
Développeur : Polyphony Digital Inc.
Éditeur : Sony Computer Entertainment Inc. (Japon) – Sony Computer Entertainment Europe Ltd. (Europe) – Sony Computer Entertainment America Inc. (Amérique du Nord)
Titre alternatif : Gran Turismo (titre usuel)
Testé sur : PlayStation
Présent au sein de la compilation : 2 Games : Gran Turismo / Motor Toon Grand Prix 2 (2003 – PlayStation)
La série Gran Turismo (jusqu’à 2000) :
- Gran Turismo : The Real Driving Simulator (1997)
- Gran Turismo 2 : The Real Driving Simulator (1999)
Version PlayStation
| Date de sortie : 23 décembre 1997 (Japon) – 5 mai 1998 (Europe) – 13 mai 1998 (Amérique du Nord) |
| Nombre de joueurs : 1 à 2 |
| Langues : Allemand, anglais, espagnol, français, italien, japonais |
| Support : CD-ROM |
| Contrôleurs : DualShock, joypad, NeGcon |
| Version testée : Version européenne |
| Spécificités techniques : Système de sauvegarde par carte mémoire (5 à 15 blocs) |
| Liens utiles : Patch de compatibilité avec les systèmes modernes |
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Il existe des révolutions si discrètes que personne n’a tendance à les considérer comme telles, et pourtant si renversantes qu’elles en viennent à modifier jusqu’à la forme des futures révolutions.

De révolutions, il aura beaucoup été question dans les années 90 – en termes vidéoludiques, s’entend. Avec l’arrivée de la 3D, de deux nouvelles générations de consoles et des cartes accélératrices, la démocratisation du support CD-ROM et la naissance du multimédia, sans oublier le début de la domination de Windows dans l’écosystème du PC – et de la domination du PC dans l’écosystème informatique –, beaucoup de choses auront changé très vite au cours de cette décennie. Pourtant, les « révolutions » vidéoludiques à proprement parler, de celles qui auront durablement impacté le gameplay et la conception du game design, n’auront au final pas été si nombreuses que cela, et auront souvent reposé sur des ensembles de détails plutôt que sur des bouleversements techniques majeurs. Le jeu d’aventure aura moins été chamboulé par l’apparition de la vidéo que par la concurrence d’autres types de jeu incluant de plus en plus régulièrement une narration poussée, la stratégie aura changé dans son rythme et son accessibilité plus que dans ses mécanismes, et les jeux de course… eh bien, justement, comment espérer révolutionner un concept aussi extraordinairement précis que celui du jeu de course ? La première révolution, la révolution technique, avait eu lieu dès la première moitié des années 90 avec Virtua Racing et Ridge Racer, alors que pouvait-il bien rester à bouleverser au sein d’un genre dont plus personne n’attendait de surprise en 1997 ?

La réponse aura été apportée par le premier opus d’une licence dont tout le monde a aujourd’hui entendu parler : Gran Turismo. Et comme toutes les réponses géniales, elle aura été la rencontre à la fois d’une grande simplicité et de l’ambition nécessaire à la mettre en oeuvre.

En lançant le mode « Arcade » de Gran Turismo, on découvre d’ores et déjà un jeu qui avait tous les arguments pour figurer parmi les meilleurs jeux de course de la ludothèque de la PlayStation en 1997, face aux ténors alors considérés comme indéboulonnables qu’étaient la saga des Ridge Racer d’un côté et celle des Need for Speed de l’autre. On a alors quatre circuits disponibles dès le lancement – ce qui est déjà davantage que tout ce qu’avaient eu à offrir chacun des épisodes de la série des Ridge Racer à cette date – et une quinzaine de véhicules aux caractéristiques diverses répartis entre six constructeurs réels ; à grande domination japonaise, certes, mais Aston Martin et Chevrolet sont également de la partie.

La 3D est incontestablement à la pointe de 1997 : la modélisation des véhicules est bluffante, avec la gestion des reflets sur la carrosserie, les environnements sont détaillés, la distance d’affichage est si bonne qu’on ne remarque jamais le plus petit effet de clipping, la sensation de vitesse est excellente – de quoi renvoyer les développeurs de Need for Speed II ou de Rage Racer à leurs chères études. Comble de bonheur : la jouabilité est un parfait mélange entre l’accessibilité de l’arcade et le réalisme de la simulation, sans avoir à maîtriser des dérapages irréalistes, avec un vrai travail à effectuer sur la vitesse et les trajectoires pour espérer performer. En y ajoutant un contre-la-montre, un mode deux joueurs, et des circuits additionnels à débloquer, on tenait déjà là un sérieux candidat au titre de meilleur jeu de course de la machine.
Sauf que ce mode « Arcade » est à peine une mise en bouche.

Car le véritable mode principal, c’est celui qui porte le nom du jeu – et qui aura apporté la véritable révolution, au fond la plus évidente de toutes pour le genre : celle du contenu. Imaginez-vous démarrer avec un garage vide et un petit pécule à peine suffisant à acquérir une voiture d’occasion. La partie va donc s’ouvrir sur la visite des différents concessionnaires – dix au total, d’Aston Martin à Subaru en passant par Chrysler, Toyota ou TVR – afin d’aller trouver votre premier bolide… parmi une sélection de plus de 150 véhicules, tous fidèlement modélisés selon des modèles réels !

Évidemment, pas question pour l’heure de s’offrir autre chose que le bas de gamme des modèles d’occasion et de se diriger vers une sélection de compétitions qui a de quoi donner des bouffées de chaleur aux quatre courses de Rage Racer : quatre types d’événements (dont un contre-la-montre et des courses individuelles qui feront figure d’entraînement), une quinzaine de courses – jouables en sens inverse – et divers championnats, parfois accessibles uniquement à une certaine catégorie de véhicules, afin de gagner suffisamment d’argent pour pouvoir acquérir de meilleurs bolides – et de meilleurs composants, nous y reviendrons – afin d’avoir une chance de rivaliser dans les compétitions les plus exigeantes. L’équivalent de ce qu’on pourrait considérer comme le premier véritable mode « carrière » du genre. Et le mieux ? C’est qu’il n’a pas pris une ride !

Certes, avant de pouvoir accéder à tout le contenu de ce mode « Gran Turismo », il va falloir franchir divers paliers – matérialisés ici par des niveaux de permis dont il faudra surmonter toutes les (courtes) épreuves avant d’espérer les obtenir. Il s’agira principalement de réaliser des portions de circuits données dans des délais extrêmement serrés nécessitant une parfaite maîtrise du véhicule imposé pour l’occasion ; si obtenir le permis « B » ne devrait pas vous demander des heures d’entrainement, les niveaux supérieurs, eux, se montreront beaucoup plus exigeants et représenteront un véritable cap à franchir pour espérer accéder aux championnats les plus exigeants.

Vous aurez de toute façon l’occasion de vous entraîner : le seul moyen de gagner de l’argent étant de finir sur le podium d’une course (ou de signer une pole position lors des essais), vous risquez d’être amené à répéter certaines compétitions le temps d’accumuler assez d’argent pour vous payer la voiture de vos rêves… ou pour l’améliorer. Car une offre impressionnante est à votre disposition pour booster chacun de vos véhicules (vous pouvez en accumuler une véritable collection à l’intérieur de votre garage) : pneus, embrayage, volant, amortisseurs, moteur et des dizaines d’autres peuvent être améliorés contre monnaie sonnante et trébuchante, avec des effets parfois spectaculaires : quand votre moteur de 280 chevaux se transforme en un monstre à 800 chevaux, attendez-vous à ce que les sensations en course ne soient plus exactement les mêmes ! Et le mieux est que chacun de ces composants ouvrira également l’accès à des réglages poussés qui sauront régaler les amateurs de simulation désireux d’aller modifier la pression du moindre de leur pneu. De quoi y passer des dizaines d’heures !

Les possibilités sont réellement grisantes – non seulement le nombre de circuits est sans commune mesure avec ce qu’offrait la concurrence, mais en plus on prend authentiquement plaisir à redécouvrir un circuit au volant d’un bolide beaucoup plus puissant qui impose une conduite assez différente – et renvoient les licences concurrentes au rang de simples démos payantes. Le bilan est même si idyllique qu’on en vient à être surpris de l’absence de quelques mécanismes importants, comme la gestion des dégâts : vos véhicules sont virtuellement indestructibles et ne souffriront jamais de la plus infime rayure après un crash à 350 km/h, ce qui est un peu décevant dans un titre qui avait tous les éléments à la fois pour que des composants endommagés impactent la conduite, et pour que les réparer engage des dépenses.

On aurait également pu bénéficier d’options plus nombreuses pour le multijoueur, ou d’un mode « Arcade » bénéficiant de tout le contenu du mode « Gran Turismo » – après tout, plus on en a, plus on en veut, et avec ce que le jeu a à offrir, le moins qu’on puisse dire est qu’il nous ouvre rapidement l’appétit. Difficile d’en exiger plus sur un unique CD-ROM, et le bilan est incontestable : l’opposition sur console est totalement balayée à tous les niveaux, et si les simulations les plus poussées, notamment sur ordinateur, pouvaient parfois espérer rivaliser au nombre de circuits, elles étaient pulvérisés sur l’accessibilité et sur ce mode principal de génie qui allait bientôt devenir la matrice incontournable du genre. De quoi changer à jamais la perception de ce que devait offrir un jeu de course, et de quoi offrir à la nouvelle licence de Polyphony Digital une avance de plusieurs années sur des concurrents littéralement laissés sur place. Un titre qu’on peut encore prendre un véritable plaisir à découvrir aujourd’hui. Que du bonheur.



























Vidéo – Course : High Speed Ring :
NOTE FINALE : 19/20
Gran Turismo aurait pu n'être qu'un jeu de course très bien réalisé avec une jouabilité irréprochable, et il aurait probablement déjà mérité son succès tant le titre parvient déjà à tenir la dragée haute aux références du genre dans ces deux domaines. Néanmoins, s'il est un domaine que le titre de Polyphony Digital sera réellement parvenu à révolutionner, c'est celui du contenu : avec plus de 140 véhicules différents, une quinzaine de circuits jouables dans les deux sens, un mode principal capable de tenir le joueur en haleine pendant une dizaine d'heures et du multijoueur en écran splitté, les Rage Racer ou les Need for Speed II passaient soudain pour de vulgaires démos payantes en comparaison ! En y ajoutant une accessibilité qui conviendra parfaitement aux néophytes et une profondeur qui pourra combler – en partie – les fans de simulation, on obtient ce qui pouvait le plus correspondre à la définition de la perfection pour un jeu de course de 1997, et ce qui demeure l'inspiration d'à peu près tout ce qui l'a suivi en la matière depuis lors. Un monument toujours très agréable à découvrir de nos jours.
CE QUI A MAL VIEILLI :
– Aucune gestion des dégâts
– Des environnements urbains qui manquent un peu de variété
– Des thèmes musicaux pas assez nombreux si l'on considère le temps qu'on va passer à jouer
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Gran Turismo sur un écran cathodique :

