Développeur : Thalion Software GmbH
Éditeur : Thalion Software GmbH
Testé sur : Amiga – Atari ST – PC (DOS)
La série Amber (jusqu’à 2000) :
- Amberstar (1992)
- Ambermoon (1993)
Version Amiga
Date de sortie : Mars 1992 |
Nombre de joueurs : 1 |
Langues : Allemand, anglais |
Support : Disquette 3,5″ (x3) |
Contrôleurs : Clavier, souris |
Version testée : Version disquette testée sur Amiga 1200 |
Configuration minimale : Système : Amiga 500/2000 – OS : Kickstart 1.3 – RAM : 1Mo Modes graphiques supportés : OCS/ECS Installation sur disque dur supportée |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Dans l’imaginaire des joueurs Amiga, Thalion Software évoque avant tout des titres comme Lionheart ou Wings of Death : le genre de logiciels magnifiques qu’on sortait pour épater tous ses amis et pour se persuader que la machine de Commodore avait décidément tous les arguments pour n’avoir rien à craindre face à l’angoissante montée en puissance du PC.
Eh bien, croyez-le ou non, mais on touche déjà là à un motif de frustration inavouable au sein du studio allemand, lequel aura rêvé durant toute son existence de connaître le succès via ses jeux de rôles… avant de voir ses espoirs systématiquement douchés, par malchance ou maladresse, jusqu’à une conclusion tragique : le dépôt de bilan en 1994, après l’échec d’Ambermoon, deuxième volet d’une trilogie qui ne sera finalement jamais arrivée à terme. Et comme un symbole, même l’héritier spirituel de la série des Amber, L’Albion paru sur PC en 1995 sous l’égide de Blue Byte, n’aura toujours pas rencontré le succès escompté. Quand ça ne veut pas… Toujours est-il qu’au commencement, à une époque où Thalion Software rêvait encore de titiller les maîtres du genre, Ultima en tête, débarqua celui qui se voulait la première pierre de la reconnaissance : Amberstar.
Figurez-vous le monde médiéval-fantastique de Lyramion, autrefois menacé par un seigneur démoniaque nommé Thornahuun. Vaincu par son propre fils Tar, Thornahuun parvint néanmoins à prendre possession de l’âme de son successeur, le corrompant jusqu’à faire de lui Tarbos, être maléfique qui répandit la terreur jusqu’à être emprisonné dans l’une des lunes de la planète.
Dorénavant, un sorcier maléfique nommé Marmion s’apprête à le libérer, et le seul moyen de l’en empêcher sera de réunir les treize fragments d’un puissant d’artefact : l’Étoile d’Ambre, ou Amberstar… et c’est là que votre héros, jeune aventurier (ou aventurière) éploré après la mort de ses parents, débute son aventure dans le village de Twinlake, sans de douter que le magicien Shandra est sur le point de l’envoyer sauver le monde…
Vous avez dit « classique » ? Des elfes, des nains, des gnomes, des orques, des magiciens et un grand méchant à tuer : tous les ingrédients sont là, et on sent bien que ce n’est clairement pas du côté de son univers que le jeu de Thalion Software va chercher à réinventer la poudre. La partie s’ouvre sur la création de votre personnage… en préambule de l’installation du jeu.
Première lourdeur dommageable : si jamais il vous prenait la fantaisie de démarrer une partie avec un autre personnage, votre seule option serait de réinstaller intégralement le jeu ! Prenez donc le temps de réfléchir et de potasser le manuel pour bien comprendre la fonction de chacune des compétences et des caractéristiques du programme, car une fois le choix arrêté, il ne sera plus temps de faire machine arrière. Une fois le logiciel installé et le jeu lancé, vous démarrerez dans le cimetière de Twinlake, avec une liberté totale pour partir explorer la ville ou même le monde. Prenez votre temps : vous n’accomplirez rien avec un personnage seul, et vu la difficulté du jeu, mieux vaudra consacrer les premières heures à circuler de ville en ville afin de composer le groupe de vos rêves en recrutant les volontaires que vous serez amené à rencontrer. Et là encore, réfléchissez bien, car il n’existe apparemment aucun moyen de forcer quiconque à quitter votre groupe une fois qu’il l’a rejoint (ou si ce moyen existe, il n’est en tous cas indiqué nulle part !).
Amberstar est donc un jeu en monde ouvert aux multiples influences. La plus évidente – comme pour n’importe quel jeu en monde ouvert de l’époque, serait-on tenté de dire – étant la saga des Ultima. Entre la vue de dessus adoptée à l’intérieur des bâtiments, la carte du monde explorable à pied, en cheval, en bateau ou même en aigle, et l’accent placé sur la discussion avec les différents PNJS du jeu, difficile de ne pas sentir immédiatement un lien assumé avec la saga initiée par Richard Garriott.
Mais que l’on pénètre dans une ville ou dans un « donjon », surprise : la vue bascule alors à la première personne pour offrir un déplacement en case par case évoquant énormément la saga des Might and Magic, cette fois. Vous allez donc alterner entre ces deux vues via une interface pas toujours très bien pensée, qui vous impose trop souvent de faire apparaître et disparaître des menus via le clic droit, et partir enquêter en interrogeant tout le monde, en prenant des notes, et en vous efforçant de ne pas faire n’importe quoi car il est tout à fait possible de se retrouver irrémédiablement bloqué. Le genre de petit tracas qui annonce hélas un long cortège d’erreurs de jeunesse qui donnent clairement un indice aux multiples raisons pour lesquelles la firme allemande n’aura jamais tout à fait réussi à percer dans le domaine du jeu de rôle.
En fait, ce n’est pas qu’on ne prenne pas de plaisir à jouer – le logiciel est objectivement agréable à parcourir – c’est plutôt qu’on a souvent le sentiment que le titre veut en faire trop, se montrer un peu trop présomptueux par rapport à ce qu’il a réellement à offrir. La plupart des villes du jeu ne contiennent ainsi souvent que deux-trois boutiques et une poignée de PNJs, entourés d’un labyrinthe interminable de rues aussi vides que laborieuses à parcourir.
On passe un de ces temps à se déplacer pour rien ! Même le monde extérieur est mal pensé : on ne peut pas y faire cent mètres sans qu’il se mette à faire nuit et qu’on perde dix secondes à aller utiliser une torche qui s’éteindra cent autres mètres plus loin. Plus grave : faute de combats (en-dehors des éventuels trolls lorsque vous franchirez un pont), le monde en question n’a strictement rien à offrir en-dehors des villes et des donjons qui sont de toute façon pratiquement tous indiqués sur la carte. Additionné à l’interface susmentionnée qui oblige à multiplier constamment les allers-et-retours d’un menu à l’autre avec des icônes peu claires, le jeu exhale une certaine lourdeur qui commençait à faire un peu tache en 1992 – rappelons qu’Ultima VII et son interface limpide à deux boutons étaient parus quelques mois plus tôt !
Rien de rédhibitoire, mais un sentiment tenace, néanmoins, qu’on passe beaucoup de temps à faire des choses pas passionnantes et qui pourraient être accomplies deux fois plus vite. Sensation renforcée par un système de développement de personnage mal pensé, vos héros étant littéralement incapables de toucher une vache dans un couloir avant d’avoir atteint un bon niveau, ce qui signifie qu’il faudra peut-être une bonne dizaine d’heures de jeu pour espérer voir votre groupe ne pas rater 95% de ses attaques ! Et comme le repos ne vous fait généralement regagner que quelques maigres points de vie et de mana, attendez-vous à multiplier les allez-et-retours pour vous refaire une santé en ville sous peine de passer un quart d’heure à multiplier les nuits de sommeil et à griller vos réserves de rations pour vous refaire une santé. Le genre de détails qui amène à se demander si Thalion a réellement joué à son propre jeu…
Niveau réalisation, Amberstar souffle également le chaud et le froid. Graphiquement, si le titre est sympathique, ce serait mentir que prétendre qu’il peut rivaliser avec les ténors parus la même année : sa partie 2D est à des kilomètres d’Ultima VII – et même d’Ultima VI, d’ailleurs, pour être honnête – et la partie 3D, beaucoup trop redondante, ne joue clairement pas dans la même cour que ce que proposent Might and Magic IV ou The Legacy. Sans être moche, le logiciel a déjà du mal à se hisser dans le haut du panier de l’Amiga, ne parlons même pas du PC.
Sachant que c’était normalement l’un des points forts du studio, il y a de quoi être surpris. En revanche, les compositions musicales signées Jochen Hippel sont nettement plus réussies, et parviennent à installer l’ambiance avec une belle efficacité. Je vous invite à écouter le thème de l’écran-titre : on a connu des jeux sur CD-ROM qui n’atteignaient pas cette qualité sonore ! L’univers, même s’il manque cruellement de profondeur (là encore, comparez avec Ultima VII…), est sympathique et peut largement attiser la curiosité du joueur suffisamment longtemps pour qu’il parvienne à mettre de côté les (très) nombreux désagréments évoqués plus haut. Car pour peu qu’on accède à un groupe de bon niveau et bien construit, Amberstar peut s’avérer réellement prenant et inviter à y passer les dizaines d’heures nécessaires à sa conclusion. La vraie question étant de savoir si vous aurez la patience d’attendre dix à quinze heures pour en arriver là…
Autant le dire : le jeu transpire la maladresse à tellement de niveaux qu’on ne peut que grincer des dents en constatant son indéniable potentiel. Est-il à la hauteur de ses illustres modèles ? Non, clairement pas.
En est-il loin ? Pas tant que ça, au fond. Son système de combat tactique, par exemple, aurait indéniablement été plus convaincant que le tournant arcade opéré par la dernière trilogie des Ultima s’il avait été plus rapide et mieux équilibré. Des plans mieux pensés, des PNJs plus nombreux, un univers plus guidé auraient également aidé le joueur à se sentir plus impliqué et moins perdu. Et cette interface, bon sang, quelle plaie… Autant de petites failles qui viennent indéniablement fissurer un édifice qui laissait augurer du meilleur. Les amateurs de jeux de rôle prêts à consacrer un peu de temps au titre devraient malgré tout passer un bon moment, mais les autres seraient bien avisés de commencer directement par Albion. On n’a pas toujours envie de laisser des heures à un titre pour qu’il commence à dévoiler ses atouts.
Vidéo – Quinze minutes de jeu :
NOTE FINALE : 13,5/20 Sur le papier, Amberstar avance avec l'ambition de David face aux Goliath historiques du genre : une large dose d'Ultima, un soupçon de Might and Magic... sans oublier quantité d'éléments qu'on sent directement importés de Dragonflight, le précédent jeu de rôle de Thalion. Si le résultat a quelques aspects emballants, une foule de maladresses empêche le titre de prétendre à ses aspirations initiales, entre un aspect exploration à l'intérêt limité, des combats trop longs et mal équilibrés, un monde qui sonne creux à trop de niveaux et une lourdeur générale qui fait qu'on passe plus de temps à essayer de se mettre en ordre de marche qu'à réellement jouer. Difficile de ne pas sentir l'énorme potentiel que recèle la formule, mais en l'état, il faudra être d'une patience à toute épreuve pour mener l'aventure jusqu'à son terme. Un titre sympathique, mais qui aurait pu aspirer à beaucoup mieux avec un minimum de rééquilibrages.
CE QUI A MAL VIEILLI : – Impossible de créer un nouveau personnage sans réinstaller le jeu ! – Une certaine lourdeur dans l'interface – Un système de développement de personnage raté... – ...et des combats qui nécessiteront de très longues heures avant de se résumer à autre chose qu'à des suites d'attaques ratées – Beaucoup de temps passé à se déplacer dans un monde beaucoup trop grand pour ce qu'il a à offrir – Des occasions de se retrouver bloqué définitivement – Des fonctions essentielles expliquées nulle part (est-il seulement possible de demander à un personnage de quitter votre équipe ???)
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Amberstar sur un écran cathodique :
Version Atari ST
Développeur : Thalion Software GmbH |
Éditeur : Thalion Software GmbH |
Date de sortie : 16 avril 1992 |
Nombre de joueurs : 1 |
Langues : Allemand, anglais |
Support : Disquette 3,5″ double face (x3) |
Contrôleurs : Clavier, souris |
Version testée : Version disquette 1.94e testée sur Atari 1040 STe |
Configuration minimale : Système : 520 ST – RAM : 512ko Écran couleur requis Installation sur disque dur supportée |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
L’Atari ST n’était peut-être pas au sommet de sa forme en 1992, mais Thalion croyait encore en lui, visiblement. En fait, un certain Udo Fischer étant crédité pour la conversion sur Amiga, on peut même aller jusqu’à en déduire que le jeu a été développé sur Atari ST. Un sentiment qui tend à se confirmer une fois en jeu : les graphismes sont strictement identiques à ceux de la version Amiga, prouvant par là même que celle-ci tournait en seize couleurs (dans les faits, certains écrans du jeu affichent 27, 43, voire 74 couleurs simultanément, rappelant au passage que Thalion savait aussi se débrouiller avec la machine d’Atari). Le contenu n’a pas changé d’un iota, lui non plus, mais la qualité du rendu sonore a, sans surprise, baissé d’un cran. Cela reste heureusement très honnête, mais autant dire qu’à tout prendre, mieux vaudra découvrir le jeu sur Amiga.
NOTE FINALE : 13/20
Aucune surprise pour ce Amberstar sur Atari ST, qui pêche comme on pouvait s’y attendre du côté du son. Le reste étant exactement identique à ce qu’on pouvait trouver sur Amiga, voilà une version très correcte mais avec peu d’arguments pour faire pencher la balance en sa faveur.
Version PC (DOS)
Développeur : Thalion Software GmbH |
Éditeur : Thalion Software GmbH |
Date de sortie : Octobre 1992 |
Nombre de joueurs : 1 |
Langues : Allemand, anglais |
Supports : CD-ROM, disquette 3,5″ (x5) |
Contrôleurs : Clavier, souris |
Version testée : Version disquette émulée sous DOSBox |
Configuration minimale : Processeur : Intel 80286 – OS : PC/MS-DOS 3.3 – RAM : 640ko Mode graphique supporté : VGA Cartes sons supportées : AdLib, haut-parleur interne, Sound Blaster, Thunderboard |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Difficile de faire l’impasse sur le PC en 1992. Thalion aura donc choisi de porter Amberstar sur la machine d’IBM… avec des efforts minimaux. Graphiquement, par exemple, on ne peut pas franchement dire que le jeu tire parti du VGA : à quelques très rares nuances de couleurs près, le jeu est identique à ce qu’offraient les seize couleurs de l’Atari ST. Les teintes sont un peu plus vives, mais rien de franchement immanquable si on ne place pas les captures d’écran côte-à-côte. Du côté musical, les quelques cartes sonores reconnues s’en tirent plutôt bien, et sans se hisser tout à fait à la hauteur de la version Amiga à ce niveau-là, le résultat n’en est vraiment pas loin et est clairement meilleur que sur ST. Au rang des bonnes nouvelles, si la création de personnage était originellement aussi lourde que sur les autres versions, Un exécutable nommé Makechar.exe a depuis été mis à disposition des joueurs afin de pouvoir recommencer une partie sans réinstaller le jeu.
NOTE FINALE : 13,5/20
Amberstar sur PC n’a clairement pas à rougir face à la version parue sur Amiga – ce qui, en 1992, commençait à être un minimum. La réalisation, sans réellement tirer parti des capacités de la machine d’IBM, offre néanmoins des performances largement équivalentes à celles observées sur celle de Commodore. Aucune raison de la bouder, donc.