
Développeur : Amstar Electronics Corp.
Éditeur : Centuri, Inc. (Amérique du Nord) – Taito Corporation (Japon)
Titres alternatifs : フェニックス (graphie japonaise), フェニックス号 (Phoenix-gō – Atari 2800 – Japon)
Testé sur : Arcade – Atari 2600
La série Phoenix (jusqu’à 2000) :
- Phoenix (1980)
- Pleiads (1981)
Version Arcade
Date de sortie : Décembre 1980 |
Nombre de joueurs : 1 à 2 (à tour de rôle) |
Langue : Anglais |
Support : Borne |
Contrôleurs : Un joystick (deux directions) et deux boutons* *Certains modèles remplacent le joystick par deux boutons additionnels |
Version testée : Version internationale, set 1 |
Hardware : Processeur : Intel 8085A 5,5MHz Son : Haut-parleur ; TMS36XX 0,372 kHz ; Phoenix Custom Sound ; Discrete Sound 120kHz ; 1 canal Vidéo : 256 x 208 (V) 61,035156Hz |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Soyons réaliste : à l’ère des balbutiements du jeu vidéo dans les foyers et surtout dans les salles d’arcade, il a pu arriver que certains titres méritants à plusieurs égards se retrouvent quelque peu… perdus dans la masse. Cela n’a rien de très surprenant si l’on considère que les premiers succès du domaine, bien avant d’engendrer leurs propres « genres » vidéoludiques avec leurs mécanismes récurrents, auront d’abord surtout traîné à leur suite une longue série de clones d’autant moins inspirés que la propriété intellectuelle était encore une notion à définir en ce qui concernait le médium électronique.

Traduit en clair : pour un Pong en salles, on avait le droit à plusieurs centaines de variantes dans la foulée (le site Mobygames en référence pas moins de 568, et il y a fort à parier qu’il en manque des dizaines), dont une bonne moitié de versions « de salon » vendues sous la forme de système dédiées, avec strictement aucun autre mécanisme à proposer que deux raquettes et une balle – soit exactement ce qu’offrait le jeu de base, ni plus, ni moins (et ceux qui lèveront les yeux au ciel devant ce consternant manque d’imagination devraient se rappeler que Pong lui-même était déjà un plagiat…). Space Invaders aura lui aussi été un inspirateur majeur à la fin des années 70 – et au-delà –, et pour un Galaxian ou un Galaga méritant d’être mentionnés, combien de dizaines de Missilevader, d’Astro Battle ou de Sky Love que l’histoire ne retiendra jamais ? Mais quelque part dans une fine zone tampon se situent également des titres à la Phoenix : des jeux qui n’ont peut-être pas inscrit leur nom en lettres d’or au Panthéon vidéoludique, mais qui méritent qu’on se souviennent d’eux pour avoir apporté quelque chose au genre.

À la racine, Phoenix est un clone assumé de Space Invaders dont il ne cherche même pas à masquer la filiation évidente en basculant la vue à l’horizontale à la Yar’s Revenge. Le principe est donc rigoureusement le même : des adversaires dont la partie supérieure de l’écran, votre vaisseau cloué en bas et restreint à un axe de mouvement purement horizontal – autant dire la norme de 99% des shoot-them-up de l’époque, le 1% restant correspondant sans doute à Defender.

Au moins les ennemis prennent-ils ici la forme de volatiles, ce qui change un peu des extraterrestres aux inspirations plus aquatiques de Space Invaders – mais bon, Galaxian était déjà passé par là, ce n’est donc pas de ce côté qu’on cherchera l’originalité du jeu. En fait, pour bien comprendre l’innovation apportée par Phoenix, il faut se souvenir du déroulement de n’importe quel jeu de tir à l’époque : une fois une vague finie, une nouvelle apparaissait – à l’identique, mais généralement en plus rapide histoire de compliquer les choses – et c’était là tout le jeu, le seul véritable mécanisme ludique étant de survivre le plus longtemps possible pour faire le meilleur score. Phoenix, pour sa part, aura eu l’idée d’introduire quelque chose d’inattendu : un soupçon de variété.

Le cœur du jeu est donc en réalité constitué non d’une unique vague se répétant ad eternam, mais bien de cinq vagues présentant des déroulements différents. Les deux premières vagues présentent des adversaires placés en haut de l’écran et se laissant fondre su votre vaisseau en lui tirant dessus – une reprise directe de Galaxian, certes, mais également un bon moyen de composer avec le mécanisme inédit composé par votre bouclier personnel activable à la demande, lequel vous rendra invincible (et immobile) pendant deux secondes, mais ne pourra ensuite plus être activé pendant cinq secondes ; de quoi ajouter une corde à votre arc et surtout un chouïa de profondeur au gameplay.

Les vagues trois et quatre sont plus originales : elles commencent sous la forme d’œufs, que vous seriez avisé de détruire au plus vite avant que n’émergent des Phoenix massifs qui demanderont d’être touchés précisément en leur centre – leurs ailes, pour leur part, finiront toujours par repousser. Comme leurs équivalent miniatures, ces volatiles n’hésiteront ni à vous bombarder ni à vous foncer dessus, et il faudra à nouveau savoir dégainer le bouclier au bon moment pour optimiser ses chances. Quant à la vague cinq, elle introduit tout simplement un concept appelé à faire date : un boss, prenant en l’occurrence la forme d’un vaisseau mère dont il faudra détruire l’imposant blindage dans l’espoir d’atteindre l’être situé en plein centre. La pression monte alors d’un cran, et en cas de succès, vous pourrez reprendre à la vague un, mais avec une difficulté accrue.

Tout cela n’a peut-être l’air de rien, mais Phoenix aura mine de rien introduit l’idée d’une progression dans le déroulement d’un jeu vidéo : le fait de ne pas composer exactement avec les mêmes éléments de la première à la dernière seconde était quelque chose de neuf, et l’arrivée d’un imposant vaisseau prenant pas loin du tiers de l’écran était à coup sûr une surprise autant que le moment marquant offert par un programme issu d’un minuscule studio qui disparaitrait corps et bien dès l’année suivante (et n’ayant à ma connaissance développé que ce titre).

Peut-être pas de quoi propulser la borne au rang des titres immortels que l’on retrouve régulièrement dans des compilations de succès de l’arcade, mais il y a fort à parier que le logiciel serait resté plus célèbre s’il avait été l’œuvre de Namco ou d’Atari. En l’état, cela reste une étape importante pour le genre, et même si cela ne se traduira sans doute pas par des dizaines d’heures de parties enflammées aujourd’hui (la faute à un certain manque de finitions dans l’équilibrage et la jouabilité), il y a quelque chose de fascinant aujourd’hui à découvrir les fondations d’idées devenues centrales dans des milliers de jeux vidéo dissimulées sous l’anonymat d’une borne dont on ne connait même pas l’identité des programmeurs et dont trop peu de joueurs auront retenu le nom. Que cette injustice soit donc corrigée aujourd’hui, et que les curieux n’hésitent pas à aller tuer dix minutes sur une borne sympathique à laquelle on doit plus de choses qu’on ne le pense.
Vidéo – Une partie lambda :
NOTE FINALE : 10,5/20
Noyé au sein de la masse des clones oubliés de Space Invaders qui pullulèrent à la fin des années 70 et au début des années 80, Phoenix est une borne qui mérite pourtant d'être remise en lumière pour avoir eu le mérite de proposer des idées neuves – et surtout, des idées neuves pertinentes. Apportant un peu de variété grâce à ses cinq vagues et proposant pour la première fois un boss, le jeu d'Amstar Electronics nécessite enfin plus d'une poignée de minutes pour en faire le tour et élaborer les diverses stratégies adaptées – notamment grâce à l'ajout bien senti d'un bouclier activable. Certes, seuls les fans absolus de scoring y consacreront des heures, mais autant prendre le temps de célébrer ce qui aura représenté plusieurs pas d'un coup dans la bonne direction.CE QUI A MAL VIEILLI :
– Des parties qui n'ont que peu de raisons de s'étendre au-delà de cinq minutes
– Un bouclier qui manque de souplesse dans son utilisation...
– ...et une jouabilité qui n'a globalement ni la fluidité ni la précision des ténors du genre
Bonus – Ce à quoi pouvait ressembler Phoenix sur une borne d’arcade :

Version Atari 2600
Développeur : General Computer Corporation |
Éditeur : Atari, Inc. |
Date de sortie : Février 1983 (Amérique du Nord) – Novembre 1983 (Europe) |
Nombre de joueurs : 1 |
Langue : Anglais |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Joystick |
Version testée : Version PAL |
Spécificités techniques : Cartouche de 64kb |

Ne nous leurrons pas : si une borne d’arcade du début des années 80 n’a pas été portée à un moment ou à un autre sur Atari 2600, c’est probablement qu’elle ne vaut même pas la peine qu’on se souvienne de son existence. Phoenix aura certes dû attendre quelques années pour faire le grand saut (et le fait qu’aucune autre machine n’en ait accueilli une conversion tend à démontrer que la borne aura connu un succès nettement plus confidentiel que celui de son modèle), mais parvient à proposer ce qu’on espérait y trouver : les cinq vagues et tous les mécanismes intacts. Le joystick n’ayant qu’un seul bouton, il faut pousser le stick vers le bas pour activer le bouclier – ce qui fonctionne très bien – et si les graphismes sont moins fins et moins colorés que sur la borne et la difficulté par défaut nettement plus basse, on retrouve les sensations qu’on était venu chercher. Indispensable ? Sans doute pas, mais à l’échelle de la ludothèque de l’Atari 2600, cela reste un shoot-them-up qui fait le café – et qui le fait plutôt bien.



NOTE FINALE : 10/20
Portage sérieux pour Phoenix sur Atari 2600, qui reproduit fidèlement les possibilités de l’arcade tout en offrant un défi plus accessible. Pour tuer dix minutes sur sa console, le contrat est largement rempli.