Blaster Master

Développeurs : Sun Electronics Corp. – Tokai Engineering
Éditeur : Sun Electronics Corp.
Titre original : 超惑星戦記メタファイト (Chōwakuseisenki Metafight, Japon)
Testé sur : NES
Disponible sur : 3DS, Switch, Wii, Wii U
En vente sur : Nintendo eShop (3DS, Wii U)

La série Blaster Master (jusqu’à 2000) :

  1. Blaster Master (1988)
  2. Blaster Master Jr. (1991)
  3. Blaster Master 2 (1993)
  4. Blaster Master : Enemy Below (2000)
  5. Blaster Master : Blasting Again (2000)

Version NES

Date de sortie : 17 juin 1988 (Japon) – Novembre 1988 (États-Unis) – 25 avril 1991 (Europe)
Nombre de joueurs : 1
Langue : Anglais
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version européenne
Spécificités techniques : Cartouche de 2Mb

Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :

Pour tous ceux qui aiment jouer sur NES, Sunsoft est un nom qui compte. Bien qu’il ne s’agisse en fait que d’une marque de la compagnie Sun Electronics Corp. – laquelle est active dans le jeu vidéo depuis la fin des années 70 – les retrogamers un minimum versés dans la ludothèque de la console de Nintendo lui associeront immédiatement des titres qui auront marqué bien des joueurs s’y étant essayés, le fameux Batman tiré du film de Tim Burton étant certainement l’un des plus célèbres.

Mais il serait certainement malvenu d’oublier Journey to Silius, Gremlins 2 ou encore U·four·ia – autant de logiciels qui viendraient à nous faire oublier que, pendant la plus grande partie des années 80, la compagnie japonaise était surtout connue pour ses très nombreux portages sur la console 8 bits, parmi lesquels on pourrait citer Spy Hunter, Fantasy Zone, Shanghai, Alien Syndrome, After Burner II… (beaucoup de jeux SEGA, ironiquement, comme on peut le voir). S’il fallait isoler une des premières licences originales imaginées par Sunsoft ayant réellement marqué les esprits, nul doute que le premier nom à sortir serait Blaster Master, un titre qui aura largement signé le début de ce qu’on pourrait considérer comme l’âge d’or de la firme en tant que studio de développement.

Histoire de démarrer très fort, commencez par vous figurer un jeune adolescent du nom de Jason qui voit un jour sa grenouille s’échapper pour aller patauger dans un fût radioactif qui trainait malicieusement par là. Les choses n’étant encore visiblement pas assez bizarres, notre héros décide de se lancer à la poursuite de son batracien en s’enfonçant sans se poser de question dans un souterrain (sauvage, sa campagne !) où il trouve un… tank.

Son premier réflexe est alors naturellement de grimper dans la machine et de se lancer dans une épopée improbable au péril de sa vie pour sauver sa grenouille, et je vous jure que je n’invente rien, tout est dans l’introduction visible en ouverture du test. À ceux qui voudraient connaître la marque du fabricant de moquette dont le scénariste a visiblement fumé le stock, je préciserai néanmoins que le scénario de la version originale japonaise du jeu nous mettait aux prises avec une énième invasion extraterrestre à repousser grâce à un prototype opportunément créé juste pour ça, on sera donc heureux de pouvoir profiter de quelque chose d’un peu plus original. Cela ne change de toute façon rien au concept du jeu : une longue aventure aux commandes de ce fameux tank (poétiquement nommé « Sofia the 3rd »)… mais pas que, car la grande force de ce Blaster Master, c’est comme on va le voir de ne pas s’être limité à un bête run-and-gun lambda.

Tout d’abord, votre char d’assaut futuriste semble remplir le rôle de n’importe quel personnage : il peut sauter et tirer, y compris vers le haut, ce qui est vraiment la base. La première originalité se manifeste lorsque vous appuyez sur Select : Jason descendra alors de son terrible engin pour continuer sa route à pied, avec sa propre barre de vie et sa propre arme.

Naturellement, notre héros étant sensiblement plus fragile et moins puissant que son véhicule (et le faire tomber de trop haut se traduira par sa mort instantanée), l’idée est surtout de lui permettre de se faufiler dans des endroits inaccessible à votre tank, comme par exemple ces portes qu’il peut franchir pour basculer alors… dans une vue de dessus à la Zelda ! Première grosse surprise : une sorte de jeu dans le jeu, où l’aspect action/plateforme horizontal laisse la place à du tir en vue de dessus, avec une arme qui peut d’ailleurs gagner en puissance et se doter de projectiles à tête chercheuse, voire se transformer en véritable faisceau, ce qui n’a pas que des avantages, mais nous y reviendrons. Dans ces séquences à pied, Jason pourra collecter des bonus, mais aussi parfois affronter des boss, ce qui lui permettra de ressortir avec… une pièce d’équipement flambant neuf pour son tank. Car oui, si votre blindé est assez limité en début de partie, il pourra bientôt voler, nager, détruire des blocs autrefois infranchissables, et même, à terme, rouler sur les murs !

Car la deuxième vraie trouvaille du jeu, c’est bien son aspect « semi-ouvert », à une époque où le terme de Metroidvania n’existait pas encore mais où Sunsoft appréciait déjà visiblement beaucoup le concept (qu’ils réutiliseraient d’ailleurs trois ans plus tard dans U·four·ia). Comme dans Metroid, le cheminement n’est pas (entièrement) linéaire : il y a des embranchements, des salles bonus, des culs de sac, et surtout de très nombreuses zones que vous considèrerez comme infranchissables, avant de découvrir que le dernier élément récupéré vous permet d’ouvrir de nouveaux passages. Et ça marche !

Le plus gros point fort du jeu reste à n’en pas douter son aspect exploration, ce besoin de concevoir, au fur-et-à-mesure, des routes optimisées pour savoir où aller et quand, où s’arrêter pour trouver des caches de bonus afin de vous refaire la cerise et de remplir vos réserves de munitions, et de parvenir à mener votre périple à son terme dans un délai décent, une partie pouvant facilement vous demander 2H30 à 3H – si vous survivez jusqu’au bout, naturellement. Une séance qui risque donc de virer à l’épreuve d’endurance puisque non seulement il n’y a pas de carte, mais il n’y a surtout ni sauvegarde ni mot de passe non plus. L’aventure sera donc à accomplir d’un trait, et vu qu’elle n’est pas exactement facile, attendez-vous à y passer beaucoup, beaucoup de temps.

Sincèrement, le concept est très bien trouvé, la réalisation est très réussie, les niveaux sont variés – pour un jeu de 1988, on sent déjà que Sunsoft a placé la barre à des hauteurs stratosphériques. De fait, on prend beaucoup de plaisir à jouer, et il faut une accumulation de petits errements qui, mis bout-à-bout, commencent à devenir prodigieusement énervants pour expliquer pourquoi Blaster Master n’hérite que d’une « bonne » note alors qu’il aurait sans doute pu aspirer à encore mieux. On a déjà parlé d’une difficulté parfois frustrante, abordons les cas où le jeu est difficile pour de mauvaises raisons.

Par exemple, quand votre personnage entre sur un écran pour se ramasser aussitôt un ennemi impossible à éviter et prendre des dégâts sans que vous ayez une quelconque possibilité d’y faire quoi que ce soit. Ou bien une imprécision assez énervante dans la gestion des masques de collision de votre arme de poing lors des phases à pied, qui fait que toucher un ennemi à vingt centimètres de vous est pratiquement impossible lorsqu’elle est à son niveau maximal ! Contre-productif. On pourra également soulever une inertie agaçante de la part de votre tank, mais là où le jeu peut réellement se montrer pénible, c’est quand vous ne savez pas où aller… et que vous réalisez qu’il va falloir retourner sur vos pas – et pas juste quelques écrans en arrière, non, il faudra se refarcir TOUTE votre épopée jusqu’au début ! Et le mieux, c’est qu’il faudra le faire DEUX FOIS !

Alors certes, vous aurez accès à quelques raccourcis, et votre tanks suréquipé aura d’autres arguments qu’au début du jeu, mais il faut aussi reconnaître que lorsqu’on ne sait plus où aller parce qu’on n’a pas souvenir d’une zone où on aurait pu passer en volant ou en roulant sur les murs, et qu’on doit virtuellement ré-explorer tout l’univers du jeu pour trouver la prochaine destination, alors qu’on joue depuis trois heures et qu’aller trop vite se traduira probablement par un game over à force d’encaisser des dégâts évitables… Autant de petites choses qui viennent parfois ternir le bilan d’un jeu qui a autrement parfaitement su positionner les bons curseurs aux bons endroits pour offrir une aventure mémorable. Le verdict est donc sans appel : Blaster Master est clairement un titre auquel il faut avoir joué dès l’instant où vous appréciez les logiciels impliquant le mélange action/exploration, et je doute qu’un quelconque possesseur de NES puisse regretter de le compter dans sa ludothèque. Alors armez-vous de patience, faites chauffer le café et mettez-vous au boulot : il y a quelque part dans ce monde une grenouille radioactive qui attend que vous veniez la sauver !

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 16,5/20 Sunsoft semblait régulièrement touché par la grâce lors de la période où la NES était sa machine de développement privilégiée, et Blaster Master n'en est qu'un des multiples démonstrations. Prenez ce qui aurait pu n'être qu'un énième titre d'action/plateforme atrocement générique, dotez-le d'une réalisation solide, variez ses phases de jeu, introduisez une composante exploration bien fichue, et vous obtiendrez un improbable et ambitieux patchwork quelque part entre Metal Warriors, MERCS et Metroid. Si tout n'est pas parfait dans le meilleur des mondes, avec un level design un peu extrême qui vous conduira littéralement à reparcourir toute la carte du jeu en sens inverse (plusieurs fois !), de longues sessions de jeu obligatoires, quelques imprécisions dommageables et une jouabilité parfois maladroitement injuste, le tout reste d'une efficacité suffisamment redoutable pour pouvoir placer sans hésitation ce Blaster Master parmi les meilleurs titres du genre sur NES. À découvrir si ce n'est pas encore fait, clairement.

CE QUI A MAL VIEILLI : – Ni mot de passe ni sauvegarde pour une aventure qui vous demandera au moins 1h30 en sachant où aller, et facilement le double en ne le sachant pas – Quelque imprécisions dans la jouabilité et les masques de collision – Une poignée de ralentissements – Des maladresses dans la difficulté – Une grosse dose de backtracking... – ...qui fait qu'on peut facilement ne plus avoir la moindre idée de la direction à prendre dans le dernier quart du jeu

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Blaster Master sur un écran cathodique :

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