder des avions ou des destroyers depuis le pont de son submersible. Das Boot propose donc fort logiquement cinq missions plus conventionnelles et surtout beaucoup plus consistantes, aux objectifs relativement variés mais qui tourneront principalement autour du fait de patrouiller, de repérer des convois et leur escorte et de s’efforcer de couler le tout avant de repartir en un seul morceau. L’occasion de configurer de nombreux réglages pour s’approcher (ou non) d’une vraie simulation historique, et de goûter enfin à tous les postes du sous-marin, dans un mode qui devient alors immédiatement plus complexe.

Un exemple valant mieux qu’un long discours, imaginons un début de mission typique vous plaçant au milieu de l’océan. Même si vous avez déjà reçu des objectifs en prélude du démarrage, il pourrait être intéressant de commencer par passer par la station radio, d’où vous pourrez recevoir les messages du commandement – à condition de les passer par un des trois systèmes de décryptage avant de les comprendre, ce qui ne nécessite jamais que d’appuyer sur la touche correspondante. Vous serez d’ailleurs régulièrement invité à faire des rapports ou à solliciter des ordres additionnels, ce qui nécessitera donc d’émettre à votre tour – en n’oubliant pas, naturellement, d’opter vous aussi pour une transmission cryptée, sans quoi vous risqueriez rapidement de recevoir un message goguenard de la flotte ennemie vous remerciant de communiquer votre position en clair avant d’envoyer son aviation se débarrasser de vous ! Ceci dit, il pourra également arriver que vous interceptiez une communication qui ne vous était pas destinée, et que vous parveniez à votre tour à la décrypter pour obtenir des informations cruciales sur les navires adverses – bref, un système original assez intelligemment intégré sans se révéler inutilement opaque.

On pourra d’ailleurs regretter que l’interface, dans son ensemble, échoue à maintenir ce seuil d’accessibilité : en effet, si tous les postes et les raccourcis permettant d’y accéder sont clairement affichés en permanence au bas de l’écran, une large partie des fonctions indispensables, elle, n’est accessible que via des raccourcis qui ne sont indiqués nulle part ailleurs que dans le manuel.

Imaginons par exemple que vous ayez envie de repérer un convoi ennemi, ce qui est quand même la base : on se doute que se contenter de rester à la surface en utilisant les jumelles n’est pas exactement la méthode optimale, mais c’est la seule accessible par le menu. Pour toutes les autres, il va falloir faire chauffer le clavier, qu’il s’agisse d’utiliser l’hydrophone (Alt + H), le détecteur radio (Alt + R), le radar de détection (Alt + B) ou le radar aérien (Alt + O). On notera également des fonctions permettant de gagner un temps considérable dans le feu de l’action, comme celle vous permettant de plonger directement à la profondeur idéale pour utiliser le périscope (Alt + P), celle permettant de remonter à la surface (Alt + S), ou encore celle permettant de pivoter le sous-marin dans la direction que vous êtes en train d’observer (Alt + F). Sans oublier celle qui pourra vous éviter de dégommer bêtement un navire de votre propre camp en prenant le temps de demander à vos collègues d’identifier une cible (Alt +I).

Ce recours systématique à des raccourcis à noter ou à apprendre par cœur est d’autant plus incohérent que, en dépit de ses meilleurs efforts, Das Boot n’est pas vraiment un titre réaliste. Déjà parce qu’il est difficile de penser que la marine allemande ait suffisamment confiance en ses U-Boots pour envoyer un seul d’entre eux dégommer non seulement un convoi, mais aussi son escorte de destroyers, un porte-avions au milieu, et même toute une division aérienne simplement avec deux canons et une vingtaine de torpilles !

On pourra d’ailleurs regretter que tout l’aspect de chasse « en meute » introduit par Wolf Pack n’ait pas fait le trajet jusqu’ici : votre sous-marin devra toujours tout faire tout seul, même quand il y a des alliés dans les parages, ce qui est aussi grotesque qu’irritant. Ensuite, si on comprend que l’idée est précisément de nous faire incarner tous les membres d’équipage, la valse permanente d’un poste à l’autre pour accéder à des fonctions qui ne sont accessibles que via un menu en particulier est aussi contraignante qu’elle est contre-intuitive : pourquoi ne peut-on désigner le cap et la vitesse du submersible que lorsqu’on est sur le pont et en surface, par exemple ? Quel est l’intérêt de nous doter de cartes si celles-ci ne montrent, quatre fois sur cinq, qu’une immense zone bleue ? Pourquoi doter tout le jeu d’un pendant arcade assumé avec des scènes d’action irréalistes et des armes qui ne s’enraillent jamais… mais en limitant les munitions, obligeant le joueur à passer dix bonnes minutes à se désengager et à parcourir la moitié de la carte afin d’aller rejoindre un navire de ravitaillement avant de repasser dix minutes à retourner sur place pour finir le travail ? Bref, est-on face à une simulation, à une « simulaction », à un jeu d’action maladroitement délayé pour se faire passer pour une simulation ? La question reste ouverte.

Elle est d’autant plus pertinente que Das Boot offre réellement de bons moments : il peut en effet être particulièrement satisfaisant de traquer les communications radio adverses pour essayer de localiser un convoi, d’en identifier les premiers éléments après une observation aux jumelles, et de passer en plongée pour faire pleuvoir la mort avec des torpilles d’autant plus faciles à tirer qu’il n’est même pas nécessaire de pivoter le sous-marin dans la direction visée au périscope – et même si c’était le cas, la commande Alt + F fait tourner instantanément votre submersible, comme s’il se téléportait. Mais c’est comme si, à trop hésiter entre la simulation et l’arcade, le jeu ne savait jamais réellement où placer ses curseurs et proposait au final un jeu d’action avec le rythme d’un simulateur – alors qu’il aurait mieux valu faire exactement l’inverse.

Après de longues minutes de traque, les affrontements se limitent à des combats brouillons et totalement irréalistes, et si on est souvent très heureux de couler une dizaine de navires et d’abattre autant d’avions, l’idée de passer dix minutes à glander pour ravitailler risque de pousser bien des joueurs à écourter une mission sitôt le premier assaut fini. Les scènes de tir sur avion faisant davantage penser, pour leur part, à une sorte de brouillon primitif de titres à la Incoming, on se retrouve au final avec une expérience déséquilibrée qui se montre agréable à jouer par séquences mais qui échoue à l’être sur la durée faute de cohésion dans le rythme – le type même de logiciel qu’on prend plaisir à lancer dix minutes de temps à autres, mais dont on ne finit jamais la moindre mission en dépit d’un contenu objectivement rachitique. Les amateurs de simulation lui préfèreront les références évoquées plus tôt, et les amateurs d’action risquent d’en faire le tour en quelques minutes ; ce qu’on appelle un entre-deux maladroit, qui explique peut-être que le titre soit si peu cité de nos jours. Comme quoi, ce n’est pas si facile que cela, en fin de compte, de viser un large public…

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


Tout comme Blue Max : Aces of the Great War, développé par le même studio à la même période, Das Boot : German U-Boat Simulation entend entraîner l'austère simulation de sous-marin vers des eaux un peu plus accessibles au commun des mortels. Il n'y parvient certes qu'en partie, tanguant trop souvent entre des séquences de tir trop « arcade » et des séquences de navigation trop longues inutilement alourdies de changements de poste inutiles sans jamais s'approcher de la profondeur d'un Wolf Pack ou d'un Silent Service II, mais cela ne veut pas dire que l'expérience est désagréable – disons juste que l'aspect « simulaction » irréaliste se prête finalement assez mal à une chasse reposant sur la patience et sur l'observation silencieuse, et que c'est précisément l'aspect simplifié du jeu qui finit rapidement par composer sa principale limite. Il y a malgré tout largement matière à passer quelques heures à tenter de vaincre les cinq missions du programme, et même à être heureux d'y revenir de temps à autres, mais au final, il manque encore un petit quelque chose au titre pour réellement s'approcher de la cour des grands.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Énormément de raccourcis à mémoriser pour espérer accéder à des fonctions essentielles
– Des séquences d'action très limitées quel que soit le niveau de réalisme...
– ...et dans l'ensemble, un aspect « simulation » qui peine souvent à être crédible
– Seulement cinq missions
– Une gestion très fastidieuse du ravitaillement

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Das Boot sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« La simulation s’avère […] assez simple, peu d’options étant accessibles aux différents postes de votre U-Boot, ce qui risque de décevoir ceux qui sont passionnés par le réalisme ou la complexité des simulateurs. Ceux qui préfèrent l’action vont par contre se régaler ! »

Didier Latil, Génération 4 n°27, novembre 1990, 85%

« Les effets de couleur de ces vues sous-marines sont extraordinaires. On distingue à peine la silhouette du submersible ennemi qui s’approche de vous, prêt à larguer quelques salves. Toute la rédaction est restée muette d’admiration devant ce plan graphique… C’est dire ! […] Das Boot est un programme que vous devez posséder, ne serait-ce que pour ses graphismes et son animation, pour l’ambiance qu’il développe, une grande première sur PC. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc. (Amérique du Nord) – Mindscape (UK) Limited (Europe)
Date de sortie : Mai 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme Blue Max, Das Boot aura été porté sur Amiga quelques mois après la sortie de la version PC, et comme Blue Max, il aura hélas laissé quelques plumes au passage. Pas du côté du contenu, bien sûr – ce qui est une bonne chose, car celui-ci n’était déjà pas énorme à la base – mais encore une fois, les graphismes et surtout le framerate souffrent beaucoup du passage d’un hardware à l’autre.

La palette de couleurs a bien évidemment rétréci au lavage ; ce n’est pas hideux, mais disons simplement que les dégradés du ciel ne font pas vraiment illusion, et que les effets de profondeur qui avaient tant décroché la mâchoire des journalistes de Tilt ne sont plus vraiment au programme ici. Ce ne serait pas une grosse perte si le tout n’affichait pas une nouvelle fois un framerate dépassant péniblement les cinq images par seconde pendant l’essentiel de la partie sur une configuration d’époque : bon courage pour parvenir à toucher un avion dans cette version. C’est fort heureusement moins pénalisant au moment de viser un navire ou un sous-marin avec une torpille, ces séquences se jouant rarement au dixième de seconde près, mais on dira simplement que cela ne rend pas service à un jeu qui étalait déjà quelques problèmes de rythme sur PC. Sans être idéales, les choses sont une nouvelle fois meilleures sur un Amiga 1200, où on peut alors espérer approcher les quinze images par seconde dans le feu de l’action. Rien de dramatique, mais le jeu reste indéniablement plus agréable à découvrir sur PC.

NOTE FINALE : 12/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

Comme son alter ego Aces of the Great War, Das Boot souffre sur Amiga d’un moteur un peu trop puissant pour le hardware de l’époque, qui rend les parties « arcade » plus fastidieuses qu’amusantes. Si les choses s’améliorent sur un Amiga 1200, la réalisation graphique n’en reste pas moins inférieure, et dans l’ensemble on n’a tout simplement aucune raison de lancer ce portage dès l’instant où on a accès à la version PC.

Blue Max : Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Titre alternatif : Aces of the Great War (Amiga, Atari ST)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari ST
Disponible sur : Windows
En vente sur : GOG.com (Windows)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x5) et 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr
*640ko requis pour les modes VGA et Tandy

Tout le monde aimerait savoir voler, mais tout le monde n’a pas nécessairement l’envie – sans même parler du temps ou des moyens – de consacrer des semaines, voire des mois ou des années, à apprendre à piloter un avion. De la même façon, ce n’est pas parce qu’on s’amuse sur un jeu de course qu’on a nécessairement envie de le complexifier au maximum en jouant avec une boîte manuelle et toutes les options de réalisme activées. Parfois, moins, c’est mieux.

Cela peut sembler évident aujourd’hui ou des notions comme l’accessibilité et le paramétrage de l’expérience sont au centre de l’expérience vidéoludique – on parle même de « casual gaming » – mais mine de rien, il aura pratiquement fallu attendre la fin des années 80 pour qu’un genre alors déjà « de niche », en l’occurrence celui de la simulation, commence à réaliser quelque chose qui avait jusqu’alors été à l’exact opposé de sa philosophie : « réaliste » ne signifie pas automatiquement « amusant ».

La société Accolade, notamment, aura commencé à se faire un nom via des Steel Thunder ou des Gunboat en commençant à étrenner un concept qu’on aura rapidement qualifié de « simulaction » : des titres où l’on veut bien piloter des jets, des hélicoptères, des tanks ou des bateaux, mais en se concentrant sur la partie fun (comprendre : celle où on tire sur tout ce qui bouge) sans avoir au préalable à consulter deux-cents pages de manuel pour avoir une chance de réussir péniblement un décollage au bout de quinze tentatives pour autant d’accidents mortels. L’idée n’aura pas tardé à faire du chemin : programmer un jeu moins complexe tout en visant un public plus large, cela ressemble fort à du gagnant-gagnant. Et les bonnes idées volant généralement par escadrilles, c’est sans doute totalement par hasard que MicroProse et Three-Sixty auront tous les deux publié le même mois deux programmes au pitch exactement similaire, à savoir une simulaction de combats aériens de la première guerre mondiale. Nous avons déjà eu l’occasion de voir ici Knights of the Sky, donc autant se pencher à présent sur Blue Max : Aces of the Great War.

Le jeu qui nous intéresse aujourd’hui va donc graviter autour de ce que l’on a tendance à retenir de l’aviation militaire en 1917, à savoir les dogfights endiablés menés par des biplans, des triplans et autres avions en bois, à une ère plus simple où il fallait compter sur de bons yeux plutôt que sur un radar et où le génie humain était déjà parvenu à concevoir une mitrailleuse synchronisée sur la vitesse de rotation des pales d’une hélice pour pouvoir tirer à travers sans casse.

Du côté du menu, Blue Max semble en tous cas ne commettre aucune faute : possibilité d’incarner les deux camps (même si parler d’«Alliés » et d’«Axe » pendant la première guerre mondiale comme le fait le jeu est pour le coup totalement anachronique), huit appareils pilotables au total (quatre pour la Triple-Alliance, quatre pour la Triple-Entente) avec leurs caractéristiques propres, plusieurs modes d’entraînement allant du simple vol libre au combat simulé pour se familiariser avec les commandes – lesquelles sont de toute façon très simples, et quasi-intégralement résumées sur un écran accessible en vol via la touche F9 – sans oublier les trois indispensables campagnes qui seront à accomplir sans faute, puisqu’en cas de décès votre pilote est automatiquement effacé (sauf si vous avez eu la bonne idée de faire une copie de sauvegarde du fichier au préalable, évidemment).

Plus surprenant : la présence d’un mode « stratégique » qui consiste… en un combat aérien au tour par tour, où les deux joueurs déplace leur avion d’hexagone en hexagone tout en paramétrant sa direction et son altitude. Un mode un peu gadget et manquant de profondeur, surtout parce qu’il reste limité à du un-contre-un (pourquoi ne pas diriger directement toute une escadre ?), mais on appréciera l’idée. Oh, et tant qu’à faire, n’oublions pas ce petit « plus » qui fait toujours plaisir : un mode deux joueurs en écran splitté, jouable aussi bien en compétitif qu’en coopératif. Oui, si le cœur vous en dit, vous pourrez tout à fait mener toute une campagne avec un ami à vos côtés, sans même avoir à dégainer un modem ou un câble série, et mine de rien cela restait assez exceptionnel en 1990.

Une fois en vol – littéralement, puisque chaque mission du jeu débute directement dans les airs, le décollage n’étant jamais géré – on se retrouve face à un modèle simple mais efficace : le clavier, le joystick ou la souris pour déplacer l’appareil et faire feu, une gestion (facultative) du vent et des nuages, des munitions limitées mais au nombre suffisamment généreux pour qu’il faille vraiment le faire exprès pour se retrouver à court, des informations essentielles (altitude, vitesse, dégâts encaissés) clairement affichées sans avoir à déchiffrer des jauges ou des cadrans, et vous voilà prêt à faire face aux forces adverses.

Seules les différentes vues et les actions de bombarder et de prendre une photo seront obligatoirement à aller chercher sur le clavier, et il ne sera pas question de compter ici sur des dégâts réalistes impactant le modèle de vol ni même sur des mitrailleuses qui s’enraillent : on est face à un titre très arcade, et qui fonctionne à ce niveau plutôt mieux que Knights of the Sky : pas besoin ici de composer avec la vitesse des balles ni de devoir lutter pendant dix minutes pour parvenir à atteindre miraculeusement un avion de deux pixels qui virevolte comme un fou : les adversaires ont tendance à voler tout droit jusqu’à vous et les combats à être assez expéditifs dès l’instant où un ennemi est au milieu de votre viseur. Ce n’est peut-être pas très réaliste, mais bon sang, on a aussi le droit de trouver cela plus amusant sans se sentir coupable. En revanche, jouabilité simplifiée ou pas, une mission ne pourra se terminer qu’en étant prêt à poser son avion en rase-campagne – et du bon côté des lignes, lesquelles ne sont pas toujours faciles à identifier. La manœuvre demande un peu de maîtrise et de temps, ce qui est toujours moins amusant au bout de la quinzième fois (et personne n’aime planter sa campagne et perdre son pilote pour s’être posé un peu trop vite au terme d’une mission réussie), mais c’est bien là la seule concession au réalisme d’un titre qui offre ce qu’on était venu chercher : le plaisir de faire « tacatacatac » sur des vieux coucous en pirouettant follement dans les airs.

Histoire d’introduire un peu de variété, le programme est organisé autour de cinq types de missions : les patrouilles (abattre au moins un appareil ennemi), les missions de défense (empêcher un objectif allié d’être détruit), les bombardements (raser un bâtiment adverse à l’aide d’une bombe à lâcher minutieusement à la main), les reconnaissances (prendre un bâtiment en photo) et enfin les missions demandant de détruire un ballon adverse.

Le jeu ne comporte qu’une seule carte par mode de jeu (ce qui signifie que chaque campagne se déroule sur une seule et unique carte) ; celles-ci ne sont ni très variées ni très différenciables, mais le moteur de jeu a l’avantage de tourner comme un charme et de proposer une action fluide et des affrontements nerveux dès l’instant où l’ordinateur est équipé d’un processeur correct – ce qui, dans un XXIe siècle déjà bien entamé, ne devrait pas exactement être un problème à trouver. En résulte une expérience qui fournit exactement ce qu’on pouvait espérer… avec ses limites, malgré tout. Avec une jouabilité aussi basique, on se doute qu’il ne faut pas des semaines pour faire le tour de ce que le jeu a à offrir, et même si on peut se fixer l’objectif de boucler les trois campagnes avec les deux camps, il ne s’agit jamais que de reproduire les cinq mêmes types de missions sur les trois mêmes cartes. La possibilité de jouer à deux sur un même écran est fort heureusement très appréciable – aucun as de la grande guerre n’étant aussi jouissif à abattre que le petit frère ou le copain à grande gueule – et aide à donner une bonne raison de ressortir le titre de temps à autres histoire de décider qui va se coltiner la vaisselle ce soir. Rien de très marquant ni de révolutionnaire, mais quand on n’a pas envie de lutter pendant des semaines pour parvenir à dompter une simulation ultra-pointue, c’est vrai que ça fait toujours plaisir de pouvoir compter sur des titres à la Blue Max.

Vidéo – La première mission du jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20


En choisissant de s'éloigner de la simulation pure pour assumer un tournant plus arcade, exactement comme un certain Knights of the Sky d'ailleurs paru au même moment, Blue Max : Aces of the Great War aura su préserver l'essentiel de ce qui fait l'intérêt des dogfights de la première guerre sans les réserver aux joueurs les plus patients et les plus adroits. Le résultat, s'il manque fatalement de profondeur et de variété, est néanmoins plutôt plus convaincant que ce qu'offre son concurrent direct, surtout grâce à la possibilité bienvenue de jouer à deux en écran splitté pour affronter un ami, pour mener une campagne en coopératif, voire même pour s'essayer à un surprenant mode stratégique qui risque cependant de ne pas dépasser le stade de la curiosité. Certes, on fait assez rapidement le tour du programme en dépit des trois campagnes et des deux camps jouables, mais on tient clairement le type de jeu auquel on peut revenir régulièrement pour une partie de cinq minutes sans avoir à déterrer le manuel pour se souvenir comment démarrer le moteur. Une approche qui n'a finalement pas si mal vieilli.


CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des atterrissages qui demanderont un peu de pratique pour éviter de saboter bêtement une mission gagnée...
– ...d'autant plus qu'en cas de crash, le personnage est automatiquement effacé !
– Très peu de moyens d'identifier la position de ses lignes...
– ...surtout quand les seules cartes du jeu sont à aller chercher dans le manuel, lequel n'est même pas fourni avec la version vendue en ligne !
– Un mode stratégique assez gadget

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Blue Max sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Si The Blue Max (sic) ressemble à un simulateur de vol, ce n’est qu’une apparence, car il s’agit en fait d’un shoot-them-up réaliste. Le pilotage est réduit à sa plus simple expression et vous ne contrôlez que la direction, l’altitude et la vitesse de votre appareil. Les différentes missions commencent en vol. Vous n’avez pas le moindre décollage à effectuer, ni aucun atterrissage (NdRA : dans les faits, toutes les missions demandent d’atterrir). Cela fera sans doute grimacer les fans de simulateurs de vol, mais l’action est suffisamment prenante pour compenser cela. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20

Version Amiga
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeurs : Three Sixty Pacific, Inc. – Mindscape International Ltd.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée
*Optimisé pour 1Mo

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Blue Max aura dû attendre quelques mois pour débarquer sur Amiga – perdant au passage une partie de son titre sur la boîte pour mieux la récupérer à l’écran-titre, les grands mystères du marketing. Il hérite pour l’occasion d’une petite animation au lancement absente de la version PC, mais pour le reste, le contenu reste strictement identique (à un détail près : il est ici impossible de définir le niveau de réalisme du pilotage). Graphiquement, on ne peut pas dire que la déperdition soit spectaculaire comparé aux 256 couleurs du VGA – les dégradés sont clairement moins fins et les détails moins nombreux, mais rien de vraiment dramatique. En revanche, vous risquez d’avoir tout loisir d’admirer la différence, car autant vous prévenir : sur un modèle « de base » de type Amiga 500/600/1000, le jeu se traîne au point d’en être à peine jouable. Même avec les détails au minimum, le framerate ne dépasse jamais les huit images par seconde, et en mettant tout à fond, là il ne dépasse carrément plus les quatre ! Heureusement, les choses vont tout de suite mieux sur un Amiga 1200, où on retrouve une action à peu près fluide sans pour autant pouvoir rivaliser avec ce qu’offraient les PC les plus puissants, naturellement. Mais étant donné que l’Amiga 1200 n’existait pas encore à la sortie du jeu, on comprend qu’une partie de la presse n’ait pas été franchement emballé par cette séance diapo qui ne pouvait même pas s’enorgueillir de son réalisme. Si vous n’avez pas un Amiga 1200 ou supérieur, fuyez !

NOTE FINALE : 08,5/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)

L’expérience délivrée par Aces of the Great War sur Amiga dépendra grandement du modèle sur lequel le jeu est lancé : en-dessous d’un Amiga 1200, le framerate risque d’être si bas que le jeu en sera pratiquement injouable. Dans de meilleures conditions, le titre peut se hisser assez près de la version DOS, mais sans le matériel approprié, ce ne sera clairement pas un jeu vers lequel vous diriger. Vous êtes prévenu.

Version Atari ST
Aces of the Great War

Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 1040 ST – RAM : 1Mo
Installation sur disque dur supportée

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Après avoir vu le résultat d’Aces of the Great War sur Amiga, on avait de quoi se montrer inquiet pour l’Atari ST. Malheureusement, et comme on pouvait le craindre, le miracle n’aura pas eu lieu : en dépit du fait que le moteur de jeu n’emploie plus que seize couleurs, le framerate ne côtoie l’acceptable qu’en mettant tous les détails au minimum, et même sous cette forme on est encore très, très loin de l’expérience offerte par la version PC. Pour ne rien arranger, le jeu est donc devenu sensiblement plus moche (équivalent graphiquement parlant à la version EGA), le rendu sonore est inférieur, et l’expérience est empoisonnée de temps de chargement interminables. Bref, même si le programme pouvait encore faire illusion à une époque où on avait l’habitude de jouer à sept images par seconde, le constat est implacable : pour découvrir le jeu, ne commencez clairement pas par là.

NOTE FINALE : 08/20

On peut prendre le problème sous n’importe quel angle, mais la fluidité, ça compte, surtout quand elle impacte aussi dramatiquement la jouabilité. Condamné à se traîner lamentablement dans des décors qui ont perdu beaucoup de leur charme en seize couleurs, Aces of the Great War sur Atari ST se réservera aux joueurs les plus nostalgiques, les plus patients ou les plus masochistes.

M1 Tank Platoon 2

Développeur : MicroProse Software, Inc.
Éditeurs : Interplay Entertainment Corp. – MicroProse Software, Inc.
Titre original : M1 Tank Platoon II (Amérique du Nord)
Titre alternatif : M1 Tank Platoon II : The Definitive Simulation of Modern Ground Warfare (titre avec slogan – Amérique du Nord)
Testé sur : PC (Windows 9x)
Présent au sein des compilations : Modern Warfare Collection (Windows) The M1 Tank Platoon Collection (Windows)
En vente sur : Gog.com (Windows), Steam.com (Windows)

La série M1 Tank Platoon (jusqu’à 2000) :

  1. M1 Tank Platoon (1989)
  2. M1 Tank Platoon 2 (1998)

Version PC (Windows 9x)

Date de sortie : 24 mars 1998
Nombre de joueurs : 1 à 5 (par câble null-modem ou par réseau local) – 1 à 2 (par modem)
Langue : Anglais
Supports : CD-ROM, dématérialisé
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version 1.2 dématérialisée testée sous Windows 10
Configuration minimale : Processeur : Intel Pentium – OS : Windows 95 – RAM : 16Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 4X (600ko/s) – DirectX : 5.0
Configuration graphique : API : Glide – Résolution : 640×480

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

On ne mesure plus forcément aujourd’hui à quel point neuf années représentaient, au XXe siècle, une éternité difficilement concevable en termes vidéoludiques. Pour donner une idée – et pour coller pleinement à notre sujet du jour –, au moment de la sortie de M1 Tank Platoon sur PC, fin 1989, le VGA était encore un standard si marginal qu’on pouvait difficilement le qualifier comme tel, les cartes sons constituaient un luxe réservé à des joueurs particulièrement fortunés, et une configuration de pointe consistait en un ordinateur doté d’un processeur à 12Mhz et doté de 640ko de RAM, lequel coûtait l’équivalent d’un mois de salaire d’un cadre – autant dire que les joueurs capables d’y jouer avec toutes les options graphiques et sonores et les détails à fond dans des conditions décentes ne devaient alors pas se chiffrer en dizaines de milliers.

Neuf ans plus tard, donc, au moment de l’arrivée de M1 Tank Platoon 2, une configuration « moyenne » (et bien moins chère que celle évoquée plus haut) consistait en un Pentium cadencé à 200Mhz avec 32 ou 64Mo de RAM, des capacités sonores infiniment supérieures dès la sortie d’usine et une carte accélératrice 3D capable de rivaliser avec ce qu’affichaient des bornes d’arcade à la pointe de la technologie. Et le jeu en lui-même nécessitait un CD-ROM de 640Mo de données là où son prédécesseur tenait sur une unique disquette 3,5″ d’1,44Mo… Autant dire que les attentes des joueurs, de leur côté, avaient suivi une évolution comparable à celle de leur matériel, que ce soit en termes d’ergonomie, d’accessibilité ou de réalisation, et que cette suite à l’un des meilleurs simulateurs des années 80 allait devoir sortir la grosse artillerie pour ne pas ternir la réputation de son glorieux prédécesseur.

Comme toutes les simulations militaires, M1 Tank Platoon 2 s’ouvre sur deux minutes de vidéos que je qualifierais personnellement d’ « army porn » en vous déballant des images probablement directement récupérées de la guerre du Golfe avec des beaux tanks qui brillent et qui roulent à fond de train, des gros canons qui déchargent, des carcasses et de la fumée (ne manquent que le sang et les larmes) sans rien qui puisse évoquer une bribe de géopolitique – quand on pilote des tanks, c’est quand même avant tout pour détruire des trucs, maintien de la paix ou pas ! Le programme n’a pas changé depuis le premier opus : prendre le contrôle d’un (ou plusieurs) pelotons de quatre tanks M1 Abrams, et le(s) mener à la victoire.

Néanmoins, on commencera par constater que le menu a pris en épaisseur, avec l’inclusion d’un didacticiel très complet couvrant à peu près tous les secteurs du jeu (mais en vous laissant quand même le soin d’aller chercher les touches dans le manuel), des missions solos réparties sur deux fronts (une zone dite « OTAN » qui correspond peu ou prou au même conflit européen que celui du premier opus, et une zone moyen-orientale qui permettra de rejouer l’opération « Tempête du désert » sans le dire), une campagne couvrant les deux zones, et même – nouveauté bienvenue – un mode multijoueur par modem ou en réseau local ! Néanmoins, autant vous prévenir : les standards dans le domaine ayant eu le temps de beaucoup changer en vingt-cinq ans, plus question d’espérer faire fonctionner ce mode avec la version dématérialisée configurée pour tourner sous Windows 7 et supérieur à l’heure actuelle. Vous pourrez d’ailleurs également tirer un trait sur l’accélération graphique : bien que les standards Direct 3D et Glide soient reconnus (et fonctionnels, ironiquement), la partie plantera systématiquement à sa conclusion, vous empêchant d’accéder au débriefing de fin (et d’espérer mener la campagne). Pour avoir le droit à des textures lissées et autres petites gourmandises de l’époque, il faudra mettre les mains dans le cambouis et avoir recours à une machine virtuelle – comme cela aura été le cas pour une large partie des captures d’écran de ce test.

Car autant le dire : neuf ans plus tard, la réalisation est la première à hurler à quel point elle a changé. Les tanks ressemblent enfin à des tanks, les fantassins sont désormais visibles (et déployables) plutôt que d’être cantonnés à des transports de troupes blindés, et même si les reliefs sont encore un peu décevants, on a droit à des zones bien plus étendues où l’on peut voir bien plus loin avec beaucoup plus d’unités engagées, et on ne va pas s’en plaindre – d’autant que la résolution native en 640×480 permet enfin aux cibles ennemies d’avoir une petite chance de ressembler à autre chose qu’à un unique pixel de couleur dès l’instant où elles se trouvent à plus de 200 mètres.

Évidemment, difficile d’être impressionné par de la 3D de 1998, mais l’aire de jeu est tout de suite moins abstraite – même s’il faudra, une nouvelle fois, s’attendre à passer beaucoup de temps sur la carte d’état-major, et pour cause : la dimension stratégique, elle aussi, est toujours de la partie. Elle a même pris un peu de galon, car l’explosion de la puissance des machines permet aussi et surtout de gérer beaucoup plus d’unités qu’auparavant, et il n’est désormais pas rare d’avoir quatre ou cinq pelotons simultanés sous ses ordres, sans même compter les unités de soutien de type artillerie ou hélicoptères d’assaut. Si prendre le temps de contrôler indépendamment chaque unité de chaque peloton est toujours possible, on a désormais assez d’unités sous ses ordres pour commencer à planifier à un niveau plus vaste, et la bonne vieille méthode consistant à aller cacher quatre tanks chacun derrière une colline différente pour déclencher une embuscade au bon moment n’est dorénavant plus la seule façon d’espérer transformer votre infériorité numérique en triomphe.

Les cartes ne sont plus générées aléatoirement, mais cela signifie également qu’il s’y passe beaucoup plus de choses, et qui faudra souvent être prêt à conserver un peloton savamment en retrait pour aller couper la route à d’éventuels renforts adverses, ou envoyer vos véhicules légers foncer à fond de train vers les positions adverses afin de servir d’éclaireur pour vos appuis feu.

L’adversaire ayant généralement accès aux mêmes possibilités, mieux vaudra éviter de rester sagement immobile en attendant d’acquérir des informations, car c’est souvent le meilleur moyen de se réveiller sous un barrage d’artillerie – bref, il faudra se montrer réactif et s’adapter en temps réel, quitte à savoir sauver les unités qu’il vous reste en cas d’inéluctable défaite, car une nouvelle fois vos hommes gagnent en expérience et il est toujours fâcheux de voir un groupe d’élite finir en un tas de tôle fumant pour avoir voulu charger sabre au clair sur des positions ennemies qui semblaient mal défendues – et qui ne l’étaient pas. On prend heureusement assez vite ses marques, l’interface n’étant pas très différente de celle du premier épisode, et même si les différents outils à votre disposition risquent d’exiger un long passage par le manuel afin d’en saisir toute la substantifique moelle, on peut néanmoins acquérir l’essentiel des connaissances nécessaires en trois ou quatre parties et même obtenir de très bons résultats de cette manière.

Il y a donc un sentiment de « la même chose en mieux » qui se dégage du titre, même si cela n’est pas forcément aussi flatteur qu’il n’y paraît : le jeu est peut-être plus beau, plus grand et plus riche qu’auparavant, mais l’expérience de jeu demeure relativement semblable – avec quelques subtilités en plus tant au niveau de la simulation qu’à celui de la stratégie, mais rien qui transcende fondamentalement ce qu’on avait déjà pu connaître avec un M1 Tank Platoon qui avait su viser juste avec ce qu’il avait à disposition.

C’est vraiment la même chose remise au goût du jour, mais sauf à transformer le programme en un véritable jeu de stratégie permettant de diriger toute une armée, on n’était déjà pas arrivé très loin du plafond de verre avec le premier épisode, et cette suite n’est finalement que son évolution logique – ni plus, ni moins. L’aspect le plus frustrant reste la quasi-impossibilité d’accéder au multijoueur, qui aurait sans doute dû consister l’apport le plus emballant de tous, sur une configuration moderne – et fait d’autant plus regretter qu’il n’y ait pas, à l’heure actuelle, un M1 Tank Platoon 3, 4 ou 12 pour profiter de la technologie de 2024. Mais cela a au moins le mérite de conserver à ce deuxième épisode une certaine fraîcheur qui fait qu’on peut le relancer ou le découvrir aujourd’hui avec un plaisir intact.

Vidéo – Une mission du jeu : Medina Ridge :

NOTE FINALE : 17/20

M1 Tank Platoon 2 n'est pas juste une excellente occasion de mesurer le chemin parcouru par le jeu vidéo en neuf ans, c'est aussi une très bonne suite à l'un des simulateurs les plus marquants des années 80. Au menu : une réalisation mise au goût du jour, bien sûr, mais aussi et surtout un contenu bien plus conséquent, des possibilités étendues, un aspect stratégique plus riche, et même la possibilité d'affronter d'autres joueurs. Une nouvelle fois, le mélange des genres fonctionne à merveille, même si les fans de simulation regretteront le peu de nouveautés dans le maniement des tanks tandis que les fans de stratégie auraient sans doute souhaité encore plus d'unités à contrôler. Reste une très bonne manière de composer avec des missions intéressantes via une interface pas trop complexe, et de ravir les fans du premier opus tout en convertissant les nouveaux venus.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une accélération 3D inexploitable dans l'édition commerciale tournant sous Windows 10...
– ...tout comme le multijoueur
– Quelques bugs jamais corrigés

Bonus – Ce à quoi peut ressembler M1 Tank Platoon 2 sur un écran cathodique :