Strike Fighter

Développeur : Sega R&D 8
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Titres alternatifs : ストライクファイター (graphie japonaise), After Burner III (FM Towns, Mega-CD)
Testé sur : ArcadeFM TownsMega-CD
Également testé : SEGA Strike Fighter

La saga After Burner (jusqu’à 2000) :

  1. After Burner I & II (1987)
  2. Strike Fighter (1991)
  3. SEGA Strike Fighter (2000)

Version Arcade

Date de sortie : Mai 1991 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un manche à balai et trois boutons
Version testée : Version export
Hardware : SEGA Y Board
Processeurs : Motorola MC68000 12,5MHz (x3) ; Zilog Z80 4,026987MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; YM2151 OPM 4,026987MHz ; SEGA PCM 4,026987MHz ; 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (H) 60Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’innovation n’est pas un phénomène linéaire qu’il suffit de mettre en route comme on démarre un moteur avant d’en récolter les fruits. C’est, par nature, le résultat d’un ensemble d’expérimentations dont une large partie aura été vouée à échouer. Ou, pour dire les choses de façon plus simple : il y a des fois ou ça ne marche pas, et puis il y a des fois où on n’a plus d’idées.

Loin de ces considérations scientifiques, le béotien (généralement appelé « responsable marketing ») a souvent une appréciation plus simple de ce qu’est l’innovation : quand le public en veut, il faut lui en donner vendre, et puisque c’est précisément à ça que servent les sections R&D, eh bien elles n’ont qu’à en produire, et de préférence avant lundi prochain, parce que ça urge.

Mais comme on peut s’en douter, un gouffre sépare souvent la théorie de la pratique et même une entreprise à la pointe de l’innovation comme pouvait l’être SEGA au début des années 90 était vouée à aboutir, de temps à autre, dans une impasse. Avec le recul, la volonté de continuer à offrir des bornes d’arcade basées sur le sprite scaling et reposant sur le fait de piloter un jet suite au succès des deux premiers épisodes d’After Burner en aura rapidement constitué une, et si les années auront vu apparaître à répétition des G-LOC : Air Battle, des Strike Fighter ou des Sky Target, aucune de ces bornes n’aura jamais pu prétendre approcher le succès des opus imaginés par Yu Suzuki. Pendant que la 3D débarquait dans les salles d’arcade via le succès de Virtua Racing ou de Virtua Fighter, l’innovation n’aura donc jamais produit d’After Burner III… au contraire du mercantilisme, qui aura décidé de donner ce nom à la version domestique d’une borne si mineure qu’elle n’aura finalement jamais quitté le Japon – et qui aurait sans doute largement pu mériter ce nom tant les points communs entre les deux licences sont nombreux, mais à laquelle il manquait peut-être juste un élément pour porter le glorieux nom de ses aînées : une idée…

Strike Fighter serait né d’une volonté simple : celui du reprendre le moteur et le système de jeu de G-LOC : Air Battle et de faire tendre sa philosophie (originellement celle de proposer une simulation allégée) vers celle, plus adaptée à l’arcade, d’After Burner.

Traduit en clair : apparemment, demander au joueur de remplir des objectifs aussi basiques que de détruire un certain nombre de cibles était déjà perçu comme trop compliqué, alors autant revenir à l’essentiel : voler tout droit, tirer sur tout ce qui se présente, et surtout : survivre. Un menu un peu léger sur le papier, mais sachant que le fun résulte souvent d’une alchimie très délicate – et que G-LOC : Air Battle avait échoué à renouer avec le succès de son prédécesseur – on peut comprendre que le premier réflexe ait été de chercher à renouer au maximum avec ce qui avait fonctionné tant c’est précisément ce que tendent à attendre les joueurs. En résumé, si Strike Fighter aspirait à être un tout petit peu plus qu’After Burner tournant avec le moteur de G-LOC : Air Battle, le fait est qu’il ne semble pas exactement être parvenu à viser plus haut que cela.

Le truc, c’est que les joueurs ne s’attendaient sans doute pas à une application aussi littérale du programme qui vient d’être exposé. Car en lançant Strike Fighter, la première conclusion qui s’impose, c’est quand même qu’on vient de lancer G-LOC : Air Battle : même hardware, même moteur, même vue, même jouabilité… le moins qu’on puisse dire, c’est que la différence ne saute pas exactement aux yeux – les détails au sol semblent même plus rares, puisqu’il ne sera pas question ici d’aller faire des passages en rase-mottes dans des défilés ni de participer à des missions de nuit comme le proposait pourtant son prédécesseur un an plus tôt !

Même les séquences de poursuite qui voient la vue passer à la troisième personne pour donner l’occasion au joueur d’éviter les tirs d’un avion placé dans ses six heures sont reprises à l’identique, à se demander si SEGA n’était pas en train d’écouler les stocks de ses vieilles bornes en leur donnant un nouveau nom pour enfumer tout le monde ! Seule minime, minuscule nouveauté : la présence d’une post-combustion qui permet de bénéficier d’un gain d’évasion en même temps que d’un boost d’adrénaline – c’est d’ailleurs tellement efficace que j’en viens à me demander s’il n’est pas possible de terminer les quinze vagues du jeu de cette façon, en se contentant de foncer tout droit en évitant les tirs adverses avec le pied dans le phare.

Reste donc l’idée de proposer une jouabilité plus « arcade » que celle d’une borne d’arcade, et pour le coup on hérite très exactement de ce qui avait déjà servi à décrire G-LOC : Air Battle : c’est littéralement After Burner en vue subjective, et rien d’autre. Ce qui signifie également que le gain en précision qui avait pu être observé dans le premier nommé n’a plus cours ici : comme dans After Burner, les jets adverses et leurs missiles arrivent à une telle vitesse que la méthode la plus efficace pour espérer survivre est de secouer le manche à balai en tous sens pour enchaîner les tonneaux cheveux au vent en se posant d’autant moins de questions que les tirs de mitrailleuse comme les missiles sont illimités.

Autant dire que 95% du temps, on ne comprend pas grand chose à ce qui se passe, et qu’à la rigueur ce n’est de toute façon même pas l’objectif : ça va vite, c’est marrant, on s’est bien amusé pendant une minute et maintenant on va jouer à autre chose. Ben comme After Burner, en fait. Mais sans l’effet de surprise, avec moins de détail au sol, avec des idées en moins (on n’a même plus de séquences de ravitaillement puisqu’on n’a rien à ravitailler !) et des sensations globalement moins présentes. Bref, ça aurait effectivement pu être After Burner III si c’était simplement parvenu à être autre chose qu’une version « light » d’After Burner II. Rien d’étonnant, donc, à ce que le marketing de SEGA ait par la suite fini par franchir le pas et par bousiller par la même occasion sa licence en vendant un jeu dont personne ne voulait basé sur une borne qui avait déjà fait un bide au Japon : à trop essorer les mêmes concepts avec les mêmes techniques, ont fini par aboutir à la quadrature du cercle : le même jeu. Autant dire qu’on aurait aussi bien pu s’en passer.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 12,5/20

Le vrai problème avec Strike Fighter, c'est qu'on passe les très rares moments où on ne se demande pas pourquoi quelqu'un s'est donné la peine de changer le nom de la borne de G-LOC : Air Battle à se demander pourquoi quelqu'un s'est donné la peine de changer le nom de la borne d'After Burner. Non seulement il n'y a pas l'ombre du début du commencement d'une idée neuve dans la borne de SEGA R&D 8, mais en plus la réalisation donne elle aussi le sentiment de ne pas avoir avancé d'un pouce, tandis que le système de jeu, lui, a plutôt fait un pas en arrière. Il en résulte qu'on passe une fois de plus dix minutes à faire des tonneaux dans tous les sens en tirant au hasard sans jamais avoir le sentiment d'avoir la moindre prise sur ce qui se passe à l'écran, et qu'en dépit de l'adrénaline offerte par la chose, on ne sait même plus dire si on s'est réellement amusé. De quoi se défouler avec le cerveau sagement rangé dans un coin de la pièce, mais le temps d'un crédit ou deux et pas davantage.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une réalisation qui n'offre rien de plus que G-LOC : Air Battle...
– ...tout en perdant en précision et en jouabilité à vouloir décalquer le gameplay d'After Burner
– Une durée de vie qui se chiffre en minutes

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Strike Fighter sur une borne d’arcade :

Version FM Towns
After Burner III

Développeur : CSK Research Institute Corp.
Éditeur : CSK Research Institute Corp.
Date de sortie : Juin 1992 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais (narration), anglais (menus)
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version CD-ROM japonaise
Configuration minimale :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Au grand jeu des conversions de l’arcade, le FM Towns n’est a priori pas la machine la plus mal équipée, et en prenant en considération le fait que le portage d’After Burner sur la même machine, réalisé trois ans plus tôt par le même studio, avait été d’excellente qualité, on lance le jeu avec une certaine confiance. Malheureusement, le titre a beau être devenu After Burner III, on a plutôt l’impression de revoir les abominables conversions sur ordinateurs de G-LOC : Air Battle ; ce n’est pas que ça soit moche ou que ça bouge mal, mais où sont passé tous les détails au sol ? On n’a pour seul horizon qu’un pâté bleu en guise de ciel, avec un pâté vert/jaune/blanc en guise de sol, et quelques points anarchiquement disséminés pour donner une illusion de mouvement ! Et histoire d’en rajouter une couche, le programme se sent obligé d’afficher ce néant à une résolution mutilée de 256×192, comme si afficher trois sprites se battant en duel au-dessus d’un décor bichrome lui demandait trop de ressources ! Alors certes, cette fois, on n’a plus vraiment d’excuses pour ne pas comprendre ce qui se passe à l’écran, la vitesse est plutôt bien préservée et la musique CD sauve la réalisation. Mais sachant que le portage du premier opus faisait mieux dans absolument tous les domaines, renommer ce Strike Fighter en After Burner III n’était sans doute pas le meilleur service à lui rendre. À oublier.

NOTE FINALE : 08,5/20

Supprimer pratiquement tous les éléments visuels dans un jeu reposant quasi-exclusivement sur sa réalisation n’est jamais une bonne idée, et on ne saura probablement jamais pourquoi CSK Research Institute aura jugé qu’After Burner III se porterait mieux en n’offrant que deux pâtés informes en guise de décor. Toujours est-il qu’on se retrouve avec un petit jeu de tir pas impressionnant pour deux sous et dont on fait le tour en une poignée de secondes. Pas exactement ce qu’on était venu chercher…

Version Mega-CD
After Burner III

Développeur : CSK Research Institute Corp.
Éditeur : CSK Research Institute Corp. (Japon) – SEGA of America, Inc. (Amérique du Nord) – SEGA Enterprises Ltd. (Europe)
Date de sortie : 18 décembre 1992 (Japon) – Mai 1993 (Amérique du Nord) – Juin 1993 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Anglais, japonais
Support : CD-ROM
Contrôleur : Joypad (trois ou six boutons), XE-1 AP
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques :

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Avec la même équipe que pour la version FM Towns aux commandes, autant dire que c’est avec un enthousiasme plutôt mesuré qu’on lance After Burner III sur Mega-CD. Pourtant, les choses partent plutôt mieux que ce qu’on pouvait craindre : certes, les graphismes sont moins colorés que dans les autres versions, mais on a au moins le droit à une résolution en 320×224, comme sur la borne, et le jeu affiche cette fois des sprites au sol – pas beaucoup, mais suffisamment pour faire un minimum illusion. La réalisation sonore est à la hauteur, cette version intégrant carrément des thèmes remasterisés des deux premiers After Burner, le framerate est bon et la jouabilité réactive. Le contenu a également été revu à la hausse : le mode débutant intègre 11 niveaux, le mode normal 15 et le mode expert 20 – ce qui fait cinq de plus que sur la borne – plus deux modes chronométrés consistant à abattre un maximum de cibles en 90 secondes ; un peu gadget mais pourquoi pas. Les versions occidentales du jeu intègrent également la possibilité de choisir sa vue, soit via le menu des options, soit à la volée en cours de partie – à condition d’avoir un pad à six boutons. Bref, cela ressemble à une version un peu plus conforme aux attentes… à un petit détail près.

Ce détail, hélas, se trouve être la jouabilité : quelle que soit la vue choisie, éviter un missile adverse demande un temps de réaction si ridiculement court que l’acte est rendu virtuellement impossible à un être humain ordinaire. Seule solution : gigoter le manche en permanence au pif total dans l’espoir de passer entre les gouttes – ce qui pouvait éventuellement faire illusion deux minutes sur arcade, mais tend à annihiler toute forme de stratégie et de plaisir de jeu ici – d’autant que cette version est beaucoup plus difficile que la borne. Atteindre la troisième vague sans perdre un continue est déjà presque un exploit ! Autant dire que l’expérience de branlotage de manche démontre rapidement son manque total d’intérêt et qu’on abandonne rapidement le jeu pour aller s’essayer à autre chose – au hasard, à After Burner sur Mega Drive, qui était bien supérieur.

NOTE FINALE : 09/20

After Burner III sur Mega-CD a beau essayer de donner le change en augmentant son contenu et en s’efforçant de soigner (un peu) sa réalisation, le fiasco qu’est sa difficulté insurmontable rend l’expérience de jeu profondément inintéressante. Après avoir passé deux minutes à faire la toupie sans rien comprendre à ce qui se passe, on va vomir un coup et on range le CD-ROM bien proprement à sa place, dans l’incinérateur. Un beau ratage.

SEGA Strike Fighter

Développeur : WOW Entertainment
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd. (Japon) – SEGA Enterprises, Inc. (USA) (Amérique du Nord) – SEGA Amusements Europe, Ltd. (Europe)
Titre alternatif : セガ ストライクファイター (graphie japonaise)
Testé sur : Arcade

À la fin du dernier millénaire, à un moment où les salles d’arcade étaient déjà inéluctablement sur le déclin et où SEGA jouait gros (et était sur le point de perdre) avec sa Dreamcast, on aurait pu s’attendre à voir débarquer sur la borne NAOMI (qui employait une architecture similaire à celle de la Dreamcast) un nom ronflant de type After Burner IV. Pour une raison ou pour une autre, c’est pourtant bel et bien la licence nettement moins célèbre des Strike Fighter qui aura eu le droit à un nouvel épisode, et histoire de rendre les choses plus confuses encore, au lieu d’avoir le droit à un grand « 2 » en bonne et due forme, le titre se sera contenté d’un grand « SEGA » pour le distinguer de la borne sortie presque dix ans plus tôt. Une forme d’aveu, tant ce nouvel opus est moins une suite qu’une relecture de l’épisode précédent, chargé de dévoiler toutes les prouesses technologiques de l’année 2000 dans une borne simple ou un modèle « deluxe » faisant usage de pas moins de trois écrans côte-à-côte. Le concept a beau être toujours exactement le même – détruire des cibles aériennes et au sol sans trop se poser de question –, la philosophie a évolué en même temps que la technique, et le jeu repose dorénavant beaucoup plus sur un gameplay précis que sur une adrénaline et une sensation de vitesse désormais quasi-inexistantes, sauf en rase-mottes. Un très bon moyen de découvrir tout ce qui avait changé en neuf ans – en bien comme en mal.

Version Arcade

Date de sortie : Novembre 2000 (Japon, Europe) – Février 2001 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un manche à balai, deux pédales, une manette des gaz et trois boutons
Version testée : Version japonaise
Hardware : SEGA NAOMI Multiboard
Processeurs : Hitachi SH-4 (little) 200MHz ; ARM7 (little) 2,8224MHz ; Zilog Z80 16MHz ; Toshiba TMP90PH44 10MHz ; Motorola MC68000 10MHz
Son : Haut-parleur (x2) ; Yamaha AICA 22,5792MHz ; 2 canaux
Vidéo : 640 x 480 (H) 61,702586Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Neuf ans, en temps vidéoludique, c’est extrêmement long – surtout au XXe siècle, où la technologie avançait à un train d’enfer. Très bonne démonstration avec SEGA Strike Fighter : reprenez exactement le concept d’une borne de 1991, et qu’obtenez-vous en 2000 ? Déjà, de la 3D nettement plus spectaculaire, en temps réel, avec ombrages, effets de lumière et toute la batterie de capacités de la Dreamcast.

Est-ce plus beau ? Infiniment. Est-ce que cela impacte la jouabilité ? Oui, mais en bien : plutôt que baser l’expérience sur la vitesse pure, WOW Entertainment aura fait le choix d’un modèle de vol un peu plus réaliste, que la borne prend d’ailleurs le temps de vous détailler via un mode entraînement dédié de plusieurs minutes ! Alors soyons clairs : on est toujours très loin d’une simulation, comme on peut s’en douter, mais on comprend enfin ce qui se passe, et l’action est d’autant plus basée sur les manœuvres et la précision que les munitions ne sont plus illimitées et que la durée des diverses missions est très limitée : entre une minute et une minute trente. Dans ce laps de temps, l’objectif est de détruire un certain nombre de cibles clairement désignées – ce qui fait qu’on s’approche encore un peu plus de G-LOC : Air Battle.

Le gros de l’action est divisée en deux « campagnes » variant les cibles et les environnements, et poussant même le raffinement jusqu’à vous offrir le choix entre deux missions différentes à la conclusion de chacune d’entre elles. On a même le droit à des petits briefings, avec une opératrice asiatique dotée d’un nom occidental, parce qu’exportation, et à un niveau bonus de ravitaillement en vol, mais la donnée importante est surtout que la borne réussit précisément l’amalgame que sa prédécesseuse avait raté : suffisamment de technicité pour qu’on se sente réellement investi en tant que pilote, et une action suffisamment nerveuse et suffisamment accessible pour qu’on soit à l’aise en une poignée de secondes.

On n’a jamais le temps de s’ennuyer, et le chrono représentant de toute façon l’adversaire principal, la vraie difficulté des missions avancées reposera surtout sur la capacité à éviter les dogfights interminables pour parvenir à aligner les cibles le plus rapidement possible. C’est relativement beau, ça va vite, c’est précis, on passe un bon moment, et il y a suffisamment de contenu pour se vider les poches avec enthousiasme. Évidemment, l’action finit fatalement par être redondante – 95% des missions consistent à garder les cibles dans le viseur suffisamment longtemps pour pouvoir tirer les missiles à tête chercheuse – mais en tant qu’expérience dans une salle d’arcade, c’est indéniablement des kilomètres au-dessus de la première version. En fait, on est très proche de ce qu’avait déjà commencé à offrir – et de ce qu’offre encore – une licence à la Ace Combat : de la simulaction où des chasseurs sont capables de transporter 45 missiles sous leurs ailes et s’affronte aux réflexes plutôt qu’aux instruments, mais ça fait parfaitement le café. De quoi donner envie de remettre une petite pièce de temps à autre, juste pour le fun.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16/20

L’arcade de 2000 avait visiblement plus de matière à offrir que celle de 1991 : SEGA Strike Fighter fait le choix de ne plus s’appuyer exclusivement sur la vitesse et sur la poudre aux yeux, et il l’assume avec brio. Grâce un aspect simulation très basique, mais qui donne enfin le sentiment de contrôler son avion, on aligne les cibles avec jubilation dans une 3D irréprochable jusqu’à ce que le menu finisse par manquer de variété – mais on aura eu tout loisir de passer un long et bon moment avant que la lassitude ne s’installe. De l’action comme on l’aime.

Phoenix (Amstar Electronics)

Développeur : Amstar Electronics Corp.
Éditeur : Centuri, Inc. (Amérique du Nord) – Taito Corporation (Japon)
Titres alternatifs : フェニックス (graphie japonaise), フェニックス号 (Phoenix-gō – Atari 2800 – Japon)
Testé sur : ArcadeAtari 2600

La série Phoenix (jusqu’à 2000) :

  1. Phoenix (1980)
  2. Pleiads (1981)

Version Arcade

Date de sortie : Décembre 1980
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle)
Langue : Anglais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (deux directions) et deux boutons*
*Certains modèles remplacent le joystick par deux boutons additionnels
Version testée : Version internationale, set 1
Hardware : Processeur : Intel 8085A 5,5MHz
Son : Haut-parleur ; TMS36XX 0,372 kHz ; Phoenix Custom Sound ; Discrete Sound 120kHz ; 1 canal
Vidéo : 256 x 208 (V) 61,035156Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Soyons réaliste : à l’ère des balbutiements du jeu vidéo dans les foyers et surtout dans les salles d’arcade, il a pu arriver que certains titres méritants à plusieurs égards se retrouvent quelque peu… perdus dans la masse. Cela n’a rien de très surprenant si l’on considère que les premiers succès du domaine, bien avant d’engendrer leurs propres « genres » vidéoludiques avec leurs mécanismes récurrents, auront d’abord surtout traîné à leur suite une longue série de clones d’autant moins inspirés que la propriété intellectuelle était encore une notion à définir en ce qui concernait le médium électronique.

Traduit en clair : pour un Pong en salles, on avait le droit à plusieurs centaines de variantes dans la foulée (le site Mobygames en référence pas moins de 568, et il y a fort à parier qu’il en manque des dizaines), dont une bonne moitié de versions « de salon » vendues sous la forme de système dédiées, avec strictement aucun autre mécanisme à proposer que deux raquettes et une balle – soit exactement ce qu’offrait le jeu de base, ni plus, ni moins (et ceux qui lèveront les yeux au ciel devant ce consternant manque d’imagination devraient se rappeler que Pong lui-même était déjà un plagiat…). Space Invaders aura lui aussi été un inspirateur majeur à la fin des années 70 – et au-delà –, et pour un Galaxian ou un Galaga méritant d’être mentionnés, combien de dizaines de Missilevader, d’Astro Battle ou de Sky Love que l’histoire ne retiendra jamais ? Mais quelque part dans une fine zone tampon se situent également des titres à la Phoenix : des jeux qui n’ont peut-être pas inscrit leur nom en lettres d’or au Panthéon vidéoludique, mais qui méritent qu’on se souviennent d’eux pour avoir apporté quelque chose au genre.

À la racine, Phoenix est un clone assumé de Space Invaders dont il ne cherche même pas à masquer la filiation évidente en basculant la vue à l’horizontale à la Yar’s Revenge. Le principe est donc rigoureusement le même : des adversaires dont la partie supérieure de l’écran, votre vaisseau cloué en bas et restreint à un axe de mouvement purement horizontal – autant dire la norme de 99% des shoot-them-up de l’époque, le 1% restant correspondant sans doute à Defender.

Au moins les ennemis prennent-ils ici la forme de volatiles, ce qui change un peu des extraterrestres aux inspirations plus aquatiques de Space Invaders – mais bon, Galaxian était déjà passé par là, ce n’est donc pas de ce côté qu’on cherchera l’originalité du jeu. En fait, pour bien comprendre l’innovation apportée par Phoenix, il faut se souvenir du déroulement de n’importe quel jeu de tir à l’époque : une fois une vague finie, une nouvelle apparaissait – à l’identique, mais généralement en plus rapide histoire de compliquer les choses – et c’était là tout le jeu, le seul véritable mécanisme ludique étant de survivre le plus longtemps possible pour faire le meilleur score. Phoenix, pour sa part, aura eu l’idée d’introduire quelque chose d’inattendu : un soupçon de variété.

Le cœur du jeu est donc en réalité constitué non d’une unique vague se répétant ad eternam, mais bien de cinq vagues présentant des déroulements différents. Les deux premières vagues présentent des adversaires placés en haut de l’écran et se laissant fondre su votre vaisseau en lui tirant dessus – une reprise directe de Galaxian, certes, mais également un bon moyen de composer avec le mécanisme inédit composé par votre bouclier personnel activable à la demande, lequel vous rendra invincible (et immobile) pendant deux secondes, mais ne pourra ensuite plus être activé pendant cinq secondes ; de quoi ajouter une corde à votre arc et surtout un chouïa de profondeur au gameplay.

Les vagues trois et quatre sont plus originales : elles commencent sous la forme d’œufs, que vous seriez avisé de détruire au plus vite avant que n’émergent des Phoenix massifs qui demanderont d’être touchés précisément en leur centre – leurs ailes, pour leur part, finiront toujours par repousser. Comme leurs équivalent miniatures, ces volatiles n’hésiteront ni à vous bombarder ni à vous foncer dessus, et il faudra à nouveau savoir dégainer le bouclier au bon moment pour optimiser ses chances. Quant à la vague cinq, elle introduit tout simplement un concept appelé à faire date : un boss, prenant en l’occurrence la forme d’un vaisseau mère dont il faudra détruire l’imposant blindage dans l’espoir d’atteindre l’être situé en plein centre. La pression monte alors d’un cran, et en cas de succès, vous pourrez reprendre à la vague un, mais avec une difficulté accrue.

Tout cela n’a peut-être l’air de rien, mais Phoenix aura mine de rien introduit l’idée d’une progression dans le déroulement d’un jeu vidéo : le fait de ne pas composer exactement avec les mêmes éléments de la première à la dernière seconde était quelque chose de neuf, et l’arrivée d’un imposant vaisseau prenant pas loin du tiers de l’écran était à coup sûr une surprise autant que le moment marquant offert par un programme issu d’un minuscule studio qui disparaitrait corps et bien dès l’année suivante (et n’ayant à ma connaissance développé que ce titre).

Peut-être pas de quoi propulser la borne au rang des titres immortels que l’on retrouve régulièrement dans des compilations de succès de l’arcade, mais il y a fort à parier que le logiciel serait resté plus célèbre s’il avait été l’œuvre de Namco ou d’Atari. En l’état, cela reste une étape importante pour le genre, et même si cela ne se traduira sans doute pas par des dizaines d’heures de parties enflammées aujourd’hui (la faute à un certain manque de finitions dans l’équilibrage et la jouabilité), il y a quelque chose de fascinant aujourd’hui à découvrir les fondations d’idées devenues centrales dans des milliers de jeux vidéo dissimulées sous l’anonymat d’une borne dont on ne connait même pas l’identité des programmeurs et dont trop peu de joueurs auront retenu le nom. Que cette injustice soit donc corrigée aujourd’hui, et que les curieux n’hésitent pas à aller tuer dix minutes sur une borne sympathique à laquelle on doit plus de choses qu’on ne le pense.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 10,5/20

Noyé au sein de la masse des clones oubliés de Space Invaders qui pullulèrent à la fin des années 70 et au début des années 80, Phoenix est une borne qui mérite pourtant d'être remise en lumière pour avoir eu le mérite de proposer des idées neuves – et surtout, des idées neuves pertinentes. Apportant un peu de variété grâce à ses cinq vagues et proposant pour la première fois un boss, le jeu d'Amstar Electronics nécessite enfin plus d'une poignée de minutes pour en faire le tour et élaborer les diverses stratégies adaptées – notamment grâce à l'ajout bien senti d'un bouclier activable. Certes, seuls les fans absolus de scoring y consacreront des heures, mais autant prendre le temps de célébrer ce qui aura représenté plusieurs pas d'un coup dans la bonne direction.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des parties qui n'ont que peu de raisons de s'étendre au-delà de cinq minutes
– Un bouclier qui manque de souplesse dans son utilisation...
– ...et une jouabilité qui n'a globalement ni la fluidité ni la précision des ténors du genre

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Phoenix sur une borne d’arcade :

Version Atari 2600

Développeur : General Computer Corporation
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : Février 1983 (Amérique du Nord) – Novembre 1983 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 64kb

Ne nous leurrons pas : si une borne d’arcade du début des années 80 n’a pas été portée à un moment ou à un autre sur Atari 2600, c’est probablement qu’elle ne vaut même pas la peine qu’on se souvienne de son existence. Phoenix aura certes dû attendre quelques années pour faire le grand saut (et le fait qu’aucune autre machine n’en ait accueilli une conversion tend à démontrer que la borne aura connu un succès nettement plus confidentiel que celui de son modèle), mais parvient à proposer ce qu’on espérait y trouver : les cinq vagues et tous les mécanismes intacts. Le joystick n’ayant qu’un seul bouton, il faut pousser le stick vers le bas pour activer le bouclier – ce qui fonctionne très bien – et si les graphismes sont moins fins et moins colorés que sur la borne et la difficulté par défaut nettement plus basse, on retrouve les sensations qu’on était venu chercher. Indispensable ? Sans doute pas, mais à l’échelle de la ludothèque de l’Atari 2600, cela reste un shoot-them-up qui fait le café – et qui le fait plutôt bien.

NOTE FINALE : 10/20

Portage sérieux pour Phoenix sur Atari 2600, qui reproduit fidèlement les possibilités de l’arcade tout en offrant un défi plus accessible. Pour tuer dix minutes sur sa console, le contrat est largement rempli.

ShockWave (Light Source Productions)

Développeur : Light Source Productions
Éditeur : Digital Magic Software Ltd.
Testé sur : Amiga

Version Amiga

Date de sortie : Septembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Souris
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Il y a toujours quelque chose de fascinant à commencer à s’éloigner des grandes autoroutes du retrogaming pour se glisser dans les chemins de campagne – plus accidentés et moins confortables, certes mais aussi plus pittoresques. Sorti des grands noms et des grands titres qui ont façonné le jeu vidéo – et il y a déjà matière à s’occuper pour un sacré bout de temps – on redécouvre parfois, en explorant avec curiosité les innombrables logiciels méconnus programmés par des obscurs et souvent disparus dans les méandres de l’oubli bien avant de s’être vus accorder une réelle chance, une sensation que les chemins balisés de la connaissance en sont venus à nous faire oublier : la surprise.

Et puis il y a sans doute des millions d’histoires en sommeil, derrière ces noms qui ne disent plus rien à personne : qui saura nous parler de Light Source Productions, des trois jeux que ce studio quasi-inconnu aura eu le temps de programmer lors de ses deux années d’existence ? Qui se souvient de Sci-Fi et de Narcissus, petits programmes oubliés chacun développés par une seule personne ? Qui se dévouera pour nous parler ShockWave, de loin leur titre le plus ambitieux – mais aussi et surtout leur dernier, avant que les membres de l’équipe ne s’en aille convoler de leur côté, la plupart du temps pour mener une belle et longue carrière qui se poursuit encore aujourd’hui ? Allez, pour la peine, je m’y colle. ShockWave, c’est ce jeu qui aurait pu être une sorte d’OVNI éminemment sympathique à la Carrier Command ou à la Herzog Zwei, et qui au final n’aura pas été grand chose tant la sentence de toute la presse spécialisée de l’époque semblait sempiternellement être la même : « Pas mal, mais… ». « Mais » quoi, au juste ?

Le scénario, comme souvent, n’a aucune importance : au XXIIe siècle, la Terre est menacée par l’attaque de coloniaux pas très contents qui ont décidé de concentrer toutes leurs attaques sur une seule ville – qui est également, coup de bol, celle autour de laquelle l’humanité a placé toutes ses défenses… c’est à dire principalement vous et votre petit vaisseau. Pas moins de dix vagues ennemies s’apprêtent à frapper depuis des stations orbitales, et c’est donc à vous que va échoir la responsabilité de protéger tout le monde. Jusqu’ici, rien de franchement neuf.

Ceci dit, la (seule) vraie originalité du jeu provient du fait qu’on ne va pour une fois pas se contenter de vous demander d’aller détruire toute l’armée adverse à vous tout seul. Non, la population du futur étant visiblement trop occupée à jouer aux jeux vidéo pour s’intéresser à son avenir, c’est également à vous que va revenir de gérer… tout l’aspect économique de la défense. En effet, votre survie va dépendre de la protection des quatre secteurs qui entourent la ville : au nord-ouest, l’océan abrite les réserves de pétrole qui viendront fournir le carburant à votre astronef ; au nord-est, vos précieuses mines vous fourniront le nerf de la guerre – l’argent qui vous permettra d’acheter tout le reste ; au sud-est, les usines se chargeront de développer votre armement, et le sud-ouest abritera les camps militaires qui pourront produire les troupes qui vous aideront à retarder l’invasion adverse. Il va donc falloir profiter des moments d’accalmie entre les assauts pour décider quoi construire et dans quel ordre afin de ne jamais vous retrouver démuni face à l’opposition toujours plus puissante qui ne manquera pas de vous refaire le coup des forces de Vega comme si vous étiez le premier Goldorak venu. Tiens, en y réfléchissant, ça aurait été une superbe idée de licence intelligemment utilisée… tant pis.

L’action en elle-même va se diviser en deux phases. Tout d’abord, le centre de commande vous placera face à la carte de la région entourant votre ville, avec les quatre secteurs et leurs ressources. Un bouton « Wait » vous permettra de faire avancer le temps (car oui, cette partie se déroule en tour-par-tour), vous permettant d’accumuler de l’argent que vous serez ensuite libre d’investir dans les installations précitées : plus vous avez de mines, plus vous gagnez d’argent ; plus vous avez de plateformes pétrolières, plus vite vos réserves de carburant se reconstituent, etc. L’ennemi ne va bien évidemment pas tarder à s’inviter dans l’équation, massant ses forces dans les différents secteurs, et sachant que lorsqu’une zone est occupée à plus de 50%, vos précieux bâtiments vont commencer à se faire détruire, il faudra rapidement se décider à aller agir sur le terrain.

Un bref détour par l’armurerie vous permettra de constater que l’armement et les défenses de votre vaisseau s’améliorent en fonction du temps et du nombre d’usines à votre disposition (vous n’en avez aucune au début de la partie), puis vous grimpez dans votre vaisseau, et vous vous retrouvez alors… dans une scène d’action en simili-3D à la Space Harrier ou à la After Burner. À ce stade, on sent immédiatement que les programmeurs du jeu avaient envie de démontrer qu’ils n’étaient pas des manches, et c’est plutôt réussi : c’est coloré, la palette du ciel et des décors s’adapte en fonction de l’heure de la journée, ça va vite, c’est fluide, la vue se penche lorsque le vaisseau pivote et il n’y a pas l’ombre d’un clignotement à l’écran. De quoi donner une bonne leçon aux conversions sur Amiga des deux titres susnommés ! La musique n’est pas en reste, le très efficace thème de l’écran-titre jouissant aujourd’hui encore d’une grande popularité au sein de la scène Amiga. Quant à la jouabilité, elle se limite à déplacer un curseur à la souris, qui décidera à la fois de votre visée et du déplacement de votre vaisseau ; le choix des armes comme l’activation de divers pouvoirs secondaires (camouflage et vision nocturne) étant à aller chercher sur le clavier. L’objectif est simple : détruire un certain nombre d’appareils ennemis, figuré en bas de l’écran, avant d’arriver à court de carburant – et sans se faire détruire, naturellement. Il arrivera également que des missions spéciales vous fassent piloter un appareil chargé explosif jusqu’au bout d’une tranchée à la Star Wars en temps limité – là encore, la réalisation fait particulièrement mouche pour un titre de 1990.

Mais alors, qu’est-ce qui a bien pu manquer à ce ShockWave pour faire sensation ? En résumé, deux choses : de la matière, et de l’équilibrage. La partie gestion est simplissime, ce qui signifie aussi qu’elle finit par casser un peu le rythme tant on passe l’essentiel de son temps à cliquer pour passer au tour suivant. Pour donner une idée, vous commencez la partie avec une unique mine qui vous fournit 10.000 crédits par tour. Le premier réflexe serait donc d’en construire une deuxième afin d’augmenter vos revenus, sauf qu’une simple mine coûte… 240.000 crédits. Oui, ça fait déjà 24 tours de jeux. Une usine ? 180.000. Des forces additionnelles ? 260.000 ! Autant dire qu’il faut énormément de temps avant de pouvoir faire quoi que ce soit, et qu’à chaque tour où vous attendez d’accumuler assez d’argent, les forces ennemies avancent…

Ce rythme (très) mal maîtrisé entraîne un deuxième problème : avec une séquence d’action tous les quinze ou vingt tours en début de partie, et sans doute tous les cinq ou six ensuite, les parties ne tardent pas à être longues. Non seulement passer une heure à enchaîner les deux mêmes séquences finit fatalement par se montrer répétitif, mais en plus, il est totalement impossible de sauvegarder, ce qui signifie que tout devra obligatoirement être fait d’une traite… ce qui nous amène au dernier problème : l’équilibrage. Comme on l’a vu, les phases d’action vont à l’essentiel : aucun moyen de gérer sa vitesse, tout se fait avec la souris. Ce qui signifie également que chaque fois que vous promenez le curseur dans la moitié inférieure de l’écran – au hasard, pour viser les troupes au sol – votre vaisseau plonge… vous exposant ainsi à percuter un arbre, un rocher ou un bâtiment comme il en défile des dizaines à la seconde. Problème : une collision vient endommager votre bouclier, lequel n’a que six points de vie. Si votre vaisseau est détruit, vous avez perdu : game over direct, aucun continue ! Et le pire ? Votre bouclier n’est pas rechargé automatiquement entre les missions et vos ingénieurs mettent un temps infini, même avec quatre ou cinq usines, pour vous proposer de le recharger ! Autant dire que pour survivre plus de dix minutes, il vous faudra déjà pas mal d’entraînement…

Le problème, c’est que le gameplay à la Space Harrier est précisément l’un de ceux qui survit le moins bien à la répétition en boucle et sur la durée des mêmes séquences. C’est amusant cinq minutes – et c’était sans doute techniquement impressionnant à l’époque – mais on ne peut pas dire que ça se renouvelle beaucoup, et quand en plus la marge d’erreur est aussi ténue, le déroulement aussi punitif et l’action aussi peu variée, on ne peut s’empêcher de penser que les développeurs ont naïvement tenté d’étirer sur une heure de jeu un concept qui, en l’état, à de quoi tenir dix minutes.

Le plus frustrant est de se dire qu’avec un peu plus de profondeur – des séquences d’action un peu plus techniques, une phase de gestion plus aboutie –, il y aurait eu matière à aboutir en peu de temps à un concept vraiment prenant sur la durée et qui aurait eu le mérite d’être demeuré relativement original même avec trente-cinq ans de recul. Las ! Comme trop souvent sur Amiga, on a davantage affaire à une démo technique trop rapidement repeinte en jeu, et ce qui aurait pu être un logiciel marquant n’est finalement qu’un C.V. pour codeurs et artistes en quête d’un C.D.I. dans un plus gros studio. Reste un logiciel qui a son charme et auquel on peut se surprendre à consacrer plus de temps que ce qu’on avait prévu… mais cela ira quand même rarement au-delà d’une heure de votre vie – et encore, à condition d’être patient. Telle était trop souvent la condition de l’amateur de jeux d’action, en 1990…

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 12,5/20

ShockWave est un cas d'école d'un bon concept porté par une bonne réalisation et plombé à la fois par un équilibrage déficient et par un manque total de profondeur. Sur le papier, le mélange entre gestion, stratégie et action a tout pour bien fonctionner : les mécanismes sont simples, les objectifs sont clairs, les séquence s'enchainent sans (trop de) de temps morts. Seulement voilà : quand la partie gestion se limite pour l'essentiel à passer 95% de son temps à cliquer sur « Wait » et que la partie action est essentiellement un clone de Space Harrier à la jouabilité imparfaite, on sent rapidement qu'on a fait le tour de la question – surtout quand la difficulté empêche d'étirer plus de quelques minutes des parties qui exigeraient des heures, et où il est impossible de sauvegarder. C'est d'autant plus dommage qu'il ne manquait vraiment pas grand chose au titre de Light Source Productions pour se montrer addictif et s'en aller rejoindre des Carrier Command au panthéon des jeux visionnaires, mais il ne reste au final qu'un petit logiciel oubliable. Frustrant.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– De très longues parties où il est impossible de sauvegarder
– Des séquences d'action bien réalisées mais beaucoup trop limitées...
– ...tout comme les séquences de gestion où l'on a finalement très peu de décisions à prendre

Bonus – Ce à quoi peut ressembler ShockWave sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Les softs basés sur un mélange entre réflexion et shoot-them-up sont rarement une réussite, mais pour une fois la recette fonctionne. On passe d’une phase à l’autre avec beaucoup de naturel et cette alternance relance sans cesse l’intérêt de jeu. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°84, décembre 1990, 14/20

Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Titre original : あっかんべえだあ (Akkanvader – Japon)
Testé sur : Arcade

La série Space Invaders (jusqu’à 2000) :

  1. Space Invaders (1978)
  2. Deluxe Space Invaders (1979)
  3. Space Invaders II (1980)
  4. Return of the Invaders (1985)
  5. Space Invaders : Fukkatsu no Hi (1990)
  6. Super Space Invaders ’91 (1990)
  7. Space Invaders DX (1994)
  8. Space Invaders (1994)
  9. Space Invaders : Virtual Collection (1995)
  10. Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies (1995)
  11. PD Ultraman Invader (1995)
  12. Space Invaders 2000 (1998)
  13. Space Invaders (Game Boy Color) (1999)
  14. Space Invaders (1999)

Version Arcade

Date de sortie : 14 Juin 1995 (International)
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langues : Anglais, japonais
Support : Borne
Contrôleurs : Un joystick (huit directions) et un bouton
Version testée : Version export
Hardware : Processeurs : Motorola MC68EC020 16MHz ; Motorola MC68000 15,238090MHz ; ES5510 10MHz
Son : Haut-parleur x2 ; Taito Ensoniq Sound System ; Ensoniq 5505/5506 to 5510 interface 29,761kHz ; Ensoniq ES5505 15,238090MHz ; 2 canaux
Vidéo : 320 x 224 (V) 58,97Hz

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Même avec l’appui du temps, il reste difficile de déterminer s’il vaudrait mieux féliciter Taito d’avoir entretenu la flamme de sa licence la plus ancienne et la plus iconique au fil des décennies, ou plutôt leur reprocher d’y avoir apporté si peu de choses, alignant les épisodes « hommage » paresseux avec la même ferveur que les moines catholiques du moyen-âge sortant les reliques sacrées au passage de la moindre procession.

Difficile d’isoler un titre marquant dans la dizaine d’opus que comptait déjà la saga alors qu’elle s’approchait de son dix-septième anniversaire, et les rares logiciels à avoir tenté d’apporter quelque chose d’un peu neuf à la licence semblaient avoir été les plus rapidement oubliés de tous – un énième signe de cet éternel paradoxe selon lequel les joueurs aiment bien le changement, mais pas trop. Bref, et pour dire les choses crument, à force de reparaître régulièrement en s’efforçant de ne jamais toucher à la moindre molécule d’un gameplay qui datait des prémices de l’arcade, quitte à n’offrir que des déclinaisons purement cosmétiques à la Space Invaders DX ou à la Space Invaders : Virtual Collection, la fameuse série de Taito commençait à sérieusement sentir la naphtaline, pour ne pas dire le sapin, et chaque nouvelle itération était reçue avec le soupir blasé qui accompagne l’annonce de la quatorzième tournée d’adieux de l’ancienne star fossilisée qui n’a pas ajouté la moindre chanson à son répertoire depuis la fin des yéyés. À tel point que l’opinion était déjà arrêtée en voyant débarquer Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies : « Encore le même jeu avec un coup de peinture ».

Grave erreur.

Dès les premières secondes, on constate l’ajout de petites touches qui ne révolutionnent certes pas le concept du jeu – on est toujours face au proto-shoot-them-up que l’on a toujours connu, avec son orientation verticale et le vaisseau du joueur solidement vissé au bas de l’écran – mais qui nous indiquent que celui-ci pourrait bien, contre toute attente, proposer enfin quelques surprises. Le simple écran de lancement qui suit l’écran-titre nous enseignera d’ailleurs trois choses :

  1. Il est possible de choisir un personnage (et son véhicule dédié) parmi cinq, et chacun d’entre eux se trouve avoir une spécificité en plus de son look bien à lui : un tir chargé qui n’aura pas le même effet d’un héros à l’autre. Par exemple, celui de Dan à bord de son « Teke-Teke » permet de transpercer directement toute une colonne d’ennemis, alors que celui de Sayo-Chan dans son « Amulet » en forme de Tori déclenchera une explosion au premier adversaire touché, permettant de nettoyer une large zone autour du point d’impact, etc. Un très bon moyen d’offrir au joueur l’occasion de se choisir un petit chouchou correspondant parfaitement à sa façon de jouer
  2. Le jeu encourage fortement un deuxième joueur à participer, mais ce n’est pas ici pour affronter le premier dans un mode « Versus » à la Space Invaders DX ; le multijoueur se trouve ici, pour la première fois de la série, être exclusivement… coopératif. Hé, après tout, quitte à repousser une invasion extraterrestre, qu’est-ce qui devrait interdire de le faire à deux ?
  3. Le look général, si coloré qu’on pourrait le décrire comme étant « acidulé », fait immédiatement penser à celui d’un titre comme Parodius, ce qui permet mine de rien de doter cet épisode d’un trait qui tendait à manquer à la série de Taito : de la personnalité.

De fait, sitôt la partie commencée, on ne peut qu’apprécier le travail effectué sur la réalisation du jeu. De la variété des ennemis à celle des décors, non seulement on est heureux de débarbouiller un peu le gris de la licence (pour citer un chanteur que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître), mais on est aussi et surtout ravi de réaliser que la variété semble s’être installée à tous les niveaux du jeu, et pas seulement à celui des ses graphismes (charmants) et de sa musique (efficace).

Car non seulement il se passe toujours mille chose à l’écran – jusqu’à en faire surgir des ennemis ENTRE les vagues, parfois le temps d’un stage bonus – mais ce sont aussi et surtout les vagues en question qui se mettent à être imaginatives. Fini, les ennemis éternellement en rangs d’oignon : il leur arriver de se décaler, de descendre, de remonter, de débarquer par tous les côtés, de partir en farandole, d’appeler du renfort, de lâcher des bombes avant de partir… en fait, plus on joue, et plus on réalise que le titre, davantage que le Space Invaders ’95 qu’en a fait la localisation occidentale, ressemble furieusement à la suite directe d’un épisode qui fêtait alors justement ses dix ans : Return of the Invaders. Idée géniale : pour s’affranchir un peu du monstre sacré que semblait être ce premier opus, pourquoi ne pas s’inspirer de l’un des rares épisodes à avoir osé s’éloigner d’un millimètre de la formule originale ? Eurêka.

Car la meilleure surprise reste l’efficacité salutaire qu’offre ce coup de chiffon, réintroduisant enfin le fun à l’état pur dans une saga qui commençait à s’encrouter furieusement.

Tout va beaucoup plus vite, dans Space Invaders ’95 : votre vaisseau mitraille plus qu’il ne tire, un niveau peut souvent être vaincu en à peine plus d’une demi-minute, ça bouge de partout, on est constamment surpris par les petites trouvailles qui n’hésitent pas à changer les règles périodiquement – quitte à ce que le fait que les ennemis atteignent le bas de l’écran ne soit parfois plus un problème ! – et entre les boss bien pensés, l’esthétique très agréable à l’œil et la nervosité de l’ensemble qui donne parfois l’impression de faire face à un manic shooter, le constat est édifiant : on s’amuse. Alors certes, il n’est plus nécessaire de déployer des trésors de précision et de stratégie pour parvenir à vaincre une vague de façon optimale – mais bon sang, on s’en fout ! Il y a aussi des fois où jouer aux purs réflexes en se laissant surprendre par la prochaine idée de la borne est pleinement satisfaisant, et on ne pourra d’ailleurs que se lamenter que, à l’instar de son prédécesseur, ce titre n’ait tout simplement jamais quitté les salles d’arcade – Taito étant visiblement plus pressé de proposer une énième réédition du premier opus plutôt que de chercher à séduire de nouveaux joueurs avec un épisode remis au goût du jour. Un choix aussi étrange que dommageable.

Certes, par essence, le concept du jeu finit fatalement par redevenir répétitif, et on est plutôt heureux, au terme de la bonne demi-heure que nécessitera la campagne solo pour être vaincue, que le titre n’ait pas cherché à allonger la sauce jusqu’à l’inévitable ennui.

Il aurait pu y avoir davantage de power-up, davantage de modes de jeu – notamment du côté du multijoueur, qui n’était pas obligé de tirer un trait sur l’aspect compétitif –, quelques possibilités s’aventurant un peu plus loin que le simple tir chargé. Surtout, on se doute bien que le titre, pour authentiquement fun qu’il soit, ne correspondait clairement pas à ce que les joueurs venaient chercher dans les salles d’arcade en 1995 – il aurait certainement été mieux accueilli trois ou quatre ans plus tôt. Bref, on a l’impression que Taito cherchait parfois à saboter volontairement toute tentative de dépoussiérer un peu la licence, en n’offrant que très peu de promotion aux épisode les plus imaginatifs et en s’assurant qu’ils n’atteignent jamais les systèmes domestiques. Dommage… reste malgré tout un titre auquel vous n’avez vraisemblablement jamais joué, et dès l’instant où vous souhaiteriez vous réconcilier un peu avec une saga au gameplay immortel, mais daté, c’est certainement cette borne qui devrait vous servir de point de départ. Hé, et puis tant qu’à faire, profitez-en pour inviter un ami !

Vidéo – Le premier round du jeu :

NOTE FINALE : 15/20

Après une série de remakes fainéants et autre pseudo-suites poussives qui nous amenaient à penser que la saga était définitivement arrivée à court d'idées, Space Invaders '95 : The Attack of the Lunar Loonies vient nous démontrer qu'il n'en fallait finalement pas des dizaines pour refaire du titre de Taito un jeu ludique, nerveux, et même souvent surprenant. Bien que s'approchant davantage dans l'esprit d'une refonte de Return of the Invaders, cette version qui lorgne parfois du côté du manic shooter introduit enfin une variété appréciable où reproduire sempiternellement les mêmes stratégies ne sert à rien et où on peut espérer s'amuser en jouant aux réflexes – ou mieux encore, avec un ami. Révolutionnaire ? Clairement pas, mais dans sa mission de dépoussiérer un concept de dix-sept ans d'âge pour lui réinjecter le peps et le fun qu'il avait fatalement commencé à perdre avec le temps, cette épisode met clairement dans le mille. À découvrir !



CE QUI A MAL VIEILLI :

– Le jeu aurait pu proposer un peu plus de power-up, peut-être ?
– Quitte à introduire le mode deux joueurs coopératif, pourquoi avoir tiré un trait sur le mode compétitif ?

Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Space Invaders ’95 sur une borne d’arcade :

Fire & Forget II

Développeurs : Jean-Michel Masson, Laurent Cluzel et Billy Noël
Éditeur : Titus France S.A.
Titre alternatif : Fire & Forget II : The Death Convoy (écran-titre – Amiga, Atari ST, PC (DOS))
Testé sur : AmigaAmstrad CPC/GX4000Atari STCommodore 64Master SystemPC (DOS)
Disponible sur : Antstream
Présent au sein des compilations :

  • 10 Great Games (1994 – PC (DOS))
  • Fox Hits CD N°1 (1994 – PC (DOS))

La série Fire and Forget (jusqu’à 2000) :

  1. Fire and Forget (1988)
  2. Fire & Forget II (1989)

Version Amiga

Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quoi qu’on ait pu penser de Fire and Forget premier du nom, le fait est que le titre du jeu (bien trouvé, il faut le reconnaître) sera bel et bien resté dans les mémoires des joueurs sur ordinateur des années 80, sans doute bien aidé en cela par un marketing assez agressif de Titus dans la presse spécialisée française – et par des articles souvent très complaisant de ladite presse, qui n’avait que rarement envie de se fâcher avec les entreprises qui lui achetaient des pages de publicité.

Un sondage effectué par mes soins sur un échantillon absolument pas représentatif tend à dévoiler une tendance édifiante : Fire and Forget correspond tout à fait à l’archétype de ce jeu dont tout le monde avait entendu parler, dont tout le monde avait vu la pub, et auquel pratiquement personne n’avait joué, mais la curiosité pour s’y essayer dût une copie malencontreusement piratée du jeu se présenter était réelle. Quoi qu’il en soit, à une époque où Titus était un nom qui comptait dans la production française – ne fut-ce que via la série des Crazy Cars – le succès de ce premier opus aura visiblement été suffisant pour justifier une suite, quitte à mobiliser une nouvelle équipe pour l’occasion. Exit donc Alain Fernandes et Olivier Corviole, entrent Jean-Michel Masson au codage et Laurent Cluzel (que nous avions eu l’occasion d’interviewer ici) et Billy Noël aux graphismes, pour un Fire & Forget II qui aura cette fois été développé sur Amiga.

Autant le préciser d’emblée, ce nouvel opus est autant une suite qu’une relecture du premier épisode. La paix mondiale a visiblement échoué à être assurée par votre buggy surarmé dans le premier jeu, puisque non seulement les vilains terroristes courent toujours, mais qu’ils ont cette fois carrément décidé d’aller raser une ville où se tient justement un congrès international pour la paix avec rien de moins qu’une bombe atomique.

Heureusement, plutôt que d’utiliser un bombardier furtif ou même un Metal Gear, nos méchants désignés ont visiblement dilapidé tous leurs revenus dans l’achat de l’ogive puisqu’il se mettent en tête d’attaquer tout bêtement par la route. Cela tombe bien : c’est justement le terrain de prédilection de votre super buggy, le THUNDER MASTER II (ça claque mieux en lettres capitales), qui dispose pour l’occasion de nouvelles capacités… à commencer par celle de se transformer en engin volant, probablement grâce aux ingénieurs venus de Xenon. Ces possibilités inédites vont donc vous permettre de faire… ben exactement la même chose que dans le premier opus, pour être honnête, mais après tout, pourquoi changer une formule qui ne marchait pas ?

On reprend donc les mêmes éléments : tout d’abord, une route qui va représenter l’unique terrain de jeux des cinq niveaux que compte le programme, systématiquement bordée d’un désert post-apocalyptique (ils ne l’ont pourtant pas encore faite sauter, cette bombe ?) qui ne se renouvèle pas beaucoup, surplombé par un magnifique ciel strié de nuages qui ne se renouvèlera pas des masses, lui non plus, puisque chaque nouvel environnement sera surtout l’occasion de reprendre les mêmes graphismes avec un color swap.

En haut de l’écran, une interface, avec un compteur qui vous indique la distance vous séparant de la tête du convoi (un camion qui fera office de boss à chaque étape), deux jauges de carburant (une pour la route et une pour le vol) que vous pourrez remplir, comme dans le premier opus, en roulant sur les jerricans appropriés, et un compteur de vies et de missiles, puisque votre véhicule dispose désormais de deux types de munitions. Comme vous vous en doutez, les missiles en nombre limité seront à réserver aux adversaires les plus coriaces et surtout les plus dangereux, puisque ce n’est pas moins d’une trentaine de véhicules adverses qui viendront se placer sur votre route, et qu’entrer en contact avec eux ou un de leurs tirs signifiera la perte immédiate d’une de vos vies. Et oui, vous pouvez aussi en perdre une en tombant à court de carburant. Il faut bien pimenter un peu les choses !

Sur le papier, l’équipe de développement s’est efforcé de conserver ce qui faisait la force de Fire and Forget (sa réalisation) tout en s’efforçant à la fois de pousser les curseurs un peu plus haut et d’adresser certains des manques du premier opus, à commencer par un manque criant de variété et de profondeur. Dans les faits, la mission est plutôt bien remplie sur le plan technique : la sensation de vitesse est bien rendue, la distance d’affichage est meilleure, ce qui permet de voir les ennemis arriver de plus loin – d’où une difficulté théoriquement un peu moins punitive. Certes, on aurait vraiment aimé bénéficier de décors plus variés, d’éléments de bas-côtés ou de petites touches pour ne pas donner l’impression de parcourir la même route d’un bout à l’autre, mais on appréciera quelques ajouts bien vus, comme ces ennemis qui viennent vous voler votre carburant et qu’il faudra détruire à leur départ – en passant en position de vol – pour récupérer votre bien. Le vrai problème, hélas, est que le game design est une nouvelle fois mort-né, et qu’il suffit de jouer trente secondes pour constater d’énormes manques que personne n’aura jugé utile de corriger avant d’envoyer le jeu dans les bacs. On pourrait déjà arguer que la fameuse possibilité de se transformer en machine volante n’apporte pratiquement rien en-dehors du fait de permettre d’atteindre des ennemis qui ne peuvent être touchés que sous cette forme.

On ne peut pas l’utiliser pour éviter des pièges ni pour contourner des défenses, et on vient à se dire que le jeu aurait sans doute gagné à vous placer directement aux commandes d’un véhicule volant et à axer son gameplay sous cet angle plutôt que d’offrir une idée gadget dont on cherche encore l’utilité réelle. Plus grave : comme dans le premier opus, il est rigoureusement impossible d’anticiper quoi que ce soit dès l’instant où on roule à pleine vitesse : il arrive fréquemment qu’on se mange un ennemi pourtant placé à deux mètres de nous à cause de masques de collision catastrophiques, et si un adversaire commence à ouvrir le feu, les projectiles sont si rapides que vous n’aurez probablement même pas le temps de comprendre ce qui vous a détruit. Dès lors, il est à peu près impossible d’anticiper quoi que ce soit sans connaître l’ordre d’arrivée des ennemis par cœur, car bien évidemment la seule solution qui eut pu paraître intelligente – rouler moins vite – vous condamnera systématiquement à mort, les réserves de carburant étant placées à des distances qui vous obligeront à être pied au plancher en permanence pour espérer les atteindre avant la panne sèche. Du génie, qu’on vous dit.

Dès lors, on comprend la prétention de Fire & Forget II à chercher à tout prix à se faire passer pour un jeu d’arcade, quitte à marquer « insert coins » sur l’écran-titre ou même à réutiliser – vraisemblablement sans autorisation – l’écran « Winner don’t use drugs » qui figurait sur les bornes américaines ! Petit problème : l’arcade de l’âge d’or reposait sur trois ingrédients qui lui étaient spécifiques : une réalisation dont le propre était précisément d’être inaccessible aux systèmes domestiques, une efficacité immédiate et surtout, le plaisir de pouvoir s’y lancer pour le prix d’une baguette de pain.

Dépouillé de tous ces éléments pour proposer un titre à la réalisation correcte mais sans plus, vendu 300 francs sur une machine en coûtant 4500 et offrant une jouabilité pensée avec les pieds où n’a jamais le sentiment de contrôler quoi que ce soit, on obtient un logiciel à la durée de vie de cinq minutes qui est une sorte d’appel international au piratage tant on imagine la mine déconfite des joueurs l’ayant acquis au prix fort pour avoir la furieuse envie d’aller le ranger dans sa boîte au terme de la première partie. Ce n’est pas que le jeu soit intrinsèquement mauvais ou sa jouabilité honteuse, c’est juste qu’il n’y a tout simplement pas assez de matière pour s’y intéresser plus d’une poignée de minutes, tant tout ce qui pourrait rendre l’expérience défoulante ou grisante à défaut d’être variée a oublié d’être là. L’avatar d’une certaine époque où on ne se posait pas des millions de questions en développant un jeu – à commencer par la plus évidente : « est-ce que quelqu’un serait réellement prêt à payer 300 francs (NdRA : l’équivalent de 81,30€ de 2025 en tenant compte de l’inflation) pour jouer à ça ? ». Voilà peut-être pourquoi tout le monde se souvient du nom du jeu et de pas grand chose d’autre : il y a des programmes dont la meilleure place est dans les publicités des magazines, ou dans la boîte à chaussure de disquettes copiées. Celle qui porte l’étiquette « jeux chiants » et qu’on n’ouvre jamais.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 09/20

Avec une nouvelle équipe aux commandes – mais une philosophie intacte –, Fire and Forget II propose indéniablement une version mieux réalisée, plus jouable et un peu plus consistante de ce qu'offrait son prédécesseur... mais ça ne suffit toujours pas. Cherchant toujours aussi naïvement à dissimuler le manque absolu de profondeur de son gameplay derrière un aspect arcade revendiqué, le titre de Titus peut dégainer ses meilleurs color swaps de ciels ou même permettre à son buggy de voler, il n'a toujours pas grand chose de plus à offrir que de foncer tout droit en tirant en n'ayant à peu près jamais le temps de comprendre ce qui vient de nous détruire. Vaguement ludique à (très) faibles doses, le logiciel a dévoilé l'intégralité de ses possibilités au bout de vingt secondes, et comme il ne peut même plus compter aujourd'hui sur sa réalisation pour donner le change, il ne mettra vraisemblablement pas longtemps à finir dans la même boîte à chaussure que Fire and Forget premier du nom, là où est objectivement sa place.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une jouabilité toujours aussi limitée...
– ...avec un mécanisme de vol très mal exploité
– Un équilibrage qui empêche toute forme de subtilité
– Des environnements qui n'offrent pratiquement aucune variété...
– ...mais c'est toujours mieux que l'action qui, elle, n'en offre aucune.

Ce à quoi peut ressembler Fire & Forget II sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Malgré son action relativement simple, ce croisement de simulation automobile et de shoot-them-up est vraiment passionnant. Son excellente réalisation y est certainement pour beaucoup. […] Beau et accrocheur, Fire and Forget II (sic) est un soft simple mais séduisant à « l’efficacité console ». »

Olivier Scamps, Tilt n°84, décembre 1990, 15/20

« Un plaisir simpliste qui ne retiendra pas l’attention du joueur très longtemps. »

Raze n°3, janvier 1991, 65% (traduit de l’anglais par mes soins)

Version Amstrad CPC/GX4000

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joypad*, joystick
*version GX4000 uniquement
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad 6128 Plus & version cartouche testée sur GX4000
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Vidéo – L’écran-titre du jeu (version Amstrad CPC Plus/GX 4000) :

Toujours très populaire en France au début des années 90, le CPC aura bénéficié de pas moins de deux version de Fire & Forget II, Titus faisant partie des (très) rares développeurs à avoir accordé une chance à l’éphémère console GX4000 (et, par extension, à la gamme « Plus » de l’ordinateur). Dans sa version « de base » à destination des CPC « ordinaires », le jeu est bien évidemment moins fin et moins coloré que sur Amiga, mais les graphismes n’en sont pas pour autant désagréables et la sensation de vitesse est correcte. En fait, le fait que l’action soit un peu moins rapide rend même cette version plus jouable que la version Amiga – ce qui ne résout hélas pas le problème du total manque de profondeur et de variété du jeu, sans compter que le titre devient ici trop facile. Dans sa version cartouche à destination de la gamme « Plus », le jeu hérite pour l’occasion d’un nouvel écran-titre et d’une réalisation rehaussée ; concrètement, les dégradés du ciel sont plus fins, il y a un peu plus de détails sur la route et il y a également davantage de bruitages. Par contre, le jeu est plus lent que dans la version de base, et on ne peut pas dire que l’action soit trépidante. Autant dire que si les deux versions n’ont rien d’honteux à l’échelle de la ludothèque de la machine, elles accusent en revanche un gros coup de vieux – mais on ne peut pas dire qu’on s’amuse infiniment moins que sur Amiga. Il faut dire que cela aurait été difficile.

NOTE FINALE : 08,5/20

Décliné en deux version sur CPC, Fire & Forget II doit hélas composer avec exactement les mêmes limites que sur Amiga, tout en compensant ses quelques sacrifices graphiques et sonores par une jouabilité mieux équilibrée où le joueur a enfin le temps de voir arriver les ennemis… ce qui tend à rendre le jeu trop facile La version cartouche, certes légèrement plus détaillée, est également plus lente.

Les avis de l’époque :

« Fire and Forget II (sic) n’est pas vraiment une réussite. Non pas que l’adaptation sur GX4000 soit très décevante (l’animation est un peu saccadée). C’est surtout le jeu en lui-même qui n’est pas passionnant. Les ennemis sont trop faciles à vaincre. Il suffit de tirer à tout va. »

Olivier Hautefeuille, Tilt n°87, février 1991, 07/20

Version Atari ST

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Évidemment, pas question pour Fire & Forget II de faire l’impasse sur l’Atari ST, autre grand chouchou des développeurs français sur la période. Les développeurs de chez Titus ayant eu à de nombreuses reprises l’occasion de démontrer qu’ils étaient très à l’aise avec la machine, on s’attend à une version à la hauteur sur le plan technique et on n’est pas déçu : il y a moins de couleurs que sur Amiga et les teintes choisies sont un peu différentes, mais on ne peut pas dire que la différence soit très marquante, d’autant que la sensation de vitesse, elle, est toujours excellente. Il est possible de choisir entre la musique, les bruitages ou les deux, et dans tous les cas la performance est au rendez-vous. Alors non, le jeu n’est pas miraculeusement devenu bon pour autant, mais en tant que pur portage, c’est inattaquable.

NOTE FINALE : 09/20

Ce n’est pas avec Fire & Forget II que l’Atari ST aura de gros complexes à nourrir vis-à-vis de l’Amiga ; comme souvent, les développeurs français ont parfaitement fait le travail, et les quelques sacrifices opérés sont à peine décelables. On a donc un titre toujours aussi limité, mais pas davantage. On s’en contentera.

Version Commodore 64

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Quitte à viser le marché international, Fire & Forget II aurait été bien naïf de ne pas tenter sa chance sur LE monstre sacré de l’ère 8 bits, à savoir le Commodore 64. Le portage, assuré pour l’occasion par quelqu’un qui aura visiblement préféré ne pas se faire connaître au point de signer « Ian Cognito », est pourtant indéniablement solide sur le plan technique ; certes, ce n’est pas très coloré, mais la sensation de vitesse est excellente et le véhicule répond au quart de tour. En revanche, pour ce qui est de l’équilibrage, on retrouve les travers de la version CPC en pire : on peut littéralement passer la quasi-totalité du jeu à rouler à fond au milieu de la route sans jamais cesser de tirer et ne rencontrer aucune difficulté. Pour donner un exemple, j’ai laissé le jeu tourner avec ma voiture lancée à fond pendant que je partais à la recherche du manuel pour connaître les touches, et à mon retour, près d’une minute plus tard, mon véhicule n’avait même pas une égratignure ! Et, comme sur Amiga, les rares fois où l’on meurt, on ne sait généralement pas trop comment ni pourquoi. Bref, encore une fois, un jeu qui aurait pu faire illusion si seulement il avait présenté un intérêt plus de vingt secondes.

NOTE FINALE : 08,5/20

Techniquement solide et parfaitement jouable sur Commodore 64, Fire & Forget II s’y enfonce également dans sa propre caricature en démontrant définitivement qu’il suffit de foncer en tirant pour venir à bout de l’aventure. Ce n’est pas tant que ce qui est à l’écran soit mauvais, c’est surtout que l’intérêt de la chose se chiffre en minutes, dans le meilleur des cas. Bref, à réserver aux joueurs qui comptaient de toute façon jouer en mode invincible sur une version crackée pour ne pas avoir à se fatiguer.

Les avis de l’époque :

« Une fois qu’on a parcouru les premiers niveaux, vu et revu les mêmes graphismes et subi à plusieurs reprises une mort aléatoire, l’intérêt s’effondre. C’est soporifique, mal conçu et barbant à jouer. Vous feriez aussi bien d’oublier celui-ci. »

Steve Jarratt, Commodore Format n°6, mars 1991, 37% (traduit de l’anglais par mes soins)

Version Master System

Développeurs : Gilles Espeche et Laurent Cluzel
Éditeur : SEGA Enterprises Ltd.
Date de sortie : Novembre 1990 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

De façon plus surprenante, Fire & Forget II aura également tenté sa chance sur console – uniquement sur Master System, là où on aurait pu penser que la NES aurait représenté un marché plus porteur, mais ça n’était visiblement pas l’avis de Titus. Quoi qu’il en soit, le portage est un nouveau signe de la qualité des codeurs du cru : en tant que pur jeu de course, l’animation est fluide et le jeu n’a clairement pas à nourrir de complexes face à OutRun ou Chase H.Q. sur la même console. Un bouton sert à tirer, l’autre à décoller et il faut appuyer sur les deux en même temps pour tirer un missile, pourquoi pas. Malheureusement, comme dans les autres versions, l’équilibrage ne connait que deux vitesses : ballade totale ou bien dégommé en un milliardième de seconde par un projectile impossible à voir venir. Dès lors, ce qui aurait pu constituer un jeu d’action sympa s’en va rejoindre les oubliettes de l’histoire, faute d’avoir autre chose à offrir que de rouler vite sans avoir une véritable prise sur ce qui se passe.

Ah, ça bouge bien, ça va. Dommage que ça ne fasse pas grand chose d’autre.

NOTE FINALE : 09/20

Bilan identique à celui des autres versions pour Fire & Forget II sur Master System : techniquement, ça tient la route, mais où est le jeu ? Est-ce que quelqu’un aurait le numéro d’un game designer ? Avec un peu de pratique et énormément de patience, il y a dix minutes à tuer, mais autant aller jouer directement à autre chose.

Version PC (DOS)

Développeur : Titus France S.A.
Éditeur : Titus France S.A.
Date de sortie : Novembre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, MCGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1990, les sociétés de développement françaises commençaient doucement à s’éveiller à la possibilité que le PC puisse représenter une machine de jeu descente – et qu’il serait une mauvaise idée pour un jeu dépendant aussi lourdement de son aspect technique que l’était Fire & Forget II de débarquer la bouche en cœur avec des graphismes en CGA et le haut-parleur interne comme seul recours sonore. Bonne nouvelle : le titre reconnait donc à la fois les cartes VGA et les carte AdLib – rien de plus, hélas, mais on à cette fois les bases pour une version correcte. Laquelle s’avère au final… être un clone quasi pixel perfect de la version Atari ST – sans les dégradés dans le ciel, mais on s’en remettra. Comme sur Atari, seule la musique est activée par défaut, il faudra appuyer sur F3 en cours de jeu pour activer également les bruitages. Dans ces conditions, on se retrouve avec une expérience très équivalent à celle observée sur la machine d’Atari – pour le meilleur comme pour le pire.

NOTE FINALE : 09/20

L’histoire se répète pour Fire & Forget II sur PC : cohérent techniquement (où il fait malgré tout à peine aussi bien que la version ST), le titre n’a malheureusement pas grand chose à offrir passé les cinq premières minutes de jeu. À réserver aux nostalgiques.

Space Invaders : Virtual Collection

Développeur : Taito Corporation
Éditeur : Taito Corporation
Graphie originale : Space Invaders : Vitual Collection – スペースインベーダー バーチャルコレクション (Japon)
Testé sur : Virtual Boy

La série Space Invaders (jusqu’à 2000) :

  1. Space Invaders (1978)
  2. Deluxe Space Invaders (1979)
  3. Space Invaders II (1980)
  4. Return of the Invaders (1985)
  5. Space Invaders : Fukkatsu no Hi (1990)
  6. Super Space Invaders ’91 (1990)
  7. Space Invaders DX (1994)
  8. Space Invaders (1994)
  9. Space Invaders : Virtual Collection (1995)
  10. Space Invaders ’95 : The Attack of the Lunar Loonies (1995)
  11. PD Ultraman Invader (1995)
  12. Space Invaders 2000 (1998)
  13. Space Invaders (Game Boy Color) (1999)
  14. Space Invaders (1999)

Version Virtual Boy

Date de sortie : 1er décembre 1995 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Japonais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise
Spécificités techniques : Cartouche de 4Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

On se pose souvent la question de savoir comment une entreprise comme SEGA ou Nintendo aurait dû s’y prendre pour parvenir à (mieux) vendre telle ou telle console à son lancement, mais on la pose souvent moins du point de vue des développeurs tiers faisant le choix – pour ne pas dire le pari – de lancer un titre sur une machine dont le succès – et par ricochet celui des jeux proposés dessus – n’est pas encore acquis. Parfois, un logiciel de lancement devient un programme iconique, voire quasiment une mascotte pour la console dont il aura a accompagné les premiers pas, à la façon du Ridge Racer de Namco pour la PlayStation.

Mais très souvent, il est jugé plus prudent d’avancer ses billes avec précaution, surtout quand la console en elle-même a de quoi laisser perplexe. Le cas de la Visual Boy est un cas d’école : a priori, difficile de se tromper en misant sur Nintendo dont même les échecs se chiffrent en dizaines de millions d’exemplaires vendus, mais ce qui se sera rapidement révélé comme le plus effroyable bide de la compagnie japonaise (770.000 consoles ayant trouvé preneur, une sortie européenne annulée en catastrophe, une ludothèque de seulement 22 jeux) avait de quoi attirer la méfiance depuis le début. Une console portable qui n’est pas portable et qui nécessite un trépied ? Une console 32 bits qui n’affiche que quatre nuances de rouge ? Et ce fameux effet 3D, comment en tirer parti ? Face à toutes ces questions, les vieux briscards de chez Taito auront choisi l’approche prudente : comme elle l’avait déjà fait avec la Game Boy, en tâtant le terrain avec un des portages de Space Invaders les plus fainéants de tous les temps, la firme japonaise aura décidé de débarquer avec une de ses plus vieilles licences, et en prenant le moins de risques possible avec Space Invaders : Virtual Collection.

Comment vendre une console à la représentation 3D révolutionnaire ? Avec un jeu en 2D de 1978, pardi ! Selon la bonne vieille formule qui veut que rien ne coûte moins cher qu’un fond de catalogue, Space Invaders : Virtual Collection choisit donc fort logiquement de dérouler les sept épisodes de la licence l’ayant précédé et… ah, pardon, on le signale dans l’oreillette que cette « collection » se résume en fait à deux jeux : le Space Invaders de 1978 et la suite directe, le Deluxe Space Invaders de 1979 (présenté, fort logiquement, sous son titre japonais de Space Invaders II, à ne pas confondre avec le titre occidental portant le même nom paru en 1980).

Sachant que les différences entre ces deux opus inauguraux sont de l’ordre de la nuance, il y a de quoi rester un peu perplexe – mais pour la défense de Taito, on signalera que le câble devant permettre de relier deux Virtual Boy pour le multijoueur n’était pas encore disponible au moment de la sortie du jeu ; face au fiasco de la console, il ne l’aura d’ailleurs jamais été, il y a donc une forme de cohérence à ne pas pouvoir s’essayer à des titres proposant cette option. Mais bon, comme beaucoup de bornes d’arcade, Space Invaders est censé être un concept suffisamment ludique pour se suffire à lui-même, alors pour faire bonne mesure, cette collection comporte plusieurs ajouts qui valent la peine d’être détaillés un peu.

Commençons par la base de la base : le mode 2D. Ici, les choses sont très simples, on se retrouve avec le contenu et la réalisation des deux premiers opus, j’aurais aimé dire « en plus beau » sauf que la palette de quatre nuances de couleur de la machine l’empêche de faire mieux dans ce domaine que ce qu’avait déjà proposé la Game Boy quatre ans plus tôt. C’est littéralement la reproduction de la borne pixel perfect, en rouge sur fond noir, avec un seul crédit et aucune option de configuration – autant vous y habituer, d’ailleurs, car cela restera vrai pour tous les modes. S’y ajoute ensuite l’attraction principale : le mode 3D. Il s’agit donc d’un mode spécifiquement conçu pour la machine et ses fameuses capacités, et qui propose… exactement la même chose, mais en 3D.

Il y a quand même une image de fond pour remplacer le fond noir, histoire de bien figurer le bond technologique, mais qu’apporte donc ce fameux effet 3D en termes de gameplay ? Vous allez rire : strictement rien. Ou plutôt si : la vue choisie étant moins lisible, l’action en devient moins précise. Alors certes, il est difficile de rendre compte de l’immersion qu’est censé apporter ce fameux effet sur des captures d’écran en 2D, mais tous les joueurs ayant eu l’occasion d’en tester une version bien plus performante et sans lunettes sur leur 3DS en auront gardé exactement le même souvenir : celui du truc qu’on désactivait au bout de dix minutes parce que ça n’apportait rien et que c’était plus contraignant qu’autre chose. Ben là, c’est pareil. Mais attendez, petits gourmands ! Dans sa grande générosité, Namco aura décidé d’ajouter pas moins de deux modes de jeu supplémentaires – praticables exclusivement en 3D, eux, pour le coup – et qui correspondent à un time trial demandant d’exécuter un niveau le plus vite possible, et à un score trial demandant de faire le meilleur score possible. Impressionnant, hein ?

On ne va pas se mentir : Space Invaders restant Space Invaders, il y a indéniablement matière à tuer dix minutes pas désagréable sur cette cartouche, voire plus si vous êtres résolument un mordu de la licence. Reste que n’avoir rien de mieux à proposer en 1995 que deux bornes de respectivement dix-sept et seize ans d’âge en nuances de rouge avec deux modes de jeu gadget et un mode 2D qui sonne comme une excuse à l’inanité du mode 3D trahit à la fois le cynisme de Taito et le concept fondamentalement boiteux d’une console dont personne n’aura jamais su que faire.

Par ce titre, Taito venait prendre la température en combinaison intégrale chauffée plusieurs mois après la sortie de la console, et le fait que cette cartouche ne soit même pas sortie du Japon où la Virtual Boy ne s’était écoulée qu’à 140.000 exemplaires sonne rétrospectivement plutôt comme une bonne idée : difficile de reprocher à la firme japonaise sa méfiance vis-à-vis de qui avait déjà le goût, la couleur et la texture d’un gros bide. Reste que pour le joueur n’ayant pas grand chose à se mettre sous la dent, cette compilation extrêmement paresseuse ne représentait certainement l’occasion de rentabiliser enfin l’investissement initial – et à l’échelle du XXIe siècle, pourquoi aller s’essayer à ces vieux succès sur une machine limitée à quatre nuances de rouge et qui a de fortes chances de vous coller une migraine ou la nausée au bout d’un quart d’heure ? Bref, une curiosité ou un objet de collection, mais rien de suffisamment mémorable pour justifier de le déterrer aujourd’hui. Comme 99% de ce que la Virtual Boy aura eu à offrir, quoi.

Vidéo – Une partie lambda :

NOTE FINALE : 10,5/20

Il y avait plusieurs façons d'exploiter une machine aussi déstabilisante que la Virtual Boy, et avec Space Invaders : Virtual Collection, Taito aura opté pour la plus cynique de toutes : prendre les deux premiers épisodes d'une série débutée dans les années 70, les offrir tels quels en quatre couleurs et avec un effet 3D si peu lisible qu'il en est d'ailleurs facultatif, y ajouter deux modes de jeu insignifiants pour faire bonne mesure, et ta-da ! Voilà une petite cartouche bouche-trou dont on fait le tour en dix minutes et qui apparaîtra rétrospectivement comme une des multiples incarnations des raisons de l'échec de la console de Nintendo, machine dont personne n'aura jamais trop eu le temps de comprendre quoi faire ni comment. Pour le joueur actuel, il ne reste vraiment pas grand chose de plus qu'une sorte de version Game Boy en nuances de rouge et qui peut vite coller la migraine. De quoi se divertir quelques parties, tout au plus, mais on comprend que les joueurs de 1995 aient attendu des logiciels un peu plus ambitieux pour leur console à 175$.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un contenu objectivement famélique
– Un effet 3D plus gênant qu'autre chose

Solaris

Développeur : Atari Corporation
Éditeur : Atari Corporation
Titre alternatif : The Last Starfighter (prototype)
Testé sur : Atari 2600
Disponible sur : Antstream, Plex Arcade

La série Star Raiders (jusqu’à 2000) :

  1. Star Raiders (1980)
  2. Star Raiders II (1986)
  3. Solaris (1986)

Version Atari 2600

Date de sortie : Novembre 1986 (Amérique du Nord) – 1988 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb

Il existe des logiciels qui portent sur leurs frêles épaules le point de si nombreuses références qu’on se demande comment ils font pour ne pas craquer avant même la fin de leur développement. Prenons l’exemple du jour : Solaris. Pour les bibliophiles assidus, le titre assume déjà une filiation évidente avec le roman de Stanislaw Lem ; pour les cinéphiles, il évoquera ses deux adaptations, par Tarkovski puis par Soderbergh trente ans plus tard.

Cela pourrait déjà être lourd à assumer (même si on m’objectera, à raison, que le film de Sorderbergh n’existait pas encore en 1986), mais il faut en plus y rajouter un autre long-métrage : The Last Starfighter (devenu simplement Starfighter en France), qui correspond, pour l’occasion, au titre du prototype du jeu. Comme si cela ne suffisait pas, la cartouche doit également assumer la filiation avec une des cartouches les plus marquantes de toute la ludothèque de la gamme 8 bits d’Atari : celle de Star Raiders… laquelle assumait déjà son lot de références obligées au nouveau pape du genre, l’inévitable Star Wars. Et le mieux ? C’est que Solaris n’entretient officiellement aucune relation avec aucun de ces films ni de ces jeux, n’étant ni une adaptation, ni une suite (Star Raiders II avait vu le jour quelques semaines plus tôt) ! Alors, tout cet héritage plus ou moins revendiqué était-il un fardeau, une béquille, ou un simple hommage ? À hauteur de joueur, la question qui prime est plus terre-à-terre : après plus de six ans d’attente, et sur un hardware inférieur à celui qui avait originellement hébergé son prédécesseur, ce Solaris peut-il réellement prétendre égaler – voire supplanter – l’expérience offerte par Star Raiders ?

Le premier opus offrait, on s’en souvient, une liberté de mouvement bienvenue parfaitement encadrée par la gestion stratégique de la défense des bases de la fédération atarienne. Quel pouvait être le meilleur moyen pour offrir à nouveau cette latitude tout en la rendant plus pertinente encore ? La réponde de Solaris à cette très intéressante question est lumineuse : pour pousser à l’exploration, rien ne vaut un objectif précis, en l’occurrence découvrir l’emplacement de la fameuse planète qui donne son nom à la cartouche.

Le vaisseau contrôlé par le joueur va donc à nouveau composer avec une carte galactique, mais celle-ci sera désormais suffisamment étendue pour être divisée en pas moins de seize quadrants de quarante-huit secteurs chacun – et bien évidemment, pas question pour vos senseurs de détecter davantage que le contenu du quadrant visité, ce qui signifie qu’il pourrait être avisé de dessiner une carte au fil de vos parties. Cette liberté pourrait sembler écrasante, ou au contraire trop permissive – pourquoi ne pas se contenter de foncer d’un quadrant à l’autre sans se préoccuper des ennemis, après tout ? C’est pourquoi le programme a eu la bonne idée de rendre de nombreux secteurs impassables, agissant ainsi comme des murs interdisant au joueur d’éviter aisément les nombreuses rencontres disséminées dans l’univers. Et celles-ci prennent des formes étonnamment variées pour une si petite cartouches : chasseurs adverses, vaisseaux amiraux de vos vieux ennemis, les Zylon, mais aussi flottes pirates, champs de mines, planètes ennemies où vous devrez récupérer des otages, blocus, trous de ver pouvant vous téléporter à un autre secteur… le moins qu’on puisse dire, c’est que l’univers de Solaris est loin d’être vide !

Le mieux, c’est que toutes ces rencontres offrent à chaque fois des séquences différentes offrant une variété appréciable en dépit du fait que le jeu se contrôle uniquement avec un joystick doté d’un unique bouton. Plus question, donc, d’aller chercher des fonctions sur un clavier qui n’existe pas, ni sur un périphérique vendu avec la cartouche : la carta galactique s’affiche tout simplement après avoir bouclé un secteur, et à ceux à qui cela ne conviendrait pas, il est possible de l’afficher en pressant le bouton du deuxième joystick !

La jouabilité est évidente : lors des phases d’exploration, vous déplacez simplement une croix figurant votre vaisseau sur une grille représentant le quadrant actuel pour décider de sa prochaine destination. Une fois arrivé sur place (c’est à dire, dans une des zones à événements qui bloqueront votre avance), le jeu passe alors dans une vue en 3D à la troisième personne, où votre vaisseau peut simplement faire feu, se diriger dans l’espace, et éventuellement se ravitailler en entrant dans la structure idoine sur une planète alliée. Car oui, la gestion du carburant est toujours de la partie : chacun de vos saut en hyperespace en consommera plus ou moins selon la précision de votre manœuvre, définie par une courte épreuve d’habileté visant à superposer votre vaisseau à son image résiduelle – simple, efficace. Certains tirs ennemis puisant dans vos réserves plus que dans votre santé, mieux vaudra toujours garder un œil sur votre réservoir et s’efforcer de trouver une planète de la fédération pour éviter de perdre un chasseur – et donc une vie – lorsque la situation l’exigera.

Le mieux, cependant, reste la simple efficacité des phases d’actions, présentées pour l’occasion dans une simili-3D riche en effets multicolores qui nous démontrent au passage ce qu’une Atari 2600 bien employée avait réellement dans le ventre. Que l’on vole en rase-motte à la surface d’une planète, que l’on fonce vers une clef dans des séquences de tranchées directement inspirées de l’attaque de l’Étoile Noire ou que l’on louvoie entre les mines ou les chasseurs adverses, on est toujours heureux de déployer son habileté face à des phases fatalement répétitives sur la durée, mais suffisamment courtes et bien pensées pour ne jamais agir comme un repoussoir à l’exploration de l’espace.

Avec le recul, parvenir à proposer une expérience de jeu aussi longue tout en restant ludique sur l’antique console d’Atari est un exploit qui côtoie le génie, et il y a vraiment de quoi se demander comment le programme n’a pas fait davantage de bruit à sa sortie – le fait d’être paru exclusivement sur une console qui n’était plus exactement le centre de l’actualité en 1986 (voire en 1988 au plus tôt pour l’Europe – le titre n’aura par exemple pas été abordé avant janvier 1991 dans Tilt !) aura sans doute énormément joué, mais quelle injustice pour ce qui peut s’avancer sans pudeur comme l’un des tout meilleurs logiciels de la machine. Seul regret : le jeu s’évente un peu dès l’instant où l’on est enfin parvenu à découvrir la fameuse planète, mais l’expérience a quand même largement de quoi vous occuper quelques heures si vous en vous montrez pas méthodique dans votre exploration. Si jamais vous cherchez un programme apte à vous donner une bonne raison de retourner chercher votre Atari 2600 au grenier, inutile de fouiller plus longtemps : on aura rarement vu un jeu aussi ambitieux ni aussi malin sur la machine. À essayer, sans hésitation.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13,5/20

Solaris n'est pas seulement une excellente suite (spirituelle) à Star Raiders, c'est aussi une fascinante démonstration de ce dont était réellement capable une Atari 2600 une fois placée entre les mains de développeurs compétents – et bon sang, cela a de quoi laisser songeur. Parvenir à mêler exploration, combats spatiaux, gestion et moments de bravoure à la Star Wars dans une si petite cartouche, avec un joystick et un unique bouton en guise d'interface était une colle que personne n'avait encore osé tenter de résoudre, mais le défi a été relevé avec brio : on passe réellement un bon moment à partir à la recherche de la planète éponyme, et on y revient avec plaisir tant qu'on n'est pas parvenu à la trouver. En dépit de l'aspect fatalement répétitif de la plupart des séquences, on tient là et sans débat un des tout meilleurs jeux jamais parus sur la console – et bon courage à ceux qui chercheront à le supplanter.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Une réalisation superbe pour la machine, mais désormais purement fonctionnelle
– Pas d'options de configuration...
– ...et un défi qui s'étiole dès l'instant où l'on connait la carte

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Solaris sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Les différentes scènes sont toutes représentées en 3D, et l’effet produit est assez convaincant. Ce shoot-them-up s’inspire de Star Raiders, le grand classique du genre. L’action est assez répétitive, mais il n’y a pas de temps morts et seule une crampe pourrait arrêter net votre voyage intergalactique. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 14/20 (NdRA : probablement suite à une coquille, le jeu a été testé dans Tilt sous le nom de « SDI Aris »)

Star Raiders

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Titre alternatif : ST Star Raiders (Atari ST – Amérique du Nord)
Testé sur : Atari 8 bitsAtari 2600Atari 5200Atari ST

La série Star Raiders (jusqu’à 2000) :

  1. Star Raiders (1980)
  2. Star Raiders II (1986)
  3. Solaris (1986)

Version Atari 8 bits

Date de sortie : 5 mars 1980 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cartouche, cassette
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version cartouche testée sur Atari 800 XL PAL
Configuration minimale : Système : Atari 400/800, XL/XE – RAM : 16ko

La première génération de jeux vidéo aura souvent été divisée entre deux pulsions contraires.

Pour beaucoup d’entreprises qui se lançaient dans le medium avec la parfaite conscience de ne pas bien savoir dans quoi elles mettaient les pieds, la tentation la plus évidente était de s’appuyer sur ce qui marchait et de proposer la même chose, quitte à n’avoir strictement rien à offrir de plus.

On ne réalise pas forcément le nombre de clones oubliés que des titres comme Space Invaders ou Breakout auront ainsi engendré à leur suite, tout simplement parce que se lancer dans le jeu vidéo ne voulait pas dire qu’on savait instantanément comment s’y prendre – même une compagnie comme Nintendo n’aura pas commencé autrement, et qui ici se souvient de titres comme Space Fever ou SF : HiSplitter qu’elle aura lancé à ses débuts vidéoludiques ? Mais il existait également une autre philosophie – qui était l’œuvre, elle, de gens qui savaient parfaitement ce qu’ils faisaient, en l’occurrence les développeurs. Et celle-ci consistait au contraire à sembler n’avoir aucun frein, aucune limite autre que l’imagination et à faire preuve d’une ambition proprement hallucinante en dépit des limitations techniques évidentes que rencontraient les premières productions. Il est ainsi assez fascinant de réaliser qu’un logiciel comme Elite, qui offrait au joueur une liberté totale dans rien de moins qu’une galaxie entière, aura été développé à destination d’un ordinateur doté de 32kb de mémoire. Et au rang de ces autres pionniers improbables qu’on n’attendait sans doute pas aussi haut aussi vite, il conviendrait également de citer Star Raiders qui, plus de quatre ans avant Elite et sur une cartouche de 8ko, proposait déjà un précurseur assez gonflé à des jeux comme Wing Commander – et d’une façon très intelligente.

Le prétexte, comme souvent à une ère bénie où les choses étaient moins complexes, est bien évidemment simplissime : il s’agira de prendre la défense de la Fédération Atarienne (!) contre l’invasion menée par l’Empire des Zylon. Très honnêtement, difficile de ne pas voir dans l’Empire en question un pastiche assumé de celui de Star Wars, tant le film de George Lucas était déjà devenu la référence obligée du genre, et le titre du jeu lui-même ne cherche qu’à souligner cette confusion.

L’idée, on s’en doute, va être de vaincre les envahisseurs – exactement comme dans Space Invaders – mais l’originalité est que le combat va se situer dans l’espace plutôt qu’à la surface de la planète (comme dans… Galaxian) et surtout, qu’il va se vivre à la première personne. Et ça, mine de rien, c’est déjà une énorme différence en termes d’immersion, parce que s’asseoir sur le siège du pilote et voir les choses par ses yeux, en 1980, c’était peut-être un rêve mais c’était aussi et surtout une sacré colle, surtout quand l’on développait l’un des premiers titres à destination de l’encore tout jeune Atari 400, sorti à peine trois mois plus tôt, et de ses 8ko de RAM. À cela, Star Raiders aura répondu d’une façon particulièrement maligne : en incluant d’une façon ludique tout ce qui permet de faire « comme si ». Et le mieux ? C’est que ça marche.

La première idée géniale du programme, c’est de ne pas limite l’aire de jeu à une simple zone mal définie dans laquelle apparaîtrait indéfiniment des vagues de vaisseaux ennemis – ce qui aura pourtant déjà largement suffi à contenter tout le monde en 1980. Non, la zone de conflit prend ici la forme d’une grille de 16×8 cases dans laquelle sont dispersées aléatoirement des stations stellaires que vous aurez la mission de défendre face aux flottes adverses.

Vos ennemis suivent en effet un plan simple : toutes leur armées convergent toujours vers une seule et même station – il vous faudra entreprendre de deviner laquelle – afin de l’entourer en vue de la détruire. Lorsque les quatre cases qui entourent une de vos bases sont occupées par des armées zylon, une alerte retentit, et vous disposerez alors d’une minute pour briser l’encerclement en nettoyant un des secteurs concernés, faute de quoi, la station sera détruite et la flotte adverse choisira alors une autre cible, en respectant la même tactique. Votre vaisseau va donc devoir passer son temps à voyager en hyperespace d’un secteur à un autre afin d’aller harceler l’armée adverse ou, au contraire, de retourner se ravitailler et faire des réparations à une des bases que vous avez la mission de défendre – un léger aspect stratégique qui a à la fois la force de vous offrir une liberté totale et de vous offrir une façon rationnelle de décider de vos mouvements à court-terme, tout en alimentant le système de score du logiciel qui vous attribuera un grade à la fin de la mission en fonction du niveau de difficulté, du nombre de stations sauvées et de la quantité d’énergie dépensée. C’est fou ce qu’on peut faire tenir, en fait, dans 8ko !

Tout cela est bien beau sur le papier, encore faut-il que l’action se révèle intéressante – et crédible – une fois le clavier et le joystick en mains. C’est là qu’entre en jeu la deuxième donnée déterminante que l’on a déjà évoquée plus haut : l’immersion. Le joueur doit s’y croire. Et comment ? En lui donnant l’impression d’être un vrai pilote, qui agit pour de vrai sur un vrai tableau de bord. Par exemple, votre magnifique astronef est doté à la fois de boucliers (pour avoir une chance de survivre à un tir adverse) et d’un ordinateur de visée (qui pourra vous aider à verrouiller les appareils ennemis afin de faire plus facilement mouche avec les torpilles à photons qui vous servent de munitions). Ils pourraient être activés par défaut, mais non, à chaque mission, il faudra penser à les activer individuellement – via les touches S et C – et c’est ça qui fait toute la différence !

De la même façon, chacune de vos actions – tirer, encaisser des dégâts, sauter en hyperespace – puisant dans vos réserves d’énergie, et vos différents systèmes pouvant être endommagés au cours d’une escarmouche (c’est toujours embêtant de ne plus pouvoir tirer parce que son lance-torpille est touché, ou de se trainer parce que les moteurs ont été atteints), il vous faudra régulièrement revenir à une station, comme on l’a vu, pour refaire le plein et vous remettre à neuf. Là encore, le procédé aurait pu être automatique dès l’instant où l’on arrivait dans le même secteur qu’une base, mais il faudra prendre le temps de s’approcher à moins de 500 mètres de la station en question et de s’immobiliser pour attendre qu’une unité automatisée vienne s’occuper de vous. Oui, c’est pratiquement la copie conforme de la manœuvre qu’il faudra employer pour aponter dix ans plus tard dans Wing Commander, encore lui, et cela prouve surtout à quel point des tas de petites choses qui pourraient morceler l’action et la rendre fastidieuse tendent au contraire à venir apporter juste ce qu’il faut de chair à un concept simple mais génial pour continuer à le rendre efficace et addictif plus de quatre décennies plus tard !

Certains pourront d’ailleurs se montrer surpris que Star Raiders se voit attribuer la même note qu’un titre comme Lightspeed, au concept similaire mais à la réalisation plus moderne et aux possibilités a priori plus riches, mais c’est précisément là que le jeu d’Atari met dans le mille : en mettant dans son gameplay précisément ce qui est pertinent, ni plus ni moins, là où le titre de MicroProse tendait à s’éparpiller dans des fonctions inutiles qui ne faisaient finalement que le rendre plus opaque et plus complexe sans rien apporter en termes de plaisir de jeu, échouant ainsi à travestir le logiciel de combat spatial qu’il était par essence.

Les parties sont fluides, rapides et nerveuses, et rarement bouclées en plus d’un quart d’heure ; on sait toujours ce qu’on est en train de faire et pourquoi, et les phases de ravitaillement offrent une courte respiration entre deux combats spatiaux. Âge du jeu oblige, l’action est fatalement redondante, mais le choix de la difficulté au lancement modifie suffisamment l’expérience pour qu’on prenne réellement plaisir à retourner affronter ces masses de pixels dans une réalisation qui n’a certes plus rien d’impressionnant, mais qui est parfaitement fonctionnelle. Tout est déjà là, en 1980, pour jouer à Star Wars en s’y croyant à fond, et après une courbe d’apprentissage de dix minutes pour apprendre les touches du clavier, on trouve immédiatement ses marques et on se passionne à optimiser nos interventions pour terminer avec le meilleur rang possible. Si jamais vous nourrissez une certaine curiosité pour ces pères fondateurs qui ont défini, à eux seuls, des genres entiers, essayez ce Star Raiders. Le voyage dans le temps pourrait bien plus ludique que vous ne m’imaginiez.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 13/20 La plus grande surprise en s'essayant à Star Raiders plus de quarante ans après sa sortie n'est pas de trouver l'ancêtre de Wing Commander, de X Wing ou de virtuellement tous les logiciels de simulation spatiale réalisés depuis lors à l'intérieur d'une minuscule cartouche de 8ko tournant sur un ordinateur de 1979 – non, c'est surtout que ce soit aussi amusant ! Qu'importe la réalisation antédiluvienne – on n'a jamais eu besoin de beaucoup de détails pour figurer des étoiles sur un fond noir –, la grande force du programme d'Atari, c'est son subtil mélange entre un aspect stratégique prenant sans être inutilement complexe, une action nerveuse et une gestion du score qui donne juste ce qu'il faut d'envie de se perfectionner et d'optimiser sa façon de jouer selon le grade choisi. Et ça marche ! Les yeux rivés sur l'ordinateur de visée pour lancer sa torpille au bon moment, on se surprend à découvrir qu'il y a exactement tout ce qu'il faut – ni plus, ni moins – pour parvenir à s'amuser pendant des parties de plus en plus longues sans être trop pressé de relâcher le manche à balai. Bien sûr, le concept est par essence répétitif et les possibilités limitées, mais l'immersion et l'ergonomie fonctionnent encore à merveille. Pourquoi s'est-on fatigué à faire des jeux plus compliqués, au fond ? CE QUI A MAL VIEILLI : – Une réalisation qui n'offre pas grand chose à voir ni à entendre – Quelques fonctions nécessitant une courbe d'apprentissage plus longue que les autres – Peu de renouvellement hors de la hausse de difficulté

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Star Raiders sur un écran cathodique :

Version Atari 2600

Développeur : Atari, Inc.
Éditeurs : Atari, Inc. – Sears, Roebuck and Co.
Date de sortie : Septembre 1982 (Amérique du Nord) – 1983 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleurs : Joystick, Video Touch Pad
Version testée : Version PAL
Spécificités techniques : Cartouche de 64kb

Au moment de lancer Star Raiders sur Atari 2600, la plus grande appréhension ne provient pas, pour une fois, des capacités graphiques ou sonores de la console, mais bien de l’absence d’un périphérique très important pour le jeu : comment composer sans un clavier ? À cette question, le programme aura répondu par une pirouette finalement assez intelligente : en étant vendu avec un périphérique dédié ! Périphérique que cette cartouche est d’ailleurs la seule de toute la ludothèque de la console à utiliser, ce qui signifie que l’émuler peut s’avérer très problématique… On va donc dire que, de toute façon, vous serez plus à l’aise sur Atari 400 ou 800 : en dépit de ses efforts, le jeu a malgré tout dû procéder à de nombreux sacrifices. Il n’y a qu’à voir la carte galactique, désormais réduite à une simple grille de 4×4, pour comprendre les dégâts ! Les combats sont bien entendus toujours présents, mais se limitent dorénavant à des vagues de deux chasseurs qui arriveront automatiquement à portée après une douloureuse attente (on ne peut plus choisir sa vitesse), et le ravitaillement se fait désormais de façon automatique chaque fois qu’on revient à la base (là encore, plus besoin de peaufiner son approche). Bref, ce qui faisait la subtilité et l’efficacité du gameplay a largement été édulcoré, et le titre est par conséquente nettement moins amusant. Bel effort, mais on était définitivement mieux sur ordinateur.

NOTE FINALE : 09/20

En dépit de réels efforts pour respecter les possibilités de la cartouche originale, quitte à ajouter un périphérique dédié dans la manœuvre, Star Raiders débarque sur Atari 2600 dans une version édulcorée qui ne fait pas illusion très longtemps. Désormais réduite à la reconduction de l’éternelle même vague de deux chasseurs entre deux sauts à la base, l’expérience a indéniablement perdu beaucoup de son charme. Amusant pour une ou deux parties, mais guère plus.

Les avis de l’époque :

« Sans égaler la version pour ordinateur, Star Raider (sic) offre déjà de beaux combats. »

Tilt n°8, novembre 1983, 5/6

Version Atari 5200

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari, Inc.
Date de sortie : 1982 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version NTSC
Spécificités techniques : Cartouche de 128kb

Pour l’édition Atari 5200 de Star Raiders, plus besoin d’un périphérique additionnel – il faut dire que la fragile manette de la console était fournie avec un pavé numérique qui pouvait, le cas échéant, remplacer un clavier. La console étant techniquement équivalente à un Atari 400, on peut cette fois s’attendre à une retranscription fidèle de ce qui faisait la force du jeu original… et c’est ce qu’on obtient, pratiquement au pixel près, si ce n’est que l’action connait des ralentissements lors de l’explosion des vaisseaux adverses, ce qui n’était pas le cas sur un Atari 800. À ce détail près, et même s’il faut un tout petit peu d’entraînement pour se souvenir quelle touche du pavé remplit quelle fonction dans le feu de l’action, on se retrouve exactement avec tout ce qui faisait la force du titre original, et c’est tant mieux.

NOTE FINALE : 12,5/20

Star Raiders sur Atari 5200 reproduit fidèlement l’expérience qu’on pouvait obtenir sur un Atari 400 – et pour cause – ce qui signifie qu’il faudra également composer avec quelques ralentissements, plus quelques minimes lourdeurs dans la manipulation du pavé numérique. Néanmoins, on passe toujours un excellent moment sur une simulation spatiale toujours aussi efficace.

Version Atari ST

Développeur : Atari, Inc.
Éditeur : Atari Corporation
Date de sortie : 1986 (Amérique du Nord) – 1987 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ simple face
Contrôleurs : Clavier, joystick, souris
Version testée : Version disquette testée sur Atari 520 STf
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Six ans après sa sortie (et même sept, a priori, pour l’Europe), Star Raiders n’avait pas encore fini sa carrière et débarquait cette fois sur ST pour profiter de la puissance de la machine afin d’offrir ce que les joueurs de l’époque attendaient le plus : la même chose, mais en plus beau ! L’interface a été revue pour offrir plus d’informations à l’écran : la carte galactique est ainsi toujours affichée par défaut (elle pourra être remplacée, le cas échéant par les senseurs longue portée), et on remarquera qu’elle est désormais composée de triangles plutôt que de carrés, ce qui signifie qu’une base peut dorénavant être entourée par trois armées au lieu de quatre. Pour le reste, même les touches sont quasiment identiques (on choisit la zone du prochain saut en hyperespace via les touches fléchées plutôt que via le joystick), et le principe n’a pas changé d’un iota ; la seule nuance, c’est la réalisation. Et dans ce domaine, on pourra comprendre que le titre ait fait son petit effet au moment de sa sortie, avec ses sprites nettement plus fins que sur la génération précédente, son action bien plus fluide, et ses chouettes effets à la Star Wars pendant les sauts en hyperespace. Bon, tant qu’à faire, dommage qu’il n’y ait toujours pas de musique – même à l’écran-titre – et que personne n’en ait profité pour intégrer quelques nouvelles idées, mais sachant que la grande force de la formule originale était précisément son parfait équilibre entre stratégie et accessibilité, on sera heureux de profiter d’une version encore plus efficace que sur Atari 8 bits. Que du bonheur.

NOTE FINALE : 14/20

Porté efficacement sur Atari ST, Star Raiders a le bon goût de ne pas prendre le risque de modifier une formule qui marche, tout en améliorant sensiblement la réalisation, l’ergonomie et la fluidité de l’ensemble. Dans une action parfaitement efficace et sans temps mort, on s’amuse, et c’est bien tout ce qui compte. Un très bon moyen de découvrir le jeu aujourd’hui.

Les avis de l’époque :

« Ce programme – qui était déjà grandiose sur les machines huit bits – renaît de ses cendres paré des qualités du ST. […] Ce programme bénéficie d’exceptionnelles qualités d’animation graphique, le bruitage n’étant pas en reste. Ainsi lors de votre pérégrination cosmique, le réalisme des météorites errantes ne peut vous laisser indifférent (splendides effets 3D). »

Eric Cabéria, Tilt n°41, avril 1987, 16/20

Venom Wing

Développeur : Softeyes
Éditeur : Thalamus Ltd.
Testé sur : Amiga

Version Amiga

Date de sortie : Août 1990
Nombre de joueurs : 1 à 2
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ (x2)
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 500
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Pour un joueur curieux passionné par une époque ou par une machine en particulier – ou, pour dire les choses plus vite, pour un retrogamer –, c’est souvent quand on commence à s’éloigner des grands noms et des références obligées que le plaisir commence.

Car derrière les éternels points de passage que tout le monde a nécessairement fréquenté un jour, les Tetris, les Mario, les Zelda – ou, pour un amigaïste, les Defender of the Crown et les Shadow of the Beast – se dissimule tout un monde, quasi-illimité, de titres méconnus ou vénérés seulement par une catégorie très particulière de joueurs, et dissimulant souvent sous une épaisse couche de médiocrité un parfum qui tend à se raréfier avec l’âge : celui de l’inconnu et de la surprise. Au commun des mortels, le nom de Thalamus ne dira sans doute pas grand chose ; il devrait en revanche évoquer plusieurs titres, et en particulier des shoot-them-up comme Sanxion, Delta Patrol ou Armalyte, qui auront fait les beaux jours du Commodore 64 et du ZX Spectrum, auprès des nostalgiques de l’ère 8 bits. Alors à une époque où l’éditeur commençait à battre de l’aile – un peu comme les machines qui avaient fait sa (modeste) renommée –, les joueurs furent ravis de voir débarquer une exclusivité Amiga du nom de Venom Wing, fruit d’une jeune équipe dont le studio, Softeyes, n’était d’ailleurs pas appelé à aller très loin. Un titre qui s’adressait, lui aussi, à un public de niche très ciblé.

S’il fallait trouver une originalité à un jeu qui, disons le d’entrée, n’en compte pas beaucoup, ce serait le concept de « shoot-them-up à défilement horizontal… à la verticale ». En effet, deux des quatre niveaux du jeu offre un déroulement un peu déstabilisant comparé au traditionnel défilement vers la droite conservé par les deux autres : celui d’avoir votre vaisseau spatial cantonné à la partie gauche de l’écran, avec un défilement exclusivement vertical, et une grande structure occupant la moitié droite… et qui viendra à votre rencontre si jamais vous avez le malheur d’avancer un peu trop près.

Une approche qui a le mérite d’offrir quelque chose de différent, à défaut de révolutionner quoi que ce soit, et d’offrir un soupçon d’imprévu dans un programme autrement très balisé consistant, comme on peut s’en douter, à tirer sur tout ce qui bouge – et surtout à survivre. Pas de tir chargé ou de complexe système d’upgrade à la Nemesis ici ; les seuls bonus prennent la forme de power-up améliorant la puissance et l’étendu de votre tir, et qui vous offriront une étrange invincibilité temporaire en transformant votre astronef en aigle pendant quelques secondes si vous avez le malheur de les détruire au lieu de les collecter. Pour le reste, on est face à un déroulement ultra-classique et farouchement gravé dans le marbre depuis le milieu des années 80, et on ne peut pas dire que les idées se bousculent pour chercher à offrir autre chose que des vagues d’adversaires vous tirant dessus.

C’est d’ailleurs à la fois l’énorme faiblesse du programme en même temps que ce qui peut lui conférer une sorte de charme intemporel auprès d’une certaine catégorie de nostalgiques : celle de coller à un embryon de game design correspondant à la génération précédente et qui passait déjà pour daté en 1990. Inutile, par exemple, de chercher ici une seule des innovations introduites par R-Type trois ans plus tôt comme le module de protection, les ennemis qui laissent des trainées, les décors mobiles ou le vaisseau géant, qui faisaient pourtant office de règles incontournables depuis lors : les adversaires et leurs patterns sont extrêmement limités et ne changent d’ailleurs guère d’un niveau à l’autre, seuls les sprites étant différents.

Non, comme souvent, et pour mieux dissimuler l’absence totale de variété ludique comme graphique des quatre niveaux du jeu, le programme aura eu recours aux bonne vieilles recettes : une difficulté immonde, des niveaux étirés artificiellement, et une réalisation qui fait à peu près illusion – du moins au début. Venom Wing est un jeu où l’on meurt énormément, la faute autant à la petitesse de la fenêtre de jeu (cantonnée à une réalisation rabotée de 288×225) qu’à l’énormité de votre vaisseau, ce qui rend l’usage de la mémoire obligatoire pour espérer franchir le premier niveau après une bonne dizaine de tentatives. La suite se limite de toute façon à vous renvoyer inlassablement les mêmes cochonneries aux visages en demandant un timing extrêmement serré pour espérer louvoyer entre les pièges et les ennemis, et on sent immédiatement que le jeu a été pensé pour être parcouru à deux – et pour être joué pour le score davantage que pour remplir l’objectif vain d’espérer en voir le terme.

On sent de toute façon une dégradation progressive de l’équilibrage comme de la réalisation au fil des niveaux, les développeurs ayant visiblement parfaitement cerné que 99% des mortels n’iraient jamais au-delà du deuxième niveau du jeu sans tricher. Là où les premiers environnements proposent encore un fond agréablement coloré et des graphismes n’ayant pas trop à rougir de la comparaison avec des titres à la Blood Money, le dernier niveau verse dans les décors mécaniques grisâtres et les robots pas très inspirés, donnant le sentiment que le level design a malicieusement été organisés pour que les stages les plus réussis arrivent en premier.

Le boss final est également beaucoup plus simple que celui du deuxième niveau – on sent parfois poindre des relents de la fameuse limite de temps truquée de RoboCop, cette philosophie selon laquelle personne ne verrait jamais la moitié du contenu du jeu de toute façon et que les derniers environnements n’existaient que pour donner du travail aux graphistes et aligner des chiffres impressionnants au dos de la boîte du jeu. Le défi est pour ainsi dire la seule récompense d’un logiciel qui ne se renouvèle jamais et qui n’a objectivement pas grand chose à offrir, comme le dit d’ailleurs ironiquement l’écran de fin qui vous annonce que votre seule récompense est le plaisir. Le reliquat d’une ère plus simple où un jeu vidéo restait surtout l’occasion de tuer dix minutes avec son petit frère avant de retourner à des activités plus sérieuses. Un chef d’œuvre méconnu ? Clairement pas, plutôt une survivance de l’ère 8 bits grimée en programme de la nouvelle génération faisant naïvement mine de croire qu’il suffisait de mettre les graphismes et la musique à jour sans se pencher sur le reste. Un voyage dans le temps qui n’intéressera probablement que les vrais nostalgiques au-delà d’une poignée de parties.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 11/20 Comme beaucoup de shoot-them-up européens développés à la même période, Venom Wing est un titre cherchant à dissimuler son absence totale de game design derrière une réalisation sympathique et une difficulté monstrueuse. C'est clairement une aventure aux niveaux trop longs, trop exigeants, trop répétitifs et trop mal équilibrés pour pouvoir espérer passionner un joueur – ou deux – jusqu'à son terme, tant les pièges proposés sont finalement toujours les mêmes avec des graphismes différents, mais les amateurs de défis insurmontables pourront au moins chercher à aller le plus loin possible, de préférence avec l'assistance d'un ami. Les autres, en revanche, feraient mieux de se contenter d'apprécier le thème musical de l'écran-titre avant d'aller voir ailleurs : ils ne rateront objectivement rien d'inoubliable. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une difficulté monstrueuse... – ...principalement due au sprite énorme de votre vaisseau – Des niveaux à défilement horizontal qui tirent en longueur – Le boss du deuxième niveau, increvable – Un équilibrage raté – Peu de power-up, souvent impossibles à reconnaître au milieu des tirs

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Venom Wing sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Thalamus est un spécialiste des shoot-them-up à scrolling horizontal, mais ce nouveau programme est assez différent des précédents. Pour une fois, votre vaisseau n’avance pas, mais ce sont vos ennemis qui viennent vers vous, ce qui risque de déconcerter les habitués. […] Si ce principe n’est guère spectaculaire, il n’en est pas point (sic) intéressant. Le niveau de difficulté est assez élevé et seuls les réflexes à toute épreuve vous permettront de tenir le coup. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 13/20

Monty Python’s Flying Circus : The Computer Game

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Titre alternatif : Monty Python’s Flying Circus (écran titre)
Testé sur : AmigaAmstrad CPCAtari STCommodore 64PC (DOS)ZX Spectrum

Les jeux adaptés des Monty Python (jusqu’à 2000) :

  1. Monty Python’s Flying Circus : The Computer Game (1990)
  2. Monty Python’s Complete Waste of Time (1994)
  3. Monty Python’s latest interactive game : Invasion from the Planet Skyron – or something completely different (1995)
  4. Monty Python : Sacré Graal (1996)

Version Amiga

Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 –  RAM : 512ko
Modes vidéos supportés : OCS/ECS

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

And now for something completely different : a game about a show.

« It’s »… Si jamais vous venez de lire ces simples mots en entendant la voix d’un Michael Palin grimé en naufragé venant péniblement d’affronter les pires difficultés pour arriver devant la caméra avant d’enchaîner avec le thème musical du Monty Python’s Flying Circus, alors vous faites indéniablement partie des fans de la plus célèbre troupe comique au monde, dont l’humour absurde fait encore référence en la matière plus de cinquante-cinq ans après ses débuts sur la BBC.

En fait, les sketches et les films imaginés par le sextuor britannico-américain sont restés si célèbres et si fermement implantés dans la pop culture anglo-saxonne (et désormais internationale) que les Monty Python restent encore, à l’heure actuelle, la seule troupe dont on cherche régulièrement à adapter les sketches en jeu vidéo avec pas moins de neuf titres au fil des vingt-cinq dernières années – le plus récent, paru sur smartphones en 2014, proposant carrément d’incarner un John Cleese lancé à pleine vitesse au Ministère des Démarches Ridicules ! Mine de rien, la question d’adapter les Monty Python – à commencer par la célèbre émission qui les aura révélés au monde en même temps qu’elle aura arrêté leur nom – aura été considérée dès la fin des années 80, avec une colle évidente : quel gameplay tirer de sketches sans aucun lien ni continuité autre que leurs interprètes ? Du côté de chez Core Design, comme le révèle Simon Phipps (le « papa » de Rick Dangerous ou Switchblade) sur son site, l’idée d’un jeu d’aventure – a priori, la plus évidente – aura bien évidemment été considérée, avant d’imaginer une suite de mini-jeux basés chacun sur un sketch différent – ce qui aurait demandé de concevoir et de programmer des dizaines de concepts pour quelques secondes de jeu à chaque fois. La chose s’avérant aussi complexe que quasi-impossible à mettre en place sur des ordinateurs 8 bits, le consensus opéré fut finalement de faire de l’univers du Flying Circus… un jeu d’action/plateforme entrecoupé de séquences de shoot-them-up et remplis de références aux centaines de sketches et répliques mondialement célèbres de la troupe. A bit silly, isn’t it ?

Quitte à trouver un personnage récurrent dans les quelques quarante-cinq épisodes diffusés entre 1969 et 1974, le choix se sera arrêté sur Mr. Gumby – archétype du crétin notoire, et surtout unique personnage à avoir été interprété par tous les membres de la troupe.

Celui-ci, après avoir – littéralement – perdu l’esprit, se retrouve donc propulsé dans un univers directement tiré des découpages de Terry Gilliam qui servaient de transition entre les sketches, soit ce qui pourrait le plus se rapprocher d’une identité visuelle pour le show. Un bon prétexte pour multiplier les références et les clins d’œil à des saynètes pratiquement toutes devenues cultes, quitte à interrompre l’action au bout de quelques secondes de jeu pour inviter le joueur à reconnaître différentes espèces d’arbres à une certaine distance. Le gameplay en lui-même se divise entre des sections d’action/plateforme très classiques et d’autre séquences où Mr. Gumby voit sa tête greffée sur le corps d’un poisson ou d’un oiseau pour se lancer dans du shoot-them-up parfois mêlé à un petit aspect labyrinthique – assez anecdotique, néanmoins, puisque les joueurs un minimum observateurs remarqueront que la direction à suivre est de toute façon indiquée ! À quelques petites facéties près, comme des interrupteurs cachés dans le décor et pouvant débloquer des passages ou révéler des bonus, on a donc affaire à un jeu qui n’invente finalement rien et dont la véritable originalité repose sur son univers graphique et sur les références qui s’y cachent.

À ce titre, autant le dire tout de suite : la réalisation a beau avoir un certain cachet, on pourra comprendre que l’esthétique « gilliamesque » ne convienne pas à tout le monde – en particulier à ceux n’ayant jamais vu le Monty Python’s Flying Circus. Les graphismes sont lisibles, mais les décors absurdes font souvent très vides, et dans l’ensemble il est difficile de congédier les scories d’un programme qui transpire les limitations des hardwares 8 bits qui représentaient encore le marché dominant en 1990.

Le son, pour sa part, n’hésite pas à puiser directement dans les sketches pour fournir quelques voix digitalisées assez réussies, notamment lors d’une séquence bonus reprenant le fameux débat payant entre Michael Palin et John Cleese. En revanche, il faudra choisir entre la musique et les bruitages pendant la partie à proprement parler – et mieux vaudra choisir les bruitages pour ne pas être rendu fou en moins de cinq minutes par l’unique thème musical reprit du générique de l’émission et joué en boucle jusqu’à la nausée. Bref, si la jouabilité est globalement précise et l’équilibrage assez cohérent (au moins lors des premiers niveaux), on ne peut pas dire qu’on en prenne plein les yeux ni plein les oreilles. Ça fonctionne, mais difficile de ne pas voir un titre lambda où les vaisseaux du futur et autres goombas aurait simplement été remplacés par des collages de Gilliam ou des réinterprétations par toujours très inspirées des personnages de la troupe incarnant des vendeurs de frigos ou des inquisiteurs espagnols.

En fait, le plus gros problème du jeu est précisément à chercher dans ses références : sorti du manuel rempli de citations cultes et hilarantes, seule une poignée de sketches a réellement fait le trajet jusqu’au programme en lui-même, et souvent au simple état de citation hyper-référencée accessible exclusivement aux joueurs connaissant déjà tout le Flying Circus par cœur.

Non seulement cela exclut d’emblée tous les autres, comme on l’a vu, tant un non-fan ne comprendra pour ainsi dire rien à tout ce qu’on lui montre, mais le pire est que même les connaisseurs les plus dévoués n’auront finalement pas grand chose à se mettre sous la dent, et qu’il ne suffit clairement pas d’incarner un Mr. Gumby ou d’avoir un score compté à l’envers pour être secoué de rire en parcourant un titre dont le déroulement en lui-même n’a rien de drôle – on aura d’ailleurs de quoi être déçu que des dizaines de références évidentes, comme le chevalier en armure avec son poulet cru, ne fassent pas la moindre apparition. Monty Python’s Flying Circus décontenance plus qu’il ne fascine, mais en dépit des efforts de Core Design, il demeure finalement un jeu passablement médiocre cherchant à donner le change via son habillage, et ne le faisant pas spécialement bien. Avec le recul, l’idée du jeu d’aventure était certainement bien meilleure, et aurait au moins eu le mérite de permettre à des non-initiés de découvrir l’humour absurde de la troupe en situation, quitte à reprendre des dialogues entiers de l’émission. Au lieu de quoi, on a vraiment l’impression de se retrouver face à un programme totalement dénué d’inspiration et qui aurait largement pu prétendre au titre de jeu le moins original de tous les temps si son héros avait été un lapin lors des phases de plateforme et un prototype du futur lors des séquences de shoot-them-up. L’esprit des Monty Python, lui, semble être resté dans les cartons, ce qui fait qu’on ne voit pas très bien à qui conseiller ce logiciel qui, faute d’idées fortes, risque surtout de ne réellement plaire à personne. De quoi meubler cinq minutes de temps à autre, mais de quoi surtout vous donner envie d’aller revoir les sketches – les vrais.

Vidéo – Le premier niveau du jeu :

NOTE FINALE : 11/20 À la très délicate question « comment adapter les Monty Python en jeu vidéo ? », Core Design aura donc répondu par un improbable mélange d'action/plateforme et de shoot-them-up qui emprunte finalement nettement plus à l'esthétique de Terry Gilliam qu'à l'émission de la célèbre troupe. Autant dire que les joueurs incapables de saisir les références à l'inquisition espagnole, au concours de débat, au Ministère des Démarches Ridicules et autres sketches désormais cultes afficheront probablement la même perplexité qu'une poule face à un clou, mais le fait est que même les fans risquent de ne pas être subjugués par un alignement de séquences redondantes et pas très inspirées qui, passé un vague effet de surprise, ne révèlent finalement qu'un jeu très générique comme on en a vu des milliers. Si vous voulez vraiment passer un bon moment, allez plutôt acheter le coffret du Flying Circus – l'investissement sera objectivement plus rentable. CE QUI A MAL VIEILLI : – Une esthétique « gilliamesque » qui ne plaira clairement pas à tout le monde – Un game design extrêmement basique – Des références totalement inaccessibles aux non-initiés... – ...et qui ne dépassent pas le stade de la citation

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Monty Python’s Flying Circus sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :

« Monty Python’s Flying Circus est sans conteste l’un des shoot-them-up les plus loufoques de l’histoire de la micro. Toutefois, si l’on rit beaucoup lors des premières parties, on s’ennuie ferme dans les suivantes. Mis à part l’humour, ce programme est un shoot-them-up très ordinaire, dont l’action n’est guère excitante. »

Alain Huyghues-Lacour, Tilt n°86, janvier 1991, 11/20

Version Amstrad CPC

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette testée sur Amstrad CPC 6128 Plus
Configuration minimale : Système : 464 – RAM : 64ko

Signe de l’ambition de Core Design pour son jeu, Monty Python’s Flying Circus aura été porté sur de nombreux systèmes, à commencer par les ordinateurs 8 bits. Cette version CPC nous dévoile d’ailleurs assez bien à quels sacrifices il faut s’attendre pour ces versions : si la partie ludique du contenu n’a pour ainsi dire pas changé, avec les mêmes niveaux dans le même ordre, c’est précisément l’habillage « pythonesque » qui aura subi toutes les coupes. Traduit en clair : oubliez les messages stupides citant les sketches phares de la troupe, les transitions animées montrant votre Mr. Gumby se faire recomposer en poisson ou en oiseau, et même le mini-jeu de débat et la séquence d’attribution du score en fonction des bonus sont passés à la trappe. Si la réalisation graphique s’en sort très bien, il n’y a plus la moindre forme de thème musical (bon, ce n’est sans doute pas une grosse perte), et les voix digitalisées tirées de l’émission ont également disparu. Du coup, en-dehors de l’esthétique à la Gilliam, pratiquement toutes les références aux Monty Python sont à chercher dans le manuel et nulle part ailleurs ! Sachant que le jeu en lui-même est loin d’être extraordinaire, même s’il se détache indéniablement mieux au sein de la ludothèque du CPC que de celle de l’Amiga, on se retrouve plus que jamais avec un jeu d’action très générique uniquement distingué par son habillage. On remarquera néanmoins que la difficulté est plus élevée dans cette version, aller au contact d’un ennemi vous coûtant très vite une vie.

NOTE FINALE : 10,5/20

En tant que pur jeu, Monty Python’s Flying Circus sur CPC préserve l’essentiel et ne s’en sort pas trop mal – mais le prix à payer est la disparition de la grande majorité des références qui participaient à l’identité du titre. Reste un petit jeu de tir à la jouabilité précise et assez bien réalisé pour la machine, mais qui n’a vraiment rien de neuf à offrir du côté du gameplay.

Version Atari ST

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″ double face
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette testée sur Atari 1040 STe
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

L’avantage des portages sur Atari ST, c’est qu’ils réservent rarement des surprises. Comme on pouvait s’y attendre, Monty Python’s Flying Circus y délivre une version semblable à 95% à celle parue sur Amiga. Au rang des différences, on remarquera une résolution un peu plus basse (en 256×200 plutôt qu’en 288×200) mais objectivement, on y fait à peine attention, et une réalisation sonore un peu moins accomplie. Tout le reste est exactement identique, et très honnêtement, on ne peut pas dire que les nuances sautent aux yeux. Une bonne alternative pour les fans inconditionnels de la fine bande, donc.

NOTE FINALE : 11/20

Comme souvent, Monty Python’s Flying Circus livre sur Atari ST une prestation qui ne s’éloigne que très marginalement de celle de l’itération Amiga. La jouabilité et le contenu sont virtuellement identiques, et la réalisation n’a laissé que très peu de plumes : du vrai portage à l’ancienne.

Version Commodore 64

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 5,25″
Contrôleur : Joystick
Version testée : Version disquette
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Porté sur Commodore 64, Monty Python’s Flying Circus y connait sensiblement les mêmes coupes que sur CPC – sauf pour ce qui est de la musique, toujours présente pour le meilleur comme pour le pire. On se retrouve donc une fois de plus avec un jeu dépouillé de ses transitions, de ses digitalisations sonores et de ses séquences bonus mais qui préserve l’ensemble du contenu d’un point de vue strictement ludique. Encore une fois, l’idée sera surtout de voir jusqu’à quel point vous accrochez à l’esthétique, parce que pour ce qui est de jouer à un shoot-them-up, vous serez sans doute mieux sur Silkworm.

NOTE FINALE : 10,5/20

Comme sur les autres ordinateurs 8 bits, Monty Python’s Flying Circus sur Commodore 64 donne une peu le sentiment d’usurper son nom tant il se dépouille de l’essentiel des gags et références aux Monty Python. Reste un jeu de tir jouable et correctement réalisé qui peinera malgré tout à rivaliser face à une très intense concurrence sur la machine.

Version PC (DOS)

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Games, Inc.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS – RAM : 512ko
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, VGA
Cartes sonores supportées : AdLib, haut-parleur interne
Pas de programme de configuration : ajoutez /A à la ligne de commande pour activer l’AdLib

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

En 1990, le PC commençait à pouvoir s’inscrire sans trop d’efforts à la suite de l’Amiga et de l’Atari ST. Une assertion qui se vérifie d’ailleurs en lançant Monty Python’s Flying Circus : le jeu est graphiquement identique à ce qu’il était sur les autres ordinateurs 16 bits, même si on constatera la disparition de certaines fioritures, comme les petites animations qui égayaient l’écran-titre.

Du côté sonore, comme on s’en doute, le haut-parleur interne casse d’autant plus les oreilles qu’il semble ici impossible de couper la très agaçante musique du jeu, et je ne pourrai m’exprimer ici sur le rendu obtenu avec une carte AdLib, le jeu plantant systématiquement sous DOSBox lorsqu’on tente d’en faire usage (à en juger par les vidéos en ligne, qui emploient toutes le haut-parleur interne, je ne suis visiblement pas le seul à avoir rencontré ce problème). Pour le reste, le jeu tourne à la bonne vitesse et les transitions sont toujours là, même s’il faudra composer quoi qu’il arrive sans les voix digitalisées. Bref, quitte à acheter un PC en 1990, on se doute que ce n’était sans doute pas pour faire tourner ce jeu. 

NOTE FINALE : 11/20

Porté sur PC de façon assez fainéante et en introduisant de grandes difficultés pour réussir à faire fonctionner une AdLib, Monty Python’s Flying Circus n’en reste pas moins le jeu limité qu’il était sur les autres ordinateurs 16 bits, avec ses références inaccessibles aux non-fans. De quoi tuer dix minutes, mais guère mieux.

Version ZX Spectrum

Développeur : Core Design Ltd.
Éditeur : Virgin Mastertronic Ltd.
Date de sortie : Octobre 1990
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Supports : Cassette, disquette 3″
Contrôleurs : Clavier, joysticks Cursor, Kempston et Sinclair
Version testée : Version cassette testée sur ZX Spectrum 128k
Configuration minimale : RAM : 48ko

Comme les autres versions 8 bits – et en particulier la version CPC, à laquelle elle ressemble beaucoup – l’itération ZX Spectrum doit composer avec son lot de coupes, l’absence de la musique étant davantage une bonne nouvelle que ce qu’on pourrait penser. Oubliez donc une nouvelle fois les transitions et autres gags superflus : on en reste à l’essentiel, à savoir le jeu en lui-même, lequel est d’ailleurs proposé dans une version pas trop vilaine qui n’hésite pas à faire usage de couleurs ailleurs que dans l’interface. La jouabilité reste aussi précise que le gameplay est limité, proposant une nouvelle fois un jeu qui n’a rien de honteux mais clairement pas assez de choses à offrir pour être plus qu’un jeu d’action de plus sur une machine qui en compte beaucoup.

NOTE FINALE : 10/20

Confrontés aux limitations du ZX Spectrum, Monty Python’s Flying Circus a au moins le bon goût de préserver l’essentiel via une réalisation qui fait le travail avec sérieux. Un jeu de niche qui ne vous gardera pas éveillé la nuit, mais rien de scandaleux à l’échelle de la ludothèque de la machine.