Spelunker II : Yūsha e no Chōsen

Développeur : Now Production Co., Ltd.
Éditeur : Irem Corp.
Graphie originale : スペランカーII 勇者への挑戦
Titre alternatif : Spelunker II : A Hero’s Challenge (traduction par Stardust Crusaders)
Testé sur : Famicom

La série Spelunker (jusqu’à 2000) :

  1. Spelunker (1983)
  2. Spelunker II : 23 no Kagi (1986)
  3. Spelunker II : Yūsha e no Chōsen (1987)

Version Famicom

Date de sortie : 18 septembre 1987 (Japon)
Nombre de joueurs : 1
Langues : Japonais, traduction anglaise par Stardust Crusaders
Support : Cartouche
Contrôleur : Joypad
Version testée : Version japonaise patchée en anglais
Spécificités techniques : Cartouche d’1Mb

Vidéo – L’écran-titre du jeu :

Le destin de Spelunker, le spéléologue/aventurier en quête de trésors et poursuivi par un fantôme, a de quoi faire penser à celui d’un archéologue – plus précisément, à un de ceux ayant hérité d’une malédiction tenace après avoir visité assez discourtoisement une pyramide égyptienne sans lui demander son avis.

Unique programme jamais développé par le studio Micro Graphic Image, il n’aura donc visiblement pas exactement lancé la carrière de son créateur, Tim Martin, lequel n’a à ma connaissance été crédité depuis lors que pour… une participation à R-Type Final 3 Evolved quarante ans plus tard (!) – et encore, il y a de fortes chances qu’il ne s’agisse que d’un homonyme – et ses collègues Robert Barber et Cash Foley ne s’en sortent pas mieux. Son sympathique héros, pour sa part, n’aura pas connu un bien meilleur sort, puisqu’après être passé sous pavillon japonais sous la houlette d’Irem, il aura connu un destin un peu particulier avec deux deuxième opus (!) en un an… avant de disparaître corps-et bien pour plus de vingt ans et d’être « ressuscité » sous la forme d’un hommage baptisé Spelunky en 2009. Comme un symbole, sa dernière aventure au XXe siècle, loin de ses racines, n’aura même pas fait le trajet jusqu’en occident, et même les fans de ses premières aventures sur Atari 8 bits n’auront donc pour l’essentiel jamais connu Spelunker II : Yūsha e no Chōsen. Un destin d’autant plus triste que la cartouche était nimbée de l’ambition d’être un peu plus qu’un simple jeu de plateforme – l’ennui étant qu’en 1987, elle était loin d’être la seule à l’avoir.

Mais mieux vaut commencer par le commencement. Déjà, il y a le cadre : imaginez un Pays des Fées gouverné depuis un millénaire par un démon maléfique nommé Geyla. Son bilan à la tête du pays étant visiblement à peu près aussi enthousiasmant que celui d’Emmanuel Macron, les fées se tournent vers un sauveur… et en trouvent trois : le joueur peut en effet incarner le spéléologue (ici qualifié d’aventurier) qui donne son nom à la licence, mais aussi un prêtre et une sorte d’esprit magique, chacun doté de leurs propres avantages et inconvénients.

Ainsi, le prêtre peut toucher les morts-vivants avec n’importe quelle arme (là où les autres devront pour cela être équipé d’un rosaire) tandis que l’« Esper » (c’est le nom de l’esprit) a lui la capacité de se téléporter pour revenir à des endroits déjà visités. L’explorateur, quant à lui, peut emporter davantage de ressources dans son sac à dos, qu’il s’agisse de nourriture (l’équivalent d’une potion de soin) ou de bombes, qui permettront à la fois de venir à bout des ennemis les plus coriaces et de certaines portes. À ce stade, les joueurs vaguement intéressés par ce qui se passe à l’écran auront également remarqué une jauge de vertu : en effet, rien ne dit que votre héros soit là par générosité d’âme ; il est peut-être simplement venu en tant que chasseur de trésors – pour ne pas dire pilleur de tombes. Cette chose se remplira (ou se videra) donc en fonction de vos actions, et non seulement cela aura un impact pour espérer toucher les morts-vivants susmentionnés (ce qui sera impossible avec une vertu trop basse), mais aussi et surtout pour décider de la fin du jeu… laquelle sera, pour l’occasion, assez délicate à atteindre.

Loin de présenter un déroulement linéaire, Spelunker II fait en effet le choix d’un environnement semi-ouvert avec de très nombreux embranchements ainsi que la possibilité (pour ne pas dire la nécessité) de retourner sur ses pas.

L’idée ? Dénicher des clefs ou de très utiles munitions pour vos différentes armes, mais aussi et surtout de précieux indices pour savoir quoi faire et où aller – car qui dit « liberté de mouvement » dit également « passer des plombes à tourner méchamment en rond », comme les joueurs expérimentés le savent sans doute déjà. De fait, difficile de ne pas penser à un jeu comme Simon’s Quest – paru une poignée de mois plus tôt – pour l’inclusion de l’aspect « aventure », et même s’il n’y a pas de villes à visiter, de marchands à trouver ni même de PNJ avec qui discuter, on comprend rapidement que les trois niveaux du jeu vont prendre beaucoup, beaucoup plus de temps à boucler qu’ils n’en ont l’air – surtout à partir du moment où votre héros n’a qu’une seule vie, aucun continue, et où l’aventure qui nécessite quand même au minimum 1H30 à boucler (en sachant parfaitement où aller) ne propose tout simplement aucun mécanisme de sauvegarde pour reprendre d’ailleurs que depuis le tout début à chaque fois. Ouch.

Le truc, c’est que Spelunker II a l’ambition d’un jeu moderne, mais avec la jouabilité d’un jeu de 1983.

Votre héros est raide comme un manche, ses sauts laissent très peu de marge de manœuvre, et l’activité consistant à monter ou descendre le long d’une corde – que vous risquez de pratiquer très, très souvent dans les loooongues grottes du jeu – nécessite une précision absolue au moment de sauter de l’une à l’autre, sans quoi votre personnage tombera comme une pierre… le plus souvent vers sa mort, car non seulement les chutes font toujours du dégâts au-delà d’une certaine hauteur, mais les phases de plateforme s’effectuant régulièrement au-dessus du vide ou de la lave, il est toujours particulièrement énervant de voir son aventure se terminer prématurément pour avoir eu le tort de ne pas avoir appuyé PRÉCISÉMENT EN MÊME TEMPS sur la flèche et le bouton de saut au milieu de la cent-quarantième acrobatie. La moindre attaque souffre d’une courte inertie suffisante pour transformer n’importe quel adversaire en menace pour la plus petite erreur de timing, et le fait que 90% du jeu soit constitué de donjons n’offrant pratiquement aucune variété au niveau des décors et de la palette de couleurs n’aide pas à rendre l’expédition spécialement agréable. Ce n’est pas qu’on n’ait pas envie de visiter l’univers du jeu, c’est surtout qu’on aimerait bien qu’il offre plus régulièrement quelque chose à voir.

Du coup, ce qui aurait pu être une sorte de Metroidvania de première génération se révèle plus proche d’une expérience maladroite ou l’aspect aventure délaye l’action plus qu’il ne l’enrichit, et où le titre aurait franchement gagné à être moitié plus court – et sensiblement plus varié. Non que l’on passe un mauvais moment sur Spelunker II, en dépit de la raideur des contrôles et de l’aspect frustrant du défi (le jeu ne serait pas si difficile sans ses satanées cordes et les chutes à répétition qu’elles provoquent), mais on finit rapidement par trouver le temps long à retraverser des écrans qui se ressemblent tous sans le début du commencement d’une direction claire, avec des indices sibyllins et la quasi-impossibilité de tenir soi-même une carte à cause de nombreux accès « dans la profondeur » qui font que l’on peut vite s’égarer.

Il ne suffit pas de rajouter des couloirs et des salles pour obtenir un Zelda, et le fait est que les mécanismes du jeu n’offrent simplement ni la précision ni la richesse nécessaires pour s’accrocher jusqu’à la fin de la partie – ou en tous cas, pas à le faire par plaisir. On regrettera d’ailleurs une certaine propension à compliquer les choses sans raison valable (il faut évidemment que le boss final soit dissimulé derrière un passage secret !), comme si rendre la progression la plus lente et la plus obscure possible était nécessairement un gage de longévité – eh bien mauvaise nouvelle, messieurs, la taille a beau être importante, elle ne vaut surtout que par le plaisir qu’elle procure, et ici on apprécierait un peu trop souvent que les choses aboutissent un peu plus vite, ce qui n’est pas bon signe. C’est d’autant plus dommage qu’on sent qu’un level design un peu mieux équilibré aurait facilement permis d’obtenir une épopée un peu plus fluide et un peu plus marquante, mais en l’état notre spéléologue nous aura surtout quitté maladroitement en mettant beaucoup trop de temps à faire ses adieux. Une curiosité qui méritait mieux.

Vidéo – Cinq minutes de jeu :

NOTE FINALE : 12,5/20

On ne peut pas reprocher à Spelunker II : Yūsha e no Chōsen de s'éloigner de l'esprit du premier opus ; au contraire, entre l'accent placé sur l'exploration, la raideur des sauts et quelques mécanismes pas toujours limpides, la suite imaginée par Now Production reprend à la fois les forces et une partie des faiblesses de Spelunker premier du nom pour transformer l'expérience en une sorte d'improbable rencontre entre Simon's Quest et Pitfall. Si on ne peut qu'être admiratif par la taille et la durée de l'aventure proposée dans une simple cartouche d'1Mb, le fait est que cette longévité finit par se transformer en handicap, plombée à la fois par le manque de variété des interminables grottes du jeu, par sa difficulté « à l'ancienne » (une seule vie, aucun continue, aucun mot de passe) et par une jouabilité qui fait son âge. Un peu trop fastidieux pour son propre bien, le titre se réservera à une catégorie de joueurs assez patients pour trouver en eux la motivation de vaincre les trois (longs) niveaux du jeu d'affilée. Ambitieux, mais imparfait.


CE QUI A MAL VIEILLI :

– Un système de sauvegarde n'aurait clairement pas fait de mal...
– ...surtout avec une seule vie et aucun continue !...
– ...tout comme une carte, d'autant qu'en réaliser une soi-même est assez complexe
– Énormément d'allées-et-venues

Bonus – Ce à quoi peut ressembler Spelunker II sur un écran cathodique :

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