Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd.
Éditeur : Three-Sixty Pacific, Inc.
Testé sur : PC (DOS) – Amiga
Disponible sur : Windows
Présent dans la compilation : Megafortress / Das Boot / Aces of the Great War (1992 – PC (DOS))
En vente sur : GOG.com (Windows), Steam.com (Windows)
Version PC (DOS)
Date de sortie : Novembre 1990 |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Supports : Dématérialisé, disquettes 5,25″ (x3) et 3,5″ (x2) |
Contrôleurs : Clavier, souris |
Version testée : Version dématérialisée émulée sous DOSBox |
Configuration minimale : Processeur : Intel 8088/8086 – OS : PC/MS-DOS 2.11 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : CGA, EGA, Hercules, MCGA, Tandy/PCjr, VGA Cartes sons supportées : AdLib, Game Blaster (CMS), Tandy/PCjr *640ko requis pour les modes VGA et Tandy |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme on aura eu l’occasion de le mentionner par ailleurs (au hasard ici), la toute fin des années 80 aura correspondu à une timide tentative de démocratisation de la part d’un genre extrêmement exigeant par nature : la simulation. Accolade avait contribué à montrer la voie, mais celle-ci était finalement tracée d’avance, selon le bon vieux précepte qui veut que « toucher un public plus large » = « augmenter les chances de vendre le jeu » = « brouzoufs » – les simulateurs « allégés » à la Ace of Aces ne constituaient après tout pas une nouveauté en soi, disons simplement que l’on pouvait attribuer leur simplicité davantage à des contraintes techniques qu’à un réel choix de game design.
Mais tiens, puisque l’on évoque Ace of Aces, figurez-vous que le jeu avait justement déjà été distribué par Accolade, et que son équipe de développement se nommait alors Artech. Quatre ans plus tard, celle-ci n’avait visiblement pas gonflé que son nom pour devenir Artech Digital Entertainments, mais aussi ses effectifs puisqu’en parallèle de Blue Max, elle travaillait également sur un autre type de simulateur, lui aussi très en vogue à l’époque : le jeu de sous-marins. Terrain plus miné qu’on pourrait le penser, puisque déjà largement occupé par des références comme Silent Service II ou Wolf Pack – d’ailleurs sortis eux aussi en 1990 –, élevant de fait le seuil d’exigence de joueurs pas forcément décidés à acheter trois simulateurs d’U-Boot en un an. Alors histoire d’augmenter les chances, autant en profiter pour avoir recours à un licence célèbre ; de toute évidence, celle d’À la poursuite d’Octobre Rouge était déjà prise, alors il aura fallu aller chercher un peu plus loin avec le long-métrage Le Bateau (titre original : Das Boot) de Wolfgang Petersen, lui-même tiré du livre de Lothar-Günther Buchheim romançant des missions que l’auteur avait vécu pendant la seconde guerre mondiale. Et voilà comment on se retrouve avec Das Boot, un jeu… qui entretient en fait pour seul lien avec le film et le roman de se dérouler dans un sous-marin.
En vertu de la philosophie visant à offrir aux joueurs impatients un peu plus d’action effrénée et un peu moins de réglages techniques pointus proprement incompréhensibles aux malheureux n’ayant pas encore compulsé les 350 pages de manuel écrit petit, le titre d’Artech commence par proposer de courtes missions d’entraînement qui ont l’avantage de faire également office de mini-jeux pour les capitaines pressés n’ayant pas envie d’écumer les océans pendant un quart d’heure à la recherche d’un convoi allié (nous aurons l’occasion d’y revenir).
On pourra donc apprécier ici la variété des séquences : tir sur avions de chasse et bombardiers depuis le canon anti-aérien placé sur le pont, tir sur cibles marines avec un canon lourd, tir de torpille depuis la surface ou sous l’eau, en visant alors avec le périscope plutôt qu’avec les jumelles, combat sous-marin entre submersibles, champ de mines, phase d’évitement de charges explosives, etc. De quoi constater que la jouabilité de ces scènes est très simple – on vise avec les flèches, on tire avec Espace –, que la 3D est particulièrement efficace pour un titre de 1990 (les effets volumétriques visibles sous l’eau, particulièrement novateurs pour la période, avaient décroché la mâchoire de la presse de l’époque), et que certaines d’entre elles privilégient d’ailleurs la poudre aux yeux au détriment de la profondeur (sans mauvais jeu de mot) au point de s’avérer très limitées, en particulier du côté des phases sous-marines. Mais au moins, le ton est donné : les joueurs qui voudraient de l’action pourront en avoir, et ils pourront même en avoir tout de suite.
Cependant, comme on peut s’en douter, le principe même de la simulation de sous-marin ne repose pas exactement, d’ordinaire, sur le fait d’aller canarder des avions ou des destroyers depuis le pont de son submersible. Das Boot propose donc fort logiquement cinq missions plus conventionnelles et surtout beaucoup plus consistantes, aux objectifs relativement variés mais qui tourneront principalement autour du fait de patrouiller, de repérer des convois et leur escorte et de s’efforcer de couler le tout avant de repartir en un seul morceau. L’occasion de configurer de nombreux réglages pour s’approcher (ou non) d’une vraie simulation historique, et de goûter enfin à tous les postes du sous-marin, dans un mode qui devient alors immédiatement plus complexe.
Un exemple valant mieux qu’un long discours, imaginons un début de mission typique vous plaçant au milieu de l’océan. Même si vous avez déjà reçu des objectifs en prélude du démarrage, il pourrait être intéressant de commencer par passer par la station radio, d’où vous pourrez recevoir les messages du commandement – à condition de les passer par un des trois systèmes de décryptage avant de les comprendre, ce qui ne nécessite jamais que d’appuyer sur la touche correspondante. Vous serez d’ailleurs régulièrement invité à faire des rapports ou à solliciter des ordres additionnels, ce qui nécessitera donc d’émettre à votre tour – en n’oubliant pas, naturellement, d’opter vous aussi pour une transmission cryptée, sans quoi vous risqueriez rapidement de recevoir un message goguenard de la flotte ennemie vous remerciant de communiquer votre position en clair avant d’envoyer son aviation se débarrasser de vous ! Ceci dit, il pourra également arriver que vous interceptiez une communication qui ne vous était pas destinée, et que vous parveniez à votre tour à la décrypter pour obtenir des informations cruciales sur les navires adverses – bref, un système original assez intelligemment intégré sans se révéler inutilement opaque.
On pourra d’ailleurs regretter que l’interface, dans son ensemble, échoue à maintenir ce seuil d’accessibilité : en effet, si tous les postes et les raccourcis permettant d’y accéder sont clairement affichés en permanence au bas de l’écran, une large partie des fonctions indispensables, elle, n’est accessible que via des raccourcis qui ne sont indiqués nulle part ailleurs que dans le manuel.
Imaginons par exemple que vous ayez envie de repérer un convoi ennemi, ce qui est quand même la base : on se doute que se contenter de rester à la surface en utilisant les jumelles n’est pas exactement la méthode optimale, mais c’est la seule accessible par le menu. Pour toutes les autres, il va falloir faire chauffer le clavier, qu’il s’agisse d’utiliser l’hydrophone (Alt + H), le détecteur radio (Alt + R), le radar de détection (Alt + B) ou le radar aérien (Alt + O). On notera également des fonctions permettant de gagner un temps considérable dans le feu de l’action, comme celle vous permettant de plonger directement à la profondeur idéale pour utiliser le périscope (Alt + P), celle permettant de remonter à la surface (Alt + S), ou encore celle permettant de pivoter le sous-marin dans la direction que vous êtes en train d’observer (Alt + F). Sans oublier celle qui pourra vous éviter de dégommer bêtement un navire de votre propre camp en prenant le temps de demander à vos collègues d’identifier une cible (Alt +I).
Ce recours systématique à des raccourcis à noter ou à apprendre par cœur est d’autant plus incohérent que, en dépit de ses meilleurs efforts, Das Boot n’est pas vraiment un titre réaliste. Déjà parce qu’il est difficile de penser que la marine allemande ait suffisamment confiance en ses U-Boots pour envoyer un seul d’entre eux dégommer non seulement un convoi, mais aussi son escorte de destroyers, un porte-avions au milieu, et même toute une division aérienne simplement avec deux canons et une vingtaine de torpilles !
On pourra d’ailleurs regretter que tout l’aspect de chasse « en meute » introduit par Wolf Pack n’ait pas fait le trajet jusqu’ici : votre sous-marin devra toujours tout faire tout seul, même quand il y a des alliés dans les parages, ce qui est aussi grotesque qu’irritant. Ensuite, si on comprend que l’idée est précisément de nous faire incarner tous les membres d’équipage, la valse permanente d’un poste à l’autre pour accéder à des fonctions qui ne sont accessibles que via un menu en particulier est aussi contraignante qu’elle est contre-intuitive : pourquoi ne peut-on désigner le cap et la vitesse du submersible que lorsqu’on est sur le pont et en surface, par exemple ? Quel est l’intérêt de nous doter de cartes si celles-ci ne montrent, quatre fois sur cinq, qu’une immense zone bleue ? Pourquoi doter tout le jeu d’un pendant arcade assumé avec des scènes d’action irréalistes et des armes qui ne s’enraillent jamais… mais en limitant les munitions, obligeant le joueur à passer dix bonnes minutes à se désengager et à parcourir la moitié de la carte afin d’aller rejoindre un navire de ravitaillement avant de repasser dix minutes à retourner sur place pour finir le travail ? Bref, est-on face à une simulation, à une « simulaction », à un jeu d’action maladroitement délayé pour se faire passer pour une simulation ? La question reste ouverte.
Elle est d’autant plus pertinente que Das Boot offre réellement de bons moments : il peut en effet être particulièrement satisfaisant de traquer les communications radio adverses pour essayer de localiser un convoi, d’en identifier les premiers éléments après une observation aux jumelles, et de passer en plongée pour faire pleuvoir la mort avec des torpilles d’autant plus faciles à tirer qu’il n’est même pas nécessaire de pivoter le sous-marin dans la direction visée au périscope – et même si c’était le cas, la commande Alt + F fait tourner instantanément votre submersible, comme s’il se téléportait. Mais c’est comme si, à trop hésiter entre la simulation et l’arcade, le jeu ne savait jamais réellement où placer ses curseurs et proposait au final un jeu d’action avec le rythme d’un simulateur – alors qu’il aurait mieux valu faire exactement l’inverse.
Après de longues minutes de traque, les affrontements se limitent à des combats brouillons et totalement irréalistes, et si on est souvent très heureux de couler une dizaine de navires et d’abattre autant d’avions, l’idée de passer dix minutes à glander pour ravitailler risque de pousser bien des joueurs à écourter une mission sitôt le premier assaut fini. Les scènes de tir sur avion faisant davantage penser, pour leur part, à une sorte de brouillon primitif de titres à la Incoming, on se retrouve au final avec une expérience déséquilibrée qui se montre agréable à jouer par séquences mais qui échoue à l’être sur la durée faute de cohésion dans le rythme – le type même de logiciel qu’on prend plaisir à lancer dix minutes de temps à autres, mais dont on ne finit jamais la moindre mission en dépit d’un contenu objectivement rachitique. Les amateurs de simulation lui préfèreront les références évoquées plus tôt, et les amateurs d’action risquent d’en faire le tour en quelques minutes ; ce qu’on appelle un entre-deux maladroit, qui explique peut-être que le titre soit si peu cité de nos jours. Comme quoi, ce n’est pas si facile que cela, en fin de compte, de viser un large public…
Vidéo – Dix minutes de jeu :
NOTE FINALE : 13,5/20
Tout comme Blue Max : Aces of the Great War, développé par le même studio à la même période, Das Boot : German U-Boat Simulation entend entraîner l'austère simulation de sous-marin vers des eaux un peu plus accessibles au commun des mortels. Il n'y parvient certes qu'en partie, tanguant trop souvent entre des séquences de tir trop « arcade » et des séquences de navigation trop longues inutilement alourdies de changements de poste inutiles sans jamais s'approcher de la profondeur d'un Wolf Pack ou d'un Silent Service II, mais cela ne veut pas dire que l'expérience est désagréable – disons juste que l'aspect « simulaction » irréaliste se prête finalement assez mal à une chasse reposant sur la patience et sur l'observation silencieuse, et que c'est précisément l'aspect simplifié du jeu qui finit rapidement par composer sa principale limite. Il y a malgré tout largement matière à passer quelques heures à tenter de vaincre les cinq missions du programme, et même à être heureux d'y revenir de temps à autres, mais au final, il manque encore un petit quelque chose au titre pour réellement s'approcher de la cour des grands.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Énormément de raccourcis à mémoriser pour espérer accéder à des fonctions essentielles
– Des séquences d'action très limitées quel que soit le niveau de réalisme...
– ...et dans l'ensemble, un aspect « simulation » qui peine souvent à être crédible
– Seulement cinq missions
– Une gestion très fastidieuse du ravitaillement
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Das Boot sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« La simulation s’avère […] assez simple, peu d’options étant accessibles aux différents postes de votre U-Boot, ce qui risque de décevoir ceux qui sont passionnés par le réalisme ou la complexité des simulateurs. Ceux qui préfèrent l’action vont par contre se régaler ! »
Didier Latil, Génération 4 n°27, novembre 1990, 85%
« Les effets de couleur de ces vues sous-marines sont extraordinaires. On distingue à peine la silhouette du submersible ennemi qui s’approche de vous, prêt à larguer quelques salves. Toute la rédaction est restée muette d’admiration devant ce plan graphique… C’est dire ! […] Das Boot est un programme que vous devez posséder, ne serait-ce que pour ses graphismes et son animation, pour l’ambiance qu’il développe, une grande première sur PC. »
Olivier Hautefeuille, Tilt n°84, décembre 1990, 17/20
Version Amiga
Développeur : Artech Digital Entertainments, Ltd. |
Éditeur : Three Sixty Pacific, Inc. (Amérique du Nord) – Mindscape (UK) Limited (Europe) |
Date de sortie : Mai 1991 |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : Disquette 3,5″ (x2) |
Contrôleurs : Clavier, souris |
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 600 |
Configuration minimale : Système : Amiga 1000 – RAM : 512ko* Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée *Optimisé pour 1Mo |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Comme Blue Max, Das Boot aura été porté sur Amiga quelques mois après la sortie de la version PC, et comme Blue Max, il aura hélas laissé quelques plumes au passage. Pas du côté du contenu, bien sûr – ce qui est une bonne chose, car celui-ci n’était déjà pas énorme à la base – mais encore une fois, les graphismes et surtout le framerate souffrent beaucoup du passage d’un hardware à l’autre.
La palette de couleurs a bien évidemment rétréci au lavage ; ce n’est pas hideux, mais disons simplement que les dégradés du ciel ne font pas vraiment illusion, et que les effets de profondeur qui avaient tant décroché la mâchoire des journalistes de Tilt ne sont plus vraiment au programme ici. Ce ne serait pas une grosse perte si le tout n’affichait pas une nouvelle fois un framerate dépassant péniblement les cinq images par seconde pendant l’essentiel de la partie sur une configuration d’époque : bon courage pour parvenir à toucher un avion dans cette version. C’est fort heureusement moins pénalisant au moment de viser un navire ou un sous-marin avec une torpille, ces séquences se jouant rarement au dixième de seconde près, mais on dira simplement que cela ne rend pas service à un jeu qui étalait déjà quelques problèmes de rythme sur PC. Sans être idéales, les choses sont une nouvelle fois meilleures sur un Amiga 1200, où on peut alors espérer approcher les quinze images par seconde dans le feu de l’action. Rien de dramatique, mais le jeu reste indéniablement plus agréable à découvrir sur PC.
NOTE FINALE : 12/20 (Amiga 500/600/1000) – 13/20 (Amiga 1200 ou supérieur)
Comme son alter ego Aces of the Great War, Das Boot souffre sur Amiga d’un moteur un peu trop puissant pour le hardware de l’époque, qui rend les parties « arcade » plus fastidieuses qu’amusantes. Si les choses s’améliorent sur un Amiga 1200, la réalisation graphique n’en reste pas moins inférieure, et dans l’ensemble on n’a tout simplement aucune raison de lancer ce portage dès l’instant où on a accès à la version PC.