Gabriel Knight : Sins of the Fathers

Développeur : Sierra On-Line, Inc.
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Titres alternatifs : Gabriel Knight : Les péchés des ancêtres (écran-titre – France), Gabriel Knight : Die Sünden der Väter (Allemagne), Gabriel Knight : Lucha Contra Las Fuerzas Sobrenaturales (Espagne), Gabriel Knight : Pecados dos Pais (Brésil), Gabriel : Zikhronot Afelim (Israël)
Testé sur : PC (DOS/Windows 3.1)Macintosh
Disponible sur : Windows (7, 8, 10)
En vente sur : GOG.com (Windows)

La saga Gabriel Knight (jusqu’à 2000) :

  1. Gabriel Knight : Sins of the Fathers (1993)
  2. Un Mystère avec Gabriel Knight : The Beast Within (1995)
  3. Gabriel Knight 3 : Énigme en Pays Cathare (1999)

Version PC (DOS/Windows 3.1)

Vidéo – L’écran-titre et l’introduction du jeu (CD-ROM) :

Souvenons-nous un instant d’une époque – désormais révolue, cela va de soi – où SEGA et Nintendo se livraient à une saisissante guerre des consoles, occultant d’autres conflits que les moins de trente ans ne peuvent pas connaître. Au début des années 90, en plein âge d’or du point-and-click, deux firmes se disputaient la suprématie dans le domaine du jeu d’aventure, ne laissant que les miettes à quelques outsiders occasionnels comme Revolution Software ou Adventure Soft – dont nous aurons sans doute l’occasion de tester les jeux sur ce site un peu plus tard.

La doyenne de ces deux firmes, Sierra On-Line, malgré une série de licences en pleine santé (nommément King’s Quest, Space Quest ou Leisure Suit Larry), sentit qu’il était temps de faire face à la société montante qu’était Lucasfilm Games en explorant de nouvelles sagas. C’est ainsi qu’au milieu des EcoQuest et autres Willy Beamish, on demanda à la romancière Jane Jensen d’imaginer un personnage appelé à rester dans les mémoires. Son nom ? Gabriel Knight.

En 1993, le premier épisode de la saga, Gabriel Knight : Sins of the Fathers, voit donc le jour en version CD et disquettes. Il vous met au commande du héros éponyme, propriétaire d’une modeste boutique de livres rares sur Bourbon Street, au cœur du quartier français de la Nouvelle Orléans. Gabriel, en plus d’être un libraire fauché bien en peine de rémunérer sa seule employée, Grace Nakimura, est également un jeune écrivain en plein syndrome de la feuille blanche, incapable de donner une suite aux aventures de son héroïne orthodontiste (!).

Puisant l’inspiration là où elle se présente, notre protagoniste est bien décidé à se pencher sur la question des meurtres vaudous qui secouent la ville, profitant pour cela de sa vieille amitié avec l’inspecteur Mosely, chargé de l’affaire, et à qui il a promis une apparition dans son prochain roman en échange d’infos plus ou moins confidentielles. Sauf que, comme on peut s’en douter, cette simple enquête amateure va rapidement dériver en quelque chose de beaucoup plus dangereux, qui va l’amener à se pencher jusque sur les origines allemandes de sa famille, et sur un mot dont il ignore encore le sens : Schattenjäger.

D’entrée de jeu, le plus frappant en abordant cette aventure aux commandes de notre séducteur invétéré, mi-loser mi-héros en devenir, c’est la qualité de l’écriture. Dans les dialogues tout d’abord, qui n’hésitent pas à faire usage d’un langage cru ou à des propos plus ou moins graveleux, mais aussi à des mots d’esprit extrêmement bien sentis ou à des remarques acides aptes à tirer quelques sourires, et dont la principale qualité est de parvenir à rendre immédiatement attachants des personnages sur lesquels on ne peut mettre un visage que lors des (nombreuses) conversations du titre. En revanche, on pourra dire que le tempérament de Gabriel, qui se voulait celui d’un clone de James Dean, a suffisamment vieilli pour le faire davantage passer aujourd’hui pour un personnage de beauf toxique la moitié du temps, particulièrement quand il s’adresse à Grace, son employée. Hé, les mœurs aussi évoluent… Le scénario, pour sa part, figure – disons-le d’emblée – parmi les tous meilleurs jamais écrits pour un jeu vidéo, n’étant à mon sens éclipsé dans ce domaine que par sa suite directe, The Beast Within.

En plus de laisser place à une montée progressive vers le fantastique extrêmement bien orchestrée – l’enquête s’étoffant, petit à petit, d’éléments subtils décidés à vous faire comprendre que vous approchez de quelque chose qui n’est pas bon pour vous – le jeu fourmille de références documentées et absolument passionnantes sur la Nouvelle Orléans, sur Marie Laveau ou sur le Vaudou. C’est bien simple : c’est très certainement l’un des seuls jeux qui vous donnera envie de vous documenter, après coup, sur le Vaudou, sur le Hoodoo, sur la révolte haïtienne, les loas, les vévés, les hounfours et tous les éléments que vous apprendrez à connaître en même temps que votre personnage, aussi novice que vous en la matière au début du jeu. L’histoire, passionnante d’un bout à l’autre, se terminera en apothéose lors d’un grand final où vous aurez à cœur de sauver la peau de personnages que vous aurez appris à apprécier comme rarement on aura eu l’occasion de le faire dans un jeu d’aventure du début des années 90.

Pour cela, il faudra d’abord être infiniment reconnaissant à ce jeu d’avoir accepté de se débarrasser de certaines des tares récurrentes les plus énervantes des jeux Sierra de la période. À commencer par cette manie de mourir toutes les cinq minutes pour des raisons plus stupides les unes que les autres, que ce soit en ratant une marche, en ramassant un objet trop pointu, voire… en tirant la chasse d’eau (authentique !) Non, pas de ça dans Gabriel Knight : S’il est bel et bien possible de trouver la mort, il faudra déjà atteindre un stade relativement avancé du jeu, et ce sera de toute façon dans des situations qui tomberont rarement du ciel.

Une sauvegarde au début de chacune des journées du jeu, qui en compte dix, devrait vous éviter les pires frustrations même si, je le répète, dans 95% des cas on sait pertinemment qu’on est en train de se diriger vers des ennuis et qu’il vaudrait mieux prendre ses précautions avant d’aller se jeter dans la gueule du loup. Le jeu est également – et c’est authentiquement salutaire – largement non-bloquant. Vous vous souvenez de ces parties de King’s Quest à recommencer depuis le début parce que vous aviez oublié de ramasser un objet trois heures de jeu auparavant et qu’il vous était impossible de faire demi-tour pour aller le reprendre ? Eh bien, c’est également à oublier ici : il n’y a ni piège, ni impératif de temps, et chacune des journées du jeu ne se termine que lorsque vous aurez accompli ce que vous étiez censé y accomplir. De fait, je ne pense avoir rencontré des situations « bloquantes » qu’à l’extrême fin du jeu, et encore, pour une scène particulière qui se terminait en game over dans la minute qui suivait si vous l’abordiez sans avoir tout le matériel nécessaire à la résolution de la dernière ligne droite, très peu de chance de se retrouver coincé à ce stade, donc.

Les énigmes, d’ailleurs, si elles sont parfois particulièrement retorses, font appel à la logique plus qu’au hasard, et vous aurez très peu de chance d’en résoudre ne fut-ce qu’une seule en utilisant aléatoirement tous les objets de votre inventaire sur n’importe quoi – d’autant que l’inventaire en question risque de se remplir très vite, et que la solution n’est jamais absurde à partir du moment où vous comprenez ce que vous avez à faire. Attendez-vous néanmoins à cogiter sérieusement à plusieurs reprises – ce qui, à une époque où on peut trouver une solution en moins de dix secondes sur internet, ne dépendra que de votre patience. En vous mettant en position de joueur lambda en situation réelle, comptez au moins une quinzaine d’heures pour venir à bout du titre – dont une grande partie sur les écrans de conversation.

Niveau réalisation, Sierra était connu pour la qualité de ses réalisations en VGA, et Gabriel Knight ne déroge pas à la règle. C’est lisible, c’est détaillé, la chasse au pixel caché se fait très rare, et les portraits employés lors des conversations sont très réussis, bref, c’est le sans-faute. Surtout que le jeu multiplie les animations, les encarts façon bande dessinée lors des scènes-clés, et que la mise en scène fait son maximum pour vous plonger dans l’ambiance – ce qu’elle fait bien.

La musique est également de très bonne qualité, même si le jeu se montrera assez chiche en bruitages dès l’instant où vous opterez pour autre chose que pour une Sound Blaster. Bref, à moins d’être totalement allergique à la production graphique de l’époque, difficile de ne pas tomber sous le charme. L’interface du jeu, elle, n’apparait que lorsque vous approchez le curseur du bord supérieur de l’image – et a la très bonne idée de placer le jeu en pause à cet instant, ce qui sera infiniment précieux lorsque l’on vous demandera d’agir en temps limité au milieu d’une situation potentiellement mortelle.

Tant qu’à faire, il serait criminel de ne pas évoquer la version CD-ROM du jeu. Si celle-ci offre quelques petites friandises, comme un mode SVGA qui affiche désormais certains objets (et surtout les portraits) en haute résolution ou une introduction retravaillée et étendue pour l’occasion, le vrai gain va provenir, on s’en doute, du doublage de tous les dialogues – en anglais.

Et à ce niveau, Sierra n’a pas pris les joueurs pour des pigeons en faisant appel à un casting « light », jugez plutôt : pour prêter sa voix à Gabriel Knight, on trouve rien de moins que le génial Tim Curry (The Rocky Horror Picture Show, Ça) et pour lui donner la réplique dans le rôle de Mosely, tenez-vous bien… Mark Hamill (La Guerre des Étoiles) ! Sachant que le reste de la distribution est à l’avenant et que tous les personnages sont parfaitement doublés, des dialogues qui étaient déjà très bons se transforment parfois en authentique morceaux de bravoure, contribuant ainsi à donner encore un supplément d’âme à un titre qui en avait déjà à revendre. Notons enfin que des options sonores supplémentaires sont disponibles, et qu’il est enfin possible d’associer une Sound Blaster à une Roland MT-32. Bref, une version qui fait tout mieux que la version disquette, ce qui tombe bien puisque c’est la seule à la vente.

Quelques mots, enfin, sur la version française : celle-ci, à l’instar de ce que proposaient tous les jeux Sierra à l’époque, comporte son lot de coquilles, de fautes d’orthographe et de contresens – mais fort heureusement, elle n’handicape jamais le jeu au point de pénaliser sa compréhension ou le plaisir qu’on prend à y jouer. Elle est, malheureusement, rarement disponible à la vente sur les plate-formes en ligne qui se contentent le plus souvent de proposer la version originale.

Vidéo – Quinze minutes de jeu (CD-ROM) :

NOTE FINALE : 18/20 Porte-étendard d'une nouvelle génération de jeux d'aventure ciblant un public plus adulte, porté par l'excellente écriture de Jane Jensen, Gabriel Knight demeure aujourd'hui encore l'un des point-and-click les plus marquants jamais programmés. Prenez un scénario en béton, historiquement très documenté et remplis d'anecdotes fascinantes sur l'histoire du vaudou et de la Nouvelle Orléans, ajoutez des personnages captivants, charismatiques et forts-en-gueule, transcendés par un casting vocal exceptionnel dans la version CD-ROM, liez le tout grâce à une réalisation à la hauteur et des énigmes nettement plus cohérentes que ce à quoi nous avait habitué Sierra On-Line jusqu'à alors, et vous obtiendrez un véritable chef d’œuvre encore célébré et rarement égalé trente ans après sa sortie. Si vous voulez comprendre comment on pouvait passer des nuits et des semaines sur un jeu d'aventure en ressentant un pincement désagréable au moment de regarder les crédits de fin défiler, découvrez ce titre de toute urgence. Vous ne le regretterez pas. CE QUI A MAL VIEILLI : – On peut vite tourner en rond lorsqu'on ne sait plus quoi faire pour faire avancer une journée – Quitte à pouvoir mourir, la bonne idée aurait été de nous permettre de recommencer juste avant notre mort plutôt que de repartir d'une sauvegarde – Le personnage de Gabriel, qui se voulait une sorte de séducteur à la James Dean, a pris un petit coup de vieux dans son attitude de beauf en rut

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Gabriel Knight sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« L’histoire est savamment distillée et les relations ainsi que le psychologie de chaque personnage sont brillamment dépeints. On s’attache énormément à Gabriel qui cache sous son nom angélique un tempérament fougueux, voire obsédé et un humour décapant qui vire souvent au scabreux. Grace, elle aussi, est particulièrement réussie : on a rarement vu des personnages aussi réalistes et attachants dans un jeu. »

Marc Menier, Tilt n°122, Janvier 1994, 92%

Version Macintosh

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

En 1994, il était devenu nettement moins exceptionnel de voir un jeu sur PC – particulièrement un point-and-click – porté sur Macintosh. Avec Sierra aux commandes, pas de mauvaise surprise : on hérite d’une copie carbone de la version PC, avec les textes, les portraits et certains objets en haute résolution. Dommage, en revanche, qu’il faille obligatoirement composer avec l’interface envahissante de l’OS. Sur le plan sonore, le matériel de base de la machine d’Apple se débrouille déjà très bien (largement à la hauteur de ce que permettait une Sound Blaster), et il est possible d’installer des pilotes pour profiter de la compatibilité avec la Roland MT-32 et avec le standard General MIDI – pas de jaloux de ce côté-là non plus, donc. À noter que même si une version CD-ROM est évoquée, je ne suis tout simplement pas parvenu à mettre la main dessus, le présent test ne s’applique donc qu’à la version tenant sur quelques douze disquettes, mais on peut sans trop s’avancer imaginer que là encore, le résultat soit très proche de ce qu’offre la machine d’IBM.

NOTE FINALE : 18/20

Aucune mauvaise surprise pour l’itération Macintosh de Gabriel Knight, qui offre à peu de choses près l’exact équivalent de la version parue sur PC, et peut-être même légèrement mieux en ce qui concerne le jeu au format disquette.

Push-Over

Cette image provient du site https://www.lemonamiga.com

Développeur : Red Rat Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Titres alternatifs : Pushover (écran-titre), This Game is No… Push-Over – Featuring G.I. Ant and his Buddy Colin Curly (boîte du jeu)
Testé sur : AmigaAtari STPC (DOS)Super Nintendo
Disponible sur : Antstream, Linux, Macintosh, Windows (version PC)
En vente sur : GOG.com (Linux, Mac, Windows)

La saga Push-Over (jusqu’à 2000) :

  1. Push-Over (1992)
  2. One Step Beyond (1993)

Version Amiga

Date de sortie : Juin 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 1Mo
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Immédiatement après le succès planétaire de Lemmings, on se doute que les réunions en catastrophe se sont multipliées à la tête des différentes sociétés de jeux vidéo pour faire ce qui était alors en train de devenir la nouvelle mode vidéoludique : réfléchir. Alors que rien ne semblait décidé à infléchir le tabac que connaissaient les petites bestioles à cheveux verts de DMA Design, hors de question de laisser un marché jusqu’alors perçu comme « de niche » vacant trop longtemps. Les gens voulaient de la réflexion ludique matinée d’adresse ? Il allait être temps de leur en donner jusqu’à en saturer le marché ! Inutile de dire qu’au petit jeu des mauvais clones développés à la va-vite, nombreux sont ceux à s’être cassés les dents… Mais parmi les rares concepts originaux de la période, il n’aura fallu attendre qu’un an après la sortie de Lemmings pour voir apparaître l’un des meilleurs d’entre eux : Push-Over.

Les premiers niveaux se résolvent aisément…

Le concept est simple : les dominos. Non non, je vous rassure tout de suite, vous n’allez pas être obligés de revivre vos après-midi camomille/scrabble/petits chevaux chez mémé : l’idée ici est plutôt de les faire tomber. Vous débarquerez donc dans un niveau pour y découvrir des dominos alignés, l’idée étant de tous les renverser, en une seule poussée, et en faisant en sorte que le domino « de fin » (désigné par son motif à trois bandes) chute en dernier. À votre charge, donc, de les placer correctement pour que la réaction en chaine se produise sans heurts. A priori, on peut difficilement faire plus simple, et on imagine mal comment remplir un jeu de cette manière – sauf que Push-Over va très habilement mettre plusieurs ingrédients dans la balance histoire de venir compliquer un peu les choses.

Le premier – et le plus évident – vient du fait que vos dominos n’appartiennent pas tous au modèle « standard » se contentant de tomber bêtement droit devant lui. Non, certains ne bougeront pas quoi qu’il arrive, d’autres continueront au contraire à cavaler en continu une fois poussés, d’autres encore exploseront, ou créeront des ponts, se diviseront ou s’envoleront – une dizaine de modèles en tout.

Un petit pense-bête est disponible par une simple pression sur F1

Chacun de ces dominos a son petit look à lui, ce qui n’empêche pas qu’il faille un peu de temps pour assimiler la fonction qui lui a été attribuée. Fort heureusement, une simple pression sur la touche « F1 » aura le bon goût de vous afficher un écran récapitulatif au cas où votre mémoire vous jouerait des tours. Évidemment, quand seuls un ou deux de ces « dominos spéciaux » sont présents dans un niveau – comme c’est le cas au début du jeu – il vous faudra rarement très longtemps pour deviner la place qui leur est due. En revanche, quand ils commencent à se compter en dizaines, les choses ne tardent pas à se compliquer, et vous ne devriez pas attendre très longtemps avant de connaître vos premières séances d’essais/erreurs à répétition.

…mais ça se complique très vite !

Cela devrait fort heureusement se faire sans temps mort : tout le principe du jeu reposant sur une seule et unique poussée, vous n’aurez jamais plus d’une poignée de secondes à attendre pour assister au résultat de votre action – le jeu est, à ce titre, beaucoup plus dynamique que Lemmings qui vous demandait parfois de glander en attendant que vos bestioles daignent arriver jusqu’à la sortie. Tellement dynamique, en fait, que les développeurs ont décidé d’ajouter un temps limité à chaque niveau – et autant vous dire qu’en voyant celui-ci s’élever à moins de trente secondes lors des premiers niveaux du jeu, on a tendance à paniquer un peu. Dans les faits, il faut commencer à arriver à un stade assez avancé du jeu pour que le temps soit un vrai problème – rien ne vous empêche de continuer à jouer après que le compteur ait atteint zéro, mais votre victoire ne sera pas comptabilisée. Quand on vient de comprendre ce que le niveau attendait de nous et que l’exécution nécessite de déplacer un unique domino, ce n’est pas un problème. En revanche, quand des dizaines de manipulations entrent en jeu, autant dire qu’il est un peu frustrant de se dire qu’on a parfaitement réussi le niveau mais qu’on va en être quitte pour le recommencer faute de temps – et qu’en plus, comble de malheur, on a oublié la moitié de la réponse à force de multiplier les expériences.

Une fois la poussée effectuée, vous pouvez encore agir – et c’est parfois indispensable

Afin d’éviter que cela vous pousse à vous arracher les cheveux, le jeu a malgré tout eu la bonne idée d’intégrer un système de « jetons » : vous en gagnez un à chaque tableau fini. Concrètement, ces jetons vous permettent de recommencer un niveau juste avant la poussée fatidique plutôt que depuis le début, ce qui pourra vous épargner de reproduire de longues et fastidieuses manipulations. Si cela peut sembler un peu gadget pendant les premières heures de jeu, autant vous dire que dans les derniers niveaux, vous allez les bénir, ces fameux jetons ! Car la résolution d’un tableau vous demandera alors parfois plusieurs minutes – et croyez-moi, se souvenir de la position précise d’une quinzaine de dominos et des manipulations nécessaires pour les mettre à leur place peut être beaucoup plus complexe qu’on le pense.

Chaque niveau réussi vous fera gagner un jeton qui vous sera très utile sur la fin

En ce qui concerne la manipulation, justement : autre contrainte. Ces dominos, vous n’allez pas simplement les déplacer par la force de l’esprit : vous aurez recours, pour cela, à un personnage (une fourmi, en l’occurrence) qui ira déplacer les dominos à l’aide de ses petits bras musclés (et oui, fourmi ou pas, elle n’en a que deux). Mine de rien, cela complique encore un peu les choses. Déjà parce que votre fourmi ne peut pas aller partout : hors de question d’atteindre une plate-forme située au-dessus d’elle s’il n’y a pas une échelle pour l’y conduire. Dans le même ordre d’idées, elle ne peut pas tomber de n’importe quelle hauteur, et elle lâche son domino en tombant : si un autre domino se trouvait au point de chute, la collision provoquera la destruction des deux, et le niveau est perdu. Tout cela constitue une subtilité supplémentaire, mais aussi un indice : en voyant une zone inaccessible, vous pourrez être sûr que ce n’est pas de ce côté que si situera la solution.

Les mots de passe sont à entrer sur le menu du jeu

Mais cela ajoute aussi une variable : un niveau ne se termine pas juste avec la chute du dernier domino, il faut également conduire votre personnage jusqu’à la sortie. Si vous réussissez parfaitement à faire tomber tous les dominos mais que votre fourmi n’a aucun moyen d’accéder à la porte de sortie ainsi ouverte, tant pis pour vous : il faudra recommencer. Si cela n’est pas un problème pendant la très grande majorité du jeu, certains niveaux reposent au contraire sur le timing autant que sur la réflexion. En effet, rien n’interdit de déplacer un domino une fois la réaction en chaine lancée, mais vu à quelle vitesse les choses se déroulent, autant vous dire que vous aurez intérêt à savoir très exactement ce que vous avez à faire – et à le faire vite, cela se jouant souvent à quelques dixièmes de seconde. Plus qu’une frustration, cela représente un renouvellement assez original – surtout que le jeu a le bon goût de ne pas en abuser.

Côté jouabilité, la maniabilité est enfantine : vous dirigez votre personnage au joystick ou au clavier, et l’unique bouton sert à accomplir les trois actions du jeu : prendre un domino, le poser ou bien le pousser (ce qui nécessitera de vous placer derrière l’un d’eux, naturellement). Le menu de lancement du jeu vous permettra de rentrer un code à cinq chiffres correspondant au mot de passe du niveau que vous cherchez à atteindre, les seules autres options présentes vous permettront de couper la très sympathique musique du jeu au cas où celle-ci – relativement discrète pendant la résolution des niveaux – vous taperait sur le système, ce qu’elle a peu de chance de faire.

Pour arriver jusqu’ici, il va falloir lutter !

Pour ce qui est de la réalisation, le jeu tire très honnêtement parti de la palette de couleurs de l’Amiga : les environnements sont très colorés, lisibles, le jeu est fluide (sauf peut-être quand beaucoup de dominos tombent simultanément, ce qui peut faire tousser un peu un Amiga 500), et dispose de son lot de petites cinématiques pas très éblouissantes, certes, mais fonctionnelles, et qui seront surtout l’occasion d’appuyer lourdement sur le placement produit du jeu sur lequel je ne m’étendrai pas.

« Et maintenant, un message de notre sponsor… »

Tout juste pourra-t-on noter que si le jeu a fait l’effort de proposer un très court scénario (récupérer des paquets de chips dans une fourmilière… ouais, ça ne vaut pas le Nobel de littérature, on est d’accord), on ne devinera jamais quel rapport cela peut bien avoir avec le fait de pousser des dominos. Mais au fond, on ne se posera pas trop la question : on sera déjà bien trop occupé à résoudre les 100 niveaux du jeu, pas vrai ?

Petite précision concernant la VF : il y avait trois phrases à traduire et pas de bol, on n’a visiblement pas été capable de trouver un élève de CM1 pour assurer la relecture. Elle est donc catastrophique, mais son rôle se limitant à vous donner la fonction des dominos, on fera avec. Ou sans.

Vidéo – Les dix premières minutes du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’or 1992 (Tilt n°109, décembre 1992) – Meilleur jeu de réflexion micro (version Amiga)

NOTE FINALE : 17/20 Le succès de Lemmings aura engendré son lot de jeux totalement dispensables s’engouffrant dans la brèche qu’il avait initiée, mais Push-Over n’est pas de ceux-là. Bien pensé, addictif, s’appuyant sur un concept d’une rare simplicité pour offrir un jeu complexe, le titre de Red Rat Software aura fait des heureux à sa sortie, et aurait certainement mérité, lui aussi, d’initier sa propre série plutôt que de retourner à un relatif anonymat. Il se contentera d'une suite intitulée One Step Beyond. CE QUI A MAL VIEILLI : – Le fait d’avoir à composer en permanence avec un chronomètre est un peu contre-productif dans un jeu de réflexion – Le placement produit, c’était vraiment obligatoire ? – On aurait bien aimé avoir le droit de passer l'introduction

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Push-Over sur un écran cathodique :


Version Atari ST

Développeur : Red Rat Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Octobre 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ simple face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512Mo
Écran couleur requis
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Parue en même temps que les versions Amiga et PC (ne vous fiez pas au copyright, qui dit « 1991 » sur l’écran-titre puis « 1992 » pendant l’introduction…), La version Atari ST est très proche de son homologue sur Amiga. Graphiquement, la seule différence tient à l’écran titre, plus détaillé que celui de la version originale pour une raison hautement mystérieuse – le reste est identique à la version Amiga. Musicalement, la musique m’est apparue comme très légèrement inférieure à celle de l’original, mais les bruitages, eux, sont meilleurs. Pour le reste, on est en terrain connu : maniabilité au joystick ou au clavier, et le jeu tourne mieux que sur un Amiga 500.

Pas de bouleversement pour cette version

NOTE FINALE : 17/20

Quasiment identique à la version Amiga,  la version ST lui est néanmoins très légèrement supérieure grâce à des bruitages de meilleure qualité et à des chargements plus rapides.

Version PC (DOS)

Développeur : Red Rat Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Août 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Supports : Dématérialisé, disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : EGA (16 couleurs), EGA (64 couleurs), MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Roland MT-32/LAPC-I, Sound Blaster
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Bonne surprise que cette version PC, d’habitude régulièrement reléguée au rang de parent pauvre des portages. Ici, non seulement rien n’a été amputé, mais en plus la réalisation n’a absolument rien à envier à celle de la version Amiga – y compris en ce qui concerne la musique, qui fait même un peu mieux à condition d’être équipé d’une Roland MT-32. Mais pourvu qu’on ait cette chance, on tient sans aucun doute la meilleure version de Push-Over – et même sans elle, un portage très largement à la hauteur de la version originale. Cette version propose même un étrange mode EGA 64 couleurs que je n’ai jamais vu employé sur aucun autre jeu PC (le VGA commençait de toute façon à être pleinement démocratisé en 1992) et dont le rendu est assez bon. Bref, exactement ce qu’on était venu chercher.

Pour une fois que la version PC ne se fait pas raboter…

NOTE FINALE : 17,5/20

Très bon cru que cette version PC, qui fait tout au moins aussi bien que la version Amiga, et peut-être même encore mieux sur le plan musical (quoique de très peu). Tout ce qu’on était en droit d’attendre en 1992.

Version Super Nintendo

Développeur : Red Rat Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : Janvier 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Oui
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Seule console à se voir offrir un portage de Push-Over, la Super Nintendo voit disparaitre dans l’opération l’introduction du jeu – et le placement produit l’accompagnant, ceci expliquant peut-être cela. Graphiquement, le jeu possède une palette différente (et d’ailleurs plutôt inférieure) à celle des versions sur ordinateurs – on peut se demander pourquoi, la console de Nintendo ayant largement les moyens de rivaliser avec un Atari ST ou un Amiga. Sinon, le jeu est particulièrement réactif, et la musique, plus pêchue, se fait mieux remarquer sur cette version. Notons également que le jeu tire profit des nombreux boutons du pad, et que la poussée et le fait de prendre/déposer un domino ne sont plus attribués au même bouton, ce qui peut éviter les très rares accidents des autres versions.

Les graphismes ont leur petit charme, mais la palette choisie est étrange

NOTE FINALE : 17/20

En-dehors d’une amputation étrange de l’introduction, la version Super Nintendo reste fidèle en tous points à ses homologues sur ordinateur – et constitue sans doute la version la plus jouable de toutes.

Ultima I

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Titre original : Ultima (version originale de 1981)
Titres alternatifs : Ultima I : The First Age of Darkness (PC-88, PC-98), Ultimatum (titre de travail), Ultima I : The Original (Atari 8 bits)
Testé sur : Apple ][Commodore 64PC (DOS)PC-88PC-98MSXFM TownsAtari 8 bits
Versions non testées : Apple ][gs, Sharp X1
Disponible sur : Mac OS X (10.6.8), Windows (7, 8, 10) – Au sein de la compilation Ultima 1+2+3
En vente sur : Gog.com (Mac, Windows)

La saga Ultima (Jusqu’à 2000) :

  1. Akalabeth : World of Doom (1980)
  2. Ultima I (1981)
  3. Ultima II : The Revenge of the Enchantress… (1982)
  4. Exodus : Ultima III (1983)
  5. Ultima : Escape from Mt. Drash (1983)
  6. Ultima IV : Quest of the Avatar (1985)
  7. Ultima V : Warriors of Destiny (1988)
  8. Ultima VI : The False Prophet (1990)
  9. Worlds of Ultima : The Savage Empire (1990)
  10. Ultima : Worlds of Adventure 2 – Martian Dreams (1991)
  11. Ultima : Runes of Virtue (1991)
  12. Ultima Underworld : The Stygian Abyss (1992)
  13. Ultima VII : La Porte Noire (1992)
  14. Ultima : Runes of Virtue II (1993)
  15. Ultima VII : Part Two – Serpent Isle (1993)
  16. Ultima Underworld II : Labyrinth of Worlds (1993)
  17. Pagan : Ultima VIII (1994)
  18. Ultima Online (1997)
  19. Ultima IX : Ascension (1999)

–PRÉCISION IMPORTANTE–

L’écran-titre de la version originale publiée par California Pacific Computer sur Apple II

En temps normal, la première version testée pour chacun des jeux présentés sur Retroarchives.fr est sa version originale – celle publiée sur la machine sur laquelle le jeu a été programmé – avant de tester les autres versions dans leur ordre chronologique de parution. Dans le cas d’Ultima I, j’ai dû faire une entorse à cette règle. En effet, la première version du titre, alors simplement nommée Ultima sans numéro ni sous-titre et publiée en 1981 par California Pacific Computer, est aujourd’hui extrêmement difficile à trouver, sans même parler de la faire fonctionner. Elle souffrait qui plus est de nombreux bugs, et étant désormais pratiquement impossible à acquérir ailleurs que chez un antiquaire (même en émulation, où je ne serai parvenu à faire fonctionner une de ses très rares versions que bien des années après la rédaction de ce test – remerciements au passage au site The Digital Antiquarian d’avoir partagé une copie des disquettes originales), j’ai préféré m’intéresser à la version retravaillée publiée en 1986 – toujours sur Apple II, ainsi que sur tout un panel d’autres machines de l’époque – qui est, elle, toujours trouvable dans le commerce pour certaines de ses itérations (PC, notamment). La version Atari 800, une deuxième édition publiée par Sierra en 1983 (cette fois sous le titre Ultima I : The Original), sera donc exceptionnellement traitée comme une version secondaire – l’épisode « canonique » et encore commercialisé étant désormais celui publié par Origin Systems.

Version Apple ][

Date de sortie : 1981 (première édition) – 1986 (remake)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette (1986) testée sur Apple IIe
Configuration minimale : Édition de 1981 :
Système : Apple II – OS : Apple DOS 3.2 – RAM : 48ko
Mode graphique supporté : Haute résolution
Applesoft BASIC requis

Remake de 1986 :
Système : Apple II – OS : Aucun – RAM : 64ko
Mode graphique supporté : Haute résolution

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il y a un peu plus de 35 ans, à une époque où la machine qui dominait le monde était déjà un produit Apple, le jeu vidéo était encore quelque chose de dramatiquement simple vous proposant le plus souvent de vous renvoyer une balle, de conduire une voiture ou de tirer sur des vaisseaux spatiaux, le tout avec des graphismes – et des sons, quand il y en avait – qui laissaient une très large place à l’imagination. Mais dès le milieu des années 70, quelques universitaires dopés aux jeux de rôles papiers et aux nuits à mener campagne autour d’une table avec toute une boîte de dés à beaucoup plus de six faces s’étaient déjà faits une réflexion : ces fastidieux lancers de dés pourraient facilement être simulés par une machine. Et qui sait, un ordinateur étant capable d’afficher du texte, on pourrait sans doute également lui demander de remplacer le maitre de jeu, et peut-être même y coder quelques symboles simples pour y dessiner des cartes…

Dès les premières secondes, on se sent en terrain familier

Voici comment les premiers jeux de rôles informatiques ont vu le jour, et il n’aura pas fallu attendre longtemps – en l’occurrence, le tout début des années 80 – pour que deux grands succès introduisent deux sagas désormais légendaires qui ont mis en place les fondamentaux qui sont en grande partie encore utilisés aujourd’hui. Le premier s’intitulait Wizardry : Proving Grounds of the Mad Overlord et vous proposait un concept inusable : mener un groupe d’aventuriers au fin fond d’un donjon pour y vaincre un puissant ennemi.

C’est en visitant ce genre d’endroits que vous augmenterez vos caractéristiques

Le deuxième, créée par un jeune étudiant du nom de Richard Garriott – mieux connu de nos jours sous son pseudonyme de « Lord British » – se nommait Ultima et proposait un concept plus ambitieux encore : un monde ouvert, avec des voyages à pied ou en véhicules, des donjons par dizaines, des quêtes à mener et même – tenez-vous bien – des combats spatiaux ! Comme vous l’aurez déjà deviné, c’est à ce deuxième titre que nous allons nous intéresser ici.

Comme cela a été précisé, la version présentée sur cette page n’est pas l’originale – désormais à peu près introuvable – mais le remake publié en 1986 pour rebondir sur le succès du quatrième épisode, qui avait fini d’installer la saga au rang des séries majeures de l’histoire du jeu vidéo. En-dehors de corrections de bugs et d’un léger lifting graphique, cette version propose strictement le même contenu que la version parue en 1981, nous ne devrions donc pas être trop dépaysés au moment d’aborder le déroulement du jeu.

Les différentes villes servent uniquement à faire vos emplettes

Comme tous les jeux de rôles de l’époque, Ultima vous propose d’abord de créer votre personnage selon une sélection de classes très basiques (guerrier, voleur, clerc, mage) et de races puisées dans les poncifs de l’Heroic Fantasy (humain, elfe, nain… et le « bobbit », dont le nom vous rappellera surement quelque chose). Ces choix auront un impact sur les caractéristiques de votre personnage (force, agilité, endurance, sagesse, intelligence), dans lesquelles vous pourrez attribuer un certain nombre de points après avoir choisi un nom à votre héros, puis vous pouvez partir à l’aventure.

Compte tenu des capacités de stockage de l’époque, le jeu est gigantesque

Dans les faits, les classes n’ont aucune restriction de caractéristiques, et vous pourrez tout à fait, après avoir progressé dans le jeu, finir avec le score maximal à chacune d’entre elles quelle que soit votre classe de départ. Il en va de même avec l’équipement, et toutes les classes peuvent lancer des sorts – dont le nombre tient d’ailleurs sur les doigts de la main. Il n’y a pas de points de mana, ni de limites de sorts à lancer : vous pouvez très bien spammer les missiles magiques avec votre guerrier niveau 1 sans que cela ne pose problème à personne ; bref, comme vous le voyez, recommencer une partie en changeant de classe ne va pas franchement bouleverser votre expérience de jeu.

Votre premier objectif sera de bien vous assurer d’avoir un stock conséquent de nourriture et de points de vie

Dans le même ordre d’idées, les combats se déroulent de la manière la plus simple qui soit : vous vous placez à côté d’un monstre, vous pressez la touche d’attaque suivie d’une direction… et c’est tout. Que vous touchiez ou que vous ratiez, c’est ensuite le tour du monstre et ainsi de suite jusqu’à la mort d’un des deux protagonistes. Si vous êtes équipés d’une arme à distance comme un arc, une baguette magique ou un pistolet laser (!), vous n’êtes naturellement pas obligé d’être au contact du monstre. Lancer un sortilège se fait exactement de la même façon : on équipe un sort, on appuie sur la touche correspondante, puis sur une flèche pour donner une direction. Autant dire que les capacités tactiques sont assez réduites – mais souvenez-vous qu’on parle d’un programme de 1981. En l’état, vous vous en doutez, la richesse de l’expérience de jeu se situe ailleurs.

Feuille de personnage, inventaire, tout est sur le même écran

De fait, dès les premiers instants passés sur la carte du jeu, vous vous retrouverez en terrain connu, et pour cause : la représentation choisie correspond à celle qui fut ensuite utilisée dans tous les CRPGs japonais pendant les quinze années qui allaient suivre. Vous déplacez un personnage sur une carte en vue de dessus et composée de tuiles chargées de représenter le terrain sans avoir à le dessiner pixel par pixel (Ultima fut le tout premier jeu à penser à cette approche), et chaque fois que vous entrez dans une ville, un donjon ou un château, un changement d’échelle se produit et vous fait apparaître sur une autre carte.

Vos explorations vous demanderont également d’écumer les océans

Dans le cas des villes et châteaux, la taille de cette carte ne sera jamais supérieure à un écran : vous pourrez déplacer votre avatar, haut d’à peine quelques pixels, au sein des différents commerces de la ville, où il vous sera possible de chercher à voler la marchandise (conseil : ne vous ratez pas car les gardes, comme cela se confirmera tout au long de la série, sont très puissants). Vos interactions avec la populace seront d’ailleurs uniquement commerciales, car en-dehors des rois et des marchands, il n’est possible d’adresser la parole à personne (il est en revanche tout à fait possible de prendre une cuite à la taverne locale). Les rois, justement, vous proposeront deux types de services : augmenter vos points de vie en échange d’espèces sonnantes et trébuchantes, ou bien partir dans une quête précise (tuer un certain type de monstre ou atteindre un endroit précis) qui vous vaudra, en cas de succès, d’être récompensé en points de caractéristiques (en force, exclusivement, mais nous y reviendrons) ou bien en recevant une des gemmes qui vous seront indispensables pour finir le jeu. Vous réaliserez aussi bien vite que chaque château contient une princesse retenue prisonnière, et pour laquelle il vous appartiendra de trouver la façon de la libérer – plutôt vers la fin du jeu, de toute façon, puisque vous devrez encore vous frotter aux gardes pour se faire.

Les adversaires rencontrés dans les donjons deviendront plus féroces à chaque étage

Dans le cas d’un donjon, en revanche, surprise : la vue passe à la première personne, et vous pourrez vous balader en case par case dans des couloirs en 3D fil-de-fer où vous pourrez cette fois admirer les ennemis de près – en graphismes vectoriels, eux aussi (si cela vous rappelle quelque chose, c’est normal : le moteur des donjons est directement repris d’Akalabeth, le précédent jeu de Richard Garriott). Tous les donjons comprennent dix niveaux, et la difficulté des ennemis rencontrés sera fonction de l’étage où vous vous trouvez. Évitez donc d’aller vous frotter aux monstres des profondeurs avec un personnage mal équipé, vous risqueriez de le payer d’une mort violente – qui vous vaudrait de reprendre le jeu dépouillé de votre équipement, de votre argent et de votre nourriture. Les donjons ne contiennent rien d’autre que des couloirs, des portes, des coffres (parfois piégés), des cercueils (qui contiennent des monstres en plus des trésors) et des monstres. Ceux-ci savent parfois se montrer originaux, comme ceux qui prennent l’apparence de coffres aux trésors, ou ceux qui se font passer pour… des murs. Ces derniers sont d’ailleurs particulièrement pénibles, puisqu’ils peuvent détruire votre armure – mais moins que ces cochonneries de Gremlins qui, eux, vous dérobent votre nourriture. Car oui, il faudra garder votre personnage constamment approvisionné : chaque déplacement coûte de la nourriture, et si vos réserves arrivent à zéro, c’est la mort. Très bonne idée, en revanche, à la sortie des donjons : le jeu vous attribue automatiquement un certain nombre de points de vie en fonction du nombre de monstres tués et de leur puissance. On peut donc ressortir d’un donjon en meilleure forme qu’on y est entré – et considérablement plus riche.

Les combats vont à l’essentiel : ils se jouent avec deux touches

On gagnera également pas mal de points d’expérience, mais je vais casser tout de suite l’ambiance : les niveaux, dans le jeu, ne servent à rien. Ou disons, à presque rien : ils influeront sur le nombre de monstres rencontrés sur la carte du jeu, et sur la puissance des objets vendus par les magasins. Et sur rien d’autre. Oui, c’est passablement décevant, mais alors cela signifierait-il que les caractéristiques de notre personnage ne peuvent pas augmenter ? Au contraire, mais celles-ci progressent en fait d’une façon un peu spéciale : comme on l’a vu, les rois peuvent vous attribuer des points de force à la conclusion d’un certain type de quêtes. Et pour les autres caractéristiques ? Eh bien, les rois vous envoient également visiter des points spécifiques. Lorsque vous pénètrerez  dans ces lieux-dits, vous constaterez rapidement que chacun d’entre eux vous fait gagner des points dans une caractéristique donnée. Voilà le truc : rien ne vous empêche de retourner les visiter pour gagner davantage de points, la seule contrainte étant que vous ne pourrez pas visiter le même endroit deux fois de suite.

Meurs ! Vil… heu, truc ?

Rien ne vous interdit donc de faire des allez-et-retours pendant vingt minutes entre deux points jusqu’à avoir le score maximal dans les caractéristiques concernées. Et on touche là à l’une des grosses faiblesses du jeu : une fois compris le « truc », il est tout à fait possible de se faire un personnage « ultime » avec toutes les caractéristiques à fond en à peine une heure. Sachant que l’équipement ne coute pas très cher – surtout comparé à ce que vous allez dépenser en nourriture – quelques phases de farming dans les donjons devraient rapidement vous permettre d’accumuler assez d’or pour acheter des points de vie à ne plus savoir qu’en faire, et le jeu ne devrait plus représenter qu’une difficulté symbolique au bout de deux heures.

À un détail près, cependant. Comme on l’a déjà vu, Ultima met à votre disposition un nombre impressionnant de véhicules – chevaux, charriots, aéroglisseurs (!), frégates… – qui vous seront rapidement nécessaires pour explorer de fond en comble les quatre continents du jeu ainsi que les dizaines de villes et de donjons. Sauf que viendra un moment où on vous proposera carrément d’investir dans une navette spatiale (!!!) pour aller poursuivre le combat dans l’espace.

En 1981, l’Heroic Fantasy ne nourrissait aucun complexe : une navette spatiale ? Et alors, où est le problème ?

Soyons clairs : ce passage, qui vous demandera d’abattre en vue subjective une vingtaine d’astronefs ressemblant plus qu’énormément à des chasseurs TIE (!!!!!) est, de très loin, le plus pénible du jeu. Les délais sont courts, la maniabilité est très limitée, et comme si cela n’était pas déjà assez stressant, vous verrez vos réserves de carburant dégringoler au fur et à mesure que le combat s’éternisera à force de vous voir rater vos tirs. C’est assez ironique si l’on pense que Richard Garriott sera le fondateur d’Origin Systems, qui publiera une décennie plus tard le célèbre Wing Commander, mais le fait est que le mélange des genres n’était pas franchement indispensable ici… Même si bien sûr, je parle là avec le recul d’un joueur de 2017.

Imaginez que vous soyez en train de jouer à Dragon Age, et hop, en dix secondes vous passez à Mass Effect. Dans Ultima, c’est possible

Car en l’état, relisez un peu la liste de tout ce qu’il était possible de faire dans le jeu : voyager à pied, à cheval et en bateau (et en navette !) à travers quatre continents, visiter des dizaines de villes, écumer des dizaines de donjons, accomplir des quêtes pour les différents rois, affronter des chasseurs TIE dans l’espace ( !) et finalement remonter le temps ( !) pour affronter Mondain, le grand méchant du jeu, plus de mille ans dans le passé. Et tout ça dans un jeu programmé en BASIC et tenant sur une seule disquette 5 pouces ¼, en 1981 ! Le simple fait que l’on puisse, encore aujourd’hui, parcourir le jeu avec un certain plaisir est déjà la preuve de tout ce que ce premier Ultima avait à la fois de révolutionnaire et de visionnaire, puisqu’il a très largement contribué à façonner les bases de tous les jeux de rôles à l’avoir suivi pendant près de trente ans… ça force quand même un peu le respect, non ?

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 12,5/20 Qu’il est difficile de noter un jeu aussi légendaire que ce premier Ultima… Certes, le jeu, programmé en BASIC sur Apple II à une époque où la grande majorité des joueurs actuels n’étaient même pas encore nés (et, dans certains cas, même pas leurs parents !) a fatalement pris un coup de vieux, que ce soit dans sa réalisation ou dans sa conception. Et pourtant, tellement de fondations indispensables sont déjà là ! Quoi qu’il en soit, ce jeu a bouleversé à jamais l’histoire du jeu de rôle informatique – les créateurs de sagas aussi célèbres que Dragon Quest ou Final Fantasy ont reconnu s’en être largement inspiré, et de fait, c’est également ce qui rend Ultima I encore jouable de nos jours : en tant que source d’une grande partie de ce que nous avons connu en termes de RPGs, il a quelque chose en lui qui nous est immédiatement familier – même aujourd’hui, plus de 36 ans après. CE QUI A MAL VIEILLI : – Mieux vaut avoir la carte de référence du jeu sous la main, car l’interface vous fera utiliser pratiquement toutes les touches du clavier – Même pour un nostalgique, les capacités graphiques extrêmement limitées de l’Apple II piquent un peu les yeux – d’ailleurs, n’espérez pas de musique non plus – Franchement, la séquence de bataille spatiale a dû faire rêver pas mal de joueurs à l’époque, mais aujourd’hui on s’en passerait très volontiers – Un jeu de rôle où l’expérience ne sert à rien ? – Finalement, le jeu est très court

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ultima I sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Avril 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
L’image a gagné en netteté et en couleurs…

En terme de contenu, la version C64 est très exactement équivalente à son homologue sur Apple II. Il faudra donc plutôt chercher les différences du côté de la réalisation. Côté sonore, c’est le calme plat, puisque le jeu n’a toujours pas de musique et qu’il faudra se contenter de quelques rares bruitages lors des déplacements et des combats. Côté graphique, en revanche, le jeu profite du hardware de meilleur qualité pour proposer une image plus nette et plus colorée – c’est particulièrement visible en ville. Pour le reste, tout le test de la version Apple II s’applique également à celle-ci.

…et on s’en rend bien compte une fois en ville.

NOTE FINALE : 13/20

Un point bonus pour récompenser une version techniquement légèrement supérieure à l’originale, mais parfaitement fidèle en terme de jeu et d’interface.

Version PC (DOS)

Développeur : John Fachini
Éditeur : ORIGIN Systems, Inc.
Date de sortie : Octobre 1987
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Disquettes 5,25 et 3,5″
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 256ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Carte sonore supportée : Haut-parleur interne
La palette de seize couleurs dépoussière un peu le jeu

Seule version 16 bits d’Ultima I développée par Origin, la version PC, qui reprend une partie des tuiles dessinées pour Ultima IV, s’impose d’emblée comme la plus belle – et cela se voit dès l’écran-titre. Les graphismes sont bien plus colorés, et le PC dispose d’une résolution supérieure à celle des machines 8 bits, bref, c’est bien plus agréable. Côté son, en revanche, toujours rien à se mettre sous la dent en-dehors des quelques bruitages crachés par le haut-parleur interne, et côté interface, le jeu ne tient toujours aucun compte de la présence d’une souris.

Cela n’empêcherait pas la version PC de s’imposer comme la meilleure si elle ne souffrait pas de bugs qu’on ne trouve pas dans les autres versions – et jamais corrigés, hélas. Par exemple, le jeu ne tient aucun compte de votre valeur d’armure lorsque vous êtes dans un donjon – ce qui complique drastiquement les choses, surtout que c’est l’endroit où vous en aurez le plus besoin. Bref, une version qu’on sent vendue trop vite, ce qui est quand même dommage si l’on considère que six ans la séparent de l’originale.

On peut facilement constater que les graphismes sont plus fins (notez au passage la coquille dans le nom de la ville)

NOTE FINALE : 13/20

Techniquement la version la plus aboutie à sa sortie, la version PC est hélas pénalisée par des bugs qui la rendent bien plus difficile – pour de mauvaises raisons – que les version 8 bits.

Version PC-88
Ultima I : The First Age of Darkness

Développeur : Super Station Inc. – Desktop Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : Décembre 1988 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″ (x4)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Enfin un peu de couleurs !

Signe de son incontestable influence sur la scène du jeu de rôle japonais, la saga Ultima aura fatalement terminé sur les ordinateurs nippons les plus en vogue de la période, à savoir les machines de NEC, Sharp et Fujitsu. Parmi la première fournée, le PC-88 sera venu rappeler que les ordinateurs japonais était globalement des machines techniquement très supérieures à leurs homologues occidentaux, comme le prouve ici une réalisation qui n’a plus grand chose à voir avec les versions testées plus haut.

Les villes, plus vivantes que jamais

Graphiquement tout d’abord, la résolution est plus haute, c’est beaucoup plus coloré, et ce sentiment tenace que le noir restait – et de très loin – la couleur la plus présente à l’écran appartient désormais au passé. Ce n’est peut-être pas encore du Caravage, mais les extérieurs sont déjà nettement moins abstraits. La lisibilité est également bien meilleure sur les écrans de ville, et les monstres en vectoriels sont désormais remplacés par des sprites en bonne et due forme dans les donjons – les murs demeurant, pour leur part, en mode fil-de-fer. Tant qu’à faire, on gagne également des thèmes musicaux qui n’ont pas grand chose à voir avec les mélodies canoniques de la saga, mais qui correspondent globalement bien à l’ambiance. Bref, l’enrobage est indéniablement meilleur. Il faudra malheureusement composer avec deux défauts : le premier, mineur, étant que l’interface n’a pas bougé d’un iota et qu’elle ne tire toujours aucun parti de la souris, ce qui est un peu dommage. Le deuxième, plus pénalisant, est que le titre n’est bien évidemment disponible qu’en japonais, eu égard à son marché cible, ce qui risque de lui aliéner l’écrasante majorité des joueurs. Une version qui demeure néanmoins clairement dans le haut du panier, mais on lui préfèrera celle sur FM Towns.

Les donjons profitent de réels sprites, dorénavant

NOTE FINALE : 13/20

Premier servi au rang des ordinateurs japonais, le PC-88 délivre une version d’Ultima I qui fait indéniablement partie des plus plaisantes en termes de réalisation, mais qui sera hélas réservée aux joueurs à l’aise avec la langue nippone.

Version PC-98
Ultima I : The First Age of Darkness

Développeur : Newtopia Planning
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 21 Décembre 1988 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 5,25″ (x2)
Contrôleur : Clavier
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Difficile de faire plus lisible

À peu près au même moment que la version PC-88, Ultima I voyait également le jour sur le successeur de la machine de NEC, à savoir le PC-98. Inutile ici de s’attarder en long en large et en travers sur une version identique à 95% à celle que l’on vient d’aborder, mais on peut néanmoins choisir de s’attarder sur la seule différence notable, à savoir la résolution.

Observez le travail sur le moindre sprite

Les graphismes sont ici plus fins que jamais, et le gain qualitatif est particulièrement évident comparé à la version PC-88 (on sent bien que ce sont les graphismes de la version PC-98 qui auront servi de base pour la version PC-88 et non l’inverse). Le reste profitant des mêmes améliorations que sur PC-88 – thèmes musicaux, monstres présentés sous forme de sprites dans les donjons – on tiendrait presque ici la version « ultime » du jeu si elle n’était pas, une nouvelle fois, disponible uniquement en japonais – et surtout si la version FM Towns n’était pas venue offrir la même chose en mieux et en anglais. Une curiosité très sympathique pour les joueurs ayant la chance de parler japonais, néanmoins.

On aurait bien aimé que les murs des donjons soient également refaits, mais on ne va pas faire la fine bouche

NOTE FINALE : 13/20

Sorte de version de référence d’Ultima I jusqu’à la parution d’Ultima Trilogy sur FM Towns, cette itération PC-98 est à n’en pas douter une des plus plaisantes sur le plan de la réalisation – le contenu, lui, n’ayant pas bougé d’un micron depuis la version Apple II. Dommage qu’elle se réserve une nouvelle fois aux joueurs parlant japonais.

Version MSX

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Pony Canyon, Inc.
Date de sortie : 1989 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Non
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette japonaise testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 2
Graphiquement, cela reste assez frustre, mais c’est coloré

Débarquée un an après les premières versions publiées au Japon, l’itération MSX d’Ultima I est largement basée sur le portage réalisé pour le PC-88 (et pas sur celui du PC-98, sensiblement supérieur sur le plan de la réalisation). Pas d’écran-titre travaillé, cette fois : après les logos, on part directement du menu initial pour créer son personnage ou continuer sa partie.

Les villes tiennent toujours en un seul écran

Le jeu s’affiche dans une résolution toujours aussi étrange, mais le gain en couleurs reste appréciable. On constatera que les donjons, une nouvelle fois, sont présentés en 3D vectorielle avec des sprites en guise de monstres, et qu’on peut profiter d’un thème musical pour nous accompagner durant l’aventure. Tout cela est bienvenu, même s’il faudra bien évidemment composer avec un jeu presque intégralement en japonais. Autant dire que l’existence de la version FM Towns – jouable en anglais, elle – prive de fait celle-ci d’une grande partie de son intérêt. À réserver aux curieux.

Les monstres sont un peu plus « visuels » dans les donjons

NOTE FINALE : 13/20

Ultima I sur MSX accomplit l’essentiel, avec un contenu préservé, une jouabilité identique et une réalisation plutôt supérieure à ce qu’on avait pu voir sur les systèmes occidentaux. Malheureusement, le fait qu’elle n’existe qu’en japonais la réservera à un public de niche – autant lui privilégier directement l’itération FM Towns.

Version FM Towns
Ultima Trilogy : I · II · III

Développeur : ORIGIN Systems, Inc.
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Octobre 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

En 1990, les utilisateurs de FM Towns auront pu découvrir toute la trilogie originale d’Ultima en une seule fois, les trois premiers épisodes n’y ayant jamais été vendus indépendamment comme cela avait été le cas un peu plus tôt pour les autres ordinateurs japonais. L’occasion de profiter des capacités de la machine pour offrir une version sensiblement dépoussiérée sur le plan technique, comme vous pourrez le constater sur l’introduction ci-dessus ainsi que sur les captures d’écran: musique CD, graphismes en haute résolution, on sent tout de suite comme un bond technologique!

C’est quand même plus joli comme ça !

La bonne nouvelle, c’est que bien que l’introduction soit en japonais, le jeu, lui, est resté en anglais, et demeure donc parfaitement jouable pour un simple anglophone. La jouabilité n’a d’ailleurs pas changé, en dépit de la reconnaissance de la souris, même s’il y a désormais beaucoup plus d’informations à l’écran, la fenêtre de jeu reprenant l’interface « canonique » ayant été employée du troisième au sixième épisode. On remarquera d’ailleurs que les villes ne sont plus proposées sur un seul écran, mais qu’on peut dorénavant les visiter avec la même vue que le reste du monde. Mine de rien, cette petite refonte technique (très largement empruntée à la version PC-98 pour ce qui est des graphismes) fait un bien fou à un titre qui accusait bien son âge sur le plan visuel et sonore, et rend l’exploration de Sosaria sensiblement plus agréable, en particulier dans les donjons où les murs dessinés et les adversaires désormais clairement représentés sous forme de sprites ont bien plus de personnalité que les couloirs vectoriels directement repris d’Akalabeth ! Seul regret, la présence d’une barre rouge dont la seule fonction semble être de prendre de la place à l’écran, ainsi que d’une barre de titre, soit autant d’espace qui aurait pu être attribué à la fenêtre de jeu. Autant dire que si vous avez un FM Towns à portée de main, il serait dommage de vous priver de cette excellente version.

Les donjons ont ici davantage de personnalité…

NOTE FINALE : 13/20

Le contenu n’a peut-être pas changé d’un pouce, mais il faut reconnaître que cet Ultima I façon FM Towns bénéficie d’une réalisation technique et de quelques adaptations d’interface qui en font à coup sûr une des versions les plus agréables à parcourir aujourd’hui. Sachant qu’elle est également jouable en anglais, ne faites surtout pas l’impasse dessus si vous avez l’occasion de vous y essayer.

QUELQUES DÉTAILS SUR LA VERSION ORIGINALE

N’ayant pas pu me frotter moi-même à la version Apple II de 1981, elle ne sera pas testée ici. Cependant, j’ai décidé de partager avec vous les quelques informations que j’ai pu trouver sur elle, et qui sont majoritairement issues de la page Ultima Codex – d’où sont également tirés les images de cette version – et que je vous invite à consulter au passage si vous voulez en savoir plus sur la saga – à condition de savoir lire l’anglais.

La réalisation graphique de la version de 1981 était encore plus sommaire que celle de 1986 – on comprendra facilement que le remake se soit efforcé d’améliorer les choses dans ce domaine. Le plus frappant étant que strictement rien dans le jeu n’était animé : il faudrait attendre Ultima II pour voir bouger la mer, et Ultima III pour voir bouger les personnages. Le jeu souffre également de quantités de bugs absents du remake de 1986, le plus original étant celui qui modifie la disposition des donjons à chaque fois que vous entrez à l’intérieur. Non, ce n’était pas de la génération procédurale, juste une erreur de code… Notons également que la programmation en BASIC Applesoft du jeu a considérablement compliqué sa conversion vers d’autres systèmes : la version originale n’est compatible ni avec l’Apple IIe, ni avec l’Apple IIc, pas davantage qu’avec l’Apple IIc+ ou avec l’Apple IIgs – des problèmes de code rendent la partie spatiale impossible à gagner.

Les graphismes du jeu ne comportaient originellement aucune animation

Version Atari 8 bits

Parue en 1983, cette version a été pensée pour ressembler au maximum à la version Apple II – dont elle conserve au passage tous les bugs. Contrairement aux autres épisodes portés sur la machine, celui-ci affiche des couleurs semblables qu’on joue en NTSC ou en PAL – les versions PAL ayant, pour les autres épisodes, la fâcheuse habitude d’apparaître en noir et blanc. Je ne suis personnellement pas parvenu à la faire fonctionner au-delà de l’écran-titre, mais plusieurs images sont disponibles sur Ultima Codex, encore une fois, et vous pourrez les visionner ici.

Image tirée du site https://wiki.ultimacodex.com

Lemmings

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Testé sur : AmigaAcorn 32 bitsAmiga CDTVAtari STPC (DOS)PC-98Super NintendoZX SpectrumAmstrad CPCFM TownsGame BoyGame GearMacintoshMaster SystemMega DriveNESPC Engine CDSharp X68000Amiga CD32Commodore 64LynxSam Coupé3DO
Version non testée : CD-i

La saga Lemmings (jusqu’à 2000) :

  1. Lemmings (1991)
  2. Lemmings 2 : The Tribes (1993)
  3. The Lemmings Chronicles (1994)
  4. 3D Lemmings (1995)
  5. Lemmings Paintball (1996)
  6. Lomax (1996)
  7. Lemmings Revolution (2000)

Version Amiga

Date de sortie : 14 février 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2 (nécessite deux souris pour le mode deux joueurs)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au tout début des années 90, si vous aviez l’opportunité de croiser un joueur lambda et de lui demander conseil pour trouver un bon jeu de réflexion, celui-ci aurait probablement affiché une mine perplexe avant de vous rediriger vers une des très nombreuses adaptations de jeux d’échecs qui fleurissaient déjà sur tous les systèmes informatiques de l’époque. Et il faut bien reconnaître que dans un genre considéré comme étant « de niche », au milieu d’un médium encore relativement jeune, les jeux de réflexion constituaient encore une production très marginale, coincée entre le succès planétaire de Tetris et le recyclage permanent de concepts inusables comme celui de l’éternel Sokoban.

Lemmings est le jeu qui allait se charger de corriger cette anomalie.

Ne sont-ils pas adorables ? Oui, hein ? Mais bon, un conseil : ne vous attachez pas trop

A l’origine de ce tabac à l’échelle mondiale (la série aurait écoulé plus de vingt millions d’exemplaires, excusez du peu !) qui allait ensuite initier de nombreuses suites, extensions et autres spin-off (Oh No! More Lemmings, Christmas Lemmings, 3D Lemmings, Lemmings Paintball, liste très loin d’être exhaustive), un concept d’une simplicité géniale. Vous avez peut-être entendu parler des lemmings – les vrais – ces petits mammifères qu’une inexplicable pulsion suicidaire pousse soi-disant (on sait depuis que c’est faux) à se jeter par milliers depuis le haut d’une falaise. Eh bien imaginez qu’à présent, votre mission soit d’essayer de leur sauver la mise.

Les conditions de victoire sont clairement affichées au début de chaque niveau

Oh, certes, les Lemmings du jeu sont un peu différents des mammifères dont ils s’inspirent : avançant sur leurs pattes de derrières selon une démarche assez funky, ils sont capables, pour peu que vous leur en donniez l’ordre, de creuser, d’escalader, de construire des ponts, voire de bloquer le passage de leurs camarades… ou même de se faire sauter. Votre mission, si vous l’acceptez – mais c’est pour cela que vous avez acheté le jeu, après tout – sera donc de guider ces marcheurs suicidaires se contentant d’avancer tout droit jusqu’à leur mort afin qu’ils atteignent la sortie de chacun des 120 niveaux du jeu, classés en quatre modes de difficulté allant de « fun » (amusant) à « mayhem » (qu’on traduira par « grabuge », faute d’un meilleur terme).

Le jeu n’hésitera pas à vous induire en erreur

L’idée est simple, mais l’exécution sera un peu plus ardue. Guider un petit lemming au-delà des ravins, des pièges, des presses, des lances-flammes (!) est une chose, mais l’exercice peut sérieusement se compliquer lorsque vous en aurez cent, avançant joyeusement en file serrée, et que vous devrez trouver le moyen de canaliser l’enthousiasme de tout ce beau monde pour leur éviter de se précipiter vers la mort qui les attend vingt mètres plus loin. Chaque niveau propose à ce titre des objectifs – et un challenge – différents : un écran vous présente le nombre de lemmings qui seront sous votre responsabilité, le pourcentage que vous aurez à en sauver (et donc, par opposition, celui que vous pourrez vous permettre de sacrifier), ainsi que le temps qui vous est alloué – car oui, cela pourra également représenter un problème.

On trouve des références à d’autres titres édités par Psygnosis, comme ce niveau qui reprend le thème musical de Shadow of the Beast

Puis, une fois le niveau lancé, une (ou plusieurs) trappe(s) s’ouvre(nt), commençant à déverser les lemmings au compte-goutte ou, au contraire, en rangs serrés (deux boutons à gauche de votre interface vous permettent de régler la vitesse du flux, mais vous ne pourrez jamais le ralentir au-delà du seuil où il était placé au commencement du niveau ; si le niveau est configuré dès le début avec un flux réglé à fond, vous devrez faire avec), vous laissant à charge d’en guider le pourcentage demandé jusqu’à la sortie – ou aux sorties. Bien évidemment, la résolution du niveau sera en grande partie liée aux aptitudes qui vous seront attribuées, disponibles dans la barre au bas de l’écran, et dont le nombre limité d’utilisations vous sera figuré par un compteur.

Parfois, la solution est plus simple qu’il n’y parait…

En l’essence, tout le génie de Lemmings est là : l’objectif est limpide (mener les créatures jusqu’à la sortie), les différentes aptitudes seront assimilées au terme de cinq minutes de jeu (les premiers niveaux servent à les introduire chacune à leur tour dans une situation facile), et l’interface est d’une limpidité à toute épreuve. Tout juste faudra-t-il peut être tester une fois les deux boutons situés à l’extrémité droite pour comprendre leur fonction : les traces de lemmings désignent en fait la pause du jeu, absolument indispensable pour s’offrir le temps de réfléchir un peu dans les niveaux les plus complexes, et le champignon atomique enclenchera l’autodestruction de tous les lemmings présents sur la carte – le moyen le plus rapide pour recommencer un niveau mal engagé, ou simplement pour assouvir vos pulsions sadiques. Là où le jeu trouve la force de se renouveler sans cesse, c’est qu’une même carte peut offrir une petite balade de santé ou au contraire se transformer en un casse-tête sans nom simplement en changeant une des variables qui concourent à leur résolution.

…et parfois, c’est exactement l’inverse

Sauver 50% des lemmings, par exemple, n’est pas une gageure quand ils sont cent : cela vous autorise au contraire une certaine largesse dans vos résolutions d’énigmes puisque la moitié d’entre eux est sacrifiable. En revanche, lorsqu’ils sont deux… Dans le même ordre d’idées, isoler un lemming solitaire pour lui faire ouvrir la voie pendant que tout le reste du troupeau est sagement maintenu entre deux « bloqueurs » est souvent la méthode la plus évidente pour résoudre un niveau. Mais la donne change dramatiquement lorsque vous n’avez pas de « bloqueur », ou lorsque vous n’avez pas le droit de sacrifier quiconque – car le seul moyen de libérer un « bloqueur » est de le faire sauter… ou est-ce bien le cas ? Les choses se compliquent encore lorsque vous avez très peu de temps, ou que le flux est réglé au maximum, bref, dans toutes les situations où vous devrez soudainement composer avec tout le troupeau, et où votre adresse et votre réactivité compteront largement autant que votre réflexion pour espérer venir à bout d’un niveau.

Cinq lemmings et vous devez en sauver au moins quatre. Soyez attentif !

C’est d’ailleurs le seul aspect authentiquement frustrant du jeu : se retrouver à échouer lamentablement à un niveau pour lequel vous aviez parfaitement compris ce que vous aviez à faire, mais où tout est parti en sucette pour avoir cliqué une milliseconde trop tard, ou un millimètre trop à gauche ou à droite du lemming que vous cherchiez à viser dans ce chaos. Imaginez votre aigreur quand, après avoir passé cinq bonnes minutes à accomplir parfaitement les trente-cinq actions qui vous permettez de réussir un niveau, vous vous retrouvez à tout recommencer pour avoir malencontreusement raté la trente-sixième… Autant dire qu’on aurait aimé avoir la possibilité de ralentir le jeu – ou, au contraire, de l’accélérer un peu quand il ne reste rien d’autre à faire que de regarder les lemmings se diriger vers la sortie – mais rien à faire, on a tendance à relancer une partie juste histoire d’accompagner encore un peu ces irresponsables à cheveux verts.

Le seul moyen de libérer un « bloqueur » est de le faire sauter. Hasta la vista, baby !

Car l’une des grandes trouvailles du jeu est de ne pas vous confronter, pour une fois, à un concept aussi abstrait que des caisses ou des briques. Les lemmings peuvent avoir un côté atrocement attachant de par leur naïveté, et il faut les voir hausser les épaules avant d’être prêts à se jeter dans le vide lorsqu’il viennent d’utiliser les dernières planches de la passerelle que vous leur demandiez de construire pour ressentir une empathie naturelle qu’on avait plus de mal à ressentir en assemblant des formes géométriques pour faire des lignes. Oh, ne vous y trompez pas: il peut également y avoir quelque chose de jubilatoire à faire sauter tout ce beau monde, surtout après avoir passé plusieurs heures à vous arracher les cheveux à tenter de les sauver. Mais on admirera la vie que DMA Design est parvenue à insuffler à des petits êtres qui ne doivent pas excéder dix pixels de haut.

Atteindre la sortie est une récompense qui se mérite

Niveau réalisation, d’ailleurs, le jeu est très plaisant : les graphismes sont colorés, les différents univers sont variés (certains sont directement repris des autres jeux Psygnosis), l’animation est irréprochable (même si cela ralentit parfois un peu avec cent lemmings à l’écran), et la musique, pêchue et entrainante, mélange sans complexe les airs traditionnels, les mouvements de musique classique et les extraits de la B.O. du Bon, la Brute et le Truand (!) afin d’engendrer une bonne humeur relativement communicative.

On appréciera la présence d’un mode deux joueurs

Notons également que, jamais avare de bonnes idées, Lemmings version Amiga propose également un mode deux joueurs – à condition d’avoir deux souris. L’objectif devient alors compétitif : chaque joueur dispose de son entrée, de sa sortie et de son propre groupe de lemmings, et doit sauver davantage de monde que son adversaire. Inutile de vous dire que, rapidement, l’idée devient de placer un maximum de bâtons dans les roues de votre concurrent afin de faire un meilleur score que lui et que cela peut donner lieu à quelques scènes mythiques et à de franches rigolades – ou à de sévères engueulades, selon l’état d’esprit des joueurs. On appréciera le fait d’avoir intégré ce mode à un jeu qui était déjà pleinement satisfaisant en solitaire.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 18/20 Le panthéon des jeux pouvant se vanter de n'avoir pas pris une ride plus de 25 ans après leur sortie ne compte sans doute pas beaucoup d'occupants, mais Lemmings n'y a certainement pas volé sa place. Le concept est enfantin, le challenge est réel, la jouabilité est irréprochable et la réalisation a un charme fou. Si jamais vous n'avez jamais posé les mains sur ce jeu, tentez votre chance. Vous passerez, à n'en pas douter, un très bon moment. CE QUI A MAL VIEILLI : – Le fait que l'adresse prime parfois sur la réflexion peut s'avérer frustrant – On aurait bien aimé pouvoir accélérer un peu la fin des niveaux, lorsqu'on se borne à regarder les lemmings atteindre la sortie

Les avis de l’époque :

« Lemmings est un jeu passionnant, dont l’humour séduira les plus endurcis et la réflexion les plus blasés. C’est la grande sortie du mois, et si vous ne pouvez acheter qu’un seul jeu, n’hésitez pas, prenez Lemmings, vous serez sûr de l’amortir rapidement. »

KA, Joystick n°13, février 1991, 97%

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Lemmings sur un écran cathodique :

Version Acorn 32 bits

Développeur : Krisalis Software Limited
Éditeur : Krisalis Software Limited
Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur A3000
Configuration minimale :
Système de sauvegarde par mot de passe

Grand habitué des portages depuis l’Amiga vers l’Archimedes, c’est une nouvelle fois le studio Krisalis qui est à la tâche pour cette version de Lemmings. Comme souvent, la machine d’Acron n’a absolument aucune raison de rougir face à celle de Commodore d’un point de vue strictement technique : les graphismes sont pour ainsi dire identiques à ceux de la version Amiga, et les thèmes musicaux sont peut-être même encore meilleurs, grâce à des instruments très bien rendus. Naturellement, le contenu comme la jouabilité n’ont pas bougé d’un iota… en-dehors de la disparition, somme toute assez anecdotique, de l’introduction et de celle – déjà nettement plus dommageable – du mode deux jours, un sacrifice que de nombreuses versions étaient hélas appelées à connaître. C’est d’autant plus frustrant que ce sont bien les seuls défauts que l’on puisse trouver à cette version autrement inattaquable du jeu. Rien d’insurmontable pour ceux qui comptaient de toute façon se limiter au mode solo, mais de quoi encourager les autres à se diriger vers des machines comme l’Amiga, l’Atari ST, la Super Nintendo ou la Mega Drive.

NOTE FINALE : 17,5/20

Encore un portage techniquement irréprochable à ajouter au CV de Krisalis : Lemmings sur Archimedes fait largement jeu égal, et peut-être même un peu mieux encore que son modèle, au détail près qu’il faudra compter sans les vingt niveaux du mode deux joueurs. Une perte dommageable, mais qui n’aura pas dû empêcher les rares possesseurs de la machine d’Acorn de se jeter sur cet excellent jeu.

Version Amiga CDTV

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Septembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris, télécommande
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe
Un changement ? Ou ça ?

Ah, le CDTV… la brillante trouvaille de Commodore, qui pensait rivaliser avec le CD-i en ajoutant un lecteur CD-ROM à un Amiga 500 sans clavier ni souris et en vendant le tout pour 1000$. À quoi sert le support CD dans le cas de cette adaptation ? Eh bien au moins, les choses vont aller vite : à rien. Ou plutôt, à intégrer une publicité pour un jeu nommé Planetside et que Psygnosis n’aura au final jamais commercialisé. En-dehors de cela ? C’est tout bêtement la version Amiga copié sur la galette, au pixel près – le jeu ne pèse même pas 1Mo. Le mode deux joueurs semble avoir sauté dans la manœuvre – je ne sais pas s’il est possible de brancher deux souris sur un CDTV – mais comme tous les sites répertoriant le jeu semblent affirmer le contraire, je vais mettre l’information au conditionnel. Dans tous les cas, une seule chose est sure : ne vous fatiguez pas à écumer toutes les brocantes pour trouver spécifiquement cette version si votre ambition est simplement de jouer à Lemmings.

NOTE FINALE : 17,5/20

Prenez la version Lemmings d’Amiga, copiez-la sur un CD-ROM – tada ! Voilà votre version CDTV flambant neuve, avec un peu de pub au passage pour un jeu qui n’aura jamais vu le jour, on n’est pas à ça près. Bref, autant jouer directement à l’original – surtout que le mode deux joueurs ne semble même pas avoir fait le trajet jusqu’à cette version.

Version Atari ST

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 260 ST – RAM : 512ko
Écran couleur requis
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Graphiquement identique à la version Amiga pendant le jeu, la version Atari ST réintroduit la petite introduction – sans le son, curieusement – ainsi que le mode deux joueurs. Sur le plan sonore, elle est en revanche un cran en-dessous de la version Amiga, comme on pouvait s’y attendre, mais rien de traumatisant.

On ne sera pas dépaysé par ce portage

NOTE FINALE : 18/20

Très fidèle à la version originale, la version Atari ST de Lemmings ne lui est inférieure que sur des détails. Toujours une très bonne pioche, donc.

Version PC (DOS)

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Juin 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Disquettes 5,25 et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 3.0 – RAM : 512ko (640ko pour les modes EGA et VGA)
Modes vidéo supportés : Amstrad, CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Tandy/PCjr
Système de sauvegarde par mot de passe
On remarque que le mode deux joueurs a disparu…

Sortie et développée en même temps que la version Amiga, la version PC y reste très fidèle – à deux ou trois détails près. Premièrement, on remarquera que la courte introduction du jeu n’est plus présente – ce n’est pas un drame, mais on est en droit de se demander pourquoi. Deuxièmement, le mode deux joueurs a disparu, ce qui est beaucoup plus difficilement excusable : non seulement il était tout à fait possible de brancher deux souris sur les PCs de l’époque (demandez aux joueurs de The Settlers), mais en plus le jeu est également jouable au clavier ou au joystick ; aucune excuse, donc. En terme de réalisation, les différences graphiques sont infimes, et tournent plus autour de la barre d’action que de l’écran de jeu en lui-même. Côté sonore, le jeu reconnait les cartes sonores Sound Blaster et AdLib, mais pas la MT-32, ce qui lui permet d’offrir une qualité musicale assez proche, quoique sensiblement inférieure, à celle de la version Amiga. Les bruitages ont en revanche été réduits à leur portion congrue : plus de « Oh no! » avant une explosion, et vous n’entendrez plus les cris de détresse de vos Lemmings en train de se noyer.

…Mais pour le reste, on est en terrain connu

NOTE FINALE : 17,5/20

A première vue simple copier/coller de la version Amiga, la version PC se révèle avoir été amputée de deux ou trois petites fioritures, et surtout d’un mode deux joueurs qu’elle aurait pourtant parfaitement pu assumer, ce qui lui coûte un demi-point. Pour le reste, le jeu solo est toujours aussi agréable.

Version PC-98

Développeur : BANDIT Inc.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 17 décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise
Configuration minimale :
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Signe de son succès planétaire, Lemmings n’aura également pas tardé à débarquer sur la quasi-totalité des ordinateurs japonais. Le premier servi aura été le PC-98 de NEC, lequel aura hérité pour l’occasion d’une version identique à 95% à celle parue sur Amiga. Inutile de chercher ici le frisson de l’exotisme ou d’espérer une réalisation en haute résolution : on se retrouve tout bêtement avec un portage strict du jeu que l’on connait tous, de l’introduction au contenu en passant par les graphismes et les thèmes musicaux… avec pour seule différence notable la disparition du mode deux joueurs. Une coupe dommageable et un tantinet arbitraire, mais pour le joueur solo, rien à redire.

Difficile d’être dépaysé, hein ? (ne faites pas attention aux glitchs au-dessus de la barre d’action, ils sont dus à l’émulation et non au jeu)

NOTE FINALE : 17,5/20

Simple portage pixel perfect de l’original sur Amiga, Lemmings sur PC-98 aura néanmoins perdu le mode deux joueurs en route. Un retrait inexplicable et injustifié qui ne devrait néanmoins pénaliser en rien l’expérience du joueur solo.

Version Super Nintendo

Développeur : Sunsoft
Éditeur : Sunsoft
Date de sortie : 18 décembre 1991 (Japon) – Mars 1992 (États-Unis) – Septembre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Première machine servie parmi les consoles de salon, la Super Nintendo n’aura a priori pas trop eu à souffrir de cette précocité. Tout le contenu du jeu est là, à sa place, avec une introduction entièrement redessinée pour l’occasion – et plutôt bien, qui plus est – et un mode deux joueurs qui n’a pas été sacrifié. Seul petit oubli sur le menu principal : impossible de choisir sa difficulté, il vous faudra donc impérativement partir de l’équivalent du premier niveau du mode Fun si vous n’avez pas les mots de passe.

Niveau réalisation, le jeu est assez proche de la version Amiga – les graphismes m’ont paru légèrement moins colorés que sur la machine de Commodore, ce qui est assez étrange quand on sait que le hardware de la Super Nintendo peut largement rivaliser de ce côté-là. La résolution un peu plus basse laisse également moins de place à l’écran – rien de franchement dramatique, reconnaissons-le. L’interface tire parti de tous les boutons de la manette, histoire de rendre la navigation plus souple – et on appréciera également que la barre d’aptitudes ait été intégralement redessinée, parce qu’elle a fière allure. Musicalement, le jeu fait encore mieux que la version originale : les morceaux sont rythmés, entrainants, et font parfaitement usage des capacités de la machine.

La réalisation est très proche de celle de la version Amiga – admirez les nouvelles icônes dans la barre inférieure

NOTE FINALE : 18/20

Très agréable surprise que cette version Super Nintendo, qui réalise un sans-faute – au point d’ailleurs de pouvoir même être éventuellement considérée légèrement supérieure à la version Amiga. Une valeur sure dans la ludothèque de la 16 bits de Nintendo.

Récompenses :

  • Tilt d’or 1991 (Tilt n°97, décembre 1991) – Jeu le plus original sur console

Version ZX Spectrum

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Décembre 1991
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick Kempston
Version testée : Version cassette
Configuration minimale : RAM : 48ko
Système de sauvegarde par mot de passe
Inutile de remuer le couteau dans la plaie : je pense qu’on comprend très vite où se situent les limites de cette version

Comme beaucoup d’ordinateurs 8 bits – lesquels étaient certes toujours populaires, mais clairement en fin de vie en décembre 1991 – le ZX Spectrum aura dû opérer de nombreux sacrifices pour pouvoir accueillir Lemmings. Bien évidemment, pas d’animation d’introduction ici, et pas davantage de mode deux joueurs ; les niveaux sont répartis sur les deux faces de la cassette en fonction du niveau de difficulté, et il n’y en a plus que soixante au total. On a bien le droit à un thème musical, mais celui-ci ne se fait plus entendre une fois passé l’écran-titre, et il n’y a plus vraiment de bruitages au-delà de quelques « bips » une fois la partie lancée. En étant méchant, on pourrait presque dire qu’il n’y a plus de graphismes non plus, car la réalisation exclusivement monochrome rend la lisibilité très problématique : on a l’impression de voir le jeu en ombres chinoises, et il est strictement impossible de comprendre quoi que ce soit lorsque plusieurs lemmings commencent à se retrouver au même endroit. Sachant que l’action se traine au dernier degré, on pourra certes largement comprendre que les possesseurs de la machine de Sinclair ait été heureux de bénéficier de leur version du jeu qui faisait alors fureur, mais avec le regard un peu moins conciliant du XXIe siècle, on n’a tout simplement aucune raison de lancer cette version aujourd’hui.

NOTE FINALE : 08/20

Inutile d’accabler le ZX Spectrum, mais proposer une version à peu près préservée de Lemmings sur cette machine était visiblement un défi un peu trop difficile à surmonter. Amputé de la moitié de son mode solo ainsi que de son mode deux joueurs, le titre est surtout à la fois lent, illisible et peu maniable, ce qui fait qu’on laissera objectivement cette version aux nostalgiques de la machine de Sinclair.

Version Amstrad CPC

Développeur : Walking Circles
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Juin 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko*
Système de sauvegarde par mot de passe
*Optimisation pour les modèles à 128ko
L’essentiel est toujours là, mais c’est quand même beaucoup moins lisible

Parue sur un CPC en fin de vie, cette version de Lemmings ne peut évidemment pas espérer rivaliser avec les versions 16 bits – mais elle fait de son mieux. Les graphismes sont très corrects (même s’il est souvent un peu difficile de distinguer quoi que ce soit dans la bouillie de pixels de vos lemmings), et les modèles disposant de 128ko de RAM pourront bénéficier de la musique. Malheureusement, l’action est très lente, il aura également fallu tailler dans le contenu : plus d’introduction, plus de mode deux joueurs, et il n’y a désormais que 60 niveaux (soit la moitié du jeu qui passe à la trappe). Pour ne rien arranger, plusieurs versions connaissent des bugs en rapport avec l’écoulement du temps, voire avec le système de mot de passe. Bref, une bonne version pour le support, mais pas celle sur laquelle vous aurez envie de vous précipiter aujourd’hui.

NOTE FINALE : 14/20

La fin d’une ère, pour cette version 8 bits, à laquelle il sera beaucoup pardonné par les nostalgiques de la machine d’Amstrad, mais moins par les autres.

Version FM Towns

Développeur : 4000Do Inc.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : Avril 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction du jeu :

Comme on aura déjà pu en avoir un indice avec la version PC-98, Lemmings n’était pas exactement décidé à revoir sa copie en profondeur en arrivant sur les ordinateurs japonais – mais après tout, pourquoi l’aurait-il fait ? Inutile, donc, de faire durer le suspense : support CD-ROM ou pas, le fait est qu’on hérite d’un portage pratiquement « pixel perfect » de la version Amiga (au détail près que la barre d’action au bas de l’écran n’est cette fois pas en haute résolution, mais vous devriez vous en remettre)… moins le mode deux joueurs, encore une fois. Pour le reste, rien ne manque, pas même la petite animation d’introduction, et vous n’aurez pas besoin de lire un seul caractère en japonais puis le jeu est resté en anglais. Tant pis pour l’exotisme, donc, mais les très nombreux joueurs occidentaux n’ayant pas eu la chance de posséder un FM Towns sauront à présent que dans ce cas précis, ils n’ont rien raté.

Non, n’insistez pas : il n’y a pas de musique CD

NOTE FINALE : 17,5/20

Les joueurs japonais n’aspiraient visiblement pas à écouvrir une version de Lemmings présentant une quelconque différence avec l’originale, ils auront donc hérité d’un portage strict de la version Amiga, en perdant le mode deux joueurs. Rien de bouleversant, mais ceux qui chercheront la verison ultime ne devront pas chercher par ici.

Version Game Boy

Développeur : Ocean Software Ltd.
Éditeur : Ocean Software Ltd.
Date de sortie : 21 décembre 1992 (Europe) – 23 septembre 1993 (Japon) – Août 1994 (États-Unis)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb
Système de sauvegarde par mot de passe
C’est lent, ce n’est pas très lisible, et c’est surtout bugué…

La petite portable de Nintendo fait ce qu’elle peut, en parvenant à rester lisible en dépit de la petitesse de son écran – notamment parce que la barre d’action n’apparait qu’après pression du bouton B. Pour le reste, il faut reconnaitre que le jeu est un peu plus lent et bénéficie du service minimal en termes d’animations. On retrouve les mêmes faiblesses que sur NES, avec des chutes mortelles dès le premier niveau. Beaucoup plus grave : certains niveaux (Fun 21, Tricky 16) sont bugués et sont impossibles à finir. Autant dire que c’est inacceptable pour une version commerciale vendue à son époque au prix fort.

NOTE FINALE : 09/20

La version Game Boy de Lemmings aurait sans doute pu être considérée comme une version honnête si quelqu’un s’était donné la peine de la tester dans son entier. En l’état, votre seule chance de voir l’intégralité du jeu sera de trouver la liste de codes extraits directement depuis la console, ce qui est assez navrant.

Version Game Gear

Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Novembre 1992 (Europe) – Décembre 1992 (États-Unis) – 5 février 1993 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles et un câble Gear-to-Gear)
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Console
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe
Non, ceci n’est pas un zoom pratiqué sur la version Master System

Exception faite de la taille réduite de l’écran, la version Game Gear est pratiquement identique, comme on va le voir, à son homologue sur Master System (développée en parallèle et publiée à peu près au même moment). Histoire de gagner de la place, la barre d’action n’apparait que lorsque vous approchez le curseur du bas de l’écran – ce qui est une bonne idée, mais l’interface NES/Game Boy restait mieux pensée à ce niveau. Pour le reste, plus d’introduction, mais le mode deux joueurs, lui, est toujours de la partie (contrairement à ce qui se produira sur Master System), ce qui est une très bonne surprise.

NOTE FINALE : 17/20

Une fois n’est pas coutume, la Game Gear de Lemmings se place très au-dessus de sa rivale de Nintendo en offrant une des meilleures versions portables, notamment grâce à l’inclusion du mode deux joueurs.

Version Macintosh

Développeur : Presage Software, Inc.
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Octobre 1992 (Japon) – Avril 1993 (États-Unis, Europe)
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68000 – OS : System 4.0* – RAM : 1Mo*
*La version couleur nécessite System 6.0.5 avec QuickDraw en 256 couleurs ainsi que 2Mo de RAM
Aucune révolution, et on a perdu le mode deux joueurs, mais l’essentiel est là.

Comme de nombreux titres du début des années 90, Lemmings aura entrepris le détour sur une machine qui commençait à présenter de solides arguments en faveur du jeu vidéo : le Macintosh. Pour l’occasion, DMA Design aura préféré confier le portage à Presage Software, qui sera visiblement parti de la version PC pour assurer cette adaptation. On se retrouve en effet face à la copie conforme de la version PC… avec une résolution doublée, néanmoins, ce qui permet de profiter de graphismes plus fin. À tout prendre, on aurait sans doute préféré rester en 320×200 si cela avait permis de conserver l’introduction et surtout le mode deux joueurs, mais il faudra bel et bien composer avec les mêmes coupes que sur la machine d’IBM. Là encore, on accusera davantage la grosse flemme qu’une quelconque limitation technique. Pour tout le reste, le jeu est fort heureusement toujours aussi bon.

NOTE FINALE : 17,5/20

Prenez la version PC de Lemmings, doublez sa résolution, et Ta-da ! Voilà votre portage Macintosh du succès planétaire de DMA Design. Dommage que cela signifie tirer un trait sur l’introduction et sur le mode deux joueurs, mais l’expérience solo est plus à la hauteur que jamais.

Version Master System

Développeur : Probe Software Ltd.
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Décembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe
Les couleurs sont quand même moins tristes que sur NES !

Très bonne surprise que cette version Master System : le jeu est très coloré, plus joli que son homologue sur NES (programmé, lui, par une équipe interne d’Ocean), et il est également très fluide. La jouabilité, elle, vous commande d’aller sélectionner les commandes sur la barre du bas avec le curseur plutôt que d’utiliser un raccourci comme sur NES. Niveau sonore, les musiques passent très bien, les digitalisations sont très propres, et on a même le droit à un petit jingle à chaque niveau réussi. Seuls sacrifiés : l’introduction et le mode deux joueurs (pourtant présent sur Game Gear), mais cette version Master System reste de haute volée.

NOTE FINALE : 16,5/20

Peut-être la meilleure version de toutes les machines 8 bits, Lemmings sur Master System est un véritable petit bijou. Dommage que le mode deux joueurs n’ait pas fait le trajet jusqu’à elle.

Version Mega Drive

Développeur : Sunsoft
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Novembre 1992 (États-Unis, Japon) – 14 décembre 1992 (Europe)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Pas de changement dans le contenu de cette version Mega Drive par rapport à sa grande sœur sur Amiga : les 120 niveaux sont bien là, accompagnés de l’introduction et du mode deux joueurs. Le jeu est un peu moins coloré que sur Amiga – ce qui peut surprendre quand on sait à quel point les caractéristiques des deux machines sont proches dans ce domaine, et surtout le jeu est en fait affiché dans une résolution native équivalente à celle de la Super Nintendo, plus basse que ce à quoi nous avait habitué la machine. La musique reprend tous les thèmes de la version originale en les adaptant aux capacités sonores de la console de SEGA – qui sont très correctes sans être renversantes. Côté bruitages, les digitalisations, en revanche, souffrent vraiment de la comparaison avec l’Amiga : ça crache, ça grésille, et c’est à peine compréhensible – c’est même moins bon que sur Master System, un comble ! Comme dans toutes les versions consoles, même si le jeu est parfaitement jouable au pad, on perd immanquablement en précision – ce qui, dans un titre où il faut parfois être capable de sélectionner un lemming au pixel près, peut être assez handicapant. On notera également que cette version comporte quelques nuances avec la version Amiga dans les derniers niveaux, où certains stages ont été remplacés par des niveaux d’Oh No! More Lemmings – on trouve même un niveau spécial avec les personnages d’U·four·ia.

Graphiquement, la Mega Drive est capable de mieux que ça, mais rien de dramatique non plus

NOTE FINALE : 18/20

Techniquement légèrement inférieure à la version Amiga – autant du côté graphique que du côté sonore – cette version Mega Drive reste une très bonne alternative, notamment parce qu’elle conserve le mode deux joueurs.

Version NES

Développeur : Ocean Software Ltd.
Éditeur : Sunsoft
Date de sortie : Novembre 1992
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Techniquement, la version NES s’en sort très bien : les graphismes sont lisibles, parfois étonnamment fins pour les capacités de la console, la musique est toujours là, le jeu a même sa propre petite introduction. On note bien quelques effacements de sprites, mais avec autant de monde à l’écran, c’était inévitable sur la machine de Nintendo. En revanche, le portage réserve petite surprise : ce doit être l’une des seules versions (avec celles sur Game Boy et sur Lynx) où j’ai vu des lemmings mourir dès le premier niveau, la faute à une partie supérieure placée trop haut qui fait que les lemmings qui tombent à la suite de vos creuseurs s’écrasent misérablement. Bref, une version qui trouve le moyen de vous compliquer la tâche – mais qui reste parfaitement jouable, même si le mode de sélection des pouvoirs, en laissant le bouton B appuyé et en utilisant les flèches, pourra demander un petit temps d’adaptation. Sans surprise, le mode deux joueurs a également disparu.

Dès le premier niveau, cette version affirme sa différence

NOTE FINALE : 16/20

Version de très bonne qualité mais avec son lot de surprises, Lemmings sur NES vient enrichir une ludothèque déjà très fournie sans avoir à rougir de sa prestation.

Version PC Engine CD

Développeur : Kuusoukagaku Corp.
Éditeur : Sunsoft
Date de sortie : 27 novembre 1992
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Dans la (très) longue liste de machines à avoir accueilli un portage de Lemmings, la PC Engine aura été une des premières à mettre à profit le support CD-ROM (avec le CDTV la même année). Jamais distribuée officiellement hors du Japon, cette version portée par Kuusoukagaku (à vos souhaits !) délivre en tous cas une prestation tellement irréprochable qu’on peut sans trop de risque la hisser au rang des meilleures. Si le CD-ROM n’est pas franchement mis à contribution lors de l’introduction – directement reprise de la version Amiga – il l’est en revanche pendant le jeu, où les thèmes musicaux ont été entièrement remixés tout en demeurant parfaitement fidèles à ceux entendus dans la version originale ! L’ambiance ainsi rendue est extrêmement sympathique, pas franchement gâchée par une réalisation toujours aussi colorée qui ne souffre pas de la résolution réduite de la machine. La jouabilité est nerveuse et impeccable (on laisse appuyé le bouton II pour sélectionner son pouvoir avec les flèches gauche et droite), le mode deux joueurs est toujours présent – bref on touche au sans-faute, et le titre ne comprenant de toute façon pas un mot de japonais, les joueurs occidentaux n’auront aucune raison d’hésiter à le lancer. Une vraie bonne surprise, et un excellent jeu de réflexion pour la PC Engine CD.

Tout fonctionne très bien, et c’est tant mieux

NOTE FINALE : 18,5/20

Parmi les prétendantes à la version ultime de Lemmings, l’itération PC Engine CD peut clairement s’avancer sans fausse pudeur : entre une réalisation réussie, une musique CD de haute volée et un contenu qui n’a été amputé de rien, on peut trouver ici absolument tout ce qu’on était venu y chercher. Incontournable.

Version Sharp X68000

Développeur : BANDIT Inc.
Éditeur : Imagineer Co., Ltd.
Date de sortie : 17 avril 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette japonaise testée sur Sharp X68000
Configuration minimale : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

On a tellement pris l’habitude de voir le Sharp X68000 nous offrir des portages ébouriffants de jeux d’arcade que le fait de le voir offrir un titre développé sur Amiga est presque une anomalie – qui traduit néanmoins le succès planétaire rencontré quasi-instantanément par Lemmings. Au grand jeu de l’adaptation, l’équipe de BANDIT n’aura en tous cas pris aucun risque : pas de fioritures ici, c’est, comme sur PC-98, face à une transposition extrêmement fidèle de la version Amiga que l’on se trouve. Pas de graphismes redessinés, pas d’animations supplémentaires, pas de thèmes remixés, mais pas de coupes non plus cette fois, ce qui fait que vous pourrez jouer à deux. Bref, aucune prise de risque, mais on ne peut pas franchement dire que le jeu en nécessitait, de toute façon. Inutile de vous ruiner pour acquérir cette adaptation, donc, mais si vous avez la chance de posséder un Sharp X68000, aucune raison de se sentir roulé non plus.

Rien de neuf, mais ce n’était de toute façon pas l’objectif de cette version

NOTE FINALE : 18/20

Aucune surprise, bonne ou mauvaise : Lemmings sur Sharp X68000 correspond à un portage presque pixel perfect de la version parue sur Amiga. Tout le contenu est là, y compris le très appréciable mode deux joueurs, et la réalisation est toujours aussi agréable. Rien à redire.

Version Amiga CD32

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Novembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version britannique
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe
Absolument rien de neuf

Une nouvelle fois, les choses vont aller vite : vous vous souvenez de la version Amiga CDTV ? Eh bien cette version CD32 est rigoureusement identique, au point qu’il y a un débat pour savoir s’il s’agit ou non d’une version officielle – même la publicité pour Planetside est toujours fidèlement à sa place. Du coup, inutile de prétendre chercher une nuance, c’est toujours exactement la même chose que la version Amiga, moins le mode deux joueurs.

NOTE FINALE : 17,5/20

Recyclage d’une version elle-même recyclée, Lemmings sur Amiga CD32 n’est rien de plus que la copie de la version Amiga, moins le mode deux joueurs. Sauf à vouloir jouer à la manette, aucune raison de priviliégier cette version, donc.

Version Commodore 64

Développeur : E&E Software
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Novembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette
Configuration minimale :
Système de sauvegarde par mot de passe
Tout est toujours là, à sa place, et ça tourne très bien

Voir un jeu sortir sur Commodore 64 fin 1993 pourra surprendre – mais Lemmings a vraiment dû être porté sur toutes les machines possibles et imaginables, en comptant les calculatrices. Pour sa défense, cette version fait un superbe travail en parvenant à animer jusqu’à une cinquantaine de lemmings à l’écran – le tout sans sacrifier le scrolling, ni la musique, un vrai exploit ! Le jeu comprend pas moins de 100 niveaux – ce qui fait certes 20 de moins que l’original mais reste très impressionnant étant donné les faibles capacités de stockage de la machine de Commodore. Inutile de préciser que le mode deux joueurs est passé à la trappe, mais cette version réussit l’exploit d’être presque aussi jouable que ses consœurs sur 16bits, et on l’en félicite.

NOTE FINALE : 15/20

Évidemment, comparée aux capacités de la machine sur laquelle elle a été programmée, cette version de Lemmings mériterait un 20/20 – mais il est ici question de la comparer aux autres versions du jeu et personne ne sera surpris qu’elle soit inférieure à celles parues sur des machines beaucoup plus puissantes. Reste un très bon portage, qui a dû ravir les derniers possesseurs de C64.

Version Lynx

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : Septembre 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Décidément, après la déception que représentait la version Game Boy, les portables se rebiffent ! Allons droit au but : la version Lynx est magnifique, et parvient à se rapprocher de la version Amiga en dépit d’une résolution très basse et d’un hardware très inférieur, un bel exploit. C’est fluide, c’est jouable – le jeu a l’excellente idée de passer en pause pendant que vous faite apparaitre le menu avec les compétences – c’est très beau et il ne manque que le mode deux joueurs, même la petite introduction est là. En plus, musicalement, la petite portable d’Atari se défend avec les honneurs, et tous les bruitages digitalisés répondent à l’appel. Une version qui pourrait servir d’exemple à plusieurs autres.

On se croirait presque sur Amiga !

NOTE FINALE : 17/20

Difficile d’imaginer faire beaucoup mieux sur une des consoles portables de l’époque. Tout y est, et de la plus belle façon qui soit. S’il fallait choisir le meilleur jeu de la ludothèque de la Lynx, voici un très sérieux candidat.

Version Sam Coupé

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : FRED Publishing
Date de sortie : 1993
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe
Pour du 8 bits, c’est plus que correct !

Énième signe du succès rencontré par Lemmings, le titre aura également été porté sur l’éphémère Sam Coupé, un ordinateur 8 bits relativement confidentiel vendu à à peine 12.000 exemplaires. Pour l’occasion, le portage s’en sort incontestablement mieux que sur ses alter ego plus anciens qu’étaient le CPC, le C64 ou le ZX Spectrum : les graphismes sont très proches de ceux de l’Amiga, même si la fenêtre de jeu est cette fois encadrée de grandes bandes noires, et la musique est aussi sympathique qu’elle est variée, avec même un thème pendant l’écran-titre (et un spécialement consacré aux longs chargement). Au rang des sacrifices, il n’y a plus d’introduction, plus de mode deux joueurs, plus de bruitages, et le jeu est sensiblement plus lent que sur les systèmes 16 bits, mais la jouabilité n’en souffre pas. Bref, une opportunité comme une autre de découvrir la sympathique machine conçue par Miles Gordon Technology.

NOTE FINALE : 16,5/20

Lemmings sur Sam Coupé nous montre ce que le petit ordinateur 8 bits avait dans le ventre, et la réponse est : de quoi se défendre. Si le titre est un peu lent et perd son mode deux joueurs, la réalisation sonore très sympathique et les graphismes à la hauteur nous font presque oublier qu’on n’est pas sur une machine 16 bits. Une très bonne surprise.

Version 3DO

Développeur : DMA Design Limited
Éditeur : Psygnosis Limited
Date de sortie : 1994
Nombre de joueurs : 1
Disponible en français : Non
Disponible en anglais : Oui
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’introduction du jeu :

Lemmings n’était visiblement pas décidé à arrêter son expansion sur les systèmes 8 et 16 bits. La 3DO aura également connu son adaptation – à une époque où elle aurait d’ailleurs pu prétendre à héberger Lemmings 2, paru l’année précédente, mais seul le premier épisode aura fait le trajet. Pour la forme, le jeu hérite d’une toute nouvelle introduction en 3D, histoire de justifier un peu d’utiliser le CD-ROM, et propose surtout des thèmes musicaux entièrement remixés en qualité numérique – tout en restant parfaitement fidèles à ceux entendus sur Amiga ! Sachant que la réalisation graphique est, pour sa part, un calque précis de la version originale (à quelques très légères fioritures près, l’interface étant légèrement plus dépouillée ici…), on tiendrait sans doute là le portage ultime… si le mode deux joueurs n’était pas passé à la trappe pour une raison inconnue ! C’est réellement dommage, car tout le reste est inattaquable, mais cela reste en tous cas une des toutes meilleures versions publiées.

Aucune mauvaise surprise du côté de la réalisation graphique

NOTE FINALE : 18/20

Un cheveu, c’est ce qu’il aura manqué à cette version 3DO de Lemmings pour être l’incontestable meilleure du lot. La réalisation irréprochable et l’apport de la musique CD sont deux gros points forts, mais il faudra tirer un trait sur le mode deux joueurs. Pour ceux qui ne jurent de toute façon que par le solo, c’est clairement une version à privilégier.

Dragon Lore : La légende commence

Développeur : Cryo Interactive Entertainment
Éditeur : Mindscape, Inc.
Titres alternatifs : Dragon Lore : The Legend Begins (États-Unis, Royaume-Uni), Dragon Lore : Se inicia la Leyenda (Espagne), Dragon Lore : Die Legende beginnt (Allemagne), Dragon Lore : A Lenda se inicia (Brésil), Dragon Lore (3DO)
Testé sur : PC (DOS)3DO
Disponible sur : Macintosh, Windows (7, 8, 10)
Version non testée : PC-98
En vente sur : GOG.com

La saga Dragon Lore (jusqu’à 2000) :

  1. Dragon Lore : La Légende Commence (1994)
  2. Dragon Lore II : Le Coeur de l’Homme-Dragon (1996)

Version PC (DOS)

Vidéo – L’introduction du jeu :

Au début des années 90, Cryo Interactive a commencé à capitaliser sur le succès, tant critique que commercial, de son excellente adaptation de Dune pour se forger une réputation de studio à la patte inimitable, que ce soit graphiquement ou musicalement.

La « French Touch » semblait alors avoir le vent en poupe, tandis qu’Eric Chahi provoquait un tremblement de terre à sa façon avec Another World, ou que des titres tels que Captain Blood, sorti quelques années plus tôt, avaient durablement marqués les esprits à l’échelle internationale. Les années passant, cependant, jusqu’au début des années 2000, une autre réputation – un peu moins flatteuse – commença à coller à la peau des productions françaises : celle de programmer des jeux magnifiques, à la réalisation de haute volée… mais avec un intérêt ludique flirtant dangereusement avec le néant. Or, nous voici justement en 1994, année de la sortie de Dragon Lore : La légende commence, et une question pourrait rapidement se dessiner : cette réputation était-elle déjà justifiée ?

Commençons déjà par placer le cadre : Dragon Lore est un jeu d’aventure – la plus grande partie du temps à la première personne – vous mettant aux commandes de Werner, jeune fermier qui se découvrira (au terme de dix minutes de jeu impliquant des activités aussi trépidantes que de faire regagner son pâturage à une vache) l’héritier des von Wallenrod, famille appartenant au clan des Chevaliers Dragons. Après quoi, votre rôle sera de l’aider à réclamer sa place légitime, sachant que votre approche des énigmes – et particulièrement de votre goût ou non pour la violence – influencera le dénouement du jeu.

Violence ? Oui, Dragon Lore propose un système de combat, et même toute une variété d’armes dont vous pourrez équiper votre personnage. Ces combats se dérouleront de la façon la plus limitée imaginable : en cliquant sur l’adversaire, et en répétant l’opération jusqu’à ce que lui ou Werner ait trouvé la mort.

Sachant que le jeu n’affiche strictement aucune forme d’information, ni impacts à l’écran, ni gémissement, ni absolument rien qui vous permette de connaître votre état de santé ou celui de votre opposant – et que les barres vitales sont cachées au fin fond de votre inventaire, à un endroit où je vous mets au défi de les trouver si vous n’avez pas lu le manuel – autant dire que l’implication du joueur se limite à prier pour la divinité de son choix en espérant que les choses se passent pour le mieux – ce qui est généralement le cas, du moins au début du jeu. Mieux vaut prendre l’habitude de sauvegarder souvent, ceci dit : sachant que chercher à adresser la parole à quelqu’un en tenant une arme revient à lui cogner dessus, autant dire qu’un accident est vite arrivé, et qu’on peut vite se retrouver à se battre contre notre pauvre vieux père adoptif au bout de vingt secondes de jeu faute d’avoir saisi les subtilités de l’interface.

L’interface, d’ailleurs, parlons-en : elle constituera, à bien des niveaux, le premier des multiples griefs que l’on pourra nourrir à l’encontre du jeu. Tout d’abord, Dragon Lore permet de voyager, un peu à l’instar de Myst, en déplaçant un curseur dans des environnements fixe en 3D pré-calculée. Parfois, lors d’un changement de « zone », le programme affichera une petite animation qui sera l’occasion de vous en mettre plein les yeux en vous montrant votre personnage en situation. C’est l’occasion de faire deux remarques :

  1. Si la 3D du jeu représentait, à l’époque, la crème de la crème de ce que pouvait proposer un programme pour nous décrocher la mâchoire, il est particulièrement cruel de constater à quel point celle-ci a infiniment plus mal vieilli, vingt ans après sa réalisation, que ce que pouvaient proposer les illustrations en pixel art à la même période. Plus que la modélisation des personnages et des décors, ce sont surtout les animations qui prêtent désormais à sourire tant la moindre action mise en scène par le jeu laisse transpirer par tous les pores une raideur anti-naturelle sur laquelle il est très difficile de fermer les yeux en tant que joueur du XXIe siècle.
  2. Le curseur utilisé pour les actions, en forme de dragon, est infiniment moins lisible qu’une simple flèche – un reproche que l’on risque de reformuler souvent en parlant de l’interface. De fait, il est extrêmement fréquent de rater une possibilité d’action ou une direction qui s’offrait à nous simplement pour avoir échoué à décrypter ce qu’était censé nous montrer ce maudit curseur.

Dans le même ordre d’idées, le jeu entreprend souvent de vous faire faire le tour de volumes assez basiques situés au milieu de votre route, et il est impressionnant de constater à quel point le simple fait de vouloir aller en ligne droite vers un point situé immédiatement en face de vous puisse parfois représenter une lutte de plusieurs dizaines de seconde entre l’homme et la machine. J’hésite d’ailleurs à parler de l’inventaire, et surtout du fait que les attributions des clics gauche et droit de la souris parviennent à être suffisamment obtuses et bordéliques pour qu’il arrive encore fréquemment, même après plusieurs heures de jeu, qu’on lâche un objet en cherchant à l’utiliser, ou que l’on s’arrache les cheveux pour réaliser une action a priori très simple.

Imaginons par exemple que vous vouliez jeter un sort, grâce au livre de magie dissimulé dans un endroit hautement improbable et que vous pourrez espérer trouver au terme d’une dizaine de minutes de jeu. Il vous faudra déjà un sortilège, ce qui peut paraître logique, mais il vous faudra également commencer par aller dans l’inventaire pour l’associer avec votre livre de sorts. Bon, mais ce sortilège, vous ne savez toujours pas à quoi il correspond, ni comment le lancer : il faut donc prendre le livre de sorts et cliquer avec sur les yeux de votre personnage, afin de voir son contenu et de mémoriser les trois runes qui vous permettront de lancer le sortilège. Notez-les bien, car à présent, il va être temps de le lancer, ce sort : il faudra donc retirer tout ce que vous aviez dans les mains pour y placer le livre, et ensuite quitter l’inventaire pour être enfin autorisé à faire un clic droit pour sélectionner vos runes – et finalement jeter le sortilège. Imaginez-vous en train de refaire le même cirque à chaque fois que vous voudrez essayer d’utiliser la magie sur quelque chose, et vous devinerez aisément la lourdeur du système.

Mais bon, des lourdeurs, il y en avait dans tous les jeux des années 90, pas vrai ? Les premiers Alone in the Dark n’étaient pas très jouables, par exemple. L’important, dans un jeu d’aventure comme celui-là, c’est le scénario, les dialogues, l’atmosphère ; en un mot : l’univers. Vu le travail superbe qui avait été effectué sur Dune, on devrait s’attendre au meilleur, pas vrai ?

Pas vrai ?

Nous en arrivons au stade où je vais réellement me montrer sévère avec Dragon Lore. L’écriture du jeu est mauvaise, c’est un fait. Mauvaise dans sa structure, tout d’abord : le jeu vous promène, de manière finalement extrêmement linéaire, dans des environnements incohérents alignés totalement sans queue ni tête, avec l’espoir que la magie va opérer. On est donc censé ne pas se poser de question en trouvant une structure ancienne composée de crânes géants, avec des squelettes qui se baladent et un petit dragon qui vous parle avec un cheveu sur la langue (un dégât imputable à la VF, mais j’y reviendrai) à à peine cent mètres de la ferme familiale où nous avons apparemment passé les dix-huit premières années de notre vie. On peut d’ailleurs passer, en deux clics, d’une grotte à une auberge dirigée par un lutin juché sur les épaules d’un troll, ou bien à un marécage de champignons géants – ne cherchez pas une logique, il n’y en a pas.

Dans le même ordre d’idées, après nous avoir demandé d’aller lui chercher un bol et de ramener la vache dans son pré, voilà que notre père adoptif nous sort tout à coup en deux phrases que nous ne sommes pas son fils et que nous ferions mieux de partir parce que nous sommes un Chevalier Dragon. C’est pour le moins… succinct, totalement anti-dramatique, et ça aurait peut-être mérité un petit effort de mise en scène, non ? D’ailleurs, en règle générale, on peine énormément à se sentir impliqué tant absolument rien ne semble participer à rendre le monde dans lequel on évolue vivant, crédible, ou simplement cohérent.

Pratiquement tous les personnages que l’on croise sont les autres Chevaliers Dragons : sachant qu’il n’y en a que quatorze dans le monde en vous comptant, c’est quand même du bol. Ils semblent d’ailleurs n’avoir rien de mieux à faire que de glander en attendant de vous donner ou non leur vote pour le grand final – sauf le grand méchant, qui s’appliquera à vous mettre des bâtons dans les roues. Dans l’ensemble, on se contente d’aller au prochain endroit pour essayer de résoudre la prochaine énigme – et manque de chance, c’est soit d’une facilité délirante soit au contraire une gageure sans nom, mais il n’y a pas de juste milieu. Et le fait que le jeu ne semble jamais se sentir gêné de repousser sans explication des solutions évidentes n’aide pas non plus à percer la logique de l’ensemble. Nouvel exemple, parce que je vous sens décrocher : vous vous retrouvez face à une plante carnivore géante qui vous bloque le passage. Ça tombe bien : vous avez dans votre livre de sorts un sortilège de boule de feu qu’on peut imaginer diablement efficace contre un végétal. Sauf que non : dans la logique du jeu, votre boule de feu devait servir à nettoyer une toile d’araignée (!) quelques écrans auparavant, et rien d’autre. Non, la vraie solution est limpide : il faut ramasser un os près de la plante, l’associer à une corde et en faire un grappin qui vous permettra de franchir l’obstacle en jouant à Tarzan à deux mètres de la plante carnivore – qui pourrait d’ailleurs tout à fait vous gober au passage, mais c’est pas grave, on la garde, Coco, c’est dans la boîte.

Tout le jeu étant de cet acabit, on est rapidement tenté d’utiliser n’importe quoi n’importe où n’importe comment, et de résoudre le reste à grands coups d’épées dans la tronche parce que ça a au moins le mérite d’être une solution claire.

C’est d’autant plus vrai que les dialogues du jeu (enfin… les monologues de ceux qui s’adressent à vous, puisque vous ne prononcez pas un mot de toute la partie) sont rarement plus longs que celui que vous adresse votre père adoptif avant de vous foutre dehors, et que si les doublages vont de l’honnête au passable dans la version originale, ils vont du médiocre au consternant dans la version française.

J’ai déjà évoqué le dragon avec un cheveu sur la langue, parlons un peu du lutin qui parle du nez, de l’asiatique avec un accent abominablement cliché et raciste digne d’un Michel Leeb sous Tranxène (répondant ainsi assez bien au personnage affligé, lui, d’un accident africain comme on oserait plus en faire depuis vingt-cinq ans), l’orque doté pour sa part d’un accent marseillais (!) ou encore ce type bleu (?!) totalement en roue libre en partant dans les aigus et dans le n’importe quoi visiblement improvisé qui achève de vous convaincre qu’il n’y a eu aucune forme de direction d’acteur pendant toute la localisation du jeu.

C’est bien simple, il n’y a pas un personnage de tout le jeu qui bénéficie d’un doublage ne fut-ce qu’honnête, et on en aurait presque honte d’être vu en train de jouer au jeu en public quand s’enclenche une conversation. En revanche, il y a certainement moyen de s’offrir quelques crises de fous-rires nerveux en imaginant où et comment ont été recrutés les acteurs responsables de ce carnage. Oh, et évidemment, la synchronisation labiale est complètement passée à la trappe lors de la VF, mais en sera-t-on réellement surpris ?

Pour ne rien arranger, le jeu n’est pas extrêmement long – à condition de ne pas rester bloqué (comptez peut-être cinq ou six heures si c’est votre première partie), et il est également abondamment bugué (Ah ! Ces monstres qui se coincent dans les murs ! Ces plantages en accédant à l’inventaire !).

Et alors qu’on trouvait rien de moins que Stéphane Picq, auteur de la superbe B.O. de Dune,  aux commandes de la musique, celle-ci ne se fait que très rarement entendre (un détail qui sera corrigé, avec plusieurs autres, dans une version « gold » hélas uniquement sortie aux États-Unis). Certes, l’univers sera prolongé dans Dragon Lore II, mais ça, c’est une autre histoire. Ce premier épisode, dans tous les cas, laissera peu de souvenirs impérissables de par son écriture, ou de par son gameplay, et de moins en moins de par sa réalisation. On erre davantage qu’on n’explore, on tâtonne au hasard davantage qu’on ne réfléchit, et au final on se sent entièrement spectateur d’un monde en carton-pâte où l’on recherche désespérément une épaisseur ou une logique, un peu à la façon de titres comme Hand of Fate qui avaient déjà plus misé sur la réalisation que sur l’écriture. En résumé : on a bien du mal à se sentir impliqué à un quelconque niveau, en dépit de l’ambition palpable de l’univers abordé. Elle n’était peut-être pas entièrement volée, finalement, cette réputation qui collait aux jeux français…

Vidéo – Quinze minutes de jeu :

NOTE FINALE : 11/20 À sa sortie, Dragon Lore : La légende commence était une vitrine technologique incroyable, un émerveillement permanent, un jeu enfin apte à utiliser pleinement les capacités que n'avait jusqu'ici laissé qu'entrevoir le support CD. Plus de vingt ans après, hélas, force est de reconnaître qu'il ne reste qu'un jeu maladroit à l'écriture simpliste porté par une narration confuse et un gameplay largement déficient. Certes, on a connu largement pire en la matière, en particulier dans les années 80, mais difficile de se sentir concerné par une aventure aussi incohérente, surtout quand ni les énigmes, ni les dialogues ne sont à la hauteur. On peut à la rigueur se laisser guider par une certaine curiosité face à l'univers du jeu, voire même lui trouver un certain charme – à condition de se montrer conciliant devant la 3D datée – mais l'expérience a objectivement mal vieilli. À réserver aux joueurs patients. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une réalisation qui sent fort les balbutiements de la 3D – Une interface d'une rare maladresse – Des doublages français qui vont du médiocre au franchement gênant – Des énigmes à la logique déficiente – Un scénario aux enjeux très limités, avec un grand méchant de Prisunic aux motivations floues

Version 3DO
Dragon Lore

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

De toutes les consoles 32 bits qui auraient pu accueillir Dragon Lore en 1995, c’est sur la 3DO que Cryo – ou Mindscape, ou les deux, très honnêtement je serais bien en peine de vous dire d’où venait la décision – aura choisi de jeter son dévolu. La bonne nouvelle, c’est que la puissante – et coûteuse – machine avait a priori les arguments pour faire tourner comme un charme ce qui était encore considéré comme un titre (relativement) à la pointe de la technologie.

Petite facétie : les 3 CD-ROM du jeu comportant toutes les localisations européennes, il faudra commencer par faire un détour par le menu du jeu (en anglais) pour espérer lancer le jeu en français. Une fois cette gageure effectuée, on se retrouve avec une version techniquement équivalente à celle parue sur PC, et même à sa version Gold à en juger par la présence de thèmes musicaux que je n’avais pas entendus lors de mon test sur l’itération DOS. L’interface au pad a même le mérite de s’en sortir plutôt mieux que celle à la souris, chaque bouton ayant une fonction précise, on peut toujours sauvegarder n’importe quand, et les temps de chargement sont aussi rapides que sur PC. Bien évidemment, les choses sont un peu moins emballantes du côté purement ludique, le jeu étant toujours aussi mauvais, mais quitte à vous aventurer à le découvrir, autant le faire sur ce très bon portage.

NOTE FINALE : 11,5/20

Si Dragon Lore n’est pas miraculeusement devenu un jeu d’aventure merveilleusement écrit et doté d’un univers cohérent et de dialogues finement ciselés en passant sur 3DO, il n’empêche qu’il est ici techniquement inattaquable comparé à la version PC, visiblement tiré de la version « Gold », et qu’il se révèle même au moins aussi jouable au pad qu’à la souris. À tout prendre, une très bonne alternative pour un jeu médiocre.

Loom

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STMacintoshFM TownsAmiga CDTVPC Engine CD
Disponible sur : Antstream, Linux, Mac OS X, Windows
Disponible sur : Gog.com (Windows), Steam.com (Windows)

Note : Les patchs de traductions françaises non-officielles de cet article proviennent du site Abandonware France

Version PC (DOS)

Date de sortie : Mai 1990 (version disquette) – Août 1992 (version CD-ROM)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français (version disquette) – Anglais, patch de traduction en français (version CD-ROM)
Supports : CD-ROM, dématérialisé, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Versions disquette et CD-ROM émulées sous ScummVM
Configuration minimale : Version disquette :
Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA (16 couleurs)
Cartes sonores supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), haut-parleur interne, Tandy/PCjr

Version CD-ROM :
Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.1 – RAM : 640ko – MSCDEX : 2.1
Mode graphiques supporté : VGA
Système de protection de copie par consultation du manuel
Liens utiles : Patch ajoutant le support de la Roland MT-32 (version disquette uniquement)

Vidéo – L’ouverture et l’écran-titre du jeu :

Loom est un jeu très particulier, ayant grandi dans l’ombre du célèbre The Secret of Monkey Island, sorti à la même période, mais ayant acquis a posteriori ses propres galons dans la glorieuse liste des jeux vidéo ayant durablement marqué les joueurs lors de leur sortie.

À l’initiative du projet, un nouvel employé de chez Lucasfilm Games nommé Brian Moriarty (fraichement débauché d’Infocom chez qui il venait de réaliser trois aventures textuelles dont le très ambitieux Beyond Zork), qui s’était mis en tête d’utiliser le fameux moteur de jeu SCUMM créé pour Maniac Mansion afin de produire un jeu d’aventure plus court et nettement moins punitif que les jeux de l’époque (notamment ceux issus des studios Sierra On-Line, où mourir à de très nombreuses reprises lors d’une partie était monnaie courante). L’idée du jeu lui viendra d’une source d’inspiration majeure, mais assez particulière pour l’univers vidéo-ludique de l’époque : le Lac des Cygnes de Tchaïkovski.

L’idée fondatrice du jeu est donc simple, mais profondément originale : la seule interface du jeu sera la musique. Pas de liste de mots pour former des actions, comme cela avait été utilisé dans Maniac Mansion, Zac McKracken ou Indiana Jones and the Last Crusade, les trois précédents jeux du studio ; en dehors d’un curseur vous servant à vous déplacer et à désigner les objets, votre unique moyen d’action sera un instrument de musique. Et pour bien comprendre en quoi cela pourrait bien vous permettre d’interagir avec quoi que ce soit, il faudra d’abord se pencher un instant sur le scénario du jeu.

Dans un monde inconnu, vous incarnez Bobbin Threadbare, un jeune homme appartenant à la Guilde des Tisserands. Le matin de votre dix-septième anniversaire, une nymphe messagère vient vous adresser un message : le Conseil vous convoque. C’est en assistant à une conversation houleuse entre les Anciens et Hetchel, la femme qui vous a éduqué après la mort de votre mère, que vous allez commencer à en apprendre plus sur une Ombre qui menace le monde – et sur le lien maléfique que certains croient voir entre votre naissance et sa venue. Cela vous permettra surtout d’hériter d’une des quenouilles avec lesquelles les Tisserands ont le pouvoir de créer la réalité…

Surpris ? L’univers dans lequel s’étend Loom est certes original, et très dépaysant. Mais sa plus grande force tient précisément d’une de ses lacunes : À peu près tout ce que vous serez amenés à comprendre de ce monde, vous devrez aller le lire entre les lignes. Pas de texte de présentation, pas de mise en situation, juste un échange d’une demi-heure entre Bobbin et Hetchel enregistré sur une cassette audio distribuée avec le jeu à sa sortie (et, à ma connaissance, jamais traduite en français) et un livre dans lequel vous pouviez noter les différentes « trames » que vous étiez amené à apprendre au fil du jeu. Vous êtes donc lâché sans information dans un univers qui vous est totalement étranger, et où personne ne vous fera jamais de grandes leçons d’histoire afin de vous introduire une culture ou une chronologie : seuls les rares dialogues du jeu, ainsi que quelques inscriptions, vous aideront à imaginer petit à petit l’immense univers qui s’étend autour des quelques régions que vous serez amené à visiter au cours de votre périple.

Cette trouvaille narrative est sans conteste l’un des plus grands points forts d’un jeu où tout ce qu’on vous montre ne semble être qu’un prétexte pour laisser parler votre imagination – avec le fait qu’on ne puisse ni mourir ni être irrémédiablement bloqué, autre concept visionnaire dont Loom aura été la première matérialisation avant le Secret of Monkey Island de Ron Gilbert. Il est d’autant plus frustrant que le jeu n’ait jamais connu de suite officielle, comme cela avait été considéré à une époque, car il faut reconnaître qu’au terme de la (trop courte) aventure, on ne peut s’empêcher de ressentir un petit pincement à l’idée de laisser dernière nous tous ces personnages alors qu’on aurait aimé en connaître encore tellement plus à leur sujet. Les dialogues sont efficaces et font mouche – certains, comme cette conversation surréaliste avec une dragonne ayant peur du feu, vous arracheront même plusieurs sourires. La mélancolie régnant à la fin du jeu a probablement, pour sa part, tiré quelques larmes au moment de sa sortie.

En termes de réalisation, Loom, fait des merveilles avec sa modeste palette de 16 couleurs. Garry Winnick et Mark Ferrari se sont inspirés du style de La Belle au Bois Dormant, de Walt Disney, et le résultat est superbe. Le jeu a incontestablement une « patte » graphique, et certains écrans – notamment cette aube permanente qui découpe en clair-obscur les reliefs de l’île sur laquelle vous commencez le jeu – touchent à la quintessence de ce que pouvaient offrir des graphismes en EGA. On appréciera également l’excellente idée de ces gros plans animés lors des conversations, qui offrent immédiatement une identité visuelle très marquée aux différents protagonistes. On remarquera aussi quelques entorses à ce qui allait s’imposer comme le « style Lucasfilm » de l’époque, et notamment une courte séquence de gore tranchant radicalement avec l’ambiance générale du jeu et qui aura décroché quelques mâchoires à l’époque.

Côté musical, rappelons que nous sommes en 1990, période où les cartes sons commencent à peine à se démocratiser sur PC. La version originale du jeu ne reconnaissait que les cartes AdLib, CMS, Game Blaster et Soundblaster, mais un patch publié quelques mois après sa sortie y ajoute la gestion de la Roland MT-32 – ainsi qu’un prélude musical tiré du Lac des Cygnes et que vous pourrez entendre dans la vidéo de l’introduction présentée ci-dessus. La version PC sur disquettes restera la seule à avoir bénéficié de cette ouverture – même les versions CD ultérieures ne la comprendront pas. Autant dire que l’orchestration est superbe pour l’époque, et qu’il est d’autant plus frustrant que la musique se fasse si rarement entendre, au point qu’on évolue dans un silence de mort pendant une bonne moitié du jeu. Reste pour beaucoup de joueurs d’alors, ce fut l’occasion d’entendre, parfois pour la première fois, de grands thèmes classiques que les jeux vidéo ne nous avaient pas trop donné l’habitude d’employer jusque là.

Alors Loom, jeu parfait ? Non, pas tout à fait, en dépit de l’indéniable capital sympathie dont il jouit auprès de plusieurs milliers de nostalgiques. Tout d’abord – et même si cela correspond à la volonté initiale de Brian Moriarty – le jeu est très court, trop court. On peut facilement en venir à bout en moins de deux heures, ce qui, en soi, n’a rien d’anormal : un jeu comme King’s Quest IV, par exemple, pouvant très bien être bouclé en une vingtaine de minutes… à condition de savoir très précisément quoi faire, sans quoi sa grande difficulté vous demandait d’y passer des semaines, voire des mois. Mais Loom n’est pas juste court, il est également très facile. L’impossibilité de mourir ou de se retrouver bloqué, comme on l’a vu, y est sans doute pour beaucoup ; le peu de possibilités offertes par l’interface étant la deuxième cause. À deux ou trois situations pas très claires près, il est rare de ne pas savoir ce qu’on attend de nous – et un simple coup d’œil à toutes les trames apprises jusqu’alors suffit à nous offrir l’intégralité de nos possibilités.

Il est également assez frustrant d’être confronté à des situations où le jeu nous force la main en dépit du bon sens le plus élémentaire. Ainsi, à un stade avancé du jeu, il est possible de se retrouver enfermé dans une cage face à deux personnes vous demandant de faire démonstration de vos pouvoirs magiques. Vous pourriez alors facilement les effrayer, par exemple – un des nombreux pouvoirs à votre disposition à ce moment du jeu. Mais non, votre seule possibilité est d’ouvrir la porte de votre cage comme ils vous le demandent, sans que rien ne vienne le justifier ; le genre de lacunes un tantinet énervantes. Rien de tout cela n’a empêché le jeu de se faire une petite place dans l’imaginaire collectif de ceux qui ont eu la chance de poser les mains dessus à sa sortie, mais il était important de souligner ces quelques anicroches aux joueurs qui désireraient le découvrir aujourd’hui.

Signalons, malgré tout, que le jeu dispose de trois niveaux de difficulté : si je n’ai décelé aucune différence entre les modes « standard » et « practice », le mode « expert », pour sa part, ne vous affichera plus les notes en bas de l’écran et vous demandera de vous débrouiller intégralement à l’oreille – ce qui rend tout de suite le jeu beaucoup plus délicat. En guise de bonus, ce mode « expert » vous offrira, vers la fin du jeu, une courte scène retirée des deux autres modes. Reste au final un jeu original, culotté et profondément visionnaire dans son approche du game design… et sans doute un peu trop au moment de sa sortie. Perçu comme trop court et trop simple pour un jeu vendu au prix fort, soulevant un certain scepticisme de la part de la critique, il aura au final été totalement éclipsé par le succès de The Secret of Monkey Island, publié quelque mois plus tard, et qui présentait une aventure plus longue, plus complexe et fondamentalement plus classique. Conséquence : Brian Moriarty, redirigé vers des titres éducatifs avant de se casser les dents sur le développement de The Dig, n’aura jamais pu achever la trilogie qu’il avait imaginée autour de Loom et n’aura plus jamais été le game designer d’un jeu d’aventure. Cruelle destinée pour quelqu’un qui aura vu un peu plus loin que les autres un peu trop vite…

Quelques mots, enfin, sur la VF : elle est d’une bonne qualité, surtout si l’on considère la période de sa réalisation, où l’amateurisme le plus total était la règle plutôt que l’exception en terme de localisation. Pas de coquille, pas de faute d’orthographe : ça change très agréablement de ce qu’on pouvait observer, au hasard, dans la série des King’s Quest vers la même période. Seul choix discutable : n’avoir traduit ni les noms des personnages – qui sont pourtant tous chargés de sens – ni le métier à tisser, auquel il est systématiquement fait référence sous le terme « Loom », ce qui permet certes de garder le lien avec le titre du jeu mais n’a pas grand sens au milieu d’une traduction intégrale. Quoi qu’il en soit, mettre la main sur cette VF par des voies légales sera sans doute très compliqué : toutes les plateformes de téléchargement proposant le jeu à la vente à l’heure actuelle ne proposent que la VO. Surement existe-t-il des patchs de fans permettant de contourner le problème.

Vidéo – Dix minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20 Loom est un jeu unique, à l'approche incomparable et à l'univers captivant. Lâché dans un monde poétique, bercé par les compositions de Tchaïkovski, le joueur se surprend à assembler lui-même un gigantesque puzzle dont on ne lui offre que quelques pièces, afin de compenser tout ce qu'une narration volontairement elliptique ne lui dit jamais directement par le biais de l'outil le plus efficace qui soit : l'imagination. La promenade est aussi rafraîchissante qu'elle est courte, hélas, et c'est avec regret qu'on laisse derrière nous des personnages qu'on aurait volontiers accompagné pendant dix ou quinze heures supplémentaires. Si vous n'avez encore jamais tenté le voyage, laissez-vous emporter. CE QUI A MAL VIEILLI : – On n’aurait vraiment pas dit non à quatre ou cinq heures de jeu supplémentaires – Certains pouvoirs qu’on ne nous permet pas d’utiliser à des moments où ils seraient très utiles – Version française difficile à dénicher

Les avis de l’époque :

« Servie par de somptueux graphismes, l’histoire reste captivante du début à la fin : il se passe (presque) toujours quelque chose à l’écran. Bref le jeu accroche et possède une atmosphère particulière (c’est rare). (…) Loom est agréable à jouer malgré ses imperfections. Relativement rapide à terminer, il plaira à tous les aventuriers (débutants ou confirmés). J’accepte de l’acheter s’il vaut 200 francs (NDRA : environ 47,15 euros en tenant compte de l’inflation), au-dessus c’est de l’arnaque. »

Dany Boolauck, Tilt n°78, Mai 1990, 16/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Loom sur un écran cathodique :

La version CD-ROM :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour une fois, la version CD-ROM du jeu est suffisamment particulière pour mériter un peu plus qu’un paragraphe chargé de statuer sur la qualité des doublages. Comme on va le voir, la date de sortie relativement précoce de cette édition (en 1992, à une époque où le support était encore loin d’être démocratisé) aura certainement eu une lourde influence sur ses caractéristiques techniques, qui sont loin d’être aussi emballantes qu’on était en droit de le souhaiter, comme on va rapidement le voir. En fait, c’est comme si chacun des atouts de cette version étaient immédiatement contrebalancé par un défaut rédhibitoire. Mais jugez plutôt :

Tout d’abord, qui dit support CD dit musique CD, n’est-ce pas ? Ne vous inquiétez pas : elle est bien là, identique dans sa composition dans ce qu’on pourra entendre, à la même époque, sur FM Towns ou sur PC Engine CD. Oui mais… Plutôt que d’utiliser les extraordinaires (pour l’époque) capacités de stockage offertes par le support, que croyez-vous que l’équipe de développement a cru bon de faire ? Eh bien, elle a utilisé les pistes numériques. Ainsi, au lieu de disposer de 640Mo d’espace, la version CD se retrouve limitée à soixante minutes de pistes musicales (moins l’espace pris par les données). Oui, cela présente déjà toutes les caractéristiques de la mauvaise idée, mais bon, une heure de musique, pour un jeu aussi court, ce devrait être largement suffisant, non ?

Cela aurait pu l’être, si les dialogues n’avaient pas également été enregistrés sur les pistes numériques. Oui, tous les dialogues du jeu. Contrainte évidente : l’intégralité des discussions du jeu doit désormais tenir en moins d’une heure. Cela a deux effets aussi évidents que catastrophiques : le premier, c’est que tous les (rares) dialogues du jeu ont dû être réécrits et rabotés pour tenir dans le peu de temps qu’on leur laissait. Non, vous ne rêvez pas : cette version CD à la capacité 300 fois supérieure à ce que contenait la version originale a dû être expurgée d’une partie de ses dialogues !

Attendez, ne ramassez pas tout de suite votre mâchoire : ce n’était que le premier problème. Le deuxième est presque aussi navrant : la musique et les dialogues se partageant la même durée, le plus simple a été de les combiner. Ce qui signifie que la musique ne peut se faire entendre… que pendant un dialogue, et jamais à un autre moment. Votre version CD vous vaudra donc d’évoluer dans un silence de cathédrale pendant la plus grande partie du jeu. Ah, on peut dire qu’ils ont fait fort ! On remerciera le célèbre auteur Orson Scott Card, déjà mis à contribution sur The Secret of Monkey Island, d’être venu apporter son aide lors de cette réécriture, mais cela n’empêche hélas pas cette version CD d’être un charcutage de bas étage d’un jeu déjà pas très bavard à l’origine.

Niveau graphismes, là, pas d’excuse : normalement, tout va bien. D’ailleurs, au premier coup d’œil, on réalise que les graphismes sont identiques à ceux de la version FM Towns sortie l’année précédente. Oui mais… Le trouble apparait après quelques minutes de jeu. Vous vous souvenez de ces magnifiques inserts présentant les personnages en gros plan ou en plan américain au cours des conversation ? Ceux-là même qui existaient déjà en 256 couleurs, puisqu’il suffisait de reprendre la version FM Towns – comme pour le reste des graphismes du jeu ? Eh bien, oubliez-les. Ils ont disparu. Pourquoi ? On ne le saura jamais – sans doute participaient-ils à étirer la durée des dialogues qu’on cherchait à mutiler au maximum. Ça, en termes d’ambiance et d’implication du joueur, c’est un autre énorme coup dur. Les protagonistes n’ont plus de visage, plus d’expression – plus d’identité, en un mot. Afin de faire le change, on a doté leurs sprites de nouvelles animations, mais le résultat donne surtout l’impression que personne dans cet univers n’est capable de dire une phrase de trois mots sans gesticuler la tête ni faire de grands mouvements avec les bras. N’en jetez plus : le carnage est complet.

NOTE FINALE : 13/20

Le destin aura donc voulu que la seule version de Loom encore disponible à la vente en 2017 soit, et de très loin, l’une des plus mauvaises. Mutilée, disséquée, découpée, expurgée, cette version doit représenter le seul cas de version CD appauvrie par rapport à la version disquettes. N’espérez même pas y trouver une VF : son seul et unique atout est de posséder des doublages anglophones – dommage que ceux-ci se basent sur des dialogues vidés de leur substantifique moelle… Bref, une mauvaise version, une mauvaise introduction à ce jeu sublime, et un incommensurable gâchis. Rabattez-vous plutôt sur n’importe quel autre portage – les deux autres versions CD, de préférence, si jamais vous parvenez à mettre la main dessus.

Version Amiga

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation possible sur disque dur
Système de protection de copie par consultation du manuel
*Optimisations graphiques et sonores avec 1Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Développé en même temps que la version PC, la version Amiga en est pratiquement la copie conforme. Graphiquement, le jeu est identique à 99,9% – quelques petites nuances dans le choix des couleurs, lors des dialogues par exemple, mais il vaut mieux avoir de bons yeux pour les déceler. Musicalement, l’Amiga ne se hisse pas à la hauteur de ce que proposait la Roland MT-32, mais il fait largement aussi bien que l’AdLib. Paradoxalement, le jeu est plus facile à trouver en français sur Amiga que sur PC où il est pourtant toujours en vente, un comble ! Mais dans tous les cas, tout le contenu du test de la version PC peut fidèlement s’appliquer à cette version – sauf la présence de l’ouverture de la version patchée.

NOTE FINALE : 16/20

Aucun bouleversement pour la version Amiga, pratiquement identique à la version PC sortie en parallèle. On pourra lui préférer la version originale patchée pour profiter de la qualité de la Roland MT-32, mais ce serait bien là la seule raison.

Version Atari ST

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien
Support : Disquette 3,5″ double face (x3)
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Écran monochrome supporté
Installation possible sur disque dur
Système de protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Si, graphiquement parlant, la version Atari ST fait très exactement jeu égal avec ses deux consœurs sur PC et Amiga, c’est en terme de capacités sonores – comme souvent – que la machine pêche : le thème musical de la version ST fait à peine mieux que ce que pouvait offrir le haut-parleur interne du PC ! Et malheureusement, ici, pas de patch pour espérer connecter une Roland MT-32 ou une interface MIDI afin de sauver les meubles… Autant dire que, dans un jeu basé sur la musique, la version Atari ST fait un peu office de mouton noir : c’est – de peu, certes – la moins bonne version de toutes celles sorties en 1990.

NOTE FINALE : 15,5/20

Un demi-point de pénalité pour la musique de moins bonne qualité que sur les autres supports – l’Atari ST aurait sans doute pu faire un peu mieux que ça. Le reste du jeu étant totalement identique aux versions PC et Amiga, je ne conseillerais cette version qu’aux nostalgiques les plus passionnés de l’Atari ST.

Version Macintosh

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x3)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Macintosh II
Configuration minimale : Processeur : Motorola 68020 – OS : System 6.0.3 – RAM : 1Mo
Configuration graphique : 16 couleurs, noir & blanc
Système de protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Avec l’arrivée du Macintosh II et de ses graphismes en couleurs, la machine d’Apple pouvait enfin espérer glisser dans une case plus traditionnelle dans le cadre du jeu vidéo… grosso modo, elle pouvait devenir l’équivalent du PC. Signe des temps, cette itération de Loom est d’ailleurs jouable aussi bien en noir & blanc qu’en couleur… exactement comme la version Atari ST, en substance.

Graphiquement, dans les deux cas, on retrouve des graphismes en basse résolution, avec des teintes exactement identiques à celles de l’EGA dans le cas de la version couleur. Seule nuance, assez anecdotique : les textes, eux, sont en haute résolution. Pour ce qui est de l’aspect musical, on est quelque part autour de ce que proposaient l’AdLib ou la version Amiga – soit au-dessus du ST et en-dessous de la Roland MT-32. Bref, rien de très surprenant, mais un portage sérieux qui aura au moins permis aux utilisateurs de Macintosh de ne pas avoir à tirer un trait sur un très bon jeu d’aventure.

NOTE FINALE : 16/20

Prenez les graphismes de la version EGA de Loom (ou ceux de la version monochrome de l’Atari St pour la version noir & blanc), ajoutez-y une réalisation sonore du niveau de celle de la version Amiga et des polices d’écriture en haute résolution et vous obtiendrez cette version Macintosh. Un aussi bon moyen qu’un autre pour découvrir le jeu.

Version FM Towns

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Fujitsu Limited
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais, patch de traduction française par Hibernatus*
*Fonctionne uniquement sous ScummVM
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version CD-ROM anglaise patchée en français
Configuration minimale : RAM : 2Mo

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Un an après sa sortie en Europe et aux États-Unis, Loom s’est vu offrir un portage sur les ordinateurs japonais. Et, à en croire le résultat, ceux-ci étaient manifestement bien mieux équipés que leurs homologues occidentaux. Ne faisons pas durer le suspense plus longtemps : cette version FM Towns fait généralement consensus pour être considérée comme la meilleure, tous supports confondus.

Graphiquement, déjà, la différence saute aux yeux dès les premières secondes : le jeu est en 256 couleurs, et ce gain de 240 couleurs par rapport à la version originale n’a pas été galvaudé : les dégradés sont légion, l’aube est plus lumineuse que jamais ; bref, c’est splendide.

Seule petite anomalie : pour une raison inconnue, les icônes désignant les objets avec lesquels vous interagissez, en bas à droite de l’écran, sont restées en 16 couleurs – ce qui n’est pas bien dramatique, mais donne un peu le sentiment d’une finition bâclée. Dans le même ordre d’idées, l’étrange transition Anglais-Japonais-Anglais lors de la traduction a doté le jeu d’un certain nombre de petites coquilles qu’une relecture un peu plus soigneuse aurait facilement éliminées. On trouve également trace d’une censure – vis-à-vis de la présence de sang à la fin du jeu – d’autant plus inexplicable que la scène la plus gore du jeu, elle, a été gardée telle quelle. Bref, quelques anicroches dommageables – mais qui ne suffisent pas à éloigner cette version de son statut de « version ultime. »

Car il faut mentionner, bien sûr, le gain musical apporté par le support CD. La musique est magnifique – très loin au-dessus de ce que pouvait offrir la Roland MT-32 – et on en regrette d’autant plus que l’ouverture du Lac des Cygnes n’ait pas fait le voyage jusqu’au Japon. Curieusement, j’en ai également entendu une version à l’orchestration différente – il existe donc au moins une alternative à la bande sonore employée sur les version PC CD-ROM et PC Engine CD. Apparemment, les deux orchestrations sont présentes sur le CD-ROM, et il semblerait que l’une soit destinée à la version anglaise et l’autre à la version japonaise – difficile de trouver une explication à ce choix, mais il faudra faire avec.

Surtout, là où le jeu original était plongé dans un silence de cathédrale pendant une bonne partie du temps, la version FM Towns choisit, pour sa part, de répéter le thème de la zone où vous vous trouvez en boucle – ce qui n’a pas que des avantages, mais au moins on ne pourra plus accuser le jeu de vous priver de sa musique. Notons également la présence de bruitages digitalisés de très bonne qualité – bref, il ne lui manque que les doublages et on était à deux doigts de tenir la version parfaite.

En fait, le principal débat quant à cette version tient avant tout à des raisons purement esthétiques : si le jeu est indubitablement plus coloré, certains amateurs de la version EGA ne manquent pas de faire remarquer que l’épuration du style original – et les ambiances très tranchées qui en ressortaient, chaque Guilde étant plus ou moins associée à une couleur dans la palette graphique du titre – est un peu passée à la trappe, la direction artistique étant tellement pressée de faire étalage de ses couleurs qu’elle en « trahit » quelque peu l’ambiance de la version de 1990. Le débat étant aussi ouvert que subjectif, je n’y prendrai personnellement pas part – mais je dois avouer que les objections stipulées ci-dessus ne me paraissent pas illégitimes. Quoi qu’il en soit, cette version reste sans conteste la meilleure, ne fut-ce que par le saut qualitatif de la musique.

NOTE FINALE : 17/20

Ironie étrange : la meilleure version de Loom est également la plus difficile à trouver. Tout le monde n’ayant pas un ordinateur japonais sous la main, je ne peux que vous conseiller l’usage du logiciel ScummVM afin d’émuler la machine – et sur le patch traduisant le jeu en français – si jamais vous parvenez à mettre la main sur cette version du jeu. Certains argueront que les graphismes de la version originale, en dépit d’une palette bien plus limitée, possédait une « âme » qu’on ne retrouve pas dans cette version multicolore. Mais si je devais vous donner un conseil, ce serait le suivant : jouez donc aux deux !

Version Amiga CDTV

Développeur : Lucasfilm Games LLC
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : 1992
Nombre de joueurs : 1
Langue : Allemand
Support : CD-ROM
Contrôleur : Souris
Version testée : Version allemande
Configuration minimale : Système de protection de copie par consultation du manuel

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Loom aura également partie des quelques rares élus à avoir fait le trajet jusqu’au CDTV – coûteuse escroquerie de Commodore qui aura rencontré un bide sidéral à peu près partout dans le monde sauf en Allemagne, où la machine sera parvenue à faire quelques victimes. Ceci dit, sans même mentionner le prix de ce qui n’était qu’un Amiga 500 avec un lecteur CD-ROM, on comprend mieux pourquoi personne ne se bousculait pour investir dans l’engin quand on découvre cette version, laquelle n’est rien de plus… que la version disquette gravée sur un CD-ROM. Les pistes numériques entendues sur FM Towns, sur PC ou sur PC Engine? Même pas en rêve ! Et pour bien situer l’étendue du foutage de gueule, même la protection de copie est toujours présente ! Ça valait bien la peine d’attendre deux ans… Bref, si le jeu est fort heureusement toujours aussi bon, acquérir ce portage ne présentera un quelconque intérêt qu’auprès des collectionneur les plus désespérés.

NOTE FINALE : 16/20

En tant que portage tirant parti du support CD-ROM (ou plutôt, ne le faisant pas), cette version CDTV de Loom mériterait un zéro pointé. Simple copier/coller de la version disquette, on sera heureux que ce portage totalement sans intérêt n’ait jamais eu l’idée d’être commercialisé ailleurs qu’en Allemagne. Mais en tant que version Amiga du jeu, eh bien, c’est toujours un bon point-and-click.

Version PC Engine CD

Développeur : Realtime Associates, Inc.
Éditeur : Turbo Technologies, Inc.
Date de sortie : 25 septembre 1992 (Japon) – 4 décembre 1992 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Configuration minimale : Super System Card requise

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour ceux qui souhaiteraient profiter de la musique CD, mais qui n’apprécieraient pas pour autant la direction artistique de la version 256 couleurs, il se peut que le compromis idéal vienne une nouvelle fois du Japon. Loom a décidément été gâté en posant ses valises dans le lointain Orient (même s’il n’a en fait pas eu besoin d’aller aussi loin, la console de NEC étant distribuée aux États-Unis) : cette improbable version PC Engine CD a tout pour plaire, et nous allons voir pourquoi.

Musicalement, premièrement, le jeu reprend à la note près les compositions réalisées pour la version FM Towns. On est donc toujours en présence de ce qui se fait de mieux – même s’il arrive à la musique de s’interrompre quelques instants à cause de petits temps de chargement. Les bruitages, eux, sont beaucoup plus basiques – allant taper dans les capacités hardware de la 8 bits qui porte décidément mal son nom. On reste dans tous les cas au-dessus de ce que proposaient les versions sorties en 1990 – dans le haut du panier, rien de moins.

C’est graphiquement que le jeu va peut-être (enfin) parvenir à réconcilier tout le monde. La console de NEC ne bénéficie certes pas de 256 couleurs – mais offre malgré tout une version à la fois très proche, et sensiblement plus travaillée que la version 16 couleurs. La palette légèrement étendue de la PC Engine permet en effet de se débarrasser de l’effet de « mosaïque » (dithering en anglais) qu’utilisait la version originale pour donner l’illusion d’une palette plus importante qu’elle ne l’était réellement, et de le remplacer par des aplats d’une autre couleur, tout en autorisant des dégradés impossibles dans la version EGA.

Concrètement, on a donc un jeu extrêmement fidèle, graphiquement parlant, à la version de 1990 tout en étant un peu plus coloré – ce qu’aurait dû être, en fait, la version Amiga si elle avait tiré parti de sa capacité à afficher 32 couleurs au lieu de 16. On pourrait donc décrire cette version comme une sorte de « FM Towns Light », l’avantage étant que le style graphique si particulier de la version 16 couleurs n’a été sacrifié à aucun niveau. Une excellente alternative, donc.

NOTE FINALE : 17/20

Les amateurs de Loom n’auront finalement que l’embarras du choix : pour ceux que la direction artistique de la version FM Towns faisait tiquer, la version PC Engine CD pourrait représenter la bonne pioche, avec sa musique CD et sa réalisation un cran au-dessus des versions 16 couleurs sans trahir en rien le style de la version originale.

Dune II : Battle for Arrakis

Cette image provient du site http://www.mobygames.com

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Ltd.
Titre original : Dune II : The Building of a Dynasty (États-Unis)
Titres alternatifs : Dune II : Der Kampf um Arrakis (Allemagne), Dune II : Битва Древних Династий (Russie), Dune II : La bataille d’Arrakis (écran-titre – France)
Testé sur : PC (DOS/Windows 3.1)AmigaMega Drive

La saga Dune (jusqu’à 2000) :

  1. Dune (1992)
  2. Dune II : Battle for Arrakis (1992)
  3. Dune 2000 (1998)

Version PC (DOS/Windows 3.1)

Date de sortie : Décembre 1992 (Amérique du Nord) – Février 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français (version française intégrale)
Supports : CD-ROM, disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version CD-ROM émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Version disquette :
Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3/Windows 3.1 – RAM : 640ko
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, Roland MT-32/LAPC-I, Roland Sound Canvas, Sound Blaster/Pro

Version CD-ROM :
Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 5.0/Windows 3.1 – RAM : 2Mo
Modes graphiques supportés : MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib/Gold, Roland MT-32/LAPC-I, Roland Sound Canvas, Sound Blaster/Pro
Liens utiles : Patch pour ajouter le support de la Gravis UltraSound

Vidéo – L’introduction du jeu :

Si vous réunissez un groupe de joueurs de plus de trente ans pour leur demander le nom du tout premier jeu de stratégie en temps réel, une grande majorité d’entre eux lèvera aussitôt la main pour vous répondre en cœur : « Dune II ! » La petite minorité restante vous rétorquera, elle, qu’il s’agit en fait d’Herzog Zwei sur Mega Drive, avant qu’une minorité encore plus réduite n’évoque le premier Herzog, ou Carrier Command, et ainsi de suite jusqu’à remonter à d’antiques titres comme Stonkers ou The Ancient Art of War, voire même à des logiciels totalement confidentiels des années 70. Ce que Dune II (ou ses prédécesseurs, pour en revenir au débat évoqué plus haut) aura réellement initié, ce sont les bases de ce qu’est devenu, aujourd’hui, le genre du STR.

L’enrobage du jeu, à base d’écrans animés, est magnifique

Pour ceux qui auraient fait l’impasse à la fois sur l’excellent livre de Frank Herbert (et toutes ses suites) et sur le (beaucoup plus dispensable) film de David Lynch, sachez donc que Dune, aussi connue sous le nom d’Arrakis, est une planète intégralement désertique sur laquelle se trouve la substance la plus précieuse de l’univers : l’Épice. C’est grâce à l’Épice que les navigateurs de la Guilde peuvent replier l’espace, autorisant le voyage intersidéral instantané. Comme vous pouvez vous en douter, elle sera ici l’enjeu de combats féroces entre trois maisons (contre deux dans le livre) : les Atréides, les Harkonnen et les Ordos – que Westwood est allé repêcher dans l’Encyclopédie de Dune et dont on se demande ce qu’ils font là, mais passons. L’enjeu est placé : une ressource, trois camps, une guerre pour la domination totale, comme cela vous est narré dans l’introduction visible un peu plus haut et qui faisait son petit effet en 1992.

Attaquer une base adverse est un processus délicat

Vous choisissez donc votre faction avant de vous lancer dans le grand bain, où plusieurs surprises s’offrent alors au joueur, surtout pour celui de l’époque. La première nouveauté dans le concept développé par Dune II, c’est que vous ne vous contentez pas de déplacer des unités sur une carte : il faudra également à chaque mission entretenir, faire grandir et protéger une base qui vous permettra à la fois de récolter l’Épice – qui fait office de monnaie du jeu – avec une moissonneuse, et de produire de nouveaux bâtiments et unités grâce à l’argent récolté par ce biais. Le jeu comporte donc une composante gestion, puisque la façon de développer votre base peut rapidement avoir de lourdes conséquences sur vos chances de remporter la victoire.

Notez comme la couleur de l’interface s’adapte à la faction que vous avez choisi d’incarner

La victoire, parlons-en : nous sommes ici à la naissance d’un genre que l’on qualifiera plus tard de STR (Stratégie en Temps Réel), les objectifs sont donc encore très limités : si les deux premières missions, quel que soit votre camp, vous proposent de ramasser une certaine quantité d’Épice, les sept autres (il y a neuf missions par camp) vous demanderont invariablement d’aller raser la (ou les) base(s) adverse(s). Ce que vous serez sans doute tenté d’entreprendre selon la bonne vieille méthode du « je fais un paquet d’unités et je les envoie dans le camp d’en face », sauf que cela pourrait se révéler plus complexe que prévu.

C’est par le biais de cette carte que vous choisirez votre prochaine mission

Tout d’abord, et même si on peut saluer l’accessibilité du titre qui, faute de vous proposer un tutoriel, commence par ne vous laisser l’accès qu’à quelques unités et bâtiments avant d’élargir l’offre au fur et à mesure des missions (un procédé aujourd’hui banal, mais Dune II était certainement l’un des tous premiers jeux à fonctionner de la sorte), la plupart des fonctionnalités qui apparaîtraient évidentes aujourd’hui n’existaient tout simplement pas en 1992.

Déplacer une vaste armée est un travail de chef d’orchestre

Par exemple, ne comptez pas déplacer une unité d’un simple clic de souris, il vous faudra à chaque fois soit cliquer préalablement sur le bouton « déplacer », soit utiliser le raccourci clavier correspondant – ce qui alourdit inutilement le processus. Ce qui nous amène d’ailleurs à l’aspect ayant le plus mal vieilli du titre : si déplacer une unité vous demande déjà deux clics, imaginer le travail nécessaire pour en déplacer vingt. Car non, il n’est pas possible de faire des groupes (Il faudrait pour cela attendre Warcraft deux ans plus tard, et encore, pour composer des groupes de quatre) ! Conjugué à l’intelligence artificielle assez balbutiante des unités, notamment du côté du pathfinding qui pédale sévèrement dans la semoule lorsque plusieurs unités se déplacent en même temps, vous comprendrez aisément que planifier un assaut vers la base adverse puisse représenter un processus un peu plus délicat que ne l’anticiperait un joueur du XXIe siècle.

Les unités de fin de jeu sont redoutables

La plus grosse contrainte est que cela vous oblige à une microgestion permanente : si vos unités ont le réflexe de tirer sur ce qui passe à leur portée, elles resteront en revanche piquées sans rien faire en étant bombardées par des unités à la portée supérieure, et vous devrez également régulièrement venir vous occuper de vos moissonneuses qui ne prennent pas automatiquement la direction du champ d’Épice le plus proche si celui-ci n’est pas juste à côté de votre raffinerie. Conjugué à la mauvaise habitude qu’a l’adversaire de déposer des unités dans les environs immédiats de votre base pendant que vous avez le dos tourné, vous pouvez facilement vous retrouver à réaliser trop tard que vous avez perdu une moissonneuse voire des bâtiments entiers faute d’avoir eu le don d’ubiquité.

Les Harkonnen dans leurs œuvres, ici au milieu d’une base Ordos

Il faudra donc composer avec quelques aspects assez frustrants, mais on ne peut qu’admirer les possibilités offertes par le jeu à l’époque. Stations de réparation, unités de transport aérien, spatioport, unités capables de capturer les bâtiments ou de faire changer une unité de camp, lance-missiles à longue portée – il ne manque rien, pas même ces foutus vers des sables géants directement tirés de l’œuvre originale et qui vous habitueront vite à garder au maximum vos unités sur les zones rocheuses si vous ne voulez pas les voir se faire avaler par Shai-Hulud. Notons aussi que chaque camp a des unités et des bâtiments qui lui sont propres, même si cela créé au final un déséquilibre assez regrettable (les modestes fremens envoyés par les Atréides, et qui finissent généralement sous les chenilles d’un tank ou d’une moissonneuse au bout de dix secondes, font assez pâle figure comparés aux missiles nucléaires des Harkonnen, par exemple). De la même manière, les unités d’infanterie deviennent très rapidement sans intérêt, même les terrible Sardaukars présentés dans le livre comme une unité d’élite capable de faire plier une armée à elle toute seule pouvant se faire exterminer en un instant en envoyant une unité blindée leur rouler dessus.

Le jeu propose également un écran des scores, histoire d’entretenir les rivalités entre amis

Bref, pas mal d’erreurs de jeunesse qui, cumulées à des mécaniques de jeu dont on fait vite le tour, tendent à rendre le jeu assez redondant – mais le fait de découvrir chacune des petites subtilités propres à chaque faction peut également vous tenir en haleine jusqu’au terme des trois campagnes.

Quelques mots sur la réalisation : les adeptes de haute résolution ultra-détaillée peuvent prendre la fuite en hurlant (mais qu’étiez-vous venu faire sur ce site, à la base ?), en revanche, les fans de pixel art parfaitement lisible avec un cachet fou devraient ronronner pendant plusieurs heures. Tous les écrans son animés, habillés, en restant fidèle à l’univers du livre, et l’ambiance vaut le détour. Du côté sonore, le jeu avait ébloui à sa sortie, et on comprend pourquoi : chaque unité répond à votre clic par un message digitalisé, on entend les crépitements de talkie-walkie, les explosions qui s’atténuent avec la distance (autre première pour l’époque) feront cracher votre caisson de basse, et les musiques variées, qui s’adaptent à la situation, vous aident à rester en permanence plongé dans l’action.

Protégez votre moissonneuse comme la prunelle de vos yeux

À noter que les possesseurs d’antiques cartes sons haut-de-gamme de l’époque seront aux anges : le jeu reconnait nativement la Roland MT-32, ainsi que la Gravis Ultrasound par le biais d’un patch, et le résultat est éblouissant dans les deux cas. Pour peu que vous ayez encore un de ces engins de compétition sous le coude – ou que vous sachiez comment les émuler sous DOSBox – vous pourrez expérimenter ce que les capacités sonores de l’époque avaient à offrir de mieux. En revanche, vous ne pourrez pas utiliser deux cartes à la fois – au hasard, une pour la musique MIDI et l’autre pour les voix digitalisés – sans un autre patch, et cela aura malheureusement un prix pour la version européenne : vous devrez alors tirer un trait sur la version française du jeu. Si vous voulez la meilleure expérience sonore, ce sera en anglais et rien d’autre.

L’Empereur Padishah Shaddam IV n’est pas décidé à faire de la figuration

Un dernier paragraphe, enfin, pour parler de ladite VF : la version sortie en Europe – et en France, donc – accuse quelques pertes par rapport à la version originale américaine : il n’y a pas de voix digitalisées pendant l’introduction, par exemple. Dans le même ordre d’idées, il n’y a plus qu’un unique acteur pour assurer tous les doublages – lequel parle avec un accent qui nous indique que personne n’a jugé utile de demander à un acteur français de se déplacer, les soldats ne répondent plus quand on clique sur eux, etc. Dans tous les cas, le jeu est parfaitement jouable dans la langue de Molière, mais je conseillerai quand même aux anglophones d’opter pour la version américaine, un cran au-dessus. Quant à la version CD-ROM, elle n’offre strictement rien de plus que la version disquette.

Vidéo – La première mission du jeu :

Récompenses :

  • Tilt d’argent 1993 (Tilt n°121, décembre 1993) – Meilleur jeu de stratégie

NOTE FINALE : 16/20 Autant pourfendre une légende : Dune II : Battle for Arrakis n'a pas « inventé » la stratégie en temps réel. En revanche, il a mis en place avec une rare intelligence les bases d'un modèle alliant une ergonomie perfectible mais déjà diablement bien pensée et une prise en main exemplaire qui rend tout passage par le manuel du jeu totalement optionnel – ce qui était loin d'être courant en 1992. En y ajoutant une réalisation irréprochable – notamment sur le plan sonore, absolument bluffant – et une certaine rejouabilité introduite par les nuances entre les trois camps, on se retrouve bel et bien face à un pilier du genre qui a infiniment mieux vieilli que la plupart de ses contemporains. Oui, certains mécanismes, en particulier dans la sélection des unités, sont datés, et les joueurs les plus impatients commenceront sans doute directement par Command & Conquer, mais si vous voulez comprendre d'où est réellement partie cette fameuse « STR », vous pourrez le faire en profitant d'un pixel art au sommet de sa forme. À connaître. CE QUI A MAL VIEILLI : – La micro-gestion à outrance – Objectifs cantonnés à l’éradication du camp d’en face – Quelques petits soucis d’équilibrage – Une version européenne inférieure à la version américaine sur le plan sonore... – ...et que vous ne pourrez pas patcher sans tirer un trait sur la V.F.

Les avis de l’époque :

« La jouabilité de l’ensemble est excellente. Même dans les moments intenses de combat et d’énervement tout se déroule comme si le programme était très simple. Pas un bug, pas un ralentissement ! Les voix digitalisées (qui seront en français) sont vraiment géniales ! Lorsque vous cliquez sur une unité, elle vous répond comme dans la réalité. Par exemple un talkie-walkie fera de légers grésillements. De même, le volume sonore s’adapte selon la distance qui vous sépare d’un bruit. Quel rendu ! »


Morgan Feroyd, Tilt n°111, février 1993, 17/20

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Dune II sur un écran cathodique :


Version Amiga

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : Mai 1993
Nombre de joueurs : 1
Langues : Allemand, anglais, français (version française intégrale)
Support : Disquette 3,5″ (x5)
Contrôleurs : Clavier, souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.3 – RAM : 1Mo*
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Installation sur disque dur supportée*
*1,5Mo requis pour installation sur disque dur

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Si, en terme de contenu, la version Amiga est strictement identique à la version PC, la comparaison est infiniment plus douloureuse pour la machine de Commodore dès que l’on commence à s’intéresser à la réalisation. Malgré la date de sortie relativement tardive, le jeu ne tire absolument pas parti des possibilités graphiques de l’Amiga 1200 : pas de gestion du mode AGA (une mauvaise habitude, de la part de Westwood Studios), ce qui fait que le jeu doit composer avec la palette traditionnelle en 32 couleurs (ou 64 en mode EHB). Si l’introduction et les scènes cinématiques s’en sortent relativement bien, le constat est plus cruel une fois en jeu, avec une palette qui réduit les zones rocheuses à une bouillie grisâtre et les étendues sableuses à une marée jaune-marron – au moins le jeu reste-t-il toujours aussi lisible, même si la fenêtre de jeu n’est pas réellement en plein écran.

On sent les limitations techniques de l’Amiga dès les premiers écrans…

Disparues, aussi, les petites animations qui rendaient le jeu vivant : vous pouvez dire adieu au cycle de couleurs des pièges à vent ou aux drapeaux battant au vent des casernes. Les écrans fixes (eux aussi ont perdu leurs animations) entre les missions s’en sortent un peu mieux, mais la comparaison reste douloureuse pour qui a posé les yeux sur la version PC. La vraie perte, en revanche, se situe au niveau sonore, là où l’Amiga était pourtant bien mieux équipé pour rivaliser avec le PC – Là encore, une autre mauvaise habitude avec Westwood. Une partie des sons digitalisés a disparu – les rapports de la base s’affichent désormais directement à l’écran – et ceux qui ont survécu sont d’une qualité égale à ce qu’on peut entendre sur PC.

…et c’est toujours vrai une fois en jeu

Quantité de petits bruitages (comme le bruit du compteur d’Épice en haut à droite) sont également passés à la trappe, appauvrissant l’ambiance sonore du jeu. En revanche, les doublages français ont été réenregistrés : fini l’accent étrange, et les soldats parlent enfin quand on clique sur eux, bon point de ce côté-là, donc.

Notez comme les bâtiments à construire sont désormais affichés dans une barre horizontale, en bas de l’écran, qui tranche un peu avec le reste de l’interface

Mais musicalement, c’est le carnage : là où la version PC nous proposait une dizaine de morceaux s’enchaînant dynamiquement, la version Amiga ne nous propose qu’un seul et unique thème ! Comble de malheur, le thème en question – une simple nappe planante ne devant pas dépasser cinq notes – ferait un très bon somnifère, et anesthésie totalement la frénésie qui caractérisait la version originale. C’est d’autant plus dommage que le jeu est très fluide, parfaitement jouable, et qu’il n’y avait pas de réelle raison d’expurger ainsi ce qu’offrait la version PC (on pouvait installer le jeu sur un disque dur). Bref, une petite déception que cette version qui semble avoir cruellement manqué d’ambition, et qui aurait sans doute pu espérer mieux en étant pensée pour l’Amiga 1200.

NOTE FINALE : 14/20

Dune II sur Amiga aura fait le choix discutable de ne pas tirer parti des caractéristiques de l’Amiga 1200 – parmi lesquelles un mode AGA qui aurait pu offrir une réalisation égale à celle du VGA – et de procéder à quelques coupes inutiles et sincèrement inexplicables, notamment sur le plan sonore. Le jeu reste bien évidemment très sympathique, mais en-dehors de la nostalgie ou de la curiosité, aucune raison de privilégier cette version à celle parue sur PC.

Version Mega Drive

Développeur : Westwood Studios, Inc.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : 1er Mai 1994 (Amérique du Nord) – Juin 1994 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Allemand, anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 8Mb
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre et le didacticiel du jeu :

Grosse surprise, a priori, que ce portage de Dune II sur la machine de Sega, mieux connue pour sa mascotte bleue et ses jeux d’action tirés de l’arcade que pour la richesse de sa ludothèque au rayon stratégie. Ce jeu restera d’ailleurs le seul portage d’un jeu Westwood sur la Mega Drive – Eye of the Beholder ayant été porté, lui, sur le Mega-CD. Mais après tout, le studio américain avait déjà développé en exclusivité pour la machine de SEGA, comme dans le cas de Warriors of the Eternal Sun.

Graphiquement très différente, cette version Mega Drive est tout sauf une version au rabais

Que penser, alors, de cette curiosité ? Au premier contact, on comprend immédiatement que les fioritures auront été les premières sacrifiées de cette version : pas d’introduction, pas de cinématiques, pas de membre du Bene Gesserit pour nous présenter les différents clans (les mentats des trois maisons le font désormais eux-mêmes, en reprenant le texte du Bene Gesserit et en parlant d’eux à la troisième personne, ce qui est un peu étrange), pas de différence d’interface d’un camp à l’autre.

Les cinématiques sont désormais réduites à la portion congrue

Le moins qu’on puisse dire, c’est que ceux qui ne connaissent pas l’univers de Dune ne sont pas exactement pris par la main en terme de présentation de l’univers ; en revanche, on trouve un didacticiel se contentant de vous présenter les différents terrains, unités et bâtiments du jeu avant de vous résumer l’interface, qui tient en trois boutons, manette oblige.

C’est une fois la partie lancée qu’intervient la plus grosse surprise : le jeu est désormais en plein écran, tout le contenu a été entièrement redessiné en prenant en compte le fait qu’on jouait sur un moniteur de télévision et pas à vingt centimètres d’un écran quinze pouces. Si l’interface y perd en identité, elle y gagne en revanche en clarté, surtout que – deuxième bonne surprise – la maniabilité au pad a été très bien pensée. Plus de bouton « déplacement  » à aller chercher : toutes les unités se déplacent désormais d’une simple pression de bouton : visez le sol, et elles se déplaceront, visez une unité adverse et elles la prendront pour cible.

Le jeu emploie dorénavant un système de mots de passe

C’est tellement bien pensé que le jeu en est même plus jouable à la manette qu’à la souris, un comble ! Pour le reste, les trois campagnes proposées restent assez proches de ce qu’offrait la version originale : on assiste à quantité de petites adaptations (les bâtiments ne font pas toujours la même taille que dans la version PC, on ne peut plus créer de dalles individuelles, certains édifices ne s’améliorent plus, ils ne laissent plus d’unités d’infanterie une fois détruits, on ne choisit plus sa destination entre les missions, etc.) mais aucune d’entre elles ne trahit l’esprit du jeu, qui reste identique à 90%. Du très beau boulot, vraiment.

La taille des unités et des bâtiments a été revue pour correspondre à un affichage sur un écran télé

Quelques petits bémols dans ce concert de louanges : tout d’abord, le système de sauvegarde a été remplacé par un système de mots de passe. Si cela peut très bien se comprendre vu les capacités des cartouches de l’époque, cela signifie aussi qu’il vous sera impossible de sauvegarder au cours d’une mission. Autant dire que vous aurez intérêt à prévoir un marathon et des séances de jeu de plusieurs heures pour les dernières missions, parce qu’il faudra à chaque fois les accomplir d’une traite.

L’écran de victoire qui suit chaque mission est la seule scène cinématique que vous verrez de tout le jeu

Cela vous prendra d’autant plus de temps que, et c’est le deuxième reproche, la Mega Drive tend à tirer quelque peu la langue quand de nombreuses unités sont engagées à l’écran (c’était vrai aussi sur PC, mais la puissance des machines actuelles a largement annihilé le problème). N’espérez pas non plus une fin en apothéose : pas de cinématique, un simple écran de félicitations et basta. Mais pour les amateurs de stratégie de l’époque, qui n’avaient pas forcément les moyens de se payer un PC haut-de-gamme histoire de faire tourner la bête, il y avait largement matière à investir dans la cartouche du jeu sans se sentir floué.

Le nombre d’impacts témoigne de la violence des combats

NOTE FINALE : 15/20

Excellent portage sachant tirer le meilleur de la machine de Sega, ce Dune II version Mega Drive pourra même se montrer plus jouable, aux yeux des joueurs modernes, que l’original sur PC. Dommage que tout l’enrobage ait été sacrifié dans la manœuvre – mais on jouait rarement à un jeu de stratégie pour sa présentation, surtout en 1994.