Développeur : HECT Co., Ltd.
Éditeur : DTMC Inc.
Titre original : キャデラックII (Cadillac II, Japon)
Titre alternatif : Square Deal (titre usuel)
Testé sur : Game Boy
Version Game Boy
Date de sortie : 30 novembre 1990 (Japon), 10 mars 1992 (États-Unis) |
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Game Link) |
Disponible en français : Non |
Disponible en anglais : Oui |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Console |
Version testée : Version américaine |
Spécificités techniques : Cartouche de 512kb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Bien avant d’inscrire son nom en bonne place au sein de la légende vidéoludique, la Game Boy aura dû escalader un à un les échelons de la légitimité.
D’abord perçue comme un gadget qui présentait toutes les caractéristiques d’un feu de paille (« un écran monochrome ? Le processeur d’un ZX Spectrum ? Des jeux qui pèsent 10ko ? »), le succès foudroyant de son bundle de lancement l’aura ensuite involontairement transformée en un autre concept réducteur dont il aura fallu se débarrasser à son tour : la console qui fait tourner Tetris. Bien que le titre d’Alekseï Pajitnov ait été porté sur à peu près tous les supports imaginables, il se prêtait si excellemment à l’expérience nomade que la portable de Nintendo en sera devenue un terreau privilégié pour tester un genre naissant : les puzzle games. Comme toutes les modes, celle-ci aura offert aux joueurs à boire et à manger, avec quelques surprises dans le tas. Et voici justement une des premières : Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker.
Comme le suggère son improbable sous-titre, Square Deal est donc un jeu basé… sur le poker. Bien avant que The Witcher ne nous apprenne à pratiquer le poker avec des dés, le titre de HECT va donc reposer sur des combinaisons : au minimum des brelans ou des couleurs sur trois cartes (on ne peut faire des paires qu’en mode deux joueurs), le but n’étant pas tant de nettoyer le plateau, comme dans la plupart des titres du genre, que de chercher à faire grimper le score.
Pour deux raisons, d’ailleurs assez bien pensées comme nous le découvrirons un peu plus tard : la première étant qu’une partie ne se poursuis pas à l’infini jusqu’à ce que vous perdiez. Non, dans Square Deal, on joue avec un jeu de 52 cartes, et pas une de plus. Une fois toutes les cartes posées, la partie se termine, et une pénalité vous sera comptée pour chaque carte subsistant sur le plateau. Ce qui nous permet d’évoquer la deuxième raison : réussir un niveau vous demandera d’atteindre un certain score (ici présenté comme étant une mise), faute de quoi, l’accès au suivant vous sera refusé et vous devrez recommencer. Des contraintes inhabituelles, mais qui ne tardent pas à apparaître extrêmement logiques une fois qu’on commence à comprendre les subtilités du jeu.
« si vous voulez réellement avancer dans le jeu, il va falloir prendre des risques »
Vous allez en effet très vite réaliser que vider le plateau du jeu serait un objectif particulièrement simple à remplir si c’était le seul du jeu. Les cartes pouvant disparaître à chaque fois qu’on les associe par couleur, indépendamment de leur valeur, attribuez une couleur à chaque colonne du tableau et vous ferez le ménage sans aucune difficulté.
C’est là qu’apparaît alors la pertinence du système de mise : si vous voulez réellement avancer dans le jeu, il va falloir prendre des risques. Les combinaisons les plus complexes (une suite dans la même couleur, par exemple) rapportant beaucoup plus de points que les combinaisons les plus simples, atteindre le score requis pour passer au niveau suivant va rapidement vous demander de ne pas céder à la solution de facilité dévoilée plus haut pour commencer à échafauder des plans plus ambitieux, le Graal étant atteint lorsque vous parvenez à réaliser deux combinaisons en un seul mouvement, ou bien à la suite d’un combo. Pour terminer les dix niveaux de la campagne solo, il faudra donc faire preuve d’audace… et d’un peu d’intelligence.
En effet, la limite de mouvements signifie également que, comme le premier Rain Man venu, vous pouvez tout à fait compter les cartes. Inutile d’espérer réaliser un brelan d’as s’il n’en reste qu’un seul en jeu, et parvenir à vous souvenir des cartes déjà utilisées vous aidera largement à manipuler une chance qui n’en est pas totalement une pour savoir, vers la fin de la partie, quelles seront les cartes qui vont fatalement tomber.
Bien évidemment, rien ne vous interdit de jouer à l’instinct, sans calculer, et en vous contentant d’aviser en fonction des prochaines cartes annoncées en haut à droite de l’interface, mais la grande richesse du jeu, c’est surtout que chacun peut y jouer à sa façon ! L’inconvénient, ceci dit, c’est qu’une fois le mode principal terminé, vous n’aurez d’autre choix que de le recommencer puisque le titre n’offre strictement rien d’autre, à l’exception d’un mode deux joueurs où les protagonistes jouent à tour de rôle sur un plateau unique et qui, sans être inintéressant, ne joue clairement pas dans la même cour que des monstres à la Puyo Puyo.
On pourra donc regretter que ce très sympathique Square Deal n’ait jamais daigné faire le trajet jusqu’en Europe : sans être un titre extraordinaire injustement oublié, il a clairement le mérite de tirer son épingle du jeu au sein d’un genre qui n’aura pas accouché que de chefs d’œuvre. Forcément circonspect lors des premières parties, on réalise bien vite qu’on a plus de mal à reposer la console qu’on ne l’avait anticipé, et on enchaine les parties avec un plaisir non-feint. Alors certes, on aurait bien aimé davantage de modes de jeu, des casses-têtes à réaliser en un certain nombre de coups ou un mode illimité pour se forcer à aborder le jeu un peu différemment, mais le fait est que la sauce prend bien et qu’on ne regrette pas une seule des très nombreuses minutes qu’on pourra facilement consacrer au logiciel. Si jamais vous vous sentez curieux à la lecture de ce test, n’hésitez pas à franchir le pas.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 15/20 Parmi la pléthore de puzzle games à s'être aventuré sur les traces de Tetris, Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker peut sans doute se vanter de figurer parmi les plus originaux. Mêler le poker aux mécanismes traditionnels du genre permet d'engendrer un système de combinaison bien pensé, complexe tout en étant immédiatement familier, qui atteint sans coup férir l'objectif de rendre le jeu étrangement addictif, ce qui est toujours une excellente démonstration de l'efficacité d'un concept. Le titre de HECT autorise même une forme de planification inhabituelle, chaque partie tournant autour de 52 cartes, ce qui lui donne un caractère encore un peu plus particulier. Cela limite bien évidemment aussi les possibilités du jeu – pas de partie « à l'infini » ici – d'autant que le mode deux joueurs reste assez anecdotique, mais c'est à coup sûr un logiciel à découvrir pour tous les amateurs du genre. Une très bonne surprise.
CE QUI A MAL VIEILLI : – Mode deux joueurs limité – Pas de mode infini : on place 52 cartes, ni plus, ni moins – Les couleurs auraient été plus lisibles sur un écran non-monochrome – Un seul mode de jeu solo : on aurait apprécié un peu plus de contenu