SolarStriker

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Développeur : Minakuchi Engineering Co., Ltd.
Éditeurs : Nintendo Co., Ltd. (Japon) – Nintendo of America Inc (Amérique du Nord) – Nintendo of Europe GmbH (Europe)
Titre alternatif : Solar Striker (graphie alternative)
Testé sur : Game Boy

Version Game Boy

Date de sortie : 26 janvier 1990 (Japon) – 6 juin 1990 (Amérique du Nord) – 28 septembre 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Console
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques : Cartouche de 512kb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme on aura déjà eu l’occasion de l’évoquer – et comme on aura vraisemblablement l’occasion de le refaire –, la Game Boy était, à son lancement, un pari particulièrement gonflé qui avait de quoi laisser autant les joueurs que les développeurs particulièrement perplexe.

Si l’idée de pouvoir jouer virtuellement n’importe où sans avoir à transporter une console, une télévision, l’alimentation et les câbles et à chercher une multiprise dans la salle d’attente du dentiste était séduisante sur le papier, le concept n’en impliquait pas moins de très sérieuses contraintes, et nombreux étaient ceux qui se grattaient la tête en s’interrogeant sur le véritable potentiel ludique (et par extension commercial) d’une machine imposant de jouer sur un écran monochrome de moins de 5cm de côté, avec quatre malheureuses nuances de gris en guise d’orgie visuelle, sans même parler du stock de piles à prévoir pour faire fonctionner la chose.

Fort heureusement, des titres comme Super Mario Land et surtout Tetris s’étaient rapidement chargés de démontrer la viabilité de l’approche… ce qui ne prouvait pas pour autant que « l’expérience nomade », comme on ne la nommait pas encore, était applicable à tous les types de jeux. À une époque où la première console 16 bits avait déjà débarqué en fanfare, proposer des titres qui puissent passionner les foules plus de cinq minutes – et justifier l’achat au prix fort de la cartouche demandait des trésors d’ingéniosité, et il aura souvent fallu envoyer des pionniers pour défricher le terrain.

Pour le genre – encore considéré comme « majeur » en 1990 – du shoot-them-up, c’est carrément Gunpei Yokoi lui-même, le concepteur de la Game Boy, qui aura pris le taureau par les cornes en proposant SolarStriker, le premier titre du genre sur la machine. Autant le dire tout de suite : on sent immédiatement, en lançant la cartouche du jeu, une ambition très mesurée consistant davantage à essuyer les plâtres que de chercher à en mettre plein les mirettes et les esgourdes. À bien des niveaux, SolarStriker fait presque office de gabarit, de « template », comme disent les anglo-saxons, des futurs shoot-them-up à défilement vertical à venir – une sorte de première pierre destinée à guider la construction du reste de l’édifice.

La minuscule cartouche de 512kb va à l’essentiel : aucune introduction, pas de séquences de jeu à l’écran-titre (on partait alors sans doute du principe que les joueurs n’allaient pas s’amuser à laisser leur console tourner dans le vide, ce qui peut se comprendre), un scénario qui tient en une phrase (« allez vaincre les méchants »), aucune mise en scène, aucune ligne de texte, et les seules illustrations ne seront visibles que pendant la séquence de fin.

Le déroulement est si simple qu’on pourrait presque le décrire comme un Space Invaders avec un défilement : des vagues adverses arrivent par le haut de l’écran tout au long des six niveaux du jeu, avant de se conclure par un boss. Il n’y a aucun obstacle à éviter en dehors des ennemis et de leurs tirs, les deux boutons ne servent qu’à tirer (avec un tir rapide, heureusement), et il n’y a qu’un seul type de power-up, lequel augmente graduellement la puissance de votre tir principal sur trois niveaux. Autant dire qu’on fait difficilement plus basique – la cartouche ne cherche de toute façon pas à épaissir artificiellement la sauce, l’aventure pouvant être bouclée en vingt minutes et pas une de plus, ce qui était une nouvelle fois la norme attendue pour une console alors exclusivement pensée pour les parties courtes.

Cette ambition très mesurée se retrouve d’ailleurs dans la réalisation : les graphismes sont pensés avant tout pour être lisibles – ce qu’ils parviennent à être sur un écran à cristaux liquides non rétroéclairé où le moindre mouvement laisse une trace d’une bonne demi-seconde – l’animation est fluide, on peut distinguer les projectiles ennemis, et la musique a l’avantage d’exister même si elle tourne assez vite en boucle.

Bref, au titre de galop d’essai, le logiciel accomplit l’essentiel… et pas grand chose d’autre, ce qui ne veut pas dire qu’on passe un mauvais moment pour autant. Disons simplement que la difficulté est suffisamment élevée – principalement à cause du peu de temps que vous laisse la minuscule fenêtre de jeu pour éviter les projectiles, surtout pendant les boss – pour nécessiter de rester concentré d’un bout à l’autre, et qu’on se rapproche en quelque sorte de la version « accessible » de la philosophie des jeux d’arcade de la fin des années 70 et du début des années 80.

On n’a peut-être pas des dizaines d’armes à gérer, des patterns démentiels pendant les boss, des décors dont on se demande comment la machine parvient à les afficher et un déluge sonore en stéréo, mais en tant que pur jeu d’adresse, cela reste suffisamment prenant pour pouvoir y consacrer assez d’énergie pour le finir. Les joueurs à la recherche d’un titre du même genre un peu plus consistant préfèreront sans doute aller voir directement du côté de Chikyū Kaihō Gun ZAS, de Sagaia ou de Nemesis – pour n’en citer que quelques-uns – mais ceux qui cherchent simplement à s’occuper les doigts avant de retourner faire quelque chose de plus important devraient y trouver leur compte. Parfois, c’est aussi précisément pour cela qu’on était heureux d’avoir une Game Boy.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 11/20 SolarStriker est le premier shoot-them-up à avoir vu le jour sur Game Boy, ce qui décrit assez bien l'expérience ludique qu'on est en droit d'en attendre : une jouabilité basique mais immédiate, des graphismes pensés pour être lisibles avant d'essayer d'en mettre plein les yeux, un déroulement étudié pour des parties courtes et un défi qui peut être surmonté en vingt minutes à condition d'avoir de bons réflexes – et de bons yeux. C'est plus une ébauche qu'un logiciel complet, une sorte de gabarit pour montrer aux futurs développeurs comment s'y prendre avec la jeune console portable, et autant dire qu'il y a peu de chance d'y engloutir des semaines avec des étoiles dans les yeux. Mais pour les amateurs du petit jeu qui occupe les doigts pendant cinq minutes et qui auraient envie d'essayer autre chose que Tetris, le titre de l'équipe de Gunpei Yokoi fait le travail. Simple, mais (relativement) efficace. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une musique qui tourne vite en boucle – Un déroulement très simple, avec très peu de renouvellement – Une difficulté essentiellement due à la petitesse de la surface de jeu – Une réalisation purement fonctionnelle

Bonus – Ce à quoi ressemble SolarStriker sur l’écran d’une Game Boy :

Les avis de l’époque :

« N’attendez pas de surprises de la part de ce soft des plus classiques, mais la bonne vieille recette est toujours aussi efficace et on se prend tout de suite au jeu. […] Les graphismes sont simples, mais clairs, l’animation est rapide et la bande sonore accompagne bien l’action. Efficace ! »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 14/20

The Punisher (Paragon Software)

Développeur : Paragon Software Corporation
Éditeur : MicroProse Software, Inc.
Testé sur : PC (DOS)

La licence The Punisher (jusqu’à 2000) :

  1. The Punisher (The Edge) (1990)
  2. The Punisher (Beam Software) (1990)
  3. The Punisher (Paragon Software) (1990)
  4. The Punisher : The Ultimate Payback! (1991)
  5. The Punisher (Capcom) (1993)

Version PC (DOS)

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquette 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr, VGA (16 couleurs)
Cartes sonores supportées : AdLib, Covox Sound Master, haut-parleur interne
*640ko requis pour le mode Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

S’il fallait se fier aux deux premières adaptations vidéoludiques de ses aventures, on pourrait en conclure que Frank Castle est un personnage plutôt… unidimensionnel.

En fait, décrire celui qui se faite surnommer « The Punisher » comme un gros bourrin meurtrier passant ses journées à accomplir exactement ce qu’il reproche aux criminels en alignant un body count à faire frémir les pires terroristes de l’histoire serait sans doute plus proche de la réalité, tant on ne l’aura jamais vu faire autre chose que d’ouvrir le feu en pleine rue quitte à y aller au lance-flammes, à la grenade ou au bazooka. Bref, on ne va pas se mentir, on ne peut pas dire qu’on ait eu grand chose à retenir de l’univers de l’anti-héros, de son parcours ou des éventuels dilemmes qui pourraient l’agiter – à tel point qu’on peut en venir à se demander s’il était vraiment nécessaire de s’emparer du célèbre comics plutôt que de créer n’importe quel vigilante générique (et libre de droits) pour accomplir exactement la même chose sans qu’on perçoive la différence.

C’est probablement une des réflexions que se sera faite l’équipe de Paragon Software au moment de développer sa propre adaptation : quitte à avoir un univers déjà installé avec un « lore », comme on dit maintenant, c’est un peu dommage de ne pas s’en servir. On appréciera donc que leur version de The Punisher à destination du PC ait le mérite d’intégrer de quoi mettre un peu de chair autour des fusillades du protagonistes, en remplissant la boîte du jeu de documents décrivant le contexte et les personnages avec coupures de presse, mémos internes du département de la justice, dossiers des Marines et tout le toutim.

Un bon moyen de se souvenir avec nostalgie de cette époque où les boîtes de jeu vidéo étaient pleines à ras-bord plutôt que de se contenter de contenir un bout de papier avec un code de téléchargement, mais passons. L’autre bonne nouvelle, c’est aussi et surtout que le studio aura décidé d’intégrer une partie de ces données dans le déroulement du jeu. Le scénario en lui-même n’est qu’un prétexte pour aligner des missions : Frank Castle a trouvé un informateur capable de lui donner l’emplacement du Q.G. du Kingpin, le redoutable chef de la pègre, mais la facture est élevée : 500.000$. Et pour ne rien arranger, le fameux criminel ayant pris l’habitude de ne jamais rester très longtemps au même endroit pour ne pas se faire coincer par la police (ou par le Punisher), la somme devra être réunie en moins de deux semaines, faute de quoi l’information deviendra caduque. Fort heureusement, notre (anti-)héros peut compter sur Microchip, un agent qui saura lui dégotter des missions lucratives aptes à réunir la somme demandée dans le laps de temps.

L’aventure commence donc dans l’entrepôt qui vous sert de repaire, et l’objectif va être simple : aligner les missions sélectionnées aléatoirement par votre collègue, suivre attentivement les briefings et vous rendre sur place pour faire ce que l’on attend de vous.

Car cette fois, il ne s’agira plus simplement de débarquer à un point donné avec son plus bel arsenal et de faire un maximum de morts : la ville de New York toute entière est votre terrain d’action, et il ne sera pas rare de devoir mener l’enquête directement sur le terrain quitte à devoir interroger des quidam, graisser des pattes, faire de la plongée (!), se déguiser pour éviter de vous faire griller pendant une mission discrète – et bien sûr, sortir votre M16 pour faire régner la justice à votre façon, c’est à dire la loi du Talion livrée en 9mm. Mieux vaudra donc bien prendre le temps de consulter vos objectifs avant de partir… et aussi et surtout de bien prendre l’adresse, car le jeu part du principe que vous êtes totalement familier avec la topographie new-yorkaise, et aucune carte n’est livrée ! On touche d’ailleurs là au premier problème du jeu pour un joueur européen lambda : quand on vous demande de vous rendre au croisement de la 47ème rue et de la sixième Avenue, les choses ne sont pas trop compliquées pour vous rendre sur place. Par contre, si on vous dit d’aller à Bryant Park ou au Pier 97, préparez-vous à sortir Google Map pour savoir où aller, car naturellement rien de tout ça n’est détaillé dans le manuel…

Aller quelque part peut d’ailleurs se faire de deux façons : vous pouvez tout simplement vous y rendre directement en entrant les coordonnées, ou bien parcourir les rues de la ville en van, quitte à devoir vous défendre face à des véhicules adverses (ce qui vous demandera d’ailleurs de puiser dans vos précieuses réserves d’argent pour faire réparer votre véhicule après coup).

À ce stade, je sens déjà poindre la question des lecteurs les plus perspicaces : « Pourquoi choisir de se déplacer en van si cela ne fait qu’aboutir au même résultat qu’en y allant à pied mais via une méthode plus longue, plus dangereuse, plus coûteuse et plus aléatoire ? » Eh bien très honnêtement, je serais bien en peine de vous fournir la réponse. Apparemment, les équipes de Paragon Software étaient apparemment si fières d’avoir développé un moteur de conduite (par ailleurs extrêmement rudimentaire : on ne peut tourner qu’aux intersections) au nom du réalisme qu’elles ont tout simplement oublié de lui donner un rôle autre que pour faire « comme si ». Ces phases étant de toute façon aussi frustrantes que sans intérêt, on sera de toute façon heureux de pouvoir s’en passer, mais cela nous donne déjà un assez bon indice quant à la solidité du game design dans son ensemble.

Une fois arrivé sur place, on se retrouve face à un jeu en vue de dessus à la Gauntlet, doté d’une interface faisant lourdement usage du clavier (90% des fonctions sont inaccessibles au joystick) et qui vous permettra à la fois de visiter et de faire feu sur les éventuelles menaces tout en bénéficiant d’un inventaire, en vous laissant parler avec les gens (via la touche F2, choix hyper-naturel…), en vous laissant ramasser des armes et des munitions, examiner des objets, etc.

De quoi profiter un peu des services de la ville et nous donner l’occasion de visiter des hangars, des bars, des parkings, des appartements ou même des yachts – et surtout des rues et des avenues à profusion, car il faudra souvent être prêt à fouiller un peu autour des coordonnées qui vous auront été données pour trouver le maquereau, le criminel ou l’indicateur que vous êtes venu chercher. Un programme alléchant sur le papier mais qui, dans les faits, donne surtout l’impression de devoir lutter de nombreuses minutes à errer en vain sur la base d’instructions floues pour parvenir à mériter de poussives séquences d’actions hyper-basiques se limitant à faire feu droit devant soi sur des ennemis qui se ressemblent tous… et qui sont d’ailleurs impossible à distinguer des civils que notre héros est censé ne jamais devoir blesser – pas ici, en tous cas, où vous pourrez allégrement massacrer des innocents à la pelle sans que cela n’empêche notre justicier de dormir. En ajoutant une réalisation en seize couleurs qui commençait à être franchement limite fin 1990 et une ambiance sonore qui s’approche du grand silence passé l’écran-titre, on ne peut pas dire que le jeu s’approche à moins de deux-cents années lumière du précurseur de GTA qu’il aurait pu être.

En fait, le plus triste avec The Punisher à la sauce Paragon Software, c’est que ce n’est même pas à proprement parler un mauvais jeu (j’ai même longtemps hésité à lui mettre la moyenne tant le titre n’est pas à des kilomètres, dans sa philosophie, d’un logiciel comme The Terminator, par exemple, qui présente des lacunes assez équivalentes) ; les différentes composantes ont beau être aussi confuses que limitées, la relative liberté offerte par le jeu a indéniablement ses vertus, un fois domptée une douloureuse courbe d’apprentissage qui risque de nécessiter une bonne heure d’efforts pour apprendre à se dépatouiller avec l’interface antédiluvienne et le manque d’indications du jeu.

Le vrai problème, c’est surtout que le maigre résultat (une action basique, illisible et moribonde qui évoque un peu celle d’un titre comme Die Hard sur NES en moins bien) ne vaut clairement pas l’investissement – il y avait certainement de quoi mordre à l’hameçon en 1990, où la plus infime touche de réalisme était perçue comme un apport ludique à part entière et où le concept du « monde ouvert » était nettement plus novateur, mais force est de reconnaître qu’il faut dorénavant une certaine dose de masochisme pour être prêt à consacrer autant d’énergie afin d’aboutir à une expérience à peine médiocre. En résumé : il faut souffrir pour parvenir à trouver le jeu sous toutes les innombrables lourdeurs, et lorsqu’on y parvient, on se dit « tout ça pour ça ? ».

Avec une jouabilité plus intuitive, une partie « aventure » un peu plus dense que de taper à toutes les portes au hasard pour échanger des one-liner avec des PNJs qui n’ont pratiquement jamais rien à vous dire et une partie « action » où on serait capable d’identifier les ennemis et qui ne vous demanderait pas d’aller ouvrir votre inventaire à chaque fois que vous voulez recharger votre arme, il y aurait eu moyen d’obtenir un titre suffisamment solide pour réellement rendre hommage au matériau de base. En l’état, on a plutôt l’impression de se trouver face à un brouillon mal fini abandonné six mois avant d’avoir pu devenir le jeu qu’il aurait mérité d’être. Les mordus des logiciels « expérimentaux » étrennant des mécanismes originaux avec une certaine maladresse pourront éventuellement y trouver leur compte, car tout n’est pas à jeter, mais pour la grande majorité des autres, la sentence est sans appel : le jeu n’en vaut sans doute pas la chandelle.

Vidéo – Une mission du jeu :

NOTE FINALE : 09,5/20 The Punisher sur PC est un assez bon exemple d'un concept intéressant sur le papier mal exécuté. En proposant – pour une fois ! – de diriger un Frank Castle dont l'activité ne se limite pas à tirer sur tout ce qui bouge, le titre de Paragon Software intègre une dimension « enquête » laissant libre cours au joueur pour visiter la ville et qui aurait pu amener une variété appréciable dans les approches, les séquences de jeu et la façon de remplir les objectifs. Malheureusement, faute de directions claires et de possibilités ludiques, l'essentiel de la partie « aventure » se limite soit à faire dix mètres pour ouvrir le feu (5% du temps), soit à tourner en rond pendant de longues et douloureuse minutes en cherchant désespérément à comprendre ce qu'on est censé faire (les 95% restants). Sachant que l'action en elle-même est hyper-limitée et que de très nombreux aspects du jeu (les déguisements, les déplacements en van, les séquences sous-marines) ne servent pour ainsi dire à rien, on se retrouve face au brouillon de ce qui aurait pu être un bon jeu, mais qui ne l'est pas. Les joueurs les plus patients trouveront peut-être la force de dompter l'interface et de se familiariser avec la topographie new-yorkaise pour aboutir à une expérience qui a son charme, mais les autres auront lâché l'affaire au bout de deux minutes, et on ne peut pas vraiment leur en vouloir. Bien essayé, mais raté. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une interface d'un autre âge – Des objectifs flous qui vous laissent souvent bien en peine de comprendre ce que vous devez faire... – ...et qui attendent de vous que vous connaissiez la géographie new-yorkaise – Aucune carte, aucun moyen de se situer – Des séquences en van dont on attend encore de savoir à quoi elles peuvent bien servir – Des scènes d'action aussi basiques qu'illisibles... – ...d'autant qu'il est impossible de distinguer un ennemi d'un civil avant qu'il ne fasse feu sur vous

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Punisher sur un écran cathodique :

Space Invaders : Fukkatsu no Hi

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Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Graphie originale : Space Invaders : スペースインベーダーズ 復活の日 (Japon)
Testé sur : PC Engine
Disponible sur : Wii

La série Space Invaders (jusqu’à 2000) :

  1. Space Invaders (1978)
  2. Deluxe Space Invaders (1979)
  3. Space Invaders II (1980)
  4. Return of the Invaders (1985)
  5. Space Invaders : Fukkatsu no Hi (1990)
  6. Super Space Invaders ’91 (1990)
  7. Space Invaders DX (1994)
  8. Space Invaders : Virtual Collection (1995)
  9. PD Ultraman Invaders (1995)
  10. Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies (1995)
  11. Space Invaders 2000 (1998)
  12. Space Invaders (Game Boy Color) (1999)
  13. Space Invaders (1999)

Version PC Engine

Date de sortie : 2 mars 1990 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : HuCard
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : HuCard de 2Mb

Connaissez-vous l’effet papillon ?


En 1987, Namco aura commercialisé une borne d’arcade (mal) nommée Galaga ’88, qui aura connu un joli succès en allant déterrer un antique classique des débuts de l’ère vidéoludique pour en faire un jeu étonnammentefficace grâce à un habile lifting associé à un autre traitement très en vogue dans les années 80 : les power-up.

Le titre original est inclus, mais ce n’est clairement pas ce qui nous intéressera aujourd’hui

Cette sorte de « reboot » avant l’heure – et surtout l’accueil qu’il aura reçu – aura visiblement fait réfléchir Taito, lesquels avaient ironiquement inauguré une formule équivalente un an plus tôt en dynamitant le très daté Breakout pour en faire le légendaire Arkanoid. Galaga étant à l’origine une réponse (ou plutôt l’évolution d’une autre réponse : Galaxian) au titre fondateur du genre, l’immortel Space Invaders, la firme japonaise se dit qu’il était peut-être temps de rendre à la société rivale la monnaie de sa pièce en relançant une licence qui avait été sagement rangée dans les cartons après l’échec de Return of the Invaders. Mais quelque mois avant la sortie d’un Super Space Invaders ’91 dont le titre ne cachait ni la filiation ni la source d’inspiration évidente, Taito aura visiblement jugé nécessaire d’effectuer un galop d’essai sur PC Engine avec un jeu qui n’aura jamais quitté le Japon : Space Invaders : Fukkatsu no Hi.

Ne renonceront-ils donc jamais ?

Signe d’une certaine méfiance, l’HuCard développée par Taito ne s’affiche pas entièrement comme un remake ou comme un reboot. En fait, loin de tout tabler sur ses nouveautés, celle-ci s’applique d’abord à intégrer… un portage en bonne et due forme du Space Invaders de 1978.

Les choses commencent doucement, et ce n’est sans doute pas plus mal

Inutile de revenir ici sur un jeu que tout le monde connait – je vous laisse consulter l’article dans l’hypothèse improbable où ça ne serait pas le cas – mais disons simplement qu’on a ici affaire à une conversion très fidèle et sans le moindre chichi de la borne, avec cinq couleurs à l’écran et l’éternelle même vague revenant à l’infini jusqu’à la fin de la partie. Sans doute pas de quoi justifier le prix du neuf douze ans après la sortie du programme original… Alors, timidement, sans même le mettre spécialement en avant sur l’écran-titre, la carte intègre également une autre version du jeu sobrement intitulée Space Invaders Plus. Et, comme on peut s’en douter, c’est tout entier dans cette édition dépoussiérée que réside le véritable intérêt du logiciel, lequel se décide enfin à prendre un minimum de risques pour repartir d’une formule éprouvée et tâcher de la moderniser un peu sans la trahir en rien. Un exercice plus délicat qu’il n’en a l’air, et sans doute pas mené avec toute l’ambition qui aurait convenu, mais qui met néanmoins globalement dans le mille à presque tous les niveaux.

Apprenez à conserver les power-up pour les moments qui comptent, car leur pouvoir de destruction est souvent énorme

Ironiquement, difficile de trouver dans ce Space Invaders Plus une quelconque nouveauté qui n’aie pas déjà été étrennée dans Return of the Invaders cinq ans plus tôt. La plus évidente est l’inévitable refonte graphique, avec des décors qui ont le bon goût de se renouveler régulièrement au fil de l’unique mode de jeu, des extraterrestres qui changent d’apparence (et parfois de comportement) d’une vague à l’autre, et même votre véhicule qui passe du tank à chenille au vaisseau spatial au gré des niveaux.

Il est rapidement très difficile de se glisser sous un « bloc » d’ennemis sans y laisser la peau

La fameuse soucoupe volante du haut de l’écran est toujours de la partie, et comme dans Return of the Invaders, elle délivre parfois des power-up… même si ce n’est pas systématique, introduisant ainsi une dose d’aléatoire qui peut avoir un gros impact sur votre espérance de vie. En effet, les nombreux bonus du jeu sont généralement aussi puissants que leur durée d’utilisation est courte, et ils pourront vous aider à venir à bout en un temps record de vagues qui se seraient autrement montrées beaucoup plus problématique à surmonter, surtout à partir du milieu du jeu. En fait, si les formations adverses ne font toujours preuve d’aucune facétie, se contentant de bouger d’un bord à l’autre de l’écran comme elles le faisaient déjà en 1978 (aucune trace ici des quelques formations alternatives expérimentées dans le titre précédent), c’est cette fois clairement leur puissance de feu qui représentera la principale menace, vous obligeant à une mobilité constante pour espérer vous glisser au milieu du déluge de projectiles qu’elles ne manqueront pas de vous jeter dessus au bout de cinq minutes de jeu. L’aspect « stratégique » est donc un peu différent ici, nettoyer les lignes inférieures étant souvent plus urgent que de déblayer les colonnes latérales comme on le faisait auparavant pour gagner du temps, mais l’action y gagne en nervosité et les joueurs qui ne tenaient même pas jusqu’à la deuxième vague sur la borne originale devraient désormais se trouver à leur aise beaucoup plus vite (et beaucoup plus longtemps).

Plus on avance dans les vagues et plus on devra compter sur les réflexes pour avoir une chance

En fait, en dépit d’une difficulté une nouvelle fois assez élevée une fois que le jeu a atteint sa vitesse de croisière, la jouabilité se révèle vraiment efficace, et même les joueurs allergiques à l’expérience originale devraient pouvoir authentiquement s’amuser… même s’ils pesteront sans doute – à raison – sur le manque de prise de risque du jeu. C’est d’ailleurs dans son manque de contenu et d’option de configuration que la carte de Taito a le plus mal vieilli : aucun mode de difficulté, un seul mode de jeu, pas de multijoueur, très peu de variations dans le comportement et la disposition des vagues adverses…

C’est très sage, mais c’est plus efficace que ça n’en a l’air

Il y avait clairement matière à faire un peu mieux, ce qui tend d’autant plus à donner à cette exclusivité PC Engine un aspect de « brouillon » du Super Space Invaders ’91 qui verrait le jour un peu plus tard la même année, et qui intègrerait davantage de variété, des boss, des stages bonus et un mode deux joueurs. Bref, ce Fukkatsu no Hi endosse le costume d’un épisode de transition sur lequel on pourra légitimement être tenté de faire l’impasse, ce qui n’en fait pas un mauvais jeu pour autant – loin de là. Disons simplement que les amateurs de scoring cherchant une expérience plus accessible, moins austère et plus nerveuse de la borne originale sans pour autant se voir ensevelis sous les nouveautés devraient se sentir ici comme des poissons dans l’eau – mais on ne va pas se mentir, la plupart des joueurs pourront directement aller tenter leur chance sur les épisodes plus tardifs sans avoir le sentiment d’avoir raté quelque chose d’inoubliable.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20 Première tentative de ressortir des cartons un Space Invaders qui commençait à sérieusement prendre la poussière – sans doute à la suite d'un Galaga '88 qui aura donné des idées à Taito – Fukkatsu no Hi a surtout la bonne idée d'introduire un Space Invaders Plus quelques mois avant que Super Space Invaders '91 ne lui emboîte le pas. On ne va pas se mentir : c'est clairement ce mode de jeu qui retiendra aujourd'hui l'attention, en offrant un gameplay plus nerveux et plus permissif que celui de son modèle sans trahir en rien son aspect « stratégique ». Bien que la formule soit efficace et se montre répétitive nettement moins rapidement que celle du titre original, elle n'offre finalement rien de nouveau comparé à Return of the Invaders, et on ne pourra que regretter que le contenu n'ait pas visé encore un cran plus haut : davantage de décors, davantage de bonus, davantage d'ennemis, des boss – oh, et puis un mode deux joueurs, tant qu'à faire. En l'état, les amateurs de scoring y trouveront leur compte plus facilement que sur la borne de 1978, mais les autres risquent de n'y revenir que très ponctuellement faute de renouvellement dans la deuxième moitié du jeu.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Une expérience exclusivement solo – Une difficulté qui ne tarde pas à redevenir insurmontable – Des vagues qui s'éternisent et qui ne se renouvèlent pas assez passé les premiers niveaux

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Fukkatsu no Hi sur un écran cathodique :

The Punisher (Beam Software)

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Développeur : Beam Software Pty., Ltd.
Éditeur : LJN, Ltd.
Testé sur : NES

La licence The Punisher (jusqu’à 2000) :

  1. The Punisher (The Edge) (1990)
  2. The Punisher (Beam Software) (1990)
  3. The Punisher (Paragon Software) (1990)
  4. The Punisher : The Ultimate Payback! (1991)
  5. The Punisher (Capcom) (1993)

Version NES

Date de sortie : Novembre 1990 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version américaine
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

N’importe quel héros vous le dira (ou, à défaut, demandez à un comédien rodé au théâtre) : l’important lorsque l’on veut que les gens se souviennent de vous, c’est de bien réussir son entrée.

On ne va pas se mentir : en 1990, Frank Castle aura raté la sienne, même si le blâme en revient davantage au studio The Edge et à sa calamiteuse adaptation du comics qu’au justicier en lui-même. Difficile d’affirmer que ce ratage initial en soit l’unique cause – l’échec commercial du nanar avec Dolph Lundgren en étant sans doute une autre –, mais le fait est qu’après un très bref pic d’activité de trois ans, le Punisher aura purement et simplement disparu des écrans vidéoludiques pour l’intégralité du XXe siècle, en remerciant au passage Capcom de l’avoir aidé à finir en beauté. Hé, faute d’avoir réussi son entrée, autant réussir sa sortie…

En voyant le jeu débarquer sur NES à peine un mois après les versions Amiga et Atari ST – sous la houlette d’une toute autre équipe à la tête d’un projet différent, cela va de soi –, on avait objectivement de quoi se montrer méfiant pour plusieurs raisons. Déjà par son simple statut d’adaptation de licence – un réservoir inépuisable de titres catastrophiques dont le titre de The Edge n’avait été qu’un représentant supplémentaire.

Ensuite par le fait que la NES n’était pas forcément la plateforme idéale pour accueillir les aventures d’un anti-héros sombre et violent qui aurait sans doute été plus à son aise sur une Mega Drive davantage orientée vers les adolescents que la très familiale (et très censurée) console de Nintendo. Enfin et surtout par la simple présence d’un logo sur la boîte que les connaisseurs de fiascos ludiques (ou les simples amateurs de youtubeurs façon Angry Video Game Nerd ou Joueur du grenier) auront appris à reconnaître et à fuir immédiatement : celui de l’éditeur américain LJN. Autant dire que tous les ingrédients étaient réunis pour s’attendre au pire… et au final, le résultat est plutôt plus enthousiasmant que tout ce qu’on pouvait craindre.

Certes, le concept ne se sera pas beaucoup éloigné de celui du titre paru un mois plus tôt : The Punisher est un vigilante qui rend la justice avec des gros flingues, on rempile donc une fois de plus pour un jeu de tir façon rail shooter : un curseur à l’écran, un bouton pour l’arme principale (une mitrailleuse) et un autre pour l’arme secondaire (des grenades qui peuvent occasionnellement être remplacées par un bazooka), des ennemis cinq cents fois plus nombreux que vous – autant dire du classique.

Cependant, on remarquera que le titre de Beam Software, lui, aura cependant opté pour une vue à la troisième personne qui aura à la fois le mérite de vous laisser apercevoir le héros du jeu mais aussi et surtout d’éviter les tirs adverses via une maniabilité à la Cabal, à laquelle manque juste la fonction qu’on aurait le plus apprécié : une roulade ou n’importe quelle autre forme de manœuvre d’évitement. Rien de révolutionnaire, donc, et sachant que la réalisation est loin d’être impressionnante, avec des décors à la perspective hasardeuse et des personnages pas toujours glorieusement dessinés, on signe a priori pour un petit jeu médiocre qui a surtout pour lui de bénéficier du peu de concurrence en la matière au sein de la ludothèque de la NES. Sauf que, le diable étant dans les détails, il s’avère que ce qui n’aurait pu être qu’une vague resucée lavasse d’Operation Wolf s’avère relativement efficace grâce à une succession de petites idées bien intégrées qui aident à combattre l’indicible répétitivité d’un programme de ce type.

Déjà, il convient a minima de saluer la longueur du jeu : avec pas moins de six niveaux, chacun divisé en trois stages (quatre pour le dernier) dont un boss, et sachant que chacun de ces stages dure au moins cinq minutes, The Punisher n’est pas de ces jeux qu’on boucle en cinq minutes mais plutôt en une heure, ce qui est plutôt une bonne nouvelle.

On appréciera également que chaque adversaire soit livré avec son propre pattern, depuis les ennemis qui surgissent ponctuellement derrière les fenêtres ou les murs jusqu’aux ninjas qui bondissent en tirant, sans oublier les redoutables utilisateurs de lance-roquette qui peuvent très facilement venir à bout de votre jauge de santé et de votre réservoir de cinq vies en un temps record. Le fait que les masques de collision ne soient pas trop imprécis est également un plus bienvenu, qui suffit déjà à faire de cette cartouche un jeu supérieur à celui paru sur Amiga et Atari ST à tous les niveaux. Néanmoins, la plus grosse qualité du titre reste le fait de récompenser le joueur d’accomplir ce qu’on lui demande, à savoir : tirer. Et à ce niveau, le curseur a été si intelligemment placé qu’on pourrait presque regretter que le programme de Beam Software n’ait pas davantage fait école en la matière.

En effet, la clef du jeu est de chercher à dévaster le décor au maximum – d’abord parce que c’est cool, mais aussi et surtout parce que des bonus indispensables tentent à se cacher aux endroits les plus improbables, que ce soit derrière une poubelle ou en-dessous d’une bouche d’égout.

Des munitions supplémentaires, tout d’abord (votre arme peut encore tirer lorsque vous êtes à court de chargeur, mais elle le fait alors plus lentement), des armes plus puissantes (c’est à dire à la fréquence de tir plus élevée), mais aussi et surtout de très précieux gilets pare-balle augmentant la taille de votre jauge de vie, des bonus de soin venant la recharger, voire carrément des vies supplémentaires ! Et ce n’est pas tout : il y a aussi des journaux vous délivrant des indices, et même des niveaux bonus (généralement accessibles via le métro) pour refaire vos précieuses réserves. Le jeu ayant la bonne idée de vous offrir de nombreuses respirations entre les vagues d’ennemis plutôt que de vous envahir sous le nombre jusqu’à la nausée, on se retrouve avec une composante « recherche » assez inhabituelle pour le genre, et qui pourra avoir un impact dramatique sur l’espérance de vie de votre justicier : dénicher un bonus de soins caché dans le décor alors qu’on est – littéralement – au bout de sa vie étant ici une situation relativement fréquente, et savoir la provoquer sera le meilleur moyen d’espérer voir tout ce que le titre a à offrir en la matière.

Sachant que le titre récompense également le fait de venir à bout d’un maximum de cibles – le pourcentage d’ennemis vaincus impactant directement la santé et les munitions restaurées en fin de niveau, un total supérieur à 95% allant même jusqu’à vous faire gagner une vie –, il est donc possible, et même indispensable de jouer « stratégiquement » en sachant ne jamais oublier un adversaire tout en se déchainant sur le décor et en essayant au passage de ne pas gaspiller plus de munitions que ce qui est nécessaire.

Alors certes, on pourra regretter que les décors ne se renouvèlent pas davantage, beaucoup d’entre eux se limitant à de simples changement de palette des niveaux précédents, que les boss soient aussi longs et aussi frustrants, ou encore qu’il soit souvent impossible d’anticiper des tirs provenant d’ennemis qui ne sont même pas encore apparus à l’écran. Néanmoins, il y a quelque chose d’inexplicablement satisfaisant dans l’approche et dans le rythme adoptés par le jeu, et qui font qu’on s’amuse généralement bien plus – et bien plus longtemps – que lors des bêtes séances de tirs sur cible offertes par les programmes jouables avec un pistolet optique. Venant d’une cartouche aux trois-quarts inconnue et dont personne ne parle jamais, c’est assurément une belle performance – et les amateurs de jeu de tir cherchant un programme plus intéressant sur la durée que l’écrasante majorité des titres du genre seraient bien inspirés de laisser une chance à ce programme. Les bonnes surprises existent.

Vidéo – Le premier stage du jeu :

NOTE FINALE : 13/20 Encore un rail shooter estampillé The Punisher ? Bien que le titre de Beam Software ne paie a priori pas de mine, il a la bonne idée d'apporter avec lui juste ce qu'il faut de contenu et de petites idées pour ne pas reproduire le tragique fiasco du programme de The Edge paru un mois auparavant. On a beau être toujours face à un logiciel où l'unique interaction avec quoi que ce soit se limite à tirer sur des cibles qui ne se renouvèlent pas beaucoup dans des niveaux qui tirent un peu en longueur, le tout fonctionne plutôt mieux que ce à quoi nous avait habitué le genre grâce à un aspect « destruction utile » qui récompense l'expérimentation autant que la précision et à un équilibrage accessible sans laisser pour autant le joueur faire n'importe quoi. En dépit de quelques faiblesses, la cartouche parvient à nous donner envie d'en voir le bout en cherchant les différents niveaux bonus, et s'avère au final l'un des meilleurs représentants du genre sur NES. Hé, il n'y a pas que des mauvais jeux, en fin de compte, chez LJN. CE QUI A MAL VIEILLI : – Des ennemis qui vous tirent dessus avant même d'être à l'écran – Aucun mouvement d'évitement – Des boss un peu trop longs – Les décors des derniers niveaux qui se limitent à des color swaps

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Punisher sur un écran cathodique :

The Punisher (The Edge)

Cette image provient du site https://www.giantbomb.com

Développeur : The Edge
Éditeur : The Edge
Testé sur : AmigaAtari ST

La licence The Punisher (jusqu’à 2000) :

  1. The Punisher (The Edge) (1990)
  2. The Punisher (Beam Software) (1990)
  3. The Punisher (Paragon Software) (1990)
  4. The Punisher : The Ultimate Payback! (1991)
  5. The Punisher (Capcom) (1993)

Date de sortie : Septembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les super-héros auront longtemps été cruellement sous-employés par l’univers vidéoludique. C’est d’autant plus surprenant qu’il y a de nombreux points communs entre les superpuissants héros en collants et les avatars de jeux vidéo : on attend souvent du joueur qu’il résolve seul des situations inextricables face à des forces infiniment supérieures en nombre, ce qui est le quotidien des justiciers en costume.

On pourrait même dire que l’uniforme est fourni, lui aussi, tant il est rare qu’un personnage change de tenue au cours d’un seul et même jeu, voire au cours d’une série – transformations exceptées, combien de fois auront-eu l’occasion d’apercevoir Mario sans son inusable salopette au cours des trente-cinq dernières années ? Mais justement, peut-être que la réponse est dans la question : les joueurs de jeux d’action et les superhéros sont si intrinsèquement proches qu’aller investir dans une coûteuse licence n’avait souvent d’autre intérêt qu’un prétexte promotionnel, tant on n’a finalement jamais eu besoin de coller un super-pouvoir breveté à Samus, au roi Arthur ou à Mega Man pour les envoyer faire tout le boulot.

D’ailleurs, cela semble être superflu même chez les super-héros eux-mêmes. Prenez Frank Castle, par exemple : lui, des super-pouvoirs, il n’en a pas. Il ne peut même pas compter comme un certain Bruce Wayne sur une confortable fortune ou sur une intelligence extraordinaire ; en fait, il ne se serait pas inventé un super alias avec une tête de mort sur le torse pour se faire appeler The Punisher qu’il ne serait fondamentalement qu’un énième vigilante élevé à la loi du Talion ayant décidé arbitrairement après la mort violente de sa famille que la justice expéditive à coups de fusil à pompe était la meilleure, et que ceux qui n’étaient pas d’accord pouvaient toujours venir lui en parler s’ils l’osaient.

Autant dire un personnage assez facile à adapter en jeu vidéo, où taper et tirer sur tout ce qui bouge étaient déjà des activités extrêmement répandues dès les années 80 – il n’aura pourtant connu qu’une très brève période d’exploitation au XXe siècle, trois petites années de timides apparitions au début des années 90 avant de disparaître dans des cartons desquels il n’est d’ailleurs plus beaucoup sorti depuis. Et les premiers à avoir tenté leur chance auront été les britanniques du studio The Edge, qui espéraient visiblement capitaliser sur l’éventuel succès de l’obscur nanar mettant en scène Dolph Lundgren un an plus tôt – et qui aura si peu marqué les esprits que vous n’en avez probablement jamais entendu parler. Espoirs rapidement déçus, visiblement : cette adaptation aura également constitué le dernier titre du studio. Et quand on voit le résultat, on se dit qu’il était peut-être effectivement temps de jeter l’éponge.

The Punisher est ici un bête gallery shooter à la Operation Wolf demandant d’aller nettoyer les rues de quelques… deux niveaux (!) pour atteindre une cible jamais présentée, à la tête d’une opération jamais introduite, dans une mission jamais évoquée.

Votre héros vengeur va donc parcourir des rues, puis les égouts de la ville (vive l’originalité) avant d’écumer deux écrans supplémentaires de type entrepôts puis chambre du boss final (lequel trépassera fort poliment en un seul coup, comme à peu près tous les ennemis du jeu) avant de boucler une aventure qui ne devrait même pas atteindre les dix minutes. Il sera pour ce faire équipé en permanence de deux armes : une mitrailleuse en main gauche, et un fusil à pompe en main droite, et la fonction du second sera principalement de prendre la relève lorsque vous devrez recharger la première. Les munitions sont limitées et vous ne pourrez jamais en récupérer de tout le jeu, mais vous pourrez compter sur un stock de grenades qui feront très efficacement le ménage à l’écran – mais mieux vaudra se ménager un minimum, car au cas où vous frôleriez accidentellement un civil, ce sera le game over immédiat, car le Punisher ne tue pas de civils innocents, et ce n’est pas négociable.

Cette donnée serait sans doute assez secondaire si la ville dans laquelle opère le Punisher (New York, si ma mémoire est bonne) n’était pas peuplée des civils les plus crétins de la planète. On pourrait effectivement penser que ceux-ci auraient mieux à faire, en cas de fusillade à l’arme lourde, que de venir faire du skate ou transporter des sacs de ciment au milieu des balles, mais ce n’est visiblement pas leur cas.

Et histoire de compliquer un peu un jeu extraordinairement court, comme on l’a vu, ils n’aiment rien tant que se matérialiser à partir de rien histoire de ne surtout pas vous laisser le temps de remarquer leur présence, vous obligeant ainsi à une retenue un peu paradoxale sur des écrans où les ennemis, eux, n’hésitent pas à se presser à six ou sept à la fois au point d’en créer des bouchons jusque dans les égouts de la ville ! Notons que ce ne serait d’ailleurs que pénalisant si les masques de collisions n’étaient pas aussi imprécis (cela va encore pour toucher les ennemis du fond de l’écran, mais les adversaires de premier plan sont paradoxalement les plus difficile à toucher en dépit de la place colossale qu’ils prennent à l’écran) et surtout si les temps de réponse de la souris n’étaient pas aussi lents, les temps de réponse étant calamiteux lorsque l’opposition commence à être un peu trop nombreuse – c’est à dire la moitié du temps. Rajoutons une petite gourmandise : rein ne vaut un bon gros bug pour vous condamner au game over, donc lors du premier niveau, évitez d’aller tout droit lorsque le jeu vous propose un embranchement, car si vous croisez un civil sur le troisième écran, le jeu considèrera automatiquement que vous l’avez tué même si vous n’ouvrez pas le feu et cela signera la fin de instantanée de votre partie !

Comme vous l’aurez constaté, le bilan n’est jusqu’ici pas franchement emballant, entre une longévité ridicule et une jouabilité aux fraises, et les images vous apprendront rapidement que la réalisation n’est pas très enthousiasmante, elle non plus. Les quelques ennemis médiocrement dessinés et mal animés se baladant au milieu des teintes sépia de décors ultra-répétitifs et sans inspiration (on n’aurait pas pu visiter un parc, un métro, un gratte-ciel, un truc un peu plus coloré ?) ne devraient pas franchement faire briller vos yeux, et sachant que le son se limite pour sa part à des bruitages qui se comptent sur les doigts d’une main du baron Empain…

Mais il importe malgré tout d’aborder l’idée la plus fondamentalement stupide du programme : celui du choix de l’arme en début de niveau. Il pourrait déjà apparaître comme intrinsèquement crétin si l’on considère que les deux seules armes dont votre personnage fait usage sont clairement arrêtées d’un bout à l’autre de l’aventure, comme je l’ai déjà décrit un peu plus haut, alors quelle peut bien être la fonction de la sélection d’une arme lourde parmi cinq en prélude de chacun des deux niveaux ? Eh bien cette fameuse arme ne vous servira qu’à conclure le niveau – littéralement. Vous n’en faites même pas usage contre le boss, mais bien APRÈS lui, pour le détruire définitivement… sans quoi, les ennemis prennent la fuite et c’est alors un nouveau game over. Et comment êtes-vous censé savoir quelle arme utiliser ? C’est là que c’est drôle : vous ne pouvez pas, c’est totalement arbitraire. Vous ne pouvez qu’en essayer une au pif, et le temps de trouver laquelle marche, vous avez donc virtuellement quatre chances sur cinq d’en être quitte pour recommencer le jeu depuis le début. C’est rigolo, hein ?

Ne nous mentons pas : on devine immédiatement une maigre tentative pour allonger artificiellement la durée de vie d’un titre où il n’y a rien à voir ni à faire et qui sent le programme développé en catastrophe pour essayer de renflouer les caisses d’un studio moribond avec une licence à succès. C’est raté, d’un bout à l’autre, et le logiciel n’a même pas assez de choses à offrir pour se montrer vaguement amusant pendant la poignée de minutes qu’il offre.

On pourra d’ailleurs noter que, comme pour un certain Die Hard 2 paru deux ans plus tard, le jeu se sert à peine de sa licence, le héros n’apparaissant que via un portrait mal dessiné en bas de l’interface ou lors d’illustrations dont une le présentant de dos est recyclée à de nombreuses reprises, puisqu’elle servira à la fois en cas de mort d’un civil, d’échec contre le boss ou lors de l’écran final ! Bref, un petit machin mal pensé et agencé n’importe comment, mal reçu à sa sortie (Tilt étant très loin le magazine le plus enthousiaste vis-à-vis du programme en lui accordant un 14/20) et très largement oublié depuis lors, à raison, tout comme le studio qui l’a engendré (quelqu’un serait capable de citer un seul titre vaguement marquant parmi la vingtaine développée par The Edge ? Non, personne ?). Une sortie de route qui nous rappelle également pourquoi les joueurs étaient parfois si méfiants à l’idée d’acheter des jeux au prix fort : les développeurs devraient a priori remercier le piratage, qui est sans doute la seule raison pour laquelle il existe encore une trace de leurs jeux pourris.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 08/20 La seule véritable qualité d'un titre comme The Punisher, c'est de rappeler aux joueurs nostalgiques que nous sommes que l'âge d'or vidéoludique n'était pas exactement fait que de chefs d’œuvre et de logiciels d'exception repoussant à chaque fois un peu plus loin les frontières du rêve et de l'imagination. Petit galery shooter poussif assemblant péniblement dix minutes de gameplay au fil de deux niveaux et demi n'entretenant d'ailleurs à peu près aucun lien avec le comics dont il est tiré, le programme de The Edge aligne à peu près toutes les pires scories du genre (réalisation lamentable, framerate poussif, précision douteuse) tout en cherchant à masquer sa durée de vie pitoyable (moins de dix minutes en ligne droite) derrière l'arbitraire d'un game over déclenché, au choix, par le choix impossible à deviner de la mauvaise arme ou la matérialisation impromptue d'un civil crétin. Bref, le genre de disquette dont on ramassait une copie à la cour de récré avant de l'essayer une seule et unique fois le soir même et de la ranger dans une boîte à chaussure qu'elle ne quitterait plus jamais – sauf pour la formater et y mettre quelque chose de plus intéressant. Et objectivement, c'est à peu près tout ce que ce jeu mérite. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une réalisation franchement minable... – ...qui trouve en plus le moyen de se traîner au point de rendre l'action imprécise – Le mécanisme de l'arme à choisir au pif sous peine de game over : Oscar de l'idée débile – Les civils qui apparaissent de nulle part et qui entraînent un game over instantané si vous les effleurez (et en plus c'est bugué !) – Aucune référence au film, pratiquement aucune au comics

Bonus – Ce à quoi peut ressembler The Punisher sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Ma conclusion : placez la disquette et le comics dans la boîte du jeu, emballez-les avec le poster, scellez le tout à l’aide de l’autocollant et balancez-moi ça à la poubelle en vitesse ! »

Aktueller Software Markt, septembre 1990, 20% (traduit de l’allemand par mes soins)

Version Atari ST

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au risque de tuer un suspense qui s’annonçait déjà moribond, on pouvait sentir dès les premières secondes passées au contact de la version Amiga que The Punisher était un jeu développé en parallèle pour la machine de Commodore et pour l’Atari ST, comme le trahissait l’emploi d’une palette en seize couleurs pas franchement éblouissante. Dès lors, on ne sera pas surpris de découvrir une version ST identique au pixel près à la version Amiga, avec deux petites nuances malgré tout. La première, relativement commune, est à aller chercher du côté de la réalisation sonore : comme souvent, le thème de l’écran-titre rend un peu moins bien ici, mais on ne peut pas dire qu’on sente une énorme différence pour les bruitages une fois en jeu. En revanche, bonne surprise pour le deuxième point : le framerate est un peu meilleur dans cette itération comparé à un Amiga 500 (du moins quand il n’y a pas trop de monde à l’écran), ce qui signifie que la souris est plus réactive et plus précise – et elle en avait vraiment besoin. Des détails qui ne modifient que très marginalement l’expérience de jeu, cependant, toujours atrocement limitée.

NOTE FINALE : 08/20

Copie conforme d’une version Amiga qui a vraisemblablement été développée en parallèle, The Punisher sur Atari ST a au moins le mérite de bénéficier d’un framerate un peu plus réactif que sur Amiga 500 qui rend la jouabilité un tantinet moins catastrophique. À ce détail près et passé la musique de l’écran-titre, on hérite exactement du même jeu.

Les avis de l’époque :

« La réalisation est d’un bon niveau. Les décors sont variés et les bandits offrent divers types d’attaque et sont d’un aspect différent. Les bruitages du programme soutiennent bien l’action. Les tirs ont la précision requise et la souris réagit au plus vite. L’idée des deux armes à fréquence de tir différente ainsi que le choix des parcours apportent un peu d’originalité à ce jeu classique. »

Jacques Harbonn, Tilt n°86, janvier 1991, 14/20

Paradroid 90

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Graftgold Ltd.
Éditeur : Hewson Consultants Ltd.
Titre alternatif : Paradroid 2000 (Acorn 32 bits)
Testé sur : AmigaAtari STAcorn 32 bits
Disponible sur : Antstream

La série Paradroid et ses dérivés (jusqu’à 2000) :

  1. Paradroid (1985)
  2. Quazatron (1986)
  3. Magnetron (1988)
  4. Paradroid 90 (1990)

Version Amiga

Date de sortie : Août 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il en va des licences de jeux vidéo comme des chanteurs sur le retour ayant connu leur dernier succès quinze ans auparavant : à un moment ou à un autre, la tentation de revenir sur le devant de la scène apparait. On aura ainsi souvent eu l’occasion d’assister à la réapparition miraculeuse – et souvent très ponctuelle – de sagas qui avait été rangées dans des cartons des années, et parfois même des décennies auparavant.

Les terminaux vous offriront toujours des informations sur les différents droïdes. Celui-ci est aussi puissant qu’il en a l’air !

Si ces résurrections-surprises offrent parfois une seconde vie à des licences, comme cela aura pu se produire par exemple avec les déclinaisons 3D de Prince of Persia, beaucoup d’autres – qui se souvient par exemple de Battlezone ou de Frogger à la sauce de la fin des années 90 ? – n’auront souvent eu droit qu’à une dernière tournée d’adieux avant de retourner définitivement (?) dans le placard d’où ont les avait tirées. Parmi ces pré-retraités cherchant à capitaliser une dernière fois sur leur gloire passée se sera également trouvé un certain Paradroid, lequel aura tenté, cinq ans après sa parution initiale, de revenir sur Amiga et Atari ST via un titre appelé fort logiquement Paradroid 90 – le chiffre correspondant bien sûr à l’année de la sortie du jeu (car non, il n’y aura pas eu 89 épisodes pour précéder celui-ci, on n’est pas en train de parler de Bomber Man).

Parfois, le game design, c’est de bien cibler ce à quoi il ne faut surtout pas toucher

Mine de rien, ce « 90 » délivre déjà une information plus pertinente qu’elle n’en a l’air : le titre ne s’appelle pas Paradroid 2, et pour cause : on est davantage face à un remake qu’à une suite à proprement parler… ce qui correspondait déjà assez bien à la description des deux précédents opus, lesquels, en dépit de quelques timides écarts, n’auront jamais daigné s’écarter très loin de la formule initiale.

Le mini-jeu de capture n’a pas bougé, et c’est tant mieux

Ici, absolument tous les mécanismes du logiciel de 1985 sont en place, pratiquement à l’identique, et pas question cette fois-ci de s’aventurer dans une vue en 3D isométrique ou dans quoi que ce soit qui puisse « trahir » les sensations originales. En fait, les plus simple serait de commencer par vous référer (si ce n’est déjà fait) au test de Paradroid pour bien comprendre de quoi il est question avant d’aborder le chapitre qui va réellement nous intéresser, à savoir celui des nouveautés. Et celles-ci, pour discrètes et symboliques qu’elles soient, entrainent néanmoins des changements suffisamment perceptibles pour modifier sensiblement l’expérience de jeu sans la révolutionner en rien. Comme souvent, le Diable est dans les détails, et c’est sur ceux-ci qu’il va être temps de se pencher.

Les astronefs sont devenus un peu plus cohérents et un peu plus intéressants à visiter

L’objectif n’a pas évolué d’un iota : il s’agira toujours de « nettoyer » des vaisseaux spatiaux des droïdes qui en ont pris possession à bord de votre unité de reconnaissance, laquelle peut toujours pirater et contrôler les unités ennemies via un mini-jeu qui n’a pas, lui non plus, bougé d’un micropoil – cela tombe bien, il était excellent, et on se souvient que la tentative de Magnetron visant à le remplacer s’était finalement avérée être une mauvaise idée.

les astronefs ennemis sont toujours aussi massifs

Il y a désormais pas moins de cinq vaisseaux à explorer – plus un vaisseau pirate secret devenant accessible lorsque l’on collecte les clefs réparties dans chacun des autres astronefs, à une raison d’une par appareil. Sachant que vaincre un seul de ces bâtiments peut facilement demander 30 à 40 minutes – et sans se rater, car tout est à faire en une seule vie et sans continue – mieux vaudra être extrêmement patient pour espérer arriver au terme de l’expérience. On notera cependant que le menu des options (accessible via la touche F2) vous laissera l’opportunité de commencer directement par le deuxième niveau histoire d’offrir l’occasion aux joueurs occasionnels de voir plus d’un seul décor du jeu.

Mieux vaudra adapter votre stratégie au droïde dont vous avez pris le contrôle

Les décors, justement, auront bénéficié d’un gros travail avec le reste des graphismes du jeu : chaque vaisseau a désormais sa palette de couleur propre, et surtout les différentes salles ne se contentent plus d’être de simples rectangles vides. Il y a du mobiliers, des réacteurs, des astronefs dans les garages, des caisses dans les soutes, et on peut même apercevoir l’espace interstellaire s’étendant autour des bâtiments.

Gagner un niveau se mérite

On remarquera également deux écueils : le premier, au demeurant assez anecdotique, est la disparition du défilement multidirectionnel, remplacé par un défilement purement vertical – une adaptation qu’on devine pensée spécifiquement pour l’Atari ST dont le hardware était assez fâché avec les défilements horizontaux. Très sincèrement, cela ne rend pas les différentes « soutes » moins intéressantes à explorer, et n’a pour ainsi dire aucune incidence sur l’expérience de jeu. Le deuxième, plus gênant, est que les droïdes n’affichent plus leur numéro. Leur puissance est désormais reconnaissable à leur apparence – plus ils sont imposants, plus ils sont forts – mais il faudra quand même compter plusieurs parties avant d’être capable de reconnaître immédiatement une cible viable d’un exercice de capture voué à l’échec, ce qui représente un recul dommageable en termes d’accessibilité. Plus beau mais moins fonctionnel, donc.

Quitte à être aux commandes d’une unité puissante, utilisez-la pour vous débarrasser de ces maudits soldats !

En revanche, la vraie nouveauté sera plutôt à chercher du côté des droïdes en eux-mêmes – ou plutôt, de leur comportement. Loin de se contenter de se balader au hasard en réagissant mollement à votre présence, les unités ennemis ont désormais toute un comportement correspondant à leur rôle : par exemple, les unités d’entretien sont pour ainsi dire inoffensives, tandis que les soldats sont très agressifs et demandent à être approchés avec précaution, même lorsqu’on est aux commandes d’une unité puissante.

Le mécanisme de l’éclairage qui change une fois un étage nettoyé est toujours présent

Votre champ de vision étant bloqué par les portes et les murs, la partie de chat et de souris qui s’engage est d’autant plus nerveuse, et la froide exploration avec les yeux rivés à des numéros du premier épisode s’apparente ici davantage à une véritable mission de reconnaissance où on ne s’engage jamais dans une zone militaire sans avoir planifiée une retraite et une réserve de modèles de secours en cas de problème. Chaque vaisseau possède dorénavant au moins une unité « boss » ne pouvant être capturée par aucune autre et qui nécessitera donc le recours à la force brute quoi qu’il arrive – ce qui veut dire que le jeu peut être joué comme un pur shoot-them-up en profitant intelligemment des différentes stations de recharge disponibles, mais que c’est une nouvelle fois la stratégie qui vous offrira une chance réelle de venir à bout de l’opposition.

Prenez bien garde à ne pas détruire malencontreusement les précieuses stations de recharge…

Au final, on peut comprendre que le titre ait été assez rapidement congédié par une partie de la presse de l’époque, n’y voyant qu’une redite sans inspiration d’un logiciel paru sur la génération précédente cinq ans plus tôt. Pourtant, en dépit de son absence de prise de risque, ce Paradroid 90 est bel et bien un meilleur jeu que ses prédécesseurs, et pas uniquement sur le plan de la réalisation.

…car la clef est souvent de savoir quand et où prendre la fuite pour vous refaire une santé

Non seulement le principe fait toujours mouche, mais le fait d’avoir à adapter sa façon de jouer en fonction de l’opposition sous peine de risquer une fin prématurée vous renvoyant directement à l’écran-titre pour avoir voulu se croire invincible offre un angle assez neuf qui octroie une partie du renouvellement qu’on ne retrouve hélas pas dans le level design, chaque vaisseau s’abordant exactement de la même façon que les autres. Il faudra donc plus que jamais apprendre à mémoriser la position des unités les plus puissantes et surtout de celles, intermédiaires, vous offrant une chance d’aller les capturer, sans parler des indispensables stations de recharge, afin de pouvoir venir à bout en dix minutes d’un vaisseau sur lequel on aura buté pendant des heures. Tout le monde n’y trouvera pas nécessairement son compte, mais il faut reconnaître que le côté stupidement addictif du jeu fonctionne mieux que jamais, et qu’on ne regrette jamais d’y avoir consacré une partie de cinq minutes qui aura finalement duré quatre fois plus longtemps. Un titre qui peut s’avérer répétitif et inutilement punitif, mais qui a le mérite d’être demeuré rafraichissant dans son approche plus de trente ans après sa sortie. Ça vaut quand même la peine de se laisser tenter, non ?

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20 Paradroid 90 est moins une suite au titre d'Andrew Braybrook paru en 1985 qu'un remake, et cela est à verser à son crédit autant qu'en sa défaveur. Les graphismes sont plus travaillés, les robots plus variés, la jouabilité plus nerveuse, mais dans l'ensemble l'expérience demeure extrêmement fidèle à celle qu'on avait connue cinq ans plus tôt – certains choix, comme le fait de ne plus afficher directement le numéro des droïdes, pouvant même être perçus comme un pas en arrière. Si le gameplay mêlant action, réflexion et stratégie à court-terme est toujours aussi efficace – et même sensiblement plus – qu'auparavant, on regrettera surtout que ce nouvel opus n'ait pas daigné intégrer davantage de variété et d'idées neuves, car les mécanismes s'avèrent suffisamment répétitifs pour que l'écrasante majorité des joueurs aie son compte bien avant de venir à bout des cinq vaisseaux du jeu. Sympathique, mais par courtes sessions. CE QUI A MAL VIEILLI : – Très peu de nouveautés depuis la version de 1985 – Pas toujours facile de juger de la puissance d'un robot – Des décors qui auraient gagné à se renouveler un peu plus

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Paradroid 90 sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Graftgold a réussi une excellente conversion de ce grand classique du C 64. Le jeu n’a rien perdu de son intérêt, car son concept reste très original. Les transferts apportent beaucoup de profondeur à l’action, même s’il est parfois très frustrant de manquer son coup. La réalisation est soignée, mais les décors ne sont pas assez variés et le scrolling vertical est inférieur au scrolling multidirectionnel de la version C 64. En revanche, cette nouvelle version est nettement meilleure en ce qui concerne les tactiques des différents droids (sic). »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 15/20

Version Atari ST

Développeur : Graftgold Ltd.
Éditeur : Hewson Consultants Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Optimisé graphiquement pour les modèles de la gamme STe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Comme ses prédécesseurs, Paradroid 90 n’aura pas exactement croulé sous le nombre des portages (une version PC Engine aura été développée, mais le dépôt de bilan d’Hewson Consultants lui aura empêché d’être terminée et commercialisée). Plusieurs indices laissent à penser que cette version ST aura été pensée parallèlement à la version Amiga – l’absence de défilement horizontal, gros point faible de la machine d’Atari, n’étant pas le moindre – et le résultat est qu’on se retrouve face à une version extrêmement proche de celle parue sur la machine de Commodore. Graphiquement, bon courage pour voir la différence entre les deux versions (même sans les optimisations du STe), en-dehors du fait que le titre ait été déplacé vers le haut de l’écran où une mini-barre d’interface a fait son apparition (mais la résolution étant légèrement plus élevée, la fenêtre de jeu n’a pas rétréci d’un pixel) et même la musique s’en sort très bien. Sachant que la jouabilité n’a pas changé d’un poil, on hérite d’un portage largement à la hauteur de son modèle, et les ataristes de l’époque n’ont pas eu de raison de se sentir lésés.

Graphiquement parlant, difficile de dire qu’on a perdu au change

NOTE FINALE : 16/20

Aucune coupe, aucune modification pour cette très bonne version Atari ST de Paradroid 90, où seule la musique a un peu souffert du portage – et encore. Aucune raison de bouder ce portage pour les possesseurs de la machine d’Atari

Version Acorn 32 bits
Paradroid 2000

Développeur : Coin-Age Ltd.
Éditeur : Coin-Age Ltd.
Date de sortie : 1993
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur A3000
Configuration minimale :

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En dépit des soucis d’Hewson Consultants, Paradroid 90 aura bel et bien fini par être porté sur un autre système – sans doute pas le plus porteur de tous, mais bon. Devenu pour l’occasion Paradroid 2000, sans doute pour camoufler les trois années écoulées depuis la sortie de la version originale, ce portage n’aura pour une fois pas été l’œuvre de Krisalis Software, pourtant responsable de facilement 95% de la ludothèque de la machine. Pour le coup, il y a bien quelques nuances graphiques dans les teintes adoptées et dans la résolution choisie (320×256 contre 320×192 pour la version Amiga), mais le résultat est au moins équivalent, si ce n’est supérieur, à celui de la machine de Commodore. Autre bonne nouvelle : la musique fait elle aussi largement aussi bien, et la jouabilité en elle-même n’ayant pas bougé d’un poil, on tient là un nouvel ajout de choix à la ludothèque d’une machine décidément surprenante.

Les couleurs sont un peu différentes, mais ça marche toujours aussi bien

NOTE FINALE : 16/20

Aucune fausse note pour cette version Archimedes de Paradroid 90 – devenue Paradroid 2000 – qui fait tout au moins aussi bien que la version Amiga, en offrant même des graphismes un peu plus fins. Si vous faites partie des rares (et heureux ?) propriétaires de la gamme d’ordinateurs d’Acorn, vous pouvez foncer.

Puzzled (SNK Corporation)

Cette image provient du site https://flyers.arcade-museum.com/

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK Corporation
Titre original : Joy Joy Kid (japon)
Titre alternatif : ACA NEO GEO PUZZLED (collection Arcade Archives)
Testé sur : Neo Geo (MVS/AES)Neo Geo CD
Disponible sur : Android, iPad, iPhone, PlayStation 4, Switch, Windows Apps, Xbox One, Xbox Series X/S
En vente sur : App Store (ipad, iPhone), Microsoft.com (Windows), Nintendo eShop (Switch), PlayStation Store (PlayStation 4), Xbox.com (Xbox One, Xbox Series)

Version Neo Geo (MVS/AES)

Date de sortie : 20 novembre 1990 (version MVS) – 1er juillet 1991 (version AES)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Un stick (huit directions) et quatre boutons (deux en usage)
Versions testées : Versions MVS et AES internationales
Hardware : Neo Geo MVS/AES
Processeurs : Motorola MC68000 12MHz, Zilog Z80 4MHz
Son : 2 hauts-parleurs – YM2610 OPNB 8MHz – 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 59,185606 Hz (résolution effective : 304×224)
Carte mémoire supportée

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Avant de devenir une sorte de symbole absolu des jeux de baston qui en jettent pendant la quasi-totalité des années 90 (et même au-delà), la Neo Geo aura commencé par se chercher un peu pendant ses premières années – au hasard, au moins jusqu’à ce que la sortie d’un certain Street Fighter II ne vienne indirectement donner le cap de ce qu’allaient très majoritairement héberger les salles d’arcade de la période.

Car le truc, justement, c’est que la Neo Geo était une borne d’arcade, et que les salles d’arcade – et les salles d’arcade japonaises en particulier – tendaient à accueillir énormément de types de jeux au-delà des shoot-them-up et des beat-them-all qui triomphaient alors. Ce qui explique que la première année d’exploitation de la console/borne de SNK ait laissé une place qui apparait rétrospectivement un peu hors de propos à des jeux de quiz, de mah-jong et autres puzzle games dont la réalisation colorée mais n’en envoyant pas exactement plein les yeux et les oreilles justifiait difficilement d’aller investir la somme que coûtait la machine (les jeux, eux, n’étant disponibles qu’à la location jusqu’en juillet 1991). C’est ainsi que, bien avant de faire la queue pour s’essayer à Metal Slug ou à King of Fighters, les joueurs pouvaient découvrir des titres ne payant pas de mine à la Puzzled sur une machine qui n’avait pas encore arrêté une direction claire pour l’avenir quant à la nature de sa ludothèque.

Puzzled (ou Joy Joy Land au japon) est un puzzle game – genre qui ne courait pas encore les rues en 1991 où le maître absolu et indiscutable de la discipline, l’initiateur et l’inspirateur de tout ce qui aura suivi, restait indiscutablement Tetris. Cela se ressent d’ailleurs immédiatement dans l’approche de Puzzled, qui peut verser ouvertement et sans se cacher dans le camp du clone de Tetris : Le mécanisme fondamental consistant à assembler des tétraminos pour former des lignes et les faire disparaître est ici repris exactement à l’identique, au point d’ailleurs de ne même pas s’embarrasser à modifier la forme des pièces.

La nuance (car il y en a quand même une), c’est la présence du petit ballon dirigeable piloté par un garçon ou une fille (le scénario mettant en scène un monde où les deux sexes auront longtemps été ennemis), et dont l’objectif sera à chaque fois d’atteindre le haut de l’écran. Associez les deux idées, et vous obtiendrez donc un titre où l’idée sera de faire disparaître les blocs retenant le ballon prisonnier pour lui permettre de grimper jusqu’au prochain étage (et donc au prochain niveau) sans vous laisser déborder par les tétraminos, lesquels tomberont bien sûr de plus en plus vite. En résumé : ce qui composerait aujourd’hui un simple mode de jeu de la milliardième variante de Tetris – mais justement, à l’époque, des variantes, il n’y en avait pas encore beaucoup, et Puzzled aura au moins pour lui d’avoir apporté une bribe d’idée neuve à un genre qui n’en offrait pas encore beaucoup.

Il y a donc a priori matière à s’amuser – même s’il faudra également composer avec l’idée que ce mode de jeu consistant à libérer le ballon est également le seul de la cartouche. Si seul, en fait, que même le mode deux joueurs se limite en fait… à jouer en solo chacun de son côté, les interactions entre les deux participants étant rigoureusement nulles !

En fait, le seul mécanisme ne consistant pas directement à assembler des tétraminos (et qui fera regretter, au passage, que la jouabilité n’ait même pas eu l’idée de consacrer deux boutons au fait de tourner les pièces pour nous laisser décider dans quel sens se fait la rotation) se limitera à l’utilisation d’une bombe par votre dirigeable, laquelle affaiblira ou détruira les blocs l’entourant, à condition d’avoir au préalable rempli une jauge… en faisant disparaître des lignes, vous l’aurez deviné. Tous les niveaux du jeu sont donc remplis d’éléments déjà présents, de diverses natures (certains nécessiteront plusieurs lignes pour être détruit, d’autre créeront de nouveaux blocs au fil du temps, il y a des ennemis mobiles, etc.) qu’il faudra parvenir à faire disparaître avant d’être débordé. Une idée qui en vaut bien une autre, et avec un potentiel si évident qu’on en retrouvera d’ailleurs des variantes dans plusieurs des jeux rattachés à la célèbre saga, au hasard dans Tetris Plus où il s’agira cette fois d’aider des archéologues à grimper jusqu’au sommet.

Sur le papier, l’idée est bonne. Une fois le joystick en mains, elle le reste… oh, pour trois bonnes minutes. Le truc, c’est que Puzzled est une borne d’arcade – et qu’une borne d’arcade, c’est fait pour vous faire cracher des pièces en vitesse. Traduit en clair, cela signifie que la difficulté monte en flèche, et que vous allez pouvoir commencer à vous arracher les cheveux dès le troisième ou quatrième niveau tant la disposition des blocs va rapidement vous conduire à la constitution de grandes « cheminées » verticales où votre seul salut proviendra de l’arrivée des fameux tétraminos rectilignes, lesquels tendent à n’arriver qu’aux pires moments.

La chance jouera d’ailleurs un grand rôle ici, car l’ordre d’arrivée des pièces est entièrement aléatoire, et si certains casses-têtes peuvent être résolus en quelques mouvement pour peu que vous disposiez des bonnes pièces, il faudra souvent batailler ferme avec ce que le jeu met à notre disposition – c’est à dire fréquemment le pire. Cela n’a l’air de rien dit comme cela, mais c’est un peu comme ne pouvoir lancer une partie de Tetris que dans le pire mode de difficulté quel que soit votre niveau ou votre patience : le jeu se révèle très frustrant et très exigeant très vite, et comme il n’y a absolument aucune forme de respiration à espérer – même pas via le mode deux joueurs, comme on l’a vu – autant dire que seuls les mordus les plus fanatiques du titre d’Aleksei Pajitnov trouveront leur compte (et un défi à leur mesure) sans avoir envie de se taper la tête contre les murs au bout de cinq minutes. Le joueur lambda, lui, s’amusera à (très) petites doses avant d’être rapidement tenté de passer à autre chose, quant à celui qui n’a jamais spécialement apprécié Tetris, il devrait trouver ici à peu près le best of de tout ce qu’il déteste !

Bref, et comme souvent, Puzzled est une borne d’arcade qui souffre d’être une borne d’arcade, et dont le potentiel sympathique est rapidement éclipsé par une difficulté éreintante et un manque total de renouvellement.

En y ajoutant une réalisation sans éclat (un peu de variété dans les décors n’aurait pas fait de mal, plutôt que d’imposer de la pierre grise jusqu’à la nausée), une musique sans relief et un temps de jeu à rallonge (bon courage pour voir la fin, d’autant que celle-ci exigera que vous ayez fini le jeu AVEC LES DEUX PERSONNAGES pour être visionnée !), autant dire qu’on se retrouve face à un logiciel qui aurait pu être une expérience solide, mais qui n’est rien d’autre qu’un mode de jeu comme on en trouverait des dizaines quelques années plus tard, avec le curseur de difficulté bloqué sur « maximum ». Pas étonnant, donc, que la cartouche ait plus ou moins sombré dans l’oublie, et qu’il soit difficile encore aujourd’hui de la recommander à quiconque tant il existe d’innombrables clones pour proposer mieux à tous les niveaux. Une curiosité à l’échelle de la ludothèque de la Neo Geo, mais pas grand chose de plus.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13/20 On ne va pas se mentir : Puzzled peut bien se donner le nom qu'il veut, il n'est vraiment rien de plus qu'une variante de Tetris d'ailleurs appelée à refaire son apparition sous la forme d'un mode de jeu dédié dans plusieurs des épisodes de la très prolifique saga officielle. Sa principale faiblesse est d'ailleurs de se limiter à cela : le principe a beau être prenant, la difficulté monte beaucoup trop vite pour avoir une chance de retenir les joueurs occasionnels (et même les autres), et la réalisation comme les stratégies manquant singulièrement de variété, les mordus de Tetris auront probablement des dizaines, sinon des centaines de titres du même genre à explorer avant de laisser une chance à celui-ci. Bref, un clone intéressant sur le papier, mais vraiment trop frustrant pour pouvoir captiver autre chose que les plus masochistes des fans de puzzle game. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une difficulté qui grimpe extrêmement vite... – ...à cause de niveaux globalement mal pensés au design frustrant... – ...oh, et puis tant qu'à faire, il faut finir le jeu deux fois pour avoir le droit à l'écran de fin – Pourquoi n'employer qu'un seul bouton pour faire pivoter les pièces ? – Un mode deux joueurs totalement sans intérêt – Une réalisation qui n'exploite pas vraiment la Neo Geo

Les avis de l’époque :

« Complexe mais prenant. »

Banana San, Tilt n°90, mai 1991, 14/20

Version Neo Geo CD

Développeur : SNK Corporation
Éditeur : SNK Corporation
Date de sortie : 9 septembre 1994 (Japon) – 1994 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : CD-ROM
Contrôleurs : Joypad, joystick
Version testée : Version internationale
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Les lecteurs commençant à connaître le principe de la Neo Geo CD (hardware équivalent proposé sur un support différent) ne s’attendront probablement pas à un déluge de nouveautés en lançant un jeu comme Puzzled sur la console de SNK. De fait, on ne va pas se mentir : on est bel et bien face à la retranscription pixel perfect de la version AES du jeu, ce qui signifie qu’on récupère pour l’occasion la (très courte) introduction présentant le scénario du jeu qui ne s’affichait pas en mode MVS. Pour le reste, inutile d’espérer un menu des options, un choix du niveau ou des réglages de la difficulté : ce sera le jeu tel qu’on l’a connu sur la borne et rien d’autre.

NOTE FINALE : 13/20

Comme très souvent, Puzzled sur Neo Geo CD n’est rien d’autre que la version AES du jeu gravée à l’identique sur un CD-ROM pour être vendue à un prix (un peu plus) décent quatre ans après sa sortie.

Mystical

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Testé sur : AmigaAmstrad CPCAtari STPC (DOS)MSXZX Spectrum
Disponible sur : Antstream, Windows

Version Amiga

Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En parcourant l’histoire vidéoludique en diagonale, quelque part au-dessus de la fin des années 80 et du début des années 90, on pourrait en concevoir le sentiment que la production française était alors animée d’une certaine magie.

Ah, l’époque des protections de copie…

De Captain Blood à Another World, d’Alone in the Dark à Dune, la fameuse « french touch » semblait dotée d’une sorte de capacité irrationnelle à développer des OVNI ne ressemblant à rien d’autre et mettant dans le mille du premier coup, quitte parfois à amorcer une forme de révolution dans le fond ou dans la forme, voire d’initier un nouveau genre. Ceci dit, il serait intéressant de considérer tout ce qu’implique le terme « magie », à savoir qu’on parle par définition de quelque chose d’exceptionnel, d’irrationnel, et donc de rare. Ce qui signifie que ces titres, pour légendaires qu’ils soient, ne représentent qu’une infime portion de la scène française de l’époque au milieu d’une nuée de logiciels nettement plus « dans le rang », avec du bon, du moins bon et du nettement moins bon. À tel point, en fait, que les jeux français commençaient même à acquérir une réputation déjà nettement moins flatteuse : celle de logiciels réalisés par des artistes très doués mais n’ayant aucune attention particulière pour la jouabilité ou le game design – des coquilles vides, en substance.

Tiens, puisqu’on en parle, prenons l’exemple de Mystical.

Le plaisir de jeu ? Youhou, le plaisir de jeu ?

Mystical, c’est un jeu d’Infogrames – une de ces sociétés dont on a appris à se moquer du succès avec une certaine acidité, des Youtubeurs comme Le joueur du grenier en ayant même fait un des symboles des entreprises vénales produisant à la chaîne des jeux pourris, ce qui est bien évidemment (volontairement) très caricatural. En fait, en 1990, Infogrames était plutôt à classer dans la catégorie des fiertés françaises, des compagnies qui parvenaient à exister dans un monde vidéoludique largement dominé par les États-Unis et le Japon (et beaucoup par les anglais, aussi), une de celles dont on regardait les projets dans les rubriques de preview avec curiosité et même, disons-le, avec impatience.

Les environnements sont tous des grands couloirs uniformes

Il faut reconnaître que, quoi qu’on en dise, il n’y avait pas exactement que des manches, chez Infogrames : au générique de Mystical, on trouve par exemple Jocelyn Valais aux graphismes, un nom qui évoquera immédiatement des souvenirs émus aux joueurs ayant connu leurs premiers émois d’adolescent sur Teenage Queen, accompagné, entre autres, d’un certain Stéphane Picq – qu’on ne présente plus depuis Dune – à la musique. En regardant les premières images du jeu, il y avait de quoi avoir l’eau à la bouche : une patte artistique avec sa propre identité, des sprites énormes, ça annonçait du lourd, comme on dit vulgairement. Pour ne rien gâcher, quand on pensait « shoot-them-up à défilement vertical » (on ne parlait pas encore de run-and-gun à l’époque), contrôler un magicien à pied plutôt qu’un vaisseau spatial avait également un caractère original. Bref, on se dirigeait sereinement vers un logiciel qui avait à peu près tout pour tirer son épingle du jeu.

C’est là que le « génie » français entre en scène. Car Mystical n’aurait donc pu être qu’un shoot-them-up lambda avec un coup de peinture bourré de charme, et même si on aurait pu le critiquer avec le recul pour un rythme assez poussif, des ennemis répétitifs aux patterns très limités (ils se dirigent vers le bas de l’écran en tirant et rien d’autre) et des décors qui s’avèrent à la fois un peu vide et pas assez variés (on a souvent affaire à des color swaps des mêmes éléments), on l’aurait sans doute observé avec une certaine nostalgie si le jeu n’avait pas fait un flop à l’époque, boudé par la critique, en raison d’une série de mauvaises idées qui peuvent toutes être regroupées sous le terme « game design ». Ou comment parvenir à bousiller un programme dont l’objectif est normalement limpide : tirer sur les ennemis. Seulement voilà, parfois, on aime bien renverser la table et tenter des trucs différents. Et fatalement, on peut être amené à se retrouver avec une table renversée, de la vaisselle cassée, et un proprio très en colère qui nous tend un balai en nous désignant la porte. Le principal problème de Mystical, au fond, eh bien c’est sa magie.

Tant qu’à faire, autant manœuvrer un personnage énorme dans une fenêtre de jeu rabotée par une interface envahissante

Dès les premiers instant du jeu, le joueur constatera ainsi une étrange incongruité : notre héros (un magicien parti récupérer je-ne-sais-quoi parce que tout le monde s’en fout) ne peut pas faire feu. Pas immédiatement, en tous cas : il devra commencer par ramasser une potion ou un parchemin, lesquels contiendront un des 32 sortilèges du jeu, avant d’en faire usage. Bon, jusqu’ici, ce n’est pas encore spécialement contraignant, et avec autant de pouvoirs différents, on imagine même des possibilités réjouissantes. C’est donc là qu’arrive la deuxième mauvaise idée : vos pouvoirs sont limités dans le temps. Buvez une potion, lisez un parchemin (ce qui au passage immobilise votre personnage pendant une demi-seconde à chaque fois, durée pendant laquelle il est donc totalement vulnérable), et vous pourrez faire usage de son pouvoir… oh, pendant une bonne vingtaine de secondes, si vous avez de la chance.

Pour terminer un niveau, vous devrez rester immobile sur ce pentacle pendant que les ennemis vous assaillent

C’est à dire que ce n’est même pas la peine de chercher à économiser vos tirs : vous devrez juste trouver un autre pouvoir une fois l’actuel épuisé, faute de quoi vous en serez réduit à passer de longues secondes à éviter les adversaires sans pouvoir vous défendre jusqu’à ramasser le prochain sortilège. Débarque alors une idée un peu plus intéressante, mais affreusement mal exploitée : la possibilité de stocker des sortilèges dans un des dix emplacements visibles en haut de l’interface. Sur le papier, c’est plutôt intelligent : pour éviter de vous retrouver sans défense, vous pouvez accumuler les sortilèges pour dégainer le plus adapté au bon moment, au hasard lors d’un boss, et ainsi composer intelligemment avec votre vaste arsenal. Problème : stocker un pouvoir vous demande d’aller appuyer sur la barre d’espace dans la seconde suivant le moment où vous l’aurez ramassé, faute de quoi il sera employé tout de suite en remplaçant celui que vous étiez en train d’utiliser. C’est déjà maladroit (pourquoi ne pas stocker les pouvoirs automatiquement ?), mais passer d’un pouvoir à l’autre demandant de repasser par la barre d’espace avant d’en choisir un avec la touche entrée, je vous laisse deviner combien de temps prend le fait de passer en revue tous vos sortilèges dans le feu de l’action, d’en choisir un et de regarder votre personnage boire sa potion ou lire son parchemin avant d’avoir le droit d’en faire usage !

Évidemment, avant d’utiliser un sortilège, il faut prendre le temps de le lancer. Ça aurait été dommage, sinon.

Le vrai problème, c’est que la moitié des pouvoirs du jeu sont des sorts défensifs ou ponctuels ne vous offrant simplement aucune arme pour disposer de l’opposition. On passe donc la grande majorité de la partie à zigzaguer entre les ennemis avec une main sur le clavier à chercher un pouvoir approprié avant de profiter, dans le meilleur des cas, d’un tir anémique pendant quinze secondes avant de recommencer le même cirque ad vitam æternam. Réussir à proposer un système aussi contraignant et aussi peu ergonomique dans un jeu de tir, c’est quand même déjà gratiné ! Mais cette usine à gaz sert surtout d’écran de fumée pour dissimuler le véritable écueil du jeu : l’absence de jeu, justement.

Aucun renouvellement, aucune variété, rien

Comme on l’a vu, la seule opposition est une poignée d’adversaires faisant tous la même chose, c’est à dire pratiquement rien, dans des décors qui se ressemblent tous et où il n’y a strictement rien à voir, au milieu d’une action molle et répétitive ou on serait de toute façon assommé par l’ennui si on n’était pas réduit à passer 90% du temps de jeu à lutter pour avoir le droit de tirer ! Ah, et j’oubliais le mode deux joueurs où le deuxième larron peut manipuler un golem qui saute partout et revenir constamment à la vie, héritant ainsi de tout le travail en première ligne pendant que le joueur un reste caché dans le fond… Oh, et n’espérez même pas un écran de fin : le jeu reprend du début sans même vous prévenir. Constat accablant : ah, certes, les personnages sont jolis, la musique a de la gueule, l’interface a la classe, sauf que d’un point de vue ludique, c’est le néant absolu. C’est typiquement le genre de jeu qui offrait de superbes captures d’écran dans les magazines mais qui faisait difficilement illusion plus de quelques minutes une fois le joystick en main – on constatera d’ailleurs que les rares magazines à lui tresser des louanges pour sa réalisation confessaient tous le même point faible : l’absence de gameplay. Mystical, c’est un shoot-them-up de 1982 ou 1983 avec une réalisation de 1990 et une ergonomie venue des enfers. Bref, rien d’étonnant à ce qu’il ait glissé dans l’oubli avec des titres à la Magician, d’ailleurs sorti au même moment : la « magie » française avait ses ratés, elle aussi.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 08,5/20 Mystical, c'est un peu la matérialisation de cette réputation poisseuse qui collait à une partie de la production française du début des années 90 : celle d'être un rassemblement d'artistes et de codeurs compétents sans la plus infime notion de game design – et qui ne jouaient vraisemblablement jamais à leurs propres jeux. Qui d'autre aurait pu avoir cette idée fabuleuse d'un run-and-gun à défilement vertical où on passe la moitié de la partie à ne même pas avoir le droit de tirer ? À faire avancer notre personnage énorme dans des décors vides et sans intérêt où on passe plus de temps à se battre avec une interface absurde qu'à réussir à faire feu, une constatation s'impose : parvenir à réaliser un jeu de tir aussi opaque, aussi répétitif, aussi peu maniable et surtout aussi chiant (disons les choses) demandait quand même une forme de génie. Mais si jamais vous vous demandez pourquoi Infogrames est un nom dont on aime encore se moquer trente ans plus tard, inutile de chercher plus loin que des perles comme Fantasia ou ce Mystical – des jeux qui auraient pu être bons, et qui ne le sont pas. À fuir. CE QUI A MAL VIEILLI : – Des décors vides où il n'y a jamais rien à voir – Des ennemis aux patterns extraordinairement limités – Un système d'upgrade qui se veut technique mais qui ne l'est pas – Un personnage au masque de collision énorme – Une musique qui ne dépasse pas l'écran-titre – Un mode deux joueurs pas plus équilibré que le mode solo – Il n'y a même pas de fin : on repart juste du début...

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Mystical sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Mystical se laisse jouer avec plaisir le temps de quelques parties, toutefois le jeu manque trop de profondeur pour tenir la distance, d’autant plus que l’action est particulièrement répétitive. Décevant !

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 11/20

Version Amstrad CPC

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – l’écran-titre du jeu :

À en juger par le nombre de portages et le budget publicité dont aura bénéficié le jeu, Infogrames croyait visiblement beaucoup en Mystical. Comme on peut s’y attendre, les différents portages d’un jeu raté ne deviennent pas miraculeusement des bons jeux, mais au moins peuvent-ils postuler à être de bons portages. C’est d’ailleurs un assez bon résumé de la façon dont on pourrait définir cette version CPC : techniquement parlant, difficile de faire un reproche, même s’il est un peu regrettable que toute la partie se fasse dans un silence de mort une fois l’écran-titre passé : il n’y a tout simplement pas de bruitages. En revanche, graphiquement, on est à des kilomètres des ignobles « Speccy ports » dont les équipes britanniques s’étaient fait une spécialité, et la jouabilité est exactement équivalente à ce qui avait pu être observé sur Amiga. Bref, un portage qui aurait été tout-à-fait enthousiasmant si le jeu était bon, mais on peut comprendre que les joueurs CPC de l’époque aient eu envie d’être plus patients que la moyenne pour laisser une chance au logiciel.

Les décors font toujours aussi vide, mais c’est très coloré, ça bouge bien et les commandes répondent quand on le leur demande

NOTE FINALE : 08/20

Mystical sur Amstrad CPC est un excellent portage d’un mauvais jeu. On pourra une nouvelle fois se lamenter des multiples choix malheureux dans le game design d’un titre qui aurait facilement pu être beaucoup plus amusant, mais sur le plan technique comme sur celui de la fidélité au programme original, l’équipe de développement ne s’est pas moquée du monde.

Version Atari ST

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Les studios français développant plus souvent sur Atari ST que sur Amiga, on ne peut pas dire qu’on lance ce portage de Mystical avec une appréhension particulière – où du moins, pas plus que pour la version originale. Et on a d’ailleurs raison : comme souvent, ce portage est à 99% identique à la version Amiga. Le thème musical de Stéphane Picq, présenté dans une version numérisé, crache un peu plus, mais c’est à peu près la seule différence qu’on puisse établir entre les deux versions. Pour le reste, on se retrouve toujours avec un jeu mal pensé, frustrant et ultra-répétitif, mais correctement réalisé. Sans doute ce qu’on pouvait espérer de mieux, à ce stade.

Yep, c’est tout pareil

NOTE FINALE : 08,5/20

Inutile de revenir sur les nombreuses faiblesses de Mystical en tant que run-and-gun ; le fait est qu’en tant que portage, cette version Atari ST fait parfaitement le travail qu’on pouvait attendre d’elle. On se retrouve donc avec un clone presque parfait de la version Amiga, avec ses qualités comme avec ses défauts.

Version PC (DOS)

Développeur : Infogrames Europe SA
Éditeur : Infogrames Europe SA
Date de sortie : Décembre 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Fin 1990, le PC commençait doucement à se transformer en une machine de jeu tout-à-fait crédible, notamment grâce à la démocratisation en cours du VGA et des cartes sonores. Naturellement, l’Europe ayant toujours eu un train de retard concernant le PC, on ne sera qu’à moitié surpris de voir Infogrames proposer benoitement un portage de Mystical en EGA sans même s’embarrasser à offrir un mode VGA reprenant exactement les teintes des version ST et Amiga – ce qui n’aurait sans doute pas demandé un travail énorme, surtout avec des machines employant une résolution identique. Voyons malgré tout le bon côté des choses : au moins le logiciel reconnait-il l’AdLib, pour un rendu du thème musical pas franchement à la hauteur de la version originale (ce n’est pas Stéphane Picq qui s’est occupé de la conversion du thème, il me l’aura confirmé lui-même), et même si la palette de couleur de l’EGA est toujours aussi criarde, le résultat est objectivement loin d’être mauvais. S’il est impossible de configurer les touches du clavier, celles-ci sont heureusement bien choisies (les flèches), et le deuxième joueur peut utiliser la souris – attendez-vous en revanche à devoir régler la vitesse vous-même sous DOSBox, le jeu n’étant pas ralenti. Bref, une machine encore une fois sous-exploitée, mais un portage qui reste cohérent et relativement solide.

Bon, dommage que ce soit de l’EGA, mais ça aurait pu être nettement plus moche

NOTE FINALE : 08/20

On pourra vraiment grincer des dents face au fait qu’Infogrames ne soit toujours pas décidé à exploiter le VGA fin 1990, mais pour le reste ce portage de Mystical fait le travail, avec une réalisation très propre et une jouabilité préservée. Mais bon, c’est en posant les yeux sur ce genre de jeu qu’on comprend mieux pourquoi les joueurs de l’époque préféraient lancer Crime Wave.

Version MSX

Développeur : New Frontier
Éditeur : Erbe Software, S.A. (Espagne)
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette testée sur MSX 2+
Configuration minimale : Système : MSX 1 – RAM : 256ko
Possibilité de configurer les touches du clavier

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Voir Mystical apparaître sur MSX est déjà un peu plus surprenant, les équipes de développement françaises n’étant pas spécialement friandes d’une machine qui n’aura d’ailleurs jamais connu un grand succès en Europe. Il semblerait d’ailleurs que ce portage n’ait été commercialisé qu’en Espagne – seul pays européen où l’ordinateur de Microsoft était vraiment populaire – mais je n’ai pas de sources irréfutables à ce sujet. Toujours est-il qu’on trouve l’essentiel, avec tout le contenu du jeu original inclus, mode deux joueurs compris. La bonne surprise provient de la musique, très bien rendue, que ce soit par le processeur sonore de la machine ou via une interface MIDI. En jeu, en revanche, c’est toujours le calme plat, et la fenêtre de jeu est totalement monochrome en-dehors de l’interface – bref, du bon vieux « Speccy port » sans même s’embarrasser à changer la palette. À noter que je ne serais parvenu à lancer le jeu avec l’image qu’en insérant une extension de RAM dans le port cartouche, les 64ko de base semblant insuffisants, mais je n’ai rien trouvé sur la boîte ni dans le manuel du jeu à ce sujet. À ce détail près, le tout tourne relativement bien, on a donc affaire à un portage honnête à défaut d’être ébouriffant, et à part curiosité vis-à-vis du thème musical, on ne conseillera à personne de découvrir ce jeu sur cette machine. Ni de découvrir ce jeu tout court, d’ailleurs.

Même dans les pays européens où le MSX était populaire, on ne se foulait visiblement pas avec les portages

NOTE FINALE : 07,5/20

Autre cas d’école d’un portage très correct d’un mauvais jeu, on laissera ce Mystical se faire oublier sans trop de regrets, même si le rendu du thème musical est très sympathique dans cette version.

Version ZX Spectrum

Développeur : New Frontier
Éditeur : Erbe Software, S.A. (Espagne)
Date de sortie : Août 1991
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue :
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko*
Possibilité de configurer les touches du clavier
*Existe en version optimisée pour les modèles à 128ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Pour la version ZX Spectrum de Mystical, on retrouve exactement la même équipe que pour la version MSX, à destination du même marché (là encore, le jeu semble n’avoir été commercialisé qu’en Espagne, mais l’information reste à prendre avec des pincettes, d’autant plus qu’il a été testé dans des magazines anglo-saxons). Du coup, autant mettre fin immédiatement au suspense : oui, c’est exactement le même jeu que sur MSX, ce qui veut dire qu’on retrouve la fenêtre de jeu monochrome mais aussi le mode deux joueurs et le très sympathique thème musical (à condition d’avoir 128ko de RAM). Encore une fois, ça n’a rien de terriblement honteux en tant que portage, mais déjà davantage en tant que jeu. À réserver aux curieux à la recherche désespérée d’un run-and-gun vertical jouable à deux sur la machine de Sinclair.

Ça ferait presque illusion, mais on ne peut pas dire qu’on s’amuse beaucoup

NOTE FINALE : 07,5/20

Comme on pouvait s’y attendre, Mystical livre sur ZX Spectrum exactement la même performance que sur MSX : celle du portage correct d’un run-and-gun très médiocre mais qui a au moins le mérite d’être jouable à deux.

Les avis de l’époque :

« Un shoot-them-up avec une réalisation à tomber, mais avec pas suffisamment de gameplay. »

Andy, Your Sinclair n°68, août 1991, 74% (traduit de l’anglais par mes soins)

Night Shift : Industrial Might & Logic

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Attention to Detail Limited
Éditeurs : Lucafilm Games LLC (Amérique du Nord) – U.S. Gold Ltd. (Europe)
Titres alternatifs : Night Shift (titre usuel), Mr. Fixit (titre de travail)
Testé sur : PC (DOS)AmigaAtari STCommodore 64Amstrad CPCZX Spectrum

Version PC (DOS)

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – RAM : 512ko*
Modes graphiques supportés : EGA, MCGA, Tandy/PCjr, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne, Game Blaster (CMS), Sound Blaster, Tandy/PCjr
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
*640ko requis pour les modes MCGA et Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Dès l’instant où l’on mentionne le nom de Lucasfilm Games, la première chose qui vienne à l’esprit est le développeur de l’âge d’or du point-and-click – âge d’or dont il peut d’ailleurs assez largement revendiquer la paternité – et des premiers vrais jeux marquants à être estampillés STAR WARS ou Indiana Jones, avec de véritables chef d’œuvre dont certains peuvent encore être considérés comme indépassables.

Retenez bien les objectifs de production – et oui, la couleur compte

On peut aussi se rappeler de quelques écarts surprenants mais souvent réjouissants, dans le domaine du jeu de sport (Ballblazer), de l’action avant-gardiste (Rescue on Fractalus!) ou même du run-and-gun sur console (Metal Warriors, Zombies). Ce à quoi on pense moins, cependant, est tout simplement Lucasfilm Games, l’éditeur. Ce qui n’est pas fondamentalement surprenant, le studio éditant quasi-exclusivement ses propres jeux… même si au moins deux exceptions peuvent être faites à l’échelle du XXe siècle. La première se nomme Pipe Mania!!, et vu le succès rencontré par le très sympathique jeu de réflexion, on peut comprendre que la compagnie de George Lucas ait eu envie de renouveler l’expérience. La deuxième (et à ma connaissance dernière) aura correspondu à un titre assez surprenant d’une équipe pas très connue nommée Attention to Detail : Night Shift. Un logiciel qui aspirait sans doute à la même renommée que Pipe Mania!!, mais qui aura fait un bide en dépit de critiques élogieuses – qui sait, peut-être même est-il la raison pour laquelle Lucasfilm Games aura décidé d’en rester à la distribution de ses propres licences.

Night Shift, où ce jeu qui aurait pu

Le point de départ annonce en tous cas une originalité certaine : vous n’incarnerez pas ici un chevalier à la recherche de sa princesse ni même un pilote de la Rébellion, mais bien… un ouvrier. Ah, déjà, ça change.

Votre score dépendra de votre production, et les éléments défaillants vous feront perdre des points

Celui-ci, qui peut être un homme comme une femme – tous deux membre de la famille Fixit, à en juger par leur nom – va devoir s’en aller pointer à l’usine sous les ordres d’un contremaître obsédé par sa productivité pour faire marcher et entretenir une gigantesque chaîne de production de six écrans de haut poétiquement baptisée BEAST (pour Bingham’s Environmentally Active Solution for Toys), au bénéfice d’une compagnie baptisée Inustrial Might & Logic (référence évidente à la société d’effets spéciaux de George Lucas, et ce ne sera pas la seule). L’objectif est on-ne-peut-plus pragmatique : produire un nombre donné de jouets dans le temps imparti, faute de quoi ce sera le licenciement sec sans préavis ni indemnité (traduit en clair : une seule vie). Une tâche a priori facile sur le papier, sauf que maîtriser le fonctionnement de la monstrueuse machine ne sera qu’un début : il faudra également composer avec ses réglages, ses incidents, avec de la vermine venant l’endommager (un lemming nommé Cliff, autre jeu de mot uniquement accessible aux anglophones – et non, ce n’est même pas une référence au célèbre titre de DMA Design, lequel n’était pas encore sorti !) et même des avocats pour venir vous pourrir la vie ! Bref, comme on va le voir, l’usine, c’est un champ de bataille.

L’avocat ne fera que vous ralentir, mais débarrassez-vous des lemmings avant qu’ils n’endommagent la machine

L’action prend la forme d’une sorte de jeu de réflexion/plateforme où l’objectif va être de faire bondir votre M. ou Mme Fixit d’un élément de la gigantesque machine à l’autre pour y apporter les réparations nécessaires via des outils qui apparaissent aléatoirement sous forme de bonus et qui, respect de l’environnement oblige (c’est littéralement l’excuse donnée dans le manuel), ne seront chacun utilisables qu’une seule fois.

Chaque nouvelle usine s’ouvre sur un mot de passe

L’idée sera donc d’entretenir et de surveiller le bon fonctionnement de la longue chaîne de production afin qu’elle puisse produire et acheminer dans les délais les jouets qui vous ont été commandés, lesquels devront passer par de nombreux ateliers dédiés : fonte des matériaux, peinture, assemblage, etc., quitte à agir sur les nombreux leviers et rouages influant sur les tapis roulants ou à chasser les lemmings qui pourrait la dégrader. Le jeu est jouable au clavier ou au joystick, et il est possible de redéfinir les touches via un menu des options accessible via la touche F2 à l’écran-titre. Il n’y a, comme on l’a vu, ni vies supplémentaires ni continue, mais un système de mot de passe à base de fruits vous permettra de reprendre exactement au niveau où vous avez échoué. Voilà pour le principe.

Pour accomplir quoi-que-ce-soit, il faudra comprendre le fonctionnement de toute la machine

Dans un monde idéal, Night Shift aurait été un grand jeu. Cela aurait probablement été un jeu de réflexion avec une courbe d’apprentissage intelligemment progressive où les différents niveaux auraient commencé par vous présenter les divers éléments de la machine un-à-un pour vous laisser l’occasion de comprendre leur fonctionnement et de vous familiariser avec eux, avant de présenter des machines de plus en plus complexes et tentaculaires pour mettre en action vos réflexes autant que votre matière grise.

Même l’entrée du nom est inutilement complexe. Dude, tous les ordinateurs ont un CLAVIER !

Malheureusement, nous ne vivons pas dans ce monde idéal. Nous vivons dans un monde où Night Shift aura préféré être un jeu de plateforme ultra-punitif ayant la mauvaise idée de vous confronter systématiquement à la même machine tentaculaire d’un bout à l’autre, en attendant de vous que vous en compreniez l’intégralité du fonctionnement pour avoir une chance d’intervenir, faute de quoi vous tournerez fatalement en rond le temps d’assimiler les éléments sur lesquels vous avez le droit d’agir, leur rôle et ses conséquences, avant de vous faire virer faute d’y être parvenu dans les temps et de recommencer. C’est déjà une très mauvaise idée : là où le joueur aurait facilement pu être mis à l’aise en une poignée de niveaux, le voilà largué directement au milieu de l’action, un peu comme si la première mission d’un jeu de stratégie en temps réel le plaçait aux commandes de toutes les unités et de tous les bâtiments contre toutes les armées adverses à la fois !

Les jouets à produire sont tous des personnages de Lucasfilm. Ici, Zak McKracken.

L’ennui, c’est surtout qu’une accumulation de mauvaises idées va rapidement transformer la courbe d’apprentissage en une pente verticale aussi raide qu’un mur, et qu’il va littéralement falloir une bonne heure de jeu avant de commencer à assimiler les éléments permettant de vaincre ne fut-ce que le premier niveau. Par exemple, la plupart des fonctions de la machine sont bel et bien inaccessibles lors des premiers niveaux, mais plutôt que de vous présenter un mécanisme simplifié, le jeu préfère vous présenter l’intégralité de la bête, avec certains éléments dissimulés derrière des panneaux de verre rouge.

Parfois, toute la chaine se dérègle sans aucune raison et des éléments qui s’assemblaient correctement arrivent inversés. C’est prodigieusement énervant.

Non seulement c’est une mauvaise idée au niveau du level design, car cela signifie que tous les niveaux reprennent absolument le même plan et la même disposition là où on aurait pu composer avec des niveaux de plus en plus complexes et de plus en plus étendus, mais cela pénalise encore la compréhension du joueur, qui aura beaucoup de mal à distinguer les plateformes et les leviers actionnables au milieu du foutoir d’engrenages et d’éléments de décors qui rend le cadre simplement illisible lors des premières parties. Et les fonctions comme les éléments réparables des divers mécanismes étant totalement obscurs faute d’indice visuels (ça aurait été difficile d’afficher les éléments défaillants d’une autre couleur, par exemple, plutôt que de laisser deviner au joueur quel boulon il doit resserrer ?), le seul recours hors de l’expérimentation au pif reste le manuel… lequel, dans un de ces traits de génie qui définissent la race humaine, aura été volontairement imprimé avec la moitié des voyelles manquantes pour lui donner un côté « authentico-comique », le rendant ainsi aux trois-quarts illisible ! Du génie, je vous dis !

Le ballon vous permettra de remonter plusieurs écrans en vitesse

Conséquence : il faudra beaucoup de temps pour comprendre le fonctionnement de la bête – comptez facilement une heure pour les bases, et prévoyez le double ou le triple pour comprendre pourquoi la machine vous envoie des pièces de couleur différente ou qui s’assemblent dans le mauvais sens alors que celles-ci sont produites par des ateliers sur lesquels vous n’avez même pas la main !

Une chaîne de production qui fonctionne est un véritable miracle

Et le pire, c’est que ces heures de souffrance à apprendre dans la douleur n’aboutissent au final qu’à… un jeu de plateforme médiocre comme il en sortait des convois entiers à l’époque, et qui perd la quasi-totalité de son intérêt dès l’instant où vous savez quoi faire, puisqu’il s’agira alors d’aligner les allers-et-retour sur six écrans pour aller mettre des coups de pieds à des lemmings et résoudre en catastrophe les incidents totalement imprévisibles d’une chaîne de montage qui se dérègle toute seule, même quand tous ses éléments fonctionnent de manière optimale ! Pour ne rien arranger, le jeu tourne trop vite sur un PC AT, avec une limite de temps qui s’écoule à toute vitesse, mieux vaut donc y jouer de manière moins fluide, à 1000 tours sur DOSBox, pour avoir une petite chance d’accomplir quoi-que-ce-soit. C’est d’autant plus frustrant que le jeu respire d’un bout à l’autre le titre sympathique avec absolument tous les éléments pour offrir un jeu de réflexion marquant et bien réalisé si le game designer avait eu pour deux sous de jugeote. Au lieu de quoi, il faudra se contenter d’un logiciel monstrueusement difficile d’accès et pour lequel le jeu n’en vaut clairement pas la chandelle. Trois mois plus tard sortirait Lemmings qui, lui, avait tout compris et obtiendrait un succès planétaire mérité. À quoi ça se joue, une bonne idée bien mise en pratique, hein ?

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 10,5/20 « Frustration » restera sans doute comme le terme résumant le mieux ce Night Shift imaginé par une équipe d'Attention to Detail qui ne mérite clairement pas son nom. « Frustration » du logiciel qui avait absolument tous les éléments pour devenir un titre éminemment sympathique s'il avait choisi d'être ce qu'il aurait dû être, à savoir un jeu de réflexion vivant, original et bourré d'idées, plutôt que d'être ce qu'il est au final, à savoir un jeu de plateforme imprécis et répétitif avec une courbe de progression s'apparentant à un mur et qui demande de très nombreuses parties pour accéder enfin à un potentiel largement éventé entretemps. Sempiternellement confronté à une machine sur laquelle il ne pourra intervenir efficacement qu'après en avoir deviné lui-même les innombrables fonctions dissimulées dans une opacité impénétrable, le joueur réalise rapidement qu'il est de toute façon condamné à y refaire toujours à peu près la même chose sans que cela ne se renouvèle jamais. Un gros gâchis qui aurait vraiment bénéficié d'un level design bien plus intelligent laissant place à la découverte de mécanismes de plus en plus complexes au lieu de nous abandonner devant toutes les possibilités dès le premier niveau. Dommage. CE QUI A MAL VIEILLI : – Un déroulement opaque où rien ne vous est jamais expliqué... – ...et où beaucoup d'incidents s'avèrent totalement inexplicables, même avec de l'expérience – Une difficulté infecte d'un bout à l'autre, particulièrement sur les configurations rapides – Aucune option de difficulté ni aucun moyen de régler la vitesse du jeu – Le manuel rendu volontairement aux trois-quarts illisible, quelle idée de génie...

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Night Shift sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Dès le premier tableau, et même en observant le mode Démo, il est quasi impossible de comprendre immédiatement ce qui cloche dans la chaîne de construction. La notice ne vous aide pas dans le détail et les décors sont si complexes que seuls les plus tenaces verront un jour le bout du tunnel. Originale, techniquement bien réalisée (animations drôles et réalistes, bruitages AdLib de qualité), cette partie est vraiment trop complexe pour atteindre la jouabilité d’un Pipemania par exemple. Si la difficulté de son jeu avait été mieux dosée, ce titre aurait durement atteint le rang des hits ! »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°86, janvier 1991, 14/20

Version Amiga

Développeur : Attention to Detail Limited
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En dépit de ses nombreux défauts, Night Shift dégageait un potentiel si évident qu’il aura globalement reçu un très bon accueil critique, ce qui lui aura valu d’être porté sur de nombreux systèmes. Difficile d’imaginer se passer d’une version Amiga, particulièrement sur le marché européen, et se retrouve donc plus ou moins avec ce à quoi on était en droit de s’attendre, à savoir un portage fidèle à 99% à la version DOS avec de minuscules adaptations dues au hardware. Graphiquement, le jeu est quasi-identique à la version PC, à quelques infimes nuance dans la palette choisie (les rouges sont ici plus proches du magenta), et la réalisation sonore est comme souvent bien meilleure que ce qu’offre l’AdLib. La meilleure nouvelle reste cependant que le jeu, tout en étant parfaitement fluide, ne tourne pas plus vite que sur un PC XT, même sur Amiga 1200 – on ne rencontrera donc pas ici les mêmes problèmes que sur les PC puissants. La jouabilité n’a pas changé (même si, pour une raison mystérieuse, le joystick ne semble fonctionner qu’en étant connecté au port deux) et il est toujours possible de redéfinir les touches. Bref, même si aucun des errements du gameplay n’a été corrigé, on tient malgré tout l’une des meilleures versions pour découvrir le titre aujourd’hui.

Il n’y a pas une couleur de plus que sur PC, mais les teintes sont parfois subtilement différentes

NOTE FINALE : 11/20

Night Shift sur Amiga a beau rester la même chose que ce qu’il était sur PC – à savoir un jeu de plateforme frustrant qui aurait pu être tellement plus – cette version offre globalement de meilleures sensations et une réalisation sonore plus satisfaisante, ce qui en fait indéniablement une des meilleures.

Version Atari ST

Développeur : Attention to Detail Limited
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : Mars 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face (x2)
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En dépit d’une sortie un peu plus tardive, on peut subodorer que cette version ST de Night Shift ait été développée en même temps que la version Amiga ; dans tous les cas, le fait est que les deux machines héritent, comme très souvent à l’époque, de deux versions très semblables. Graphiquement, elles sont d’ailleurs jumelles, et la jouabilité comme la fluidité générale sont globalement identiques (l’Atari ST n’a jamais eu de problème avec les défilements verticaux comme celui employé par le jeu). Pas de problème particulier ici pour faire usage du joystick, et la qualité musicale est comme toujours (du moins, lorsque la machine n’emploie pas des samples numériques) inférieure à celle entendue sur Amiga, et peut-être même à celle entendue sur PC (question de goûts). Pour le reste, le jeu n’a pas changé d’un pixel, vous savez donc exactement à quoi vous attendre.

Le jeu des zéro différence avec la version Amiga bat son plein !

NOTE FINALE : 10,5/20

Night Shift sur Atari ST livre la prestation homologuée d’un portage de 1991, comprendre : « la copie carbone de la version Amiga mais avec une réalisation sonore légèrement inférieure ». Pas de quoi pousser les vieux fans à laisser leur machine de côté pour se lancer sur celle de Commodore, cependant.

Version Commodore 64

Développeur : Attention to Detail Limited
Éditeur : Lucasfilm Games LLC
Date de sortie : Février 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au moment d’aborder les versions 8 bits de Night Shift, on s’attend déjà à des adaptations un peu plus conséquentes en termes de jouabilité et de réalisation. La version Commodore 64 constitue un très bon éclaireur, la machine étant capable du meilleur comme du pire. Dans les grandes lignes, le déroulement du jeu reste parfaitement identique à celui des versions 16 bits, même si la disposition de la machine a un peu changé et que les mots de passe sont désormais différents. Plus question de jouer exclusivement au joystick ici, cependant : il faudra obligatoirement passer par la barre d’espace pour accéder aux outils. Si la jouabilité est bonne et les commandes réactives, la lisibilité générale est un peu moins bonne, pas seulement à cause de la résolution moins fine et du manque de couleurs, mais aussi et surtout parce que les parties inaccessibles de la machine ne sont plus dissimulées derrière un panneau de verre, cette fois, ce qui signifie qu’il est encore plus difficile de deviner où intervenir dans les premiers niveaux. Rien de trop grave pour les vétérans, mais les néophytes, eux, risquent de connaître une période d’adaptation encore plus délicate que sur les ordinateurs 16 bits. Autant dire que vu la courbe d’apprentissage déjà raide de la version originale, on ne saurait recommander aux nouveaux venus de démarrer avec ce portage.

Ça fonctionne quand on sait quoi faire – et c’est là qu’est le problème

NOTE FINALE : 09,5/20

Loin d’être un mauvais portage, cette version C64 de Night Shift doit néanmoins composer avec des tares rendues encore un peu plus pénalisantes par les quelques adaptations malvenues sans doutes dues aux contraintes techniques. Le jeu risque d’être encore plus difficile d’accès dans cette version, ce qui n’était vraiment pas nécessaire.

Les avis de l’époque :

« La mauvaise documentation fait vraiment du mal à ce qui aurait pu être un grand jeu. En l’état, mieux vaut avoir la patience d’un saint généreusement doté en la matière et la détermination d’un gladiateur pour finir ce truc. Une fois qu’on a compris où le jeu veut en venir, les choses deviennent vraiment intéressantes et très amusantes à jouer. Mais cette phase d’initiation risque de s’avérer insurmontable pour beaucoup de joueurs. »

Commodore Format n°38, novembre 1993, 72% (traduit de l’anglais par mes soins)

Version Amstrad CPC

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Au moment de porter Night Shift sur CPC, Lucasfilm Games et Attention to Detail auront visiblement décidé de repasser le bébé à U.S. Gold. À lire cette information, tous les fans de la machine d’Amstrad tremblent à la simple idée de deux mots : « Speccy port ». Eeeeet c’est bien évidemment ce à quoi on aura le droit : une simple adaptation de la version ZX Spectrum du jeu, avec une palette de couleurs différentes pour faire mine d’avoir développé une version à part entière. Quand on sait de quoi la gamme d’ordinateurs d’Amstrad était réellement capable, surtout en 1991, il y a de quoi grincer des dents, mais il faudra s’en contenter. On se retrouve sans surprise avec une sorte de « version Commodore 64 du pauvre », avec les mêmes problèmes, comme le fait que toutes les pièces de la machine soient accessibles d’entrée (mais le manque de détail a au moins le mérite de clarifier un peu les choses). Pour le reste, on ne s’étendra pas sur la réalisation plutôt spartiate, mais la jouabilité fonctionne toujours relativement bien.

C’était vraiment si fatigant de porter, au hasard, les graphismes de la version C64 ?

NOTE FINALE : 09/20

Frappé de la malédiction du « Speccy Port », Night Shift sur CPC devra donc s’y contenter de graphismes en quatre couleurs (en comptant le noir) et de la plupart des petits tracas déjà observés sur Commodore 64. L’essentiel est toujours là mais cela reste une version à éviter pour les joueurs souhaitant découvrir le jeu.

Version ZX Spectrum

Développeur : U.S. Gold Ltd.
Éditeur : U.S. Gold Ltd.
Date de sortie : Avril 1991
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cassette
Contrôleurs : Clavier, joysticks Cursor, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko
Système de protection par roue codée
Système de sauvegarde par mot de passe
Possibilité de redéfinir les touches

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le test de la version CPC de Night Shift étant déjà passé par là, on va dire que la surprise ne joue plus au moment d’aborder la version ZX Spectrum. On hérite d’ailleurs assez logiquement d’une version identique à 95%, les nuances étant à aller chercher du côté de la palette de couleurs employée (assez mal, d’ailleurs, puisque le jeu donne presque l’impression d’être monochrome alors qu’il y a cette fois six couleurs à l’écran, soit plus que ce qu’affichait le CPC). Rien à redire du côté de la jouabilité, le gros problème si situant plutôt, comme dans toutes les autres versions, au niveau de la prise en main et de la courbe d’apprentissage. Même une fois la machine « domptée », la présentation a, comme dans les autres versions 8 bits, l’avantage d’être plutôt plus dépouillée et un peu plus facile à comprendre.

Il y a plus de couleurs que sur CPC, mais elles sont moins bien utilisées

NOTE FINALE : 09/20

Portage sans surprise pour Night Shift sur ZX Spectrum, avec les forces et les faiblesses déjà observées sur CPC et Commodore 64. Si le jeu est assurément plutôt dans le haut du panier de la machine une fois qu’on en a saisi les tenants et les aboutissants, il faudra une nouvelle fois accepter de sacrifier facilement une heure de sa vie au minimum avant d’en maîtriser les nuances, ce qui ne sera assurément pas du goût de tout le monde.

Ooops Up

Cette image provient du site https://www.mobygames.com

Développeur : Silicon Warriors
Éditeur : Demonware Softwarehaus GmbH
Testé sur : Amiga

Version Amiga

Date de sortie : Août 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – OS : Kickstart 1.2 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS
Système de sauvegarde par mot de passe

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il n’est sans doute pas nécessaire d’avoir approché un jour une ligne de code où d’avoir décortiqué les étapes d’animation d’un sprite pour concevoir le travail extraordinaire que représente le développement d’un jeu vidéo. Graphistes, compositeurs, animateurs, codeurs, beaucoup plus rarement scénaristes ; un logiciel du XXe siècle était déjà le fruit d’un rassemblement d’artistes et de techniciens (et bien souvent de personnes pouvant revendiquer les deux casquettes à la fois) œuvrant de concert pendant des semaines ou pendant des mois.

Les idées originales, c’est pour les losers !

Mais ce qu’on ne réalise pas toujours, si on ne s’est jamais mis en tête de programmer soi-même un jeu, c’est la difficulté d’appréhender le concept ludique en lui-même. Parce que réaliser des graphismes, des animations, des thèmes musicaux et le moteur permettant de joindre le tout, c’est une chose, encore faut-il savoir quel jeu on s’apprête à faire. Et mine de rien, s’il est une question à laquelle il est particulièrement délicat de répondre, c’est bien celle du : « que pourrait-on faire qui n’ait pas déjà été fait un million de fois ? ». Fameuse colle au moment de démarrer un jeu, il faut l’Idée avec un grand « i », le petit truc en plus auquel personne n’avait pensé, LA trouvaille qui va donner aux joueurs une bonne raison de venir s’essayer à VOTRE programme…

…ou bien on peut aussi s’en foutre et développer des jeux à la Ooops Up

« Oups, j’ai totalement pompé un autre jeu ! Promis c’est pas fait exprès ! »

À l’origine de ce jeu au titre improbable (nous y reviendrons) se trouve l’équipe de Silicon Warriors, dotée d’une idée simple : proposer un clone de Pang, grand succès de l’arcade paru quelques mois plus tôt – et sans avoir les droits, bien entendu, parce que c’est compliqué, qu’il y a sans doute beaucoup de monde sur les rangs et que ça coûte cher. En termes de flair mercantile, il faut néanmoins reconnaître à l’équipe allemande un certain à-propos : Ooops Up sera effectivement paru avant le portage officiel de la borne sur Amiga (publié en octobre 1990), ce qui en faisait donc la première occasion pour les joueurs de découvrir une version domestique du hit de Mitchell Corporation…

Ah, la musique, je vous garantis que vous allez en rêver la nuit…

…du moins en Allemagne car, la distribution de l’époque étant ce qu’elle était, le titre aura mis plusieurs mois pour débarquer partout en Europe, se faisant ainsi griller la politesse par la conversion officielle du jeu qu’il avait cherché à cloner. L’arroseur arrosé, en quelque sorte. Mais quitte à assumer de n’avoir aucune idée originale, le studio de développement aura décidé de jouer la carte de l’opportunisme jusqu’au bout : si jamais vous vous demandez d’où peut bien provenir ce nom de Ooops Up, contentez-vous de consulter le hit parade musical allemand au moment de la sortie du jeu. Vous y trouverez, solidement niché à la première place, un morceau de Snap! portant exactement le même nom, et qui sera donc devenu – officiellement, cette fois – l’unique thème musical du jeu et le titre auquel le jeu doit son nom ! Ce qu’on appelle savoir saisir le sens du vent…

La réalisation est correcte, mais il faut vraiment aimer les décors monochromes devant l’espace

Pour ce qui est du jeu en lui-même, dès l’instant où vous connaissez Pang, les choses vont aller vite : remplacez les ballons par des astéroïdes, ajoutez l’obligation à chaque niveau d’aller chercher une pièce correspondant à un morceau du vaisseau spatial des héros (le prétexte étant, vous l’aurez compris, de le reconstituer), et vous aurez votre jeu 100% original avec ses quelques cent niveaux !

Au moins, vous ne serez pas obligé de reprendre du début à chaque fois

Tous les bonus de Pang sont là à l’identique, plus quelques malus dispensables (commandes inversées, paralysie, et même mort immédiate) et quelques très très rares idées originales (des téléporteurs, l’ajout de la problématique des pièces à récupérer), mais dans l’ensemble c’est exactement la même chose avec un coup de peinture par-dessus – ça tombe bien, on sent que c’était précisément l’objectif (c’est moi ou les équipes de développement allemandes tendaient à être vraiment fâchées avec le concept de propriété intellectuelle, à l’époque ?). Reconnaissons au moins que dans le domaine, le travail est fait correctement : même s’il faut aimer les décors monochromes invariablement placés sur un fond noir étoilé, la réalisation est très correcte, il est toujours possible de jouer à deux et la jouabilité est très proche de celle de la borne. En revanche, la difficulté est encore plus raide, même si cela est compensé par la présence d’un mot de passe à chaque niveau, ce qui offrira au moins une petite chance aux joueurs n’ayant pas envie de s’entraîner pendant des mois pour boucler le jeu au bout de deux heures d’effort.

Vous pourrez voit votre vaisseau se construire entre deux niveaux, histoire de hacher le rythme

Du côté des défauts tendant à rendre le jeu plutôt moins amusant que son modèle, en-dehors de la difficulté évoquée plus haut, on notera le manque total de renouvellement des décors – généralement les six ou sept mêmes images proposées avec des variations de palette –, ce qui est quand même un peu dommage dans un titre où il n’y a pour ainsi dire rien d’autre à voir, et surtout le thème musical en lui-même. Oh, le sample est très propre, pas de problème, et il n’est pas nécessaire d’être un fan de dance allemande pour pouvoir l’apprécier.

« Hé, ce ne serait pas exactement la même planète dans une autre couleur ? »

En revanche, quand le sample en question est limité à une vingtaine de seconde (pas assez de place sur une disquette pour le morceau en entier) et qu’il tourne en boucle de la première à la dernière nanoseconde de la partie, je vous garantis que vous allez rapidement en avoir votre dose, du fameux hit de l’année 1990 ! Bref, à moindre d’être un fan transi de Pang et de chercher à n’importe quel prix un clone qui aurait pu vous échapper, il y a certes matière à s’amuser en lançant ce Ooops Up, mais vraiment pas de quoi s’imposer face aux épisodes de la série officielle, ni même face aux dizaines d’autres clones du même type. Moralement douteux, techniquement correct, ludiquement sans imagination : un titre oubliable à réserver aux passionnés.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 14/20 Parfois, on n'a pas d'idée, mais on a quand même envie de faire un jeu vidéo ; c'est sans doute ce qui aura conduit l'équipe de Silicon Warriors à développer ce Ooops Up. Le titre en lui-même peut être fidèlement décrit en trois mots : « clone de Pang » ; même concept, même jouabilité, mêmes options – à deux ou trois bonus près, on serait bien en peine de trouver une différence avec le titre de Mitchell Corporation au-delà de la refonte graphique. Même la musique – un sample d'un morceau de Snap! qui aura fait fureur dans certains pays à l'époque – n'est pas d'eux ! Bref, le type de jeu qui pullulerait quelques années plus tard en freeware et qui ne passionnera aujourd'hui que les fans de Pang ayant envie de s'essayer à une sorte de pack de niveaux additionnels avec un nouveau thème graphique. Jouable et correctement réalisé, mais rien d'étonnant à ce qu'il n'ait pas marqué les esprits. CE QUI A MAL VIEILLI : – Pratiquement rien de neuf depuis Pang – Des décors qui se répètent trop vite – Un thème musical qui finit par rendre fou

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Ooops Up sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Ooops Up ressemble à Pang comme deux gouttes d’eau. Les graphismes des sprites et des décors sont différents et l’action s’accompagne d’un rap endiablé, mais à part cela tout est strictement identique à Pang. Alors, bien sûr, le programme est très amusant, mais pourquoi choisir une copie alors que l’on peut s’offrir l’original ? »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 15/20