
Développeur : Tamsoft Corporation
Éditeur : TAKARA Co., Ltd. (Japon) – Playmates Interactive Entertainment, Inc. (Amérique du Nord) – Sony Computer Entertainment Europe Ltd. (Europe)
Testé sur : PlayStation
Disponible sur : PlayStation 3, PS Vita, PSP
La série Battle Arena Toshinden (jusqu’à 2000) :
- Battle Arena Toshinden (1995)
- Battle Arena Toshinden 2 (1995)
- Battle Arena Toshinden Remix (1995)
- Battle Toshinden URA : Ultimate Revenge Attack (1996)
- Battle Arena Toshinden 2 Plus (1996)
- Battle Arena NiToshinden (1996)
- Battle Arena Toshinden 3 (1996)
- Toshinden 4 (1999)
Version PlayStation
Date de sortie : 27 décembre 1996 (Japon) – 31 mars 1997 (Amérique du Nord) – 27 juin 1997 (Europe) |
Nombre de joueurs : 1 à 2 |
Langue : Anglais |
Support : CD-ROM |
Contrôleur : Joypad |
Version testée : Version européenne |
Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (1 bloc) |
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Comment passe-t-on du statut de « killer app de la PlayStation apte à humilier la Saturn et son Virtua Fighter » à celui de « licence qui n’intéresse plus personne et qui glisse sur le toboggan de l’oubli » en un temps record ? Demandez à Tamsoft. Il se pourrait que le furtif succès de Battle Arena Toshinden leur ait donné des éléments de réponse.

Il faut dire que quand on développe pas moins de sept jeux appartenant tous à la même licence et au même genre en à peine deux ans, c’est soit qu’on a beaucoup d’idées, soit qu’on a très envie de gagner de l’argent d’abord et de se poser des questions ensuite – mais dans tous les cas, il y a de fortes chances qu’on n’ait pas nécessairement pris le temps d’analyser et de comprendre ce que le public plébiscite et la façon dont pourrait évoluer ses attentes à court terme. Tout occupé à produire à la chaîne des variations de moins en moins inspirées de la même chose en vertu du principe consistant à profiter au maximum d’une formule qui marche, le studio japonais aura rapidement senti par sentir le souffle de la concurrence sur sa nuque – et quand la concurrence s’appelle Namco ou SEGA, c’est un peu comme partir avec dix mètres d’avance dans une course contre Usain Bolt : il y a rapidement un moment où ça ne suffit tout simplement plus. Cerné de toutes part par les Tekken 2, les Virtua Fighter 3 ou les Dead or Alive, Il allait être temps pour la licence autrefois si populaire de sortir le grand jeu et de démontrer qu’elle avait les armes pour lutter avec les meilleurs. Telle était la mission de Battle Arena Toshinden 3.
Tel aura été son échec.

Sur le papier, en tous cas, le titre a d’emblée de l’ambition à revendre. Capitalisant sur son peu original scénario tournant autour d’un tournoi annuel, la licence y ajoute une mystérieuse organisation secrète qui tire les ficelles dans l’ombre, et qui chercherait à ramener un dieu destructeur appelé Agon Teos à la surface du monde.

De quoi dessiner des enjeux dramatiques pour chacun des personnages, avec sa dose de cinématiques qui en envoient plein les yeux… sauf que le scénario sera à aller chercher dans le manuel, car une fois en jeu il n’y a pour ainsi dire pas une seule forme de narration entre l’introduction et la cinématique de fin. Conséquence : non seulement il n’y a aucun réel enjeu narratif, mais il n’y a surtout aucune forme de background pour les différents personnages – du moins, pas avant d’avoir fini le jeu et de bénéficier d’un pavé de texte qui nous explique enfin pourquoi ils ont fait tout ça. Même si c’est fondamentalement anecdotique – qui joue à un jeu de combat pour son scénario ? – cela dit aussi en filigrane que ce troisième opus n’a visiblement aucune intention de bénéficier des efforts de mise en scène entraperçus dans Battle Arena Toshinden Remix. Un premier indice du principal péché d’un jeu qui ne semble jamais se donner les moyens d’aller au bout de ses idées.

Par exemple, en termes de contenu, Battle Arena Toshinden 3 cherche à annoncer la couleur d’entrée : non seulement le roster de quatorze personnages est déjà particulièrement conséquent pour un titre de 1996, mais il peut même atteindre des proportions gargantuesques avec un total de dix-huit combattants à débloquer, soit trente-jeux personnages au total !

Une variété impressionnante, et fatalement en trompe l’œil : comme on peut l’imaginer, Tamsoft – qui développait son quatrième épisode de la saga en un an – ne se sera jamais franchement donné le temps d’équilibrer sa sélection, et il ne faut surtout pas très longtemps pour réaliser que l’impressionnante liste de nouveau venus est très largement constituée… de personnage miroirs reprenant très exactement le style de combat et les attaques spéciales d’autres combattants. Autant dire qu’on est est très loin de l’approche d’un Samurai Shodown III qui offrait deux système de combat complètement différents pour chaque personnage : ici, plus on joue et plus on a le sentiment de visiter un village Potemkine où les façades ne servent qu’à dissimuler un grand vide en espérant que personne n’aura la curiosité d’aller regarder derrière. La poudre aux yeux se dissipe d’autant plus vite que la technicité est toujours aux abonnés absents : avec deux boutons ayant pour unique fonction de spammer les coups spéciaux, et une super-attaque-de-la-mort qui ne demande que d’appuyer à la fois sur □ et X, la plupart des personnages se maîtrisent en une poignée de secondes… ce qui aide à mesurer toutes les limites du gameplay.

Le gros problème étant d’ailleurs qu’à ce niveau-là, non seulement la licence n’a fait aucun progrès, mais elle trouve même le moyen de faire un sérieux pas en arrière. Alors certes, cet opus prend le risque de remplacer les arènes par des cages, ouvrant ainsi la possibilité d’envoyer un adversaire s’écraser contre un mur ou contre le plafond – et de façon plus intéressante, de rebondir sur ces mêmes surfaces pour amorcer une contre-attaque.

L’ennui étant que non seulement cette idée en partie piquée à Fighting Vipers supprime la sortie de ring et ses possibilités de retourner le combat, mais qu’elle souffre en plus de deux tares du game design : des combats qui s’éternisent, et l’imprécision notoire de la licence. Par défaut, le titre fait en effet le choix de supprimer la limite de temps (elle peut être réactivée) et de proposer des affrontements plus longs… parce que les attaques font très peu de dégâts. Cela tend déjà à réduire l’impact des prises spéciales (à quoi bon sortir une animation de quinze secondes avec le décor qui passe au noir pour une prise enlevant misérablement un huitième de la jauge de vie ?), mais il faut bien reconnaître que les principaux points forts de la licence – son fun et sa nervosité – se retrouvent ici délayés jusqu’à l’ennui, surtout lorsque débloquer des personnages demande de boucler à chaque fois un mode arcade long de pas moins de quatorze rencontres ; autant le dire, on regarde sa montre bien avant d’arriver au boss final – surtout quand la stratégie se limite à répéter en boucle les mêmes attaques.

Car le vrai problème reste surtout l’impossibilité physique de faire usage d’un minimum de finesse : sachant que les personnages mettent un temps infini à se retourner pour faire face à leur opposant après une roulade latérale – et que celle-ci constitue le seul mécanisme d’évitement avec une parade beaucoup trop efficace – il ne faut souvent que quelques secondes pour qu’un combat se transforme en chaos navrant où les deux combattants frappent dans le vide à cinq mètres de leur adversaire pendant que la caméra fait n’importe quoi, le tout à deux à l’heure.

De quoi laisser le temps de constater à quel point la réalisation assume un retard de plus en plus criant sur ses rivaux, avec ses décors vides et sans personnalité et ses personnages qui se ressemblent tous. Le clou du spectacle étant atteint lorsque le jeu propose un mode d’affichage en cinquante images par seconde… à condition de supprimer les textures des décors, ce qui donne l’impression de redécouvrir la 3D de 1993 ! Quand on se souvient de Virtua Fighter 2 sur Saturn qui, un an plus tôt, tournait déjà à soixante images par secondes et à une résolution bien plus élevée sur une console réputée techniquement plus faible, on sent bien que l’époque où Tamsoft épatait les joueurs avec ses textures et ses décors chiadés était déjà bien terminée. En ajoutant un contenu se limitant à un mode « Survie » et à un mode entrainement en-dehors du mode arcade, le bilan est accablant : Battle Arena Toshinden 3 tente beaucoup de choses, mais n’en réussit aucune.

Reste une expérience de bric et de broc qui peine de plus en plus à faire illusion : loin de la révolution annoncée, ce troisième opus fait davantage penser à une sorte de créature de Frankenstein où on aurait mélangé des idées dans un shaker sans réellement se soucier de leur pertinence ni de leur intégration avant de livrer le tout à la date convenue en priant pour que ça marche.

Raté : sous le feu nourri d’une presse de moins en moins dupe et face à un public qui ne mordait plus vraiment à l’hameçon, lui non plus, la licence allait être invitée à connaître une longue pause qu’elle aurait dû s’imposer et mettre à profit depuis des mois : le plus très attendu Toshinden 4 n’allait voir le jour que deux ans et demi plus tard. Le temps, sans doute, de faire le point et de méditer sur la manière d’essorer et de saboter une licence prometteuse qui aurait pu marquer l’histoire, mais qui aura préféré recréer à sa façon la fable du paysan face à la poule aux œufs d’or – pour la même conclusion. Conséquence amère, mais implacable : si vous souhaitez réellement découvrir ce qui faisait le charme de la licence qui ne sera pas restée dans le vent, commencez plutôt par un des deux premiers épisodes – bourrés de défauts, eux aussi, mais amusants.















Vidéo – Combat : Eiji vs. Ten Count :
NOTE FINALE : 13/20
Présenté comme l'épisode du renouveau, Battle Arena Toshinden 3 tente un certain nombre de choses, on ne peut pas lui enlever cela – le vrai problème étant qu'il les exécute mal. Entre des combats mal rythmés qui côtoient l'ennui, un mode arcade trop long, un gameplay imprécis, un roster massif en trompe-l’œil, une réalisation qui donne le sentiment de n'avoir pas avancé d'un pouce depuis le premier opus et un game design qui se limite trop souvent à spammer les deux mêmes attaques entre deux roulades, la série de Tamsoft donne surtout l'impression d'avancer en aveugle, abandonnant une partie de son fun et de son accessibilité au profit de mécanismes confus et mal intégrés. Les joueurs les plus impliqués pourront sans doute trouver quelques raisons de défendre le jeu, avec par exemple un système de contre qui aurait mérité un meilleur sort, mais face à une concurrence déchaînée qui faisait déjà mieux dans tous les domaines, le sort de la licence semblait déjà scellé. Bien essayé, mais (malheureusement) raté.CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des combats trop longs pour leur propre bien...
– ...et toujours aussi maladroits dans leur exploitation de la troisième dimension
– Un roster composé pour moitié de personnages miroirs reprenant les attaques des autres
– Un contenu qui peine de plus en plus à rivaliser avec celui de la concurrence...
– ...tout comme une réalisation qui fait du surplace, quand elle ne vire pas carrément à la blague en mode 50fps
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Battle Arena Toshinden 3 sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :
« Toshinden 1 (sic) fut fantastique en son temps. Toshinden 2 (sic) fut moyen. Toshinden 3 est carrément manqué, complètement en retard au niveau actuel de la technique. D’un faible intérêt, il se paye en plus le luxe d’être esthétiquement catastrophique et quasi-monochromique (sic). […] Médiocre et inutile. »
Greg, Joypad n°68, octobre 1997, 48%