
Développeur : Dynamix, Inc.
Éditeur : Sierra On-Line, Inc.
Titre original : Silent Thunder : A-10 Tank Killer II (États-Unis)
Titres alternatifs : Aces over Mountains (titre de travail), Silent Thunder (Allemagne)
Testé sur : PC (Windows 3.1/Windows 9x)
Présent au sein des compilations :
- Aces : Collection Series (1997 – PC (DOS, Windows 3.x, Windows 9x))
- Action Pack : Earthsiege 2 + Silent Thunder (1997 – PC (Windows 3.1, Windows 9x))
- Le Meilleur de Sierra (1997 – PC (Windows 9x))
- Simulation (1997 – PC (Windows 3.1))
- Best of Sierra Nr. 10 (1999 – PC (Windows 3.1, Windows 9x))
La série des Great War Planes (jusqu’à 2000) :
- A-10 Tank Killer (1989)
- Red Baron (1990)
- Aces of the Pacific (1992)
- Aces over Europe (1993)
- Silent Thunder : A-10 Tank Killer 2 (1996)
Version PC (Windows 3.1/Windows 9x)
| Date de sortie : Mars 1996 |
| Nombre de joueurs : 1 |
| Langues : Allemand, anglais, français |
| Support : CD-ROM |
| Contrôleurs : Clavier, joypad, joystick, souris |
| Version testée : Version CD-ROM émulée sous DOSBox |
| Configuration minimale : Processeur : Intel i486 DX2 – OS : Windows 3.1/Windows 95 – RAM : 8Mo – Vitesse lecteur CD-ROM : 2X (300ko/s) Configuration graphique : Résolution supportée : 640×480, 256 couleurs |
Vidéo – L’introduction et l’écran-titre du jeu :
Autour de la deuxième moitié des années 90, le genre de la simulation se retrouva dans une position aussi paradoxale qu’inconfortable : celle d’être resté, plus que jamais, un genre de niche qui ne semblait pas profiter de l’essor formidable du marché vidéoludique tout en étant confronté, dans le domaine, à une concurrence de plus en plus féroce. Une ère plutôt funeste en la matière, puisqu’elle aura à la fois annoncé la mort prochaine de studios majeurs dans le domaine (MicroProse en 2001, Dynamix en 2001) et celle du genre dans son ensemble qui, faute d’avoir su se réinventer ou trouver un public plus large, aura plus ou moins disparu des radars « mainstream » pour rester solidement cantonné dans une niche plus étroite que jamais au fil du XXIe siècle.

Difficile de dire si, à l’amorce de la période, les équipes de développement sentaient déjà le vent tourner – mais du côté de Dynamix, qui venait d’enchaîner les succès avec Red Baron, Aces of the Pacific et Aces over Europe, on imagine que le moral était alors plutôt au beau fixe. Bien décidé à profiter de la dynamique de la série des Great War Planes, le studio américain n’en arrivait pas moins à court de périodes originales à traiter ; qu’importe : suivant une autre tendance de plus en plus en vogue à l’époque, il décida naturellement de revenir à ses premières amour en donnant une suite au déjà ancien A-10 Tank Killer. Signe des temps (et du marketing), celle-ci faillit s’appeler Aces over Mountains mais sortit sous le nom (un peu) plus parlant de Silent Thunder : A-10 Tank Killer 2. Un programme plutôt clair, donc, restait juste à savoir comment celui-ci allait se traduire en jeu.

Dynamix oblige, les connaisseurs du studio (et de la licence) ne devraient pas être très dépaysés : on retrouve l’interface et le programme classique de tous les jeux de la série des Great War Planes, avec la campagne d’un côté et les missions individuelles de l’autre. Les esprits chagrins noteront d’emblée que le contenu, en dépit de pas moins de trois théâtres d’opération différents, semble un peu plus pauvre que dans les précédents titres : il n’y a qu’un seul camp à incarner, un seul avion à piloter, et seulement trois campagnes au total, donc – et toujours rien qui ressemble à un mode multijoueur à se mettre sous la dent.

Plus question non plus de profiter de missions générées aléatoirement : les options de configuration comme la philosophie générale semblent en effet renouer avec celles d’A-10 Tank Killer, ce qui signifie également que les missions, plus cadrées, sont également plus longues et centrées sur des objectifs plus vastes. Interception, bombardement, reconnaissance, appui aérien : tous ces objectifs seront désormais mélangés dans chacune des missions disponibles, et il ne sera donc plus question de se faire des opérations « à la carte » en tirant un trait sur des aspects qui nous intéresse moins ; désormais, ce sera tout ou rien. On remarquera néanmoins la présence d’une aide en ligne directement intégrée au jeu, ainsi que d’une version française à peine passable avec des textes traduits un peu vite et des acteurs qui ne respirent pas la motivation – et une vidéo d’introduction qui, elle, est carrément restée en anglais sans même profiter de sous-titres.

La bonne nouvelle, c’est que le moteur de jeu a cette fois subi un vrai coup de jeune. Du moins en ce qui concerne la réalisation : graphismes en haute résolution, 3D texturée, musique CD, le bond technologique qui avait quelque peu manqué aux précédents titres est cette fois immanquable. Au moins, cette fois, il y a des détails au sol, avec des reliefs plus marqués que jamais, de la végétation, des bâtiments et des véhicules civils : voler en rase-motte dans les rues d’une ville a au moins autant d’impact ici que dans le premier opus, et le tout a l’avantage de bien tourner sur un Pentium sans nécessiter de carte accélératrice 3D ni même Windows 95, le titre pouvant tourner sous Windows 3.1.

Pour ce qui est du gameplay, en revanche, on pourra certes saluer la relative simplicité des commandes – comme toujours avec Dynamix, seule une poignée de touche du clavier est nécessaire, principalement pour pouvoir régler sa vitesse et choisir son armement – mais on pourra également remarquer que la filiation avec le premier opus est si marquée qu’on a un peu trop souvent l’impression de s’essayer à un remaster d’A-10 Tank Killer plutôt qu’à une suite, avec notamment un moteur de vol totalement irréaliste qui donne l’impression de contrôler un tank volant plutôt qu’un avion. Silent Thunder vise ouvertement du côté de l’arcade, ce qui est loin d’être un défaut en soi, le problème étant qu’il se rate dans des secteurs surprenants, à commencer par sa difficulté générale. Et histoire de se mettre dans le bain, quoi de mieux qu’une première mission de la première campagne qui soit à elle seule un catalogue de tout ce qui ne fonctionne pas dans le jeu ?

Premièrement, il n’y a pas vraiment de briefing : les objectifs précis ne sont donnés qu’une fois la mission lancée, soit après avoir choisi son armement, ce qui est passablement stupide. La sélection est d’autant plus rapide qu’il n’y a plus aucune option de configuration du réalisme, et que la campagne ne propose aucun choix de difficulté – déjà deux mauvais points. Une fois lâché en vol, les objectifs ne sont hélas pas beaucoup plus clairs : il s’agit « d’appuyer des unités au sol » (en faisant quoi exactement ?) au sud-est, avant d’attendre d’autres instructions. Histoire de bien donner le « la », le trajet le plus rapide vous fera immédiatement passer au-dessus de deux positions anti-aériennes, chercher à couper par les montagnes vous obligera à prendre trop d’altitude, ce qui révèlera votre présence et enverra des MiGs à votre poursuite (autant dire un arrêt de mort), et si vous cherchez à louvoyer discrètement à basse altitude, une voix féminine atrocement mal jouée vous mettra un coup de pression en vous rappelant que vous devez rejoindre l’aéroport le plus vite possible, parce que naturellement le timing prévu est très serré !

Très confortable, comme initiation… Sauf que vous n’êtes encore qu’au début de vos problèmes : vous foncez donc tant bien que mal vers votre objectif en consultant la carte et vous apercevez un colonne de tanks. Naïvement, vous pensez qu’il s’agit des blindés désignés comme cible sur ladite carte et vous ouvrez le feu… avant de vous faire traiter de gros débile par votre supérieur et de voir s’afficher un écran indiquant que la mission est perdue. Ah, donc, il devait en fait s’agir des unités que vous étiez censé assister… vos véritables cibles étaient en réalité à peine cinquante mètres plus loin, et les reconnaître risque de poser un léger problème, puisque non seulement les blindés ennemis sont totalement impossibles à distinguer des vôtres, affichant les mêmes modèles et les mêmes couleurs, mais qu’en plus vos systèmes de visée ne sont doté d’aucun mécanisme permettant de faire la distinction entre une cible alliée et une cible ennemie ! Pour tout arranger, les fameux blindés étant placés sur une route riche en relief, vous pouvez tout à fait les survoler à quinze mètres d’altitude sans les voir pour peu que vous arriviez sous le mauvais angle, et faire demi-tour pour aborder un second passage vous demandera donc de manœuvrer au-dessus du fameux aéroport au sein duquel sont placé pas moins de deux canons de DCA… Heu, les gars, vous êtes au courant que je débute, là ?

L’occasion, au passage, de constater que le mécanisme de ciblage ne tend à s’activer que lorsqu’on est très proche d’une cible, ce qui est un peu dommage pour employer des missiles dont le principal intérêt est de ne pas avoir à s’approcher à portée de canon, que votre mitrailleuse demande une précision totale sur des cibles minuscules, et qu’il faudra employer précisément le bon type d’arme pour avoir une chance de toucher chaque cible… ce qui est d’autant plus frustrant que non seulement les bombes et autres roquettes sont très variées, mais surtout que le programme ne prend absolument jamais le temps de vous présenter leur rôle, pas même pendant la mission d’entrainement – chose qu’A-10 Tank Killer avait pourtant eu la présence d’esprit de faire quelques sept ans plus tôt !

Oh, et pour en revenir à cette fameuse première mission : en admettant que vous parveniez à distinguer les tanks ennemis dans le fatras de reliefs qu’est la route bordant l’aéroport et que vous les détruisiez, le jeu vous enverra ensuite griller vos munitions sur un camp de guérilleros avant de vous envoyer – Oscar du sadisme – frapper une position blindée… installée à quelque mètres d’une unité de missiles sol-air ! Et évidemment, le titre n’offrant AUCUNE solution pour choisir sa cible parmi plusieurs et le mécanisme de ciblage ne s’activant, comme on l’a vu, qu’en étant nez-à-nez avec les ennemis, vous voilà donc en train de foncer sur une position qui peut vous abattre en deux secondes sans même avoir la certitude que vous parviendrez à la cibler avant d’être à moins de vingt mètres d’elle. MEC, C’EST MA PREMIÈRE MISSION !

Un assez bon résumé d’un équilibrage totalement délirant qui risque de nécessiter plusieurs dizaines de tentatives simplement pour avoir le droit d’accéder à la deuxième mission de la campagne… qui ne fait de toute façon que reprendre les missions individuelles bloquées dans les conditions les plus difficiles, vous serez donc aussi bien à aller faire votre marché là-bas. Le pire étant que de très nombreuses missions du jeu sont beaucoup plus faciles, alors quel pouvait bien être l’intérêt de nous faire commencer précisément par celle-là ?!

Dans l’ensemble, les faiblesses révélées par cette (douloureuse) première expérience restent hélas valables d’une mission à l’autre, et les difficultés de ciblage et de lisibilité viennent constamment pénaliser un titre qui peut se montrer efficace et même très ludique par séquences, mais qui donne le sentiment désagréable de n’avoir strictement rien appris depuis un épisode datant tout de même de 1989 – et même de faire davantage d’erreurs de jeunesse. Alors qu’il visait l’accessibilité, Silent Thunder nécessite une courbe de progression inutilement raide pour parvenir à composer avec ses nombreuses maladresses, et il y a de quoi se montrer ébahi que personne parmi les testeurs du jeu n’ait vu où se situait le problème alors que celui-ci est évident aux yeux de tout le reste de la population mondiale ! Une sortie pas très glorieuse pour la série des Great War Planes, qui n’ira d’ailleurs pas plus loin (ce qui n’empêchera pas Dynamix de continuer d’offrir en parallèle des suites à Red Baron sans les ranger dans la même collection). Reste une suite avec très peu d’idées qui pourra néanmoins se révéler divertissante pendant quelques heures à condition de parvenir à surmonter un premier contact qui risque de se résumer à une bonne baffe en pleine tronche. À la réflexion, ce n’était sans doute pas ce que les joueurs attendaient en 1996, et ça n’a pas beaucoup changé depuis.



Vidéo – La première mission du jeu :
NOTE FINALE : 14,5/20
Silent Thunder : A-10 Tank Killer est un exemple assez frustrant de suite appliquant le précepte « la même chose en mieux » en occultant totalement la deuxième partie de la phrase. Car si la réalisation a effectivement subi un lifting salutaire (mais rapidement daté), il est néanmoins hallucinant de constater que non seulement le gameplay n'a pas progressé d'un pouce depuis un premier opus de sept ans d'âge, mais qu'en plus il a même trouvé le moyen de régresser, la faute à des erreurs aberrantes comme un équilibrage aux pâquerettes, un mécanisme de ciblage qui ne s'active qu'à bout portant, des alliés totalement impossibles à distinguer des ennemis et un moteur de vol qui donne le sentiment de piloter une soucoupe volante plutôt qu'un chasseur de tanks. Même s'il reste de bons moments à passer grâce à un contenu respectable, on attendait quand même un peu plus de Dynamix que cette suite tiédasse maladroitement exécutée où beaucoup de joueurs ne dépasseront même pas la première mission de la campagne pour se contenter d'enchaîner les missions individuelles. Pas vraiment le jeu qu'on attendait.CE QUI A MAL VIEILLI :
– Un équilibrage totalement raté (cette première mission !)
– Un mécanisme de ciblage qui ne s'active que lorsqu'on est littéralement nez-à-nez avec une cible
– Des ennemis affichant les mêmes couleurs que vos alliés...
– ...et souvent difficiles à distinguer sur le sol texturé
– Un modèle de vol de type « tank volant »
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Silent Thunder sur un écran cathodique :

Les avis de l’époque :
« Silent Thunder me sidère : jamais auparavant je n’avais vu un jeu d’une telle qualité affligé d’une tare fatale qui était pourtant si facile à corriger. L’interface de vol, habituellement intimidante dans une simulation aérienne, est limpide dans Tank Killer 2. La musique est excellente et les graphismes sont à couper le souffle, mais les missions sont beaucoup trop difficiles. Toute personne disposant d’énormément de temps libre pour maîtriser Silent Thunder adorera ce jeu. Le reste d’entre nous n’y consacrera jamais 50$. »
World Village (Gamer’s Zone), 1996, 3/5 (traduit de l’anglais par mes soins)
