X-Men (Paragon Software)

Développeur : Paragon Software Corporation
Éditeur : Paragon Software Corporation
Titre alternatif : X-Men : Madness in Murderworld (écran-titre)
Testé sur : PC (DOS)Commodore 64

Les jeux de la licence X-Men (jusqu’à 2000) :

  1. X-Men (Paragon Software) (1989)
  2. The Uncanny X-Men (LJN Toys) (1989)
  3. X-Men II : The Fall of the Mutants (1991)
  4. Wolverine (1991)
  5. The Uncanny X-Men (Konami) (1992)
  6. Spider-Man/X-Men : Arcade’s Revenge (1992)
  7. X-Men (SEGA) (1993)
  8. Wolverine : Adamantium Rage (1993)
  9. X-Men : Children of the Atom (1994)
  10. X-Men : Mutant Apocalypse (1994)
  11. X-Men : Gamesmaster’s Legacy (1995)
  12. X-Men 2 : Clone Wars (1995)
  13. X-Men vs. Street Fighter (1996)
  14. X-Men : Mojo World (1996)
  15. X-Men : The Ravages of Apocalypse (1997)
  16. X-Men : Mutant Academy (2000)
  17. X-Men : Mutant Wars (2000)

Version PC (DOS)

Date de sortie : 1989 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquettes 5,25″ et 3,5″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.1 – RAM : 384ko*
Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Tandy/PCjr
Carte son supportée : AdLib
*512ko requis pour la version Tandy

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Cela surprendra peut-être les membres d’une génération ayant grandi dans l’ère des Marvel Cinematic Universe, des Snyder’s Cut et de la 163ème variation filmique de Batman, mais au siècle dernier les super-héros étaient encore très loin d’être le centre d’attention des studios cinématographiques. En fait, en dépit du succès inattendu du Superman de Richard Donner en 1978, l’idée d’adapter les aventures de la multitude de personnages de comics aura rapidement périclité, barrée par des contraintes techniques alors encore insurmontables et par les entrées de moins en moins enthousiasmants des suites de plus en plus médiocres au sein de cette même licence Superman, justement.

Au fond, les comics, c’était surtout quelque chose de réservé aux grands enfants et aux adolescents pas encore décidés à passer à l’âge adulte, un marché de niche à destination de marginaux auxquels on donnait déjà le nom de « geeks » – tiens, exactement comme le jeu vidéo par exemple. Alors quand la première adaptation des aventures des X-Men, ces célèbres mutants reproduisant à leur manière l’opposition idéologique entre Malcolm X et Martin Luther King, débarqua sur les écrans informatiques en 1989, ce n’était pas sous la houlette d’un gigantesque éditeur ayant investi une somme rondelette dans une licence valant son pesant d’or. Non, ce fut sous celle de Paragon Software, un développeur américain principalement centré sur le marché du PC, et qui se sera livré au jeu des adaptations (les lecteurs du site se souviendront peut-être avoir déjà croisé The Punisher, par la même équipe) avec ses moyens et son talent (limités dans les deux cas), mais avec un authentique mérite : celui de chercher à faire un peu plus que des reprises de concepts hyper-classiques avec un simple coup de peinture à licence par-dessus. Qu’il soit au moins remercié pour cela.

Qui est le Professeur Xavier ? Si les connaisseurs du comics et de ses versions animées et filmiques connaissent déjà tout ce qu’il y a à savoir sur le télépathe fondateur de l’institut qui porte son nom, d’un point de vue vidéoludique, sa fonction rejoint celle de Robin ou d’April O’Neil : se faire kidnapper.

Ici, il est bien évidemment tombé entre les mains de son grand rival Magneto, aidé par le génie du mal Arcade, et si le jeu en lui-même ne s’embarrasse pas à nous expliquer comment, c’est parce qu’un comics inédit vendu en bundle avec le programme se chargeait de le faire à sa place. Pour aller lui sauver la peau, Serval, Cyclope, Tornade, Diablo et Dazzler se lancent à l’assaut d’un étrange parc d’attraction au nom évocateur de « Murderworld » – lequel sera, on s’en doute, rempli d’ennemis et de pièges pour leur barrer la route. De façon plus surprenante, il sera également bourré d’objets à ramasser et d’énigmes à résoudre, car Paragon avait visiblement une ambition un peu plus large pour ses héros en collants que celle d’offrir un simple beat-them-all à la Konami. X-Men est donc un improbable mélange d’action/aventure/réflexion ce qui est à la fois sa grande force (dans l’idée) et, comme on va rapidement le réaliser, sa principale faiblesse (dans l’exécution).

Au premier abord, le titre de Paragon pourrait donc passer pour un jeu d’action/plateforme en vue de profil assez classique : le personnage incarné se déplace en 2D et traverse des écrans fixes (pas de défilement, ce qui n’est pas très surprenant sur un PC en 1989), combat des ennemis, affronte des boss, emprunte des échelles et visite le tentaculaire repaire adverse.

Le système de combat, hélas pas follement précis, fait largement penser à celui des jeux d’arts martiaux de l’époque : chacune des huit directions du joystick (ou du pavé numérique) combinée au bouton produit une attaque différente, et chaque personnage dispose bien évidemment de capacités différentes en fonction de ses pouvoirs (on n’attendra donc pas de Serval, de Diablo ou de Colossus qu’ils puissent attaquer des ennemis à distance, au contraire de leurs trois collègues). On ne va pas se mentir : la moitié du temps, impossible de déterminer si une attaque touche ou non sa cible – particulièrement lors des corps-à-corps – et les ennemis ayant la fâcheuse habitude de réapparaître, on va passer la plus grande partie du temps à se contenter de les éviter pour ne pas perdre bêtement de la vie. D’autant plus que la mort d’un seul de vos héros signifiera l’impossibilité de gagner le jeu, même si celui-ci n’aura pas l’exquise honnêteté de vous envoyer un écran de game over pour vous prévenir : dans X-Men, on peut se coincer sans même le savoir. Et de plusieurs façons.

Car la plus grosse surprise intervient en appuyant sur la barre espace : un menu apparait alors, avec non seulement une très pratique option de sauvegarde accessible n’importe quand (sauf pendant les combats), mais aussi des options pour changer de personnage, consulter l’état de santé de toute votre équipe, mais aussi ramasser, déposer et utiliser des objets, et également faire usage du pouvoir de votre héros pour autre chose que pour dégommer des sentinelles. Car quitte à vous faire incarner des mutants, le jeu est bien décidé à mettre leurs capacités à contribution : vous en trouverez un première exemple au bout de deux écrans, avec une cage et une porte fermée à clef.

Comment passer ? Très simple : prenez Diablo, faites-le se téléporter à l’intérieur de la cage, il en ressortira avec une clef que vous pourrez alors utiliser sur la porte, et le tour est joué. L’idée, sur le papier, est excellente – et justifie a posteriori que vous ayez besoin de garder tout le monde en vie : Colossus pourra ouvrir des passages secrets en détruisant certains murs, voir certaines portes, Dazzler pourra éclairer des pièces plongées dans les ténèbres, Tornade pourra voler pour accéder à certaines zones autrement inaccessibles (sauf pour Diablo), etc. De quoi offrir un terreau fertile pour de nombreuses énigmes reposant sur de très nombreux objets à collecter qu’il faudra savoir utiliser au bon moment et de la bonne manière pour pouvoir progresser – malheureusement, de ce côté-là, le jeu présente le même bilan que pour tout le reste : d’une bonne idée à un bon game design, il y a un très, très grand pas.

En théorie, le potentiel du jeu est indéniable. Dans les faits, entre sa réalisation pas très emballante (encore une fois, difficile d’attendre des exploits d’un PC en 1989), son level design aux fraises, ses décors répétitifs, ses combats confus et ses énigmes souvent insolubles, le titre tend à se ramasser là où un Teenage Mutant Ninja Turtles : Manhattan Missions par exemple offrirait deux ans plus tard un concept assez similaire mais mieux exécuté.

On pourra pester contre le level design incohérent où l’on passe d’un écran à l’autre d’une grotte à un égout puis à une zone futuriste – chacune de ces zones revenant à plusieurs reprises, ce qui rend l’exploration assez difficile sans faire une carte pour s’y retrouver – mais le vrai problème consiste à faire le lien entre les dizaines d’objets que l’on collecte (dont une vaste majorité est totalement inutile) et l’usage que l’on est censé en faire. Pour donner un exemple parmi une dizaine, imaginez-vous en train d’avancer dans quelques écrans de western. Vous allez croiser quelques plans d’eau qui apparaissent comme purement décoratifs, sauf qu’en fait non : le programme attend de vous que vous alliez chercher un tamis de chercheur d’or que vous aviez ramassé une heure plus tôt et que vous l’employez sur un de ces plans d’eau en particulier – totalement impossible à distinguer des autres, et bien évidemment aucun écriteau ni indice ne fait mention de la présence d’or – pour trouver un objet indispensable ! Non seulement c’est totalement opaque, mais il peut également arriver qu’un objet essentiel ne puisse être acquis qu’en faisant usage du pouvoir spécifique d’un des mutants (et d’aucun autre) sur un élément de l’inventaire. Le problème, c’est qu’en cas d’erreur, l’objet sera détruit en même temps que son contenant, et la partie sera perdue sans même que vous soyez au courant !

Bref, en dépit d’une approche engageante, le jeu ne sait la plupart du temps absolument pas comment tirer quelque chose de ludique de ses composantes mal assemblées, et ce qui aurait pu être un jeu original et rafraichissant offrant une belle variété se révèle au final être une expérience fastidieuse, lente et confuse où il faut vraiment se faire violence pour arriver au terme des deux heures de jeu nécessaires à la libération du brave professeur – à condition de savoir quoi faire et où aller, ce qui, on l’a vu, n’est pas gagné d’avance.

C’est d’autant plus frustrant qu’on sent d’un bout à l’autre le potentiel pour une sorte de Metroidvania avant l’heure qui aurait vraiment pu proposer quelque chose de bien plus marquant que les brouettes de jeu d’action/plateforme qui auront pullulé à sa suite sur consoles, mais qui finit par rejoindre la longue liste des expériences malheureuses des studios occidentaux dans leur quête souvent pas très motivée du game design. De quoi susciter une certaine curiosité, mais sauf à être particulièrement patient, autant dire que les disquettes auront regagné leur boîte au bout de quelques parties. Bien essayé, mais raté.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 09,5/20

Comme d'autres productions de Paragon Software (coucou The Punisher), X-Men sur PC est un assez bon exemple de concept intéressant sur le papier saboté par une exécution maladroite. En cherchant à mettre en jeu les pouvoirs des célèbres mutants pour autre chose qu'un simple beat-them-all, le titre introduit une composante aventure/réflexion qui aurait vraiment pu être rafraichissante si elle avait été mieux pensée – et mieux exécutée. Malheureusement, entre ses grands couloirs répétitifs, ses combats frustrants et imprécis et ses énigmes opaques lorsqu'elles ne se résument pas à trouver une clef pour ouvrir une porte, l'expérience s'évente très vite au-delà de la curiosité initiale et laisse le goût amer d'un logiciel qui aurait pu être vraiment sympathique avec un vrai game design, mais qui va juste rejoindre le magma des adaptations improbables à la Batman : The Caped Crusader. Dommage, le potentiel était là.

CE QUI A MAL VIEILLI :

– Des combats brouillons et imprécis
– Des énigmes très limitées...
– ...quand elles ne sont pas totalement insolubles
– Un level design incohérent où on peut vite se perdre

Bonus – Ce à quoi peut ressembler X-Men sur un écran cathodique :

Version Commodore 64

Développeur : Paragon Software Corporation
Éditeur : Paragon Software Corporation
Date de sortie : 1989 (Amérique du Nord)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Disquette 5,25″
Contrôleurs : Clavier, joystick
Version testée : Version disquette américaine
Configuration minimale : RAM : 64ko

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Bien qu’une version Amiga de X-Men ait été prévue et promue (on peut même voir des captures d’écran au dos de la boîte des éditions publiées sur les autres machines), elle n’aura au final jamais vu le jour, et le Commodore 64 aura été l’unique ordinateur à bénéficier de son portage du jeu. Pour l’occasion, le déroulement et le contenu n’ont pas changé ; seuls quelques sacrifices au niveau de l’interface ont été opérés.

Par exemple, il n’y a plus d’écran dédié pour choisir son personnage, la sélection se fait dans une simple liste ; les objets ne sont plus visibles à l’écran mais juste indiqués par une phrase et il n’y a plus besoin de déplacer un curseur pour dire où les utiliser, etc. Globalement, cette « simplification » fait davantage de bien que de dégâts à la prise en main, et la réalisation n’étant clairement pas à des kilomètres de celle de la version PC, on pourrait même considérer tenir un portage plutôt supérieur à l’original… à un petit détail agaçant près : l’omniprésence des temps de chargement. Chaque changement d’écran, chaque changement de personnage, chaque action s’accompagne de longues secondes d’attente, et le rythme du jeu n’étant déjà pas trépidant à la base, autant dire qu’on passe beaucoup de temps à se tourner les pouces.

NOTE FINALE : 09,5/20

Bon portage n’effectuant que des adaptations minimales – mais souvent plutôt bénéfiques –, X-Men sur Commodore 64 doit hélas composer avec les lourdeurs de son hardware et morceler l’action par des temps de chargement intempestifs qui rendent rapidement l’expérience fastidieuse. Une aventure à réserver aux joueurs patients.

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