
Développeur : HECT Co., Ltd.
Éditeur : HECT Co., Ltd.
Testé sur : Famicom
Également testé : Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker
La série Cadillac (jusqu’à 2000) :
- Cadillac (1990)
- Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker (1990)
- Great Deal (1991)
Version Famicom
Date de sortie : 2 février 1990 (Japon) |
Nombre de joueurs : 1 à 2 |
Langues : Japonais, traduction anglaise par Gil Galad |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Joypad |
Version testée : Version japonaise patchée en anglais |
Spécificités techniques : Cartouche de 512kb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
De tous les genres à succès s’étant formés dans la traîne d’un succès planétaire appelant sa cohorte de clones attirés par l’odeur de l’argent facile, le puzzle game est sans doute celui qui aura mis le plus de temps à dessiner ses contours.

Il faut dire que si Tetris avait fixé d’emblée un cap qui avait de quoi laisser rêveur – un logiciel au principe évident, ne coûtant pratiquement rien à développer et rencontrant un succès planétaire quasi-instantané – parvenir à s’en inspirer pour en tirer un programme qui ne soit pas un autre Tetris se sera avéré beaucoup plus délicat. Parmi les premiers candidats à avoir proposé des idées pertinentes, on peut citer le P.Z. Karen Co. Development Group avec son Block Out – qui, pour le coup, était précisément un « autre Tetris », mais en 3D –, Alexei Pajitnov lui-même avec son Welltris – même description –, ou SEGA avec un Columns qui remplaçait les formes par des couleurs. Un autre candidat mériterait d’être cité, en dépit de son anonymat complet en occident – où il n’a, il est vrai, jamais été commercialisé : Cadillac, un puzzle game qui a l’excellente idée de s’inspirer… du poker.

Contrairement à ce que pourrait laisser penser le titre du jeu, il ne va donc pas être question ici des voitures du constructeur automobile américain de Detroit, mais plutôt de casino. Bien avant que The Witcher ne nous apprenne à pratiquer le poker avec des dés, le titre de HECT va donc reposer sur des combinaisons : au minimum des brelans ou des couleurs sur trois cartes (on ne peut faire des paires qu’en mode deux joueurs), le but étant bel et bien de parvenir à « nettoyer le plateau » comme dans la plupart des représentants du genre, mais en composant ici avec des contraintes un peu particulières – d’ailleurs assez bien pensées comme nous n’allons pas tarder à le découvrir.

La première, c’est donc qu’une partie ne se poursuit pas à l’infini jusqu’à ce que vous perdiez. Non, dans Square Deal, on joue avec un jeu de 52 cartes, et pas une de plus. Une fois toutes les cartes posées, la partie se termine, et si le score est compté en fonction d’une mise de départ (imposée) et d’un système de pénalité pour chaque carte subsistant sur le plateau, la deuxième contrainte entre en jeu : un niveau ne sera considéré comme « vaincu » qu’à partir du moment où la totalité des cinquante-deux cartes aura disparu. Ce n’est pas à proprement parler un obstacle à la progression : le joueur est libre de choisir son niveau de départ via le menu, et la seule « récompense » est d’obtenir une image d’une des hôtesses locales, pour les amateurs d’illustrations 8 bits. Mais pour le joueur qui se mettrait en tête de boucler l’unique mode de jeu solo depuis le commencement, ce sera l’objectif.
« si vous voulez réellement avancer dans le jeu, il va falloir prendre des risques »

Dans l’absolu, les mécanismes traditionnels du puzzle game ne proposent pas exactement les mêmes difficultés qu’à l’accoutumée : si la vitesse de chute des cartes peut être contraignante dans les niveaux les plus avancés, un système de pause (chronométrée) est mis en place pour s’offrir jusqu’à une minute quarante de réflexion au total. Quant à la crainte de se retrouver face à un plateau rempli, elle peut facilement être exorcisée : les cartes disparaissant à chaque fois qu’on les associe par couleur, indépendamment de leur valeur, attribuez une couleur à chaque colonne du tableau et vous ferez le ménage sans aucune difficulté.

C’est là que le système de jeu montre à la fois ses forces et ses faiblesses : les combinaisons les plus complexes (une suite dans la même couleur, par exemple) rapportant beaucoup plus de points que les combinaisons les plus simples, atteindre le score élevé va rapidement demander de ne pas céder à la solution de facilité dévoilée plus haut pour commencer à échafauder des plans plus ambitieux, le Graal étant atteint lorsqu’on parvient à réaliser deux combinaisons en un seul mouvement, ou bien à la suite d’un combo. Le vrai problème de ce premier opus, en revanche, est que si le score trouve une utilité sur la durée puisqu’il représente de l’argent qui sera nécessaire pour payer la « mise » du prochain niveau, il demeure un simple objectif secondaire derrière celui, nettement plus ardu – et plus aléatoire – de parvenir à vider le tableau. Faute de quoi, pas de salut, il sera impossible de passer au niveau suivant.

C’est ici que la stratégie et la mémoire vont commencer à entrer en jeu : comme le premier Rain Man venu, vous pouvez tout à fait compter les cartes – et cela risque même d’être rapidement une obligation. Inutile d’espérer réaliser un brelan d’as s’il n’en reste qu’un seul en jeu, et parvenir à vous souvenir des cartes déjà utilisées vous aidera largement à manipuler une chance qui n’en est pas totalement une pour savoir, vers la fin de la partie, quelles seront les cartes qui vont fatalement tomber.

Bien évidemment, rien ne vous interdit de jouer à l’instinct, sans calculer, et en vous contentant d’aviser en fonction des prochaines cartes annoncées en haut à droite de l’interface – mais mieux vaudra alors tirer un trait sur l’espoir de jouer pour autre chose que pour accumuler de l’argent virtuel, ce qui est un peu dommage. Surtout quand l’unique alternative au mode principal se trouve être un mode deux joueurs où les protagonistes jouent à tour de rôle sur un plateau unique et qui, sans être inintéressant, ne joue clairement pas dans la même cour que des monstres à la Puyo Puyo.

On pourra donc regretter que ce très sympathique Cadillac, au-delà de quelques très bonnes idées, mette un peu à côté de ce qui est normalement le socle du puzzle game, à savoir la partie illimitée se disputant au sang-froid. Le mécanisme forcé du « vidage de plateau » place ici une barre très contraignante qui risque de venir rapidement frustrer un paquet de joueurs initialement attirés par son potentiel authentiquement addictif. Sachant que le contenu correspond, comme on l’a vu, précisément à celui des débuts du genre (soit, pour dire les choses plus clairement, à pas grand chose à se mettre sous la dent), le potentiel indiscutable du programme se heurte à un game design pas très bien pensé qui risque de le réserver à des stratèges particulièrement pointus – ou particulièrement patients. Les curieux auront tout intérêt à lui laisser une chance tant ils pourraient découvrir ainsi un principe qui peut faire mouche, mais les vrais néophytes seront sans doute plus à l’aise en se lançant via le deuxième épisode sur Game Boy.
Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 14/20
Parmi la pléthore de puzzle games à s'être aventuré sur les traces de Tetris, Cadillac peut sans doute se vanter de figurer parmi les plus originaux. Mêler le poker aux mécanismes traditionnels du genre permet d'engendrer un système de combinaison bien pensé, complexe tout en étant immédiatement familier, qui atteint sans coup férir l'objectif de rendre le jeu étrangement addictif, ce qui est toujours une excellente démonstration de l'efficacité d'un concept. Dommage que le titre de HECT, loin de se contenter d'autoriser une forme de planification inhabituelle tournant autour de l'usage de 52 cartes – et pas une de plus – décide de l'imposer au joueur pour débloquer la progression dans l'unique mode de jeu, ce qui est inutilement exigeant – surtout dans un titre comportant par définition une large part de hasard. Cette contrainte inutile additionnée à un manque de contenu handicape maladroitement un programme certes, surprenant, mais auquel il manque encore un tout petit quelque chose pour se montrer réellement addictif.CE QUI A MAL VIEILLI :
– Mode deux joueurs limité
– Pas de mode infini : on place 52 cartes, ni plus, ni moins...
– ...et vu la conjonction planétaire nécessaire pour parvenir à les éliminer toutes, bon courage pour gagner une partie
– Un seul mode de jeu solo : on aurait apprécié un peu plus de contenu
Bonus – Ce à quoi peut ressembler Cadillac sur un écran cathodique :

Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker

Développeur : HECT Co., Ltd.
Éditeur : DTMC Inc.
Titre original : キャデラックII (Cadillac II – Japon)
Titre alternatif : Square Deal (titre usuel)
Testé sur : Game Boy
Version Game Boy
Date de sortie : 30 novembre 1990 (Japon), 10 mars 1992 (États-Unis) |
Nombre de joueurs : 1 à 2 (avec deux consoles reliées par un câble Game Link) |
Langue : Anglais |
Support : Cartouche |
Contrôleur : Console |
Version testée : Version américaine |
Spécificités techniques : Cartouche de 512kb |
Vidéo – L’écran-titre du jeu :
Il n’aura fallu qu’une poignée de mois pour que Cadillac se dote d’une suite – et que celle-ci, contrairement au premier opus, fasse le trajet jusqu’en Amérique du Nord, en prenant pour l’occasion un nom prêtant un peu moins à confusion quant au contenu de la cartouche. Au premier regard, on pourrait d’ailleurs congédier ce Square Deal comme n’étant qu’un vulgaire portage de la version NES sur Game Boy : comme l’indique sa présence ici plutôt que sur un test dédié, le titre propose exactement les mêmes mécanismes et les mêmes modes de jeu que le premier opus.

Une nuance de taille fait néanmoins son apparition : il n’est plus nécessaire de parvenir à faire disparaître la totalité des cinquante-deux cartes pour progresser. Cette fois, et de façon plus logique, c’est bel et bien le score qui va être la clef : la résolution d’un niveau demande d’atteindre une certaine « mise », laquelle est atteinte en réalisant des combinaisons, les plus complexes rapportant naturellement plus d’argent que les simples « couleurs ». Terminer la partie avec un plateau couvert de cartes aura néanmoins un prix, puisque chacune des cartes restantes viendra appliquer une pénalité au score. Cela n’a l’air de rien dit comme ça, mais ce rééquilibrage résout le plus gros problème de la première version, et permet au titre de se montrer moins bêtement punitif et par-là même sensiblement plus addictif. Certes, tant qu’à faire, on n’aurait vraiment pas craché sur des modes de jeu additionnel ou sur un multijoueur repensé, mais le constat se maintient : ça fonctionne tout simplement mieux sous cette forme.





Vidéo – Le premier niveau du jeu :
NOTE FINALE : 15/20
Parfois, le meilleur moyen d’améliorer un gameplay, c’est de toucher à très peu de choses – mais de changer les bonnes. En revoyant exclusivement le système de progression de Cadillac, Square Deal : The Game of Two-dimensional Poker fait un meilleur mouvement que ce qu’on aurait pu penser et corrige le principal facteur de frustration du premier opus pour une approche à la fois plus cohérente et plus satisfaisante. C’est la seule nouveauté, mais c’est sans doute celle dont le jeu avait le plus besoin.