Développeur : Atlus Co., Ltd.
Éditeur : Atlus Co., Ltd.
Titre original : Mesopotamia (Japon)
Titre alternatif : メソポタミア (graphie japonaise)
Testé sur : PC Engine
Version PC Engine
Date de sortie : 4 octobre 1991 (Japon) – Décembre 1992 (États-Unis) |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : HuCard |
Contrôleur : Joypad |
Version testée : Version américaine |
Spécificités techniques : HuCard de 4Mb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Pour la plupart des retrogamers occidentaux, la PC Engine est une excellente terre de prospection dans deux domaines : le shoot-em-up (en incluant son sous-genre à pied, le run-and-gun) et les titres dépaysants – le terme « dépaysant » désignant souvent des jeux perçus comme « trop japonais », esthétiquement ou culturellement, pour avoir une chance d’être bien reçus à l’international sans subir au préalable un abondant coup de peinture souvent accompagné d’une censure au couteau de boucher.
Mais il faut bien reconnaître que cet « exotisme » qui donne son charme à une large partie de la ludothèque d’une machine n’ayant jamais réellement percé hors de l’Archipel n’impacte finalement qu’assez rarement le gameplay : remplacez les personnages d’Obocchama-kun ou de Kaizō Chōjin Shubibinman par une souris et un canard de chez Disney – avec l’univers afférent – et vous aurez bien souvent un jeu lambda n’ayant rien de spécifiquement original à proposer.
Et puis il y a aussi les jeux dépaysants au-delà de leur esthétique ou de leurs références. Et dans le domaine, il y a presque de quoi être déçu qu’on n’évoque pas plus souvent Somer Assault, qui accomplit le paradoxe d’avoir à la fois un caractère assez classique et de ne ressembler à rien d’autre à pratiquement tous les niveaux.
Commençons par le commencement : imaginez une sorte de sorcière sumérienne désirant régner sur le monde. Pour se faire, elle invoque douze créatures correspondant aux douze signes du zodiaque histoire de bousiller tout ce qui bouge, parce que bon, quitte à être méchante… et c’est là qu’intervient un… un truc.
Bon là, déjà, se dessine la première difficulté : je ne vois même pas comment décrire ce qui sera le personnage (ou est-ce un véhicule ?) que vous allez incarner pendant les douze niveaux du jeu. Une espèce de ver croisé avec un tuyau en PVC qui se déplace en pivotant d’une extrémité à l’autre ? Le plus simple est sans doute que vous alliez jeter un œil à la vidéo du premier niveau, où vous découvrirez à la fois l’histoire et le… le bidule, là. Car c’est là qu’on en arrive au jeu en lui-même, qui va envoyer votre bitoniau faire feu (oui, il peut tirer) sur l’opposition dans des environnements à l’esthétique inspirée de la Mésopotamie (d’où le titre original du jeu, remplacé par un subtil jeu de mot faisant référence à la ville de Sumer dans la version américaine). Je vous laisse recombiner le tout : sorcière, Mésopotamie, bitoniau, run-and-gun. Ça ne commence déjà pas mal, non ?
Le principe est à la fois très simple et un peu différent de ce à quoi nous ont habitué à peu près tous les représentants du genre. Il s’agit bel et bien de boucler tous les niveaux du jeu, systématiquement clôturés par un boss correspondant à un signe zodiacal… notez d’ailleurs que le logiciel commencera par vous demander le vôtre, ce qui aura des répercussions sur le déroulement de la partie – assez mineures, mais je vous en laisse la surprise lorsque vous affronterez le boss rattaché à votre signe.
Quoi qu’il en soit, c’est également là que votre bidule entre en jeu : comme on pouvait s’en douter, il ne vole pas, et on ne peut pas vraiment dire qu’il marche non plus. En revanche, il peut très facilement se déplacer aux murs et au plafond, ce qui fait que le game design va souvent mettre en jeu une composante « exploration » en vous demandant de commencer par trouver le boss – un aspect assez original dans un jeu de tir, puisque la menace sera moins représentée par des adversaires assez discrets que par la limite de temps, nettement plus dangereuse, elle. L’idée va donc moins être de faire appel à vos réflexes et à une action débridée qui sera réservée au boss, mais plutôt d’apprendre à maîtriser le plan de chaque niveau et de ses subtilités comme les téléporteurs ou les dalles piégées afin de pouvoir le boucler dans le temps imparti.
Cela pourrait être atrocement frustrant si le titre n’avait pas la bonne idée d’alterner les niveaux en ligne droite aux plans plus tentaculaires, et s’il n’avait pas l’intelligence de ne jamais verser dans le labyrinthe totalement impardonnable avec deux-cents possibilités et une seule bonne route à prendre.
Certes, ce n’est pas nécessairement l’approche que viendront chercher les fans d’action, mais pour ceux qui voudraient tout simplement un jeu solide sortant un peu de la masse pour proposer quelque chose de différent, Somer Assault reste très accessible tout en proposant quelques subtilités bienvenues. La plus intéressante à maîtriser est d’ailleurs liée au mode de déplacement de votre machin, qui se plie et se déplie comme un accordéon : ses tirs ne se comporteront pas de la même façon selon qu’il soit en extension ou ramassé, ce qui signifie qu’il faudra apprendre à choisir la bonne « étape » de votre démarche pour faire feu là où vous le désirer, quitte à étendre la taille de votre masque de collision. Cela a peut-être l’air compliqué dit comme cela, mais rassurez-vous : une fois la manette en main, vous aurez tout compris au bout de dix secondes, et c’est sans doute la plus grande force du jeu.
Au rang des défauts, on pourra regretter que le concept n’ait pas été poussé un peu plus loin pour offrir davantage de variété. Qu’il s’agisse des power-up, des ennemis ou des environnements, on ne peut pas dire que l’esthétique comme les situations ou le gameplay se renouvèlent beaucoup, et en dépit d’une efficacité certaine le jeu finit par s’essouffler un peu trop rapidement et par ressembler à un simple boss rush d’autant plus redondant qu’il faudra ré-affronter une deuxième fois tous les boss du jeu (oui oui, les douze) à la suite avant d’avoir le droit d’arriver au combat final !
De quoi être un peu déçu, car avec davantage de pièges, de types de dalles, de patterns ennemis et des graphisme qui daignent s’éloigner des motifs de vieilles pierres, on aurait vraiment eu un jeu capable de marquer les mémoires et de se montrer prenant de la première à la dernière seconde. En l’état, il n’en est pas moins sympathique à faibles doses, et pourra même capter l’intérêt d’une partie des joueurs jusqu’à son terme. Mon conseil ? Essayez-le.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 15/20 Si vous pensiez ne plus pouvoir être surpris par un run-and-gun, le moment est certainement bien choisi pour découvrir Somer Assault. Improbable mélange entre les signes du zodiaque, la culture mésopotamienne et un véhicule/personnage dont la simple description représente déjà une colle, le titre imaginé par Atlus a pour lui un gameplay atypique nécessitant une légère courbe d'apprentissage sans pour autant laisser le joueur démuni lors des premiers instants, et un game design reposant bien davantage sur l'exploration que sur la destruction systématique d'une opposition d'ailleurs assez discrète. C'est dépaysant sans être déstabilisant et suffisamment original pour donner envie de s'accrocher jusqu'au bout de la partie, même si on pourra regretter que les possibilités ne soient pas plus étendues du côté des power-up ou des pièges rencontrés. Une expédition qui s'essouffle un peu sur la durée mais qui mérite d'être tentée, ne fut-ce que parce qu'il est difficile de lui trouver un réel équivalent. Un petit peu d'air frais dans un genre qui en avait besoin.
CE QUI A MAL VIEILLI : – La limite de temps, dont on aurait très bien pu se passer dans un jeu de ce type – Un gameplay original, mais qui manque un peu de profondeur – Un boss gauntlet qui nécessite de se re-farcir les DOUZE boss du jeu à la suite ? Sérieusement ?
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Somer Assault sur un écran cathodique :
Les avis de l’époque :
« Si la conception de Mesopotamia (NdRA : le titre japonais du jeu) est assez originale, surtout à cause de la limitation de vos mouvements, il n’en est pas de même pour la réalisation, qui loin d’être bâclée n’est cependant pas fantastique. Certes, les graphismes sont variés et tombent à propos compte tenu du scénario du jeu, mais en vérité je vous le dis, on est loin d’être devant un chef d’œuvre. »
Jean-Marc Demoly, Joystick n°22, décembre 1991, 75%